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L'attitude des états de la CEMAC face au conflit de Bakassi et ses effets sur l'institution

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par Sali Aliyou
Université de Dschand - D E A  2008
  

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CHAPITRE I :

 L'EVEIL DES ETATS DE LA CEMAC SUR LES QUESTIONS DE SECURITE DANS LA SOUS REGION

A partir de 2002, les questions relatives à la paix et à la sécurité dans la zone CEMAC feront l'objet d'une grande attention. La question de sécurité va évoluer. Les Etats vont désormais se prononcer sur les problèmes sécuritaires non seulement dans la zone CEMAC mais aussi et surtout sur des questions de paix et de sécurité internationales147(*). L'engagement des Etats de la CEMAC en faveur du maintien de la paix et de la lutte contre l'insécurité se traduit par une prise de conscience sur les problèmes de la sécurité interne des Etats (section 1) et un souci de la sécurité transfrontalière (section 2).

SECTION I : LA PRISE DE CONSCIENCE DE LA SECURITE INTERNE DES ETATS

L'insécurité qui règne dans la zone CEMAC est devenue une préoccupation majeure des Etats membres. Ils sont résolus désormais à prendre des mesures collectives pour pouvoir y faire face. Ils s'investissent pour ramener la paix dans les Etats en situation de crise. Ainsi fut organisée par exemple, en 2003, une conférence extraordinaire des Chefs d'Etat et de délégation pour examiner l'évolution de la situation en République Centrafricaine148(*), puis la conférence extraordinaire des chefs d'Etat de la CEMAC du 1er juin 2004 dont le but était l'examen de la situation qui prévalait dans la sous région149(*). Il s'agissait pour les Etats de la CEMAC d'apporter leur appui et leur contribution à la résolution des crises internes dans certains Etats.

Cette lutte contre l'insécurité dans les Etats passe par l'adoption des politiques communes (paragraphe 1) et dans certains pays par le déploiement de la force multinationale de la CEMAC (paragraphe 2).

Paragraphe I: L'adoption des politiques communes par les Etats de la CEMAC

Les Etats de la CEMAC ont adressé des encouragements150(*), des remerciements151(*) et des félicitations152(*) à certains chefs d'Etat pour leurs efforts inlassables en faveur de la paix, de la sécurité et de la stabilité dans la sous région. A cela s'ajoutent l'examen et la condamnation des actes compromettant la sécurité nationale (A) d'une part, et d'autre part, le soutien aux pays en situation de crise (B).

A- L'examen des situations dans les Etats membres et la condamnation des actes compromettant la sécurité intérieure

La situation qui prévaut dans certains Etats membres de la CEMAC notamment la RCA et le Tchad préoccupe fortement les Etats de la CEMAC. Dans la recherche des solutions, les chefs d'Etats ont jugé nécessaire d'examiner les situations dans les Etats membres de la communauté (1) avant de condamner les actes qui compromettent la sécurité intérieure (2) dans ces Etats.

1- L'examen des situations dans les Etats membres de la CEMAC

L'examen de la situation qui prévalait dans la sous région fut l'objet de la conférence extraordinaire des chefs d'Etat de la CEMAC à Libreville le mardi 1er juin 2004153(*). Lors de cette conférence, les Chefs d'Etat et de gouvernement ont examiné les situations créées par les récentes tentatives de renversement des régimes politiques en Guinée Equatoriale154(*) et au Tchad. Pareillement, ils ont procédé à un examen de la situation qui prévalait dans la sous région. Ici, les chefs d'Etat et les chefs de délégation ont réaffirmé avec détermination leur engagement à poursuivre toutes les actions nécessaires pour garantir la sécurité, la paix et la stabilité en Afrique Centrale. En outre, ils ont exprimé leur préoccupation au regard de la répercussion de la crise du Darfour, en Afrique Centrale plus précisément dans les Républiques du Tchad et de Centrafrique. L'examen de la situation qui prévalait dans la sous région en général et dans certains Etats membres en particulier traduit une prise de conscience de la nécessité de la sécurité par les Etats de la CEMAC qui s'accompagne de la condamnation des actes compromettant la sécurité intérieure des Etats.

2- La condamnation des actes compromettant la sécurité intérieure des

Etats

Les Etats de la CEMAC se fondant sur la solidarité sous régionale ont procédé à la condamnation des actes compromettant la sécurité nationale de certains Etats membres. En 2004, par exemple, lors de la conférence extraordinaire des Chefs d'Etat précitée, les chefs d'Etat et de délégation ont unanimement condamné la tentative d'élimination du chef de l'Etat du Tchad et la déstabilisation des institutions démocratiques dans ce pays.

Cette condamnation sera réitérée en 2008 notamment lors de la 9ème conférence des chefs d'Etat de la CEMAC tenue à Yaoundé du 23 au 25 juin 2008. En effet lors de cette conférence, les Etats participant ont condamné avec fermeté les attaques et les tentatives de déstabilisation du Tchad155(*).

Ces condamnations traduisent un changement d'attitude des Etats de la CEMAC après le conflit de Bakassi. Car pendant le conflit, ces Etats n'avaient pas condamné les actes d'agression du Cameroun par les troupes nigérianes.

Ces condamnations s'accompagnent, dans certains cas, du soutien aux pays en situation de crise.

B- Le soutien aux Etats en situation de crise

La CEMAC a rompu avec sa vieille tradition d'indifférence face aux pays en situation de crise. Désormais, elle leur vient en aide en leur apportant son soutien. Le soutien dont bénéficient les Etats est collectif et individuel.

Sur le plan collectif ou communautaire, la CEMAC a décidé d'apporter son aide au Tchad et à la RCA lesquels depuis quelques années, sont victimes des troubles. Le soutien apporté par la CEMAC était à la fois moral, financier et matériel. Pour permettre au Tchad de faire face au conflit du Darfour au Soudan, la CEMAC a décidé que le Cameroun, le Congo, le Gabon et la Guinée Equatoriale apportent une aide ponctuelle de deux milliards de FCFA. Cette aide est destinée à l'assistance aux populations tchadiennes frontalières du Soudan, pour leur permettre de faire face aux effets de l'afflux massif des réfugiés du Darfour156(*).

De même en 2008, face à la tentative de déstabilisation du Tchad par les mouvements rebelles, le 11 juin, la CEMAC a décidé de l'octroi d'une aide financière et matérielle au Tchad et a exhorté les pays amis et les organisations internationales de lui venir en aide157(*).

En RCA, le soutien apporté à ce pays est plus considérable au regard de la situation déplorable dans laquelle l'Etat était plongé. En 2003, la CEMAC a organisé une conférence extraordinaire des Chefs d'Etat et de délégation158(*) dont l'objet était d'examiner l'évolution de la situation dans cet Etat. Lors de cette conférence, la Guinée Equatoriale a fait l'offre de contribuer financièrement à la restructuration des forces armées centrafricaines.

Sur le plan individuel, certains chefs d'Etat ont décidé de manière unilatérale d'apporter leur soutien à leur homologue dont le pays était en situation de crise. Il en est ainsi du président gabonais et du président congolais lesquels suite à la tentative de coup d'Etat en Guinée Equatoriale en mars 2004, s'y sont rendus pour apporter leur soutien au président Equato-Guinéen. Le président gabonais affirmait « Nous, nous sommes fait inviter pour (...) apporter notre soutien au président Obiang »159(*). Ce soutien est fondé sur la solidarité qui est la base sur laquelle les Etats de la CEMAC ont déployé une force multinationale en RCA.

Paragraphe II : Le déploiement de la force multinationale par les Etats de la CEMAC

Après le retrait des deux forces internationales déployées au moment des troubles politico-militaires déclenchés en 1996, à l'occurrence la MINSAB160(*) et la MINURCA161(*), la CEMAC a déployé sa force multinationale (FOMUC) créée le 02 octobre 2002162(*) pour assurer la paix et la sécurité en Centrafrique. Elle devint opérationnelle le 21 décembre 2002. Déployée en RCA, cette force est composée des Etats de la CEMAC (A) et poursuit des missions précises. (B).

* 147 Les Etats de la CEMAC lors de la conférence extraordinaire des chefs d'Etat de la CEMAC du 1er juin 2004 à Libreville s'étant penchés sur le conflit du Darfour, se sont prononcés en faveur du respect des accords de Marcoussi en Côte d'Ivoire, ont souhaité le transfert de pouvoir aux irakiens, et ont exprimé leur préoccupation face au regain de violence enregistré dans la crise israélo palestinienne.

* 148 V. communiqué final de la conférence extraordinaire des chefs d'Etat et de délégation de la CEMAC du 2 au 3 juin 2003 de Libreville.

* 149 V. communiqué final de la conférence extraordinaire des chefs d'Etat de la CEMAC du 1er juin 2004.

* 150 Encouragements adressés au président Idriss Deby pour qu'il poursuive sa médiation jusqu'au règlement global et définitif du problème du Darfour ; encouragements adressé au président centrafricain pour la poursuite de la mise en oeuvre des recommandations consensuelles issues du dialogue national d'octobre 2003 etc.

* 151 Remerciements au président gabonais pour l'action sans cesse renouvelée qu'il mène en faveur de la paix en RCA.

* 152 A Denis Sassou Nguesso.

* 153 V. communiqué final de la conférence du 1er juin 2004 précitée.

* 154 Les tentatives de coup d'Etat de mars 2004.

* 155 Tentatives de déstabilisation perpétrée par les rebelles en février 2008.

* 156 Communiqué final de la conférence des chefs d'Etat du 1er juin 2004 précitée.

* 157 V. communiqué final de la 9ème conférence des chefs d'Etat du 23 au 25 juin 2008 précitée.

* 158 Du 02 au 03 janvier 2003.

* 159 Propos cité par Ngogang (T) Op. Cit p. 1.

* 160 Mission interafricaine de surveillance des accords de Bangui du 25 janvier 1997.

* 161 Mission des nations unies en République centrafricaine.

* 162 Lors de la conférence des Chefs d'Etats de Libreville.

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"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault