WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Devenir professionnel des diplômés du système universitaire guinéen : étude exploratoire à partir des diplômés de l'Université de Conakry

( Télécharger le fichier original )
par Mamadou Gando BARRY
Université de Montréal - Maîtrise en Sociologie 2003
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

CONCLUSION

Cette étude exploratoire avait pour but de comprendre l'insertion professionnelle d'un petit échantillon de diplômés du système universitaire guinéen formés à l'Université de Conakry. Ce mémoire a mis en relief quelques uns des procédés ayant le plus d'influence sur le passage entre les études et le marché du travail chez les diplômés universitaires guinéens. De plus, quelques archétypes d'insertion des diplômés ont été décrits en fonction de diverses variables objectives et subjectives.

Sur le plan de la problématique, l'analyse qui cible la sortie du système universitaire et l'insertion dans le marché du travail a été privilégiée. En fait, elle conduit à cesser de considérer l'insertion professionnelle comme un simple passage sans interruption du système universitaire au marché du travail. Elle signifie une conjugaison de situations allant de la formation principale, aux formations complémentaires et aux stages, à la recherche de l'emploi, à l'emploi, au chômage ou à l'exclusion (inactivité). L'analyse vient remettre en question le lien entre la formation reçue et l'emploi chez les diplômés universitaires guinéens. D'où l'éternelle question de l'inadéquation de la formation et de l'emploi.

Quand on considère le rôle de l'origine sociale, les résultats de l'analyse de nos données montrent qu'elle ne joue pas beaucoup sur le processus d'insertion des diplômés. Par exemple dans notre échantillon, force est de constater que sur les 22 diplômés (55% de l'échantillon total) issus d'une origine sociale aisée, la moitié est au chômage. L'origine sociale a probablement peu d'effet, passé l'entrée à l'Université. Même si pendant longtemps certains auteurs ont souvent affirmé que l'origine sociale est déterminante dans l'accès à l'emploi (Bourdieu et Passeron, 1970 ; Kelley, 1976). Dans notre étude, cette influence est loin de se manifester clairement.

Du point de vue des réseaux sociaux, nous avons souligné la pertinence des réseaux relationnels pour comprendre le processus d'insertion professionnelle des diplômés du système universitaire guinéen et particulièrement ceux de l'Université de Conakry. La quasi totalité des interviewés confirment dans leur discours le rôle des réseaux relationnels dans le contexte guinéen afin de décrocher un emploi. Les répondants sont aussi unanimes sur le fait que ces pratiques se font régulièrement sur le marché de

l'emploi guinéen et 56 % des interviewés soutiennent que les réseaux constituent un moyen efficace d'insertion professionnelle. Ce phénomène est accentué par la corruption et le "pistonnage". Ce qui permet d'arriver à la conclusion qu'en Guinée, les réseaux constituent l'une des ressources importantes pour accéder à un emploi. Ainsi, de façon générale en Guinée et de l'Université de Conakry en particulier, les diplômés ont des chances différentes de réussir l'insertion. Pour réussir, les réseaux jouent effectivement un rôle capital.

Du point de vue des formations complémentaires et des stages, comme on l'a montré plus haut, ce sont les diplômés de la Faculté des Lettres et Sciences Humaines qui présentent la meilleure situation d'emploi après la sortie de l'Université. Contrairement à ce qu'on est porté croire habituellement que les diplômés de la Faculté des Sciences auraient dû avoir une meilleure insertion professionnelle par rapport à ceux qui ont fait Lettres, ils sont les plus touchés par le chômage. C'est pourquoi, la crainte du chômage après les études conduit souvent les diplômés à multiplier les formations et à acquérir des compétences afin d'élargir leurs chances d'insertion sur le marché du travail. Ainsi, l'analyse sur les besoins de formations complémentaires montre que contrairement à la logique habituelle, dans un marché de travail déprimé, le diplôme universitaire dans sa forme traditionnelle ne semble plus suffire pour permettre aux diplômés de décrocher un emploi en Guinée.

En ce qui concerne les formations complémentaires, les répondants font de la maîtrise des logiciels et de l'outil informatique, de l'anglais et de la comptabilité-gestion une de leurs priorités. Ainsi, avec cet intérêt des diplômés, on peut dire que l'intégration des formations complémentaires dans les programmes universitaires serait une avenue intéressante pour les institutions d'enseignement supérieur de Guinée en raison de la demande et des revenus que de telles formations pourraient générer.

Une autre tendance est apparue de façon évidente et corroborée par d'autres études. En fait, il appert qu'en Guinée, l'ensemble des diplômés ayant connu simplement une formation principale connais sent après la sortie de l'Université de Conakry une situation de chômage ou d'emploi précaire. Cela explique pourquoi une grande proportion d'entre eux choisissent de faire une formation complémentaire dans le but évidemment

d'augmenter leurs chances d'occuper un emploi même si ce dernier n'est pas relié à leur formation universitaire.

Selon PADES, la participation à un stage semble (60% des répondants), pour les auteurs de cette étude, la voie royale pour obtenir un emploi en Guinée. A ce niveau, notre étude recoupe celle de PADES et confirme en même temps notre hypothèse 3 de recherche que les formations complémentaires et les stages sont incontournables pour décrocher un emploi sur le marché de travail guinéen. Toutefois, contrairement à l'étude menée par le PADES qui révélait que les diplômés des Institutions d'enseignement supérieur jugent assez positivement la formation universitaire, notre recherche montre que les diplômés de l'Université de Conakry ne jugent pas assez positivement la formation reçue. Cette appréciation de la formation, nos répondants la confirment en portant un regard négatif sur les programmes enseignés par rapport aux besoins du marché de l'emploi guinéen.

A propos de l'emploi, la comparaison montre que ce sont les diplômés ayant fait au moins une formation complémentaire (soit en informatique, soit en anglais ou encore en compabilité-gestion) qui tirent le mieux leur épingle du jeu, le fait est qu'aujourd'hui en Guinée, sans une formation supplémentaire, ou sans stage, il est difficile voire impossible de décrocher un emploi.

Les résultats de cette recherche amènent à poser la question de la valeur de la formation universitaire principale. Est-ce que tous les diplômes obtenus sont en adéquation avec les besoins du marché de l'emploi guinéen ? A notre avis les diplômes sanctionnés par une formation complémentaire ou un savoir pratique, professionnel et technique, ont une longueur d'avance sur les autres. Ajoutons qu'il existe souvent un certain décalage entre les programmes que l'Université de Conakry offre à ses étudiants et la réalité du marché de l'emploi guinéen.

A notre avis, l'intérêt de cette étude réside dans le fait qu'elle contribue à faire avancer les connaissances dans le champ de la sociologie de l'insertion et porte de manière précise sur l'insertion professionnelle des diplômés sur le marché du travail dans le contexte africain.

Dans l'ensemble, les données suggèrent que les jeunes diplômés (hommes et femmes) auraient plus de difficultés que leurs aînés sur le marché du travail de Conakry, difficultés caractérisées par un accès moins rapide à un premier emploi, une plus grande implication dans le secteur informel, mais davantage dans des statuts "dépendants" et un accès moins élevé à un premier emploi dans le secteur public. Ainsi, les données permettent de suggérer également que le passage d'un régime centralisé (où la garantie de l'emploi pour tous était assurée par l'État) à un régime de libéralisme économique, accompagné de l'application des programmes d'ajustements structurels du Fonds Monétaire International et de la Banque Mondiale auraient effectivement affecté les diplômés en rendant encore plus problématique leur insertion sur le marché du travail guinéen.

Dans notre étude, il ressort par exemple, que cette situation conduit plusieurs diplômés de l'enseignement supérieur à accepter des emplois non reliés à leur domaine d'étude. En outre, de manière générale, les diplômés de ces dernières années, lorsqu'ils trouvent un emploi, restent dans une situation précaire et reçoivent une rémunération nettement inférieure à celle des employés plus anciens ayant un niveau de qualification inférieur dans l'entreprise. L'analyse des résultats sur le rôle des stages dans l'obtention de l'emploi permet de comprendre que la valorisation des stages par les répondants va en conformité avec les points de vue des employeurs qui privilégient ces stages. On note aussi une forte adéquation entre les perceptions des répondants et celles des employeurs sur la nécessité de commencer par un stage avant l'embauche. La valorisation du stage qui se manifeste tant chez le diplômé que chez l'employeur potentiel s'explique en partie par le fait que cette force de main-d'oeuvre participe à la bonne marche des entreprises mais aussi contribue à faciliter l'insertion du diplômé.

Par ailleurs, en ce qui concerne les causes du chômage des diplômés, nos résultats concordent avec ceux du PADES (1998). Les auteurs de cette étude soulignent que de façon générale les causes du chômage sont intra et extra universitaire. Les causes les plus citées, au niveau intra, sont les lacunes dans des disciplines comme le français, la communication écrite (exposée des idées), l'anglais, l'informatique, ensuite l'insuffisance de la diversification des compétences et la sous information des diplômés sur les réalités

du marché du travail. Au niveau extra, les contraintes sont l'interruption du recrutement dans la fonction publique et le faible nombre d'entreprises privées ou publiques offrant des emplois aux diplômés universitaires.

Maintenant il importe de signaler les limites de notre étude. Notre recherche présente des limites à cause de son caractère exploratoire, notre population est réduite à deux Facultés de l'Université de Conakry alors que cette dernière compte en son sein cinq Facultés et deux centres d'études. Ainsi, nos résultats ne sont pas généralisables à tout le système universitaire guinéen ou même de l'Université de Conakry. Si nous avions à faire une étude ultérieure, elle devrait utiliser un échantillon représentatif des diplômés de l'Université de Conakry incluant toutes les Facultés.

Plusieurs possibilités s'offrent, notamment de comparer les différentes Facultés de l'Université de Conakry et établir un rapport entre les diplômés qui ont fait, sciences économiques ou informatique ou encore anglais par rapport à ceux qui ont choisi des disciplines différentes. Car, dans notre étude il apparaît que les connaissances de la comptabilité-gestion, de l'informatique et de l'anglais constitue un atout d'insertion professionnelle importante.

Après avoir tracé un bilan général de notre étude, prenons un peu de recul dans le but d'élargir notre réflexion. Quelles sont les perspectives de devenir professionnel qui attendent les diplômés guinéens à la sortie de l'université ? D'entrée de jeu, quelques faits nouveaux sont inscrits au centre de la réflexion sur l'insertion professionnelle : « diminution des possibilités d'emploi dans le secteur public, modification de la relation formation-emploi, "délinéarisation" du processus d'insertion professionnelle et diversification des modes d'insertions » (Trottier, Perron et Diambomba, 1995 : 7). Si la présente recherche a pour mérite de rappeler aux yeux des premiers concernés, les diplômés, qui seront susceptibles d'y trouver des informations de première utilité. Alors, cette étude n'aura pas été vaine.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Des chercheurs qui cherchent on en trouve, des chercheurs qui trouvent, on en cherche !"   Charles de Gaulle