1.2. Les éléments minéraux du sol
1.2.1. Notion de facteur limitant et loi de Liebig
Le facteur limitant est le facteur qui va conditionner la
vitesse ou l'amplitude d'un phénomène plurifactoriel à un
moment précis. A ce moment là, tous les autres facteurs
permettant la réduction de ce phénomène sont en
excès par rapport au facteur limitant. Le concept de quantité est
très important, une modification des propriétés peut
changer la nature du facteur limitant.
Cette notion semble être apparue en XIXeme
siècle dans le cadre des recherches agricoles mais est
utilisée dans de multiples domaines (en agriculture, en alimentation, en
chimie en écologie etc.). En agriculture, elle désigne les
composantes du sol et a été formalisée en 1912 par la loi
de Liebig sur le minimum.
La loi du minimum ou loi des facteurs limitants, est l'un des
principes les plus importants de l'agronomie pratique. Sous sa forme
théorique initiale, donnée par Liebig vers 1850. Dans sa
théorie de l'alimentation minérale des plantes, elle
énonce que « le rendement d'une culture est limité par celui
des éléments fertilisants qui le premier vient à manquer
(soit N ou P, K, Mg etc.) et qu'il convient de compenser le manque par un
apport, sous forme d'engrais minérale, complétant le ou les
éléments en quantité suffisante». La figure 1 montre
que l'azote constitue le facteur limitant le rendement des cultures.
Figure 1 : Dessin
illustrant la loi de Liebig
1.2.2. Les éléments minéraux et leur
importance pour la plante
Pour l'accomplissement de son cycle végétatif,
le maïs, aussi bien d'autres plantes a besoin de nombreux
éléments nutritifs, mais en proportions variées, comme
l'affirme la revue Agromaïs N0 45 (1986).
Selon Aldrich et al, (1975); IFA, (1992); Mengel et Kirkby.
(1987); on distingue habituellement seize éléments indispensables
aux plantes.
Les éléments absorbés par les plantes ne
viennent pas tous du sol (Aldrich et al, 1975 ; Bertrand et Gigou, 2000;) :
- Le carbone (C), contenu dans le CO2, provient de
l'air;
- L'hydrogène (H) et l'oxygène (O), principaux
constituants de l'eau;
- Une partie de l'azote (N) provenant de la fixation
atmosphérique et de quelques apports sur les feuilles par l'air ou l'eau
de pluie.
Les éléments nutritifs, sont classés du
point de vue agronomique sur l'importance quantitative et leurs rôles en
:
- Eléments majeurs : N, P, K
- Eléments secondaires: Ca, Mg, S
- Et oligo-éléments: Fe, Z, Cu, B, Mo, Co
Considérés comme indispensables en
quantité importante pour la croissance des plantes, les
éléments minéraux sont limités par des
quantités disponibles; leur étude dans la gestion et le maintien
de la fertilité et par conséquent l'augmentation de la production
grainière s'avère nécessaire.
1.2.2.1. Azote (N)
L'azote (N) est le facteur principal de la croissance des
plantes et du rendement des cultures (FAO, 1980). En effet la plupart des
systèmes de cultures non légumineuses exigent l'apport d'azote,
particulièrement les variétés à haut rendement. Sa
déficience dans le sol devient un obstacle à la production. C'est
ainsi que des études ont été conduites en vue d'une
utilisation efficace des engrais azotés, enfin de limiter des pertes en
azote sous forme de nitrate et des pollutions des nappes aquifères
(Madgoff et al, 1984 ; Roth and Fox, 1990 ; Angle et al, 1996 ;
Randall et al, 1997 ; Sogbedji et al, 2000 ; Fofana et al, 2002),
mais la gestion efficace de l'azote reste un défit à relever
à cause de la complexité associée à la dynamique de
l'azote dans le système sol- plante-atmosphère (Kladivko et al,
1991 ; Van Es et al, 1991).
a. Importance de l'azote dans la nutrition des
plantes
L'azote est l'un des éléments nutritifs
utilisés par les plantes (Bado, 2002). C'est le quatrième
constituant des plantes qui est utilise dans l'élaboration de
molécules importantes comme les protéines, les
nucléotides, les acides nucléiques et la chlorophylle (Epstein,
1972).
L'azote favorise l'utilisation des hydrates de carbone,
stimule le développement et l'activité racinaire, favorisant
ainsi l'exportation des autres éléments minéraux et la
croissance des plantes (Stevenson, 1986). C'est donc le pivot de la fumure
(Gros, 1967) Il est essentiel pour la synthèse des enzymes de la
photosynthèse (Lamaze et al, 1990).
D'autres rôles lui sont attribués tels que retard
de la sénescence et de la maturation ; il contribue souvent aussi
à un affaiblissement des résistances mécaniques de la
plante (verse des céréales) et leur conférer une plus
grande sensibilité à certaines maladies cryptogamiques (Vilain,
1993).
Les plantes absorbent l'azote sous forme de nitrates
(NO3-) et d'ammonium (NH4+).
L'importance relative de chacune de ces formes dépend de l'espèce
végétale et des conditions du milieu (Layzell, 1990 ;
Hageman, 1984).
Une carence du sol en azote se traduit chez les plantes
céréalières et particulièrement chez le maïs
par le jaunissement, signe principal qui apparaît d'abord sur des
vieilles feuilles en forme de "V" des extrémités des feuilles qui
se dessèchent prématurément ; une taille
réduite (Bertrand et Gigou, 2000).
· Action de l'azote sur le rendement des
cultures
L'alimentation en azote détermine directement le
rendement potentiel. Aussi l'effet de l'azote sur le rendement est
spectaculaire et l'azote est considéré comme le pivot de la
fertilisation (Bertrand et Gigou, 2000).
En effet l'importance de l'azote pour l'obtention des
rendements a été soulignée par plusieurs auteurs. C'est
ainsi que des études de l'IRAT (1973 - 1980) souligné par Dossa
(1991) portant sur la réponse des céréales à la
fertilisation azotée des céréales à la
fertilisation azotée à Kitangbao au Togo ont montré qu'un
apport croissant de quantité d'azote - engrais de 0 à 90
unités fertilisantes / ha augmente le rendement grain du maïs par
unité d'environ 26 kg L'azote constitue de ce fait le facteur limitant
le rendement des cultures. Par ailleurs l'action excessivement intense de
l'azote sur la plante a des revers : excès de la biomasse, retard
des plants à la maturité, une sensibilité plus grande aux
maladies cryptogamiques et une tendance à la verse des
céréales. C'est pourquoi son emploi est plus délicat que
celui des autres éléments ; d'autres auteurs dont Gros
(1979) l'ont affirmé qu'au fait :
- Une fumure azotée rationnelle doit tenir compte des
reliquats minéraux existant déjà dans le sol; des
possibilités de minéralisation de la matière organique
évoluée et des résidus de récolte récemment
enfouis ;
- Cette fumure doit s'effectuer avant des périodes
critiques de la récolte ;
- Le mode d'épandage devra être le plus
efficace.
D'une façon générale, il en sort qu'il
existe une relation étroite entre l'azote et le rendement des cultures,
une relation résumée par la loi énoncée par
MITSCHERLICH : En cas d'apports au sol de doses croissantes
d'éléments fertilisants, les augmentations des rendements obtenus
sont de plus en plus faibles au fur et à mesure que les quantités
s'élèvent et que la récolte est proche de son maximum
(Gros, 1967).
C'est ainsi que sur une courbe représentative des
rendements en fonction des doses d'un élément fertilisant (figure
ci-après), on observe que le maximum, une fois dépassé, un
apport supplémentaire non seulement provoque une dépression mais
n'est pas nécessairement économique.
Figure 2 : Courbe
illustrant la loi de MITSCHERLICH.
b. Principales sources d'azote
Ø Le sol
Des expériences réalisées sur le
maïs et sur le riz (Chabalier, 1976); sur le sorgho (Gigou et Dubernard,
1979) et sur le mil (Ganry et Guiraud, 1979 ; Ganry, 1990) ont permis
d'observer que l'azote du sol est prépondérant dans la nutrition
azotée des plantes; soit près de deux fois la part des engrais
dont le coefficient réel d'utilisation varie de 30 à 45%.
La première source d'azote organique utilisée
par les plantes est l'azote du sol. En absence de tout apport d'engrais, les
plantes non fixatrices d'azote utilisent l'azote du sol durant leur cycle
physiologique. Chaque type d'amendement influe selon sa nature sur la
fourniture de l'azote et sur les propriétés physico-chimiques et
biologiques du sol. La qualité des amendements organiques et leur
capacité à fournir l'azote sont généralement
évaluées par leur rapport C/N (Stevenson, 1984).
Ø Les amendements organiques
Les résidus organiques laissés sur le sol
après les récoltes constituent une litière temporaire.
Plusieurs études effectuées en Afrique de
l'Ouest (Adjetunji, 1997 ; IFDC, 1990,1992 Saragoni et al, 1992) ont
montré que l'incorporation des résidus de récolte issus de
la culture de maïs ont significativement augmenté les
rendements.
Cependant, dans la plupart des pays d'Afrique, les
résidus de récolte sont souvent exportés des champs pour
d'autres utilisations (Poss et al, 1997).
Ø Les engrais minéraux
L'azote du sol et des amendements organiques ne suffisent pas
pour atteindre des rendements optimums (Bado, 2002). Des engrais azotés
sont utilisés comme complément d'azote pour augmenter les
rendements et intensifier la production végétale.
Cependant leur utilisation est faible à cause de
coûts relativement élevés comparativement aux faibles
revenus des producteurs. L'engrais enrichit le sol. En effet les sols qui
reçoivent régulièrement des engrais permettent d'obtenir
des rendements plus élevés et une bonne réponse aux
engrais : on parle d'un effet " vieille graisse " (Morel et al,
1994 ; Boniface et Trocmé, 1988 ; Bosc, 1988 ; Bertrand
et Gigou, 2000) car souvent sur un sol épuisé, même en
apportant de fortes doses d'engrais, on arrive pas à atteindre un
rendement aussi élevé que celui obtenu sur les sols
régulièrement fertilisés.
Par ailleurs, bien que l'importance des engrais azotés
ait été bien établie, leur utilisation reste très
limitée en Afrique de l'Ouest à cause du coût
élevé de l'azote, l'inefficacité du système de
distribution, les politiques agricoles inadéquates, le faible taux de
recouvrement des engrais azotés et d'autres facteurs
socio-économiques. Ces dernières années, les chercheurs se
sont penches sur d'autres moyens moins coûteux pour apporter l'azote dans
les systèmes de cultures et notamment sur la rotation
légumineuses et céréales. Les légumineuses sont
reconnues pour augmenter la fertilité du sol à cause de la
fixation symbiotique de l'azote (Bationo et al, 1993 ; Stoop et Staveren,
1981 ; Reddy et al, 1992).
Ø Les plantes fixatrices d'azote :
importance des légumineuses dans les systèmes de
culture
La plus grande partie de l'azote de la biosphère (79%)
se trouve dans l'atmosphère (Haynes, 1986 ; Foth, 1990). Mais, seul
un nombre réduit de genres bactériens vivant librement ou en
symbiose avec les plantes sont capables de réduire l'azote
moléculaire de l'atmosphère. Par la symbiose entre les
bactéries réductrices de l'azote atmosphérique, une grande
partie des légumineuses utilisent principalement l'azote provenant de
l'atmosphère. Dans une revue de littérature, Peoples et al,
(1995) donnent le potentiel de fixation de l'azote atmosphérique par les
légumineuses. Les légumineuses tropicales comme
niébé (Vigna unguiculata), l'arachide (Arachis
hypogea) et le soja (Glycine max) peuvent fixer respectivement 32
à 89, 22 à 92 et 0 - 95% de leur besoin en azote dans
l'atmosphère (Bado, 2002). Comme on le constate, les quantités
d'azote fixé sont très variables d'une espèce à
l'autre et pour une même espèce car l'activité symbiotique
est influencée par les souches bactériennes, l'espèce
végétale et les facteurs du milieu (Wani et al, 1995).
Dans les systèmes de culture utilisant les rotations,
l'azote fixé par les légumineuses peut être utilise d'abord
par les légumineuses, puis par les cultures suivantes (Bado, 2002).
En effet, les rotations culturales ont des avantages bien
connus et ne sont plus à démontrer. Des études
réalisées par Bationo au Niger en 1995 sur les effets de l'azote
et des systèmes culturaux sur la production du mil (Pennisetum
thyphoïdes) a donné des rendements faibles à travers
tous les taux d'azote que lorsqu'il était en rotation avec le
niébé (Vigna unguiculata) ou l'arachide (Arachis
hypogea). D'après les travaux de Bagayoko et al, (1996 et 2000), le
niveau de rendement de mil après un précédent
niébé est équivalent à celui que produiraient 40
unités fertilisantes d'azote par hectare. Les résultats de
recherches réalisés au Nigeria montrent un effet résiduel
du niébé, équivalent à 36 kg d'N/ha/an pour la
céréale suivante (Eaglesham et al, 1982).
Les mêmes études conduites au Nigeria avec le
pois (Cajanus cajan) en rotation avec le maïs ont montré
une augmentation de 50% par rapport à une culture pure de maïs
(Hulugalle et al, 1986).
Au Togo et au Ghana, le niébé, le pois
(Cajanus cajan) et l'arachide, en rotation avec le maïs ont
significativement augmenté les rendements de maïs (IFDC, 1990,
1992,1993 ; DRDR, 1987).
Des résultats similaires ont été
rapportés par MacColl (1989) au Malawi où les rendements du
maïs a augmenté de 2,8 kg / ha en rotation avec le pois par rapport
à la continue de maïs.
Par ailleurs les légumineuses de couverture en rotation
ou en association avec le maïs ont été conduites en Afrique
sub-saharienne dans le but de surmonter la dégradation de la
fertilité des sols et d'améliorer le rendement de maïs.
Ainsi, les plantes de couverture comme lablab (Lablab purpureus) et
mucuna en rotation ou en association avec le maïs (Sanginga et al,
1996 ; Galiba et al, 1998 ; Sedga et Toe, 1998, Mayong et al, 1999)
ont amélioré la fertilité des sols ainsi que le rendement
du maïs.
Toutefois, le fait que les légumineuses de couvertures
produisent une biomasse importante et que celle-ci reste dans les champs
expliquent une meilleure restauration de la fertilité des sols que les
légumineuses à graines (Sedga et al, 1998). En plus de cela, les
légumineuses de couvertures offrent l'unique opportunité de
résoudre les problèmes de l'invasion des mauvaises herbes (Carsky
et al, 1998 ; Elbasha et al, 1999).
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