PREMIERE
PARTIE :
Origine de la protection des Droits de l'Enfant en Mauritanie
En Mauritanie, les enfants sont confrontés à de
nombreuses difficultés qui constituent un obstacle à leur
développement et leur plein épanouissement. Notamment certaines
catégories d'enfants, c'est-à-dire les plus diminues qui sont
ceux de la rue, les mendiants, les enfants au travail, les enfants
handicapés..., ont conduit à une prise de conscience collective
et particulièrement celle des autorités publiques.
Face donc à de telles conditions, nous allons essayer
de voir d'une part la problématique de la situation des enfants en
Mauritanie (chapitre 1) et ensuite voir comment cette prise de conscience et
cette volonté de protéger l'enfant se sont
caractérisées, d'où l'apparition de la protection des
droits de l'enfant en Mauritanie (chapitre 2).
Chapitre1 : Situation difficile de l'Enfant en
Mauritanie
La situation de l'enfant en Mauritanie reste de plus en plus
critique, étant donné que l'environnement dans le quel il se
trouve est peu favorable à son développement, car plusieurs
facteurs freinent l'évolution des droits de l'enfant . Le jeune
mauritanien est très souvent livré à lui-même et il
se retrouve dans les rues où il est susceptible d'affronter le pire. Les
enfants sont de plus en plus vulnérables, ils sont tantôt victimes
d'exploitation, tantôt victimes de certaines formes de maltraitances ou
même objet du tourisme sexuel, cette pratique qui est devenue monnaie
courante de nombreux pays va à l'encontre de plusieurs principes des
droits de l'homme.
On examinera dans ce qui suit les différentes formes
d'exploitations que les enfants peuvent subir (section 1) et ensuite faire une
analyse plus approfondit de la vie des enfants en situation difficile (section
2).
Section 1 : Exploitation des Enfants
L'exploitation des enfants soit à des fins
économiques soit à des fins sexuelles, qualifiée
aujourd'hui de haute criminalité, n'est pas un phénomène
nouveau.
On a toujours eu à recourir à cette main
d'oeuvre très « rentable », mais on a
constaté son accroissement à la fin du 20 et début du
21eme siècle. Cette exploitation est parfois liée
à l'appauvrissement de certaines zones et parfois elle peut être
la conséquence des conflits armés, comme c'est le cas des pays
d'Afrique en conflit. Nous allons voir d'une part l'exploitation sexuelle des
enfants (paragraphe 1) et ensuite celle qui consiste à exploiter les
enfants à des fins sexuelles (paragraphe 2) et les autres formes de
violences infligées à l'enfant (paragraphe 3).
Paragraphe 1 : Exploitation Economique
Selon les rapports du bureau international du travail (BIT),
dans le groupe d'enfant de 5 à16 ans, un sur six soit deux cent quarante
six millions est astreint au travail2(*). L'exploitation économique sous ses pires
formes est une réalité quotidienne pour les enfants dans toutes
les régions du monde particulièrement dans les pays en voie de
développement.
Malgré les nombreuses stratégies, mesures et
mécanismes qui ont été mis en place pour la protection de
l'enfant face aux pires formes de travail, la question ne semble pas être
résolue. Le travail des enfants devient de plus en plus un
phénomène mondial auquel aucun pays ni aucune région du
monde n'échappe. Les crises de toutes sortes, catastrophes naturelles,
chocs économiques, pandémies du VIH /SIDA et conflits
armés ont notamment pour effet de pousser un nombre croissant de jeunes
vers les formes de travail débitantes, parfois illégales et
clandestines comme la prostitution, la pornographie et d'autres
activités illicites. Certains enfants sont assujettis à des
travaux relevant des pires formes de travail car il s'agit d'activité
intrinsèquement condamnable comme l'esclavage que l'on retrouve de plus
en plus en Mauritanie malgré les textes sur l'abolition de l'esclave, la
traite, la servitude pour dettes et autres formes de travaux forcés
comme le recrutement en vue de participer à des conflits armés.
Agés de 5 à 17ans, la plus part de ces enfants
travaillent en plein temps et la majorité de ces enfants travaillent
dans l'agriculture, l'artisanat ou encore par exemple en Inde où
certains enfants travaillent dans la manipulation du four où coule le
verre fondu ou plus loin encore au Népal où les enfants sont
confrontés à la fabrication du tapis. Mais la plus part des pays
on retrouve les enfants dans les champs, dans les mines, les ateliers ou dans
les cuisine. Parmi les secteurs cités, l'agriculture reste la grande
utilisatrice d'enfant. C'est ce qui expliquait l'accroissement du taux de
natalité dans l a plus part des pays d'Afrique, particulièrement
dans les campagnes.
La mortalité, la malnutrition et
l'analphabétisme presque partout plus élevés dans les
campagnes que dans les villes, car dans les grandes entreprises qui s'y
trouvent la réglementation sur l'âge et la durée du travail
est en général respecté ce qui au contraire n'est pas le
cas des petites entreprises ou des petits ateliers non déclarés
qui utilisent abusivement cette main-d'oeuvre très économique.
En Mauritanie on retrouve des enfants qui travaillent comme
domestique, généralement des petites filles, elles sont en
général loué ou même vendus à des familles
plus riches. Dans l'immense majorité il s'agit de fillettes souvent de
moins de treize ans, issues de famille très pauvres et qui habitent chez
l'employeur qui les exploite sous toutes les formes et à toutes les
fins.
Concernant la situation des jeunes travailleuses, le
Comité des droits de l'enfant relève que « des filles
âgées de moins de 15 ans faisaient souvent le même travail
domestique que des femmes adultes ; ces occupations n'étaient pas
considérées comme du « travail véritable » et
n'étaient donc jamais prises en considération dans les
donné statistique3(*).
Une enquête de l'UNICEF a mis en évidence la
précarité des conditions de vie des filles domestiques et les
problèmes de protection qui se posent à leur égard : 70%
des filles domestiques ont entre 12 et 14 ans et 18% sont âgées de
moins de 11 ans. Un quart d'entre elles ne sont pas
rémunérées, les autres gagnent entre 1000 et 4000 UM (3
et10 euro) par mois, et ce sont souvent leurs parents qui perçoivent le
salaire. 74% sont issues de familles vivant dans des conditions
précaires et 45% viennent de familles séparées. Dans
près d'un cas sur trois (30%) de leur famille est sans ressources, leurs
parents étant soit tous deux au chômage, soit
décédés. 90% de ces jeunes filles ont été
privées de tout enseignement.
Une majorité d'entre elles (56%) étaient
Harratines, 28% étant d'origine Poular, 10% d'origine Wolof et 5%
Soninké.
Selon l'article 32 de la CDE spécifie l'enfant doit
être protégé contre tout
travail mettant en danger sa santé, son
éducation ou son développement. Le code mauritanien qui vient
d'être révisé fixe l'âge minimum d'admission à
l'emploi et réglemente les conditions de travail. Le Code mauritanien du
travail, fixe l'âge d'admission au travail à 14 ans, sauf
dérogation par arrêté du Ministre du Travail. Il est
important que les nouvelles dispositions améliorent la protection des
enfants en instaurant l'âge de 15 ans, correspondant à ce qui est
requis par la Convention n°138 sur l'âge minimum qui a
été ratifiée par la Mauritanie
Malgré, la ratification de la Mauritanie des
différentes conventions relatives au travail des enfants, ce fait reste
ancré dans une pratique sociale et culturelle très ancienne.
Dans la société traditionnelle en effet,
quelque soit le groupe ethnique, l'enfant pratique différents travaux et
activités dès son jeune âge, selon le milieu auquel il
appartient4(*). Les
garçons sont impliqués dans des travaux productifs hors du
domicile (activités agricoles, garde des troupeaux...), alors que les
filles pratiquent différents types de travaux domestiques (transport de
l'eau, garde des enfants, entretien de la maison...). C'est ce qu'on appelle un
apprentissage progressif qui favorise leur intégration dans la
communauté et le groupe social.
Selon des données du recensement de 20025(*), 30 000 enfants de 10 à
14 ans
travaillaient, les deux tiers étant occupés dans
les travaux de l'agriculture et de
l'élevage. Ainsi, 9% des agriculteurs et 13% des
éleveurs avaient entre 10 et 14 ans. Les enfants travailleurs
représentaient 7,4% de la population active occupée. Parmi eux,
les filles représentaient le tiers des effectifs. Moins souvent
occupées dans l'agriculture ou l'élevage que les garçons.
Le taux d'activité des enfants était particulièrement
élevé dans la région du Rural Fleuve, alors qu'il
était par contre insignifiant en milieu urbain.
De ce fait il en découle des conséquences
très graves sur la santé et aussi sur l'avenir de l'enfant. Dans
le plus part des activités effectuées par les enfants, les
risques d'une détérioration rapide de leur santé sont
importants. L'utilisation des produits chimiques dans les cas des industries.
Les enfants qui travaillent dans la construction ont des troubles de
croissance et des déformations en raison du port de charge trop lourd.
Les enfants qui travaillent dans les carrières et les mines sont
exposés à la silicose et ceux qui prostituent sont de plus en
plus fréquemment atteints du VIH SIDA. Depuis ces dix dernières
années on remarque en Mauritanie une évolution
considérable de la prostitution juvénile liée
essentiellement à l'appauvrissement du pays. Pour la plus part
d'entre eux, ils sont condamnés à l'analphabétisme
à vie car ils ne vont pas à l'école. Isolés,
souvent privés de leur famille, ils souffrent de carences effectives
dont ils risquent de garder les séquelles à vie.
La persistance d'enfants au travail demeure donc un
phénomène fréquent, et ceux-ci sont d'autant plus
pénalisés dans un contexte de généralisation de la
scolarisation. Un glissement s'est par ailleurs opéré dans la
nature du travail demandé à certains enfants, qui a cessé
de ce fait d'être une pratique sociale favorisant leur
épanouissement pour se muer en une exploitation économique
préjudiciable à leur intérêt. Ce glissement est
consécutif au bouleversement des modes de vie qui a
résulté des grandes sécheresses des années 1970,
avec notamment la sédentarisation, l'urbanisation, la dislocation des
réseaux sociaux et la montée des rapports marchands.
* 2
www.travailenfants.com/rapport bit
* 3 Rapport sur la 8eme session
du comité des doits de l'enfant,2001, UNICEF
* 4 Ou Lafdal M. et Sow A.,
Etude sur les orphelins et autres enfants vulnérables, Rapport final,
MSAS/DAS -
UNICEF, octobre 2003
* 5 « Etude sur le
travail en Mauritanie », Fall. B.UNICEF, décembre 2003
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