AVANT-PROPOS ET REMERCIEMENTS
La question des mariages interethnique soulève
des problèmes réels de définition de l'appartenance
ethnique des descendants au niveau des groupes ethniques dont sont issus les
parents géniteurs. Mais cette situation conduit les acteurs à
développer un reflexe de mobilité ethnique face à leur
rejet souvent pour des questions de respect d'institution et de
pérennisation des habitudes et coutumes des groupes ethniques. Les
différentes sociétés touchée par le
phénomène de mariage interethnique veulent toujours fonctionner
comme si les échanges matrimoniaux n'avaient pas subit de
transformation. Les phénomènes tels que le modernisme, les
migrations, ont contribués à rendre effective les relations entre
des groupes humains socialement et culturellement différent. En effet,
au nom d'une cohésion nationale les autorités villageoise et
étatique incitent les populations à développer des
habitudes d'interpénétration ethnique. Mais ces mêmes
autorités se tiennent à distance des phénomènes que
créés ce genre de politique. Les sociétés
ivoiriennes sont envahies par les problèmes de définition d'un
statut identitaire ou d'une appartenance sans ambiguïté des
descendants et mêmes de leur parent. Car pour avoir pris pour femme ou
pour homme une personne différente de son groupe ethnique les conjoints
subissent certains désagréments au sein de leur groupe d'origine
et souvent aussi dans le groupe ethnique du conjoint. Toutes ces situations non
exhaustives que nous présentons méritent qu'une étude soit
menée sur la question des mariages interethnique. C'est dans ce contexte
que nous avons entrepris d'engager une étude pour saisir les
phénomènes d'ethnicité sous l'angle des mariages
interethnique. En effet, les mariages interethniques constituent pour nous une
porte d'entrée valable, pour cerner les questions d'ethnicité
dans nos villages. Nous pensons que ces transformations au niveau des
échanges matrimoniaux contribuent à une désorganisation
profonde des habitudes et coutumes des peuples. Les sociologues sont donc
attendu, afin d'apporter des éléments de compréhension de
ce phénomènes. Afin, de proposer des mécanismes de prise
en compte des nouvelles catégories d'acteurs dit métisse afin
d'intégrer au plan macro, méso et micro cette composante sociale
particulière dans les prises de décisions sur les questions des
identités sociales. Ce travail de recherche se veut une contribution
à l'explication de la problématique des questions
d'ethnicité manifeste dans nos sociétés traditionnelles et
modernes sous l'angle des mariages interethniques. Il s'inscrit dans le cadre
de notre formation en sociologie et surtout passage obligé pour
l'obtention d'une maîtrise de recherche en sociologie.
La réalisation de ce mémoire de
maîtrise a été possible grâce au concours de
plusieurs personnes qu'il importe ici de nommer et de remercier. Ainsi nous
tenons à remercier Dr Roch Yao Gnabeli, maitre assistant à l'IES
(Institut Ethno Sociologie) et chef de département du dit institut, pour
ses conseils et orientations. Nous voulons témoigner aussi notre
profonde reconnaissances aux étudiants en thèse de sociologie
surtout à Droh Rusticot, à Bouaki Baya, Gacha Franck, et à
tous les étudiants menant la recherche sur le mariage interethnique et
la production de l'ethnicité dans les autres villages. Car les
différentes rencontres formelles ou informelles nous ont permis de mieux
appréhender les différents concepts structurant notre
thème de recherche.
Nous n'oublions pas nos différents guides sur
notre terrain d'étude à savoir Miessan Edmond chef de
catégorie tchagba et son oncle tonton kouadio, le président des
sages de Yaou en la personne Ekrassi Mathurin et son fils, sans oublier le
collège des notables. Nous tenons à témoigner
spécialement notre gratitude à notre mère, Gnagne Essime
Clémentine, et à tous mes frères et soeurs. Nous
n'oublions pas M. Dayoro doctorant à l'IES, Achi Okou Francis, Amian
Robert pour la correction des fautes de grammaires, tous les membres de la
classe méthodiste Bérée et tout le groupe de jeunes de
l'église methodiste unie John Wesley de la palmeraire. Enfin merci
à Bouberi Benita, à Kakou Yah Joelle, et à Guébo
Hadassa pour leur soutien moral, financier, matériel et pour leurs
prières.
TABLEAU DES SIGLES ET ABREVIATIONS
IRD
|
Institut de recherche et de développement
|
CCF
|
Centre Culturel Français
|
IES
|
Institut d'Ethno-Sociologie
|
INADES
|
Institut Africain pour le Développement Economique et
Social
|
Google
|
Moteur de recherche sur INTERNET
|
Yahoo
|
Moteur de recherche et de messagerie sur INTERNET
|
INTRODUCTION
CONTEXTE DE L'ETUDE
La réflexion actuelle sur les rapports interethnique
dans la structuration de la réalité sociale sous l'angle des
mariages interethniques, nous ouvre une perspective de recherche sur une
question que peut de sociologue ont analysé. En effet les concepts
d'ethnie, d'ethnicité, et de mariage interethnique sont des
réalités sociales en pleine mutation dans nos milieux ruraux.
L'analyse d'un point de vue historique des échanges matrimoniaux
décrit l'évolution des échanges matrimoniaux depuis la
période coloniale jusqu'à nos jours.
Vu la floraison d'articles et d'ouvrages sur les rapports
décrivant plusieurs tendances sur cette même question.
Un tel constat atteste de l'effort scientifique mené
afin de mieux comprendre un phénomène aussi complexe, que les
rapports interethniques.
Aussi, dans le cadre de cette activité conduite
à plusieurs niveaux du système social, force est de constater que
la plupart des travaux présente les relations interethniques, comme
nécessairement conflictuelles.
De plus, ces travaux présentent le foncier comme la
variable principale entraînant les autres variables, dans l'explication
des rapports entre les groupes ethniques en interaction. Alors que d'autres
aspects ou éléments sociaux permettent d'élucider les
différents comportements des groupes ethniques en interaction
perpétuelle, dans la structuration du système social. Il va s'en
dire, que d'autres variables existent et sont valables pour décrire
expliquer et analyser d'autres types de rapports interethniques, non
nécessairement conflictuels.
Dans cette optique des études
précédemment menées dans le cadre du laboratoire d'analyse
des phénomènes interethniques depuis près de trois
années au département de sociologie de l'université de
Cocody sous la direction du docteur Roch Yao Gnabeli, conforte notre position
selon laquelle le foncier n'est pas le seul élément de
régulation des relation interethniques. Comme plusieurs journalistes et
scientifiques semblent le faire croire. La nouvelle thématique qu'aborde
ce laboratoire s'intitule : « mariage interethnique et
production de l'ethnicité ».
Au vu des approches de réflexion qu'elle soulève
nous pouvons dire qu'il existe plusieurs champs sociaux dans
l'appréhension des logiques d'explication des limites aux
frontières ethniques que semblent dessiner les groupes ethniques en
interaction.
Ceci dit, les mariages interethniques constituent pour nous
une porte d'entrée valable pour mener une analyse pertinente sur la
question des relations interethniques.
PREMIERE PARTIE
CADRE THEORIQUE ET METHODOLOGIQUE
I- CADRE THEORIQUE
I-1- PROBLEMATIQUE
L'analyse par les sciences sociales des relations
interethniques ne peut plus aujourd'hui être négligée, ce
qui explique la floraison d'article et d'ouvrage sur la dite question.
Le phénomène de l'ethnicité a
été abordé sous plusieurs angles. Nous pouvons citer
plusieurs écrits sur la question : l'analyse de l'ethnicité
en rapport avec l'intégration des minorités1(*), ensuite l'ethnicité sous
l'angle des conflits foncier2(*), de plus l'ethnicité traité en relations
avec la citoyenneté3(*) , et l'ethnicité en rapport avec le
multipartisme4(*), enfin
l'ethnicité sous l'angle des frontières entre les groupes
ethniques5(*). Il est
important de notifier que cette liste n'est pas exhaustive.
Ces différents écris attestent que le
phénomène de l'ethnicité structure à plusieurs
niveaux les rapports entre les groupes en interaction.
Cependant, il est donné de constater que
l'ethnicité n'a pas suffisamment été abordée sous
l'angle des mariages interethniques en Cote d'Ivoire. Les écrits sur la
question de l'ethnicité en rapport avec les mariages interethniques sont
presque inexistants. Alors que l'un des modes de désignation le plus
récurrent des groupes et des individus, dans le quotidien est l'ethnie.
Dans cette perspective les mariages intra ethnique permettent sans
difficulté de définir l'appartenance ethnique des descendants de
ce type de mariage. Il ressort de ce qui précède que les
mariages intra ethnique constituent une continuation dans le processus
d'assignation des appartenances ethniques. Contrairement au mariage intra
ethnique, le mariage interethnique fait naître une discontinuité
au niveau du mode de désignation déjà répandu dans
la société. En effet, dans un mariage interethnique les deux
membres du couple ne partagent pas les mêmes codes culturels. Partant de
là, nous voulons comprendre dans le cadre des mariages interethniques
comment se fabrique l'appartenance ethnique des descendants de mariages
interethnique ? Et également de quel groupe ethnique se
réclamerons les descendants de ce type de mariage ?
Au regard de l'enjeu que révèle le mariage
interethnique dans le mode de fabrication de l'ethnicité, nous avons
réalisé une enquête exploratoire à Yaou. Cette
enquête révèle une différenciation au niveau des
descendants de mariage interethnique. Cette enquête nous a permis de
saisir les manifestations concrètes des mariages interethniques dans le
processus de fabrication de l'ethnicité.
Elle a permis également d'observer la
société Abouré de Yaou sous l'angle des mariages
interethnique.
En effet, une structuration ethnique se dégage de
l'espace social. Chaque ethnie ou groupe ethnique en présence sur notre
champ d'étude, exerce une activité précise dans
l'organisation sociale et dans la production. De plus les autochtones
(Abouré) ont matérialisé l'hiérarchisation ethnique
du village, par des limites que les allogènes Ivoiriens et non
Ivoiriens ne peuvent franchir. Ces limites se situent au niveau politique,
économique et au niveau foncier, pour ne citer que ceux là. La
composition de la communauté allogène et allochtone est la
suivante à Yaou : Burkinabé, Attié, Malien,
Ghanéen, Baoulé et Bété.
A propos des raisons de leur présence à Yaou,
ils la justifient par une quête de conditions climatiques et
végétales propice à l'activité agricole, la
recherche de bien être économique et sociale et la fuite des
travaux forcés pendant la période coloniale.
Ces différents éléments cités plus
haut ajoutés à l'existence des mariages interethniques,
contribuent à la sédentarisation de la communauté
allogène dans le village de Yaou.
La sédentarisation contribue également à
la naissance d'une nouvelle configuration ethnique et spatiale de Yaou
antérieurement homogène. Ce constat conduit à
l'hétérogénéité ethnique et spatiale du
village de Yaou.
Dans le cas de Yaou, l'enquête exploratoire a permis
d'identifier une composition de stratégies, que les acteurs sociaux
allochtones déploient dans leur interaction avec les autochtones, pour
contourner les restrictions érigées à leur encontre, afin
d'accéder à un certain nombre de ressources, de privilèges
qui structurent le mode de vie social à Yaou. Aussi constatons-nous un
ensemble de mesures restrictives mise en place par l'organisation politique et
sociale des Abourés de Yaou, à l'encontre des enfants issus des
mariages interethniques entre un Abouré et les autres groupes ethniques.
Les rôles des enfants, leur statut social et identitaire, leurs
privilèges sociaux sont diversement appréciés en fonction
de la spécificité du champ où se produit l'interaction. Au
plan politique, les enfants issus des mariages interethniques sont soumis
à des barrières sociales qui les empêchent d'accéder
à certaines hiérarchies politiques du village et à
certaines ressources, car ils sont qualifiés par un discours social les
taxant de ne pas être « Abourés pur6(*) ».
Aussi constatons-nous, sur le champ des héritages, la
production de différence sous les clichés suivant
« Abouré pur » et
« Abouré ». Ces clichés structurent les
rapports entre les acteurs dans une logique conflictuelle au niveau de
l'accession à l'héritage des enfants issus des mariages
interethniques. Car ils sont souvent disqualifiés, alors que sur
d'autres champs tels que le champ culturel et sur le champ de la modernisation
du village, ces mêmes acteurs précédemment
identifiés comme n'étant pas « Abouré
pur » sont intégrés.
En plus, il a été constaté qu'aucune
restriction n'était admise pour disqualifier les acteurs sociaux issus
du mariage interethnique, pour leur participation à la fête de
génération.
De même, aucune distinction n'est faite au niveau du
lieu de sépulture entre les acteurs issus des mariages interethniques et
ceux issus des mariages intra ethniques.
Aussi observons-nous, que dans le cadre des associations de
développement, il n'y a pas de discrimination entre les acteurs sociaux
issus du mariage interethnique et les autres catégories d'acteurs. De
plus, ils peuvent sur ce champ précis prétendre aux
différents niveaux de responsabilité dans les associations de
développement du village.
Tous ces constats nous amène à soulever les
interrogations suivantes:
Quels sont les mécanismes sociaux de
différenciation des acteurs issus de mariage entre un Abouré ou
une Abouré et les autres groupes ethniques présents à
Yaou ?
Les idéologies et les institutions étant des
modalités sociales fondamentales dans la fabrication des rapports
sociaux. L'étude des idéologies et des instituions permet de
situer les individus et les groupes dans le champ social, et
l'élaboration d'une identité sociale et personnelle compatible
avec des systèmes de valeurs socialement et historiquement
déterminés.
Dans le contexte socio politique actuel l'ethnie
apparaît comme une variable à enjeu important dans la fabrication
de l'ethnicité. Car l'appartenance ethnique constitue dans certains cas
un moyen de capter des ressources villageoises et un moyen de revendiquer dans
des cas le statut d'autochtone .Ces raisons nous conduisent à nous
demander : quels enjeux cachent l'appartenance à l'ethnie
Abouré de Yaou ?
I-2- REVUE DE LA LITTERATURE
La littérature sur le mariage interethnique et la
production de l'ethnicité n'est pas assez fournie en ce qui concerne les
ouvrages édités. Toutefois, nous avons pu consulter
différents documents se rapportant à notre thème de
recherche et eu recours à des sites Internet pour la documentation en
ligne. Au terme de nos lectures, nous avons répartis les documents
consultés de façon suivante. La première partie traite de
la question de l'ethnie, la seconde partie s'attarde sur la question de
l'ethnicité et la troisième partie est structurée par les
travaux abordant la question des frontières ethniques. Enfin la
dernière partie renferme les écrits sur le mariage en
général et en particulier sur le mariage interethnique.
- La question de l'ethnie
La consultation des écrits relatifs au concept
d'ethnie, permet de constater deux tendances au niveau théorique dans la
définition et dans l'appréhension du phénomène
ethnique. L'une, saisissant l'ethnie d'un point de vue primordialiste et
essentialiste. Comme tête liste de cette tendance, nous avons (Shils,
1957)7(*), (Kallen,
pluralisme culturel, 1915)8(*), (Geertz, 1963)9(*). Tous ces auteurs ont en un commun
d'appréhender le phénomène ethnie suivant deux
qualités, dont la qualité primaire et la qualité
fondamentale.
Le discours sur la qualité primaire s'illustre
aisément dans l'ouvrage, (Philippe Poutignat, Jocelyne Streiff-Fenat,
1995 : 98)10(*)
« puisque l'individu naît (ou acquiert dès la naissance)
les éléments constitutifs de son identité ethnique :
les caractéristiques physiques, le nom, l'affiliation tribale ou
religieuse, tous ses éléments qui le relient à des
ancêtres putatifs dont l'héritage se transmet de
génération en génération ».
Quant au discours sur la qualité fondamentale, il se
perçoit dans cet extrait « pour les primordialistes,
l'appartenance au groupe ethnique ne représente pas en foyer possible
parmi d'autres formes d'identification, mais l'identité de groupe,
« base » pour tous les individus, celle à travers
laquelle se transmettent les émotions les instincts, les souvenirs d'une
façon que l'individu ne peut choisir et qui au-delà de la
conscience » (Nourak, 1972)11(*) ; (Nicolas, 1973 : 96)12(*).
En somme l'ethnie sert donc à distinguer les groupes
humains les uns des autres, comme s'ils avaient une différence
essentielle et irréfutable de par leur naissance.
L'autre tendance, cerne le concept d'ethnie d'un point de vue
historique et symbolique donc sous un angle dynamique. Comme précurseur
de ce pôle de réflexion, nous avons Vacher De La Pouche13(*), qui présente l'ethnie
en ces termes :
«Ce sont des groupes sociaux qu'il définit comme
à la fois `'naturels et factices'' », (Philippes Poutignat,
Jocelyne Streiff-Fenart, 1995 : 35) procède à une
réfutation minutieuse des critères objectifs de l'appartenance
nationale, au profit des critères subjectifs (le désir, la
volonté, le consentement). En somme pour Renau14(*), l'ethnie est une forme
d'appartenance symbolique. Hechter (1976)15(*) renchérit « le groupe ethnique est
clairement pour Weber, une construction sociale, dont l'existence est toujours
problématique », (Philippe Poutignat, Jocelyne Streiff-Fenart,
1995 : 41).
Une deuxième tendance est construite sur les limites de
la première.
Aujourd'hui, d'un point de vue épistémologique,
et pragmatique, le concept d'ethnie doit être débarrassé de
son contenu naturel, pour se référer qu'aux relations et à
la dimension symbolique. La plupart des ouvrages disponibles sur la question,
mettent plus en exergue le caractère ou le trait naturel du concept
d'ethnie. Alors que l'analyse de la réalité sociale montre que
l'ethnie ou les ethnies ne sont pas des réalités statiques. Cette
même analyse de la réalité ethnique atteste de
l'apparition de nouvelles ethnies et de la disparition de celles existantes.
De nos différentes lectures, nous pouvons retenir que
les définitions, qui excluent les variables historiques et symboliques
ne sont pas à même d'expliquer la réalité ethnique
à présent.
En somme nous pouvons affirmer que l'ethnie se définit
comme un ensemble d'individu ou un groupe qui appartient historiquement et
symboliquement à la même culture.
La question de l'ethnicité
La littérature sur l'ethnicité ne doit pas faire
illusion, dans la majorité des cas, le terme d'ethnicité est
davantage utilisé comme une catégorie descriptive permettant de
traiter un problème d'une autre nature (l'intégration,
l'immigration, les rapports interethniques) que comme un concept sociologiques.
Les catégories de l'altérité qui nous occupe plus
particulièrement ici sont celles qui visent à distinguer l'autre
sur les critères qui se basent sur une « origine
supposée commune ».
A l'instar de Philippe Poutignat, nous pensons
réintroduire la question de l'ethnicité, non pas sous sa forme
stéréotypée, mais relativement aux interrogations et aux
débats d'un point de vue purement relationnel qui lui sont liés.
Et ce afin de donner un élan nouveau à la sociologie des
relations interethnique dans les pays africains.
Ceci dit Poutignat définit l'ethnicité comme
« une forme d'organisation sociale basée sur une attribution
catégorielle qui classe les personnes en fonction de leur origine
supposée et qui se trouve validée dans l'interaction sociale par
la mise en oeuvre de signes culturels socialement
différenciateur » (Poutignat et Al, 1995 : 155). Le
passage en revue des oeuvres sur la question, nous a permis d'identifier de
multiples approches théoriques de l'ethnicité. Nous avons la
conception qui considère l'ethnicité comme primordiale, qui est
considérée comme dépassé par la plupart des acteurs
(Poutignat et Al, 1995) mais elle reste le point de départ de toute
réélaboration théorique de la notion. Cette approche, en
particulier celle qui a été développée par Shils et
Kallen dans leur essai sur le pluralisme culturel, postule « une
spécificité des attachements ethniques basée sur le
caractère ineffable, irrationnelle et profondément ressenti des
sentiments qu'ils inspirent » (Poutignat et Al ; 1995 :
96).
Dans cette perspective, l'homme est guidé par
« son implication dans des liens personnels dotés de
qualités primordiales ».
Ces attachements primordiaux sont ceux qui lient par une
relation à laquelle il accorde une qualité spéciale qui
tient à la nature du lien indépendamment « de relations
effectives », (1995 : 96). Ces liens sont dotés d'une
signification égale à celle attribuée aux liens de
parenté et se caractérisent par la solidarité qu'ils
suscitent, par leur force coercitives et par les émotions et le
sentiment du sacré qui leurs sont associés. Ici l'identité
est une qualité essentielle qui est transmise dans et par le groupe,
indépendamment des relations avec l'out-group.
- Après cette approche, nous avons celle dite
sociobiologique. Elle peut être considérée comme une
nouvelle variante des théories primordialistes classiques. Pierre Van
Den Berghe16(*), son
principal représentant a, avec la publication de The ethnic phenomenon
(1981), suscité dans le milieu académique un embarras certain.
(Poutignat et Al, 1995). Sa thèse principale postule que les humains
sont programmés comme les autres animaux pour maximiser leur chance de
succès dans la reproduction. Dans cette méthode
l'ethnicité apparaît comme une méthode de sélection
des « apparentés » par laquelle les individus
maximisent leur propre aptitude à se reproduire. Dans le prolongement,
de l'énumération des théories de l'ethnicité, nous
avons mentionné les théories mobilisationistes et
instrumentalistes; au sein de cette approche, on trouve la théorie du
groupe d'intérêt, les théories du choix rationnels et la
théorie du colonialisme interne. Toutes considèrent
l'ethnicité comme ressource mobilisable dans la conquête du
pouvoir politique et des biens économiques.
Glazer et Mognihan17(*) « la contribution de l'ethnicité
à cette mobilisation de groupe est de fournir un idiome qui favorise la
solidarité de groupe et qui, d'une certaine manière dissimule les
intérêts spécifiques communs pour lesquels la bataille est
menée ». (Poutignat, 1995 : 105).
Nous avons également, les théories
néo-marxistes. Le centre d'intérêt de ces rapports est le
rapport entre l'ethnicité et la classe au sein d'une théorie
d'exploitation capitaliste du travail. Les divisions ethniques et raciales sont
appréhendées à partir des fonctions qu'elles remplissent
dans le système capitaliste. L'ethnicité constitue une forme
d'application sociale en compétition avec la classe « dont la
fonction idéologique est de masquer les intérêts de classes
convergentes entre les groupes ethniquement dominés et la fraction
exploitée du groupe ethniquement dominant » (Poutignat
1995 : 119).
De plus nous avons, les approches néo-culturalistes,
ces approches saisissent l'ethnicité comme un système culturel
permettant aux individus de situer leur place dans un ordre social plus large.
La dimension culturelle est vue comme le processus par lequel les gens,
à travers les différences culturelles se communiquent des
idées sur ce qui distingue les hommes et tentent de résoudre les
problèmes de signification. (Poutignat et Al 1995 : 121).
Et enfin, l'ethnicité comme forme d'interaction
sociale, cette approche met l'accent sur le fait que l'ethnicité est
« un processus continu de dichotomisation entre membres et outsiders,
demandant à être exprimé et validée dans
l'interaction sociale » (Poutignat et Al 1995 : 123).
Cette approche englobe trois sous approches :
v Celle développée par Fredérik
Barth18(*) met l'accent
sur les aspects génératifs et processuels des groupes ethniques.
Ces derniers ne sont pas considérés comme des groupes concrets
mais comme des « types d'organisations basés sur l'assignation
et l'auto attribution des individus à des catégories
ethniques » (Poutignat 1995 : 123)19(*). Ici l'accent est mis sur
l'analyse des processus d'attribution catégorielle et d'interaction.
v Quant à l'approche interactionnelle, elle comprend
l'approche cognitiviste pour cette tendance, « l'ethnicité,
les symboles et les labels ethniques sont des référents cognitifs
manipulés dans des buts pragmatiques de compréhension de sens
commun et mobilisés par les acteurs pour leurs comportements »
(Poutignat et Al 1995 : 187).
v Et enfin la sous approche situationnelle,
développée par Lyman et Douglas (1972), l'ethnicité
comprise comme élément de définition de situation
manipulée par les acteurs. Elle se présente comme un moyen de
construction, de manipulation et de modification de la réalité et
est un élément des négociations explicites ou implicites
de l'ethnicité. (Poutignat et Al 1995 : 129).
Dans la littérature disponible sur l'ethnicité,
ce phénomène est mis en rapport avec plusieurs aspects de la
réalité sociale.
- L'ethnicité traitée en rapport avec
l'identité sociale.
- L'ethnicité analysée en rapport avec la
féminité (recherche féministe Vol 5 N°1 1992).
- L'ethnicité traité en rapport avec la religion
et l'intégration (rapport religion /ethnicité et
intégration d'une église africaine indépendante en
France)
- L'ethnicité analysée sous l'angle de
l'intégration des minorités (mémoire de maîtrise
Université de Genève, Vincent Bracke sous la direction de Claudio
Bobzman)
- L'ethnicité traitée sous l'angle des
identités collectives.
Au terme de cette exploration, sur la littérature
ayant trait à la question de l'ethnicité, il nous parait
important de préciser quels éléments permettent d'apporter
un éclairage pertinent pour notre étude. On peut
considérer le caractère relationnel plutôt que
essentiel de l'ethnicité. Cela signifie que le `'nous'' se construit en
fonction et souvent en opposition d'un autre. C'est un aspect fondamental pour
les théories interactionnistes mais aussi dans les approches
mobilisationnistes qui étudient la compétition. On peut en
conclure que les différences culturelles ne sont pas à l'origine
de la formation des groupes ethniques mais que c'est la communication
culturelle qui permet de tracer les frontières entre les groupes
compréhensibles pour les insiders et les outsiders.
Une deuxième caractéristique tient au
caractère dynamique plutôt que statique de l'ethnicité, qui
ne se définit pas comme une propriété inhérente
à un individu ou à un groupe. C'est plutôt une forme
d'organisation, un principe de division du monde qui peut changer selon les
lieux et les temps.
Le troisième élément qu'il faut retenir
est que l'identité ethnique ne peut se définir par
elle-même, elle est toujours un produit des actes d'autres groupes.
« Elle se construit dans la relation entre catégorisation par
les non membres et l'identification à un groupe ethnique »
(Poutignat et Al 1995 : 155). Elle est donc liée à une
définition sociale, à une interaction. Il faut donc être
attentif aux deux processus à l'oeuvre, c'est-à-dire
l'attribution et l'identification, même si les deux sont difficilement
séparables dans une perspective analytique parce qu'ils sont dans une
relation d'opposition dialectique.
Enfin la dernière caractéristique est la marge
de liberté des groupes ou individus dans l'établissement des
critères de définition d'eux même et des autres. La marge
de liberté dépend des situations et des rapports entre groupes.
Dans des situations de domination l'imposition d'une catégorie par le
groupe dominant a comme nous l'avons déjà souligné, un
pouvoir performatif.
La question des frontières
ethniques
Dans le territoire du politique20(*), «la
représentation de l'espace est celle d'un plan continu, d'un support,
divisé par les frontières du maillage politico-administratif.
Tout individu est très précisément situé dans
l'espace. Il appartient à une entité et pas à une autre,
repéré dans un espace clos, un polygone fermé par des
frontières. Il est dedans ou dehors et presque malgré lui,
inscrit dans une clarification binaire du monde. L'appartenance au territoire
relève de la représentation, de l'identité culturelle et
non plus de la position dans un polygone. Elle suppose des réseaux
multiples, elle se réfère à des géosymboles plus
qu'à des frontières, elle s'inscrit dans des lieux et des
cheminements qui débordent les blocs d'espace homogène et continu
de "l'idéologie géographique" (Sauter, 1985). Ces formes
réticulées de l'espace seront peut-être la structuration
dominante de l'espace de demain.» [...]
«Il s'ensuit que l'affrontement entre la logique de
l'Etat-nation et celle de l'identité culturelle ne se réduit pas
à un problème d'échelle différente ou de domination
entre des parties de force inégale [...]. Plus profondément, il
s'agit d'une contradiction entre des systèmes de valeur reflétant
chacun des éthiques différentes du territoire.»
Dans la perspective culturelle, «le territoire est
perçu comme un "espace culturel", un géosymbole garant de la
vitalité des différences légitimes et par là,
porteur de l'harmonie pluriculturelle de l'univers. [...] Le territoire est
considéré comme le lieu-fondateur des identités locales et
le ressort secret de leur survie.» (p. 9)
«Au-delà de la fonction qu'il assume, le
territoire est d'abord une valeur. [...] La puissance du lien territorial
révèle que l'espace est investi de valeurs non seulement
matérielles mais aussi éthiques, spirituelles, symboliques et
affectives. C'est ainsi que le territoire culturel précède le
territoire politique et à plus forte raison qu'il précède
le l'espace économique.» (p. 10)
«La territorialité humaine se définit
beaucoup plus par la relation culturelle qu'un groupe ou une ethnie entretient
avec [...] le maillage des lieux et le système d'itinéraires qui
quadrillent son espace, que par la référence aux concepts
biologiques fermés d'appropriation et de frontières. Le
territoire dans cette perspective est véritablement un espace symbolique
ou, si l'on préfère, un géosymbole, c'est-à-dire le
support d'une écriture chargée de sens.»
La question du mariage interethnique
La question du mariage en général et en
particulier celui du mariage interethnique, intéresse à plusieurs
titres les différentes disciplines des sciences sociales. Dans le cadre
de cette réflexion sociologique que nous menons et au vue de la
littérature sur la question du mariage, il nous parait judicieux de
présenter les différentes idées des auteurs selon la
configuration suivante : nous présenterons l'historique du
phénomène mariage et ses différentes formes, les objectifs
ou ceux à quoi sert le mariage selon les sociétés qu'elles
soient occidentales et non occidentales.
Claude Lewis Strauss, dans les structures
élémentaires de la parenté met en exergue la
théorie de l'alliance élaborée à partir de
l'étude ethnographique des sociétés
extra-européennes où se manifestaient des relations
étroites entre consanguinité et affinité : cette
théorie a comme fondement la prohibition de l'inceste : principe
selon lequel, au sein d'une société donnée un parent ou
une catégorie de parent est pour un individu interdit au mariage.
« La prohibition de l'usage sexuel de la fille ou de la soeur
contraint à la donner en mariage à un autre homme, et en
même temps, elle crée un droit sur la fille ou sur la soeur de cet
autre homme. Ainsi, toutes les stipulations négatives de la prohibition
ont-elles une contrepartie positive. La défense équivaut à
une obligation : et la renonciation ouvre la voie à une
revendication.» (Claude Lewis Strauss, 1967 : 60)21(*). Selon la théorie, de
l'alliance il existe deux formes différentes de structures
d'échange de femmes :
· Soit les femmes de mon groupe sont données
à un groupe explicitement défini par les institutions. On parle
ici de structures élémentaires
· Soit la collectivité des conjoints possibles
pour les femmes de mon groupe est indéterminée et toujours
ouverte, à l'exclusion cependant de certains proches, comme c'est le cas
dans la société occidentale. On parle ainsi de structures
complexes.
A l'analyse du livre (d'Alfred Schwartz, 1971)22(*), les formes de mariage
décrites par Claude Lewis Strauss cohabitent souvent dans les pays
occidentaux et non occidentaux. Il n'existe donc pas une forme
particulière de mariage pour une société donnée
(d'Alfred Schwartz, 1971, p223). Dans cette partie il distingue les
différentes formes de mariage en pays Guéré :
« l'organisation matrimoniale Guéré distinguent cinq
formes de mariage : le mariage ba-tê-ino ou `'achat par le
père'' ; le mariage ple-ino ou `'rapt similé'' ; le
mariage dju-we-siga ou `'échange directe'' ; le mariage
o-dja-ino-io-tê, littéralement `'il (ou elle) m'apporte la femme
pour que je l'achète'' et enfin le mariage tewa-ino ou
`'l'héritage de la veuve'' ; mariage djugà-niino,
littéralement `'femme du neveu utérin'' et enfin le mariage
no-we-na-no `'homme qui suit un autre homme ».
Les cinq premières formes de mariages sont
qualifiés par l'auteur `'de mariages classiques'' et les deux derniers
de mariages d'exception''. Quant à (Maryse Duponchel, 1971)23(*), elle décèle
dans son ouvrage deux types de mariages interethniques : les mariages
entre deux ethnies d'aire culturel différent ; et les mariages
entre ethnie d'un même aire culturel.
Concernant (Snjezana Mrdjen)24(*), il décrit le mariage inter-ethnique sous une
autre forme. Il la présente comme une union entre deux personnes (homme
et femme) de différentes nationalités. « Les mariages
interethniques sont un excellent révélateur du niveau
d'intégration et d'homogénéisation socio-culturelle des
populations qui cohabitent depuis plusieurs siècles ou entre autochtones
et immigrés ». (Snjezana Mrdjen, 2000, Vol I).
A ce stade de nos propos, force est de constater le
caractère dynamique du phénomène mariage. Car après
les travaux remarquables de Claude Lewis Strauss qui liait les
différentes formes de mariages selon les sociétés,
c'est-à-dire société extra-européenne et
société Européenne. Car d'une société
à une autre on retrouve souvent les mêmes formes de mariage, mais
avec une légère différence locale. Maryse Duponchel
révèle que le brassage culturel en milieu urbain est l'une des
raisons du dynamisme du mariage.
(Maryse Duponchel, 1971) « Dans une ville d'Afrique
la grande diversité ethnique entraîne un brassage culturel intense
qui réduit les différences et les oppositions traditionnelles.
Une appréciation de ce brassage, propre aux centres urbains, peut se
faire à partir de la fréquence des mariages inter-ethniques qui
sont une manifestation de cette intégration ».
Au niveau du but ou des objectifs du mariage Binet Jacques,
(1961)25(*) résume
son ouvrage intitulé Mariage en Afrique noire en ces termes
« il semble se dégager deux caractères communs aux
mariages africain : son but essentielle est la procréation des
enfants, et il diffère donc du mariage européen où la vie
du couple joue un rôle primordiale ; et la fréquence de
l'union libre en découle directement. Les deux morales et les deux
civilisations qui se heurtent en Afrique ont leur part dans cette
désagrégation ».
A ce titre les travaux de (Norbert Robitaille et Erick
Guimond, 2003, Vol.32, p295-314)26(*) attestent que la procréation comme but du
mariage n'est pas particulière à l'Afrique. Car pour faire face
au renouvellement des autochtones du Canada, le mariage sous sa forme
exogamique a pour objectif la procréation afin d'accroître et de
renouveler les autochtones du Canada.
« L'exogamie profite de plus en plus à la
fécondité de tous groupes d'identités autochtone
étant donné la diminution de la sur-fécondité des
couples endogames ». (Norbert Robitaille et Erick Guimond, 2003,
p304).
Si les sociologues et anthropologues expliquent le mariage
sous sa forme interethnique par le brassage culturel, par l'immigration et
l'émigration, il est important de modifier comme le dit (Binet Jaquet,
1961) dans le résumé de son ouvrage. La cohabitation des valeurs
européennes et non-européennes a une part déterminante
dans la désagrégation du mariage en Afrique noire. Cette
désagrégation atteste de l'actualité de la
réflexion que nous menons sur la place et le niveau d'intégration
ou d'exclusion des acteurs issus des mariages interethniques dans nos
sociétés. En effet, de nombreux écrits ont certes
analysés le phénomène de l'ethnicité ou de
l'ethnicisation27(*) en
rapport avec certaines réalités sociales tel que la
citoyenneté, l'identité sociale, l'intégration sociale.
Mais le mariage interethnique n'a pas été analysé comme un
élément social et idéologique permettant la
catégorisation, l'intégration ou l'exclusion des acteurs issus de
ce type de mariage. Au regard de cette analyse critique de la
littérature, le mariage interethnique apparaît comme une
contradiction dans le mode de désignation des acteurs sociaux. C'est
à cette contradiction que notre étude veut apporter un
démenti, en analysant le mariage interethnique comme un mode de
désignation de l'altérité.
I-3- OBJECTIF DE L'ETUDE
I-3-1- Objectif général
Notre objectif vise à analyser les mécanismes
sociaux de différenciation et d'intégration des acteurs sociaux
issus de mariages interethniques.
I-3-2- Objectifs spécifiques
Cette activité de recherche vise également les
objectifs suivants :
- Identifier les mécanismes idéologiques et
institutionnels d'appartenance au groupe ethnique Abouré de Yaou.
- Identifier et analyser les rapports entre acteurs issus de
mariages entre un Abouré et les autres groupes ethniques à
Yaou.
- Déterminer les enjeux d'appartenance au groupe
ethnique Abouré de Yaou.
I-4- MODELE D'ANALYSE
Par définition le model d'analyse est le lieu
d'opérationnalisation des concepts clés de la recherche. Cette
logique de recherche permet de faire la jonction entre la théorie et la
pratique. Il s'agira dans cette rubrique de présenter notre
hypothèse de recherche et de définir le concept clé de
notre etude
I-4-1- Hypothèse de recherche
L'hypothèse est une présomption non gratuite
portant sur le comportement des objets réels étudiés. Elle
procure à la recherche un fil conducteur particulièrement
efficace qui, à partir du moment ou elle est formulée remplace la
question de recherche dans cette fonction, même si celle-ci doit rester
présente à l'esprit. Il s'agit dans cette logique de la recherche
de donner à titre provisoire la réponse à notre question
de recherche. Dans un souci d'une structuration cohérente rappelons la
question centrale que soulève notre étude avant de
dévoiler l'hypothèse de recherche. Celle-ci se présente
sous cette forme :
Comment les mécanismes idéologiques et
institutionnels de différenciation entre les descendants de mariage
interethnique fabriquent l'appartenance ethnique au groupe Abouré de
Yaou. Notre réponse provisoire à cette question est la
suivante : l'intégration et la différenciation
des acteurs issus de mariage interethnique dont l'un des conjoints est
Abouré de Yaou est lié à la représentation sociale
de l'autochtonie.
I-4-2 Plan de vérification de
l'hypothèse
Dans cette partie, il s'agira de définir le concept de
représentation sociale. Mais avant compte tenu de la complexité
du concept, il sera question d'élucider les concepts de
représentations et d'autochtonie.
I-4-3 Représentation sociale
Représenter vient du latin repraesentare, rendre
présent. Le dictionnaire Larousse précise qu'en philosophie, " la
représentation est ce par quoi un objet est présent à
l'esprit " et qu'en psychologie, " c'est une perception, une image mentale dont
le contenu se rapporte à un objet, à une situation, à une
scène (etc.) du monde dans lequel vit le sujet.
La représentation est " l'action de rendre sensible
quelque chose au moyen d'une figure, d'un symbole, d'un signe.
Ces différentes définitions contiennent des mots
clés qui permettent d'approcher la notion de représentation :
sujet et objet, image, figure, symbole, signe, perception et action.
- Le sujet peut être un individu ou un groupe social.
- L'objet peut être aussi bien une personne, une chose,
un événement matériel, psychique ou social, un
phénomène naturel, une idée, une théorie, etc. ; il
peut être aussi bien réel qu'imaginaire ou mythique, mais il est
toujours requis.
- Le mot perception suggère le fait de se saisir d'un
objet par les sens (visuel, auditif, tactile ...) ou par l'esprit
(opération mentale).
- Le terme action renvoie à l'appropriation de l'objet
perçu par le sujet.
- Image, figure, symbole, signe : ce sont des
représentations de l'objet perçu et interprété.
D'après Jodelet, la représentation " est une
forme de connaissance socialement élaborée et partagée
ayant une visée pratique et concourant à la construction d'une
réalité commune à un ensemble social.
Placées à la frontière du psychologique
et du social, les représentations sociales permettent aux personnes et
aux groupes de maîtriser leur environnement et d'agir sur celui-ci.
Jean-Claude Abric définit la représentation " comme une vision
fonctionnelle du monde, qui permet à l'individu ou au groupe de donner
un sens à ses conduites, et de comprendre la réalité,
à travers son propre système de références, donc de
s'y adapter, de s'y définir une place.
Afin de mieux saisir ce concept des représentations
sociales, nous allons préciser leurs caractéristiques et leurs
fonctions.
Le concept de représentation sociale est si riche et si
complexe qu'il n'est pas toujours évident de le définir. Pour
arriver à cerner cette notion, il est nécessaire d'ordonner et de
schématiser son contenu. Nous discernerons d'une part les
caractères fondamentaux d'une représentation sociale et d'autre
part ses fonctions principales.
Les cinq caractères fondamentaux d'une
représentation sociale (d'après Jodelet)
· Elle est toujours représentation d'un objet
:
Il n'existe pas de représentation sans objet. Sa nature
peut être très variée mais il est toujours essentiel. Sans
objet, il n'existe pas de représentation sociale. L'objet peut
être de nature abstraite, comme la folie ou les médias, ou se
référer à une catégorie de personnes (les
enseignants ou les journalistes par exemple).
L'objet est en rapport avec le sujet : la
représentation " est le processus par lequel s'établit leur
relation. Le sujet et l'objet sont en en interaction et s'influencent l'un
l'autre. Dans la préface du livre de Claudine Herzlich, Santé et
maladie, Moscovici écrit : " il n'y a pas de coupure entre l'univers
extérieur et l'univers intérieur de l'individu (ou du groupe). Le
sujet et l'objet ne sont pas foncièrement distincts ... se
représenter quelque chose, c'est se donner ensemble,
indifférenciés le stimulus et la réponse. Celle-ci n'est
pas une réaction à celui-là, mais, jusqu'à un
certain point, son origine.
Dans l'étude des représentations, on
s'intéressera donc au phénomène d'interaction entre un
sujet et un objet. Herzlich définit son étude par le fait de
tenter " de comprendre les attitudes et le comportement qu'elles (les
représentations sociales) engendrent, le savoir qui circule à
leur propos, dans la relation même qui se crée entre l'individu,
la santé et la maladie.
· Elle a un caractère imageant et la
propriété de rendre interchangeable le sensible et l'idée,
le percept et le concept :
Le terme image ne signifie pas la simple reproduction de la
réalité mais renvoie à l'imaginaire social et individuel.
C'est la face figurative de la représentation : les scientifiques, par
exemple, évoquent une ''soupe primitive'', composée de
molécules diverses qui sont à l'origine de la vie sur la terre.
De par son caractère imageant, la représentation sociale aide
à la compréhension de notions abstraites. Elle relie les choses
aux mots, elle matérialise les concepts. Jodelet cite l'exemple de la
notion de poids, décrite par R. Roqueplo (1974) : " le sens commun
utilise la notion de poids dont il y a une évidence sensible pour
interpréter la notion de masse, concept abstrait défini
scientifiquement depuis trois siècles et qui fait partie de notre bagage
scolaire et de notre culture.
· Elle a un caractère symbolique et signifiant
:
La représentation sociale a deux faces, l'une
figurative, l'autre symbolique. Dans la figure, le sujet symbolise l'objet
qu'il interprète en lui donnant un sens. Pour Rouquette28(*) et Rateau, c'est le sens qui
est la qualité la plus évidente des représentations
sociales.
· Elle a un caractère constructif :
La représentation construit la réalité
sociale. Pour Abric, " toute réalité est
représentée, c'est-à-dire appropriée par l'individu
ou le groupe, reconstruite dans son système cognitif,
intégrée dans son système de valeurs dépendant de
son histoire et du contexte social et idéologique qui l'environne.
L'étude des représentations permet de mettre en
évidence que la pensée sociale élabore la
réalité selon différents modèles. Pour reprendre le
domaine de la maladie, François Laplantine estime qu'elle peut
être considérée d'après plusieurs modèles :
maladie exogène / maladie endogène ; modèle
épistémologique (biomédical, psychologique ou relationnel)
; modèle des systèmes thérapeutiques.
· Elle a un caractère autonome et
créatif : Elle a une influence sur les attitudes et les comportements.
C. Herzlich.. a bien montré comment les
représentations de la maladie - destructrice ou libératrice -
induisent des comportements : refus des soins et de recours au médecin
dans le cas de la maladie destructrice ; rupture avec les contraintes sociales,
enrichissement sur le plan personnel, lorsque la maladie est vécue sur
le mode d'une libération.
- Les fonctions des représentations sociales
· Des fonctions cognitives :
Les représentations sociales permettent aux individus
d'intégrer des données nouvelles à leurs cadres de
pensée, c'est ce que Moscovici a mis en évidence à propos
de la psychanalyse. Ces connaissances ou ces idées neuves sont
diffusées plus particulièrement par certaines catégories
sociales : les journalistes, les politiques, les médecins, les
formateurs...
· Des fonctions d'interprétation et de
construction de la réalité :
Elles sont une manière de penser et
d'interpréter le monde et la vie quotidienne. Les valeurs et le contexte
dans lequel elles s'élaborent ont une incidence sur la construction de
la réalité. Il existe toujours une part de création
individuelle ou collective dans les représentations. C'est pourquoi
elles ne sont pas figées à jamais, même si elles
évoluent lentement
· Des fonctions d'orientation des conduites et des
comportements :
Les représentations sociales sont porteuses de sens,
elles créent du lien ; en cela elles ont une fonction sociale. Elles
aident les gens à communiquer, à se diriger dans leur
environnement et à agir. Elles engendrent donc des attitudes, des
opinions et des comportements.
La représentation sociale a aussi un aspect prescriptif
: " Elle définit ce qui est licite, tolérable ou inacceptable
dans un contexte social donné.
· Des fonctions identitaires :
" Les représentations ont aussi pour fonction de situer
les individus et les groupes dans le champ social... (elles permettent)
l'élaboration d'une identité sociale et personnelle gratifiante,
c'est-à-dire compatible avec des systèmes de normes et de valeurs
socialement et historiquement déterminés.
Jodelet parle d'affiliation sociale : " Partager une
idée, un langage, c'est aussi affirmer un lien social et une
identité.
· Des fonctions de justification des pratiques :
Elles nous semblent très liées aux fonctions
précédentes. Elles concernent particulièrement les
relations entre groupes et les représentations que chaque groupe va se
faire de l'autre groupe, justifiant a posteriori des prises de position et des
comportements.
Selon Abric, il s'agit d'un " nouveau rôle des
représentations : celui du maintien ou du renforcement de la position
sociale du groupe concerné.
Dans le contexte de notre étude, l'objet de la
représentation s'identifie à une catégorie de personne,
les descendants de mariage interethnique dont la mère n'est pas
Abouré de Yaou .Quant au sujet, il renvoie à deux entités
sociales sur notre champ d'étude : les institutions et les acteurs
véhiculant les normes et les codes et valeurs qu'incarnent les
institutions. Dans le cadre de notre étude, par représentation
nous entendons l'ensemble des clichés qui renvoie et justifie soit
l'intégration des acteurs issus de mariage interethnique, soit
l'exclusion des acteurs issus de mariage interethnique. Ces clichés sont
motivés par l'ensemble des normes que véhicule la filiation
matrilinéaire et aussi par l'enjeu en jeu sur les différents
champs. Les représentations se matérialisent au travers des
discours sociaux suivant : « Abouré pur », « tu es
mélangé », « tu n'es pas d'ici », « ta
famille n'est pas d'ici ». Ce sont ces différentes
représentations qui structurent les rapports entre les acteurs. Ce sont
elles qui occasionnent les catégorisations entre les acteurs. Tel que
« Abouré pur » et « Abouré non pur ».
I-4-4 Autochtonie
La notion d'autochtonie est une dialectique complexe et
problématique qui est évoquée par plusieurs ouvrages et
articles Avant d'aller plus loin dans la définition il semble judicieux
de définir ce qui est entendu par autochtonie.
D'après le Petit Robert, un autochtone est originaire
par voie ancestrale du pays qu'il habite. Cette définition ne met
cependant pas en évidence les enjeux importants que la logique de
l'autochtonie révèle dans l'interaction entre une unité
géographique (ou territoire) et des groupes ethniques (ou peuples).
Prenons les origines mythologiques de ce concept: chez les Grecs, un autochtone
désigne un enfant né spontanément de la terre. A ce
moment-là le principe a un poids incontournable: « les
Athéniens n'habitent pas Athènes, ils sont Athènes ».
Les mythes fondateurs leur enseignent qu'ils sont fils de la terre d'Attique et
que c'est leur groupe humain, issu d'ancêtres communs qui constitue la
cité. Il est difficile de relier le principe de l'autochtonie avec
des concepts politiques modernes si on prend en compte la notion originale:
l'attachement à sa terre de naissance est un lien vital pour un Grec,
aussi fort que celui qui le lie à sa famille. Cette acception pose les
Grecs comme assimilables à une plante en tant que produit de sa terre.
De cette conception découle à Athènes une
conséquence politique : le pouvoir appartient à l'ensemble des
citoyens et ne peuvent diriger le destin de la cité que ceux qui en sont
issus, c'est-à-dire, les autochtones au sens accepté du terme,
ceux qui sont nés tout à la fois de la terre même et de la
même terre. Cette définition peut paraître plus pertinente
pour analyser ce que l'autochtonie signifie dans la vie de certaines
communautés d'aujourd'hui bien qu'il faille toutefois, souligner les
déviances. En effet, l'autochtonie est utilisée dorénavant
par certains comme une stratégie dont le but avouer est d'obtenir le
pouvoir. Ce qui n'est pas sans poser problème. En effet, revendiquer une
autochtonie c'est redéfinir une identité qui va dans le sens
inverse du mouvement de mondialisation enclenché ces dernières
années.
Le mouvement de globalisation auquel nous assistons tend
à faire du monde un village où les flux, en particulier
d'idées, permettent de rapprocher les hommes. De plus, la mondialisation
accélère, même si c'est un mouvement qui lui est
antérieur, le flux des migrants apportant, ainsi une dimension
multiculturelle à un bon nombre d'Etats. Nonobstant, force est de
constater la montée en puissance des extrêmes, notamment en Europe
(Autriche succès de Heider, France Jean-Marie Le Pen au deuxième
tour de l'élection présidentielle...). L'actualité
mondiale offre des exemples quasi quotidiens du développement de la
xénophobie à travers le monde. Cette méfiance
vis-à-vis de l'altérité puise sa force dans une
dialectique complexe qui est celle de l'autochtonie. L'objectif premier des
articles est justement de démystifier le concept et de donner des
éléments clefs pour l'appréhender. A la lecture des
textes, constat est fait d'une dichotomie dans les définitions due aux
passés des nations qui permet d'établir deux axes majeurs: d'une
part le cas européen, avec une histoire particulière qui
l'empêche d'utiliser la définition traditionnelle de
l'autochtonie. D'autre part, celui de l'Afrique où la
problématique de l'autochtonie sert de terreau à la violence.
Nous en volons pour preuve les conflits fonciers entre les peuples autochtones
en Côte d'Ivoire et aux Cameroun.
L'invocation du clivage entre «autochtones» et
«allogènes» est devenue récurrente dans la vie sociale
camerounaise. La petite ville de Makénéné, sur la route
Yaoundé-Bafoussam, a par exemple connu de graves affrontements entre
« autochtones » Nyokon et« allogènes »
bamiléké, en novembre 1998. En juillet 1999, des fidèles
catholiques ont contesté en ces termes la nomination de Mgr André
Wouking, Bamiléké, comme archevêque de la capitale, faisant
écho à une bataille ecclésiale similaire à Douala,
en 1987 : 51 prêtres « autochtones » de l'archidiocèse
(sur 80) avaient alors adressé au Vatican un mémorandum
dénonçant la « bamilékisation de la hiérarchie
de l'Église » à la suite de la nomination de Mgr Gabriel
Simo comme évêque auxiliaire - raisonnement contesté par
l'Assemblée du clergé indigène du diocèse de
Bafoussam1. Mais la problématique de l'autochtonie au Cameroun ne se
limite pas à la stigmatisation de l'«ethnofascisme»
bamiléké, à laquelle s'était livré un
intellectuel organique du régime Biya en cette même année
1987 et dont le spectre hante en fait le système politique camerounais
depuis les années cinquante. Elle se retrouve aussi bien dans le Nord :
l'irruption des «broussards», «venants» et autres
«populations flottantes» dans l'activité commerciale a remis
en cause la « confiance » qui était à la base de la
négociation des prix et de la fiabilité du crédit entre
«originaires»2 ; et les combats entre Choa et Kotoko, or le Cameroun
est loin de constituer un cas isolé au sud du Sahara. L'une des
évolutions politiques les plus inquiétantes sur le continent
tient précisément à la généralisation de
l'opposition entre « autochtones » et «allogènes »
et à la véhémence nouvelle qu'elle y revêt. Une
telle dichotomie est de plus en plus souvent évoquée pour
justifier des formes d'exclusion d'une brutalité croissante, voire des
opérations de nettoyage ethnique qui peuvent prendre une dimension
génocidaire comme au Rwanda en 1994. L'extermination des Tutsi par le
Hutu Power, leur diabolisation par l'ethnonationalisme messianique qui s'est
développé dans les camps de réfugiés hutu burundais
en Tanzanie, la contestation de la nationalité et des droits
économiques dans les provinces zaïroises/congolaises du Kivu depuis
les années quatre-vingt croient trouver leur légitimation dans
les origines prétendument «éthiopiennes» 1 J.-F.
Bayart, A. Mbembe, «La bataille de l'archidiocèse de Douala»,
Politique africaine, 35, octobre 1989, pp. 77-104.
2 J. Roitman, «The Garrison-Entrepôt»,
Cahiers d'études africaines, 150-152, XXXVIII-2-4, 1998, pp.
297-329. des peuples hamitiques3. Au Kenya, les «autochtones»
kalenjin de la Rift Valley s'en sont violemment pris aux «squatters»
kikuyu en 1992, et des tensions comparables ont été
enregistrées sur la côte en 19974. De même, au
Shaba/Katanga, en 1993, des pogroms ont contraint à l'exode de nombreux
Baluba d'origine kasaïenne. Dans des contextes très
différents, la militarisation des conflits politiques ou sociaux dans la
province du Natal, ou autour des hostels dans les townships,
en République sud-africaine, à la fin des années quatre
vingt et dans la première moitié des années
quatre-vingt-dix, ou la guerre civile somalienne n'ont pas été
étrangères à la problématique de l'autochtonie5.
Enfin cette dernière n'épargne pas l'Afrique de l'Ouest. Au
Nigeria, elle est au coeur de la mobilisation des peuples du Delta contre les
compagnies pétrolières et, dans le Sud-Ouest, l'Ooduo Peoples
Congress prétend défendre manu militari les droits des
Yoruba contre les «allogènes» hausa ou ijaw.
I45 Représentation sociale de
l'autochtonie
Ce concept désigne l'ensemble des règles et
connaissances qui déterminent l'appartenance ethnique des acteurs. En
effet, à Yaou, le concept d'autochtonie ne renvoie pas à la
primauté du droit au sol se résumant dans les cas les plus
rencontrés : «nous sommes arrivés ici les
premiers ». A Yaou c'est une autre réalité, le concept
d'autochtone à une double signification en fonction des acteurs en
interaction. Quand on a en interaction un Abouré et un autre groupe
ethnique, l'autochtonie se détermine en fonction du droit au sol. Tandis
que, quand les descendants de mariage interethnique sont en interaction avec
ces mêmes acteurs, ce n'est plus le droit au sol qui est mis en avant,
c'est plutôt la règle de recrutement des membres de la famille qui
est convoquée. Dans le cas d'espèce, c'est le système
matrilinéaire qui est en vigueur, la conséquence donc est la
suivante : les descendants de mariage interethnique dont la mère
est Abouré de Yaou sont considérés comme autochtones et
les descendants de mariage interethnique dont le père est autochtone
sont considérés comme allochtone. Cette situation
démontre que le concept d'autochtonie n'est pas une
réalité immuable. La définition ou la détermination
du statut d'autochtone est malléable. En un mot les questions
d'identités sont malléables en fonction des acteurs en
interaction et aussi en fonction des ressources misent en jeu.
CONCEPTS
|
DIMENSIONS
|
COMPOSANTE
|
INDICATEURS
|
Représentation sociale de
l'autochtonie
|
- Cognitive
- Normative
|
Opinion
Le système matrilinéaire
|
les vrais Abouré sont les descendants dont la
mère est Abouré.
Abouré pur
Recrutement des membres de la famille du coté de
la mère
|
II-CADRE METHODOLOGIQUE
II-1- DELIMITATION DU CHAMP DE L'ETUDE
II-1-1- Champ géographique
Pour mieux cerner la réalité que nous
étudions, nous avons circonscrit le cadre de l'étude au village
de Yaou, qui est situé dans la sous-préfecture de Bonoua. Le
choix de ce village s'explique d'une part par le fait qu'il est situé en
milieu rural, localisation géographique qui nous permet d'identifier
sans trop de difficulté la totalité des acteurs ayants
contractés un mariage interethnique. Et d'autre part, à cause de
la présence des allochtones et des allogènes
sédentarisés depuis les périodes coloniales, pour diverses
raisons. Une étude dans ce village permettra de saisir
l'évolution des mariages interethnique en rapport avec la production de
l'ethnicité, dans un contexte sociopolitique hostile au brassage
culturel. Afin, d'identifier et de comprendre les facteurs favorisants, ou
limitant l'intégration et/ou l'exclusion des communautés
allochtones et allogènes dans le contexte post-crise dans le village de
Yaou en particulier et dans le pays en général.
II-1-2- Champ social
Pour la réalisation de notre enquête à
Yaou, nous interrogerons l'ensemble des acteurs sociaux du village, capables de
nous donner des informations, afin de consolider notre travail de recherche. A
cet effet, nos différents instruments de collectes de données
s'adressent aux acteurs ruraux suivants :
- Les notables du village, car depuis plus de huit ans, ce
sont eux qui dirigent et gèrent les affaires courantes du village. Cette
situation s'explique par le fait que les querelles internes rendent impossible
la désignation du roi. Ce sont donc les seules autorités
villageoises capables de nous donner les différents codes culturels et
lois qui régissent la vie sociale à Yaou. De plus, ils peuvent
nous renseigner sur les coutumes, les idéologies, l'histoire de
peuplement des Abourés de Yaou, leurs organisations sociales et
culturelles etc.
- Après les notables nous avons eu des entretiens avec
les acteurs sociaux ayant contractés un mariage interethnique vivants
à Yaou, parce que c'est auprès de ces acteurs que nous allons
avoir les informations portant sur la production de l'ethnicité, aux
modes de vie en vigueur dans ce type de couple et le sort réservé
par la communauté autochtone aux acteurs Abourés ayant
contractés un mariage avec un autre groupe ethnique présent
à Yaou.
- Et enfin les personnes de 18 à 35 ans issues de
mariage interethnique entre un Abouré et un autre groupe ethnique parce
qu'elles constituent un maillon essentiel pour observer et comprendre les
règles, les codes culturels et le mode de vie social que leurs imposent
les institutions villageoises.
II-2- METHODE D'ANALYSE: l'analyse
de contenu
L'analyse de contenu est une technique d'étude
détaillée des contenus de documents. Elle a pour rôle d'en
dégager les significations, les intentions non directement perceptibles
à la simple lecture des documents. Il est donc de première
importance de disposer d'une technique alliant rigueur et procédures
simples pour analyser ces contextes d'actions et de situations que sont les
mots agencés dans un discours signifiant. L'exégèse et la
dissection interprétative ne suffisent pas à rendre tout le sous
jacent, l'implicite, dans le sens d'un texte, sur des bases autres que
seulement subjectives et approximatives. L'analyse de contenu sert à
combler cette insuffisance .Nous retiendront la définition
générale suivante : l'analyse de contenu est une
« technique de recherche pour la description objective,
systématique et quantitative du contenu manifeste des communications
ayant pour but de les interpréter »
C'est en fait une étude de texte qui se veut :
Objective : tous les analystes poursuivant les
mêmes objectifs de recherche devraient aboutir aux mêmes
résultats en analysant les textes.
Systématique : tout le contenu doit être
analysé, ordonné et intégrer. Toutes les
possibilités signifiantes par rapport aux objectifs du chercheur doivent
être recensées, répertoriées et explorées, ou
du moins il s'agira d'omettre le moins possible d'unités de
signification pertinentes.
Quantitative : on peut dénombrer les
éléments significatifs, effectuer des calculs, des comparaisons
statistiques des pondérations, des corrélations, des
fréquences des moyennes. En résumé l'analyse nous de
contenu nous permettra de mieux traiter : tout matériel de
communication verbale tels que les livres, les journaux, les rapports, les
documents administratifs et même des films, des discours etc. Et tout
matériel spécialement créé par le chercheur, tel
que les protocoles d'interview, discussion de groupe, test verbaux.
Selon OMAR Aktouf29(*), il existe en gros six types d'analyse de contenu
selon le but visé et le genre de résultats escomptés par
le chercheur.
Ce sont : l'analyse de contenu d'exploration, l'analyse
de contenu de vérification, l'analyse de contenu qualitative, l'analyse
de contenu quantitative, l'analyse de contenu directe, l'analyse de contenu
indirecte. C'est précisément l'analyse de contenu directe et
indirecte que nous utiliserons tout au long de notre analyse.
L'analyse de contenu directe consiste à ne se
contenter de prendre au sens littéral la signification de ce qui est
étudié. On ne cherche pas dans ce cas à dévoiler un
éventuel sens latent des unités d'analyses. Quant à
l'analyse indirecte, elle cherche inversement à dégager le
contenu non directement perceptible, le latent qui se cacherait derrière
le manifeste.
II-3- ENQUETE EXPLORATOIRE
L'enquête exploratoire est une opération
importante dans le processus de la rédaction du mémoire. Elle
consiste à effectuer une visite d'exploration sur le champ physique
d'étude. Afin de mesurer la faisabilité de recherche du
thème soumis à notre étude sur ce champ
géographique précis. le chercheur sélectionnera quelque
personnes directement concernées par le problème ou en tout cas
très informées sur ce dont il traître pour avoir avec
chacune une entrevue non directive centrée sur le sujet de recherche.
Cette étape de la recherche, a consisté à
identifier approximativement le nombre de mariage interethnique existant dans
le village. L'enquête exploratoire nous a également permis, de
reconsidérer la posture épistémologique adoptée au
préalable, pour ne retenir que les couples mixtes où l'un des
conjoints est autochtones, c'est-à-dire Abouré de Yaou et l'autre
allochtone ou allogènes vivant dans ce village. Cette opération
de recherche, a permis d'adapter notre outil de recueil des données
à la réalité du terrain. Ainsi, certaines questions ont
été reformulées, complétées ou
supprimées et d'autres ont été rajoutées pour faire
la lumière sur certains points qui nous paraissaient confus pour les
enquêtes. C'est à la fin de cette opération que nous sommes
passés à l'enquête proprement dite.
II-4- LES TECHNIQUES DE COLLECTE DES DONNEES
Dans le cadre de notre étude, nous avons opté
pour la méthode qualitative.
En effet, nous avons opté pour cette méthode
pour mettre en exergue les croyances, les systèmes de
représentations sociales, les logiques sociales qui interviennent dans
la construction de l'appartenance ethnique et dans la production des
différences au niveau des descendants du mariage interethnique. Dans une
telle perspective, comme le relève Paul N'da (200130(*)), « l'approche
qualitative d'investigation ambitionne de comprendre le phénomène
et non de démontrer, de prouver, de contrôler quoi que ce
soit ». Il s'agit donc pour nous de comprendre le pourquoi et le
comment d'activation des mécanismes de production de différences
entre les descendants du mariage interethnique.
II-4-1 La construction de l'échantillon des
enquêtés
La détermination du nombre d'enquêtés
s'est faite par la technique d'« échantillonnage en boule de
neige » ou « par réseau », un
échantillon non probabiliste obtenu sur la base d'un choix
raisonné, donc de convenance. Cette technique consiste à choisir
un noyau d'individus (des personnes considérées comme influentes
par exemple) ; noyau auquel s'ajoute tous ceux qui sont en relation (de
travail, d'affaire, d'amitié, etc.) avec eux et ainsi de suite. On se
fonde donc sur des réseaux sociaux, d'où l'expression
« par réseau ».
Dans le cadre de cette étude, nous sommes entrés
en contact avec les chefs de génération les notables, les amis
des couples mixtes, les jeunes du village, le chef de quartier de Koumassi. Ces
différents acteurs nous ont permis d'identifier les couples de mariage
interethnique qu'ils connaissaient. C'est grâce à cette technique
que nous avons pu recenser les quarante couples mixtes pour la
réalisation de notre étude.
Fiche de dénombrement des couples mixtes
identifiés
N° COUPLE
|
NOM DU CONJOINT
AUTOCHTONE
|
NOM DU CONJOINT
ALLOGENE
|
DUREE DU MARIAGE
|
NOMBRE
D'ENFANT
|
1
|
Abouré
|
adjoukrou
|
5 ans
|
2
|
2
|
Abouré
|
Baoulé
|
30 ans
|
7
|
3
|
Abouré
|
Bété
|
25 ans
|
2
|
4
|
Abouré
|
Apolo
|
25 ans
|
9
|
5
|
Abouré
|
Ghanéenne
|
22 ans
|
5
|
6
|
Abouré
|
agni
|
22 ans
|
2
|
7
|
Abouré
|
agni
|
23 ans
|
10
|
8
|
Abouré
|
Baoulé
|
42 ans
|
3
|
9
|
Abouré
|
Attié
|
43 ans
|
5
|
10
|
Abpuré
|
Baoulé
|
4 ans
|
2
|
11
|
Abouré
|
Baoulé
|
8 mois
|
2
|
13
|
Abouré
|
Ebrié
|
3 ans
|
1
|
14
|
Abouré
|
Bété
|
29ans
|
1
|
15
|
Abouré
|
Agni
|
9ans
|
7
|
16
|
Abouré
|
Gagou
|
10 ans
|
3
|
17
|
Abouré
|
Apolo
|
19 ans
|
7
|
18
|
Abouré
|
Ghanéenne
|
26ans
|
5
|
19
|
Abouré
|
Ghanéenne
|
32ans
|
1
|
20
|
Abouré
|
Attié
|
25ans
|
7
|
21
|
Abouré
|
Alladjan
|
2ans
|
3
|
22
|
Abouré
|
Agni
|
12ans
|
11
|
23
|
Abouré
|
Tagbana
|
25ans
|
3
|
24
|
Abouré
|
Bété
|
6ans
|
1
|
25
|
Abouré
|
Baoulé
|
15ans
|
4
|
26
|
Abouré
|
Alladjan
|
2 ans
|
3
|
27
|
Abouré
|
Ghanéenne
|
6 ans
|
3
|
|
|
|
|
|
28
|
Abouré
|
Tagbana
|
4 ans
|
2
|
29
|
Abouré
|
Ebrié
|
20 ans
|
4
|
II-4-2- La recherche documentaire
Comme son nom l indique cette méthode de
pré enquête consiste a répertorier et a consulter les
documents les plus spécifiques et les plus spécialisés
possibles sur le sujet de recherche, on utilisera donc les registres, les
rapports les thèses, les mémoires et même si il en
existe des documents audio visuels afin d'en savoir le plus que l'on peut
à l avance connaître sur le problème traité ou sur
des problèmes identiques.
Cette phase de l'étude nous a
amené à faire des recherches dans plusieurs bibliothèques.
Elle nous a conduits à la bibliothèque de l'IES, à la
bibliothèque de l'INADES, à la bibliothèque du Centre
Culturel Français et enfin à l'Institut de Recherche et de
Développement (Petit Bassam/Marcory). Nous avons également fait
la recherche en ligne sur les moteurs de recherche Google et Yahoo. Cette
technique nous a permis de recueillir des documents traitants de notre
thème de recherche. Ce qui nous a aidés à la
rédaction de la problématique, il faut également noter que
nous avons lu des ouvrages de méthodologie, des ouvrages et des
mémoires. Tous ces documents nous ont permis de mieux préciser
nos réflexions et de baliser notre voix de recherche.
II-4-3- L'entretien
Sous leurs différentes formes, les méthodes
d'entretien se distinguent par la mise en oeuvre des processus fondamentaux de
communication et d'interaction humaine. Correctement mis en valeur, ces
processus permettent au chercheur de retirer de ses entretiens des informations
et des éléments de réflexion très riches et
nuancés. A l'inverse de l'enquête par questionnaire, les
méthodes d'entretien se caractérisent par un contact direct entre
le chercheur et ses interlocuteurs et par une faible directivité de sa
part.
Ainsi, s'instaure en principe un véritable
échange au cours duquel l'interlocuteur du chercheur exprime ses
perceptions d'un événement ou d'une situation, ses
interprétations ou ses expériences, tandis que, par ses questions
ouvertes et ses réactions, le chercheur facilite cette expression,
évite qu'elle s'éloigne des objectifs de la recherche.
II-4-3-1'Entretien semi directif
L'utilisation de l'entretien semi directif comme technique de
recueil des informations a été pertinente. Nous avons choisi
cette technique parce qu'elle permet au chercheur de recentrer l'entretien sur
les objectifs. Chaque fois que le sujet s'en écarte, et permet
également de détendre l'atmosphère pendant l'interview.
Enfin, cette technique cadre mieux avec la perspective qualitative dans
laquelle s'inscrit notre étude et de rendre au mieux les opinions, les
perceptions en vue de restituer les significations, les idéologies que
les acteurs sociaux donnent aux actions et pratiques humaines dans la
société.
Les entretiens se sont déroulés individuellement
afin d'éviter que les conjoints, les enfants ne soient influencés
dans leurs réponses par la présence des autres.
Le support qui a servi à l'entretien est
structuré de la façon suivante :
- L'identification des mécanismes d'appartenance
- La nature des rapports entre acteurs sociaux issus de
mariages interethniques et les conjoints et les institutions du village.
- Les enjeux d'appartenance au groupe ethnique.
II-4-4- Le dépouillement
Deux types de dépouillement sont à la
disposition du chercheur. Le dépouillement manuel et le
dépouillement informatique. Nous avons pour notre part, utiliser le
dépouillement manuel eu égard de la nature de l'enquête qui
est essentiellement qualitative. Cette technique est généralement
plus ou moins longue mais à l'avantage de permettre une meilleure
appréciation des réponses recueillies et de procéder
à leur catégorisation : ce qui facilite les analyses et les
interprétations qui ont été faites. En effet, les
entretiens avec les enquêtés on été
réalisés à l'aide d'un enregistreur numérique. Par
la suite, nous avons procédés à des transcriptions
intégrales, puis à une catégorisation des idées. De
façon pratique il s'est agit pour chaque question posée de
dénombrer et de classer les réponses obtenues par groupe de
reposes identiques.
II-4-5 Le séminaire de restitution
Dans le sens d'éprouver la théorie et le terrain
dans le processus de la recherche. Nous avons participé à un
séminaire de restitution de nos enquêtes exploratoires. Cette
activité scientifique était sous la présidence du docteur
SEKA aman représentant le directeur de recherche et sous la direction du
doctorant DROH junior. Les impétrants étaient les
étudiants menant la recherche sur la question des mariages interethnique
et la production de l'ethnicité dans près treize villages de la
Cote d'Ivoire. Pour les citer nous avons : Lopou (Dabou) , Ebimpé
(Anyama) , Kouamekro ( Divo) , Sebia Yao ( Bingerville) , Samo ( Bonoua) , Yaou
( Bonoua) , Ono (Agboville) .
Etait présent à ce séminaire les
différents chefs des villages ci-dessus cités.
Après les allocutions nous avons pris la parole pour
présenter de façon synthétique les données de notre
enquête exploratoire. Dans le prolongement de la réflexion sur le
thème mariage interethnique et production de l'ethnicité, dans
notre cas à Yaou. Nous avons identifié 30 couples de mariage
interethnique ou l'un des conjoints est autochtone Abouré de Yaou.
L'enquête exploratoire nous à permis de constater que les acteurs
issus de ce type de mariage étaient construit comme étranger sur
certain champs. Nous avons constaté que les acteurs issus de mariage
interethnique ne pouvaient accéder au trône royal et d'autres
types de pouvoirs : la notabilité, chef de quartier, chef de
lignage. Ce constat nous a conduis à chercher à comprendre cette
situation. A ce propos la question centrale de notre étude est la
suivante. Quels sont les mécanismes sociaux de différenciation et
d'intégration des acteurs sociaux issus du mariage interethnique ?
L'autre phase du séminaire à consister à
un échange entre les jeunes chercheurs que nous sommes et les acteurs et
autorités villageoises. Ce fut des échanges très
intéressant pour nous. Ces échanges nous ont permis de savoir
qu'à Yaou c'est le système matrilinéaire en vigueur qui
disqualifie certains acteurs sociaux issus de mariage interethnique. Et de
savoir que depuis 1997 un conflit au niveau de l'accession à la
royauté secouait le village de Yaou. Et que la résolution de ce
conflit influençait plusieurs aspects du système social.
Ces échanges ont également permis de rendre de
restructurer nos objectifs de recherche afin de mieux cerner la
réalité soumise à notre sagacité.
II-5- L'ENQUETE
Nous rappelons que l'enquête, c'est le travail qui
consiste, pour le chercheur, à se déplacer sur le terrain et
à recueillir auprès des personnes retenues dans
l'échantillon les données qui constitueront, en fait, la
véritable base de sa recherche, de ce qu'il démontrera ou
découvrira. (Omar Aktouf, méthodologie des sciences sociales et
approche...(1987)
Ceci dit le processus de la recherche est composé de
plusieurs logiques de recherche à réaliser afin de parachever la
recherche. Dans cette optique nous avons réalisé un mois semaines
d'enquête après le séminaire de restitution. Elle s'est
réalisée en trois phases. La première, a consisté
à interroger les autorités du village, avec comme instrument de
collecte, un guide d'entretien. La seconde phase, elle a permis de
réaliser les entretiens avec les acteurs autochtones du mariage
interethnique, à l'aide également d'un guide d'entretien
particulier. Afin de saisir les croyances, les perceptions, les
idéologies de cette catégorie d'acteur par rapport au mariage
interethnique. La dernière phase, quant à elle a servi à
interviewer les acteurs allochtones et allogènes de mariage
interethnique.
Pendant l'enquête, il nous a été
donné de constater que les hommes Abouré se maries plus avec des
étrangers que les femmes Abouré. Car sur les trente cinq couples
interethniques, trente trois sont des conjointes allochtones. L'enquête
s'est réalisée sur un mois vu l'activité champêtre.
En effet, avec la dépréciation du prix de l'ananas, les paysans
Abouré de Yaou et leur famille, ont commencé à planter
l'hévéa. Les plantations d'hévéa étant
à leur début pour la plupart, elles demandent beaucoup de suivie
de la part des cultivateurs et leur famille. En dehors des entretiens formels,
nous avons pendant l'enquête été témoin d'un fait
intéressant. En effet, au cour d'un match, un enfant issu de mariage
interethnique dont la mère est allochtone a giflé un chef
guerrier. La population du village par voix de leur représentant, a dit
ceci « il faut qu'il parte chez lui, sa famille n'est pas d'ici,
c'est pourquoi il ne respecte pas nos autorités». Cette situation a
valu l'interruption de nos enquêtes. Et tout acteur issu de mariage
interethnique dont la mère est allogène ou allochtone
était méprisé. L'enquête sur notre champ
d'étude, nous a permis en tant que jeune chercheur, d'observer un
phénomène, et de développer notre capacité
observation et d'analyse et de mieux comprendre la pertinence du terrain dans
la recherche. Mais cette enquête ne s'est pas réalisée sans
difficulté
II- 6 LES DIFFICULTES RENCONTREES ET LES
IMPACTS
SUR LA METHODOLOGIE
Lors de la collecte des données, nous avons
été confrontés à trois difficultés
essentielles, à savoir la barrière linguistique, la perte des
données liée à la communication non verbale et le contexte
de conflit qui secoue le village depuis 1997 au sujet du trône royal
à Yaou. Dans le cadre de l'observation directe, nous avons
assisté à des jugements portant sur un descendant de mariage
interethnique à la cour royale qui se déroulaient en
Abouré, ce qui nous a empêché de cerner les
mécanismes de sanctions qu'un acteur dont la mère n'est pas
Abouré subit quand il commet des impaires. Pour surmonter cette
difficulté, nous avons bénéficié des services d'un
interprète avec tous les risques que cela comporte. En outre, au cours
des entretiens approfondies avec les enquêtés la communication non
verbale nous a échappé, par conséquent nous n'avons pas pu
capter l'expression du visage, la gestuelle etc. selon les questions.
La dernière difficulté est liée au
contexte de crise que vit le village de Yaou. Chaque partie au cours de notre
enquête, nous soupçonnait d'être des espions de l'autre
camp. La collecte des informations était donc très difficile, il
nous a fallut expliquer la raison de notre présence à la cour
royale en présence des deux parties en conflit. Après cette
étape l'enquête exploratoire et l'enquête proprement dite se
sont déroulées sans trop de difficultés. L'autre
élément qui a permis la réussite de notre étude fut
également le séminaire de restitution organisé par la
cellule d'animation scientifique de l'IES.
En somme, les enseignements ou les leçons de
méthodologie nous ont permis de dégager une orientation
spécifique pour la présente étude.
CALENDRIER DE MATERALISATION DE LA
RECHERCHE
|
ACTIVITES
|
PHASE I
|
27-06-07
Compréhension des concepts clés du thème de
recherche
|
05-07-07
Lecture des ouvrages et textes relatifs à
l'ethnicité
|
07-08- 2007
Délimitation des axes de la recherche par le Docteur
ROCH
|
02-08-2007
Constructions du guide d'entretien de l'enquête
exploratoire
|
PHASE II
|
15-08-07 Enquête exploratoire
|
PHASE III
|
07-09-07
Rapport d'enquête exploratoire suivi du
séminaire de restitution et rédaction du cadre théorique
du mémoire
|
PHASE IV
|
15-10-07
Construction du guide d'entretien de l'enquête
|
PHASE V
|
08-03-08
Enquête +monture finale du mémoire
|
DEUXIEME PARTIE
ANALYSE ET INTERPRETATION DE DONNEES
I- REPRESENTATION DU MARIAGE INTERETHNIQUE ET ETHNICITE
A- DEFINITION DE LA REPRESENTATION
« Le concept de représentation sociale
désigne une forme de connaissance spécifique, le savoir de sens
commun, dont les contenus manifestent l'opération de processus
génératifs et fonctionnels socialement marqués. Plus
largement, il désigne une forme de pensée sociale. Les
représentations sociales sont des modalités de pensée
pratique orientées vers la communication, la compréhension et la
maîtrise de l'environnement social, matériel et idéal. En
tant que telles, elles présentent des caractères
spécifiques au plan de l'organisation des contenus, des
opérations mentales et de la logique. Le marquage social des contenus ou
des processus de représentation est à référer aux
conditions et aux contextes dans lesquels émergent les
représentations, aux communications par lesquelles elles circulent, aux
fonctions qu'elles servent dans l'interaction avec le monde et les
autres. »31(*)
Après, la mise en évidence de la
définition de la représentation, nous
décrirons les représentations des acteurs sociaux selon
leur catégorie. Nous exposerons dans un premier temps les
perceptions et les représentations des allochtones sur la question du
mariage interethnique et l'ethnicité, ensuite nous décrirons
celles des autochtones et enfin les représentations des enfants.
B- REPRESENTATION DES ALLOCTHONES
L'analyse des réponses à la question
générale qui ouvre le guide d'entretien des allochtones, permet
de mettre en exergue trois formes de représentations du mariage. La
première forme de représentation est la suivante : le
mariage pour les acteurs procure le respect des autres acteurs sociaux. La
deuxième, présente le mariage sous un angle religieux. Pour cette
catégorie d'acteur se marier, c'est accomplir la volonté de Dieu.
Quant à la troisième forme de représentation, le mariage
est un facteur de consolidation de liens entre les deux ethnies et les familles
auxquelles appartiennent les conjoints. Il se dégage de ces
réponses que le mariage est pour les allochtones une stratégie
intégration dans le tissu social à Yaou. Le mariage interethnique
leur permet de se mettre au même niveau sur certains champs que le tuteur
ou le patron. En effet, la plupart des acteurs dans cette posture,
étaient des employés auparavant. L'autre élément
que révèlent ces réponses, est le rôle dynamisant du
modernisme dans les collectivités rurales. Ce rôle dynamisant
prend son essence sur deux facteurs : l'école et les masse medias.
En effet, ces deux facteurs dynamisant constituent des éléments
de déstructurations des représentations des villageois. Autrefois
il était difficile pour un Abouré de dépasser les
limites territoriales des Abouré pour nouer des échanges
matrimoniaux avec d'autres peuples. « Avant leurs parents disaient
que la Cote d'Ivoire se limitait à Mossou ». Ce discours
montre pourquoi les échanges matrimoniaux avec les autres peuples
étaient rares. Ici la limite ethnique se matérialise
territorialement. L'étranger c'est celui qui n'est pas de la même
ère géographique que l'Abouré.
« Gnangnouan » personne qui vient de loin, c'est le terme
désignant l'étranger sous l'angle allogène et allochtone.
Pour les allochtones et les allogènes le mariage interethnique permet de
faire tomber la représentation, qui les construit comme des acteurs
venant de très loin, donc des étrangers. Aussi est il un moyen
permettant de mieux apprécier les valeurs sociales et coutumières
du peuple Abouré. De plus, pour eux, le mariage interethnique constitue
un moyen permettant de prouver que les préjugés sur eux ne sont
pas fondés .Au regard du discours produit par les acteurs, le mariage
interethnique est une médiation. Il permet, dans ce cas de figure, aux
acteurs sociaux de connaître et comprendre les habitudes de vie, les
coutumes, et le système de valeur des Abouré. Le mariage
interethnique agit dans ce contexte comme, le début d'un processus de
cohabitation objectif entre les Abouré et les autres groupes ethniques.
Nous qualifions ces relations de cohabitation objectives, car les
barrières idéologiques intériorisées dans le
processus de socialisation se trouvent voilées. En effet, la fonction
latente des barrières idéologique permet de formaliser
l'interaction entre les Abouré et les autres groupes ethniques à
Yaou. De plus, les effets du modernisme ont contribué à
l'interpénétration matrimoniale entre les peuples, qui
étaient autrefois considérés comme totem matrimonial.
L'école et le modernisme ont également fissuré la
structure d'échange au niveau matrimonial entre les groupes ethniques,
et ont actionné le processus relationnel entre les groupes ethniques
autrefois en conflit latent. Dans le prolongement de l'analyse, il est
donné de constater que la plupart des mariages interethniques
recensés, sont de type endogamique. En effet, nous avons des mariages
entre deux ethnies d'un même grand groupe ethnique. Tandis que Seulement
quatre parmi le nombre total de mariages interethniques sont des mariages
exogamiques. C'est-à-dire que les conjoints n'appartiennent pas au
même grand groupe ethnique.
C- REPRESENTATION DES AUTOCHTONES FACE
AU PHENOMENE DU MARIAGE INTERETHNIQUE
La question permettant de saisir les représentations
des autochtones sur la question du mariage interethnique, décrit trois
tendances.
le mariage est la consolidation des liens entre un homme et
une femme et leur famille réciproque.
le mariage est l'union entre un homme et une femme en vue de
procréer.
le mariage est le gage de respect.
L'analyse de ces tendances révèle que les
acteurs perçoivent le phénomène du mariage en termes de
rôle qu'il joue sur le système social. Ce qui nous amène
à dire que l'institution mariage dans la société
Abouré prône la procréation. Le mariage fonctionne ici
comme une institution, parce qu'il structure les acteurs à un double
niveau : symbolique et relationnel. Dans ce cas d'espèce le
symbolique transparaît lorsqu'on oblige les acteurs à se conformer
à la valeur procréative du mariage. Nous pouvons citer des
auteurs comme DEDY Sery et TAPE Gozé pour qui le mariage a pour but de
perpétuer l'espèce humaine. Car « l'enfant
représente une valeur existentielle, un supplément
d'âme32(*) »
Quand au niveau relationnel, il se manifeste à travers
la séparation des conjoints par les familles. « On se marie
pour faire des enfants s'il n y a pas d'enfants vos parents vous
divorces »
Dans la société Abouré de Yaou, champ de
notre étude, le mariage signifie procréation .Un mariage sans
enfants durant une période convenable après le mariage doit
être brisé. Le a pour sens mariage la reproduction de
l'espèce humaine. Au niveau du sens que les acteurs donnent au mariage
interethnique, nous le percevons mieux à travers ce discours
social : « c'est un totem pour les sorciers parce que quand la
famille maternelle veut tuer les enfants en sorcellerie, la famille paternelle
dit que ce n'est pas votre enfant. Vis versa ». Ce discours contribue
à mobiliser, les acteurs réfractaires au mariage interethnique.
En réalité les parents ayant contracté ce type de mariage
présente le mariage interethnique comme un antidote aux oeuvres de la
sorcellerie. Cet argument consiste à faire disparaître la
différenciation que les enfants issus du mariage interethnique subissent
dans l'organisation sociale du village. En effet, les acteurs qui
véhiculent cette idée sont les parents ayant contracté un
mariage interethnique. En mobilisant les autres acteurs à opter pour le
mariage interethnique, les parents des enfants issus de ce type de mariage
veulent voir accroître le nombre de parent dans leur cas, afin de mieux
défendre les statuts de leur enfant. Les données
révèlent que la plupart des autochtones ayant contracté un
mariage interethnique sont les hommes Abouré. Un autre
élément d'explication se perçoit dans le fait qu'en pays
Abouré, les femmes ont un pouvoir important, ce sont `elles qui
choisissent les personnes qui doivent exercer un quelconque pouvoir dans le
village. De ce fait, elles ont un caractère autoritaire que les acteurs
Abouré hommes redoutent. Ils contractent donc ce type de mariage pour
affaiblir les femmes. Il est nécessaire de noter que, c'est le
matriarcat et le matrilinéaire qui sont en vigueur à Yaou.
En plus de l'idéologie du totem des sorciers, de
l'impact du modernisme, le mariage interethnique constitue une stratégie
de lutte contre le pouvoir des femmes dans la société
Abouré de Yaou. Nous détaillerons mieux cette partie dans la
rubrique genre et société Abouré de Yaou .
II- STRUCTURATION DE L'ORGANISATION SOCIALE A YAOU
Après l'exposition des représentations, nous
présentons les différentes organisations du village afin de mieux
percevoir les champs de production de différences entre les acteurs
sociaux concernés par cette étude. En effet, la
présentation de l'historique de peuplement, de l'organisation politique,
économique, culturelle, sociale, de la parenté, de la famille
II-1 HISTORIQUE DE L'INSTALLATION DES ABOURE DE
YAOU
Selon la tendance du clan Ovo Ehivet
Le nom porté par le village de Yaou, a une histoire et
une signification particulière. En effet, « Oyo »
est le nom d'une rivière du village, à laquelle l'on vouait un
culte. C'est la déformation du nom de cette rivière qui est
devenu Yaou. Le peuplement de ce village se situe vers le 17e
siècle. C'est en provenance du Ghana que les Abourés sont
arrivés en Côte d'Ivoire. Pendant leur exode, le premier
arrêt qu'ils ont marqué était à Alouré,
village qui existe jusqu'à présent dans la sous préfecture
d'Aboisso. C'est arrivé à Alouré, que le roi M'BE a
envoyé trois messagers en exploration, à la recherche de terre
fertile pour s'y installer. Ces trois messagers étaient respectivement
moulo opho responsable « fakoué », qui signifie chef
de quartier. Boidi gnangué en sa qualité de chef de terre et un
représentant du roi. C'est à l'issu de cette exploration que le
site actuel a été choisi.
Initialement, le nombre de lignage était de sept. Mais
les querelles au sein des lignages ont occasionné la division de
quelques lignages en deux lignages distincts. Présentement, le nombre de
lignage à la cour royale est de 18 lignages. Le nom des sept principaux
lignages sont les suivants : Ovo Ehivet, Obou Ehivet, allié Ehivet
, Fatouan Ehivet, Manmlé Ehivet , Sapié Ehivet, .
Selon le clan Agbessi Ehivet
C'est vers 1701 que les Abourés sont venus d'Egypte
à la suite d'une crise avec d'autres peuples. Pendant leur fuite le
peuple Abouré à reçu de nombreuses attaques. Ces
nombreuses guerres ont causé la mort du roi d'alors et tous ces
héritiers au trône, ne restant qu'une soeur du roi. C'est dans ce
contexte que le lignage royale Ovo Ehivet a perdu la plupart des ses membres et
a perdu par la même occasion le trône royal, au détriment du
clan familial Agbissi Ehivet qui a conduit le peuple jusqu'au site de Yaou. Le
premier site, lors de notre arrivée après notre fuite du Ghana
était « mèlètchèkro »,
33(*)quant `au
deuxième site, c'était offouko sur la coline. Et le dernier site
est Yaou. Le village porte le nom de Yaou parce qu'à notre
arrivée les féticheurs ont interrogé les esprits de ce
lieu, qui leur ont dit que leur nom est oyo, le génie de la
rivière qui est juste à l'entrée du village en venant de
Bonoua. Et que le totem de cette rivière est le canard, le porc et les
femmes indisposées. Le respect de ces totems était la condition
pour occuper les lieux .Mais aujourd'hui le non respect de ces totems a conduit
à l'assèchement de la rivière. Dans le village nous
vivons avec des étrangers, qui sont les Attié, les baoulé,
les N'Zima, les Agni, les burkinabé. Ils sont là il y'a longtemps
à cause de la culture d'ananas pour certains, et pour d'autres la fuite
des travaux forcés. En principe il devait avoir 7 (sept) familles,
mais à cause des problèmes intra familiaux, il y a des familles
qui se sont éclatées. Sinon il y a réellement 7(sept)
familles qui sont : Obou Ehivet, Allié Ehivet, Fatouan Ehivet,
Manmlé, Sapié Ehivet, Agbessi Ehivet et Samanté Ehivet.
Après avoir présenté ces deux
récits de peuplement du peuple de Yaou. Que revêt une telle
situation ! Cette situation traduit un conflit qui secoue le village de
Yaou depuis 1997. Ces deux récits dévoilent également les
parties en conflit et leurs soutiens. C'est dans ce contexte que s'est
réalisée notre étude, chaque partie au cours de notre
enquête nous soupçonnait d'être des espions de l'autre camp.
La collecte des informations était donc très difficile, il nous a
fallut expliquer la raison de notre présence à la cour royale en
présence des deux parties en conflit. Après cette étape
l'enquête exploratoire et l'enquête proprement dite se sont
déroulées sans trop de difficultés. L'autre
élément qui a permis la réussite de notre étude fut
également le séminaire de restitution organisé par la
cellule d'animation scientifique de l'IES.
II- 2 STRUCTURATION POLITIQUE
? La royauté
La royauté, sa majesté le Roi symbolise le
peuple Abouré de Yaou composé aussi bien des vivants
que des morts. Depuis 1997 le village de Yaou n'est plus dirigé par un
roi. La raison de cet état de fait s'explique par le conflit, qui existe
entre les clans familiaux Ovo Ehivet et Agbessi Ehivet. D' après le chef
de génération des Tchagba, ce conflit tire sa source de
l'historique d'installation des Abouré de Yaou. Les acteurs dont la
mère est Abouré peuvent prétendre à la
royauté, s'ils font partis du lignage royal. Le roi règne
entouré d'un conseil de notables qui sont les représentants des
clans familiaux. Leur présence à la cour royale est
matérialisée par un siège clanique dont l'emplacement est
bien identique et immuable. Actuellement, il y a dix huit (18) chaises à
la cour royale. Mais il y a trois chaises qui ne portent pas le symbole des
guerriers qui est le sabre. En effet, ces trois clans familiaux n'ont pas de
guerriers dans leur lignage. Car ils ne font pas partie des sept clans
familiaux qui ont créé ce royaume de Yaou.
? La notabilité ou
« mlanté34(*) »
Les notables, compte tenu de leur nombre important, sont
repartis en groupes de sept notables de justiciers qui siègent à
tour de rôle six (6) jours dans la semaine. Chaque groupe est
composé d'un président, de son adjoint et d'un porte-parole qui
joue également le rôle de messager. Tous les notables assurent le
tribunal permanent du roi. Ils appliquent les lois coutumières. Ils sont
choisis par les femmes les plus âgées des lignages, parce que le
notable représente la famille et en est le chef.
La désignation des notables, revient aux femmes les
plus âgées de la famille. Le prétendant à ce poste
doit être de mère abouré. Les acteurs qui ont pour
père un abouré ne peuvent pas être notables. Lorsque le
prétendant est choisi, il est présenté au roi au moment
venu à la cour royale, pour son investiture et son intronisation. Il est
très difficile de destituer un notable, mais il peut être suspendu
momentanément de ses fonctions en cas de faute grave. Si le notable est
malade, alors le groupe auquel il appartient prend contact avec la famille pour
voir la possibilité de le remplacer. La responsabilité revient
donc à la famille.
Le conseil des notables détient les pouvoirs
exécutif et judiciaire.
? Les chefs de quartiers ou
« fakoué35(*) »
Il existe deux quartiers à Yaou. Donc deux chefs
quartiers dans le village. Les deux quartiers du village sont :
Bégniri et Kumasi. Le chef du quartier est le représentant de la
population qui vit dans le quartier. Leur rôle est très important
dans l'administration des affaires du village. Le roi ne peut rien faire sans
les chefs quartier. C'est dans le clan familial Alliet Ehivet qu'on recrute les
chefs quartiers. Pour être chef de quartier, il faut être de
mère Abouré de Yaou . Les acteurs dont le père est
Abouré et la mère allochtone ou allogène sont
disqualifiés pour l'accession à ce poste.
?Le chef de terre
Ce poste appartient à un clan familial obouon ehivet
et ce depuis très longtemps. Son rôle est de faire les libations
pendant les cérémonies, et les libations pour confier le roi aux
ancêtres. Pendant la désignation du roi le chef de terre doit
donner son point de vue.
?Les chefs de générations ou
« orfouamanibé36(*) »
Pour être chef de génération, on
hérite de son père. Ce qui signifie que le père devrait
précédemment être chef de génération avant
que le fils ne soit chef de génération. Ici, les deux
catégories d'acteurs peuvent prétendre à cette fonction,
à condition que le père lui-même ait déjà
occupé ce poste.
Le chef de génération veille sur les membres de
sa génération, il veille aussi à l'éducation de ses
membres, il est le premier responsable des actes que les membres de sa
génération posent dans le village.
?Le porte canne ou
« kpamanpouè »
Le « pkamanpouè37(*) » est le porte
parole de la cour royale. C'est lui qui dévoile les décisions du
roi et des notables pendant une réunion ou une cérémonie.
Comme le roi et les notables ne doivent pas parler en public.
Pour être porte canne, il faut appartenir à la
génération atiblé ou bahoulé .
Les deux catégories d'acteurs issus du mariage
interethnique peuvent prétendre à cette fonction.
?Les griots ou
« orgbayèpouè38(*) »
Le rôle du griot en pays Abouré de Yaou est
d'annoncer dans le village le communiqué de la cour royal.
La fonction de griot commence à disparaître avec
l'arrivée de la radio de proximité de Bonoua. Quand il y a une
manifestation on fait passer un communiqué à la radio pour
informer la population.
Toute personne ayant une voix qui porte peut jouer le
rôle de griot. Il n'existe pas une famille particulière dont ce
poste est destiné. Et les descendants de mariage interethnique peuvent
être retenus pour être
« orgbayèpouè »
?La place des femmes
Dans la société Abouré de Yaou, les
femmes jouent un rôle très important. Elles sont la mémoire
de la société . Leur place importante dans la
société fait que les hommes les trouvent caractérielles. A
ce propos un enquêté dit ceci « les femmes abouré
ont un caractère de garçon, c'est pour cette raison que beaucoup
d'abouré homme vont chercher leur femme dans les autres
ethnies ». Les femmes dans la société Abouré de
Yaou sont chargées de régler seulement toutes les questions
liées à l'accession à l'héritage. Elles sont les
dépositaires du système d'héritage dans la
société Abouré de Yaou.
§ Organigramme de commandement du
village
Chef de génération
Population
Chef de terre
Chefs de quartiers
NOTABLES
ROI
ROI
NOTABLES
Chefs de quartiers
Chef de terre
ROI
ROI
ROI
Chef de terre
NOTABLES
Chefs de quartiers
Chef de génération
Population
II-3 STRUCTURATION CULTURELLE
Il sera question dans cette rubrique de décrire et
analyser les différents mécanismes de reproduction des coutumes
et valeurs sociales attachées à la communauté
abouré de Yaou. En d'autres termes de voir comment se construit
l'appartenance au groupe ethnique abouré de Yaou.
Au niveau culturel la société abouré de
Yaou est structurée par les classes d'âges, les
générations et la fête de génération .Ces
différents éléments sociologiques constituent des
institutions dans la structuration du système social et sont
déterminants dans le processus de socialisation pour un abouré.
Ils permettent la reproduction des valeurs et coutumes à travers les
initiations lors des fêtes de génération et dans le
quotidien des abourés.
Les générations, les classes
d'âges et la fête de génération
II-3-1- La génération
Elle est une unité sociologique d'individu mâle
regroupé par tranche d'âge. On distingue trois
générations A, B et C dont les promotions s'alternent de
manière cyclique dans le sens A, B, C puis B, C, A enfin C, A, B.
En pays Abouré, précisément à
Yaou, les générations se succèdent au pouvoir de
manière automatique, en douceur et dans la joie. Cette alternance du
pouvoir est inscrite depuis des siècles dans la conscience des
Abourés de Yaou. Elle n'est pas une vague idée, mais un
comportement respecté et vécu39(*).
Chez les Abourés de Yaou, il y a trois (3)
générations qui sont :
· N'nowe
· Noudjou
· M'ploussoue
Chaque génération est subdivisée en
quatre (4) classes et regroupe de deux à cinq cent personnes.
II-3-2- Les classes d'âges
La génération est subdivisée en quatre
classes d'âge (D, E, F, G). On distingue :
D-les Aînés (Attible)
E-les Cadets (Bohoule)
F-les Puînés né après un
frère ou une soeur (Tchagba)
G- les Benjamins (Djamian)
Les membres de la classe Attiblé sont des
hommes dont la moyenne d'âge se situe autour de 60 ans.
En raison de leur âge, ces hommes ont pour mission de
continuer à s'occuper des affaires du village et du pays en cas de
conflit armé. En un mot, les Attiblé sont les
décideurs du village. Ils réfléchissent et organisent.
Mais s'il y a une décision à prendre, ils
convoquent les trois autres groupes pour délibérer. S'il n'y a
pas de consensus, leur idée est rejetée.
Quant aux membres de la classe Bohoulé, ils
sont en général des hommes âgés de 45 ans à
50 ans : ce sont ceux-là qui votent les lois. La classe
Tchagba comprend les éléments masculins d'un quartier
dont la moyenne d'âge varie entre 25 et 30 ans. Ils sont les guerriers,
leur rôle est de veiller au bien être des populations
vulnérables ; enfant, femme et vieux. Enfin la classe
Djamian est la classe des benjamins ; les plus jeunes ont dix (10
ans), les plus âgés ont quinze ans. Ils sont entre ceux qui vont
au front et ceux qui surveillent. Ils ravitaillent ensuite en vivres et
évacuent les morts et les blessés au cours d'un conflit
armé.
En définitive, une classe d'âge
est « un ensemble d'individus » ayant
approximativement le même âge de l'un ou de l'autre sexe et qui,
sont organisées de manière cohérente en un groupe
socialement reconnu, soumis au rythme de passage ayant le même statut
dans la société globale et exerçant les mêmes
activités »
Dans la plupart des sociétés, il existe des
instances de socialisations qui échappent au contrôle
familial ; ce sont les masques (Wê, Dan, Sénoufo, Gouro,
Baoulé, etc.) et les classes d'âges chez les Abouré. A
l'intérieur de ces structures, les initiés apprennent sous la
direction spirituelle de leur maître, les secrets de la vie au sens large
du terme, façonne leur psychologie pour devenir des hommes accomplis,
courageux, généreux, honnêtes (Dedy S et Tapé
G : 1994). La formation est le fait d'une autorité collective et
s'appuie généralement sur des enseignements
ésotériques. Il noter que l'initiation a un caractère
obligatoire.
II-3-3- La fête de
génération
La fête de génération est
institué depuis la nuit des temps dans la société
abouré de Yaou .Chaque quartier du village organise sa fête de
génération et décide également l'intervalle entre
deux fêtes. Mais la structure ne varie pas, les articulations sont les
mêmes et les manières également ne sont pas
spécifiques à chaque quartier. La spécificité se
manifeste seulement au niveau du temps qui sépare deux fêtes.
Elle se déroule pendant une semaine, du lundi au
samedi.
Les deux premiers jours servent au nettoyage du village et
à la réflexion sur les préparatifs de la fête
proprement dite. Le mercredi sert de quartier libre aux membres de la
génération. Le jeudi est le début de la formation ou
l'initiation proprement dite. Cette étape s'articule en deux phases, la
première consiste à éprouver les membres de la
génération sur le plan physique. Et l'autre phase sert à
l'initiation des guerriers. En effet, les guerriers sont formés à
part car ils sont les protecteurs de chaque catégorie ou ils seront
affectés. La fête proprement dite est le samedi, jour ou les
aînés rendent public le classement de chaque homme dans les
différentes catégories. C'est-à-dire soit dans la
catégorie attiblé ou bahoulé ou tchagba ou tchamian. Cette
étape terminée tout le village passe à la phase festive de
la fête de génération. Il nous ait apparut important de
décrire la fête de génération, car c'est l'un des
champs sur lequel les données ne relèvent pas de production de
différenciation entre les descendants de mariage interethnique et
même entre eux et les descendants de mariage intra ethnique.
II-4- STRUCTURATION ECONOMIQUE
A l'instar de la Côte d'Ivoire, le succès
économique du village de Yaou repose sur l'agriculture, la pêche
et la fabrication du « koutoukou40(*) ». On note
également d'autres secteurs tels que le commerce et le transport. La
caractéristique de ce succès s'explique par le fait que les
richesses sont produites et détenues essentiellement par les
autochtones.
II-4-1 L'Agriculture
L'agriculture a permis à la population de Yaou de
réussir son envol économique. Deux facteurs justifient cette
réussite : d'une part, il y a l'esprit d'entreprise et de
concurrence qui animent les populations autochtones, et d'autre part, il y a
l'opportunité qui leur a été offerte de s'adonner
très tôt aux cultures industrielles, comme, l'ananas,
l'hévéa, le palmier à huile en plus du café et du
cacao déjà pratiqués dans presque toutes les
régions du pays.
La quasi-totalité de la population commence à
pratiquer plus la culture d'hévéa au détriment de la
culture d'ananas autrefois culture phare des abouré, dans la mesure
où elle procure plus de bénéfices que l'ananas
aujourd'hui. Ici donc, tout le monde s'essaie à cette culture.
Même les salariés et les cadres livrent une concurrence aux
paysans. Si l'ananas, le café et le cacao assurent des revenus
périodiques annuels, l'hévéa et le palmier à huile
permettent une mensualisation des revenus. De plus, avec la mévente de
l'ananas, la culture du manioc a pris une place stratégique dans
l'économie du village. La Plupart des femmes abourés ont
aujourd'hui une plantation de manioc. La culture du manioc à outrance,
a maintenant permis l'exportation de « l'atoupkou » et
« kouman » vers la ville d'Abidjan.
II-4-2 La pêche
Avec la proximité du fleuve Comoé qui traverse
le village de Yaou , la population de Yaou a développé un
attrait pour la pêche. Les produits de la pêche sont
convoyés à la sous préfecture pour être vendus. Dans
chaque concession, chaque chef de famille a une pirogue et un filet. Pendant
que les femmes modernisent la transformation du manioc, les hommes ne sont pas
en reste, ils perfectionnent leur technique de pêche.
II -4-3 La fabrication du koutoukou
Le développement de la culture du palmier à
huile a entraîné une activité intense de fabrication du
« koutoukou » .En effet, le koutoukou est une boisson
alcoolisée faite à partir du vin de palme. Cette boisson est
considérée comme l'eau de l'abouré . Dans le jargon
abouré cette boisson est communément appelée
« pitèce »41(*). Chaque jour des femmes viennent d'Abidjan, pour
l'achat cette boisson. Pendant nos entretiens, un fabriquant de cette boisson
nous fait la révélation suivante, « c'est notre cacao,
le flux de cent litres plein, on le vent aux femmes d'Abidjan à cent
vingt mille, ananas est tombé, cacao aussi est tombé c'est
koutoukou qui nous permet de vivre nous les jeunes ».
II-4-4 Le commerce
L'activité commerciale dans le village de Yaou est
considérablement variée. En effet, à Yaou, l'on trouve des
kiosques des restauratrices ambulantes et des restaurants, des maquis, des
jeux vidéo et des vidéos clubs, des buvettes de
« pitèce ». A coté de cette catégorie
d'activité, nous avons de nombreux points de vente d'aloko et de
beignets. Le samedi est le jour de marché. Ce jour là, des
vendeurs et vendeuses viennent de Bonoua ,de bassam et de moossou .
Mais il est formellement interdit aux allochtones et
allogènes de vendre l'atoupkou et l'attiéké .
II-4-5 Le transport
La plupart des transporteurs sont des autochtones. Et une
seule ligne compose l'itinéraire des transports à Yaou : la
distance Yaou ? Bonoua et bonoua? Yaou
II-5 STRUCTURATION DU SYSTEME DE PARENTE
Le système de parenté est un ensemble de
dispositions qui permettent à des personnes de vivre ensemble et de
coopérer selon les règles de la vie sociale. Elle est
basée sur la filiation ce qui détermine le caractère d'un
système de parenté, c'est la façon dont la filiation est
reconnue et établie. Il est important de signifier que la parenté
n'est pas un vase clos. Il est en rapport avec tout le système social
global. La structure de la parenté n'est pas basée sur le lien
biologique, mais sur les relations d'alliance. Ce qui lui confère une
nature culturelle et non biologique. Le caractère culturel de la
parenté se manifeste de manière différentiels les dans les
sociétés humaines. Ce qui nous introduit dans les logiques de
différenciation des groupes en interaction. En effet, le système
de parenté est différemment vécu et apprécier dans
les différents groupes ethniques. L'ethnicité des descendants de
mariages interethniques prend sa source dans le système de
parenté en vigueur dans la société Abouré de Yaou.
Le système de filiation en vigueur dans le village de
Yaou est la parenté matrilinéaire. Elle constitue la base de la
matérialisation de l'ethnicité des descendants issus du mariage
interethnique. L'accession aux relations de pouvoir est structurée par
le mode de filiation établit à Yaou. L'accession à
l'héritage, aux relations de pouvoir, à l'accès au foncier
sont exclusivement réservés aux acteurs dont la mère est
abouré. L'exclusivité dont nous faisons cas préalablement
signifie, que ces acteurs dans le cadre de l'accession au pouvoir ou la gestion
des biens familiaux, sont les seuls habiletés à postuler. Le
système matrilinéaire influence la structure des relations dans
les différents champs. Tout se fait et se défait selon la
filiation matrilinéaire à Yaou. Tous les mécanismes de
différenciation quelque soient leur mode de fonctionnement sont
structurés par la filiation matrilinéaire à Yaou.
II-6 LA STRUCTURE FAMILIALE DE YAOU
- La famille
Elle est regroupée en clans. Un clan selon le petit
Robert est une unité sociologique constituée d'individus se
reconnaissant en un ancêtre commun.
A l'origine, Yaou comptait sept (7) clans à savoir
agbessi ehivet42(*),
obouon ehivet, alliet ehivet, manmlé ehivet, allié ehivet,
samanté ehivet, vantouan ehivet, eyivévré ehivet. Pour des
raisons particulières, il a maintenant douze lignages. Face à
cette situation un autre conflit au niveau de la royauté
emmène les lignages à remettre en cause le statut de lignages
d'origines de certains lignages. Cette situation conduit le clan familial
agbessi et avo ehivet à contester le statut de lignage royal et vis
versa, le clan familial agbessi nie le statut de lignage royal à au clan
avo ehivet. Ceci dit voici l'ensemble des clans familiaux :
· agbessi ehivet
· Oboon ehivet
· Alliét ehivet
· manmlé ehivet
· voManmlé ehivet
· allié ehivet
· samanté ehivet
· Vantouan ehivet
· eyivévré ehivet .
· sapié ehivet
· avo ehivet
· adévéssé ehivet
De nos jours on dénombre donc dix huit (12) clans. Mais
avant de les citer, il faut remarquer qu'à Yaou, chaque clan est
symbolisé par deux chaises (ou Ebihin). Et on reconnaît
d'ailleurs les membres d'une famille par la chaise qui est la cellule sociale
de la famille. Yaou est donc un regroupement de clans familiaux. Depuis 1997
le village de Yaou n'a plus de roi. Un conflit entre deux clans qui se
disputent la chaise royale rend impossible la désignation du roi.
Tableau récapitulatif des clans familiaux et
des chaises à la cour royale
N°
|
Dénominations des clans
|
Familles-chaises
|
1
|
Agbessi ehivet
|
2 chaises
|
2
|
Obouon ehivet
|
2
|
3
|
Alliet ehivet
|
2
|
4
|
Manmlé ehivet
|
1
|
5
|
Vonamlé ehivet
|
1
|
6
|
Allié ehivet
|
2
|
7
|
samanté ehivet
|
2
|
8
|
Vantouan ehivet
|
1
|
9
|
Eyivévré
|
1
|
10
|
Sapié ehivet
|
2
|
11
|
Avo ehivet
|
1
|
12
|
Adévéssé ehivet
|
1
|
Total
|
12
|
18
|
- Logique de formation des couples mixtes
L'analyse des motifs de contraction des mariages
interethniques à Yaou révèle deux tendances de
motivations. Les données montrent que les autochtones qui contractent ce
type de mariage sont les hommes abouré. Les raisons que les acteurs
avancent pour expliquer cette disposition est la
suivante : « les femmes abouré ont le comportement
des hommes, très grossières et caractérielles ».
C'est ce discours qui légitime la réticence des hommes à
prendre en mariage les autochtones femmes. Dans la société
abouré, en particulier à Yaou , les opinions des femmes sur des
questions importantes est très déterminante dans le processus de
résolution des conflits . De ce fait, elles sont très
écoutées et leurs idées écrasent souvent celle des
hommes. De plus, avec la légende de la reine « abla
pokou », le rôle et la position des femmes se trouvent
être logés un cran au dessus de celui de l'homme, car ce sont
elles qui ont fait le sacrifice, afin d'échapper à l'ennemi.
L'analyse des données révèlent que les hommes,
fatigués de subir la position dominante des femmes sur les questions
d'ordre publique, mettent en place des stratégies pour échapper
à cette même situation au plan matrimonial. Le mariage
interethnique devient pour les hommes abouré un moyen de contourner la
position dominante des femmes. Car la suprématie des femmes
s'étend sur d'autres champs tels que : l'accession à
l'héritage et dans les relations de pouvoirs plus
précisément sur le choix des autorités à savoir le
roi et les chefs de familles qui sont les notables à la cour royale.
Ces différentes analyses montrent à quel point
la question genre est de mise dans la société abouré de
Yaou. Face à cette situation, nous cherchons à saisir les
motivations des conjoints allogènes et allochtones dans le processus de
formation des couples mixtes.
En effet, nous constatons que la plupart des conjoints
allochtones sont de sexe féminin, alors que beaucoup de restriction sont
faite à l'égard des allochtones et des allogènes sur le
plan économique et sur le plan l'activité agricole. Le fait de
contracter ce type de mariage constitue pour cette catégorie ethnique un
moyen de contourner ces restrictions. De plus, le mariage interethnique est
un moyen pour les conjointes, qui étaient des servantes dans les
ménages abouré de se repositionner de façon identitaire
et de se reconstruire un statut de meilleure qualité, que l'ancienne.
Car, dans un passé récent, elles étaient
catégorisées comme des servantes, donc des acteurs qui ne
devaient pas prendre position, mais plutôt des acteurs qui subissent les
positions et opinions de leur patron ou patronne. De ce fait, le mariage
interethnique revêt pour les conjointes allochtones et allogènes
des enjeux capitaux au niveau de leur insertion économique et au niveau
de la reconstruction de leur statut professionnel et identitaire dans le
village de Yaou .
III- LA QUESTION GENRE DANS LA SOCIETE ABOURE DE YAOU
La société abouré est très
marquée par la question genre. En effet, nous l'affirmons à cause
de la place importante que jour la femme dans la société
abouré de Yaou. Au niveau de l'organisation sociale les femmes
gèrent les questions cruciales à Yaou. A savoir la gestion de la
question de l'héritage, donc les détentrices du système
matrilinéaire. De plus se sont les femmes qui ont le dernier mot sur les
questions de désignation des chefs de famille, des notables, du roi et
des chefs guerriers. Tous ces éléments d'informations nous
emmène à réfléchir sur l'origine de cette position
importante des femmes dans la société abouré de Yaou.
Cette situation prend source dans le mythe de la reine Abla Pokou43(*) lors de la fuite du grand
groupe ethnique akan pendant la guerre au Ghana leur point d'origine selon
l'historien. Ce mythe à un effet de double structuration au niveau des
rapports intra ethnique et interethnique dans les interactions entre les
acteurs. Dans un premier temps ce mythe fonde la dichotomie entre le groupe
Akan et les autres grands groupes ethniques sous l'angle de leur origine,
c'est-à-dire que le phénomène des frontières
ethniques dans les relations interethnique s'explique aussi par la mise en
évidence de ce mythe, le discours d'un acteur justifie ce poit de vue
« c'est facile de se marier avec les baoulé, les Agni, les
Adioukrou, les Attiés, les Ebrié ». Dans un second
temps ce mythe produit l'idéologie selon laquelle se serait le neveu
qui serait légitime pour hériter des biens de son oncle et que le
« vrai abouré 44(*)» est l'acteur dont la mère est
abouré. C'est bien cette deuxième structuration qui fonde la
place importante qu'occupent les femmes dans la société
Abouré. Mais dans notre démonstration nous nous pencherons sur le
deuxième point, c'est-à-dire la position dominante de la femme
sur les hommes, structuré par le mythe de la reine Abla Pokou .En effet,
l'appartenance ethnique au groupe abouré de Yaou des descendants de
mariage interethnique se construit en fonction des normes matriarcale. Car les
enfants issus de mariage interethnique dont le père est abouré
sont construits comme ayant sa famille ailleurs. Donc celui-ci n'appartient pas
au groupe ethnique abouré de Yaou. Ceci révèle le statut
de la femme dans la société abouré de Yaou. Car la
définition de l'appartenance ethnique se définit selon les femmes
et l'appartenance à une classe d'age et la participation effective aux
activités de sa catégorie. Mais l'élément
déterminant dans l'appartenance ethnique est la
matrilinéarité. Le système matrilinéaire structure
l'appartenance ethnique dans le village de Yaou. La construction sociale de ce
système matrilinéaire à Yaou régit et filtre
l'intégration des ascendants et descendants de mariage interethnique au
niveau politique et au niveau de l'héritage.
De tout ce qui précède les femmes jouent un
rôle important dans la société abouré de Yaou. Et
ceci explique également le fait qu'elles sont peu à contracter
des mariages interethniques.
IV- LES MANIFESTATIONS DE L'ETHNICITE
Dans cette partie, nous présenterons les
différentes logiques de dichotomisation entre les acteurs issus du
mariage interethnique et ceux qui sont issus du mariage intra ethnique.
IV-1 ETHNICITE ET INTEGRATION DES CONJOINTS
ALLOCHTONES ISSUS DE MARIAGES INTERETHNIQUE
Concernant la manière dont les abourés
perçoivent, les conjoints allochtone ou allogène, nous pouvons
dire, que la population ne manifeste pas une hostilité ouverte envers
les beaux ou les belles. Mais la matérialisation des logiques de
différenciation est plutôt transférée au niveau de
l'ethnicité des enfants issus du mariage interethnique. Car, c'est au
niveau de leur ethnicité que les enjeux revêtent une
signification particulière. Le discours social qui conforte la
description de l'interaction entre les autochtones et leur conjoint ou
conjointe, les enfants issus et l'ensemble de la population villageoise est la
suivante : « nos enfants, c'est-à-dire ceux dont le
père est abouré de Yaou et la mère pas, doivent faire
beaucoup attention à leur parole.». Ce discours
révèle, que dans la société abouré, les
logiques de différenciation se formalisent sur les acteurs issus du
mariage interethnique. C'est donc sur les enfants que la société
abouré braque les yeux. Car, ils sont une menace pour la reproduction
des règles, normes institutionnelles. A ce sujet, une sélection
est opérée entre les acteurs issus du mariage interethnique. Sur
les différents niveaux de manifestation du pouvoir, la sélection
se matérialise par la disqualification des acteurs sociaux dont la
mère n'est pas abouré. Les acteurs justifient cette
sélection par le respect des normes du système
matrilinéaire. « Ici c'est le matrilinéaire, donc les
enfants dont la mère est abouré ont un statut et une
considération particulière face à ceux dont la mère
n'est pas abouré. » Parmi ces deux catégories d'acteurs
issus de ce type de mariage, il existe une ethnicité entre ces acteurs.
Nous constatons une ethnicité effective au niveau de l'accession au
pouvoir entre les deux catégories d'acteurs ci-dessus mentionné.
Le constat que nous faisons est le suivant : entre les deux
catégories d'acteurs issus du mariage interethnique, ce sont ceux dont
la mère est abouré qui sont considérés comme des
abouré à Yaou.
IV-2 ETHNICITE ET BLANCHIMENT DE LA GENEALOGIE
DU LIGNAGE AVO EHIVET
En effet, depuis 1997 le village de Yaou n'a plus de roi. La
raison est la remise en cause ou le blanchiment de la généalogie
du lignage précédemment autorisé à occuper la
fonction de roi. « Quand nous sommes sortis d'Egypte, la famille
royale était les avo éhivet. Arrivé sur le site actuel,
après des années de règne le roi m'BE
décède. Un problème se poser : la reine mère
n'ayant plus d'enfants de sexe masculin, il sera donc impossible de recruter
un autre roi dans le lignage avo éhivet. Un accord a donc
été trouvé entre la famille du porte canne du
défunt roi, pour que son porte canne soit roi jusqu'à ce que la
reine mère ait un enfant de sexe masculin. Après de ce pacte, la
reine n'a pas pu avoir d'enfant male et sa seule fille, malheureusement a
trouvé la mort. Dans les soucis de récupérer le
siège royal, la reine mère n'ayant plus d'enfant, va affranchir
ses esclaves femmes, pour les considérer comme ses enfants. Ces enfants
socialement construis aurons des maternités. C'est la naissance des
enfants de celles-ci qui va relancer les clauses du pacte
précédemment signé entre les familles ovoéhivet et
agbessiéhivet »
IV-3 ETHNICITE ET INTEGRATION SOCIALE DES CONJOINTS
ETRANGERS ISSUS DE MARIAGE INTERETHNIQUE
Les autochtones ayant contractés un mariage
interethnique savent que leurs enfants ne peuvent pas équitablement
accéder aux différents postes de pouvoir dans le village à
cause du fait que leur femme ne soit pas autochtone. Au niveau de
l'ethnicité des conjointes allochtones l'intensité des logiques
de différenciation est faible. En effet, au niveau de leur
ethnicité l'enjeu n'est pas investi d'une signification
particulière. Et la plupart des conjoints étrangers sont des
acteurs de sexe féminin. Elles étaient pour la plupart des
servantes dans le village avant de se marier avec un autochtone. Elles ont donc
préalablement construit des rapports privilégiés avec la
plupart des villageois. Elles sont également venues dans ce village,
depuis près de quinze ans en arrière. Sur le nombre total de
couples recensés, seul un conjoint est allogène burkinabé.
Pendant les premières heures de la crise socio politique, et pendant que
les autochtones chassaient les burkinabé. Il a été
épargné, tandis que ses concitoyens étaient
pourchassés. Le mariage interethnique qu'il a contracté a
masqué sa nationalité. En effet, le mariage interethnique a
contribué au blanchiment de sa généalogie, pour le
reconstruir comme un des leurs. « Dramane c'est notre frère,
il a marié notre soeur ». Ce discours social
révèle la capacité des mariages interethniques à
rendre poreuse les frontières ethniques. De plus, le mariage
interethnique est une stratégie pour contourner les restrictions
économiques à l'encontre des allochtones et allogènes dans
le village. Car cette catégorie ethnique ne doit pas vendre de
l'attiéké, l'atoupkou45(*) aux abords de la voie principale. Cette
décision a été prise il y a deux ans à la cour
royale par la notabilité. Il est important de signifier que
l'intégration de ces acteurs est limitée dans le temps et dans
l'espace. De plus, cette intégration comme pour les conjointes
allochtone se limite aux champs culturels, économiques, sociaux,
religieux.
IV-4 ETHNICITE ET APPARTENANCE ETHNIQUE
DES DESCENDANTS DE MARIAGE
INTERETHNIQUE
Selon le système de parenté en vigueur dans le
village de Yaou, les villageois distinguent deux catégories d'acteurs
issus de mariage interethnique. Ceux dont la mère est autochtone et ceux
dont le père est autochtone. La distinction n'est pas fortuite. En
effet, se sont les enfants dont la mère est abouré de Yaou qui
sont construits comme des autochtones, tandis que ceux dont le père est
abouré sont considérés comme des autochtones à un
degré moindre. Dans leur rapport quotidien, les autres acteurs leur
rappellent qu'ils n'ont pas de famille dans le village. Et que leur famille se
trouve dans leur village maternel .Cette dichotomie au niveau identitaire, qui
les présente comme n'étant pas des « abouré
pur »46(*),
implique leur disqualification sur les champs de structuration du pouvoir. En
effet, le contexte de crise identitaire qui secoue la Côte d'Ivoire
depuis le début de la crise, a contribué à exacerber les
restrictions définies à leur égard. De plus, cette
situation contribue à transformer la manière de voir et de
pratiquer l'intégration des minorités à Yaou. Ceci dit,
revenons donc à la question particulière de notre étude,
l'insertion des descendants issus du mariage interethnique à Yaou. Nous
constatons sur la question de l'intégration de ces acteurs, qu'elle est
différenciée sur les champs. En effet, nous constatons une
intégration sur quatre champs : culturel, économique,
religieux et social.
IV-5 ETHNICITE DES DESCENDANTS DU MARIAGE
INTERETHNIQUE ET RAPPORT DE POUVOIR
Nous avons constaté pendant nos enquêtes et le
séminaire de restitution auquel nous avons pris part, que l'enjeu que
révèle le champ politique est très sensible. Et ce sur
tous les champs d'étude où se déroule la même
étude. Au niveau politique, l'idéologie de l'autochtonie est
instrumentalisée à un double niveau de structuration des
rapports. Au niveau des acteurs issus du mariage interethnique, plus
précisément les enfants issus de ce type de mariage, cette
idéologie. contribue à mobiliser les villageois
à remettre en cause la pureté du sang des enfants de mariage
interethnique. Le discours social qui soutient cette idéologie est le
suivant : « ils ne sont pas de purs abouré ».
Ce qui produit donc l'exclusion de ceux ci dans l'exercice de rapports de
pouvoir. Sur ce champ, l'accession aux rapports de pouvoir des enfants issus de
mariage interethnique est différenciée. Selon le système
matrilinéaires seul les enfants dont la mère est abouré
peuvent prétendre à la notabilité, à être
chef de quartier, à être chef guerrier, à être chef
des notables, et si sa mère est du lignage royal, à la
royauté. La disqualification des acteurs dont le père est
abouré, s'explique par le rôle dominant de la femme dans la
gestion de la cité et dans la désignation des autorités du
village. En réalité l'éventail de privilèges
accordé aux acteurs dont la mère est abouré est plus
large, que celui des acteurs dont le père est abouré, ceci
démontre le rôle important mais latent que jouent les femmes dans
la société abouré de Yaou. . De plus, cette
réalité montre le recours inconditionnel des femmes dans la
résolution des conflits dans la société abouré de
Yaou. La disqualification des acteurs dont le père est abouré
révèle que les femmes sont les dépositaires des rapports
de pouvoir dans la société abouré de Yaou. Elles sont les
détentrices exclusives du privilège de désignation des
autorités du village. En d'autre terme, la place des femmes dans le
système social à Yaou est déterminante dans la
structuration des rapports dans notre champ d'étude. En poussant
l'analyse plus loin, nous constatons que la configuration de l'organisation
économique, politique, sociale, religieuse, symbolique, est beaucoup
influencé par la position des femmes dans le village. Cependant, se
sont les hommes qui dirigent et gèrent les affaires courantes dans le
village. Mais ces derniers, n'exécutent que les décisions prises
par les femmes.
IV-6 ETHNICITE DES DESCENDANTS DE MARIAGE
INTERETHNIQUE ET ACCESSION A L'HERITAGE
Justification historique du système
matrilinéaire
Elle est tirée de l'épopée de la Reine
Pokou qui caractérise le groupe Akan en Côte d'Ivoire. De
quoi s'agit-il ?
L'histoire enseigne que lors de l'exode du peuple
Baoulé du Ghana vers la Côte d'Ivoire, il devait traverser un
fleuve pour échapper aux poursuivants Ashanti. Il n'y avait pas
d'embarcation. Le devin consulté, prédit que le fleuve exigerait
un sacrifice humain. Celui d'un jeune enfant.
Lorsque le roi s'adressa à son épouse afin
qu'elle permit que son plus jeune fils soit livré au fleuve, elle opposa
un refus catégorique.
Compte tenu du danger qui menaçait le groupe, ce fut la
soeur du roi qui offrit son fils qu'elle portait dans les bras. Le roi
après incantation jeta l'enfant dans le fleuve et par miracle, un pont
artificiel formé par une colonne de caïmans traversant le fleuve de
part en part permit aux fugitifs de passer et d'avoir ainsi la vie sauve.
Depuis cette épopée, on décida que
désormais l'enfant hérite de son oncle maternel.
Nous constatons que les deux catégories d'acteurs
sociaux identifiées à la suite des données recueillies sur
le terrain, ont un accès différentiel au système
d'héritage en vigueur dans la société Abouré de
Yaou. Ces données révèlent que les acteurs dont la
mère est autochtone bénéficient d'un éventail de
privilège plus vaste du point de vue de l'accession à
l'héritage de leurs géniteurs, mais aussi au niveau de leurs
oncles croisés. Alors que ceux dont le père est autochtone ne
peuvent qu'accéder à l'héritage de leur géniteur,
que si les biens en question, ne sont pas du patrimoine familial. Le
système de recrutement des membres de la famille est un opérateur
de détermination de rôle, de statuts, de niveau
d'intégration dans la société Abouré de Yaou. Il
ressort donc de l'analyse que le principe d'accession à
l'héritage est un mécanisme de différenciation entre les
acteurs issus de mariage interethnique. Aussi, l'idéologie de la
matrilinéarité structure les rapports d'héritage dans la
société Abouré de Yaou. Le système
matrilinéaire est la sève nourricière de l'accession
à l'héritage. Car pour comprendre le système
d'héritage, il est important de saisir le système de
parenté en vigueur dans la société étudiée.
IV-7 ETHNICITE DES DESCENDANTS DE MARIAGE
ET ACCESSION AU FONCIER
Au niveau de l'accession au foncier, les données
relèvent deux tendances. Mais il est important en effet, de
préciser les représentations rattachées à la terre
en tant que bien. Dans la société abouré de Yaou on
distingue trois types de représentations liées à la terre
dans la société abouré de Yaou. La première
représentation est la suivante :
? « ebetié » terre lotie, qu'on
peut vendre à toute personne.
? La deuxième qualité est
celle-ci « obo » forêt non
déchiffrée, mais cultivable. La dernière
représentation liée à la terre est :
? « n'foué » terre
déjà travaillée.
L'énumération de ces trois
représentations révèle du point de vue symbolique un
système de hiérarchisation de la terre. Chaque
représentation renvoie à un ou des objectifs qui sont soit
communautaires, soient individuels. En ce qui concerne la terre
« ébetié » l'objectif communautaire qui en
ressort est le développement au sens de l'urbanisation. Cette
représentation de la terre amène les acteurs à ne pas
ériger des barrières entre les autochtones et les
allogènes dans le processus d'accès à la terre
« ébétié ». Toutes les
catégories ethniques en interaction sur le champ d'étude peuvent
accéder aux terrains lotis. Et ce, à cause de l'idéologie
du développement rattachée à cette représentation
de la terre. En effet, dans le processus de développement de la sous
préfecture de Bonoua, Yaou veut concurrencer avec le village de Bonoua
et de Mossou. Le village de Yaou veut prendre la revanche sur le passé,
car selon les acteurs par le récit de l'arrivée des
abouré sur le territoire au jour d'hui appeler Cote d'Ivoire disent
ceci « Lors de notre arrivée suite à la guerre qui
a déclenché dans le royaume du Ghana. Nous sommes arrivées
en groupe sur notre ancien site. Nous sommes arrivés ici les premiers
parmi tous les abouré. C'est pourquoi lorsqu'il y'a un
problème dans les autres villages abouré, c'est ici qu'on venait
le régler. Mais aujourd'hui c'est l'inverse ». Nous constatons,
que l'intégration des allochtones et allogènes sur la question du
foncier, au sens du lotissement, est motivée par l'idéologie du
développement.
L'analyse nous a permis de comprendre, que le foncier sous son
angle terre lotie n'est pas instrumentalisé par les acteurs comme un
mécanisme de différenciation dans le processus des rapports
interethnique. En d'autres termes, le foncier sous l'angle terrain loti ne
constitue pas un élément de définition de l'appartenance
ethnique.
L'objectif rattaché à la deuxième
représentation de la terre dans la société abouré
de Yaou est : la mise en avant de l'idéologie de l'autochtonie.
Cette idéologie de l'autochtonie se matérialise par l'exclusion
sur ce champ précis des autres catégories ethniques autres
qu'autochtone. Le sens rattaché à cette seconde
représentation de la terre pour les autochtones se perçoit dans
ce discours social « la forêt, c'est notre patrimoine, c'est
ce qui prouve que nous sommes arrivés les premiers sur les
lieux ». Propos d'un notable à la cour royale. L'analyse de ce
discours montre que la forêt est un moyen de reproduction et de
pérennisation de leur appartenance ethnique. De plus, elle constitue un
cadre d'affirmation de l'autochtonie. Ce discours révèle
également que la forêt non défrichée est un
héritage que les ancêtres leur ont légué. Dans la
culture abouré, les seuls acteurs qualifiés pour hériter
d'un quelconque bien communautaire sont les neveux utérins. Le lien de
parenté est un élément déterminant dans l'accession
au « obo ». En somme les acteurs sociaux instrumentalisent
la terre sous son angle « obo » comme un mécanisme
de différenciation entre eux et les autres groupes ethniques
présent à Yaou . Le prolongement de cette analyse permet de
constater que parmi les deux catégories d'acteurs issues du mariage
interethnique, ceux dont le père est autochtone sont aussi
disqualifiés dans l'accession au « obo ». Ce
mécanisme de différenciation structure à un double niveau
les rapports à la terre sous son angle forêt non
défrichée « obo ». Il permet d'écarter
non seulement une partie des descendants issus des mariages interethniques,
mais aussi les membres appartenant à un groupe ethnique distinct des
abouré de Yaou.
Il ressort de la dernière représentation un
objectif de convocation de l'idéologie de l'autochtonie ; le droit
de propriété est donc exclusif aux autochtones. Toutefois, sa
spécificité se matérialise par le fait qu'un allochtone ou
un allogène ou un acteur issu d'un mariage interethnique dont le
père est abouré peut bénéficier d'une
propriété temporaire. Il en découle un second objectif
économique. La mise en location de la terre dite n'foué est un
moyen pour les autochtones de capter des ressources financières. Nous
constatons que cette représentation à la terre
« nfoué » est utilisée par les acteurs comme
un mécanisme de différenciation entre eux et les
catégories ethniques présentent sur notre champ d'étude.
Après la mise en évidence des
représentations liées à la terre du groupe ethnique
abouré de Yaou, que nous révèlent les deux tendances
relatives à l'accession au foncier :
Les acteurs dont la mère est abouré de Yaou
peuvent hériter de tout bien privé et familial .Quant aux
acteurs dont le père est abouré de Yaou , ils ne peuvent
hériter qui des biens appartenant à leur père .
CONLUSION
La multiplicité des mariages interethniques au sein de
nos différentes sociétés africaines, soulève
beaucoup de préoccupations d'ordres scientifiques, que sociaux. En
effet, certains scientifiques confirment que la naissance des mariages
interethniques contribue à la destruction des préjugés,
des stéréotypes, attribués aux différentes ethnies
autres fois. Aussi permettent-ils d'effacer les frontières ethniques
entre les groupes ethniques en interaction. Face à ces constats, il
paraît évident de signifier que les mariages interethniques
constituent un facteur de consolidation de la cohésion sociale dans la
société.
Cependant, sommes-nous interroger sur les implications que
causent les mariages interethniques dans l'assignation et la désignation
des identités ethniques des descendants de ce type de mariage ?
Cette interrogation ouvre la réflexion sur la
manière dont les mariages interethniques, fabriquent l'ethnicité
dans nos sociétés rurales.
En effet, au cours de notre étude, nous avons
cherché à saisir les processus de construction des
identités ethniques des descendants de mariages interethniques dans la
société abouré de Yaou.
Car pendant que, la société en
général présente le mariage interethnique comme un facteur
de cohésion sociale. La réalité impose une autre lecture.
Il est donné de constater que les mariages interethniques produisent de
l'ethnicité à un double niveau de la construction de la
réalité. C'est à dire au niveau des conjoints et au niveau
des descendants de ce type de mariage. Mais dans le cas d'espèce, ce
sont les résultats sur le questionnement de l'ethnicité des
descendants que nous exposerons dans cette partie.
C'est dans cette perspective, que la question centrale qui a
structuré notre étude se présente de la façon
suivante : quels sont les mécanismes sociaux de
différenciation des descendants de mariage interethnique entre un ou une
abouré et un autre groupe ethnique ?
Il a s'agit tout le long de cette recherche, d'identifier et
d'analyser les mécanismes par lesquels sont construis les dichotomies
euxnous dans la société abouré de Yaou.
Dans le souci de comprendre la réalité
liée aux rapports interethniques sous l'angle des mariages
interethniques, nous avons émis une réponse provisoire afin de
cerner l'acceptation ou le rejet des descendants de mariage interethnique
à Yaou se structure de la façon suivante :
l'intégration et la différenciation des acteurs issus
de mariage interethnique dont l'un des conjoints est abouré de Yaou est
lié à la représentation sociale de l'autochtonie.
Il est donné de voir que, que dans le cas
d'espèce le concept d'autochtonie revêt une autre signification
particulière dans la construction de la réalité sociale.
En effet, le concept d'autochtonie est ici inextricablement lié au mode
de recrutement des parents dans la société abouré de Yaou.
La construction de l'identité ethnique se fait en rapport avec le
système matrilinéaire dans le cas d'espèce,
c'est-à-dire dans le village de Yaou.
Selon le système de parenté en vigueur dans le
village de Yaou, les villageois distinguent deux catégories d'acteurs
issus de mariage interethnique. Ceux dont la mère est autochtone et les
acteurs dont le père est abouré. La distinction n'est pas
fortuite. En effet, se sont les enfants dont la mère est abouré
qui sont construits comme des autochtones, tandis que ceux dont le père
est abouré sont considérés comme n'étant pas
autochtones sur certains champs. Dans leurs rapports quotidien, les autres
acteurs leur rappel qu'ils n'ont pas de famille dans le village. Et que leur
famille se trouve dans leur village maternel .Cette dichotomisation au niveau
identitaire, qui les présente comme n'étant pas des
« abouré pur » implique leur disqualification sur
les champs de structurant les relations de pouvoirs.
Nous avons constaté également que l'enjeu que
révèle le champ politique est très sensible. Et ceux dans
tous les villages où se déroule la même étude. Au
niveau politique l'idéologie de l'autochtonie est
instrumentalisée à un double niveau de structuration des
rapports. Au niveau des acteurs issus du mariage interethnique, plus
précisément les enfants issus de ce type de mariage, cette
idéologie contribue à mobiliser les villageois à remettre
en cause la pureté du sang des enfants de mariage interethnique. Le
discours social qui soutient cette idéologie est le suivant
« ils ne sont pas abouré pur ». Ce qui conduit
à les exclure dans l'exercice de rapports de pouvoir. Sur ce champ,
l'accession au rapport de pouvoir des enfants issus de mariage interethnique
est différenciée. Selon le système matrilinéaire
seul les enfants dont la mère est abouré peuvent prétendre
à la notabilité, au chef de quartier, chef guerrier, chef des
notables si sa mère est du lignage royal, à la royauté si
sa mère est du lignage royal.
La disqualification des acteurs dont le père est
abouré, s'explique par le rôle dominant de la femme dans la
gestion des affaires au sein du village et dans la désignation des
autorités du village.
Ces différents constats permettent d'affirmer que notre
hypothèse d'étude s'est confirmée au terme de notre
démonstration.
A propos des outils de collecte des données et
méthodes d'analyse ayant eu cours tout au long de notre étude, au
titre des outils et techniques de collecte des données, nous avons
opté pour l'entretien. Car il est approprié aux études
à perspective qualitative. De plus l'entretien permet au chercheur de
retirer des informations et des éléments de réflexion
très riches et nuancés. Plus précisément nous avons
utilisés une des variantes de l'entretien qui est l'entretien semi
directif.
Au niveau de la méthode d'analyse des données,
il a s'agit de convoquer l'analyse de contenu, car elle permet de traiter de
manière méthodique des informations et des témoignages qui
présentent un degré de profondeur et de complexité.
Ces différents éléments
méthodologiques annoncés nous ont permis d'aborder et d'expliquer
les différents thèmes structurant notre guide d'entretien. A
savoir :
·la description des représentations
liées aux mariages interethniques selon les catégories
ethniques.
La description des différentes institutions du
village.
La question du genre dans la société
Abouré de Yaou.
Les manifestations de l'ethnicité.
L'exposition et l'analyse des résultats structurant les
différents thèmes énumérés, conduisent
à retenir, que les descendants des mariages interethniques
méritent une attention particulière en terme de production d'une
littérature scientifique sur la dite question. Car la double
appartenance à différents groupes ethniques constitue soit un
avantage, soit un inconvénient au niveau de l'intégration des
descendants des mariages interethniques dans les villages d'origines de leurs
ascendants.
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minorités, mémoire de matrise Université de
Génève
TABLE DES MATIERES
AVANT-PROPOS ET REMERCIEMENT 1
TABLEAU DES SIGLES ET ABREVIATIONS 4
INTRODUCTION 5
CONTEXTE DE L'ETUDE 5
PREMIERE PARTIE CADRE THEORIQUE ET METHODOLOGIQUE
7
I- CADRE THEORIQUE 8
I-1- PROBLEMATIQUE 8
I-2- REVUE DE LA LITTERATURE 12
-La question de l'ethnie 12
-La question de l'ethnicité 14
-La question des frontières ethniques 20
-La question du mariage interethnique 21
I-3- OBJECTIF DE L'ETUDE 26
I-3-1- Objectif général 26
I-3-2- Objectifs spécifiques 26
I-4- MODELE D'ANALYSE 26
I-4-1- Hypothèse de recherche 26
I-4-2 Plan de vérification de l'hypothèse 27
I-4-3 Représentation sociale 27
I-4-4 Autochtonie 33
I45 Représentation sociale de l'autochtonie 37
II-CADRE METHODOLOGIQUE 39
II-1- DELIMITATION DU CHAMP DE L'ETUDE 39
II-1-1- Champ géographique 39
II-1-2- Champ social 39
II-2- METHODE D'ANALYSE: l'analyse de contenu 40
II-3- ENQUETE EXPLORATOIRE 42
II-4- TECHNIQUES DE COLLECTE DES DONNEES 43
II-4-1 La construction de l'échantillon des
enquêtés 43
II-4-2- Recherche documentaire 46
II-4-3- L'entretien 46
II-4-3-1 L'entretien semi directif
47
II-4-4- Dépouillement 47
II-4-5 Séminaire de restitution 48
II-5- L'ENQUETE 49
II-6 LES DIFFICULTES RENCONTREES ET LES IMPACTS
SUR
LA METHODOLOGIE 50
DEUXIEME PARTIE ANALYSE ET INTERPRETATION DE DONNEES
53
I- REPRESENTATION DU MARIAGE INTERETHNIQUE
ET ETHNICITE 54
A- DEFINITION DE LA REPRESENTATION 54
B- REPRESENTATION DES ALLOCTHONES 54
C- REPRESENTATION DES AUTOCHTONES FACE 56
AU PHENOMENE DU MARIAGE INTERETHNIQUE
II- STRUCTURATION DE L'ORGANISATION SOCIALE A YAOU 58
II-1 HISTORIQUE DE L'INSTALLATION DES ABOURE DE YAOU 58
II- 2 STRUCTURATION POLITIQUE 60
-La royauté 60
-La notabilité ou « mlanté» 61
-Les chefs de quartiers ou
« fakoué » 62
-Le chef de terre 62
-Les chefs de générations ou
« orfouamanibé » 62
-Le porte canne ou « kpamanpouè »
63
-Les griots ou
« orgbayèpouè » 63
-La place des
femmes........................................................63
-Organigramme de commandement du village 64
II-3 STRUCTURATION CULTURELLE 64
II-3-1- La génération 65
II-3-2- Les classes d'âges 66
II-3-3- La fête de génération 67
II-4- STRUCTURATION ECONOMIQUE 68
II-4-1 L'Agriculture 68
II-4-2 La pêche 69
II -4-3 La fabrication du koutoukou 69
II-4-4 Le commerce 70
II-4-5 Le transport 70
II-5 structuration du système de parenté 70
II-6 La structure familiale de Yaou 71
III- LA QUESTION GENRE DANS LA SOCIETE ABOURE DE YAOU 75
IV- LES MANIFESTATIONS DE L'ETHNICITE 76
IV-1 ETHNICITE ET INTEGRATION DES CONJOINTS
ALLOCHTONES ISSUS DE MARIAGES INTERETHNIQUE
77
IV-2 ETHNICITE ET BLANCHIMENT DE LA GENEALOGIE
DU LIGNAGE AVO EHIVET 78
IV-3 ETHNICITE ET INTEGRATION SOCIALE DES
CONJOINTS
ETRANGERS ISSUS DE MARIAGE INTERETHNIQUE 79 IV-4 ETHNICITE
ET APPARTENANCE ETHNIQUE
DES DESCENDANTS DE MARIAGE INTERETHNIQUE 80
IV-5 ETHNICITE DES DESCENDANTS DU MARIAGE
INTERETHNIQUE ET RAPPORT DE
POUVOIR 81
IV-6 ETHNICITE DES DESCENDANTS DE MARIAGE
INTERETHNIQUE ET ACCESSION A L'HERITAGE
82
IV-7 ETHNICITE DES DESCENDANTS DE MARIAGE ET
ACCESSION AU FONCIER 84
CONCLUSION 87
BIBLIOGRAPHIE 91
TABLE DES
MATIERES..................................................................99
ANNEXES...................................................................................103
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* 34 Notable en Abouré
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abouré de Yaou
* 36 Chef de
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Yaou
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* 40 Boisson alcoolisée
obtenue à partir du vin de palme
* 41 Boisson forte produite
artisanalement avec le vin de palme cuit associé à des tiges de
plante thérapeutique
* 42 Ce mot signifie famille en
abouré
* 43 Selon la legende de
peuplement du groupe ethnique Akan, elle était la reine mère
* 44 Discours social
désignant les descendants de mariage interethnique dont la mère
est abouré
* 45 Mets culinaire
abouré fait de poudre de manioc
* 46 Discous social designant
un descendant de mariage interethnique dont le père est abouré
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