Paragraphe 2 : Le Statut du jeune
Délinquant
Le statut du jeune délinquant a largement changé
du moins théoriquement avec l'entrée en vigueur du code de
procédure pénal des mineurs. Dans les dispositions
générales de ce code le principe de la responsabilité de
l'enfant est relativement atténué, l'article 2 dispose que
l'enfant âgé de moins de sept ans est présumé
irefragablement n'avoir pas la capacité d'enfreindre la loi
pénale, cette présomption devient réfragable pour les
enfants âgés de sept ans révolus.
La question se pose de savoir quel est le statut du mineur
délinquant, il est important de voir s'il est auteur ou victime des
infractions ? D'une part nous avons un système, dans lequel le
mineur délinquant est au centre d'un système qui le
considère comme une victime (de sa famille, du milieu social, de la
conjoncture économique) et où l'intervention de la justice, de
type paternaliste, cherche des réponses sous forme de soins. D'autre
part un système où le jeune délinquant est
considéré comme plus ou moins responsable, doté de libre
arbitre et où il doit répondre de ses actes, même si la
réponse peut être édulcorée en raison de son
âge et de sa plus faible conscience de la portée de ses actes ;
les réponses s'appuient donc sur la punition, essentiellement sur la
mise à l'écart.
Il est utile de se poser la question suivante: l'apparition
des droits de l'enfant dans le domaine pénal a-t-elle
amélioré le statut des enfants, respectivement amené les
gouvernements à rendre des décisions nouvelles à leur
endroit et à prévoir des modèles plus respectueux de ce
statut? Ou au contraire, a-t-elle provoqué un durcissement des positions
et des réponses sociales car plus de droits signifient aussi plus
d'obligations?
On peut répondre tout d'abord que le nouveau statut de
l'enfant a certainement amené de nombreux Etats à vérifier
la position de l'enfant dans les procédures pénales ouvertes
à leur égard et à conférer plus de droits formels
en cette matière: présomption d'innocence, droit d'être
assisté d'un avocat, respect des règles strictes en
matière de détention préventive, droit de recourir
à tous les stades de la procédure, droit de voir sa situation
évaluer périodiquement, etc.... Sur ce point-là, on peut
imaginer qu'il y a eu une avancée certaine.
Par contre, sur le droit de fond, on peut douter que le
mouvement soit à une amélioration sensible de la situation des
enfants. On a plutôt l'impression d'assister à un discours qui
dirait plus de droit égal plus de responsabilités égal
plus de punition. Vous voulez des droits, chers enfants? D'accord, mais assumez
vos responsabilités. Vous cassez, vous volez, vous blessez; d'accord. Et
bien payez maintenant. Alors que l'on aurait pu assister à une
évolution vers un statut de meilleure émancipation et vers une
nouvelle position de participation des mineurs, on assiste plutôt
à un retour du bâton. On est dans une symétrie droits
égal obligations, qui justifie cette évolution, contestable
à mes yeux.
Le retour du droit qui pourrait être compris comme la
réponse aux défauts du modèle de protection comporte donc
des dangers sérieux et ne devrait pas nous leurrer. Plus de droits ou de
meilleurs droits ou une nouvelle position de l'enfant en conflit avec la loi
consistent à lui donner la parole, à l'entendre et à lui
offrir la possibilité de participer à la décision prise
à son égard. Elle ne consiste pas à lui donner raison
envers et contre tout, mais elle ne devrait surtout pas se limiter à lui
dire qu'il a simplement plus de garanties formelles, mais que le prix à
payer est qu'il sera plus sanctionné. On aboutit alors à un net
durcissement de la justice pénale envers les mineurs, Durcissement
d'autant plus dangereux qu'il est légitimé par l'octroi de ces
garanties formelles.
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