Cette étude est initiée dans un contexte de
modernisation progressive et irréversible du secteur bancaire et
financier de l'UEMOA sous l'impulsion de la Banque Centrale. Les
systèmes de transfert en temps réel et de
télécompensation sont déployés dans l'ensemble des
pays. La monétique interbancaire est en phase de test. Ces innovations
s'insèrent dans une vision à moyen et long terme. Elles
créent un cadre favorable pour une promotion de la bancarisation et de
l'utilisation des instruments scripturaux de paiement.
L'objectif principal de cette étude est de
déterminer les facteurs explicatifs de la faible bancarisation afin de
proposer les mesures nécessaires à la promotion de la
bancarisation. La revue de littérature a permis de mieux
spécifier cet objectif en désignant deux types de facteurs:
l'environnement global, l'état du secteur bancaire. Nous avons introduit
un troisième facteur, relatif à l'impact de la microfinance pour
tenir compte de la spécificité de l'UEMOA
caractérisée par la présence d'un secteur florissant des
IMF.
Les résultats obtenus montrent que l'environnement
global ne contribue pas à la réduction de la faible
bancarisation. Il en est de même de l'état du secteur bancaire.
Par contre, le secteur de la microfinance contribue de façon
significative à la réduction de la faible bancarisation notamment
par l'offre de microcrédit de montant relativement
élevé.
La présente étude a plusieurs limites dont il
convient de mesurer l'importance afin de ne pas en exagérer la
portée. Ces limites tiennent essentiellement aux difficultés
rencontrées dans la collecte des informations. Le manque de
données statistiques fiables sur une longue période a
constitué une contrainte majeure dans la définition du
modèle et du nombre de facteurs potentiellement explicatifs. La
profondeur temporelle n'est pas réellement suffisante pour des tests
efficaces. Le modèle est sensible aux modifications. En plus le taux de
bancarisation qui a servi de base à la détermination de la marge
de bancarisation n'est qu'une approximation (relativement fiable) de la
réalité. Il s'agit plutôt du taux de
pénétration démographique du compte bancaire dans la
population active. Il devra être corrigé des titulaires de comptes
multiples et de comptes joints.
Moins qu'un aboutissement, une identification formelle et
irréfutable des principaux facteurs explicatifs du
phénomène complexe de la faible bancarisation, notre étude
est un pas dans une direction où beaucoup reste à faire.
Il est impératif que la problématique de la
bancarisation soit prise en charge au niveau de chacun des Etats et au niveau
des instances sous-régionales en vue de définir des politiques
globales d'action. La faible bancarisation et ses corollaires font corps avec
le problème de sousdéveloppement au même tire que les
difficultés d'accès à la santé, à l'eau
potable, à l'électricité, à l'éducation, au
transport et à la communication (Peachey et Roe, 2004).
Il existe de par le monde des expériences qui
pourraient servir de base à une politique de bancarisation dans l'UEMOA.
Nous pouvons citer:
· l'approche française: elle est
caractérisée par une utilisation importante des lois,
règlements et autres décrets pour obliger les populations
à ouvrir un compte en banque. L'obligation du règlement des
salaires en monnaie scripturale et le droit au compte en sont les symboles;
· l'approche américaine: elle est basée
non sur le principe du droit au compte mais sur la facilitation de
l'accès au financement bancaire (Gloukoviezoff, 2005). Le CRA (Community
Reinvestment Act) oblige les banques à financer des activités des
foyers démunis dans leur zone d'implantation. Un système efficace
de notation permet de faire payer les banques défaillantes et de primer
celles qui jouent le jeu: c'est du «play or pay» (Hudson et Matray,
2004).
· l'approche sud africaine: elle est
caractérisée entre autres par la proposition d'un compte
spécifique sans frais dénommé «mzansi»
destiné aux populations pauvres du pays (Napier et Beghin, 2006a et
2006b).
Mais aucune de ces approches ne saurait être
appliquée dans l'UEMOA sans tenir compte du contexte et des
spécificités locales. D'où l'importance des études
qui permettront de mieux cerner les mécanismes engendrant la faible
bancarisation et d'y adapter les solutions. A cet égard, il serait
particulièrement intéressant de réaliser dans l'Union des
travaux approfondis sur l'évolution du taux de bancarisation et du mode
de passage des clients des IMF vers les banques.