Les enjeux de la formation DEDA sur mes pratiques professionnelles d'acteur du système de santé au Burkina Fasopar Alain KABORE Université de Ouagadougou - Licence 2005 |
iii. Que retenir de ce parcoursUn tel parcours comme le mien, de l'enfance à l'acteur de développement que je suis aujourd'hui, est entaché aussi bien de succès que d'échecs. Sur le plan des succès, les acquis sont à mettre au niveau de ma personne en tant qu'agent social, qui a été forgé par l'éducation reçue de mon microcosme social et familial. En effet, l'intégration sociale aussi bien à Ouagadougou qu'à Toma, a été facilitée par l'assimilation de l'habitus que j'ai reçu aussi bien de ma famille, de mon parcours scolaire que de ma formation professionnelle. L'habitus est défini comme « l'ensemble des habitudes et des dispositions, propres à une culture ou à un milieu social, inculqué à l'individu au cours de la socialisation17(*). » En tant qu'aînée de la famille mes parents m'ont préparé à mieux appréhender les situations difficiles et partant, à faire face aux éventuelles difficultés qui se présenteraient en moi. Ils aimaient illustrer leurs dires par cet adage africain : « l'aîné est un dépotoir. » Je me rappelle encore des conseils d'un sage de mon village qui me guidaient dans mes attitudes lorsque j'avais rejoint mon poste de travail à Toma : « ne jamais réclamer son droit est une preuve de maturité.» Et il renchérissait que "ce qui revenait au crapaud ne pourrait être sur un arbre18(*). " Au plan des difficultés rencontrées dans ma carrière professionnelle, je note un premier choc que j'ai reçu une fois au contact du terrain : l'écart entre l'enseignement théorique reçu et les réalités du terrain. Comme le reconnaît WHITE : `' l'un des plus importants obstacles à l'implémentation des SSP fut l'échec de la plupart des institutions d'enseignement post-secondaire médical à adapter leurs missions et activités au défi posé par l'initiative « santé pour tous », leitmotiv des SSP.'' En somme, j'ai eu l'impression une fois sur le terrain, que tout se contrastait avec ce qui nous avions appris pendant la formation. Cela pourrait s'expliquer par la divergence des programmes de santé mis en oeuvre dans une région sanitaire à une autre au Burkina Faso. En effet, au gré des partenaires au développement (bailleurs de fonds), le territoire burkinabé a été « balkanisé » et « colonisé » au plan sanitaire. On trouve par exemple, la coopération hollandaise qui intervient dans les régions sanitaires du plateau central et du centre Nord via l'ONG `'Save the Children'' Pays Bas (SCPB.) La coopération française agit dans les régions des Hauts Bassins et de la Comoé à travers le projet HCK(Houet, Comoé et Kénédougou.) Il y a aussi la coopération allemande qui s'exprime dans les régions sanitaires du sud-ouest et de la boucle du Mouhoun en mettant en oeuvre le programme santé sexuelle, VIH/SIDA, droits humains et lutte contre les pires formes de travail et le trafic des enfants(PSV-DHTE.) Aussi les régions du Sahel, de l'Est et du Centre-Est sont parrainées par les institutions onusiennes (UNFPA, UNICEF.) Ces partenaires appuient techniquement et financièrement la mise en oeuvre de la politique sanitaire nationale (PSN.) Ne disposant pas de nos moyens propres pour cela nous nous trouvons par conséquent obligés de mettre en oeuvre des stratégies proposées à la limite imposées par ces partenaires. Ces stratégies mises en oeuvre ne sont pas toujours adaptées, parce que n'étant pas conçues en fonction de nos réalités socioculturelles et même psychologiques. Comme exemple on peut citer l'inadaptation des modes de recouvrement des coûts, préconisé dans la stratégie de renforcement des SSP comme alternative de participation des communautés au financement de la santé. En effet, dans la plus part des sociétés traditionnelles, les soins et les médicaments ne sont pas payés en espèces, mais en nature, le plus souvent symbolique : poulet, mouton, cola, cauris... A cette difficulté d'inadaptation de mes apprentissages acquis pendant la formation professionnelle aux aspirations réelles des populations, s'ajoutent les péripéties issues des relations interpersonnelles aussi bien en milieu professionnel que celui communautaire. Nonobstant ma jeune expérience professionnelle, je me suis retrouvé responsable d'un service où huit (8) autres agents plus âgés et plus anciens professionnellement travaillaient déjà. Il se posait ainsi un besoin de savoir-être et de savoir-faire dans les relations interpersonnelles. En outre, dans mes tâches de chargé de programmes destinés aux communautés de base, il me fallait des outils et des techniques d'approche appropriés pour réussir les interventions. Cependant la formation professionnelle que j'avais reçue ne me conférait pas ces aptitudes. Dans le souci de combler ces insuffisances j'ai effectué de stages de perfectionnement et pris par à de sessions de formation continue dont les thèmes étaient relatifs : - au management et communication dans les services de santé, organisé par la GTZ d'août en juillet en 1999 - à la recherche action en santé de la reproduction au centre international de formation et de recherche action (CIFRA) à Ouagadougou, du 02 novembre 1999 au 14 mars 2000; - à la communication avec les jeunes en santé sexuelle et reproductive au centre d'études sur la famille africaine (CEFA) à Lomé au Togo, du 22 avril au 15 mai 2002 - à la réalisation d'enquête quantitative en santé de la reproduction, organisé par la GTZ et l'institut national de la statistique et de la démographie (INSD) en juin 2002 - à la formation de formateur en santé de la reproduction du 21 février au 15 mars 2000, organisé par la GTZ et la DRS de la Boucle du Mouhoun; - à la formation en gestion de district organisé par la cellule d'appui à la décentralisation du système de santé (CADSS) et la DRS de la Boucle du Mouhoun du 5 au 25 juin 2000 et bien d'autres séminaires et ateliers non moins importants. Toutes ces différentes formations reçues m'ont certes doté et ou actualisé mes compétences pour la réalisation pratique de mes activités. En revanche, elles ne m'ont fourni des bases théoriques de réflexion. En d'autres termes, je me sentais capable de pratiquer mais à la limite de ce qui était vu lors des sessions de formation. La conséquence systématique est la difficulté d'adaptation et d'actualisation lorsque le contexte ou les conditions de mise en oeuvre changeaient. Michel FEUTRE19(*) illustre cette vision quand il déclare que : `'dans certaines activités, le champ de connaissances est tel que l'on peut penser que l'actualisation n'est plus suffisante mais qu'il faut mettre en place des temps d'acquisition formalisés plus ou moins long selon le domaine et le niveau d'expertise requise permettant à l'individu d'acquérir de nouvelles références de nouveaux schémas de pensée conformes aux nouvelles exigences de son activité.`' Une formation universitaire s'avérait impérative. C'est ainsi que j'ai postulé à une bourse d'études en sciences sociales et sanitaires à l'Université Henri POINCARRE de Nancy I, bourse que je n'ai jamais obtenue. Aussi ai-je constaté que mes pouvaient être comblées sur place lorsque j'ai pris connaissance du contenu du programme de formation en développement et éducation des adultes (DEDA.) DEUXIÈME PARTIE * 17 AKOUN André et ANSART Pierre (sous la dir.), (1999), Dictionnaire de sociologie, , collection dictionnaires le Robert, Editions Seuil, P251. * 18 Proverbes en pays mossi. * 19 FEUTRE, Michel, la validation des acquis personnels et professionnels et l'université, in Education n°18-19 p 55 |
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