4.2. DIAGNOSTIC DIRECT
- ELISA antigène
La technique fixe des anticorps anti-VIH au fond des puits.
La liaison des antigènes du VIH présents dans le sérum aux
anticorps est révélée par des anticorps anti-VIH
conjugués à une enzyme. Cette réaction est
colorimétrique.
- Isolement viral
Cette technique se fonde sur la culture des cellules
mononuclées du sang périphérique après stimulation
initiale des cellules par la phytohémagglutinine (PHA). Une fusion
lymphocytaire réflète l'effet cytopathique de la multiplication
du VIH. La détection de l'antigène dans le surnageant de culture
signe la présence du virus VIH.
- Anticorps anti-VIH2
Le principe "sandwich" permet de détecter les anticorps
anti-VIH2 à cause des réactions croisées entre VIH1 et
VIH2.
- Agglutination passive
Les billes de polystyrène mises en présence
d'anticorps anti-VIH produisent un réseau d'agglutination visible
à l'oeil nu.
- Radio-immunoprécipitation (RIPA)
Un virus marqué par un isotope radio-actif comme la
cystéine 35 donne un lysat viral avec des antigènes à
l'état natif pendant qu'il est incubé avec le sérum
à tester. Les billes de protéines A-Sépharose captent les
complexes immuns ainsi formés. La révélation des
anticorps dirigés contre les protéines d'enveloppe est
réalisée par autoradiographie.
- Western-blot
Il s'agit d'un immuno-transfert qui révèle la
présence des anticorps fixés en focntion de leur
spécificité sur les protéines virales par addition d'une
antiglobuline humaine marquée par une enzyme, puis d'un substrat
chromogène.
- Détection de l'ADN et de l'ARN
Les techniques détectent les acides nucléiques
viraux. Les méthodes d'hybridation moléculaire conventionnelle
in situ basées sur la présence du VIH et son niveau d'expression
par la quantification de ses ARN messagers étaient peu sensibles que
l'isolement viral.
Aujourd'hui on utilise la technique "Polymerase Chain Reaction
ou PCR" qui effectue l'amplification de séquence à partir de
l'ADN : rechercher la présence de l'ADN proviral VIH
intégré dans l'ADN cellulaire ou la présence des ARN
génomiques ou messagers grâce à une étape
préalable de transcription inverse qui transforme l'ARN en ADN. Le
résultat de l'amplification est ensuite analysé par
électrophorèse sous forme d'une bande colorée au bromure
d'éthidium.
5. REPONSE SEROLOGIQUE A L'INFECTION VIH ET DEPLETION DES
CELLULES T-CD4
La détection de l'antigène p24 dans le
surnageant des cultures du VIH n'est pas encore reconnue comme une
méthode de référence. L'antigénémie p24
assure le dépistage précoce de l'infection VIH (phase de
primo-invasion de l'adulte ou du nouveau-né de mère
séropositive) et aurait une valeur pronostique : l'antigène p24
disparaît du sérum après la primo-invasion chez 15% de
séropositifs asymptomatiques (8 à 12 semaines) et ne
réapparaît qu'au stade SIDA de l'infection VIH (60% des cas
évoluent en quelques semaines vers la mort) ; les anticorps Ig M et Ig G
(anti-antigènes p24, gp41, gp120) se développent 3 mois
après la contamination (Figure 1).
L'apparition des anticorps anti-p24 coïncide avec une
phase temporaire d'une baisse des antigènes p24 et une formation des
immunocomplexes (GOODSMIT, 1986 ; ALLAIN J.P., 1986 ; SIMMONDS, 1988 ; COOPER,
1988 ; VON SYDOW, 1988).
A la primo-infection, le nombre des CD4 diminue brusquement au
moment de l'hypervirémie (phase aiguë de l'infection VIH,
lymphadénopathie généralisée). Après 3
mois, la virémie devenue nulle coïncide à une
remontée du taux des CD4 vers des valeurs limites inférieures de
la normale (TINDALL B., 1991) ; ici commence une période de latence
clinique qui peut durer 10 ans. Avec la progression de l'infection VIH, la
dépletion des CD4 et l'hypervirémie VIH favorisent entre la
huitième et la onzième année de la durée de
l'infection VIH l'émergence des affections opportunistes et la survenue
du décès des patients (Figure 2).
La surveillance du compte des CD4 reflète le mieux la
progression de l'infection VIH puisque leur taux montre une très forte
corrélation avec la sévérité de
l'immunodépression (CDC, 1993). Un sujet même asymptomatique avec
un nombre de CD4 inférieur à 200/mm3 est actuellement
classé au stade SIDA depuis la révision 1993 du CDC.
6. COEUR ET SIDA
C'est plus tard que les atteintes cardiaques du SIDA
retiendront l'attention des chercheurs américains avec l'invasion
cardiaque par le sarcome de Kaposi (AUTRAN et al., 1983 ; SILVER M.A. et al.,
1984 ; FRIEDMAN K. et al., 1982). Plusieurs travaux apportent la preuve de
l'atteinte de toutes les tuniques cardiaques au cours du SIDA dans les pays
développés et avec un intérêt particulier sur les
cas de cardiomyopathies dilatées (COHEN I.S. et al., 1986 ; CALABRESE
L.H. et al., 1987 ; CORBOY J.R. et al.,
Figure 1
Evolution des marqueurs sérologiques de
l'infection au VIH.
Ag : antigènes. Ac : anticorps anti-
Figure 2
Déplétion des lymphocytes CD4 et virémie
VIH au cours du temps.
00 : virémie VIH, dilution -> 1/512,
·--- · compte des CD4
A : primo-infection. B : latence clinique. C : apparition des
affections opportunistes. D : décès
1987 ; HAKAS J.F. et al., 1991 ; JOSHI V.V. et al., 1988 ;
KAMINSKY H.G. et al., 1988 ; LEIDIG G.A., 1991 ; REILLY G.M. et al.,
1988). Cette riche documentation se fonde sur les descriptions
nécropsiques (FINK L. et al., 1984 ; CAMMAROSANO C. et al., 1985 ; LEVY
W.S. et al., 1989 : STEINHERZ L.J. et al., 1986). Aux Etats-Unis
d'Amérique, 28 à 73% des patients au stade SIDA présentent
un dysfonctionnement cardiaque (CAMMAROSANO et LEWIS, 1985 ; LEWIS W., 1989 ;
VULLIEMIN P. et LEDUC D., 1993 ; MONSUEZ J. et al., 1988 ; MARTIN R.P. et al.,
1980 ; FINK L. et al., 1984).
Le type d'affection qui vient endommager le coeur des patients
souffrant d'infection VIH varie considérablement suivant la
région géographique et la race.
Dans les pays développés d'Amérique et
d'Europe, l'hypertrophie (dilatation) isolée du ventricule droit a
été retrouvée chez 33% des patients sidéens et
régresse chez 47% après 15 mois d'observation (BLANCHARD D.G. et
al., 1991). Elle est la conséquence d'un coeur pulmonaire chronique
(HIMELMAN R.B. et al., 1989 ; EWIG S. et al., 1994). Des cas d'hypertension
artérielle pulmonaire primitive (HTAP) ont aussi été
observés chez des patients atteints de SIDA (MARTOS A. et al., 1993 ;
DUCHESNE N. et al., 1993 ; METTE S.A. et al., 1992 ; GOUELLO J.P. et al., 1992
; COPLAN N.L. et al., 1990). Chez l'animal avec dépression immunitaire,
l'HTAP est caractérisée par un dépôt de
collagène autour des vaisseaux pulmonaires (GILLESPIE M.N. et al.,
1994). Dans l'HTAP primitive associée au SIDA, l'atteinte
plexogénique des artères pulmonaires entraîne un coeur
pulmonaire et une myocardite de surcharge volumique (REISER P. et al.,
1992).
En Afrique noire, le SIDA transmis par voie
hétérosexuelle, présente trois caractéristiques
épidémiologiques (PIOT P. et al., 1993) : sa fréquence
sensiblement égale chez les deux sexes, alors que le rapport de
près de 19 hommes pour 1 femme est observé aux Etats-Unis, son
incidence maximale dans la tranche d'âge de 20 à 39 ans et un pic
de séropositivité dans la même tranche d'âge.
L'infection VIH y est un paradigme épidémiologique puisque le
nombre de sujets contaminés se compte déjà par millions.
Dans un grand hôpital de Kinshasa, plus de 35% des sujets
hospitalisés (enfants et adultes) sont infectés par le VIH (NGALY
B. et al., 1988). Chez les noirs d'Afrique souffrant de SIDA, la
fréquence de morts attribuées à une cause cardiaque varie
de 6 à 10% (BERTRAND Ed., 1992). Malgré la progression
inquiétante du SIDA dans cette partie du continent africain, il n'existe
que quelques données fragmentaires sur les atteintes cardiaques. Il est
fait état des péricardites liquidiennes, des cardiomyopathies
dilatées et rarement des endocardites associées au SIDA (BOGUI F.
et al., 1992 ; BOURAMOUE C., ASOBOA, 1989 ; BOURAMOUE C. et al., 1992 ; KAGAME
A. et al., 1991). Le SIDA est de plus en plus reconnu comme facteur
étiologique des cardiomyopathies dilatées (BERTRAND Ed., 1992 ;
BOURAMOUE C. et al., 1992). Dans la plupart des cas, il s'agit d'atteintes
cardiaques chroniques dont les manifestations cliniques apparaissent avant les
symptômes liés au SIDA.
Dans la région des Caraïbes, il s'agit plus
souvent des populations toxicomanes (84,4%) et d'ethnie hispanique (ALTIERI
P.I. et al., 1994) : l'atteinte cardiaque associée au SIDA est souvent
asymptomatique malgré la fréquence élevée des
myocardites (32%) d'origine infectieuse comme Histoplasma capsulatum,
Toxoplasma gondii, Mycobacterium tuberculosis, Cytomegalovirus, Cryptococcus
neoformans et des mycobactéries atypiques.
L'Europe et les Etats-Unis présentent des patients dont
le SIDA se complique de tuberculose et de cryptococcose. Des 350.000 cas de
SIDA que compteront les Etats-Unis en l'an 2000, 25.000 souffriront d'un
dysfonctionnement ventriculaire gauche : une étude conduite à
l'hôpital Johns Hopkins montre une prévalence de 14,5% et une
incidence de 18% de ce dysfonctionnement ventriculaire gauche au cours du SIDA
(HERSKOWITZ A.H. et al., 1993). En France, la prévalence de
l'altération de la fonction ventriculaire gauche est inférieure
(9,5%) à celle de l'Amérique (LASSAIGNE D. et al., 1991).
Notre modeste contribution, fruit du travail clinique d'une
décennie dans un milieu africain différent des régions
nord-américaine, européenne et des Caraïbes, vise un
dépistage systématique des atteintes cardiaques chez des patients
infectés par le VIH pour mieux :
1. déterminer leurs différents aspects
cliniques, biologiques, électrocardio-graphiques, radiologiques et
échocardiographiques.
2. évaluer leur évolution naturelle par la
compréhension des relations existant entre le VIH et les
différentes variables anthropométriques, biologiques et
échocardiographiques. Ces variables sont liées au pronostic et
à la survie.
3. rechercher une cause immunopathologique possible
liée au complexe d'histocompatibilité (HLA) et tester
l'hypothèse de l'existence d'une base génétique dans ces
atteintes cardiaques associées à l'infection VIH.
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