B) L'évaluation des emplois et la confection d'une
grille salariale équitable
L'évaluation permet de hiérarchiser les emplois
d'une organisation selon la valeur relative de leurs exigences, afin d'accorder
aux employés des salaires proportionnels aux exigences de ces emplois.
L'évaluation des emplois permet de jauger la contribution relative des
emplois au succès de l'organisation en examinant la valeur ou
l'importance relative de leurs exigences, et non la contribution des titulaires
de ces emplois (qui fait plutôt l'objet de l'appréciation des
performances).
Compte tenu de la nature subjective de la démarche
d'analyse et d'évaluation des emplois, l'acceptation des
résultats repose sur la façon dont l'entreprise a
procédé pour les obtenir. Par conséquent, bien qu'il soit
important que la direction s'assure de verser des salaires équitables,
il est aussi important que les employés considèrent que leurs
salaires ont été déterminés équitablement.
Cette perception de l'équité est conditionnée
essentiellement par le processus de gestion de l'analyse et de
l'évaluation des emplois.
La CNSS pourrait mettre en place un comité
d'évaluation composé de la direction générale, d'un
cadre du service personnel, des représentants des titulaires des emplois
visés, qui connaissent bien l'emploi parce qu'ils l'exercent, et un
consultant externe. La CNSS étant un milieu syndiqué, il est
judicieux d'inclure le syndicat dans le comité.
Une fois le comité institué, l'évaluation
des emplois proprement dite peut être réalisée. Il existe
plusieurs méthodes d'évaluation des emplois. Mais nous opterons
pour celle qui est la plus appliquée : la méthode
d'évaluation Hay qui est un outil d'analyse réducteur de
subjectivité particulièrement efficace pour les postes
d'encadrement.
Elle consiste à élaborer une grille de
rémunération ou cadre de cohérence. Cette grille est
composée de critères ou facteurs pertinents représentant
les raisons pour lesquelles certains emplois sont plus exigeants que d'autres.
Ces facteurs peuvent correspondre à des intrants dans le travail (la
formation, l'expérience), aux exigences du travail (la prise de
décision, l'initiative, les efforts physiques ou mentaux), à des
extrants dans le travail (l'impact de l'emploi sur le résultat de
l'organisation), et à des conditions de travail (l'environnement de
travail, les risques). Ces facteurs doivent être déterminés
en fonction du contexte particulier de l'organisation.
Ensuite, il faut déterminer les niveaux de
présence par facteur ou par champ du cadre de cohérence. Par
exemple, le niveau le plus élevé pour le facteur formation peut
être un diplôme de doctorat alors que le niveau le plus faible
serait un diplôme d'études primaires, avec des niveaux
intermédiaires (Bac, Bac+2, Bac+3, Bac+5). Des points sont
attribués du niveau le plus élevé au niveau le moins
élevé. Le comité peut choisir de pondérer ou non
les différents facteurs ou critères d'évaluation en raison
de leur importance relative pour l'organisation. Mais il n'en est pas toujours
ainsi.
La grille ainsi confectionnée va servir à
évaluer ou valoriser les emplois. La qualité de cette
étape dépend intrinsèquement de la qualité de la
grille d'évaluation. Chaque emploi de l'organisation est valorisé
à tour de rôle. Pour ce faire, le comité
d'évaluation détermine pour chaque emploi le niveau de
présence à travers chacun des facteurs d'évaluation. Les
points correspondant au niveau de présence pour chaque facteur sont
additionnés. La somme totale obtenue représente le poids de
l'emploi. C'est ce qu'on appelle généralement la pesée des
postes. Cette valorisation des emplois ne peut être définitive et
doit être réactualisée en fonction des évolutions de
l'environnement de travail.
Le total des points obtenus par chaque emploi à l'issue
de l'évaluation permet de hiérarchiser les emplois selon les
scores obtenus et de regrouper dans une même classe, ceux dont la valeur
en points est similaire : c'est la classification des emplois. En effet,
une différence de 10 points ne veut pas dire qu'un emploi est
nécessairement plus exigeant qu'un autre. Cet exercice vise à
ordonner dans un souci de justice sociale, les différents emplois de
manière à rémunérer effectivement la qualité
de la contribution de chacun au rendement de l'organisation.
Mais l'évaluation des emplois, si elle permet de
hiérarchiser et de classer les emplois, ne suffit pas pour conclure
à l'existence de la grille salariale. Il faut encore des étapes
pour passer de la classification des emplois à la structure
salariale.
En effet, la détermination de la grille salariale
nécessite des informations sur le marché des salaires.
L'entreprise doit s'inspirer du taux auquel les autres organisations de son
secteur rémunèrent leurs salariés. Cette comparaison se
réalise par les enquêtes de rémunération encore
appelées mercuriale des salaires, qui ont pour but de réaliser
l'un des principes d'équité fondamentale en matière de
rémunération : l'équité externe. La CNSS
pourrait s'intéresser aux taux de rémunération
pratiqués dans les offices ou entreprises semi-publiques.
Ainsi, en tenant compte du marché du travail, mais
aussi de l'équilibre financier de l'organisation, les minima sont
définis par catégorie de même que la règle
arithmétique d'évolution de ces minima. Mais, ces minima ne
peuvent être en dessous des minimaux légaux. Dès lors, la
structure salariale peut être présentée.
Sur l'axe horizontal, on trouve les classes d'emplois, qui
correspondent à des groupes d'emploi dont les exigences sont
jugées similaires selon la méthode d'évaluation des
emplois et qu'on rémunère de la même façon (soit par
un taux de salaire unique ou par une échelle salariale).
Sur l'axe vertical, on trouve les échelles ou
fourchettes salariales qui décrivent la progression des salaires des
titulaires des emplois d'une même classe d'emplois. Toute échelle
salariale comporte un taux de salaire minimal offert au titulaire qui commence
à occuper un poste de cette classe d'emploi, et un taux de salaire
maximal qui correspond au salaire le plus élevé qui peut
être officiellement versé aux titulaires des emplois de la classe.
Cette variation de salaire à l'intérieur d'une même
échelle vise le respect d'un autre principe de gestion de la
rémunération : l'équité individuelle.
La réalisation d'une grille salariale respectant les
différents principes d'équité (équité
interne, équité individuelle, équité externe,
équité du processus de gestion de la rémunération),
est susceptible de créer chez le salarié une perception de
justice qui constitue une source de motivation. L'individu est conscient que le
salaire de base qui lui est versé correspond aux exigences de son emploi
et est équitable par rapport aux autres salariés de
l'organisation. Dans un pareil contexte, sa motivation au travail est
déclenchée comme le démontre la théorie de la
justice et de l'équité d'ADAMS. Il est important que les
responsables de la CNSS perçoivent la nécessité de
procéder à une telle démarche, pour optimiser l'impact de
l'allocation de ressources que constitue la rémunération pour la
performance de l'organisation. Mais, le salaire de base, s'il permet de faire
régner l'équité, source de la motivation, ne peut
atteindre ses effets en présence d'une rémunération
variable incohérente.
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