Les usagers de la Drogue et la Justice Pénale au Sénégal( Télécharger le fichier original )par Magna Brice Sylva Université Gaston Berger de Saint louis du Sénégal - Maitrise ès sciences juridiques et politiques, option Droit de l'entreprise 2007 |
PARA II : L'ATTITUDE REPRESSIVE DES JURIDICTIONS SENEGALAISESL'attitude répressive des juridictions Sénégalaises se fonde sur plusieurs éléments. En effet la remarque faite est que la plupart des usagers de drogue inculpés finissent en prison. Cela pourrait s'expliquer de plusieurs manières. Soit de la prise en compte de la personnalité du délinquant par les juges ou même de la prise en compte de la conception sociale défavorable étiquetée à l'égard des toxicomanes. Mais ce qu'il convient de retenir c'est que le simple usage de drogue en soi n'est pas réprimé de la même sorte que le trafic. Mais dans la pratique c'est tout comme, la différence ne réside qu'au niveau de la durée des peines. Il faut noter que si cela est possible c'est d'une certaine manière grâce à l'imprécision des textes. La plus constantes des chefs d'inculpation retenus contre les usagers de la drogue est celle de « détention et usage de drogues » ou même de « détention et trafic de stupéfiants ». Ainsi on voit des actes qui juridiquement s'analysent comme « usage de drogue » si l'on se réfère à l'article 7 de la loi de 1972 être sanctionnés de la même sorte que le délit de trafic de stupéfiants. C'est-à-dire des actes qui devraient être sanctionnés normalement par les peines prévues par l'article 7 et même possible bénéficiaire des mesures de traitement prévues à l'article 8 se voient appliquer les peines prévues à l'article 3. Alors qu'au niveau de l'alinéa 2 de ce dernier article « la peine d'emprisonnement est obligatoire sans qu'il soit possible d'appliquer les dispositions de l'article 704 du Code de Procédure Pénale ». L'imprécision qui est à la base de cet état de fait se situe à la définition ou plus exactement au sens donné au terme « détention ». L'intérêt de l'attention accordée à ce terme réside dans le fait qu'il a permis aux juges Sénégalais d'inculper de simples usagers de drogue sur la base de l'article 2 en leur assurant la prison comme sanction sur la base de l'article 3. Un fait qui participe pour une grande part à l'attitude répressive des juridictions pénales Sénégalaises à l'égard des simples usagers de drogue30(*). La « détention » n'est pas définie ni par les conventions internationales ni par la loi nationale. Prosaïquement, elle s'entend du fait d'avoir par devers soi, soit entre ses mains soit en un endroit sous sa responsabilité, des choses quelconques. Elle peut être précaire, purement matérielle ou coïncider avec une possession précaire. Ainsi entendu, il apparaît évident que le caractère trop extensif de la notion de détention appelle à la nécessité d'en circonscrire les limites en traçant une ligne de démarcation avec les notions voisines auxquelles elle se superposera souvent. Cependant faudra préciser que la nécessité de circonscrire les contours de la notion appartient à chaque juge faisant face à cette situation, mais toutefois il n'y a aucune contrainte qui pèse sur lui donc il est libre selon sa propre conception de donner un sens élargi de la notion comme de donner aussi un sens restrictif de celle-ci. C'est ainsi que sous l'empire de la loi n°63-16 du 5 février 1963, la détention était associée au délit d'usage et après l'abrogation en 1972 de la loi qui justifiait cela, s'est perpétué jusqu'à nos jours, la formule de « détention et usage de stupéfiants » pour en fait, ne désigner que des actes qui s'analysent juridiquement en simple « usage de stupéfiants » au sens de l'article 7 de la loi de 1972. Cette dernière incrimine la détention comme délit spécifique puni des peines plus sévères prévues à l'article 3. Et c'est ce qui permet entre autre aux juridictions pénales Sénégalaises, dans la mise en pratique de la loi, d'opter pour une attitude répressive vis-à-vis du simple usager de drogue. Une répression qui est essentiellement axée sur l'emprisonnement même si celle si révèle des limites considérables et justifie la nécessité d'alléger le traitement. * 30
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