Chapitre 4. DISCUSSION
Cette étude démontre avec des preuves le
rôle bénéfique de l'entraînement cardiovasculaire
dans une population au travail à haut risque cardiovasculaire (12,13).
En effet, dans les pays développés, la pratique
régulière de l'activité physique diminue l'incidence des
maladies cardiovasculaires et la mortalité totale (21-23).
Ainsi, dans la présente étude,
l'entraînement cardiovasculaire appliquant les principes
théoriques et pratiques de la médecine physique visait à
agir sur certains facteurs de risque cardiovasculaire, la fonction respiratoire
et la performance en milieu de travail de la SNEL. Ce programme
d'entraînement cardiovasculaire est nécessaire pour ces
employés de la SNEL présentant un taux très
élevé d'inactivité physique estimé à 61,9%
des employés en 2002(13) et 90,5% dans la présente étude.
Il est admis que l'inactivité physique double le risque
de maladie coronaire (39,40). La présente étude met en
évidence d'autres facteurs de risque cardiovasculaire qui militent pour
la promotion de la santé en terme de qualité de vie :
alimentation saine, absence de tabac et d'abus d'alcool.
4.1. FACTEURS DE RISQUE CARDIOVASCULAIRE ISOLÉS
4.1.1. Age et sexe
Les employés évalués étaient en
majorité des hommes reconnus vulnérables pour les maladies
cardiovasculaires. Le sexe masculin au delà de 55 ans et le sexe
féminin au delà de 65 ans, ont aussi été
cités comme facteurs de risque cardiovasculaire. L'âge moyen de la
population étudiée était de 54, 4#177;7,2 ans ; cet
âge suggère une population congolaise avec amélioration de
l'espérance de vie (41) et en transition démographique,
elle-même concomitante à la transition nutritionnelle et à
la transition épidémiologique (42).
Dans un travail très récent, LONGO MBENZA et al.
ont démontré que le sexe masculin, l'âge avancé, le
niveau socio-économique faible, la migration, la fréquence
cardiaque élevée et l'hyperfibrinémie étaient des
facteurs prédictifs significatifs de la mortalité par AVC chez
les congolais (43).
Une étude réalisée en 2004 par ONYUMBE
(44) a estimé que les agents de sexe masculin constituaient la
majorité de l'effectif total de la SNEL : 90 %d'hommes contre 10%
de femmes. En outre, il y a une forte concentration de 2/3 des agents de la
SNEL dans la tranche d'âges compris entre 40 ans et 54 ans (44).
4.1.2. Style de vie
Le revenu mensuel de la population étudiée
définissant un niveau socio-économique moyen à
élevé pour la majorité ( 13) et le milieu urbain de
Kinshasa expliquent le taux élevé de tabagisme par cigarette
(14,3%) et d'excès d'alcool estimé à 57,1% des
employés. C'est pourquoi le programme d'entraînement
cardiovasculaire proposé à ces employés comprend un
volet de conseils pratiques. Ce volet vise à éliminer les
idées reçues préconisant un repos absolu en cas
d'hypertension artérielle ou de MCV et à les convaincre du risque
auquel ils s'exposaient s'ils continuaient à mener leur vie comme par
le passé, sans pour autant les faire paniquer.
Aussi, il leur était recommandé de cesser de
fumer de la cigarette et de faire usage modéré de consommation
d'alcool. En effet, le tabagisme à la cigarette, actif ou passif,
intervient comme facteur de risque cardiovasculaire majeur (16,24,46,48). Une
réduction efficace de récidive d'accident coronaire est
observé en cas d'arrêt d'usage de tabac (24 - 46) avec gradient
social important au dépens des ouvriers (16,40-52). En milieu
hospitalier de Kinshasa (8,54), dans la population générale de
Kinshasa (10) et en milieu de travail de la SNEL à Kinshasa (13), de la
régie des voies maritimes à BOMA et de l'Office National de
Transport à BOMA (54), il est observé une prévalence plus
élevée de tabagisme par cigarette chez les hommes que chez les
femmes (8-11,53-56).
En Afrique du Nord, le tabagisme à la cigarette
apparaît comme le premier facteur de risque (70%) de l'infarctus du
myocarde avec une consommation de plus de 20 cigarettes par jour exclusivement
pour les hommes (56).
Plusieurs études rétrospectives et prospectives
dans le monde ont fait état du rôle protecteur de la consommation
modérée d'alcool (1 à 2 verres de vin par jour) dans les
MCV ainsi que dans les autres maladies comme le cancer (48,57,58). En Afrique,
Kacou et Monkam supposent que les coronariens consomment plus d'alcool que les
groupes témoins (15).
La consommation excessive d'alcool est la principale cause de
cardiomyopathie dilatée dans les pays développés (59).
L'excès d'alcool augmente le risque d'accident vasculaire
cérébral (60,61). Le volet de conseils pratiques recommandait
donc une consommation modérée d'alcool qui diminue le risque
cardiovasculaire et de mortalité (62-68).
Il était important que les sujets prennent en charge
eux - mêmes ce programme d'entraînement afin que cela fasse partie
intégrante de leur vie car le but était de changer leur mode de
vie ; abandonner le sédentarisme et prendre goût à
une vie active. En effet, la vie active est un concept qui considère
l'activité physique pour améliorer la qualité de vie tant
dans le milieu de travail, à la maison et dans les loisirs. Mener une
vie active et participer à un programme d'exercice sont en soi deux
choses bien différentes. Mener une vie active signifie intégrer
les activités physiques adaptées dans sa vie de tous les jours.
(Ex. : préférer gravir les marches d'escalier que prendre
l'ascenseur). Il est bon de rappeler que la population d'étude a
été prise dans un pays où la culture sportive est quasi
inexistante et où la culture du bien être ne cadre pas avec une
vie active. La majorité des sujets menait une vie sédentaire
franche. La reprise des activités physiques avait été une
dure épreuve pour leur corps. Déverrouiller des articulations,
dérouler des muscles gardés pendant des années voire des
décennies sans grande activité et optimiser le travail du coeur
et des poumons avait demandé beaucoup de volonté et de sacrifice
de la part de chacun d'entre eux.
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