Table de matières
INTRODUCTION
3
1 CADRE THÉORIQUE
6
1.1 De la langue, système de signes, aux
interactions multimodales
6
1.1.1 De la langue-système à la langue instrument
de communication
6
1.1.2 Le schéma de la communication
8
1.1.3 La communication en situation
9
1.1.4 La communication non-verbale
10
1.1.5 Les actes de langage et l'interaction
10
1.1.6 L'interaction en classe de langue et les
énoncés métalangagiers
10
1.2 La communication médiatisée par
ordinateur (CMO)
10
1.2.1 Interaction plurisémiotique en ligne
10
1.2.2 Organisation séquentielle et interactionnelle
10
1.2.3 Dimension techno-sémio-pragmatique :
icônes et émoticones
10
1.2.4 Les médias, la communication médiatique et
médiatisée
10
1.2.5 Communication électronique et types de discours
10
1.3 Des TICE à la CPMO
10
1.3.1 Les médias et les TICE, de l'EAO à l'ACAO
10
1.3.2 Interactivité homme-machine et interaction humaine
10
1.3.3 FLE-FAD, systèmes et dispositifs
10
1.3.4 La communication pédagogique
médiatisée par ordinateur (CPMO)
10
2 METHODOLOGIE
10
2.1 Choix et type de données
10
2.1.1 Justification du choix des données
10
2.1.2 La saisie des observables et la constitution du corpus
10
2.2 Démarche de construction d'un modèle
10
2.2.1 Observation et présentation des données
10
2.2.2 Approche systémique
10
2.2.3 La modélisation
10
2.2.4 Domaines ou niveaux d'analyse
10
3 ANALYSE
10
3.1 Contexte institutionnel
10
3.1.1 Dispositif du tutorat en ligne
10
3.1.2 Cadre pédagogique
10
3.2 Le forum de la plate-forme
Moodle, un système hiérarchisé
10
3.2.1 Structuration hiérarchisée des contributions
10
3.2.2 Données quantitatives
10
3.2.3 L'arborescence dans les fils de discussion
10
3.2.4 Structuration et fonctionnalité interne des
contributions
10
3.2.5 Interventions initiatives, réactives, proactives et
mixtes
10
3.2.6 Gestion du polylogue
10
3.3 La construction d'une relation, mouvements
d'ajustement
10
3.3.1 Un type de relation se met en place
10
3.3.2 Premiers échanges à dominante
référentielle ou relationnelle
10
3.3.3 Mouvements d'ajustement
10
3.4 Type ou genre de discours
10
3.4.1 Communication non-langagière
10
3.4.2 Actes discursifs plurisémiotiques
10
3.4.3 Place, portée et fonction des émoticones
10
4 RÉSULTATS ET DISCUSSION : ANALYSE
SYSTÉMIQUE-PLURIDIMENSIONNELLE
10
4.1 Révision du schéma : composantes
de la situation pédagogique
10
4.2 Interactivité et interaction discursive
plurisémiotique
10
4.3 Actes de langage et interaction
10
4.4 Contrat didactique, rapport de places, figuration
10
4.5 Type de tutorat
10
4.6 Limites du système... ou avantages ?
10
4.7 Interprétation : les unités, dans
leur contexte
10
4.8 Modalité de discours et espace d'exposition
discursive
10
CONCLUSION
10
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
10
ANNEXES
10
Introduction
Comme enseignante de FLE et formatrice, nous nous
intéressons depuis longtemps à l'intégration des
technologies, et plus particulièrement à l'utilisation d'Internet
dans l'enseignement-apprentissage des langues étrangères. Au
milieu des années quatre-vingts, quand nous débutions,
l'enseignement-apprentissage assisté par ordinateur (EAO)
démarrait. Si à ce moment-là l'usage pédagogique
des ordinateurs nous paraissait peu convaincant, dès que l'ordinateur
est entré en réseau et qu'il est devenu à la fois
fournisseur de ressources documentaires et moyen de communication, à la
fin des années quatre-vingt-dix, il nous a semblé qu'une nouvelle
ère pour l'éducation et la formation était en train de
naître. Nous sommes convaincue des apports du réseau Internet pour
la formation à distance en langues étrangères, notamment
par le fait qu'il permet de mettre l'apprenant en contact avec le natif, dans
des situations de communication visant des objectifs linguistiques, culturels
et pragmatiques ; mais nous sommes également consciente des
difficultés et des besoins en formation entraînés par ces
avancées des technologies de l'information et de la communication (TIC).
Celles-ci amènent d'ailleurs souvent les universités à
réviser les programmes de formation en fonction des nouvelles exigences
liées aux nouveaux outils. Parallèlement, les changements sociaux
rendent encore plus nécessaires les contacts interculturels et la
collaboration à distance. La recherche dans l'axe entre ces deux
domaines suggère des pistes d'utilisation des TIC
précisément pour la formation en langues, la conception de
scénarios pédagogiques basés sur une approche de nature
socio-constructiviste et interculturelle, facilitant des `rencontres' à
distance qui favorisent les échanges à la fois langagiers et
culturels authentiques.
En même temps, l'étude des supports de
communication, de leurs caractéristiques et de leur effet sur la
communication a contribué à consolider la communication
médiatisée par ordinateur (CMO) comme un nouveau champ de
recherche intéressant des disciplines comme les sciences de
l'information et la communication, la sociologie et les sciences du langage.
Nous présenterons dans la sous-partie 2.2 ce champ qui cherche à
décrire les formes discursives de la CMO à partir de principes et
méthodes élaborés dans le sillage des recherches issues de
disciplines aussi différentes que l'anthropologie, la psychologie, la
sociologie et la linguistique.
Certains de ces travaux en CMO prennent pour objet
des interactions pédagogiques. Etant donné les
« questions spécifiques d'ordre éducatif »
qui caractérisent ces échanges, Dejean-Thircuir & Mangenot
(2006a : 7), à l'instar de Peraya (2000), proposent « de
parler dans ce cas de `communication pédagogique
médiatisée', pour désigner en quelque sorte un
sous-domaine empruntant des outils d'analyse et certaines
références théoriques à la fois à la CMO et
aux champs de la didactique et de l'analyse des interactions en
classe » (ibidem) : c'est dans ce sous-domaine ainsi
défini que se situe le présent travail. Celui-ci a
été facilité par le fait que dans les plates-formes de
formation en ligne (Learning Management Systems, en anglais), qui permettent la
rencontre pédagogique à distance, divers outils gardent des
traces qui peuvent ensuite être analysées et qui sont de multiple
nature, écrite, orale et visuelle; ces traces peuvent être
abordées, comme ce sera le cas ici, d'un point de vue interactionnel,
dans le but de décrire la dynamique et le flux des échanges.
Elles peuvent être soumises à des analyses qui privilégient
le traitement quantitatif ou qualitatif (Mangenot, 2006) : étant
donné la nature exploratoire de notre recherche, ce seront les
démarches qualitatives qui seront privilégiées.
La présente contribution porte sur des échanges
en ligne entre des étudiants français et espagnols (qui ne
se sont jamais rencontrés) dans le cadre d'un tutorat de FLE qui s'est
déroulé pendant trois mois à travers une plate-forme de
formation en ligne ; précisons que ces échanges avaient un
caractère institutionnel, au sens qu'ils étaient
intégrés dans la formation des deux publics. Les données
prises en compte sont de nature verbale, para-verbale et non-verbale. L'angle
d'approche privilégié a été systémique,
cherchant à mettre au jour les rapports entre les différentes
variables étudiées sous un angle descriptif et qualitatif, dans
l'objectif de dégager les indices pertinents et les
spécificités de ce type de communication pédagogique
médiatisée par ordinateur, dans le but d'essayer d'en
élaborer un modèle dans la lignée des travaux de
l'équipe qu'anime François Mangenot, au sein de l'axe de
recherche « Didactique des langues et TIC » du Lidilem, de
l'université Stendhal Grenoble 3 (programme « Communication
pédagogique médiatisée par ordinateur »).
Plus largement, ce travail descriptif d'une modalité
particulière de communication pédagogique
médiatisée par ordinateur (CMPO) se veut une contribution
à une meilleure compréhension des pratiques
d'enseignement-apprentissage à distance en mode asynchrone,
facilitées par les nouveaux moyens technologiques : il est
aujourd'hui capital, d'un point de vue praxéologique, de former les
futurs enseignants à pouvoir prendre en charge de telles situations,
parallèlement aux situations classiques de l'enseignement
présentiel.
En nous lançant dans cette étude, nous avions
voulu, tout d'abord, répondre à des questions de cet ordre :
« Peut-on envisager d'acquérir des compétences
culturelles lors d'un échange entre étudiants en ligne ? Les
étudiants laissent-ils des traces de comportements culturellement
marqués ? » (Voir Annexe I : Projet de recherche
Master 2). Nous avons, pour ce faire, décidé d'examiner les
échanges à l'aide des outils d'analyse empruntés à
la pragmatique. La délimitation des actes de langage nous a
détournée de notre préoccupation interculturelle initiale
et nous a amenée à nous interroger, en premier lieu, sur le poids
relatif du contenu et de la relation dans les
messages, ainsi que sur la construction et l'évolution de la
relation entre les étudiants. L'examen de l'évolution dans la
relation nous a conduit à analyser la structuration de l'interaction.
Nous avions comme arrière-plan la poursuite de l'exploration d'Internet
comme canal de communication entre des étudiants en formation, ce qui
nous a orientée vers la description d'éléments qui nous
semblaient participer à différents niveaux à cette
modalité de communication. Finalement, l'approche qui s'est
imposée a été celle de décrire
précisément les spécificités de cette
modalité de communication, particulière par ses contraintes
technologiques et par le contexte situationnel pédagogique
entièrement à distance.
Ce mémoire comprend trois parties principales :
un aperçu théorique où il est question des
différentes approches théoriques et pratiques des
phénomènes de communication interpersonnelle, de la CMO et de la
CPMO ; une brève présentation méthodologique, dans
laquelle sont évoqués les niveaux, domaines et paramètres
pris en compte, ainsi que les étapes de la présente
étude ; une dernière partie consacrée à la
description puis à la discussion de ces différents niveaux :
les variables qui configurent le contexte situationnel de ce type de tutorat en
ligne, les caractéristiques du canal de communication, les
possibilités offertes aux étudiants pour construire l'interaction
et l'examen des unités discursives et leur `tissage'
techno-sémio-pragmatique.
1 CADRE THÉORIQUE
Comment articuler les différents cadres de
référence auxquels nous avons eu recours afin d'essayer de
répondre aux questions qui se présentaient au fur et à
mesure que nous découvrions le terrain de recherche ? Nous allons
mentionner tout d'abord des recherches qui ont été
réalisées par des linguistes, et par des chercheurs en
disciplines non-linguistiques, concernant la communication humaine
interpersonnelle tant de façon globale et théorique que
méthodologique. Nous exposerons ensuite des voies de recherche
actuelles, ouvertes à la description d'éléments
significatifs de différente nature (technique, sémiotique et
pragmatique) qui configurent la communication médiatisée par
ordinateur. Pour clore cette partie de notre étude, nous
évoquerons des étapes de la recherche sur l'usage et
l'intégration des technologies informatiques et
télématiques dans l'enseignement-apprentissage des langues et la
formation ouverte et à distance, que nous mettrons en relation avec les
approches pédagogiques sous-jacentes, configurant la communication
pédagogique médiatisée par ordinateur.
.
1.1 De la langue,
système de signes, aux interactions multimodales
L'étude des pratiques communicatives et du langage en
situation commence à intéresser des chercheurs issus de
différentes disciplines vers le milieu du siècle dernier. La
linguistique, d'orientation structuraliste s'occupait essentiellement
à la même époque des aspects syntaxiques et
sémantiques de la langue écrite - considérée comme
un ensemble de règles d'un code normatif ; les conditions
concrètes de l'utilisation du langage dans une situation précise
de communication orale - l'importance du ton, des gestes etc. étaient
considérées comme extralinguistiques.
1.1.1 De la langue-système à la langue
instrument de communication
Nous devons à Saussure une vision structurée de
la langue : la langue comme système de signes
articulé. Nous ne voudrions pas oublier de signaler cependant que
Saussure, dans ses cours publiés par ses élèves,
considérait la langue comme « un produit social de la
faculté du langage et un ensemble de conventions nécessaires
adoptées par le corps social» ([1915] 1993 : 124). Une autre
leçon que nous retirons de ses cours est l'importance qu'il accorde au
sens (« le problème linguistique est avant tout
sémiologique ») et le fait de considérer aussi
« les rites, les coutumes, etc. comme des signes (...) qu'il
faut grouper dans la sémiologie et (...) les expliquer par les lois de
cette science » (ibidem : 128).
Pour Benveniste (1966 : 126) « la relation de
la FORME et du SENS [est] le problème qui hante toute la
linguistique moderne ». Ce qu'il énonce de la façon
suivante :
« Le rapport forme : sens que maints linguistes
voudraient réduire à la seule notion de la forme mais sans
parvenir à se délivrer de son corrélat, le sens. Que
n'a-t-on tenté d'éviter, ignorer ou expulser le
sens ? ».
Benveniste (ibidem : 130) distingue explicitement
« la langue comme système de signes » de
« la langue comme instrument de communication, dont l'expression est
le discours », la phrase étant pour lui
« l'unité du discours ». Il nous intéresse
tout particulièrement de signaler qu'il estime que les propositions
assertives, interrogatives et impératives, « les trois
modalités de l'unité de la phrase », ne font que
« refléter les trois comportements fondamentaux de
l'homme ». L'étude du comportement des étudiants de
notre corpus confirmera cette triple dimension : « parlant et
agissant par le discours sur son interlocuteur : il veut lui transmettre
un élément de connaissance, ou obtenir de lui une information, ou
lui intimer un ordre ». Toujours selon cet auteur, « [c]e
sont les trois fonctions interhumaines du discours ». Nous
aurons recours au terme discours qui englobe, pour lui, toutes les
formes de manifestation verbale car il considère que le
« discours est écrit autant que parlé »
(ibidem : 242).
Benveniste est à la base, aussi, de
l'énonciation : le langage «se tourne en instances
de discours, caractérisées par ce système de
références internes dont la clef est je (...), je
et tu (...) n'existent qu'en tant qu'ils sont actualisés
dans l'instance de discours ». Avec cette conception du `langage en
exercice', Benveniste est donc à l'origine des conceptions actionnelles
actuelles prises en considération par le Cadre européen
commun de référence pour les langues : « la
`forme verbale' est solidaire de l'instance individuelle de discours en ce
qu'elle est toujours et nécessairement actualisée par l'acte de
discours et en dépendance de cet acte » (ibidem :
255).
Dans sa conception du langage, « il ne faut pas
manquer d'observer d'une part que ce rôle [de transmission que remplit le
langage] peut être dévolu à des moyens non-linguistiques,
gestes, mimiques, et d'autre part (...) les systèmes de signaux,
rudimentaires ou complexes » (ibidem : 258-259) - signes
non-verbaux auxquels nous allons revenir à plusieurs reprises dans
la suite de cette partie théorique de notre étude (voir
1.1.4 / 1.2.1 / 1.2.3).
1.1.2 Le schéma de la communication
Passons maintenant de l'autre côté de
l'Atlantique où Jakobson se sert des avancées des disciplines
non-linguistiques, intéressées par la communication
interpersonnelle, pour situer le message dans un schéma de
communication, apportant des notions qui se sont avérées
importantes pour les sciences du langage et les sciences humaines.
Dans les années quarante aux États-Unis est en
train de se développer une théorie générale des
systèmes. Un système est défini comme un
« complexe d'éléments en interaction » et
dans ce cadre théorique, proche de la cybernétique de Wiener,
Shannon élabore « une théorie mathématique de la
communication » (Winkin 1981 : 17). Jakobson, une quinzaine
d'années plus tard, a utilisé le schéma de la
communication de Shannon, pour l'adapter aux sciences humaines. Il
décrit les six facteurs qui participent à la communication et qui
donnent naissance à six fonctions linguistiques
différentes :
|
CONTEXTE
F. référentielle
|
|
DESTINATEUR
F. émotive
|
MESSAGE
F. poétique
|
DESTINATAIRE
F. conative
|
|
CONTACT
F. phatique
|
|
|
CODE
F. métalinguistique
|
|
TABLEAU 1: Schéma de la communication,
réalisé à partir des schémas de Jakobson ([1963]
1993 : 141-145)
Pour Jakobson, « [i]l y a des messages qui
servent essentiellement à établir, prolonger ou interrompre la
communication, à vérifier si le circuit fonctionne (...),
à attirer l'attention de l'interlocuteur ou à assurer qu'elle ne
se relâche pas.» Nous aurons l'occasion d'étudier
particulièrement la fonction vouée à
« l'accentuation du contact -la fonction phatique, dans les termes de
Malinowski- [qui] peut donner à l'échange profus de formules
ritualisées, voire à des dialogues entiers dont l'unique objet
est de prolonger la conversation » (ibidem : 143) ; nous
nous référerons aussi aux autres fonctions : la fonction
émotive ou expressive, la fonction conative, référentielle
et métalinguistique ou métalangagière sous-tendant les
échanges de notre corpus.
Nous sommes revenue sur ce fameux schéma de la
communication de Shannon, de 1949, dans la mesure où il a
provoqué le début des recherches sur le langage menées par
les chercheurs du Collège invisible qui s'y opposaient
(Winkin 1981 :
22).
1.1.3 La communication en situation
Des chercheurs issus de disciplines comme la psychiatrie, la
linguistique, l'anthropologie et la sociologie, présentés en
France comme membres d'un collège invisible par Winkin (1981),
dans l'ouvrage La nouvelle communication, partagent un modèle
de la communication « conçue comme un système
à multiples canaux auquel l'acteur social participe à tout
instant » (ibidem : 8). Ils font consensus autour de
l'idée que « [l]a communication doit être
étudiée par les sciences humaines selon un modèle qui leur
soit propre » (ibidem : 22).
Comme nous l'avons déjà annoncé, notre
étude adopte cette perspective `extra-linguistique' dans laquelle chaque
langue, en tant que système de signes articulés, s'emboîte
dans un autre système de signes qui obéit à des
règles culturelles intériorisées. La réalisation
linguistique est produite, de ce point de vue, par le corps social et
répond à un système qui comprend des signes non
linguistiques, mais communicatifs. Comme les linguistes avaient fait en mettant
en relief le système de langue, ces chercheurs essaient de
décrire les règles sous-jacentes au système de signes de
la communication sociale :
« De même qu'il est possible de parler une
langue correctement et couramment et de n'avoir cependant pas la moindre
idée de sa grammaire, nous obéissons en permanence aux
règles de la communication, mais les règles elles-mêmes, la
`grammaire' de la communication, est quelque chose dont nous sommes
inconscients » Paul Watzlawick et John Weakland (cités par
Winkin 1981 : 23-24).
Pour ces chercheurs, la communication interpersonnelle doit
être étudiée comme un processus, une suite de
réalisations dynamiques qui a lieu dans un contexte social et
qui obéit à des règles. C'est cette conception de
la communication située qui suppose un changement de point de vue
très important. La méthode entreprise pour analyser la
communication est celle des anthropologues, adoptée par les sociologues
et adaptée à la réalité sociale occidentale. Nous
suivrons leurs principes méthodologiques, selon lesquels la
communication est placée dans son contexte `naturel' (« notre
travail s'appuie sur une histoire naturelle concrète », dit
Bateson) conçue comme une suite d'actions faisant partie d'un processus
dynamique dans lequel la communication ne peut être qu'
inter-action.
« Cette façon de replacer chaque signal dans
le contexte de l'ensemble des autres signaux fonde la rigueur essentielle de
notre travail. (...) A ce point, notre concept de communication devient
interactionnel. (...) Ce cadre plus vaste détermine la signification de
ce que chaque personne dit et fait. » Bateson ([1971] 1981 :
129)
Chaque langue est décrite depuis Saussure comme
reposant sur un code qui met en jeu un nombre fini de
catégories d'unités et de règles qui
gèrent leur articulation. Dans l'évolution de la linguistique
`externe', Watzlawick, Beavin & Jackson ([1967]1993: 241)
établissent « les différentes unités de
communication (ou de comportement) ». Pour eux, une unité de
communication est le message « ou bien, là où
la confusion n'est pas possible, une communication. Une série
de messages échangés entre des individus sera appelée
interaction (...), nous introduirons l'expression modèles
d'interaction pour désigner une unité de la communication
humaine d'un degré encore plus complexe ».
L'information ou contenu du message ne peut
être interprétée sans tenir compte des aspects
extralinguistiques au niveau de la relation entre les partenaires.
Nous devons à ces chercheurs du Mental Research Institute de Palo Alto
la distinction entre les deux composantes de la communication, le
contenu et la relation :
« Un message sous son aspect d' 'indice' transmet
une information ; dans la communication humaine, ce terme est donc
synonyme de contenu du message. (...) L'aspect `ordre' par contre,
désigne la manière dont on doit entendre le message, et donc en
fin de compte la relation entre les partenaires.» (ibidem:
242).
Cette théorie systémique de la
communication stipule qu'on ne peut pas ne pas communiquer : tous
nos gestes et nos silences portent un message (« activité ou
inactivité, parole ou silence, tout a valeur de message »,
ibidem : 240). Dans la transmission de l'information les signes de nature
analogique (« les moyens non-linguistiques »
cités par Benveniste, icônes et émoticones de la
communication médiatisée par ordinateur) se confondent avec des
signes verbaux propres à la communication digitale. Pour ces
chercheurs, ces deux modes de communication se complètent; ce
qu'ils formulent de la façon suivante: « [s]elon toute
probabilité, le contenu sera transmis sur le mode digital, alors que la
relation sera essentiellement de nature analogique » (ibidem: 248).
Nous verrons dans la partie 3.4.3.2 si notre corpus corrobore cette
affirmation.
Chaque modèle d'interaction peut être
fondé sur les rapports dans la relation basés
« soit sur l'égalité, soit sur la
différence ». A partir de leurs observations de
terrain, ces chercheurs décrivent la relation
symétrique et complémentaire ainsi que le
processus dynamique de la relation :
« [d]ans le premier cas, les partenaires ont
tendance à adopter un comportement en miroir, leur interaction peut donc
être dite symétrique. (...) Dans le second cas, le
comportement de l'un des partenaires complète celui de l'autre (...) on
l'appellera complémentaire » (ibidem :
251).
Ce double volet, nous pouvons l'observer dans les relations de
notre corpus de communications pédagogiques en ligne : car la
relation que nous allons étudier sera tantôt symétrique,
tantôt complémentaire, comme nous aurons l'occasion de le
vérifier au moment de décrire les premiers messages
échangés, de notre corpus, dans la sous-partie 3.3.
E. Goffman, sociologue, cherche dans son doctorat à
l'Ecole de Chicago « à dégager une théorie
sociologique de la communication interpersonnelle », selon Winkin
(ibidem : 93). « Reprenant les données déjà
présentées dans son doctorat, Goffman poursuit
l'élaboration de concepts familiers aux `interactionnistes
symboliques' : soi (Self), interaction, rôle, etc. »
(ibidem : 96). Il décrit les relations interpersonnelles en termes
de mise en scène (traduction française de
Presentation of Self in Everyday Life). Cette notion va de pair avec tout
un engrenage social implicite, sorte de code rituel, auquel nous
allons nous référer : notamment le code rituel propre aux
rapports entre `maître' et `élève'
intériorisé par tout individu scolarisé. L'aspect le plus
marquant des apports de Goffman est celui de la gestion de l'équilibre
dans la relation :
« Le code rituel lui-même demande un
équilibre délicat que peut aisément détruire
quiconque le soutient avec trop ou insuffisamment d'ardeur, par rapport aux
idéaux et aux attentes du groupe dont il fait partie. »
Goffman (1974 : 18).
Il propose, donc, une étude détaillée des
effets du langage ancrée dans des actions sociales, dans lesquelles il
faut distinguer le statut particulier incarné par les individus
participant à la relation :
«Lorsque nous examinons comment l'individu participe
à l'activité sociale, il nous faut comprendre que, en un certain
sens, il ne le fait pas en tant que personne globale, mais plutôt en
fonction d'une qualité ou d'un statut particulier » (ibidem :
47).
Goffman se réfère aussi à des
règles qu'il faut respecter et qui « tendent à
s'organiser en codes qui garantissent les convenances et
l'équité » (ibidem : 49). La rupture de
l'équilibre dans la relation est d'après lui intimement
liée à la notion de face, qu'il définit
comme :
« la valeur sociale positive qu'une personne
revendique effectivement à travers la ligne d'action que les autres
supposent qu'elle a adoptée au cours d'un contact particulier. La face
est une image de moi délinéée selon certains attributs
sociaux approuvés, et néanmoins partageable, puisque, par
exemple, on peut donner une bonne image de sa profession ou de sa confession en
donnant une bonne image de soi » (ibidem : 9 ).
Le double jeu de protéger la propre face et de ne pas
menacer la face de l'autre entraîne des techniques qui en
français reçoivent le nom de figuration et de
réparation, notions auxquelles nous reviendrons quand nous
analyserons la gestion de la relation : les ajustements réciproques
pour l'assurer le maintien de l'équilibre dans la relation (voir
3.3.3).
Hymes et Gumperz fondent l'ethnographie de la communication
qui « a sans doute pour objectif ultime l'analyse de la
compétence communicative ». La compétence
communicative est une notion clé depuis les années
soixante-dix en didactique de langues, mais son but initial, dans les termes de
Hymes, c'est de « combler le fossé entre ce qui appartient
à l'analyse ethnographique et ce qui relève de l'analyse
grammaticale » (Gumperz [1982]1989 : 57). Une autre des notions
importantes développées par l'ethnographie de la communication
est celle d'événement de langage qui s'ouvre aux aspects
extralangagiers et qui nous aidera à interpréter le
comportement langagier de nos étudiants :
« Au plan de la description ethnographique, un
comportement verbal est un événement du langage,
c'est-à-dire une unité limitée dans le temps et dans
l'espace (...), tout comportement verbal est régi par des normes
sociales qui déterminent les rôles des participants, les droits et
devoirs à l'égard d'autrui, les sujets de discussion
autorisés, les façons de parler appropriées et les
manières d'introduire l'information » (ibidem: 69).
M. Garfinkel est à l'origine d'un courant de la
sociolinguistique qui s'appuie sur des analyses qualitatives, baptisé
par lui comme ethnométhodologie. Garfinkel, d'après
Gumperz,
« montre qu'on ne peut correctement définir
le savoir social par des catégories telles que le classement
sur une échelle des rôles, des statuts ou des
caractéristiques de la personnalité des individus. Pour lui, le
savoir social se construit dans le processus même de l'interaction et les
interactants créent leur propre monde en se comportant comme ils le
font » Gumperz ([1982] 1989 : 61). Bien que nous ne nous
occupions pas dans cette étude de l'acquisition des langues, nous
retenons cette conception du `savoir social' qui se construit entre les
partenaires pour en tenir compte à des fins didactiques.
L'objet d'étude de prédilection des
ethnométhodologues est la pratique sociale de base, la
conversation. Dans cette approche, qui est devenue conversationnelle,
l'une des notions centrales a été proposée par Gumperz,
celle de indices de contextualisation: « A la
différence des mots dont on peut discuter en dehors de tout contexte, le
sens des indices de contextualisation (...) est toujours affaire de
conventions sociales.» (ibidem : 30). Il fonde le courant
interactionniste qui observe les actes de langage - notion que nous
verrons sous une autre approche bientôt - comme « des
stratégies conversationnelles détournées qui permettent
d'établir des relations particulières et de négocier des
interprétations communes » (ibidem : 32). Ces
observations nous ont aidé à analyser les actes de langage
situés et à comprendre la `construction' de l'interaction entre
les scripteurs de notre corpus.
A la suite de l'ethnométhodologie, se développe
un courant de recherche qui a pris une grande ampleur, l'analyse
conversationnelle, et qui est venu compléter les apports de l'analyse du
discours plus focalisé sur l'écrit. Nous ne considérons
pas notre corpus comme une conversation, comme nous verrons plus tard, mais
nous tenons à mettre en oeuvre quelques outils propres à
l'analyse conversationnelle afin de décrire les principes
organisationnels de ce que nous considérons plutôt comme une
interaction. Nous empruntons à l'analyse conversationnelle
« les tours de parole et la séquentialisation des mouvements
conversationnels (...) les paires adjacentes, telles que
question-réponse, salutation-salutation,
demande-réponse ». Notre corpus confirmera le rythme ternaire
des échanges didactiques souligné par Gumperz (ibidem : 124-125),
à l'instar de Mehan : « Le langage didactique
diffère de la conversation ordinaire en cela qu'il est constitué
non pas de deux mais de trois éléments : une réplique
évaluative suit toujours la réponse à un mouvement
initial, selon un système tripartite constitué d'une ouverture,
d'une réponse et d'une évaluation ».
1.1.4 La communication non-verbale
A la convergence de tous ces courants focalisés sur la
communication humaine se trouve l'éthologie (humaine) : pour
Cosnier ([1987] 1991 : 292), les recherches des disciplines
non-linguistiques sur la communication interpersonnelle évoquées
précédemment « présentent en commun, au moins
les trois caractères suivants :
- l'approche `naturaliste', qui consiste à capter
une interaction `naturelle' ou `authentique', c'est-à-dire où les
participants ont un libre choix de leurs mouvements et de leurs mots, et ont
à gérer une réelle situation d'échange.(...)
- La prise en compte du non- verbal. (...)
- L'abandon du sujet monodique au profit de
l'interaction : il ne s'agit plus (...) de comprendre ou de
théoriser le fonctionnement d'un `sujet', mais de décrire et
d'élucider l'interaction pour elle-même. C'est la dyade (ou le
groupe) qui constitue l'entité à étudier ; les
actions et réactions de chacun n'étant qu'une contribution
à un énoncé coopératif. »
Ce qui nous intéresse particulièrement dans
l'éthologie, c'est qu'elle s'est occupée de décrire et
catégoriser les aspects verbaux et non-verbaux de la communication. Nous
empruntons, dans la typologie des gestes
communicatifs de Cosnier (ibidem : 297), les gestes associés
nécessairement à la parole lors des conversations en face
à face : les co-verbaux (expressifs ou
illustratifs) ; les synchronisateurs, qui assurent
l'interaction : les phatiques (`activité du parleur
destinée à vérifier ou à maintenir le contact') et
les régulateurs (`activité du récepteur en
réponse aux précédents').
Un geste, selon Cosnier (ibidem : 295), « pourra
apparaître en `position d'émission' (verbale) de son auteur (le
parleur) ou en `position de réception' (verbale) ». Cet aspect
ne peut pas être pris en compte en communication à distance
asynchrone, car on n'a pas affaire à une situation simultanée
d'émission et réception, mais les interventions peuvent
être interprétées comme initiatives et/ou réactives.
Marcoccia, qui a analysé l'utilisation des smileys dans la
communication médiatisée par ordinateur, s'est
intéressé à « la portée » de
ces manifestations non-verbales (comme nous verrons en 1.2.1).
1.1.5 Les actes de langage et l'interaction
Dans le monde anglo-saxon, mais de ce côté-ci de
l'Atlantique, la pragmatique, « la benjamine des
disciplines linguistiques » comme l'appelle Kerbrat-Orecchioni
([1984]1993 : 217) émerge, d'après ce chercheur
spécialiste de l'interaction, comme une nouvelle et double
approche :
1) « La pragmatique énonciative, qui
selon la définition de Charles Morris a pour tâche de
décrire les relations qui s'établissent entre
l'énoncé et ses utilisateurs, et tous les aspects du message
verbal qui sont tributaires du cadre énonciatif dans lequel il
s'enracine ;
2) la pragmatique illocutoire, ou théorie des
actes de langage, qui étudie tout ce qui dans l'énoncé lui
permet de fonctionner comme un acte spécifique, i. e. ses
aspects performatifs et illocutoires » (ibidem : 218).
Kerbrat - Orecchioni présente une étude
comparative de ces deux versants de l'approche pragmatique. Benveniste dans son
texte fondateur Problèmes de linguistique
générale, s'intéresse « à
décrire les procédés linguistiques qui permettent la
conversion de la langue en discours, son appropriation par le sujet parlant et
l'inscription dans l'énoncé de l'énonciateur et
l'énonciataire ». Selon cet auteur (ibidem : 218), la
pragmatique illocutoire a été fondée par
Austin (« Dire, c'est aussi faire. Et cela, c'est
grâce à Austin qu'on le sait » ). De
cette étude comparative, nous allons retenir que c'est « sur
ce terrain des circonstances de l'énonciation que se
rencontrent (...) Austin et Benveniste (...) au niveau des conditions de
réussite d'un acte de langage déterminé» (ibidem
: 222-224). Buscar donde B. Rechaza los a. de l.
Searle, philosophe nord-américain successeur d'Austin,
dans son ouvrage Speach acts (paru en 1969)
« considère que tout énoncé linguistique
fonctionne comme un acte particulier (ordre, question, promesse, etc.)
qui vise à produire un certain effet et à entraîner une
certaine modification de la situation interlocutive. Il appelle
illocutionary force (en français force illocutoire) la
composante de l'énoncé qui lui donne sa valeur d'acte »
(Kerbrat-Orecchioni [2001] 2005 : 16).
On se réfère aux actes de langage
indirects quand le signifiant, la forme de l'énoncé, ne
correspond pas avec le signifié, la valeur illocutoire qu'il
transporte ; ainsi, par exemple, une question apparente peut cacher une
requête (- peux-tu me passer le sel ? ) ; de nombreux
exemples de notre corpus illustrent le fait que
« l'interprétation de la valeur pragmatique d'un
énoncé fait intervenir simultanément différents
facteurs de nature hétérogène » (ibidem : 45).
La confluence du courant interactionniste, d'inspiration
plutôt sociologique, et de la pragmatique illocutoire, d'inspiration
philosophique, place les actes de langage « en contexte
(...) à l'intérieur d'une
séquence ». Pour Kerbrat-Orecchioni, la perspective
interactionniste complète ainsi les possibilités d'analyse des
actes de langage car « [négligés] par la perspective
classique, ces deux aspects du fonctionnement des actes de langage sont au
contraire considérés comme centraux par les courants pragmatiques
qui se sont développés dans le champ de la pragmatique
interactionniste » ( Kerbrat-Orecchioni [2001] 2005: 53).
N'oublions pas de signaler que « [l]l'une des
tâches de la pragmatique interactionniste consiste (...) à
compléter la description des actes de langage par celle des
règles et principes qui sous-tendent leur organisation
séquentielle. A telle fin, un certain nombre d'outils ont
été élaborés dans le cadre de divers modèles
d'analyse de discours et de la conversation » (Kerbrat-Orecchioni
[2001] 2005 : 59).
Plusieurs disciplines ont donc contribué à
l'émergence de l'objet « interaction verbale » qui
« s'est construit au carrefour des sciences du langage et des
sciences sociales » selon Colletta (1995 : 43). Ce chercheur en
psychologie et sciences de l'éducation examine dans cet article quelques
approches de l'interaction. Nous nous appuierons sur le modèle
structuraliste de Roulet qui nous aidera à observer
« l'interaction verbale comme un emboîtement
d'unités de rangs différents : l'interaction (ou
« incursion ») apparaît comme une succession
d'échanges constitués de deux ou trois interventions,
elles-mêmes constituées d'actes de langage ». Nous nous
référerons aussi aux fonctions illocutoires de
l'intervention : initiative, réactive ou mixte
« selon qu'elles permettent d'ouvrir, de clore ou de poursuivre
un échange » (ibidem : 44). Nous retenons en outre sa notion
de la complétude interactive qui explique les
échanges qui se poursuivent au-delà de trois interventions
« avec enchâssement de plusieurs interventions ou ouverture
d'un échange subordonné » (ibidem : 45).
A la suite de Goffman et de sa théorie de la
figuration (face-work ), Brown et Levinson font l'inventaire
et la description des différentes stratégies qui peuvent
être mises au service de l'exercice de la politesse et qui sont, pour
Kerbrat-Orecchioni ([2001] 2005 : 73), nombreuses et diverses :
« les formulations indirectes des actes de langage d'abord, mais
aussi d'autres procédés tels que ces réparateurs
que sont l'excuse et la justification ; et toutes sortes de
procédés adoucisseurs (...) les
minimisateurs » - procédés que nous
aurons l'occasion d'observer dans notre corpus, de même que les FTA et
FFA. Kerbrat Orecchioni ([2001] 2005 : 72, 74) propose d'introduire dans
ce modèle théorique à côté du terme FTA, qui
dénomme les actes menaçants pour la propre face ou la face de
l'autre ( Face Threatening Acts ) le terme FFA (Face
Flattering Act) ou acte valorisant, ou `flatteur', pour la face d'autrui.
1.1.6 L'interaction en classe de langue
et les énoncés métalangagiers
L'analyse conversationnelle s'est aussi
intéressée à la description des interactions en
classe : Kramsch (1984 : 59, 63) se base sur une étude
ethnométhodologique faite par van Lier à l'Université de
Lancaster (Analyzing Interaction in Second Language Classrooms, 1982)
qui « tente d'élucider l'interaction complexe de la classe de
langue ». A des fins descriptives du champ des interactions
didactiques, nous retenons un des aspects, celui qui concerne les troubles
de communication :
- « les problèmes de transmission (dans
l'élocution, l'écoute ou la compréhension). Ce sont des
problèmes communs au locuteur et auditeur ;
- les erreurs, linguistiques ou discursives. Ce sont des
problèmes du locuteur ;
- les problèmes de procédure :
règles d'activité, (...) personne adressée, choix du
locuteur suivant. Ceux-ci concernent aussi bien le locuteur que
l'auditeur. »
La situation de communication didactique à distance
entre les jeunes tuteurs et les apprenants présente-elle la même
casuistique ? Quelles sont les sources de « troubles de la
communication » dans notre corpus ? Van Lier,cité par
Kramsch (ibidem : 64), pense « qu'il vaut mieux
considérer la réparation de problèmes et d'erreurs comme
un `ajustement interactionnel' ou `contrôle pragmatique' plutôt que
comme la correction de `fautes' vue dans une perspective normative »
.
Nous sommes d'accord avec Kramsch, quand elle
considère qu'une pédagogie de l'interaction doit concevoir
« la correction des troubles de l'interaction au sein de la classe de
langue » (ibidem : 64). Dans notre corpus, nous faisons le
constat suivant : les messages qui rendent compte des
« troubles » sont, d'un côté, les situations
de communication les plus sociales, `authentiques' et, d'un autre
côté, ce sont celles qui suscitent les échanges et
séquences les plus riches, quant à la longueur et au nombre de
contributions et de besoins en termes de moyens d'expression.
Maintenant, nous allons nous référer aux
segments des messages remplissant la fonction que Jakobson appelle
« métalinguistique ». Nous n'allons pas nous
arrêter là-dessus, bien qu'ils soient très présents
dans notre corpus, mais nous nous référerons ponctuellement
à ces segments présents surtout chez les tuteurs. Pour cela, nous
nous appuierons sur l'étude réalisée par De Gaulmyn
([1987] 1991) sur l'ensemble des énoncés
métalangagiers, qu'elle limite « à la classe
des énoncés qui comportent un ou plusieurs termes qui
dénotent le langage » (ibidem : 169). Elle distingue les
énoncés métacommunicationnels qui
réfèrent à la conduite de l'interaction (un exemple
tiré de son corpus : « Je vais te poser une
première question »), les énoncés
métadiscursifs qui réfèrent au discours
tenu (elle donne comme exemple : « ... donc, ça veut
aussi dire ») et les énoncés
métalinguistiques qui réfèrent à langue et
à son usage. De Gaulmyn divise la classe des énoncés
métadiscursifs en deux types : « des
énoncés qui réfèrent à des actes
illocutoires et d'autres qui réfèrent au contenu ou à la
forme des paroles, donc soit à l'énonciation - au dire -
soit à l'énoncé - au dit -,
considéré pour la forme de l'expression ou pour celle du
contenu » (ibidem : 170).
Avant de présenter la seconde sous-partie du cadre
théorique de notre étude, nous voudrions signaler que nous avons
eu recours, à différents moments, à la consultation des
notions importées de divers courants de la pragmatique et d'autres
disciplines du Guide terminologique pour l'analyse des discours,
publié par De Nuchèze & Colletta (2002).
1.2 La communication
médiatisée par ordinateur (CMO)
L'apparition de nouveaux supports et systèmes de
communication (notamment avec le développement d'Internet) interroge les
chercheurs issus de disciplines comme l'informatique, les sciences de
l'information et de la communication, les sciences de l'éducation, les
sciences du langage, la didactique des langues. Nous nous
référerons, dans cette sous-partie, à des recherches
théoriques et qualitatives, selon leur finalité, en sciences de
l'éducation et sciences du langage qui mettent à l'oeuvre des
outils d'analyse empruntés à des disciplines et courants qui
viennent d'être évoqués dans la première sous-partie
théorique de notre étude, de préférence
focalisées sur les particularités de la communication asynchrone
médiatisée par ordinateur.
1.2.1 Interaction plurisémiotique en ligne
Tous les chercheurs semblent être d'accord,
l'interaction est une notion controversée. Pouvons-nous parler
d'interaction alors que nous étudions un corpus d'échanges
asynchrones en ligne ? Kerbrat-Orecchioni, dans son dernier ouvrage Le
discours en interaction (2005), exclut l'échange en
différé qu'elle considère dialogal mais `non
interactif'. Pour Kerbrat-Orecchioni (ibidem : 17) la notion
d'interaction
« implique que le destinataire soit en mesure
d'influencer et d'infléchir le comportement du locuteur de
manière imprévisible alors même qu'il est engagé
dans la construction de son discours ; en d'autres termes, pour qu'il y
ait interaction il faut que l'on observe certains phénomènes de
rétroaction immédiate ».
D'autres chercheurs considèrent différemment
cette notion. De Nuchèze (1998 : 7-8) décrit
l'archétype d'interaction comme un « type
primitif d'action langagière et modèle d'action langagière
contextuellement marqué. Forme stable mais non-figée,
collectif et individuel, intériorisé par tout interactant au
cours de sa socialisation, l'archétype d'interaction
faciliterait l'interprétation et la production des
discours ». Pour De Nuchèze (ibidem : 8), la notion
d'interaction « ne renvoie pas seulement à l'échange
dialogal en face-à-face ». Sa définition de
l'interaction (« d'obédience bakhtienne »)
sera la nôtre : « toute co-production
pluri-sémiotique inscrite dans un parcours énonciatif
contextuellement marqué », cette notion inclut
« celles d'activité conjointe, de discours et de
variation (en synchronie et en diachronie) ».
De Nuchèze marie la pragmatique et l'interactionnisme
symbolique avec la tradition de l'analyse du discours d'inspiration
française (interaction en tant que processus et en tant que produit).
Elle tient compte des éléments non-verbaux :
« contributions régulatrices, structuratrices et
mimogestuelles » dans une approche interactionniste des discours.
Selon ses mots, il s'agit de
« procédés dits régulateurs
chez l'auditeur et phatiques chez le locuteur.
(...) L'ensemble de régulateurs et des phatiques -
synchronisateurs de l'interaction - illustre aisément la notion
de gradualité (...) : contact oculaire, hochement(s) de tête,
mimiques régulatrices (sourire) vocalisations (...) »
(ibidem : 31)
parce que, comme De Nuchèze remarque, preuves à
l'appui, - et nous aurons aussi l'occasion de le constater -
« [à] l'écrit, ces éléments ne sont pas
perdus » (ibidem : 32 ).
Une partie de cet ouvrage, Sous le discours l'interaction,
nous intéresse tout particulièrement : les
résultats de l'analyse, avec les outils de l'approche
pragmatico-énonciative, des aspects « [n]orme, microculture et
variation » d'un corpus d'interactions synchrones en ligne
(IRC sur minitel) où sont mis en relief « dans le
cadre d'une communication qui passe par l'écrit (...) la
naturalité de l'oral et une partie, au moins, des dimensions prosodique
et non-verbale des échanges en face à face » (dont les
smileys) et les effets de l'interaction (ibidem :
89-90). Comme résultat de cette analyse, il ressort « de
fortes similitudes avec la structuration d'un oral conversationnel et les
manifestations de l'oralité : ouverture et clôture
ritualisées de l'échange, (...) marqueurs de structuration
de la conversation (bon, ben), les phatiques de face à face
(...) et les marques les plus fréquentes de l'oralité» .
1.2.2 Organisation séquentielle et interactionnelle
Pour l'ethnométhodologue Mondada (1999),
« Internet est un immense réservoir de corpus discursifs
pouvant faire l'objet d'analyses et descriptions, aussi bien que de
sensibilisation à l'hétérogénéité des
genres et des registres ». Elle cherche, dans cet article, à
« doter d'outils d'analyse et de description empiriques des formes
linguistiques et communicationnelles caractéristiques de ces
échanges ».
Retenons également que la communication asynchrone
(ou différée) sur Internet se présente, selon ce
chercheur, comme un continuum entre l'organisation de l'information -comme
à l'écrit - et les traces caractéristiques de la dimension
orale de la communication : « tout en étant privée
de la dimension paralinguistique des gestes et des regards, elle utilise des
dispositifs alternatifs pour modaliser les messages (trucages orthographiques,
ponctuation, typographie) ». Ce caractère hybride serait
« la spécificité de la CMO, au-delà des
particularités les plus emblématiques, comme le recours aux
binettes (emoticons) ».
A l'aide des outils développés par l'analyse
conversationnelle d'inspiration ethnométhodologique, elle met en relief
« l'organisation séquentielle et interactionnelle qui
caractérise les messages asynchrones » et s'intéresse
concrètement aux modalités d'enchaînement
séquentielles entre messages. Ce qui l'amène à
décrire les particularités rencontrées de la gestion des
tours de parole, qu'elle appelle des « a-tours
(c'est-à-dire des tours asynchrones, reconstitués par le
locuteur comme successif) ». Elle analyse aussi l'effet
rétrospectif et prospectif, « la structuration
séquentielle d'une parole est accomplie collectivement par les
interlocuteurs dans le fil de son déroulement », sans cesser
de constater la manifestation des paires adjacentes (question / réponse,
salutation / salutation...) à l'intérieur des tours de parole.
Notons particulièrement la jonction de
« l'analyse des réparations en analyse
conversationnelle ». Elle s'appuie sur Schegloff, Jefferson et Sacks
pour traiter de « l'importance du positionnement séquentiel de
la réparation », selon ses mots, qu'elle présente comme
« une série ordonnée de possibilités
d'intervention (...) dans le même tour s'offre la première
opportunité pour le locuteur de s'autocorriger (...): c'est la
solution préférentielle qui peut être aussi observée
dans les échanges CMO (...). Le deuxième tour est le lieu de
l'hétéro-initiation de la réparation» ce qui est peu
fréquent dans son corpus « ou bien de
l'hétéro-réparation - plus fréquente (...). La
dernière opportunité pour une réparation est offerte au
troisième tour ».
En s'appuyant sur Schegloff, elle affirme que ce
troisième tour « constitue ainsi (...) le dernier lieu
disponible pour le maintien et la défense de l'intersubjectivité
menacée par la perturbation ».
1.2.3 Dimension techno-sémio-pragmatique :
icônes et émoticones
Nous ne pourrons pas nous référer aux
écrans, ou interfaces graphiques (Peraya 1996) sans tenir
compte des icônes ni des boutons
illustrés « à cliquer qui actionnent des fonctions
et mettent à disposition des outils les plus divers ». Ces
aspects de la communication analogique (non-verbaux) sont étudiés
par Peraya (ibidem) plus particulièrement en ce qui concerne
« les icônes de logiciels et d'environnements informatiques
standard (ILEIS) ». Nous nous y référerons
très rapidement au moment de nous intéresser aux aspects de
l'interactivité entre l'individu, la machine et les logiciels (Voir
3.2).
La représentation des émotions à travers
des images dans la communication médiatisée par ordinateur (CMO)
est un objet d'étude de Marcoccia. Ce chercheur attire l'attention sur
le fait que les messages échangés sur le réseau Internet
« contiennent assez souvent des signes codés qui transmettent
des informations sur la dimension relationnelle et émotionnelle de
l'échange ». Une fois présentées les
caractéristiques de ces « pictogrammes », Marcoccia
(2000) analyse leur fonctionnement et esquisse une typologie qui lui permet de
« mettre en évidence les spécificités de la
communication médiatisée par ordinateur ». Ainsi, il
souligne aussi « son caractère hybride (entre oral et
écrit) » de même que « l'importance presque
paradoxale accordée à la dimension relationnelle » dans
les communications sur Internet. Pour lui, les utilisateurs d'Internet
« en voulant accorder autant d'importance à la relation qu'au
contenu échangé, rencontrent les `limites' du code
écrit », parce qu'ils ont « l'interaction en face
à face comme idéal de communication ».
Selon son interprétation, cette modalité
d'écriture repose sur un « choix paradoxal (faire du face
à face avec l'écrit) » (ibidem). Il estime que son
principe essentiel est celui de « trouver un substitut
écrit au paraverbal, aux marques de l'intonation (par exemple utiliser
des majuscules pour signifier que l'on `crie') et aux expressions
mimogestuelles produites lors d'une conversation, principalement, celles qui
sont liées à l'expression des émotions (les
smileys) ».
Suivant les principes de la mise en scène de
Goffman, Marcoccia (ibidem) analyse les aspects relationnels et se
réfère à l'importance du « management de
faces » qui ont une théorisation ad hoc: un code de
bonne conduite, de «savoir-communiquer», appelé
Netiquette (l'étiquette du Net) qui reprend, d'après
Marcoccia, les « principes de politesse (ménager la face de
l'autre, adoucir les messages), la maxime de modalité (...) et des
règles liées à l'environnement technique et juridique
d'Internet » (ibidem).
Le fait d'utiliser ces signes peut se rapprocher de deux
procédés du discours écrit : il cite Anis, lorsqu'il
affirme que « les études sur la télématique
montrent que ses utilisateurs ont tendance à privilégier la
ponctuation à valeur expressive sur la ponctuation
syntaxique » ; il se réfère aussi à
Mourhlon-Dallies & Colin qui notent « que la fonction des smileys
est très proche du système des didascalies dans le texte
théâtral ». Dans une contribution plus récente,
Marcoccia (2004) affirme que « [c]es procédés ne sont
pas utilisés uniquement pour « mimer » l'oral(...).Leurs
fonctions sont en effet similaires à celles du matériau
non-verbal dans la conversation en face à face ». Ce qui
l'amène à conclure que « [l]e traitement linguistique
de ces procédés doit donc résoudre diverses
difficultés :
- prendre en compte la dimension interactionnelle et pas
seulement référentielle de ces marques,
- arriver à analyser le fait que ces marques - à
l'instar du non-verbal - ont souvent peu de signification en soi mais en
trouvent dans le type de relation qu'elles entretiennent avec les messages
qu'elles accompagnent,
- identifier la « portée » de ces marques.
Comme les marques non-verbales, les segments sur lesquels elles portent sont
difficiles à déterminer. Par exemple, l'expression
apportée par un smiley porte-t-elle sur la totalité du message,
sur la phrase dans laquelle le smiley apparaît ? Existe-t-il des
critères formels ?
En fait, la difficulté majeure réside sans doute
dans le fait que ces marques ne peuvent être analysées qu'en
tenant compte de nombreux paramètres liés à la gestion des
interactions communicatives, qui dépassent dans une certaine mesure les
dimensions morpho-syntaxiques ou sémantiques des messages : leur
dimension relationnelle, leur caractère situé, leur visée
pragmatique, etc. »
Marcoccia (2000), données à l'appui, annonce
une esquisse des fonctions des smileys qui sera
développée par Marcoccia & Gauducheau (2007) :
- les smileys expressifs qui peuvent
« apporter une information sur l'état
émotionnel », ou bien « permettent d'expliciter la
dimension émotionnelle » ou bien peuvent « renforcer
la valeur expressive présente dans le contenu
verbal » ;
- les smileys d'ironie et d'humour peuvent montrer
cette dimension, la renforcer ou la manifester quand elle n'est pas
exprimée par le contenu verbal;
- les smileys relationnels et de proximité qui
« participeraient au maintien de la relation » ;
- les smileys de politesse qui « servent
à atténuer le caractère menaçant ou hostile du
contenu verbal d'un message ».
Cependant, ces auteurs avouent que ce n'est pas si aisé
d'attribuer une fois pour toutes telle ou telle fonction. Nous pourrons
constater, comme ces auteurs, que « les mécanismes
d'interprétation des messages » présents dans le corpus
« semblent le plus souvent reposer avant tout sur la part verbale du
message » (Voir 3.4.3).
Nous avons voulu, dans cette sous-partie 1.2, rendre compte
des résultats de recherches articulant les dimensions technologiques,
sémiotiques et sociales visant les caractéristiques des
interactions sociales en ligne. Nous ne pouvons pas passer sous silence, ici,
un concept que nous devons à Peraya (1998) : la qualification de
dispositif techo-sémio-pragmatique, appliquée aux
dispositifs pédagogiques (voir la différence entre
système et dispositif en 1.3.).
Quelques précisions terminologiques avant de poursuivre
cette sous-partie 1.2 théorique, qui va être consacrée
maintenant à l'examen des phénomènes qui se situent
à la croisière de la technologie, la communication et l'analyse
du discours. La base de données CRITER donne
« frimousse » comme traduction du terme anglais
smiley. Nous préférons le terme émoticone
qui combine deux vocables de la langue
française (émotion et icône). Le
terme le plus utilisé par les chercheurs francophones est sans aucun
doute celui de smiley (c'est le cas de Marcoccia) ce qui peut
s'expliquer par le fait que les premiers étaient effectivement
des :-), trois signes de la ponctuation représentant des sourires.
Dans notre corpus, les étudiants ont utilisé les deux types, les
signes typographiques (réalisés avec les signes de ponctuation)
et les graphiques, des images fournies par la plate-forme Moodle. La
définition donnée par CRITER semble ne parler que du
premier cas.
1.2.4 Les médias, la communication médiatique et
médiatisée
Nous empruntons à Marcoccia (2003) la définition
de Média qui nous permet, d'un côté, de situer les
systèmes de communication sur Internet parmi les autres systèmes
technologiques et qui, d'un autre côté, va nous aider à
analyser le type de communication de notre corpus :
«Un média est une technique utilisée
par un individu ou par un groupe pour communiquer à un autre individu ou
à un autre groupe, autrement qu'en face à face, l'expression de
sa pensée, quelles que soient la forme et la finalité des
messages. Un média, au sens large, permet donc la transmission, plus ou
moins loin, et à un nombre plus ou moins important de personnes, d'un ou
plusieurs messages aux contenus les plus variées : la presse, la
radio, la télévision, le cinéma, l'affiche, le
téléphone, le courrier électronique, le web, sont,
à ce titre, des médias au sens large. »
Marcoccia n'explicite pas la distinction entre média
analogique et digital, il distingue la communication médiatique (de
masse) et la communication médiatisée (interpersonnelle). Nous
verrons le sens donné par Peraya (1998) à médiatisation et
médiation (en 1.3.4).
Nous revenons sur la question de l'interaction, liée
ici à la notion de type de discours. Marcoccia (ibidem) se demande
« [à] quel type d'interaction correspond un forum de
discussion ». Il part du constat que « le nombre de
participants est un critère apparemment suffisant pour considérer
les forums de discussion comme polylogues médiatisés par
ordinateur ». En partant de ce constat, il se demande si
« les échanges observables dans un forum constituent une
interaction ou du moins une discussion ». Une fois examinés
les deux paramètres « définitoires d'une
conversation » (l'unité thématique,
l'unité de site ), il estime que les forums de discussion
permettent des « conversations discontinues » et finit par
définir les forums de discussion comme des « polylogues
discontinus médiatisés par ordinateur ».
1.2.5 Communication électronique et types de discours
Une autre approche de la communication
médiatisée par ordinateur sur forum est celle de l'analyse de
discours française. Mourlhon-Dallies (2007), dans l'héritage de
Bakhtine, propose de « revisiter la notion de `genre du discours' en
intégrant à la réflexion les dispositifs de communication
électronique sur internet (en particulier les forums de discussion et
les chats) ». La question que se pose ce chercheur est la
suivante : l'apparition de nouveaux dispositifs de communication (...)
entraîne-t-elle l'émergence de nouvelles sphères
d'utilisation de la langue, lesquelles correspondraient à de nouveaux
genres ? Elle fait référence à la conception
(bakhtinienne) des genres discursifs de Moirand, « des
représentations intériorisées ». Cette
conception « implique vraisemblablement un apparentement de
ce qui apparaît à d'autres genres (ou régimes discursifs
préexistants), dans une optique comparatiste, lisible en termes de
continuités ».
Pour Mourlhon, « toutes les recherches qui
s'attachent à traquer dans les forums de discussion des traces de
débats écrits ou oraux, des marques du genre épistolaire
dans les courriels, etc. » s'inscrivent dans cette lignée
(c'est ce que nous ferons dans la sous-partie 3.4 de notre travail). Mais nous
sommes tout à fait d'accord, aussi, avec le caractère
spécifique de la communication médiatisée par ordinateur
qui tient à l'articulation de trois axes, selon ses dires :
« Le forum de discussion se ramène à une
cristallisation de formes (textuelles et linguistiques) particulières,
mises en relation avec un dispositif énonciatif (un espace discursif) et
une structuration type de la communauté de production des messages
échangés ».
1.3 Des TICE à
la CPMO
Nous poursuivons notre présentation des bases
théoriques de notre travail en passant rapidement sur l'origine et le
développement des technologies de l'information et de la communication
au service de l'éducation (TICE), de l'enseignement assisté par
ordinateur (EAO) et de l'apprentissage des langues assisté par
ordinateur (ALAO) ; nous mentionnerons, ensuite, la question de la
communication médiatisée par ordinateur (CMO), en rapport avec
les apprentissages collaboratifs assistés par ordinateur (ACAO)
situés dans le contexte institutionnel de la formation ouverte et
à distance (FOAD) et nous nous centrerons, finalement, sur les
interactions pédagogiques en ligne, objet d'étude abordé
par des chercheurs issus des sciences du langage et de la didactique des
langues.
1.3.1 Les médias et les TICE, de
l'EAO à l'ACAO
Depuis la fin des années quatre-vingts, les
médias et les nouvelles technologies de l'information et la
communication (NTIC) ont constitué de nouveaux terrains et de
nouveaux objets de recherche pour les sciences du langage. Centrées tout
d'abord sur la description des outils et des usages (la différence
entre les ressources hors ligne et /ou en réseau), sur leur fonction
(support d'information, canal de communication ...), sur le type de produit
(produit grand public ou matériel conçu à des fins
pédagogiques), les recherches se sont intéressées par la
suite à l'analyse des usages (l'intégration dans la pratique
didactique, l'aide au développement de l'autonomie...), à
l'influence de la médiatisation sur l'apprentissage et à
l'importance de la médiation pédagogique. Nous allons passer
rapidement en revue quelques aspects des recherches sur les nouvelles
technologies dans l'enseignement des langues et de la formation, des
multimédia en réseau, qui se développe en France depuis
1997.
L'apprentissage de langues assisté par ordinateur ALAO,
d'après Mangenot (2005) commence à se développer il y a
une trentaine d'années avec une orientation au début très
béhavioriste (il s'agissait d'exercices structuraux écrits).
Après s'être intéressée à la conception de
didacticiels d'abord textuels, puis multimédias, elle se penche de plus
en plus maintenant sur les possibilités offertes par le réseau
Internet en termes de communication. A cette époque-là, Mangenot
([1996] 1998) à l'instar de Janitza, considère
particulièrement bénéfique pour l'apprentissage des
langues l'approche socio-constructiviste (qui privilégie le
travail par paires devant un ordinateur) ; il relève trois
questions qui touchent au triangle didactique `classique': « les
modalités du contact avec les savoirs à acquérir, le
contenu des activités proposées aux apprenants et la
manière dont auront lieu les interactions ».
C'est ce tournant didactique, qui privilégie la
collaboration et l'échange à la transmission de contenus, qui est
à la base des « Apprentissages collaboratifs assistés
par ordinateur ». Mangenot (2000) caractérise l'ACAO selon
deux critères : « l'emploi d'un logiciel ad hoc,
destiné aux apprentissages collaboratifs » et
« la prépondérance de la dimension de résolution
en commun de problèmes de nature diverse ou l'existence d'un projet
d'élaboration d'un objet textuel collectif ». En
établissant une relation entre CMO et ACAO, Mangenot (ibidem) constate
qu'en langues les « ACAO peuvent être considérés
comme une forme de CMO associée à un projet » c'est qui
le cas de la situation pédagogique de notre corpus, comme nous verrons
dans la partie 3.1, au moment de présenter notre terrain de
recherche.
1.3.2
Interactivité homme-machine et interaction humaine
Les nouveaux dispositifs technologiques peuvent-ils se
substituer à l'enseignant ? La spécialiste des sciences de
l'éducation Belisle, dans ses recherches sur l'intégration des
nouvelles technologies dans la formation, étudie les questions de la
médiatisation technologique et de la médiation humaine à
travers les notions d'interactivité et d'interaction :
« Vu du point de vue technologique, le terme interactivité
implique la notion d'un dispositif capable de réponses
différenciées en réaction à une activité
humaine » (Belisle 1998 : 17). Nous l'utiliserons dans la partie
4, au moment d'examiner le contact entre le scripteur ou récepteur et
les outils de l'ordinateur. Dans un contexte d'apprentissage, selon cet auteur,
« on peut parler d'interaction entre un apprenant et un
formateur-concepteur, présent de quelque façon à travers
le programme interactif » (interaction entre étudiants,
tuteurs et apprenants, dans notre cas). Suite à cette étude, elle
conclut en rappelant l'écart entre « les interactions sociales
liées à la médiation humaine dans les
phénomènes sociaux et l'interactivité technologique que
désigne l'interaction personne-machine » et surtout elle
pointe un aspect déterminant, concrètement les limites de
l'interactivité homme-machine « à soutenir le processus
interactionnel d'inter-synchronie et d'ajustement mutuel, à travers
lequel se construit l'agir humain » (ibidem : 18 ). Une partie
de notre analyse sera consacrée précisément à
l'observation de la façon dont les étudiants soutiennent le
processus interactionnel et d'ajustement mutuel avec les moyens techniques
à leur disposition.
1.3.3 FLE-FAD, systèmes et
dispositifs
En ce qui concerne particulièrement les
expériences d'écriture télématique collective, en
temps réel et en temps différé en France, elles ont eu
lieu bien avant qu'il ne soit question d'Internet. Elles ont commencé en
FLE à la fin des années quatre-vingts, sur Minitel. Francis
Debyser, auteur de l'Immeuble, en a été l'un des
pionniers, comme le rappelle Mangenot (2000 : 139). Mais ce sera
seulement dix années plus tard que « l'Éducation
Nationale décide officiellement de se donner des accès aux
autoroutes de l'information et de la communication »
événement qui a mérité que les Rencontres
Multimédia et FLE de l'ASDIFLE abordent le thème des
réseaux et des dispositifs pédagogiques à ce
moment-là :
« 1997 est sans doute, dans l'histoire des nouvelles
technologies éducatives, une année charnière (...)
où l'on découvre en France que le réseau Internet peut
transporter non seulement du texte mais également du son, des images
fixes et animées » ce qui supposait « la convergence
des technologies multimédias et réticulaires » (
Tauzer-Sabatelli 1998 : 111).
Les recherches en informatique se développent,
concevant des systèmes de communication, comme les
plates-formes, pour assister « la conduite de formations
ouvertes et à distance. Ce type de logiciel regroupe les outils
nécessaires aux trois principaux utilisateurs -formateur, apprenant,
administrateur - d'un dispositif qui a pour premières finalités
la consultation à distance de contenus pédagogiques,
l'individualisation de l'apprentissage et le
télétutorat », selon la définition donnée
par le site d'Algora, citée par Mangenot (2004).
De l'ensemble d'outils dont disposent les plates-formes, nous
ne nous intéressons qu'au forum qui est défini par le
Vocabulaire de l'Informatique et de l'Internet, publié au Journal
Officiel de la République française du 16 mars
1999 comme « service permettant l'échange et la
discussion sur un thème donné : chaque utilisateur peut lire
à tout moment les interventions de tous les autres et apporter sa propre
contribution sous forme d'articles ».
Les plates-formes ont donc été conçues
pour la formation ouverte et à distance. La FOAD est
considérée comme « un dispositif souple de formation
organisé en fonction de besoins individuels ou collectifs (individus,
entreprises, territoires). Elle comporte des apprentissages
individualisés et l'accès à des ressources et
compétences locales ou à distance. Elle n'est pas
exécutée nécessairement sous le contrôle permanent
d'un formateur" (selon la circulaire DGEFP n°2001/22 du 20 juillet 2001
1.2).
Pour ce qui est de la terminologie, « pour
désigner ce qui est donné à faire aux apprenants (du point
de vue du concepteur) », nous retiendrons celle proposée par
Dejean & Mangenot (2005 : 313) « pour le domaine de la
formation en ligne » et qui figure dans le tableau
ci-après :
Scénario Pédagogique
|
Tâche (production attendue)
|
Chronologie
|
Scénario de communication
|
Ressources
|
Sous-tâches
|
Interactions
Étudiants / tuteur
|
Interactions
entre pairs
|
TABLEAU 2: Composantes du scénario pédagogique
Nous précisons que ce tableau met bien au clair la
situation de communication pédagogique des étudiants de notre
corpus. Nous y reviendrons dans les deuxième et troisième
parties, au moment de décrire et de situer notre objet
d'étude, qui se correspond avec celui des « interactions
étudiants/tuteur » du « scénario de
communication ».
Pour notre travail nous utiliserons aussi des termes de
l'analyse du discours, `adaptés' à ces nouveaux moyens
informatiques : Develotte & Mangenot (2004 : 12) dénomment
l'interface de l'ordinateur « espace discursif »
(« l'espace discursif où `se rencontrent' étudiants et
tuteurs est constitué par les forums où les étudiants
viennent placer les contributions répondant à telle ou telle
tâche » - cette description correspond tout à fait
à notre corpus). Dans un article récent, Develotte (2006 :
89) distingue « espace d'exposition discursive » et
« espace de production discursive », nous y reviendrons
dans la sous-partie suivante, qui va porter sur les caractéristiques du
forum.
Pour une connaissance approfondie des recherches
menées dans les dernières années dans les domaines de la
didactique des langues, la communication médiatisée par
ordinateur et les apprentissages médiatisés par ordinateur, on
peut lire la thèse de Zourou (2006). Nous présenterons
ci-après des travaux francophones qui s'intéressent
spécialement à la description de la communication
pédagogique médiatisée par ordinateur s'inscrivant dans
différents courants et donnant des résultats très
différents en fonction du cadre théorique et de la méthode
appliqués.
1.3.4 La communication
pédagogique médiatisée par ordinateur (CPMO)
Cette troisième partie théorique de notre
étude va être consacrée, comme nous venons de l'annoncer,
à des travaux qui s'inscrivent dans une perspective descriptive et
fonctionnelle visant à explorer ce qui distingue la CPMO. Concernant le
concept : médiatisation, Peraya (1998) fait remarquer
que :
«Du point de vue théorique, il nous paraît
pertinent de maintenir au sein d'un TPS, une distinction entre
médiatisation et médiation. Le premier concept désigne le
travail de scénarisation de contenus de formation (au sens large)
à travers un registre sémiotique donné, tandis que le
second désigne les interactions entre les acteurs du processus
médiatique, à savoir la médiation de la relation sociale
et affective, dans notre cas de la relation pédagogique.»
1.3.4.1 Contenu et
relation, unités et structuration
Peraya (1996) s'inscrit dans le courant de recherches de
l'analyse systémique de la communication
menées par Bateson et son équipe de Palo Alto: il part
du constat que tout acte d'enseignement est un acte de
communication ; toute communication comporte deux composantes. un
contenu et une relation (le contenu étant les contenus
d'enseignement, et la relation, la relation pédagogique) et deux
dimensions, analogique (non-verbales) et digital (verbale).
Il étudie plus particulièrement la « communication
pédagogique distante et médiatisée » qui recourt
« à des formes de communication différée -
non-présentielle et asynchrone - et médiatisée, puisque la
rupture spatio-temporelle du processus de communication pédagogique
implique l'utilisation de supports médiatiques ».
Dans le cadre du Séminaire Thématique en
Formation à Distance, de l'École d'été 1996
à la Télé-Université de Québec, il souligne
que la médiatisation est vue sous un double angle technique et
sémiotique correspondant au dispositif technique - le canal et le
support - et aux langages audio-scripto-visuels (verbaux et non-verbaux).
Dans des travaux postérieurs, Peraya & Ott
contribuent à une meilleure compréhension des différentes
formes de « communication éducative
médiatisée » dans le contexte de l'enseignement ouvert
et à distance synchrone. Ainsi, dans la partie théorique du
rapport final du Projet Poschiavo (2000 : 4-5), ils
évoquent plusieurs événements - colloques ou rencontres -
indiquant l'importance de la communication éducative
médiatisée par ordinateur, « ce champ
émergeant », permettant de prendre la mesure de son
évolution. Nous utiliserons leur formulation du terme
générique de « dispositif de communication et de
formation médiatisées » pour désigner la double
nature - « communicationnelle et formative » - de ces
dispositifs.
Dans ce rapport, ils s'appuient sur des travaux qui analysent
les interactions conversationnelles : d'un côté ceux qui se
situent « dans le cadre d'un théorie de
l'agir » ; d'un autre côté, l'approche qu'ils
qualifient de « plus classique », celle que poursuit
à l'École de Genève l'équipe de J.-P. Bronckart ;
une troisième approche « est centrée sur le discours
pédagogique et propose une adaptation du cadre théorique de la
pragmatique à l'analyse d'interactions pédagogiques »
qui identifie les catégories significatives des interventions parmi
« les séquences présentant une cohérence
sémantique ». D'après Peraya & Ott, ce dernier
modèle proposé « exclut à
tort (...) les séquences de régulations, dites
contextual exchanges ». Ils proposent une « grille
d'analyse simplifiée comportant trois catégories
fondamentales de communication permettant de caractériser les
unités des différents niveaux de granularité retenues,
tant les interactions que les séquences », dimensions que nous
reprenons à notre compte dans l'étude du corpus :
« a) la dimension
référentielle, autrement dit les contenus
d'apprentissage ou plus généralement la tâche
réalisée dans l'environnement,
b) la dimension relationnelle, i.e. celle qui
regroupe tous les actes de socialité dont les salutations constituent
une grande part et enfin
c) la dimension régulatrice des
mécanismes conversationnels. »
Pour traiter un point essentiel, pour l'analyse du discours,
celui des unités (« un problème méthodologique
majeur dans le cadre de l'analyse du discours comme d'ailleurs des
actions », selon ces auteurs) ces chercheurs tiennent compte des
structurations et des terminologies déjà employées et
offrent une structuration hiérarchique « à cinq
niveaux », qui est celle que nous appliquerons à notre corpus
:
« 1. l'incursion (école de Genève),
Speech event (Hymes) ou rencontre (Goffman) ;
interaction (Kerbat Orecchioni, Cerisier), (...) ;
2. la séquence (...) ;
3. l'échange qui correspond au niveau
dialogique élémentaire ;
4. l'intervention ;
5. enfin l'acte de langage lui-même ».
(Ibid.)
1.3.4.2
Système, dispositif et modèle pédagogique
Une autre approche des systèmes de communication
écrite asynchrone de type forum, proposée par Mangenot (2002),
est basée sur l'importance de faire la distinction entre les aspects
socio-cognitifs et socio-affectifs dans les projets de formation à
distance (FAD).
Pour Mangenot, il est essentiel de rappeler que la formation
à distance permet l'accompagnement pédagogique « dans
une logique d'échange et non dans une logique
de présentation des contenus » (Mangenot 2002b).
C'est ce que ce chercheur peut affirmer suite à « une
expérience de trois années de suivi pédagogique par forum
d'une unité d'enseignement de maîtrise à distance1(*) ». Mais, le choix d'un
suivi entièrement à distance ne va pas sans difficultés,
notamment celle de « lutter contre l'impression d'isolement
inhérent à la FAD » d'où l'importance de tenir
compte des aspects socio-affectifs. Basé sur une idée centrale
d'inspiration socio-constructiviste, « la mutualisation des
travaux », et sur l'hypothèse que
« l'élément crucial pour la réussite d'un suivi
entièrement à distance est lié à la nature de
tâches données à réaliser aux
apprenants », il est conseillé de concevoir un cours à
distance, en tenant compte du système (l'interface du système
informatique) sans oublier les dimensions socio-cognitive et socio-affective
dans la construction d'un projet pédagogique bien ficelé.
1.3.4.3 Les effets
du canal sur le discours, types de tutorat
Aux trois propriétés essentielles
relevées par les chercheurs en communication
médiatisée par ordinateur : la dimension écrite,
asynchrone et publique (pour le groupe ayant accès au forum) des
échanges sur forum, Mangenot (2004), en s'appuyant sur la pratique et
l'observation suite à des expériences de formation
entièrement à distance et de formation hybride2(*) ajoute et décrit une
quatrième, le caractère structuré des
échanges. C'est cette dimension qui « constitue la
spécificité communicationnelle des forums et qui doit être
prise en compte si l'on veut intégrer de tels systèmes à
des pratiques pédagogiques ». Il souligne aussi
« deux caractéristiques particulièrement
intéressantes : la souplesse chronologique qu'autorise le temps
différé et la permanence de l'écrit qui fait du forum
l'équivalent d'un texte en perpétuelle voie
d'enrichissement ».
Dans la sous-partie 3.2 nous allons examiner en détail
la structuration des échanges et« l'effet du canal sur les
discours » qui permet, d'après Mangenot, de « faire
ressortir certaines caractéristiques de la communication
pédagogique à distance », dans l'examen de notre corpus
concernant l'utilisation d'un forum en complément à des cours
présentiels.
Pour Maingueneau (2005), cité par Mangenot (2006),
« l'AD, en tant que courant des sciences du langage, a pour objectif
de mettre au jour des régularités liant organisations textuelles
et situations de communication ». Dans le but de décrire
les caractéristiques particulières de ce type d'échange
pédagogique en ligne et « [s]elon une démarche
inspirée de l'ethno-méthodologie », Celik &
Mangenot (2004) dans une étude exploratoire dans laquelle ils
établissent un lien entre « les fonctionnalités du
système utilisé [le forum] et la manière dont est
envisagé l'accompagnement pédagogique » distinguent,
à l'instar de Glikman, « deux formes de tutorat, à
tendance réactive ou
proactive ». A partir de la structure
caractéristique du forum sur Internet, ils présentent un
dispositif qui « relève plutôt d'un type de tutorat
proactif, [et qui] constitue néanmoins un cas
particulier non envisagé par Glikman ». Ces auteurs mettent au
jour, donc, la spécificité d'un tutorat
« mixte », qui se correspond avec le nôtre : il
est constitué à la fois d'interventions initiatives, typiques du
tutorat à tendance proactive (« les consignes de l'enseignant
- tuteur » [...] peuvent [...] être considérées
comme des interventions initiatives ») et des réponses
(« feed-back à ces travaux ») qui sont des actions
plus caractéristiques du tutorat à tendance réactive.
D'autres approches empruntent les outils d'analyse à la
microsociologie interactionniste goffmanienne pour mettre « en
parallèle les structures de l'interaction conversationnelle, issues des
travaux de Goffman, et celles d'interactions pédagogiques à
distance, telles que pratiquées dans les situations de tutorat
(proactif) mise en place pour accompagner les formations à
distance » (Blandin 2004 : 366). En se situant dans le contexte
de la relation pédagogique (« instance particulière de
la relation éducative dans un dispositif éducatif
particulier ») ce chercheur a recours aux notions
développées par Goffman de « rites
d'interactions », « rôles »,
« statut », « cadre »,
« distance sociale » s'interrogeant sur les
particularités de la relation pédagogique lorsque la formation a
lieu entièrement à distance : « quelles
procédures relationnelles la relation pédagogique à
distance met-elle en oeuvre ? En quoi diffère-t-elle de la relation
pédagogique en mode présentiel ? ». Une fois
présentées les modalités de présence
(« face à face ou en mode présentiel »,
« présence virtuelle », « à
distance synchrone », « à distance
asynchrone ») il propose d'ajouter le terme
« médiatisé » (Ibid. 365) à une
définition de la situation de Gofmman (« `perceptions directes
ou médiatisées' et `présence mutuelle
immédiate ou médiatisée' »). Comme
conclusion, il trouve que la relation pédagogique à distance
« s'atténue » (du fait d'un certain changement de
repères institutionnels (« statut des acteurs et des lieux,
rituels... ») mais « les interactions à distance
suivent de nombreux schémas identiques à ceux régulant les
interactions en face à face ou tentent de les reproduire »
(Ibidem : 379).
Les modalités de tutorat dont il a été
question jusqu'ici étaient réalisées sous la
responsabilité des enseignants. Nous allons voir, maintenant, un cas
particulier du tutorat de FLE réalisé par des étudiants,
apprentis de tuteurs, qui est l'objet d'étude de Dejean-Thircuir &
Mangenot (2006b). Dans l'article intitulé « Pairs ou
tutrices ? » ces chercheurs s'appuient aussi sur des
notions de la micro-sociologie goffmaniennes pour mener à terme
l'analyse des données discursives d'un projet de recherche -
action3(*) de tutorat
« entre pairs » dans le but de mettre en relief comment des
étudiantes qui jouent un rôle de tutrices, dans le cadre de leurs
études de maîtrise FLE à distance, se mettent en
scène ; la façon dont elles se positionnent par rapport aux
apprenants et cherchent à définir implicitement ou explicitement
les contrats et négocier les cadres de l'interaction. C'est le
contexte de notre tutorat en ligne que nous présenterons en 3.1.
Nous avançons, pour l'instant, que nous allons nous
appuyer sur les apports de la pragmatique, déclinée en
techno-sémio-pragmatique, domaine interdisciplinaire, qui nous ouvre un
chemin de réponse aux questions qui ont provoqué le début
de cette recherche. En effet, héritière des éclairages
offerts par des disciplines non-linguistiques, la pragmatique explique la
communication comme un phénomène lié à une
situation sociale concrète, où le langage est un
élément de plus, imbriqué dans un réseau complexe
d'éléments.
La pragmatique, à l'heure actuelle, nous semble pouvoir
poser un regard différent sur la nouvelle communication - ici, la
communication pédagogique - médiatisée : car elle
permet l'analyse systémique :
- des faits ou actions, actes communicatifs non-linguistiques
et actes de langage, qui laissent des traces, et d'interpréter leur sens
dans leur contexte particulier;
- elle peut aussi rendre compte des traces de
l'énonciation et aborder l'étude de nouveaux genres de discours
- ici le genre de discours interactif émergeant, propre à la FAD
des étudiants de FLE qui apprennent en échangeant dans le cadre
d'un scénario pédagogique qui se construit au fur et à
mesure que se construit leur relation.
Notre étude se positionne comme une contribution aux
études exploratoires et qualitatives des échanges en ligne dans
le cadre des apprentissages des langues. Des trois domaines possibles de
référence de ce nouveau champ d'études : l'analyse
des interactions en classe de langue, la communication médiatisée
par ordinateur (CMO) et l'apprentissage collaboratif assisté par
ordinateur (ACAO), nous nous situons dans la CMO pour
« décrire les nouveaux discours nés de l'utilisation
des outils électroniques » (Mangenot & Zourou , 2007).
2
METHODOLOGIE
Notre propos est de mettre en lumière les actions -
verbales et non-verbales - sous-jacentes à la communication
pédagogique médiatisée par ordinateur ; notre
attention se portera ainsi sur la structure du processus de communication -
comme manifestation des caractéristiques d'un modèle ou type de
relation, rencontre ou interaction didactique en ligne. La méthode
choisie est celle de l'observation et de la description des données
brutes enregistrées sur Internet. Nous allons, en premier lieu,
justifier le choix des données et expliquer leur saisie et leur
traitement informatique, pour ensuite présenter et justifier
l'évolution dans la sélection des variables prises en
considération pour notre étude en fonction de l'orientation de
la recherche.
2.1 Choix et type
de données
Notre parcours professionnel, évoqué dans
l'introduction de cette étude, d'enseignante et de formatrice a
été très influencé, d'abord, par l'arrivée
des méthodes communicatives, basées sur des approches
socio-constructivistes, qui conseillaient l'utilisation des documents
authentiques à la fois comme déclencheurs de la parole en cours
et parce qu'ils apportaient l'authenticité des communications sociales,
propres des rencontres en milieu `naturel'. Ensuite, par la l'arrivée de
l'ordinateur en réseau devenu, à la fois, d'une part, base de
données (fournisseur des ressources documentaires) ; et d'autre
part, moyen de représentation et de communication facilitant les
échanges réels entre apprenants d'une langue
étrangère et natifs de cette langue (Telenti 1997, 1998, 1999,
2000).
2.1.1 Justification du choix des
données
En nous lançant dans cette étude, nous voulions,
tout d'abord, répondre à des questions de cet ordre :
« Peut - on envisager d'acquérir des compétences
culturelles lors d'un échange entre étudiants en ligne ? Les
étudiants laissent-ils des traces de comportements culturellement
marqués ? » Nous avons pour ce faire décidé
d'examiner les échanges à l'aide des outils d'analyse
empruntés à la pragmatique. Concrètement, le choix des
données du tutorat franco-espagnol se justifie par le fait que ce sont
les pays et les langues-cultures que nous connaissons le mieux, ce qui, nous
pensions, pouvait faciliter une meilleure compréhension des aspects
interlinguistiques et interculturels.
D'un autre côté, il s'agit d'un échange a
priori très asymétrique comportant des natifs ou experts
préparant un Master en FLE et des apprenants débutants ou faux
débutants pour qui le français est une matière parmi
d'autres. Comment se construit cette modalité de communication ?
Nous avons examiné les données de l'échange 2005/2006 et
le choix s'est finalement porté sur les échanges qui ont eu lieu
cette année 2006/2007, en raison d'une plus grande possibilité de
contact avec les intervenants, s'il le fallait, pour des besoins de la
recherche.
2.1.2 La saisie des observables et la
constitution du corpus
Tout d'abord, il faut préciser que parmi l'ensemble des
données brutes constituant ce tutorat en ligne : les tâches
intégrant le scénario pédagogique et les messages du
scénario de communication, nous avons sélectionné comme
objet d'étude les messages qu'apprenants et tuteurs ont
déposé sur le forum (TABLEAU 2). Ces messages servent
surtout à faire parvenir le travail à accomplir (la
réalisation ou la correction d'une tâche). Le forum est,
donc, la « scène » dans laquelle se déroule
la `vraie' communication - 'vraie' parce que même si elle est
tout à fait spontanée, non-inventée, authentique, elle a
lieu dans un cadre pédagogique, soumis donc à des contraintes
d'ordre divers.
Comme ces données brutes sont électroniques
(l'ensemble des messages échangés sur forum) elles apparaissent
structurées par le système informatique (le forum de la
plate-forme Moodle) accessible via Internet. Afin
d'étudier la structuration du système, nous avons
réalisé d'une part des copies de quelques écrans
correspondants à la page d'accueil, à la présentation de
l'organisation des forums et, `à l'intérieur' de
ceux-ci, des écrans correspondants aux fils de
discussion ; et d'autre part nous avons procédé
à des copies d'écrans montrant la première intervention
d'un fil de discussion et l'enchaînement des réponses, ainsi que
les options de présentation des données qui s'ouvrent à
disposition des émetteurs et des récepteurs. En outre, nous
avons relevé des écrans montrant les options du système
mises à disposition des émetteurs : pour des interventions
initiatives et des réponses, de façon à
étudier les aspects interactifs propres au système (rapports
utilisateur-ordinateur-logiciel) ainsi que les espaces discursifs (dans les
interfaces graphiques) avec lesquels interagissent les scripteurs.
Suite à ces démarches destinées à
permettre d'observer et de décrire « la
scène » mettant en relief les possibilités offertes par
le système du point de vue interactif et dynamique (l'articulation
système - utilisateurs), nous procéderons aussi à relever
des contributions individuelles indépendantes ou
enchaînées, soit par la même procédure technique de
reproduction de l'écran, soit par l'extrait des messages (à
l'aide des outils copier-coller) afin de pouvoir
présenter formellement des échanges (des interventions
enchaînées sémantiquement).
Afin d'examiner de plus près le contenu et la forme des
contributions, nous avons saisi la totalité des messages, d'abord
séparément et, dans un deuxième temps, en unités de
sens à l'aide des outils informatiques. Les changements
opérés par nos soins ont été leur anonymisation et
quelques petites modifications non-significatives de leur aspect formel :
réduction de la taille des caractères et perte des couleurs des
intitulés. La disposition spatiale a été respectée.
Les messages sont présentés dans cette
étude dans leur intégralité (les coupures sont
indiquées par des points suspension entre deux crochets). Une
codification est mise en place afin de signaler si le scripteur est un
étudiant de FLE (E) ou un étudiant-tuteur (T), quel est son
groupe d'appartenance (groupes A, B, C, D) et quel est le forum d'où le
message a été extrait. Les étudiants-tuteurs ont ouvert
des forums consacrés aux différentes tâches
(appelées activités par les groupes C et D)
destinés à chaque groupe et, à l'intérieur de
chaque groupe, pour chaque tâche (ils ont nommé forum, le
premier forum de chaque groupe ; et ensuite tâche1,
tâche2... ou activité1,
activité2...). Nous présenterons à nouveau cette
convention dans l'analyse des interventions.
2.2 Démarche
de construction d'un modèle
Nous allons présenter ici les démarches
méthodologiques que nous avons mises en place ainsi que l'explication
des différentes étapes prises en considération pour
l'étude des données.
2.2.1 Observation et présentation
des données
Nous avons commencé par la lecture et la
« transcription » des données brutes. D'abord, nous
avons examiné les plus petites unités de sens,
délimitées par la pragmatique illocutoire, les actes de langage.
Ainsi, nous avons mis au jour une sorte de squelette ou structure des messages.
Nous avons choisi d'encadrer des messages, des échanges et des
séquences qui apparaissaient à l'écran isolés
(pour les premiers) ou enchaînées (pour les autres).
A l'aide des lectures réalisées,
consignées dans le cadre théorique, nous avons
réexaminé ce corpus et veillé à respecter les
unités de sens des messages, échanges et séquences
-recadrés selon leur sens par nos soins. A plusieurs reprises nous avons
été obligée de revenir sur les données brutes
(accessibles sur Internet) afin de mettre en application et croiser
différents notions et outils méthodologiques empruntés
à d'autres courants et disciplines évoqués dans la partie
théorique. Ces copies d'écrans qui seront infra
présentées, de même que les encadrements des contributions,
nous serviront à décrire statiquement des instants `fugitifs',
extraits du flux dynamique de l'interaction.
2.2.2 Approche systémique
Nous offrons, dans la première partie de l'analyse,
quelques données quantitatives mais nous nous tournons ensuite vers
l'analyse qualitative, parce que nous avons trouvé que, pour
décrire cette situation de communication, il faut passer par le sens,
par l'interprétation. Au moment de l'interprétation du sens de
cette communication pédagogique médiatisée par ordinateur,
nous avons recouru autant à la considération des contraintes
imposées par le système technologique qu'à celles
imposées par la situation institutionnelle d'apprentissage : aux
variables dues au dispositif spatio-temporel, au « contrat
didactique » auquel sont `attachés' les participants de
façon implicite...
Enfin, suite à l'application sur le corpus de ces
différents regards, nous nous sommes tournée vers l'approche
globale ou systémique, la seule approche qui nous permettait de
décrire tous les aspects de façon intégrée, qui
« consiste à donner plus d'importance aux relations entre les
variables d'une situation donnée qu'à l'étude
isolée de telle ou telle variable » (Mangenot 2000 :
118).
2.2.3 La modélisation
Ce travail descriptif d'une modalité
particulière de communication pédagogique
médiatisée par ordinateur se veut une contribution à une
meilleure compréhension des pratiques d'enseignement-apprentissage
à distance en mode asynchrone, facilitées par les nouveaux moyens
technologiques. L'approche systémique vise à tenir compte de
toutes les variables, linguistiques et extra-linguistiques, intervenant dans la
communication et notamment la mise en relief de l'influence exercée par
les moyens informatiques : l'ordinateur et les logiciels qui servent
de canal de communication. Quel est l'effet de la médiatisation
technologique dans la communication ? Nous avons
présenté des travaux réalisés qui ont
déjà exploré ce terrain et donné des
résultats à l'aide de différents outils d'analyse.
Dans la lignée de ces nombreux travaux qui ont
analysé les interactions en classe de langue, l'objectif de notre
contribution est d'apporter des éléments qui aideraient à
« construire un modèle de description qui puisse mettre en
évidence `l'architecture du jeu discursif'. C'est de toute
évidence un modèle fonctionnel » (Pléty
1993 : 72).
Face à un ensemble assez vaste de données, qui
se présentent sous une forme très structurée par le
système informatique, le premier problème qui se pose est celui
de la sélection et du traitement des indices pertinents pour mettre en
relief « les rangs utiles à la
description » (ibidem).
2.2.4 Domaines ou niveaux
d'analyse
Nous avons décidé de distinguer trois
domaines ou niveaux que nous présentons comme :
macro, méso et micro (Develotte, 2006 :
88), à l'intérieur desquels nous avons décliné une
série de paramètres qui nous ont paru indispensables pour
l'analyse de cette modalité de communication médiatisée.
Le niveau macro correspondrait aux contraintes
institutionnelles et en fonction du projet de formation et de recherche ;
le niveau méso se situerait plutôt dans la convergence des
interactants avec les outils informatiques et les ressources, et entre les
interactants ; le niveau micro refléterait les traces discursives
verbales et non-verbales.
TABLEAU 3: Domaines & paramètres à aborder
dans la description
Niveau macro :
contexte situationnel
o cadre didactique, statut et rôle des participants,
scénario pédagogique, environnement informatique ;
paramètres spatio-temporels.
Niveau méso :
organisation des interactions (leur hiérarchisation structurelle et
temporelle)
o médiatisation informatique,
interactivité : structuration des interventions en
forum> fils de discussion> réponses
o enchaînement des interventions (arborescence à
l'intérieur des fils de discussion)
o données quantitatives / données qualitatives
facilitées par le système
§ médiatisation et interaction : l'acte
d'émission, moment et mode d'intervention (Répondre
à un message / Nouveau sujet de discussion), structuration
interne qui échappe au système informatique
Niveau micro : les traces discursives,
pragmatiques et interactionniste, et la médiatisation informatique
o mise en place d'un type de relation
o positionnement énonciatif, termes d'adresse
o gestion du polylogue
o actes de langage, les échanges et les
séquences
o interventions initiatives, réactives, proactives et
mixtes
o dimension référentielle, relationnelle et
régulatrice
o traces des mouvements d'ajustement réciproques
o emprunts à l'écrit formel et à l'oral
conversationnel
o ponctuation expressive et émoticones.
3 ANALYSE
Cette partie de notre étude sera consacrée
à la description des données de notre corpus. Suivant la
perspective systémique, nous allons mettre au jour les variables qui,
selon notre point de vue, composent la situation de communication
pédagogique en ligne dont il est question. Nous commencerons, ainsi, par
la présentation de la situation institutionnelle de formation et les
autres paramètres relevant du domaine macro ; nous passerons en
revue ensuite les aspects reliant le système de communication et des
traces discursives d'interaction organisation et structuration des
interventions correspondant au niveau méso, et finalement nous nous
référerons aux aspects relationnels d'ajustement
réciproque.
3.1 Contexte
institutionnel
La présentation du projet Le français en
première ligne, « que l'on peut assimiler à une
recherche-action-formation », son contexte institutionnel, son
évolution et les particularités du volet franco-espagnol peuvent
être consultés dans Mangenot & Zourou (2007) et sur le site
web du projet4(*). Nous nous
limitons à signaler ici qu' « [i]l s'agit de faire
réaliser par des étudiants en master français langue
étrangère (maîtrise FLE entre 2002 et 2004, master 2
professionnel ensuite ) des tâches multimédias pour des apprenants
étrangers distants et de leur faire tutorer ces tâches, afin de
les former à l'enseignement d'une langue via
Internet ».
3.1.1 Dispositif du tutorat en ligne
Le schéma présenté ci-dessous, qu'il faut
comprendre de façon dynamique (voir 1.2.1) montre le dispositif
spatio-temporel du tutorat en ligne qui est à l'origine de la situation
de communication pédagogique médiatisée par ordinateur de
notre corpus franco-espagnol, correspondant à l'année en cours,
2006/2007.
Le cadre intérieur du schéma représente
le groupe de vingt apprenants espagnols en première année
à l'université (non spécialistes, débutants ou faux
débutants en français) qui se connectent sur Internet, en
présence de leur enseignant, pour participer à la formation
complémentaire à distance, depuis une salle informatique de
l'université (ce qui a lieu deux heures par semaine, entre septembre et
décembre 2006) ; un cadre plus large représente à
distance les quatre étudiants-tuteurs de l'université Stendhal
Grenoble 3 qui ont le rôle d'experts de la langue.
Les étudiants-tuteurs préparent en binôme
les tâches à faire, tâches que chaque tuteur mettra en
application avec cinq apprenants. Les apprenants découvrent les
tâches à faire (montrées par les flèches en
pointillé), les réalisent et les envoient pendant leurs heures de
cours (les flèches unidirectionnelles représentent les
communications ou messages échangés à ce sujet). Les
tâches sont élaborées à partir de documents
multimédia -authentiques, publiés sur Internet ou
élaborés par les tuteurs en support écrit, audio et
vidéo. Nous n'allons examiner, comme nous avons déjà
signalé, que les messages échangés entre les
étudiants
SCHÉMA 1 : Dispositif du tutorat en ligne
Revenons sur une des caractéristiques du forum, le
caractère public des messages, aspect que nous mettrons en relation avec
une observation de Kerbrat Orecchioni ([2001] 2005 : 56): les
destinataires premiers des messages des apprenants (qu'elle qualifie de
« principaux ») sont les tuteurs et les
destinataires premiers des messages des tuteurs sont les
apprenants ; mais tous ces messages ont des destinataires secondaires
ou `latéraux', leurs enseignants.
Quand l'étudiant (apprenant ou tuteur) rédige sa
contribution, il pense essentiellement au destinataire premier mais il a
éventuellement en tête aussi les autres destinataires (notamment
le professeur espagnol pour les étudiants de l'Université de Leon
et le professeur français pour les étudiants de
l'Université Stendhal Grenoble 3).
3.1.2 Cadre pédagogique
Nous poursuivons la description des variables
extra-linguistiques de cette modalité de communication
pédagogique avec un schéma représentant le cadre
pédagogique, les facteurs intervenant dans la situation de communication
dont il est question. Le triangle pédagogique classique formé par
l'apprenant, l'enseignant et les savoirs est modifié par l'entrée
en scène de l'ordinateur comme nous allons montrer
ci-après :
SCHÉMA 2 : Composantes de la situation
pédagogique
Une précision à donner : la variable
Contenus d'enseignement correspond ici d'un côté à
la langue française (pour les étudiants espagnols), tant comme
contenu théorique (l'objet des tâches) que comme moyen de
communication et, d'un autre côté, à la méthodologie
du tutorat à distance (pour les étudiants de Grenoble) qui
englobe aussi plusieurs aspects (réalisation et mise en ligne des
tâches, correction des productions, suivi de la formation ...) .
A l'extérieur de ce schéma, nous avons voulu
représenter les axes de l'encadrement pédagogique disciplinaire,
méthodologique et technique où vont `s'insérer' et `agir'
les étudiants pendant le tutorat tout en les construisant : la
formation à distance (FAD) en français langue
étrangère (FLE), servira de complément à des cours
présentiels. Cette modalité de tutorat hybride va se
réaliser sous forme de scénario pédagogique (basé
sur la réalisation de tâches) à travers des outils d'une
plate-forme de communication sur Internet.
Concernant la plate-forme Moodle, elle fournit les
outils nécessaires aux enseignants, tuteurs et apprenants pour
l'ouverture d'espaces d'échange et de partage, publication et
consultation à distance de contenus pédagogiques et la
communication asynchrone. L'outil qui va nous intéresser est le forum.
Comment se présente cet outil ? quelles sont les traces des actions
`techniques' réalisées à l'aide des moyens offerts par le
logiciel ? Quelle influence a-t-il sur la communication
pédagogique ? Nous allons essayer de répondre à ces
questions, dans la partie suivante consacrée au niveau
intermédiaire ou méso de l'analyse.
3.2 Le forum de la
plate-forme Moodle, un système hiérarchisé
Nous poursuivons la description des variables prises en compte
pour notre étude, avec celle des paramètres du domaine
intermédiaire ou méso. Nous allons regarder d'abord l'aspect
`physique' du `lieu de rencontre', les écrans de la plate-forme
Moodle : nous allons montrer en premier lieu l'interface du
projet, l'écran que découvre le participant ou le visiteur -
comme c'est notre cas -, pour passer ensuite à la présentation
des écrans successifs qui s'ouvrent aux étudiants et qui nous
montrent les différentes modalités d'interactivité, de
structuration des données offertes par le forum de Moddle,
ainsi que les différentes formes d'organisation des interventions en
fils de discussion à l'intérieur d'un forum.
3.2.1 Structuration
hiérarchisée des contributions
Le premier écran du volet franco-espagnol du projet
Le Français en Première Ligne, ci-après,
donne accès aux forums créés dans la
plate-forme Moodle à l'attention des participants (et visiteurs
autorisés). Les étudiants des quatre groupes trouvent ici les
forums qui ont été ouverts au fur et à mesure
pour eux.
ECRAN 1 : Projet León -Grenoble
On peut apercevoir dans la partie inférieure de
l'écran les sept forums du groupe A : Forum Etudiants Groupe A,
Tâche 1, Tâche 2, Une chanson pour les vacances ... Tâche 4,
Tâche 5 et Tâche 6.
Si on faisait défiler cet écran nous pourrions
rencontrer les autres forums des autres groupes. Chaque forum (voir
tableau infra) donne accès aux fils de discussion
(terme que nous utiliserons dans un sens technique) ou sujets de
discussion (terme qui reflète plutôt l'aspect communicatif).
La copie d'écran suivante représente l'interface
qui s'ouvre après avoir cliqué sur le lien du forum
appelé Activité 2. Nous pouvons voir, ici, comment
se présente l'accès aux sujets de discussions et au
nombre d'interventions ou réponses (ci-dessous, nous pouvons
observer qu'un seul sujet de discussion a suscité 14
réponses).
ECRAN 2 : Un seul fil de discussion
D'autres configurations sont possibles comme le montre la
copie d'écran ci-dessous :
ECRAN 3 : Plusieurs fils de discussion
Ce dernier écran offre à la vue un autre
`tissage': en effet, au lieu d'un fil de discussion, nous voyons 10 fils
ouverts qui ont suscité 21 réponses. Une double contribution de
la tutrice, 8 échanges binaires - en réalité ternaires
(puisque l'étudiant répond au tuteur, qui lui répond
à son tour) et 1 échange apparemment ternaire ( mais formé
par quatre tours de parole, selon le même principe). A
ces données quantitatives s'ajoutent d'autres données
qualitatives : le nom de celui ou celle qui a ouvert la discussion,
l'intitulé de celle-ci et le nom et la date de celui ou celle qui a
déposé le dernier message. Dans le cas des échanges ayant
plus d'une réponse, il n'est pas possible d'avoir davantage de
renseignements : il faudrait `ouvrir' le fil de discussion pour
avoir directement accès aux contributions enchaînées, ce
que nous ferons dans la suite de notre étude (voir 3.2.3).
3.2.2 Données quantitatives
Cette première approche des données brutes (des
écrans correspondants aux forums et aux fils de
discussion) nous facilite un aperçu du différent
comportement de chaque groupe d'étudiants, sorte d'esquisse de la
production et structuration et organisation de l'interaction.
Nombre
|
Étudiant(e)s
|
Forums
|
Fils
|
Messages
|
Groupe A
|
1 tuteur
1 apprenant et
4 apprenantes
|
8 forums
|
42 fils
|
90 messages
|
Groupe B
|
1 tutrice
2 apprenants et
3 apprenantes
|
8 forums
|
42 fils
|
96 messages
|
Groupe C
|
1 tutrice
1 apprenant
4 apprenantes
|
10 forums
|
64 fils
|
188 messages
|
Groupe D
|
1 tutrice
1 apprenant
4 apprenantes
|
9 forums
|
73 fils
|
164
messages
|
TOTAL
|
24 étudiants
- 6 étudiants
- 18 étudiantes
|
35 forums
|
221 fils
|
538
messages
|
TABLEAU 4 : Données quantitatives
La vue de ces résultats invite à s'interroger
sur les raisons qui peuvent avoir provoqué un degré
d'activité si différent et à comparer les raisons de la
différente productivité des groupes et des étudiants.
C'est le moment de préciser que ce qui attire notre attention, dans
cette étude, n'est ni le comportement individuel des apprenants ni celui
des tuteurs, mais la spécificité de l'interactivité qui
s'établit entre les étudiants et le système
informatique et les effets de la médiatisation : du canal sur
l'interaction ; concrètement, dans cette sous-partie 3.2.3, notre
but est de mettre en relief à la fois l'entrelacement des communications
et leur organisation séquentielle.
3.2.3 L'arborescence dans les fils de
discussion
Une autre fonctionnalité de la plate-forme
Moodle donne accès à l'arborescence de chaque
fil de discussion. Cette approche, encore plus
détaillée, met en évidence le type d'enchaînements
des contributions. Pour y accéder, il suffit de cliquer sur
l'intitulé d'un sujet de discussion et de sélectionner l'option
Réponses en fils de discussion, qui est la sélection par
défaut, sur le menu déroulant situé en haut de la page
(ECRAN 4).
A la différence de l'approche antérieure,
celle-ci permettrait de quantifier le nombre de messages émis par chaque
étudiant, prendre note des données chronologiques et des
intitulés des messages ainsi que des noms des destinataires premiers des
messages. Ci-après, l'ECRAN 4, illustre ce que nous venons de
dire :
ECRAN 4 : arborescence à l'intérieur d'un
fil de discussion
Cette ouverture affiche, donc, le premier message
d'un fil de discussion et son arborescence : les
enchaînements des interactions que nous allons appeler `structurales'
mais ne permet de connaître le contenu, ni le type d'interaction
intersubjective qui se noue entre les scripteurs.
Si, par contre, notre choix porte sur l'étiquette
Réponses emboîtées du menu déroulant, en
haut de l'écran, ce sont les contributions qui vont apparaître
affichées : l'une à la suite de l'autre ou
enchaînées entre elles - comme l'exemple représenté
infra - ce qui est indiqué par le petit décalage. C'est
le mode par défaut du système.
ECRAN 5 : Message d'un apprenant suivi de la
réponse de son tuteur
L'émetteur n'a pas besoin de s'identifier, son nom
apparaît affiché dans l'intitulé du message par
défaut. L'utilisation de l'option Répondre
enchaîne les contributions aussi par défaut, ce qui permet de
connaître le(s) destinataire(s) premier(s) du message sans que mention en
soit faite.
ECRAN 6 : Espace d'écriture pour répondre
à un message
Le fait de cliquer sur Répondre ouvre l'espace
d'écriture que nous pouvons apprécier supra.
L'intitulé s'affiche par défaut, précédé de
Re. (Ici, Re. : Tâche 1), mais peut être
modifié par l'émetteur.
Le bouton Parcourir permet de sélectionner un
document dans l'organigramme de l'ordinateur ou d'un autre support informatique
et de le joindre au message.
Dans la suite de notre étude, les unités de
sens:
- le message ou intervention indépendant (qui est en
réalité souvent une intervention initiative des tuteurs
adressée au groupe d'apprenants),
- l'échange entre l'apprenant et son tuteur
(échange binaire ou ternaire),
- la séquence (formée par plus de trois messages
enchaînés),
qui n'apparaissent pas toujours ensemble dans les
écrans, nous avons décidé de les réunir et de les
présenter encadrées pour faciliter leur lisibilité.
3.2.4 Structuration et
fonctionnalité interne des contributions
La lecture des messages des apprenants nous permet de
constater des conduites qui ne respectent ni la structure hiérarchique
du forum, ni les consignes données par les tuteurs au début de
l'échange se référant au respect de l'affichage des
réponses correspondant au thème dans chaque fil de discussion.
L'exemple suivant illustre ce comportement.
T/Btâche2
Consignes par
m
d - Thursday 19 October 2006, 10:09
Bonjour à tous,
Hola hola,
Postez votre fichier son en réponse à
ce message ( et pas comme nouveau fil de discussion).[...]
MESSAGE 1
Il y a deux possibilités offertes par le système
qui sont sous-jacentes à deux comportements-type, au moment de
l'émission d'un message : soit on clique sur l`étiquette
Répondre, soit on se décide par l'ouverture d'un
Nouveau sujet de discussion. La première des options est celle
choisie davantage par les tuteurs, la seconde est très
fréquemment utilisée par les apprenants. Nous pensons que cette
conduite des apprenants reflète la recherche de la facilité
d'accès aux messages des tuteurs. En effet, si chaque apprenant ouvre un
Nouveau fil de discussion et le tuteur utilise l'étiquette
Répondre, ces échanges s'affichent sur l'écran
des fils de discussion, dans le forum consacré au travail en cours (voir
supra ECRAN 3). La recherche des contributions, à
l'intérieur d'un fil de discussion, oblige, par contre, à
parcourir toute son arborescence comme l'a montré l'ECRAN 4 .
3.2.5 Interventions
initiatives, réactives, proactives et mixtes
Les interventions des apprenants répondent à
deux types de comportements : ou bien elles s'enchaînent aux
consignes qui ont été données aux groupes par leur tuteur
respectif ou bien elles répondent à des messages qui leur ont
été adressés `personnellement'. Il y a donc deux types de
contributions réactives des apprenants, celles en réponse
à une consigne générale et celles en réponse
à un message qui leur est adressé `personnellement' (mais qui
peut être lu par tous les participants au forum).
Les interventions initiatives des tuteurs sont les consignes,
destinées à mettre en place les règles du jeu. Comme nous
l'avons déjà indiqué, elles sont préparées
par deux tuteurs en binôme et sont ensuite publiées par chaque
tuteur à l'attention de son groupe d'apprenants. Ci-dessous nous
revenons sur le MESSAGE 1 qui contient deux requêtes, dont une explicite
d'organisation des contributions (postez...) et une autre plus
nuancée par l'utilisation d'une tournure (pensez à...).
L'envie de recevoir la photo est exprimée par les points
d'exclamation.
T/Btâche2
Consignes par
m
d - Thursday 19 October 2006, 10:09
Bonjour à tous,
Hola hola,
Postez votre fichier son en réponse à
ce message ( et pas comme nouveau fil de discussion).
PS : Pensez à nous envoyer une photo de votre tête
!! Mucha suerte !! Si si, hablamos espanol !!!
MESSAGE 2 (Message 1, complet)
La plupart des interventions des tuteurs sont
réactives ou mixtes, étant destinées à
évaluer le travail réalisé par les apprenants et à
les orienter et les accompagner dans le cadre de cette relation
pédagogique. Pour mettre en relief ce double mouvement, nous allons nous
appuyer sur l'unité échange, de façon à
situer dans son contexte discursif chaque intervention. L'échange
ci-dessous nous sert d'exemple d'une intervention mixte, réactive et
proactive du tuteur:
E+T/Aforum
tâche 1- D par
s f
d - Tuesday 17 October 2006, 19:00
Bonjour!
voilà le premiere tache
correction tache 1 par
m
bt - Sunday 22 October 2006, 14:32
voici la correction de ton travail, avec des commentaires. pour
la tache 2 peux tu envoyer ton travail sur le forum en réponse aux
consignes? Merci
ECHANGE 1
Il s'agit de la tâche1, elle n'a pas
été déposée par l'apprenant sur le forum
approprié (tâche1), mais sur le forum
ouvert pour l'échange des premiers messages (dénommé
forum). Afin de corriger cette conduite et de veiller à une
certaine organisation discursive (instaurée dans le forum, où
chaque forum est destiné à une tâche), le tuteur,
une fois rendue la correction de son travail à l'apprenant (segment
réactif de l'intervention), ajoute une question qui a valeur de
requête (peux tu...?) ou segment proactif de
l'intervention, le merci comme clôture contribuerait
à renforcer cette requête indirecte.
3.2.6 Gestion du
polylogue
Notre corpus présente une particularité, bien
que l'outil de communication employé, le forum, soit par défaut
un espace public de communication auquel tous les participants ont accès
et où ils peuvent réagir aux contributions des autres : nous
constatons que la communication est quasi exclusivement personnalisée
entre apprenant et tuteur. Le schéma est le suivant : soit les
tuteurs émettent des messages collectifs, sans indiquer qui a
préparé la tâche proposée aux apprenants ; soit
le binôme des tuteurs est mentionné, comme c'est le cas des deux
tuteurs qui ont préparé le travail à faire pour les
groupes A et B, ce qui est noté par la tutrice du groupe B à
l'attention des apprenants de son groupe B:
T/Btâche2
Re: consignes par
m
d - Sunday 22 October 2006, 18:41
Voici un exemple de conversation que M. et moi avons fait. [...]
MESSAGE 3
Les apprenants répondent individuellement (ou en
binômes) à leur(s) tuteur(s) et ceux-ci répondent à
leur tour individuellement (ou à deux) aux apprenants, comme nous
verrons par la suite. Mais, voyons trois situations dans lesquelles un message
d'un apprenant fait part d'un travail réalisé en
binôme : comment sont-elles traitées par le tuteur ?
Comment sont gérées les marques d'énonciation et les
termes d'adresse ?
E/Ctâche1
Re: Tâche 1, activité 3 par
A
B - Friday 20 October 2006, 13:48
Salut,
Voilá mon audio avec ma copine S..<lien>
Au revoire!
Tuteur répond à B
Message pour B. par
a
p - Saturday 21 October 2006, 17:31
Bonjour,
j'ai écouté votre dialogue avec S (
activité 3) . [...]
Tuteur répond à S
Message pour S. par
a
p - Saturday 21 October 2006, 17:36
Bonjour,
j'ai écouté votre dialogue avec B ( activité
3) . [...]
ECHANGE 2
Un participant à un forum en ligne utilise un code
d'accès que le logiciel `reconnaît', `retient' et va afficher par
défaut en tête du message, comme le montre l'intitulé de la
première intervention ci-dessus (...par A.B.). Si le message se
réfère à un travail réalisé en binôme,
il y a un deuxième émetteur implicite : c'est le cas ici,
car B. fait allusion dans le corps du message à sa copine
S. avec qui elle a réalisé l'activité 3 de la
tâche 1. Le récepteur (ici, la tutrice), par contre, s'il
n'utilise pas l'option Répondre au moment de répondre
à un message, il doit indiquer explicitement leur(s) destinataire(s), ce
qui est fait à cette occasion avec l'ouverture de deux sujets de
discussion à l'attention des apprenantes : Message pour B
et Message pour S , contenant des commentaires dirigés
à chacune d'entre elles. Ces trois interventions font partie d'une
séquence plus longue, car la tutrice leur reproche que le travail
réalisé est incomplet et les apprenantes vont répondre
à leur tour à leur tutrice...
Si le tuteur s'adresse à deux apprenants qui ont
réalisé une tâche ensemble suivant les consignes, le
tuteur fait le choix d'afficher le nom des deux destinataires dans
l'intitulé du message, comme nous voyons dans la réponse du
tuteur ci-après:
E+T/Ctâche2
Re: Tâche 2, activité 3 par
A
B - Friday 27 October 2006, 13:29
Salut!
Voici l'activité 3 avec S, [...].
A plus!
Message pour B et S par a p - Monday 30 October 2006, 09:48
Salut, [...]
ECHANGE 3
Souvent les tuteurs encouragent la communication
pédagogique entre les apprenants, comme le fait la tutrice dans
l'émission de son message. Voyons l'extrait suivant :
T/Btâche2
Re: tache deux audio par
m
d - Saturday 4 November 2006, 18:52
Bonjour I !! [...] Comme tu as fais le travail avec B., montre
lui les corrections aussi.[...]
MESSAGE 4
Les étudiants, n'ayant que le tuteur comme destinataire
principal de leurs contributions, ne se sentent pas obligés d'indiquer
le nom de leur destinataire. Parfois, néanmoins, ils s'adressent
individuellement au binôme de tuteurs qui prépare les
tâches, comme les deux premières contributions ci-après.
D'autres fois, les contributions transmettent une `voix collective' (nous
) qui s'adresse aux tuteurs (vous ), comme le troisième
exemple ci-après :
E/Btâche1
Présentation oral (I) par
i
f - Friday 20 October 2006, 13:47
Voilà ma présentation oral du tache 1.
C'est pas très longue mais j'espère que ce soit
suffit.
Au revoir M et M!
E/ Btâche2
Voici le tâche deux de I par
i
f - Friday 27 October 2006, 13:38
Salut!
Ici je vous laisse ma deuxième tâche. Comment
ça va M et M?
E/Btâche3
Nous avons des problèmes avec cette tâche par
F
U - Friday 3 November 2006, 13:35
Salut,
L'activité que vous nous proposez présente des
problèmes techniques: [...]
MESSAGE 5, 6, 7
Le pronom vous utilisé dans les MESSAGES 6,7
est une autre preuve de la conscience des apprenants du fait que les tuteurs
travaillent ensemble.
Nous pouvons extraire quelques conclusions des points
traités dans ces deux sous-parties 3.1 et 3.2. Notre regard, lors de
cette partie descriptive, s'est posé d'abord sur le contexte
situationnel (niveau macro) et ensuite sur l'organisation structurale des
données brutes de notre corpus (niveau méso). Dans cette
deuxième approche, nous avons croisé des observations du
fonctionnement du système informatique avec des actions communicatives
(langagières et instrumentales) des émetteurs et nous en avons
ainsi tiré quelques résultats :
- le système de structuration des
données ne correspond pas toujours avec les interactions
intersubjectives sous-jacentes (non répertoriées par le
logiciel) ;
- le système ne rend pas compte de la pluralité
d'énonciateurs et énonciataires des messages ;
- les messages des tuteurs peuvent apparaître à
l'écran comme messages indépendants ou tronqués mais ce
sont en réalité des interventions
initiatives multiadressées;
- les messages des apprenants qui peuvent paraître des
interventions initiatives sont en réalité des interventions
réactives à des messages des tuteurs ;
- la plupart des messages font partie d'un échange
binaire (formé par les deux types d'intervention que nous venons
d'évoquer) ou ternaire (quand il est complété par une
réplique).
3.3 La construction
d'une relation, mouvements d'ajustement
Cette partie sera consacrée plus
particulièrement à la mise en lumière des traces verbales
et non-verbales des actions entreprises par les uns et les autres pour
l'établissement de la relation didactique et leurs ajustements
réciproques. Dans ce genre d'exercice de communication à
distance, il faut absolument prendre en compte les limites techniques ainsi que
des aléas de tous ordres qui peuvent entraver les communications et
modifier les relations entre les interactants. Quel est en
réalité le contenu des messages ? Quel type de relation
instaurent les participants à cette formation en ligne ? Nous
allons étudier d'abord des contributions à dominante
relationnelle, pour passer ensuite à l'examen de la dominante
référentielle pouvant provoquer des situations menaçantes
pour l'équilibre de la relation.
3.3.1 Un type de relation se met en
place
Nous allons nous intéresser ici aux aspects
relationnels, interindividuels, médiatisés par ordinateur. A tel
effet, nous examinerons avant tout des messages de présentation des
étudiants. En premier lieu, nous nous occuperons de la façon dont
les présentations des apprenants ont lieu et ensuite celles des
étudiants-tuteurs. Les premières contributions des apprenants de
français reflètent une conduite langagière assez
conventionnelle.
Les premiers messages des apprenants montrent un registre
familier et les conventions propres aux rencontres informelles en face
à face (cette manière de se présenter peut aussi
correspondre à celle adoptée en situation d'échange
communicatif en salle de cours entre apprenants). Les quatre contributions
suivantes peuvent servir d'exemple:
E/Aforum
Salut! par
s f
d - Friday 29 September 2006, 14:04
Salut M
Je m'apelle D. j'ai dix huit ans.
E/Bforum
Bonjour par i f - Friday 29 September 2006, 14:04
bonjour comment ça va? je m'appelle i
au revoir
E/Cforum
Bonjour par
A R
R - Friday 29 September 2006, 14:00
Bonjour,
Ça va?
Au revoir
E/Dforum
Bonjour par
M M
G - Friday 29 September 2006, 15:32
salut a.!! je m'apelle m et je suis dans la salle d'ordinateurs.
Ça va bien?
au revoir!
Nous rappelons les conventions de
transcription
- E (étudiant de FLE) T (étudiant-tuteur)
- A, B, C, D groupes formés par un tuteur et cinq
étudiants
- Forum, tâche 1, tâche 2 ... noms des forums
Une série comme E/Aforum signifie : message d'un
étudiant du groupe A laissé sur le forum appelé
forum.
Les références aux documents attachés
où aux liens html des messages sont : <lien>
|
MESSAGE 8, 9, 10, 11.
Nous constatons que les apprenants appellent leurs tuteurs par
leur prénom comme le montrent deux des exemples précédents
(Salut M, Salut A.) . Nous remarquons de même le
recours à des signes non-verbaux, comme la répétition de
points d'exclamation et le smiley du dernière message qui
contribueraient à renforcer cette impression de `proximité' ou de
`parité' dans les rapports qu'ils mettent en place avec leurs
tuteurs.
Nous allons, maintenant, nous pencher sur les premiers
messages de trois tuteurs, ci-dessous, afin d'étudier leur façon
de réagir aux messages des apprenants.
T/Dforum
Re: bonjour par a p - Thursday 5 October 2006, 16:43
Bonjour M,
Je suis A ta tutrice et je suis très heureuse de faire ta
connaissance. J'espère que nous allons bien travailler ensemble.
A bientôt
A
T/Aforum
Re: salut par m b - Wednesday 4 October 2006, 13:19
Salut I,
Ça fait plaisir d'avoir un message de ta part, ne
t'inquiète pas nous allons progresser ensemble
T/Cforum
Re: bonjour par a p - Tuesday 17 October 2006, 18:26
Bonjour S,
je suis ravie de faire ta connaissance.
J'attends avec impatience notre collaboration
à bientôt
ta tutrice A.
MESSAGE 12, 13, 14.
Nous observons qu'ils ont utilisé l'option
Répondre (Re : est affiché dans
l'intitulé des messages) et de ce fait ces messages s'affichent à
l'écran à la suite du message initiateur, avec un léger
décalage vers la droite servant de repère au destinataire
visé. Les tuteurs ont néanmoins recours à un terme
d'adresse (M., I., S.) dans l'ouverture (marque affective ou pratique
de routine). L'utilisation du prénom et le tutoiement sont des
marqueurs d'échange symétrique. Par contre, une
référence comme ta tutrice (deux occurrences) ou l'acte
de langage d'encouragement ne t'inquiète pas fonctionnent comme
des marqueurs d'une relation pédagogique et, à la fois, de
position haute dans une échelle. Ce qui confirmeraient les allusions
explicites au travail : travailler, progresser, collaborer (dans lequel il
y a `labor').
Les étudiants-tuteurs sont, en effet, en position plus
`élevée' que les étudiants-apprenants du français
du fait d'être plus âgés et plus compétents en
langue, culture et méthodologie du français que les apprenants,
plus jeunes et démunis dans l'expression en français.
Néanmoins, derrière l'emploi des possessifs à la
première personne du pluriel (nous, notre -
équivalent à `toi et moi' ou à `nous tous') dans les actes
de souhait d'une progression dans la connaissance, on peut percevoir, chez les
tuteurs, une manifestation du statut d'étudiant prêt
à apprendre.
L'analyse de ces trois messages initiaux des tuteurs
reflète bien le va-et-vient entre un type de relation symétrique
(qu'ils établissent avec des étudiants) et
asymétrique : du fait qu'ils jouent le rôle de tuteurs ayant
des responsabilités plus contraignantes.
Nous allons rencontrer souvent des segments ambigus - ou
polysémiques -, comme c'est le cas de celui-ci: nous allons
progresser ensemble ; ce segment peut vouloir dire `je vais te faire
progresser' (le nous n'est alors qu'une manière de créer
un lien social) ; si l'on comprend `tu vas pouvoir progresser comme
apprenant et moi comme tuteur', ce segment serait plutôt marqueur de la
parité ; s'il est compris comme un acte d'encouragement, il
pourrait aussi contribuer à renforcer la position haute du tuteur.
3.3.2 Premiers
échanges à dominante référentielle ou
relationnelle
Lors des moments à
dominante relationnelle, au début et à la fin de la `rencontre',
nous assistons à des échanges très ritualisés,
symétriques et égalitaires : ouverture, question et
réponse de routine, clôture. Ils respectent le rituel habituel des
rencontres informelles qui ont lieu en face à face. Voyons un
exemple :
E+T/Cforum
Bonjour par A R R - Friday 29 September 2006, 14:00
Bonjour,
Ça va?
Au revoir
Re: Bonjour par a p - Thursday 5 October 2006, 21:22
Bonjour ,
tout va très bien
à bientôt
ECHANGE 4
Une fois dépassée l'étape des
présentations, l'échange didactique s'impose tout
naturellement et en même temps le type de relation évolue. Comment
s'articulent la dominante référentielle, du travail à
accomplir, et la dominante relationnelle des relations entre les
étudiants ?
Un exemple, de ces différentes réalisations des
échanges entre étudiants et tuteurs par `tâche'
interposée, serait le suivant :
Atâche2
tache 2 par s f d - Tuesday 24 October 2006, 18:45
Voilà la tâche 2: <lien>
Re: tache 2 par m b- Sunday 12 November 2006, 18:09
voila la correction de la seconde tâche, regarde aussi la
correction du travail de I <lien> à bientôt.
ECHANGE 5
L'apprenant fait parvenir le résultat de son travail
à son tuteur, en pièce jointe, avec des mots comme ceux qu'il
prononcerait en situation de face à face au moment de rendre `la copie'
à l'enseignant. Le tuteur utilise la fonction Répondre
et, sans préambule, recourt aussi à un déictique
(rappelant le geste de pointage), pour signaler le lieu où
l'étudiant va pouvoir faire la connaissance des commentaires à
son travail ; un acte explicite de requête précède la
clôture du message.
Il convient de préciser que la correction des
productions des apprenants a lieu généralement `en privé',
dans des documents attachés aux messages. Cette conduite sépare
le discours plus `naturel', du discours didactique des contenus d'enseignement.
Il arrive, cependant, que les tuteurs incluent des
commentaires et des corrections à propos des tâches dans les
messages et, de ce fait, les messages recoupent les deux sortes de
discours « le discours étranger qui forme le contenu de
l'apprentissage (...) - et le discours qui sert à ménager cet
apprentissage, c'est-à-dire le dialogue entre maître et
élèves, didactique à certains moments, `naturel' à
d'autres » (Kramsch 1984 : 8). C'est le cas du MESSAGE 15,
ci-après, qui présente le discours `naturel' (je suis
contente de te connaître) et le discours `didactique' (Ta
présentation...). L'utilisation des lettres capitales serait
l'équivalent d'une intonation plus accentuée dans le discours
oral en situation de cours présentiel.
T/Bforum
Re: presentation audio_m par
m
d - Wednesday 18 October 2006, 13:26Bonjour Maria, Je suis contente
de te connaître !! Ta présentation est très bien, mais
fait attention à la prononciation de " UNE". Ecoute bien ma voix pour
corriger. A bientôt !!
MESSAGE
15
Les deux exemples présentés ci-après
montrent bien la conscience de coexistence de ces deux types de discours :
dans le MESSAGE 16, le compliment affiché porte sur la tâche
tandis que la correction porte sur le message (discours `naturel') de
l'apprenant. Nous pouvons remarquer que celle-ci est
précédée de l'expression : Je me permets
de..., de même que la correction du MESSAGE 16, portant sur le
message, qui apparaît aussi précédé de l'expression
je dois aussi... Ces expressions des tuteurs, qui introduisent la
correction des messages des apprenants, seraient-elles des mouvements de
figuration, des adoucisseurs des actes menaçant la face de
l'apprenant ?
T/Btâche4
Re: tache 4 par
m
d - Thursday 16 November 2006, 08:39
Bonjour, C'est bien B ! Je me permets de corriger ton
message: Un exercice, une erreur, le troisième
était correct Voila, A bientôt, M.
T/Btâche1
Re: Présentation oral (I.) par
m
d - Thursday 26 October 2006, 09:54
je dois aussi corriger ton message !! [...]
MESSAGE 16, 17
La séquence ci-dessous illustre une situation qui
tourne autour du discours didactique. Le tuteur corrige dans le corps du
message la production d'un apprenant (qui a réalisé une
tâche consistant à simuler un interview) au moyen d'une
référence métadiscursive (sur le discours de l'apprenant)
et métalinguistique (à propos du sens contextuel d'un terme). Le
contrat didactique, ici, permet la correction de la tâche sans `risque'
ni pour la face du tuteur ni pour celle de l'apprenant. Sur la dernière
contribution, qui clôt la séquence, l'apprenant revient sur la
remarque du tuteur et s'auto-corrige en le remerciant :
E+T/Ctâche6
par
A R
R - Tuesday 28 November 2006, 19:56
Bonjour,
Voilà l'interview <lien>
A plus!
Suite
Re: Activité 6 (Interview) par
a
p - Thursday 30 November 2006, 21:09
Bonjour A,
[...]
Pour la phrase dans laquelle tu parle de Gerard Dépardieu
, je ne suis pas sûre mais je pense que tu voulais dire " "Un long
parcours" . On n'utilise pas le mot "trajectoire " dans ce contexte -
là. On utilise le mot "trajectoire " quand on parle du
déplacement d'un objet.
à très bientôt
A
Re: Activité 6 (Interview) par
A R
R - Friday 1 December 2006, 14:36
Bonjour A,
Quand j'ai dit "trajectoire", je parlais du parcours de l'acteur
Gerard Dépardieu. Merci pour la correction.
[...]
Au Revoir
SEQUENCE 1
Nombreux sont les actes constatifs métalangagiers dans
notre corpus, surtout chez les tuteurs. Cette sorte d'intervention discursive
lors d'une rencontre exolingue entre un natif et un alloglotte est à
l'origine des séquences potentiellement acquisitionnelles (SPA) qui
intéressent surtout les chercheurs en interaction-acquisition des
langues5(*).
3.3.3 Mouvements d'ajustement
Le cadre institutionnel fixe les normes, les droits et les
devoirs des uns et des autres. Les tuteurs et les apprenants sont donc soumis
à une `charte' ou `contrat didactique', qui établit des
règles et conditionne fortement ce type de relation (Matthey :
ibid.). Quels procédés mettent-ils en place pour gérer la
transgression des règles suite à des incidents et aléas
divers ? Nous allons présenter quelques situations qui provoquent
des mouvements d'ajustement.
Le cas suivant présente deux messages ayant les deux
aspects contenu et relation presque identiques. Les deux
apprenants suivent le même schéma, ils ont eu recours aux
mêmes actes de langage dans le même ordre : ouverture,
état d'âme, constat de l'incident survenu malgré eux,
justification, compensation, clôture. Ce qui change est la formulation de
ces différents actes pragmatiques. Nous pouvons penser qu'ils ont
collaboré dans la réalisation de ce message un peu embarrassant,
car ils les ont envoyés au même moment :
C/tâche3 message1
Re: Activité 3 par
A
B - Tuesday 7 November 2006, 18:18
Salut!
Je suis trés desolee mais je ne peux pas vous envoyer
l'audio de l'activité 3 parceque le micro ne fonctione pas dans cette
ordinateur et nous sommes dans autre pièce des ordinateurs.
Je vais commencer aujourd'hui avec la tâche 4 et quand je
peux....je envoyerais l'activité 3.
A plus
2ème message
Re: Activité 3 par s b- Tuesday 7 November 2006, 18:18
Bonjour,
Je suis desolée,parce que mon audio ne
fonctione pas dans cette salle d'ordinateurs,et Je ne peux pa de envoyer toi la
deuxiéme part de mon activité.
Je le tenterai plus tard dans l'otre salle où apres
l'activité 4
Au revoir.
_S_
MESSAGE 18, 19
3.3.3.1 Échange réparateur auto-initié
déclenché par un apprenant
L'exemple suivant constitue une séquence d'une
situation dans laquelle l'apprenant se présente comme `coupable' :
il ne rend que la partie textuelle du travail, ce qu'il annonce sous forme de
promesse-compensation (le mardi...) et d'une demande de pardon.
L'intervention réactive du tuteur consiste à lui rendre la
correction de son travail écrit, accompagnée de
l'évaluation et d'un acte d'encouragement ; une requête
`adoucie' - rappel du compromis de rendre la deuxième partie du travail
- précède la clôture du premier échange (avec
l'adverbe très qui prend ici une valeur d'intensification de la
requête).
E+T+E+T Dtache6
Tache 6 correct par P R F - Friday 24 November 2006, 16:32
Bonjour
Voila la tache 6 le mardi je t envoie l'enregistrement. Pardon
<tâche>
Re: Tache 6 correct par a p- Thursday 30 November 2006, 10:25
Salut P, tu peux consulter la correction de l'activité
dans le fichier joint. C'est très bien, continue... <lien>
J'attends ton fichier audio....
à très bientôt
Suite
l'audio tache 6 par P R F- Tuesday 12 December 2006, 18:36
Bonjour A!
Voila l'audio de la tache 6.Pardon pour mon retard.
Au revoir
Re: l'audio tache 6 par a p - Thursday 14 December 2006, 08:57
Ne t'inquiète pas, il n'y a pas de problème...
à bientôt
A
SEQUENCE 2
Dans le deuxième échange, ci-dessus, l'apprenant
rend le travail (fait l'acte de réparation), assorti d'un nouvel acte de
demande d'excuse accompagné d'un signe non-verbal (il `affiche un
sourire', à valeur phatique). Ces actions de l'apprenant sont
appréciées par le tuteur qui répond en minimisant
l'affaire et finalisant ainsi la séquence auto-réparatrice,
auto-initiée.
3.3.3.2 Échange enchâssé
L'apprenant, dans l'exemple suivant, rend le produit de son
premier travail (Voilà, morphème polysémique,
peut être ici compris comme un déictique ou une annonce de la
suite dans l'interaction) et fait un acte d'excuse implicite sur sa
compétence linguistique (un énoncé assertif, à
valeur illocutoire d'acte d'excuse : c'est difficile pour moi).
Au niveau relationnel, ce procédé peut être
interprété comme un `adoucisseur' (de même que la demande
de pardon et le smiley de la séquence précédente)
destiné à s'attirer la bienveillance du destinataire :
E+T+E/Btâche1
Re: votre première tâche !!continuation par
m
d - Thursday 26 October 2006, 10:14
salut M. et M.!
Ça va? Voilà ma presentation audio. C'est difficile
pour moi la pronunciation mais ici le resulté.
Au revoir!! <lien >
Re: votre première tâche !!continuation par
m
m - Friday 27 October 2006, 13:26
Je suis désolée mais je n'arrive pas à
ouvrir ton fichier. Enregistre le en MP3 !!
Re: votre première tâche !!continuation par
m
m - Friday 27 October 2006, 13:26
Bonjour !! <lien>
voilà ma presentation audio. j'espere que tu peut ouvrir
mon fichier.
au revoir!!!
ECHANGE 6
Cet acte de réparation auto-initié n'aura pas
d'intervention réactive complémentaire, la tutrice ne rebondit
pas sur cet aspect, comme nous pouvons remarquer ci-dessus, car elle est
confrontée à un problème d'ordre non linguistique, mais
technique, puisqu'elle fait le constat, qu'elle prend à son compte, de
son incapacité à ouvrir le fichier audio de l'apprenant (Je
n'arrive pas à...). Evénement qui peut être
vécu par la tutrice comme doublement menaçant envers l'apprenant
- qui a peut être mal réalisé les démarches
techniques - et soi-même (elle n'est pas assez compétente au
niveau technique pour ouvrir le fichier de l'apprenant). Situation très
embarrassante qui est résolue par la tutrice à travers une excuse
implicite (la forme introductrice Je suis désolée de
type évaluatif affectif et l'assertion, assomption de la
culpabilité) qui `adoucit' l'acte de requête explicite,
accompagné d'éléments typographiques qui le renforcent.
La réponse de l'apprenant, au troisième `tour',
apporte la réparation et laisse entendre qu'un effort a
été réalisé afin de rétablir
l'équilibre dans la relation, à travers un acte de souhait. Nous
assistons à un enchaînement `hiérarchisé',
formé par un échange de réparation
hétéro-initié, qui se trouve enchâssé dans un
échange réparateur auto-initié, comportant des
procédés `adoucisseurs'.
3.3.3.3 Réparation à la charge du tuteur
Dans ce type de communication à distance, des
difficultés d'ordre technique sont inévitables. Le moyen de
communication (ordinateur, logiciel ou réseau) devient le thème
de la communication (ce que l'on a déjà vu plus haut ).
E/Btâche3
Nous avons des problèmes avec cette tâche par
F
U - Friday 3 November 2006, 13:35
Salut,
L'activité que vous nous proposez présente des
problèmes techniques:
la page ne s'ouvre pas, lenteur, la
chanson est coupée
et nous ne comprenons pas la ta tâche
Aur revoir
T/Btâche3
desolée !! par
m
d - Saturday 4 November 2006, 19:19
Bonjour à tous, Je suis désolée, la
chanson marchait bien quand je l'ai mise en ligne pour vous mais il y a
effectivement un problème. Le site que j'avais trouvé a des
problèmes apparemment. C'est dommage. Encore pardon. Nous vous
en enverrons d'autres avec M. à la rentrée. A la semaine
prochaine !! Et pensez à répondre dans le même fil et ne
pas ouvrir un nouveau sujet de discussion. C'est plus simple pour moi !
ECHANGE 7
Cette intervention (voir supra) fait part d'un lien
qui s'est avéré non-opérationnel. Cet incident affecte
deux groupes d'apprenants et leurs deux tuteurs (Nous avons... vous nous
proposez... nous ne comprenons...). Les tuteurs (Nous... avec
M.) réagissent avec toute un éventail
d'adoucisseurs : expression de l'état d'esprit intensifiée
par les points d'exclamation dans l'intitulé du message,
répétée après l'ouverture, suivie d'une
justification, de la reconnaissance du problème survenu malgré
eux, de la demande explicite de pardon, d'une offre de compensation. Le
rôle des tuteurs leur a été donné par l'institution
éducative, mais, dans le déroulement de l'interaction, ils
doivent être capables d'assurer cette place plus haute au niveau
hiérarchique. Avant de clore ce macro-acte de réparation, ils
réalisent deux actes de langage qui les remettent dans leur position
haute, atténués par une justification.
3.3.3.4 Enchaînement d'échanges
réparateurs
Nous n'avons repéré dans notre corpus que deux
actes de requête explicites faits par les apprenants. Bien qu'ils soient
différents, aux niveaux linguistique, sémantique et pragmatique,
nous allons les traiter ensemble dans le cadre d'une séquence. Il s'agit
des deux messages suivants, adressés par les deux étudiants
à leur tuteur à une minute d'intervalle. Le premier apprenant
fait un acte de requête à l'impératif, tandis que le
deuxième est un acte de requête indirect : sous la forme
d'une assertion se cache une demande teintée de reproche en direction du
tuteur :
E/Atâche4
Bonjour M. par I.L- Tuesday 7 November 2006, 18:58
Bonjour
Ecoute le message suivant <lien>
Au revoir
I.
E/Atâche4
Salut! par g i - Tuesday 7 November 2006, 18:59
Bonjour M.!
J'a attend votre tache
Au revoir
I.
T/Atâche4
Et voici la Tâche 4! par
m
b - Wednesday 8 November 2006, 13:01
Bonjour à vous tous,
Tout d'abord j'espère que vous allez bien et que vous avez
pu avancer malgré mon manque de disponibilité ces derniers jours.
Mais cela est fini, maintenant on va rattraper ce petit retard avec cette
Tâche 4. Prenez bien le temps de faire les activités, il me tarde
déjà de voir comment vous allez décrire les images du
deuxième exercice! Bon travail et à bientôt. Ps: Je
ne vous ai pas oublié, je vous envoie bientôt la correction de vos
derniers documents audio!
ECHANGE 8
Quelle est la réaction du tuteur ? Il ne
répond pas directement à ces deux messages, comme nous pouvons
voir supra, il s'adresse au groupe, présente une explication
(mon manque...) suivie d'un acte de compensation (on va
rattraper...) ; à la fin de son intervention, il ajoute un
deuxième acte de compensation sous forme de promesse (je vous
envoie bientôt...) :
Une deuxième intervention mixte,
présentée tout de suite, adressée au groupe, va clore
l'échange réparateur : le tuteur rend les `corrigés',
rétablissant ainsi l'équilibre de la relation et peut, ensuite,
recadrer le groupe (voir infra) :
T/Atâche4
La correction de la tâche 2 est prête!!!par m.b.-
Sunday 12 November 2006, 18:26
Voilà, j'ai enfin eu le temps de corriger vos travaux
précédents.
Avant de vous lancer dans la quatrième tâche allez
voir ce que vous avez déjà fait pour éviter de refaire les
mêmes erreurs.
Bonne relecture de vos travaux, je vous conseille aussi d'aller
voir ce que vos collègues ont fait.
A bientôt
MESSAGE 20
Un autre mouvement réactif s'enchâsse dans cette
séquence : suite à ces actions du tuteur, trois messages de
remerciement lui seront adressés. Nous allons nous intéresser
à un de ces messages, parce qu'il clôt cet échange et en
ouvre un autre dans le même sujet de discussion. Il s'agit de
celui-ci :
E/Atâche4
La Tâche 4!!! petit probleme par
I
L - Friday 24 November 2006, 14:44
Bonjour M.
J' ai un probleme avec la tâche 4, Je l'ai perdue
dans mon ordinateur
Je te l'enverrai mardi prochai.
P.D. Merci pour las corrections de las tâches 1 et 2.
À bientôt
MESSAGE 21
L'apprenant se trouve confronté à un obstacle
d'ordre technique, les exclamations (fonction expressive) et la minimisation
apportée par l'adjectif petit placés dans
l'intitulé du message l'annoncent d'une manière à la fois
exagérée et atténuée. Dans le corps du message, il
confirme qu'il manque à l'obligation de réalisation de la
tâche 4, et ajoute la justification (l'aveu et la justification
serviraient à s'attirer la bienveillance du tuteur) et un acte de
compensation (il remercie à la fin le tuteur des corrections des
tâches précédentes). Quelle valeur prennent ces actes de
langage au niveau relationnel ? L'apprenant se présente comme
affecté par cette situation (exclamations, aveu exprimé à
la première personne, acte de compensation) et, de plus, il fait un acte
de remerciement, à valeur aussi d'adoucisseur...
Cette intervention, à son tour, est placée au
milieu d'un autre échange (regardons la référence horaire
des messages ci-dessous) qui concerne, cette fois, la partie écrite de
la tâche4 :
E+T/Atâche4
Tâche4 partie ecrite par
I L
A - Friday 24 November 2006, 14:39
/tâche/
Re: Tâche4 partie ecrite par
m
b - Friday 24 November 2006, 22:21
Salut I,
Voilà la correction de la tâche 4.
Bon travail pour la partie orale! M.
ps : sympa ta photo !!
ECHANGE 9
Si nous rétablissons l'ordre dans ces actions, en nous
servant des indications horaires, l'apprenant ouvre un nouveau sujet de
discussion dans le forum de la tâche 4 et y dépose
la partie écrite de la tâche à 14 h 39, à 14 h 44 a
lieu l'envoi de l'intervention mixte (celle que nous avons commentée
supra).
Le tuteur affiche une intervention-réponse à ces
deux messages : tout d'abord, il répond à l'envoi de la
partie écrite et, ensuite, fait un acte qui pourrait être
interprété comme une félicitation (Bon travail pour la
partie orale). Mais c'est la suite qui permet d'en déjouer le sens,
car il s'agit en réalité d'une réaction au message de
réparation qui était resté `apparemment' tronqué,
donc un acte d'encouragement ou de requête qui rappelle à
l'apprenant qu'une partie de la tâche 4 n'a pas été
présentée pour correction. L'intervention finit par une
appréciation positive qui porte sur une photo envoyée par
l'apprenant.
Pendant le cours suivant (28 nov.), plus bas, l'apprenant
envoie à son tuteur la partie audio de la tâche 4 (qu'il avait
perdue) et celui-ci lui adresse une réponse (évaluative et
proactive) qui clôt l'échange et la séquence : ainsi,
l'équilibre dans la relation est finalement rétabli.
E+T/Atâche4
Re: Tâche4 partie audio par
I
L - Tuesday 28 November 2006, 19:58
Voila la partie audio
Au revoir M.
Suite
correction tâche4 partie audio par
m
b - Thursday 30 November 2006, 21:25
Salut I, Avant de commencer la séance d'aujourd'hui,
tu peux éventuellement revoir ce que tu as fais la dernière fois.
Ecoute attentivement la correction, il y a des sons qu'il faut que tu
travailles mais dans l'ensemble c'est pas mal!! à bientôt.
ECHANGE 10
Une série d'interventions imbriquées, comme
celle-ci, ne peut être mise au jour sans tenir compte du sens des
messages, comme nous l'avons déjà fait remarquer
précédemment. Les intitulés des messages témoignent
des conduites communicatives, non-linguistiques : des procédures de
postage des messages mais ces conduites ne nous apportent pas le tissage
réel des ajustements réciproques de la relation entre les
interactants qui se fait à travers les actes verbaux et non-verbaux
(gestes techniques, signes de ponctuation et émoticones) au niveau non
superficiel mais interne à l'interaction.
Voyons maintenant d'autres situations d'interaction,
apparemment très consensuelles, comprenant des échanges de
compliments et de remerciements.
3.3.3.5 Exchange complimenteur initié par un(e)
apprenant(e)
L'échange complimenteur, d'après
Kerbrat-Orecchioni (1994 : 201) « se présente comme une
`paire adjacente', ou plus justement comme une `chaîne d'actions,
constituée principalement : d'une intervention initiative, le
compliment, produit par le complimenteur (L1) à l'intention du
complimenté (L2) et d'une intervention réactive : la
réponse au compliment, produite par L2 à
l'intention de L1 ». Trois exemples vont être
analysés : dans les trois cas il y a, à l'origine, une
intervention d'un apprenant. Voyons le premier :
E+T/Atâche1
Re: iris par i g - Tuesday 17 October 2006, 18:44
je te envie la première tâche. elle est très
amusante.
au revoir
i.
voila la correction de ta 1ère tache!! par m b - Sunday 22
October 2006, 14:24
Voici en pièce jointe la correction de ta première
tâche avec des commentaires.
ECHANGE 11
Le complimenteur est un apprenant et le complimenté son
tuteur, le compliment porte sur la tâche préparée par le
tuteur ([la tâche] est très amusante). Le tuteur
réagit à la première partie du message, en apportant la
correction de la tâche à son tour mais en évitant la
réaction au compliment.
Dans le deuxième exemple, ci-après, l'apprenant
à la demande de sa tutrice qualifie la difficulté de
l'activité de moyenne et il ajoute, de son propre chef, ma
amusante. La tutrice réagit en remerciant l'apprenant (`avec un
sourire' ). Nous
verrons que ce geste mérite une réponse de remerciement de la
part de l'apprenant.
E+T+E -E / Ctâche4
Activité 4 par
A R
R - Friday 10 November 2006, 15:08
Bonjour,
Voilà l'activité 4. Mardi prochain, je ferai
l'audio.
Je pense que l'activité est moyen, ma amusante.
A plus!
Re: Activité 4 par
a
p - Sunday 12 November 2006, 10:27
Bonjour A,
[...] ]merci beaucoup pour ce poème car il m'a permis de
mieux connaître M.
[...]
Re: Activité 4 par
A R
R - Tuesday 14 November 2006, 19:43
Bonjour A,
Merci pour la correction.
Audio (Activité 4) par
A R
R - Tuesday 14 November 2006, 18:32
Bonjour,
Voilà l'audio.<lien>
Au revoir
SEQUENCE 3
Au milieu de cet échange de remerciements, il y a eu
l'acte d'envoi de la partie audio de la tâche 4 qui manquait, ce que nous
apprenons grâce aux dates et à la présentation sur
l'écran des messages (l'acte de remerciement a eu lieu plus d'une heure
plus tard, déjà en dehors de l'heure de cours).
Le dernier exemple de cette série montre la
tutrice qui réagit au compliment en exprimant son état
d'esprit (Je suis contente... ) et adressant un compliment à
son tour à l'apprenante (j'ai beaucoup aimé ton poème.
Il est très joli). Mais cette intervention réactive ne
clôt pas l'échange : elle fonctionne comme une intervention
initiative et provoque un sous-échange, un message de clôture de
ce cycle complimenteur.
E+T+E/ Ctâche4
Activité 4 par s b - Friday 10 November 2006, 13:53
Voilá m'activité 4
la tâche a été très originale et
amusante
Au revior
Re: Activité 4 par a p - Sunday 12 November 2006, 10:09
Bonjour S,
je suis contente que tu as aimé cette activité.
Moi, j'ai beaucoup aimé ton poème. Il est
très joli . Mais il manque la fin . Où sont les phrases pour le
lettres "n" et "a" ?
J'attends avec impatience la suite. [..].
à bientôt
A
Re: Activité 4 par s b - Tuesday 14 November 2006,
18:11
Bonjour A
Je viens de lire les corrections. Merci
SEQUENCE 4
Le complimenté est placé en position de
débiteur et se sent obligé de fournir une contrepartie : la
production d'un contre-compliment. Le complimenteur devient à son tour
complimenté, et donc fournit aussi en compensation une contrepartie sous
la forme d'un remerciement.
Nous pouvons nous interroger sur la différence existant
entre les situations qui viennent d'être présentées. Dans
la deuxième, l'apprenant signale que le travail est incomplet (acte de
réparation auto-initié) et offre une compensation, sous forme de
promesse. Dans la dernière, l'intervention de la tutrice apporte une
piste qui peut nous aider à comprendre mieux cet échange
complimenteur : en effet, elle reproche à l'apprenante son travail
incomplet (Il manque la fin) et fait un double acte de
requête indirect. L'apprenante `en faute' met-elle en scène des
actes phatiques : un acte qui peut être qualifié de
préventif (le compliment) et un acte qui serait plutôt palliatif,
le remerciement ? Et la tutrice, de son côté, instaure-elle
l'autorité à l'aide des actes de requête adoucis par les
compliments ? La tournure avec impatience, polysémique,
peut renforcer la requête ou le compliment.
Suite à cette analyse, nous pensons que les compliments
et remerciements échangés sont à mettre au compte du
maintien de l'équilibre dans la relation qui fixe la
représentation de rôles asymétriques entre des
étudiants. Ces actes de langage sont affichés, surtout, quand il
y a des incidents qui risquent de la perturber, et montreraient des mouvements
de figuration destinés à garder la face et à ne pas
menacer la face de l'autre.
3.4 Type ou genre
de discours
Notre attention va maintenant se porter sur la
problématique du genre de discours : des actes instrumentaux
permettant de mettre en ligne un lien hypertexte (actes communicatifs
non-linguistiques) vont de pair avec des actes para-verbaux et non-verbaux
(signes de ponctuation expressive ou images) qui complètent les messages
de la communication médiatisée par ordinateur. Nous allons
observer de plus près ces actes `instrumentaux' et ces ressources
expressives auxquelles ont recours les étudiants.
3.4.1 Communication
non-langagière
Faire parvenir au tuteur le résultat du travail est en
soi un acte (statut pragmatique) qui peut être accompli à travers
des gestes non-verbaux (statut sémiotique) : ouverture du forum
et d'un sujet de discussion ; clic sur l'étiquette
Répondre d'un des messages, sur le bouton
Parcourir ; recherche et sélection d'un document
préparé pour l'occasion... Lors de ces étapes,
l'émetteur `communique' avec le matériel et le logiciel, avec
l'ordinateur en réseau. L'interactivité entre l'homme et la
machine se fait à travers des signes linguistiques (les
étiquettes, les nom des archives...) et non-linguistiques (images,
icônes propres au langage informatique et télématique).
ECRAN 7 : Message contenant un lien vers un archive
audio
Le troisième message de l'échange reproduit
ci-dessus est le résultat des actions qui viennent d'être
décrites. Un apprenant a déposé un message qui ne contient
qu'un lien vers un document audio : une adresse html suivie d'une image de
magnétophone. Éléments sémiotiques, communicatifs
mais non-langagiers (de même que l'acte de lever le bras en cours pour
indiquer qu'on est présent et prêt à rendre la copie pour
correction).
3.4.2 Actes discursifs
plurisémiotiques
Les étudiants respectent les caractéristiques
formelles de l'écrit, tout en employant des expressions propres de
l'oral accompagnées de signes de ponctuation expressive et / ou de
ces images connues comme smileys ou émoticones. Voyons
une séquence particulièrement `expressive' composée de
neuf messages (numérotés par nos soins):
E/Dforum (1)
Je te envie la tache 1! (X) par
X
A - Friday 20 October 2006, 13:56
Je te envie la tache 1, mais seulement les deux premieres
activités, parce que le ordinateur ne me reconais pas le
microphone. Ce soir, les autres activités (Si je peux!)
T/Dforum (2)
salut x par
a
p - Tuesday 24 October 2006, 10:44
Tout est très bien dans tes activités... j'ai juste rajouté
un 'e' au mot 'étudiante'...
J'espère que tu pourras m'envoyer les fichiers
audio....
Continue comme ça
A très bientôt
A
T/Dforum (3)
recherche désespérée de fichiers audio par
a
p - Thursday 26 October 2006, 12:43
Bonjour x,
As-tu pu arranger le problème avec ton micro....et
penses-tu pouvoir m'envoyer tes fichiers audio?
Quand tu pourras, donne-moi des nouvelles......
signée: ta jeune tutrice désespérée
de ne rien recevoir!!!!!
E/Dforum (4)
Les activités 3 et 4!! par X A - Friday 27 October 2006,
16:09
Ici, je te envie mon audio. J'ai eu quelquns problemes avec le
micro dans la salle de informatique et aussi avec le micro á ma maison.
Pour le prochiéme fois, ne t'inquiète pas, je fait tout
trés tranquilement et sans vite!!
* (Está comprimido con winrar)
T/Dforum (5)
d'accord par
a
p - Monday 30 October 2006, 13:48
Très bien, je ne m'inquièterai plus X..merci de
m'avoir rassurée...
J'ai juste un petit problème pour ouvrir tes fichiers mais
je pense que je vais réussir à le résoudre...
Je te donne rendez-vous pour les tâches 2 et 3
A très bientôt
A
T/Dforum (6)
par
a
p - Monday 6 November 2006, 13:08
X, je suis désolée mais je ne peux pas ouvrir tes
fichiers audio....il va falloir que tu me le réenregistres sous un autre
format......
Tiens moi au courant
A bientôt
A
E/Dforum (7-8-9)
Activité 3 et 4: texte par
XA
- Friday 17 November 2006, 15:36
Ici les activites 3 et 4 autre fois!
Audio activité 3 par
XA
- Friday 17 November 2006, 15:39
Audio activité 3
Audio Activité 4 par
X
A - Friday 17 November 2006, 15:40
Audio Activité 4
SEQUENCE 5
Si la disposition des paragraphes, les guillemets (en 2),
l'astérisque (en 4), la signature (A., en 2, 3 et 6 )
et le vocable signée rappellent la tradition du style
écrit plus ou moins formel , la ponctuation expressive de 3, 4 et 6
correspondrait plutôt à la communication écrite informelle
qui essaie de représenter les silences, les pauses dans le rythme de
l'expression orale (points suspension en 3,6) et l'emphase dans l'expression
(points d'exclamation en 3, 4). Par contre, les émoticones de 2,3,4,5 et
6 font partie des caractéristiques de la communication
médiatisée par ordinateur : ils seraient destinés
à pallier l'absence de la mimo-gestualité propre à la
communication en face à face comme le signale Marcoccia (2004) ?
Quel serait le rôle de ces éléments
non-linguistiques ?
Les signes de ponctuation (en 2, 3, 4 et 6) sont mis en nombre
supérieur à ce qui est accepté par les règles de
la ponctuation, ce qui est d'usage dans la publicité, les bandes
dessinées et la communication écrite informelle à des fins
expressives. Les points de suspension (en 2, 3 6) semblent ici renforcer,
intensifier le contenu explicite du message (l'aspect `attente' de cet acte de
requête) de la tutrice. Les points d'exclamation (en 3, 4) renforceraient
ici aussi la valeur illocutoire de l'acte de langage qu'ils accompagnent :
la requête (en 3) et la promesse (en 4) . Dans l'intitulé (en
4) ils seraient destinés à compléter l'acte constatif
d'envoi des tâches réalisées d'un effet expressif
positif (en 4).
Quant aux émoticones, nous remarquons que dans cette
séquence sont affichées trois `mimiques' différentes.
Quelle est leur fonction ? Le premier semble avoir un rôle
réactif, il accompagnerait l'évaluation positive
précédente, en apportant l'expression de l'état d'esprit
de la tutrice et/ou proactif, comme un anti-FTA, destiné à
adoucir la critique qui va suivre. Le deuxième, , aurait un rôle
interprétatif, car il aiderait à comprendre le sens humoristique
du dernier énoncé, procédés verbal et non-verbal
destinés à adoucir le contenu menaçant de ce macro-message
de requête. Les trois accompagnent l'acte de promesse de l'apprenant. Est-ce qu
l'étudiant répond avec un grand sourire -`prolongé dans le
temps'- au sourire de sa tutrice ? Ou montre-il la gêne de
l'apprenant, de même que les rires dans les moments un peu difficiles des
rencontres en face à face ? Le (en 5) paraît un
smiley relationnel, un marqueur de politesse. Le dernier, le , serait plutôt une
manifestation de l'état d'esprit un peu désabusé de la
tutrice, il apporte une information qui n'est pas apportée par le
contenu verbal du message.
L'ECHANGE 12 est construit à l'aide de signes de
ponctuation expressive, d'écrit formel et d'images. A première
vue, nous avons l'impression d'assister à un échange de sourires
entre la tutrice et l'apprenante lors d'une correction
sémantico-culturelle :
T/Dtâche1
Activité 1 et 2 M par
a
p - Tuesday 24 October 2006, 11:01
Bonjour M,
J'ai regardé tes activités....et tout est
bon....
Il y a juste une petite erreur concernant la nationalité
d'A.....qui est polonaise...Son pays est la
Pologne.
La bolognaise est une sauce tomate qui se mange
avec des pâtes. ...personnellement j'aime beaucoup....
Je te laisse sur cette charmante petite confusion et te souhaite
un bon appétit!!!!
A très bientôt
A
E/Dtâche2
Mon Activité 2 le vendredi (je suis m) par
M M
G - Tuesday 24 October 2006, 18:59
bonjour!!
Le vendredi j' envoye toute l'activité.
PD. d'accord, c'est polonaise, mais non bolognese... pardon
a bien tot!!
ECHANGE 12
Il s'agit d'un début de séquence (que nous
présentons incomplète) qui se déroule entre deux
forums (tâche1 et tâche2):
l'apprenante emprunte les sigles PD du registre écrit (Post
Data s'utilise dans la correspondance espagnole de même que
P.S - Post Scriptum-, dans la française) pour marquer
un changement thématique car, suite au message correspondant au forum de
la tâche 2, elle veut, d'une part, montrer qu'elle a bien pris en compte
la correction, d'autre part, qu'elle s'est aussi rendu compte du
caractère un peu ridicule de sa méprise. Le smiley
serait de l'autodérision et de plus elle se sent dans
l'obligation de réparer une faute, menaçante pour la face d'une
des tutrices, qui avait eu lieu dans le forum de la tâche
1, ce qu'elle fait en présentant explicitement ses excuses dans un
message particulièrement expressif (les points d'exclamation de
salutation et de clôture). Une vue d'ensemble de cette intervention
inviterait à orienter l'analyse vers un macro-acte de réparation,
formé de deux micro-actes de réparation, un réactif et
l'autre proactif, les traces non-verbales étant, dans ce cas, des
adoucisseurs de `la faute' avouée et de l'annonce d'un retard dans
l'accomplissement de la tâche.
Les extraits des cinq messages des tuteurs
présentés ci-après rappellent, d'un côté, la
tradition de l'écrit formel (les sigles PS ),
l'écriture manuscrite (stylos), l'énoncé
métadiscursif (Il ne fallait pas me dire `c'est moi' ) et,
d'un autre côté, l'oral conversationnel et le registre familier
(Mais bon, c'est pas grav ...) qui semble aussi être
représenté dans le dernier message à la fois de
façon sémantique (`parler' au lieu d'écrire). La
ponctuation expressive essaie de restituer l'emphase para-verbale et les
smileys, apporteraient la touche non-verbale qui serait
spécifique de la communication médiatisée par
ordinateur.
T/Ctâche5
Activité 3 par a p - Monday 30 October 2006, 17:08
[...]
PS : Pour des raisons techniques , je n'ai pas pu mettre la
chanson directement ici , vous allez la trouver dans le réponse à
ce message.
T/Dtâche2
Re: Activité 2 (P) par
a
p - Monday 30 October 2006, 11:57
Salut P
Bon, ben!!! je n'ai rien à dire sur la partie
écrite de la tâche. tout est bon..... Je te dis bravo....!!!
[...]
A plus
A
T/Ctâche4
Activité 4 par
a
p - Monday 6 November 2006, 23:15
[...]
Bon travail et à vos stylos
A
T/Dtâche3
Re: activite 3 par
a
p - Monday 6 November 2006, 12:58
[...]Il ne fallait pas me dire "c'est
moi"...... Mais bon, c'est pas grave, c'est pas très important!!!
[...]
T/ Dtache4
Attention, Attention nouvelle rubrique!!!! par a p - Thursday
9 November 2006, 10:12
[...] Cette semaine nous parlerons de MUSIQUE....dès
à présent venez participer ........ [...]
MESSAGE 22, 23, 24, 25, 26
Avant de nous occuper plus précisément des
émoticones, nous allons examiner une autre situation qui nous permet de
revenir sur les traits spécifiques du discours numérique. Cette
fois-ci, il s'agit d'une intervention auto-centrée d'une tutrice
destinée à éviter une mauvaise compréhension d'un
énoncé. Ci-dessous, le message problématique et l'acte de
réparation:
T/Ctâche1
Re: Tâche 1(Premiere Partie) par
a
p - Wednesday 18 October 2006, 15:43
Bravo !!!
Vous avez très bien reussi les 2 activités.
continuez comme ça. J'attends avec impatience la suite?
A
Re: Tâche 1(Premiere Partie) par
a
p - Wednesday 18 October 2006, 19:06
J'attends avec impatience la suite.
C'est une affirmation , pas une question. le point
d'interrogation s'est glissé par erreur
A
MESSAGE 27, 28
La tutrice se rend compte qu'un signe d'interrogation
s'est glissé par erreur à la fin d'un
énoncé qu'elle voulait assertif . Ce fait malencontreux
motive une intervention réactive où elle se reprend,
s'autocorrige et donne une explication métadiscursive à sa
méprise. Le smiley semble apporter à cet acte de
réparation une expression positive de soulagement.
D'ailleurs, nous voyons cette situation comme
spécifique de cette modalité de communication écrite, car
il s'agit d'un discours fixé, mais en même temps en cours
d'acheminement (si le message n'est pas encore reçu). A la
différence de l'oral conversationnel et de l'écrit analogique,
l'écrit numérique se caractériserait aussi par cette sorte
d'exposition permanente en ligne.
3.4.3 Place, portée et fonction
des émoticones
Nous allons nous occuper maintenant des émoticones.
Nous nous sommes demandée si la place qu'ils occupent aurait une
signification particulière. Nous allons examiner différents cas
dans le but de vérifier s'il y a un lien à établir entre
`situation', `portée' et `fonction'. Y a-t-il un rapport entre la place
que les émoticones occupent dans les messages et leur
fonction ? Quels sont les types d'émoticones présents
dans notre corpus ? Nous allons maintenant essayer de répondre
à ces questions.
3.4.3.1 Place et
fonction des émoticones
Concernant leur place dans le message, les émoticones
sont le plus souvent affichés à la fin, après la formule
de clôture, comme le montrent les deux messages ci-après. Dans
cette place, ils sembleraient avoir une fonction phatique ou régulatrice
(nous allons voir que ce n'est pas toujours le cas). D'autres fois, ils sont
insérés au coeur du message, portant sur des actes de langage
ponctuels (ce que montre aussi l'ECRAN 8). Ils ont été inscrits
dans l'intitulé du message deux fois, annonçant leur
tonalité et une autre fois le smiley se trouve juste
après la formule de salutation .
ECRAN 8
Tout de suite, nous allons nous intéresser à un
des six échanges plurisémiotiques (multimodal) de notre corpus
(ECRAN 8).
Les représentations `mimo-gestuelles' de l'apprenante
(voir supra), au niveau pragmatique, seront-elles une façon de
s'excuser, à l'avance, pour la mauvaise qualité du travail
réalisé ? Étant donné que l'apprenante avait
annoncé le cours précédent, avec un , le retard dans la
présentation de son travail -message qui avait mérité un
de réponse de
sa tutrice, nous pouvons nous demander si ces émoticones ont une
portée réactive, mixte ou proactive. L'analyse de la double
réaction de la tutrice, au niveau interactionnel, confirme la
première interprétation : elle réalise une
évaluation positive qui peut porter sur le travail et répondre
aussi à la conduite non-verbale (C'est bien P...continue comme
ça).
Nous venons d'annoncer que les émoticones situés
à la fin des messages ne sont pas toujours phatiques ou
régulateurs. Ceux qui ont été mis avant la clôture
peuvent-ils remplir différentes fonctions ? Voyons les exemples
suivants :
T/Ctâche5
Re: Activités 1 et 2 par a p- Thursday 16 November 2006,
18:02
[...] J'espère que tu aimes chanter
à vendredi
A
E/Atâche6
Re: voilà une dernière tâche avant Noël!
par g i- Tuesday 19 December 2006, 18:54
Salut!
Notre group ne peut pas regarder le video.
Bonne année 2007 et Joyeux Noël!
MESSAGE 29, 30
Comme les deux émoticones qui allaient ensemble dans
l'écran qui vient d'être présenté, , ceux-ci
accompagnaient-ils un acte de langage (là-bas un acte de
réparation et ici, un acte de souhait et un acte constatif) ?
Seront-ils l'un proactif (il adoucirait une requête implicite) et l'autre
réactif (il manifesterait l'état émotionnel au moment du
constat d'un dysfonctionnement) ? Ce dernier pourrait avoir une
portée proactive, renforçant un acte de requête implicite.
Le cas suivant présente un smiley qui aurait
une fonction ironique ou humoristique qui aiderait donc à
comprendre le sens de l'énoncé ou bien qui renforcerait la
tonalité du message réactif où il est
inséré.
E/Ctâche6
par A R R - Tuesday 28 November 2006, 19:56
Bonjour,
Voilà l'interview.
A plus!
T/Ctâche6
Re: Activité 6 (Interview) par
a
p - Thursday 30 November 2006, 21:09
Bonjour A.,
Un grand bravo pour cet interview . Je trouve tes idées
très interessantes . Avec un tel casting
je sui sure que ce film serait un carton ( c'est à dire un
grand succès). [...]
ECHANGE 13
3.4.3.2 Les émoticones, données
quantitatives
Les émoticones apparaissent de façon très
inégale dans ce corpus : un des quatre groupes y a recours
très souvent, un autre ne les utilise jamais. Au total, nous avons
repéré 70 émoticones graphiques et trois
typographiques:
- une apprenante du groupe A affiche deux émoticones
graphiques dans deux messages, le tuteur en `dessine' un typographique;
- trois apprenants du groupe C et leur tutrice les affichent
11 fois (une fois chaque apprenant et huit fois la tutrice) ;
- le groupe D s'en sert souvent, car on peut compter 57
émoticones (dont deux typographiques) dans 52 messages (22 de la
tutrice et 35 de quatre apprenants) ;
- la plupart des émoticones ne provoquent pas de
réaction `visible' à l'écran, excepté : Dforum
(SEQUENCE 5), entre Dtâche1-Dtâche2 ( ECHANGE 12), Dtâche2,
Dtâche3, Dtâche5 (ECRAN 8 ) et Dtâche7.
Nous avons comptabilisé 9 types d'images graphiques et
trois typographiques. Nous représentons dans le tableau à la
suite avec le nombre d'occurrences et leur dénomination (donnée
par le logiciel Moodle) :
34 sourire
1 :)
|
22 grand sourire
|
3 triste
1 :(
|
3 clin d'oeil
1 ;)
|
2 rouge
|
2 incertain
|
2 timide
|
1 cool
|
1 pensif
|
TABLEAU 5: Types d'émoticones
Excepté les cas exposés ci-après, on
comptabilise une image par message. Seulement trois apprenants du groupe D
affichent deux ou trois émoticones par message :
- Dforum, un apprenant affiche trois sourires `collés'
(voir p. 67)
- Dtâche5 , une apprenante inscrit deux `mimiques'
différentes ensemble et un
(p. 71);
- une apprenante a recours à deux émoticones du
même contenu dans deux messages, un publié dans le premier forum
(le sourire) et l'autre dans le dernier forum (tristesse), elle inscrit la
modalité typographique dans l'intitulé et la modalité
graphique dans le corps du message,
o :) dans l'intitulé et dans le corps du
message E/Aforum
:( dans l'intitulé et dans le corps du message
E/Atâche7
Nous avons signalé des émoticones qui nous
semblaient expressifs, apportant une information sur l'état
émotionnel de l'émetteur d'un message, aidant à comprendre
cette dimension émotionnelle et renforçant la valeur expressive
présente dans le contenu verbal ; nous avons aussi mentionné
des smileys d'ironie et d'humour ainsi que d'autres
destinés plus précisément à indiquer le type de
relation de familiarité ou de connivence souhaitée ;
d'autres cas semblaient compléter les procédés de
réparation. Dans l'ensemble, ces `binettes' pourraient être vues
comme des stratégies pragmatiques servant à adoucir le
caractère menaçant d'un énoncé ou un message.
Pouvons-nous, à partir de ces quelques exemples
examinés dans cette sous-partie 3.4, tirer des
conclusions générales sur la spécificité du
discours didactique médiatisé par ordinateur ? Est-il un
mélange de genres, de registres et de procédés ? Ou bien,
devons-nous nous limiter à considérer ces
spécificités comme propres à une modalité de
tutorat : un tutorat hybride qui met en contact des étudiants, des
étudiants qui débutent comme tuteurs en ligne et des apprenants
débutants ou faux-débutants en français ?
Il semblerait que ces manifestations `éclectiques' ne
seraient pas vides de sens ; elles représenteraient le
`va-et-vient' entre le statut d'étudiant et le rôle de
tuteur , le besoin d'encadrer et de faire avancer le groupe d'apprenants
qui va de pair avec le fait d'établir et de maintenir un rapport
`amical'.
Dans ces quelques exemples apportés dans cette
sous-partie 3.3, les emprunts à l'écriture seraient plutôt
des marqueurs d'autorité utilisés par les tuteurs et les traces
d'oralité, le registre familier et les marques qui chercheraient
à représenter une rencontre face à face contribueraient
plutôt à instaurer un type de relation conviviale et à
réduire les distances entre expert et apprenant, c'est-à-dire,
à créer une ambiance favorable à la communication. Tout
tuteur à distance, d'ailleurs, que se soit un tuteur professionnel ou un
apprenti-tuteur, comme ici, aurait intérêt à mettre des
marques socio-affectives destinées à pallier le sentiment
d'isolement et l'absence physique, surtout dans le cadre d'une formation qui
aurait lieu entièrement à distance.
Venons-en maintenant, en guise de synthèse de cette
partie analytique, à une vision globale de ce que nous avons
présenté de façon fragmentée.
4 Résultats et discussion : analyse
systémique-pluridimensionnelle
Nous avons l'impression d'avoir soumis notre corpus à
une approche descriptive et fonctionnelle rapide. Cette étude n'a
d'ailleurs rien d'exhaustif, elle privilégie la description empirique
des échanges visant simplement à rassembler des observations qui
puissent servir à dessiner un type ou modèle de CPMO. Dans le but
de contribuer à la réflexion focalisée sur
l'amélioration de pratiques pédagogiques, nous allons
présenter pour discussion quelques résultats.
4.1 Révision
du schéma : composantes de la situation pédagogique
Il nous semble nécessaire de revenir sur le
SCHÉMA 2 dans lequel nous présentions l'arrivée de
l'ordinateur dans la scène didactique. Suite à notre
étude, il semblerait que l'ordinateur y occuperait une position
centrale ; quant aux contenus d'enseignement par lui
véhiculés, ils seraient de deux types : d'une part les
ressources `authentiques' (documents non fabriqués pour l'enseignement)
et les ressources `didactiques' (documents fabriqués pour
l'enseignement) entrelacées dans les tâches et, d'une autre part,
les communications qui ont lieu entre les étudiants.
Tuteur
|
|
Apprenant
|
|
O
|
|
Ressources
& tâches
|
|
Communications
|
SCHÉMA 3 : Partie intérieure du
SCHÉMA 2 modifiée
Le flèches de ce schéma représenteraient
le dynamisme entre les composantes de cette relation pédagogique :
étudiants-apprenants de français et étudiants-tuteurs
seraient obligés de passer par l'ordinateur : les premiers pour
accéder aux tâches préparées à leur
attention, les deuxièmes pour préparer les tâches, les uns
et les autres pour pouvoir communiquer entre eux.
4.2 Interactivité et interaction
discursive plurisémiotique
Deux structures soutiendraient cette modalité de
communication tissée par ordinateur. D'un côté, une
structure externe, apparente, qui est facilitée par le
logiciel (résultat de l'interactivité) permettrait
l'accès à l'espace d'exposition discursive et servirait de
support et de canal de la communication, tout en organisant les interventions.
D'un autre côté, il se construirait une structure interne,
intersubjective (résultat de l'interaction) que nous avons essayé
de dévoiler par une approche inductive.
Parcours externe, de
l'interactant et de l'analyste
|
Parcours interne,
de l'analyste
|
Plateforme
Forum du groupe X
Sujet de discussion
Réponse
Nouveau sujet de discussion
|
Intervention
Initiative
Réactive
Proactive
Mixte
|
Acte de langage ou ANL
Échange (2 ou 3 interventions)
Séquence ( 4 interventions ou +)
Interaction multimodale
|
Structuration externe ou apparente
|
Structuration interne
|
Enchaînements des actions,
ou gestes, `techniques'
|
`Tissu' interactionnel
|
Enchaînements des actions
techno-sémio-pragmatiques
|
Interactivité
|
Interaction plurisémiotique
|
TABLEAU 6: Parcours externe et interne
La deuxième case de la colonne de gauche
schématiserait les étapes d'accès à l'espace
d'exposition discursive, soit pour l'acheminement d'actes communicatifs
à l'attention des autres, soit pour la réception ou la
consultation des actes communicatifs des participants, soit pour
connaître cette modalité de structuration des communications
interdiscursives. Tout au long de ce parcours, on interagit avec l'ordinateur.
La case au centre de la deuxième ligne indiquerait les
possibilités d'interaction qui se réaliseraient à
travers un ou plusieurs actes de langage (actes discursifs verbaux, para
verbaux ou non-verbaux). On n'accèderait à la colonne de droite
qu'à travers la colonne de gauche.
Nous sommes partie des actes de langage, unité minimale
de notre étude, pour trouver les échanges et les séquences
de cette interaction. Au bout du parcours de gauche, nous avons trouvé
les réponses à ces questions : comment ?
(ouverture du site, clic sur un lien...), combien ? (nombre
d'interventions, de participants, de réponses à une discussion
...), quand ? (données temporelles),
qui , à qui ? (la réponse à cette
question est incomplète, car il y a des messages
émis/adressés par/à une dyade ou à un groupe).
Finalement, pour répondre à la question quoi ?
( que se disent-ils ?) et comment, par quels moyens
plurisémiotiques ? nous avons suivi le parcours
présenté sur la colonne de droite du schéma.
4.3 Actes de
langage et interaction
Au niveau micro-structural, les différents types
d'unités sémiotiques et pragmatiques offrent d'infinies
variations dans leur réalisation et leur combinaison :
l'étude paradigmatique des énoncés nous a permis de
croiser le sens (sémantique et pragmatique) très dépendant
du contexte. Ces unités, les énoncés-actes de langage,
nous avons choisi de les présenter dans la mouvance de l'interaction, de
façon à offrir une vision dynamique de leur structuration
`interne' : la pragmatique dans l'interaction.
En effet, nous nous sommes beaucoup servie des actes de
langage, en ayant eu recours aux notions d'acte `constatif', `requête',
`compliment' ou `remerciement' au moment de l'analyse des interventions et de
l'interprétation du sens des énoncés construisant
l'interaction ... L'acte de langage (ainsi que l'acte sémiotique qui
affiche une trace para-verbale ou non-verbale sur l'écran) en situation
nous a aidé à comprendre les mouvements de l'interaction, fruit
d'ajustements réciproques. Ces unités, les actes de langage, nous
semblent être les piliers de la construction de la relation puisqu'il est
parfaitement clair que les destinataires les interprètent et
réagissent - s'appuyant sur les conventions communes, connues et
acceptées de tous.
4.4 Contrat
didactique, rapport de places, figuration
Les tuteurs font des compliments, des remerciements,
présentent des excuses, des justifications... Et habituellement ils
finissent leurs interventions par des actes de requête. Quelle conclusion
pouvons-nous tirer de ces données ? Les requêtes,
situées à la fin des interventions, les repositionnent (les
rehaussent ?) dans leur rôle de tuteur ?
D'un côté, l'accomplissement des actes
d'avertissement, l'hétéro-évaluation négative ou
les actes de requête situeraient les tuteurs en position haute ;
d'un autre côté, l'auto- évaluation négative,
les excuses et les justifications, les placeraienten position basse. De plus,
les actes que nous avons énoncés en premier, étant
donné leur statut d'étudiants, les situeraient en position
difficile, car ce sont aussi des étudiants et leurs actes peuvent
être perçus comme des critiques et être menaçants
pour la face de l'apprenant, d'autant plus que le forum est un
espace d'exposition discursive ouvert à tous ; ceux que nous avons
énoncés en second lieu, ce sont plutôt des actes
menaçants pour leur propre face. Ce va-et-vient serait ici à
l'origine des rituels de figuration : les tuteurs vont s'efforcer de
modaliser leur discours, par l'usage des actes de langage (et actes
non-linguistiques) atténuant leurs propos.
Chez les apprenants, il faut tenir compte de leur
pénurie en ressources linguistiques (nous ne pouvons pas analyser les
moments où ils ont choisi d'employer des stratégies
d'évitement au lieu de se manifester) si nous voulons analyser leurs
stratégies de figuration. L'analyse discursive, sémantique et
pragmatique permet de rendre compte des traces de figuration, verbales
et non-verbales. C'est le cas, par exemple, quand ils annoncent leurs
faiblesses linguistiques ou le manque d'accomplissement d'une tâche; et
de même quand ils annoncent aux tuteurs des dysfonctionnements qui leur
sont en principe imputables.
Tout cela construit une sorte de répertoire de
réparations qui leur est propre et qui caractérise notre corpus.
Nous nous demandions au début de cette étude
quelle part prend dans cette communication pédagogique la dominante du
travail à accomplir et la dominante des relations interpersonnelles dans
le déroulement de cette interaction. Nous estimons maintenant que cette
modalité d'interaction est construite entre tous les interactants :
en surface, ils produisent un inter-discours très structuré, sous
lequel se construit l'interaction. Cela nous semble être la
spécificité de cette communication qui se fait avec, et à
travers, un média, sorte de communication que l'on pourrait qualifier de
communication `média tissée' (nous reviendrons sur cette
métaphore).
4.5 Type de
tutorat
Les actes de langage nous ont permis aussi de mettre au jour
deux autres aspects de la médiation qui contribuent à instaurer
un type déterminé de relation entre les étudiants :
l'aspect dynamique (les actions ou mouvements) et l'aspect relationnel
(socio-affectif).
Les apprenants interviennent de façon réactive.
Comme nous avons pu constater, ils réalisent les tâches (et les
font parvenir aux tuteurs) ou s'excusent, se justifient ou font des actes de
promesse (de compensation) s'ils ne sont pas en mesure de répondre aux
consignes qui leur ont été données par les tuteurs. Leurs
mouvements sont des interventions réactives, également, quand ils
remercient les tuteurs de leurs corrections et leur font des compliments.
Nous avons constaté que les tuteurs font des
interventions initiatives (publication de différentes tâches et
consignes sous forme de requête plus ou moins modalisée),
réactives (énoncés métalangagiers, actes
constatifs, excuses et justifications, compensations, remerciements,
compliments) et proactives (requêtes, encouragements). L'analyse des
actes de langage permet, ainsi, de mettre en relief les caractéristiques
internes du type de rapports qui s'établissent entre les
étudiants et du type d'accompagnement pédagogique de ce tutorat
-qui accorde une grande importance aux aspects socio-affectifs.
4.6 Limites du
système ... ou avantages ?
Toute situation de communication interpersonnelle est soumise
à des aléas et, dans ce genre d'exercice de communication
pédagogique à distance, d'autant plus. Quels sont les obstacles,
les transgressions des normes, les aléas de tous ordres qui peuvent
entraver la communication et peuvent gêner la relation ?.
Nous avons repéré des interventions-type des
apprenants n'offrant qu'une adresse html ou un élément
graphique, lien vers le produit destiné à l'évaluation par
le tuteur ; d'autres modalités de messages sont celles qui
apportent les liens accompagnés d'une formule d'ouverture (salutation et
terme d'adresse) ou de clôture ; souvent un déictique
précède le nom de la tâche ou activité en
pièce jointe. Les interventions les plus complexes des apprenants (et
des tuteurs) sont celles qui rendent compte d'un incident technique (ou autre
type d'empêchement) survenu dans le propre camp (ou dans le camp de
l'autre), barrière à l'accomplissement du travail : nous
avons pu constater la grande variété d'actes et des formulations,
ainsi que des combinaison d' éléments sémio-pragmatiques.
Finalement, nous considérons que ces incidents ont
été bénéfiques au niveau linguistique et
pragmatique puisqu'ils ont offert la possibilité de se mettre en
scène et de réagir linguistiquement, sémantiquement et
pragmatiquement, en créant des situations d'interaction plus vraies et
plus riches. Ces « troubles de communication » seraient des
pistes à explorer, dans le domaine de l'acquisition : il faudrait
chercher à créer des situations qui faciliteraient l'emploi de
différents actes de langage au sein d'une véritable
interaction.
4.7
Interprétation : les unités, dans leur contexte
L' étude du corpus a été
réalisée, comme il a été dit, à partir de sa
segmentation en actes de langage et actes non-linguistiques. Mais, pour mener
à terme l'interprétation de ces unités, nous nous sommes
appuyée sur la situation institutionnelle dans laquelle ce corpus
s'inscrit (cette situation, en même temps, est construite par le
corpus).
Il nous semble que sans la connaissance du contexte
institutionnel, en effet, les échanges auxquels nous avons
assisté n'auraient pu être interprétés, ni
l'interaction dévoilée. Nous rappelons ses quatre piliers :
le cadre de la formation ouverte et à distance ; le français
langue étrangère, langue de communication et langue
d'étude ; le scénario pédagogique et l'espace de
communication, ouvert dans la plate-forme Moodle.
4.8 Modalité
de discours et espace d'exposition discursive
L'analyse de ce corpus nous a apporté une vision du
discours inséparable de celle d'espace d'exposition discursive.
Effectivement, le discours est co-construit dans un espace de production
discursive qui, à la fois, contribue à le construire sur le plan
technique, sémiotique, pragmatique et interactionnel. Prenons comme
métaphore le métier à tisser : l'ordinateur (l'outil
informatique) serait le métier à tisser, le logiciel (le forum de
la plate-forme Moodle) serait la trame sur laquelle se tisseraient les
fils de discussion qui dessineraient le tissu des communications, ce tissu
aurait un dessin particulier qui serait le discours plurisémiotique
(verbal, para-verbal et non-verbal) et polyphonique (véhiculant
plusieurs voix) en ligne(s).
Le produit de ces travaux `média tissé', nous
pourrions le qualifier donc de `discours didactique plurisémiotique et
polyphonique construit et visible en ligne(s)'.
4.9 Le forum, espace de rencontre6(*)
Aux traces laissées par les participants à cette
échange du forum comme espace où ils se déplacent ou bien
ils se situent, pour déposer, commenter et corriger les
contributions :
- T/Atâche4 : allez voir dans son
espace
- T/Btâche4 : Je vais corriger directement
ici,
nous pouvons ajouter les traces du forum comme lieu de
rencontre :
- T/Ctâche5 : vous joindre à
nous
- T/Dforum : on se retrouve bientôt
- T/Dtâche2 : je suis contente que tu sois
revenue.
Le forum virtuel apparaît donc comme un lieu où
très souvent on se donne rendez-vous, on se rencontre, on
échange, on partage et on discute. A cela contribue le fait que le
système apporte le je dans l'intitulé du message de
telle façon que l'internaute a l'impression quand il arrive et ouvre un
message, d'être face à l'autre à ce moment-même, bien
que le(s) message(s) ait été déposé(s) depuis
quelques heures ou quelques jours. D'où les nombreuses traces de l'oral
conversationnel...
-
Conclusion
Durant cette année de travail, nous avons parcouru un
long chemin : nous avons découvert le cadre théorique des
sciences du langage, les différentes modalités de la formation en
langues à distance, la méthodologie de travail de
recherche ; et nous avons ouvert des chemins d'exploration dans un corpus
qui nous semblait inépuisable.
Suite aux différents regards orientés selon de
multiples approches, ces échanges en ligne, à première vue
ni longs ni riches en contenu et présentant des situations somme toute
répétitives et basiques, se sont imposés par leur
variété digne d'étude, offrant des actes de langage soumis
à une organisation et une structure internes basées sur des
marqueurs de relation, destinés au maintien d'une modalité de
communication qui balance entre parité et asymétrie.
Ce corpus nous a permis aussi de découvrir que les
contributions des étudiants sont fortement marquées par les
contraintes relatives à l'espace discursif où elles sont
inscrites, de même que par leur contexte situationnel. Ce cadre est
construit et évolue tant au niveau discursif qu'interactionnel par le
biais du langage à la fois informatique et plurisémiotique. Car
une autre dimension s'est révélée pertinente, celle des
indices de différente nature qui chercheraient à rétablir
les phénomènes verbaux, prosodiques et mimo-gestuels de la
communication en face à face : ce corpus nous a permis de
découvrir leur convergence dans la régulation interactionnelle
.
Notons aussi que, d'un point de vue pédagogique, pour
les étudiants qui suivent une formation en méthodologie FLE &
FOAD, cette expérience nous paraît très riche. En effet,
ils trouvent là un terrain particulièrement adapté
à la mise en place de tout un panel de possibilités au niveau de
la conception de matériaux, de l'organisation et du suivi des
apprenants, de la prise de décisions évaluatives. Espérons
que des éléments mis en relief par cette étude pourront
aider à la réflexion sur la conception de scénarios de
communication appelant le développement des stratégies
discursives, pragmatiques et interactionnelles dans différents contextes
situationnels interculturels.
Il faut se demander toutefois si cette nouvelle
écriture, qui favorise sans aucun doute le développement de
stratégies informatiques, linguistiques, pragmatiques et
interactionnelles, offre un cadre suffisamment favorable au
développement des compétences discursives pour faire face
à des situations de communication réelle (orales et
écrites). Ce type de tutorat permet-il de se situer dans des contextes
variés (de la vie quotidienne, institutionnels ou professionnels)
permettant à l'apprenant d'envisager des situations de communication
demandant l'adoption de compétences discursives
adaptées ?
Nous avons apprécié cette possibilité
d'étude et de recherche dans l'axe didactique de langues et TIC du
Lidilem. Nous tenons à remercier François Mangenot de nous avoir
permis d'utiliser le corpus du volet franco-espagnol du projet Le
Français en première ligne et de nous avoir orientée
et encouragée dans cette voie d'exploration et de découverte des
dimensions techno-sémio-pragmatiques de la communication
pédagogique médiatisée par ordinateur.
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Seuil. [Original publié en 1972]
Zourou, K. (2006). Apprentissages collectifs
médiatisés et didactique des langues : instrumentation,
dispositifs et accompagnement pédagogique. Thèse en Sciences
du Langage, Université Stendhal-Grenoble 3.
Précisions terminologiques
Rencontre avec la langue française. Vocabulaire de
l'informatique et de l'internet. Journal officiel du 16 mars 1999.
[Consultable en ligne :
http://www.culture.gouv.fr/culture/dglf/cogeter/16-03-99-internet.html]
Ministère de l'emploi et de la solidarité.
Délégation générale à l'emploi et à
la formation professionnelle. Circulaire DGEFP n°2001/22 du 20 juillet
2001.
[Consultable en ligne :
http://ressources.algora.org/telechargement/tel/dgefp0122.pdf]
Base de données CRITER [Consultable en ligne :
http://www.criter.dglf.culture.gouv.fr/pls/DGPB/rechercher.frame_res_fiches]
ANNEXES
ANNEXE I Projet Professionnel Master 2
Recherche
Pourquoi vouloir faire le Master2 Recherche en Didactique de
Langues à l'Université Stendhal Grenoble III à l'âge
de 52 ans ? La curiosité, l'envie de continuer à apprendre pour
mieux servir la cause pédagogique.
Ayant plus de vingt années de pratique
pédagogique comme enseignante de français en lycée et
formatrice en langues étrangères en Espagne, enseignante
d'espagnol en France dans le secondaire (d'abord en "échange poste
à poste" et ensuite comme professeur stagiaire, suite à un CAPES
externe) et dans l'enseignement supérieur (cinq années comme
vacataire en IUP, Faculté de Lettres et IUT), j'ai cumulé des
expériences diverses et variées.
Etant placée en situation de disponibilité en
France pour suivre mon conjoint, je peux cette année suivre des cours
sur place et consacrer tout mon temps à l'étude, la
réflexion et la mise en place d'un projet de recherche sur l'acquisition
à distance des compétences culturelles.
Cadre théorique
Depuis les annéessoixante-dix, les linguistes
distinguent les concepts de Langue et Parole. Est la Langue un code de
communication verbal, qui reflète la vision du monde d'une
communauté culturelle, et la Parole l'expression individuelle,
résultat de l'utilisation de cet outil. Tout enfant, né dans une
communauté, va acquérir « naturellement » la
langue qui transmet la culture de sa communauté. Pour qu'un enfant ou un
adulte puisse communiquer en langue étrangère, il doit apprendre
le code linguistique imprégné de la culture qu'il transmet en
milieu « naturel », en situation de communication
« réelle » . Pour que les apprenants participent
à des interactions sociales semblables à celles auxquelles
participent les locuteurs autochtones, l'enseignant peut faciliter la
communication réelle avec lui, entre les apprenants; dans la pratique
habituelle, on recourt aux documents représentant la langue cible et
à la simulation de situations de communication, proches des celles
vécues par les autochtones.
Selon les objectifs à atteindre, le corpus
linguistique peut être plus orienté vers ce qu'on continue
à considérer comme la Culture savante ou cultivée
(transportatrice de savoirs historiques, artistiques, socioculturels...), va
cibler plutôt des domaines professionnels spécifiques (droit,
économie, commerce, tourisme, communication...), ou bien il peut
privilégier l'approche communicative « de survie »,
orienté à l'acquisition d'actes de parole, porteurs ou reflet des
« habitus », comportements implicites qui partage
globalement la communauté dont on étudie la langue.
Des nos jours, l'ordinateur en réseau facilite le
contact entre natifs et apprenants et entre enseignants de langues
étrangères. La culture communicationnelle s'est beaucoup
développée et de nouvelles voies de plus en plus performantes de
collaboration à distance s'ouvrent, donnant lieu à de nouvelles
habitudes interlinguistiques, interculturelles et interdidactiques.
Projet pédagogique
Je pense à l'Union Européenne actuelle, aux
rencontres « interculturelles ». Il est évident que les gens
de différents pays se rencontrent de plus en plus. Non seulement on
voyage de plus en plus, mais on achète des maisons et on s'installe dans
un pays différent de celui où on est né, pour les vacances
ou la retraite, aussi pour le travail. Face à cette
réalité nouvelle, la méthode communicative
d'enseignement-apprentissage des langues étrangères et les TIC
(avec une bonne dose de « culture cultivée » et d'habitudes
culturelles) peut, donc, aider à communiquer, à découvrir,
à comprendre et se faire comprendre, quand on est dans un autre pays ou
bien quand on reçoit des étrangers chez soi ou quand on
intègre la même équipe de travail pour une courte
période de temps.
Pour moi, en termes instrumentaux, quand j'analyse la
méthode communicative que j'ai connue comme enseignante, ou mon propre
parcours comme apprenante du français ou de l'anglais, je la vois comme
un facilitateur, si l'on peut dire, pour une « intégration
provisoire», pendant un laps de temps court (en tant que visiteur,
touriste ou participant à événement quelconque). En
parallèle, ifonctionne aussi un certain degré de tolérance
qui facilite cette "intégration provisoire", dans le sens « on va
faire un effort pour que cela se passe le mieux possible ». Cet effort ne
pourra pas se faire en continu, sur une longue période.
Dans la nouvelle Union Européenne, à cette
migration touristique, dans un sens large du terme, à celle des
élèves ou des étudiants à l'Université,
à celle des apprentis plus ou mois qualifiés qui font des stages
en entreprise (d'une semaine, de 15 jours ou de trois mois par an), il faut
ajouter celle des étudiants, des assistants, des professionnels qui
s'installent pour une durée plus longue.
L'intégration de longue durée des jeunes adultes
et des adultes demande une connaissance beaucoup plus approfondie de l'Autre,
du milieu que l'on intègre, et de soi-même aussi. Parce que, si la
société change, dans le fond, elle reste la même. Et
l'étranger qui prétend intégrer un milieu éducatif
ou professionnel, pour ne pas se heurter à des situations
« inconfortables » a besoin de la connaissance des
implicites culturels qui sont en quelque sorte « le code de la
route » relationnel. Pour se préparer à cette nouvelle
réalité, il me semble que l'apprentissage linguistique en
situation ne suffit pas, qu'il faudrait pouvoir agir en
situation - en situation réelle ou en situation simulée.
- Quels savoirs et quels savoir-faire ? Quelle
méthode pour l'acquisition des compétences
culturelles proches des celles de natifs ? Comment favoriser une
meilleure connaissance interculturelle ?
A telle fin, il conviendrait de repérer et
sélectionner des situations donnant lieu à des malentendus
culturels ou linguistiques7(*) ; les présenter à des
étudiants, originaires de deux communautés parlant deux langues
différentes, et leur demander de réagir face à
chacune des situations proposées : qu'est-ce que tu dirais (en
langue étrangère) et qu'est-ce que tu ferais (en langue
maternelle). A la présentation de deux réactions ou actions
virtuelles peut suivre l'intervention d'un tuteur, afin d'analyser le
résultat avec les intervenants. Donner lieu à une analyse des
actions « étrangères », situées au
niveau linguistique et comportemental et en dégager les
différences porteuses de sens culturel.
Comme la prétention de devenir bilingue linguistique
et/ou bilingue culturel « dans le cadre de
l'enseignement/apprentissage des langues-cultures
étrangères » semble hors de portée,
« plutôt que d'acquérir des comportements culturels
étrangers, il importe que les apprenants apprennent à savoir
discerner/discriminer les ressemblances/convergences et les
différences/divergences entre la culture étrangère et la
culture maternelle et de savoir s'en servir pour une meilleure
communication/interaction ».8(*)
C'est dans cette ligne que je souhaiterais pouvoir mener mon
étude : en approfondissant mes connaissances théoriques,
ainsi qu'en adoptant la méthode de recherche la mieux adaptée
à ce sujet.
Annexe II
Tableaux, schémas, copies
d'écran
TABLEAU 1: Schéma de la communication,
réalisé à partir des schémas de Jakobson ( p. 8 )
TABLEAU 2: Composantes du scénario pédagogique ( p.
26 )
TABLEAU 3: Domaines & paramètres à aborder dans
la description ( p. 37 )
TABLEAU 4 : Données quantitatives ( p. 44 )
TABLEAU 5: Types d'émoticones ( p. 73 )
TABLEAU 6: Parcours externe et interne ( p. 76 )
SCHÉMA 1 : Dispositif du tutorat en ligne ( p. 39
)
SCHÉMA 2 : Ccomposantes de la situation
pédagogique ( p. 40 )
SCHÉMA 3 : Partie intérieure du
SCHÉMA 2 modifiée ( p. 75 )
ECRAN 1 : Projet León -Grenoble (p. 42 )
ECRAN 2 : Un seul fil de discussion ( p. 43 )
ECRAN 3 : Plusieurs fils de discussion ( p. 43 )
ECRAN 4 : Arborescence à l'intérieur d'un fil
de discussion ( p. 45 )
ECRAN 5 : Message d'un apprenant suivi de la réponse
de son tuteur ( p. 46 )
ECRAN 6 : Espace d'écriture pour répondre
à un message ( p. 46 )
ECRAN 7 : Message contenant un lien vers un archive
audio ( p. 66 )
ECRAN 8 : Échange d'émoticones ( p. 71 )
Annexe III : Glossaire
Langue : p. 6
Sens : p. 6, 37
Discours : p. 7
Signes non-verbaux : p.7, 13
Énonciation : p. 7, 15
Message : p . 8, 10
Système : p. 8
Schéma de la communication : p. 8
Fonctions du langage : p. 9, 17-18
Processus : p. 9
Contexte : p. 9
Règles : linguistiques p. 9, sociales 11
Unités : linguistiques / de communication ou de
comportement p. 9
Interaction : p. 9, 15, 17-18
Code : p. 11
Communication : p. 10
Contenu / relation : p.10, 27
Analogique / digitale ou numérique: p. 10
Icônes et émoticones : p. 11, 20, 21
Relation symétrique / complémentaire : p.
10
Mise en scène Statut , Face : p. 11
Figuration et réparation : p. 11, 31
Savoir social : p. 12
Compétence communicative : p. 11
Événement du langage : p. 12
La conversation : p. 12
Indices de contextualisation : p. 12
Actes de langage : p. 12, 14
Tours de parole : p. 13
Séquentialisation : p. 13
Paires adjacentes : p. 13
La portée : p. 13
Intervention initiative, réactive ou mixte : p. 15
FTA , FFA : p. 15
Troubles de communication : 16
Métalangagier : p. 17
Synchrone : p : 18
Asynchrone : p. 19; 30
Oral / écrit : p. 18-21
Techno-sémio-pragmatique : p. 22
Système et dispositif : p. 22, 26, 29
Média : p. 22, 24
Polylogue : p. 22
Type de discours : p. 22-23
Plateforme, Forum , FOAD : p. 26
Scénario pédagogique : p. 26
Espace discursif : p. 27
Echange : p. 29
Achevé d'imprimer
à Nevez,
le 12 septembre 2007
* 1 Expérience
soutenue, aux plans financier et logistique, par Grenoble Campus Ouvert (GRECO)
entre 1999 et 2002, avec une unité d'enseignement optionnelle de 50 h.
consacrée à l'utilisation des technologies dans l'enseignement du
FLE.
* 2Dans le cadre du DESS
« Ingénierie pédagogique dans des dispositifs ouverts
et à distance », Université de
Franche-Compté.
* 3 Il s'agit du projet
franco-australien « Le français en première
ligne », initialement conçu par Christine Develotte [qui] a
débuté en 2002-2003, à l'Université de
Besançon.
* 4 Voir le site
http://w3.u-grenoble3.fr/fle-1-ligne.
* 5 Voir Matthey, M.
(1995 : 122-123).
* 6 Nous avons
été autorisée à présenter ici ce point de
synthèse exposé lors de la soutenance le 26 septembre 2007
* 7 Le projet CULTURE,
franco-américain, a mis en place une expérience pour analyser
« le rôle et l'impact des échanges en ligne pour
l'apprentissage de l'interculturel, dans le cadre d'un cours de
langue » . Un des moyens pour atteindre cet objectif a
été celui de concevoir des questionnaires « pour
sonder : le sens que les étudiants donnent à des mots comme
individualisme/individualism, réussite/success, travail/work,
famille/family, liberté/freedom etc. ; leur conception d'un bon
citoyen, d'un bon voisin, d'un bon patron, etc. ; et leurs comportements
dans des situations et contextes hypothétiques divers dans le cadre de
différents types de relations (avec un ami ; des inconnus, un
collègue, etc..) ». Communication
interculturelle franco-américaine via Internet : le cas de
Cultura. Gilberte Furstenberg, MIT (Boston, USA), Kathryn
English, Ecole Polytechnique (Paris)
* 8
Haydée Maga, en collaboration
avec Manuela Ferreira Pinto, responsable du Pôle langue française
au Centre international d'études pédagogiques (CIEP).
http://www.francparler.org/dossiers/interculturel_former.htm
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