L'émergence d ela notion de sécurité humaine dans la protection internationale des droits de l'homme( Télécharger le fichier original )par Sabine Nicole Jiekak Mougoué Université Catholique D'afrique Centrale, Yaoundé, Cameroun - Master en droits de l'homme et action humanitaire 2005 |
IntroductionLa scène internationale est de plus en plus caractérisée par les échanges individuels et de moins en moins par les relations interétatiques. La lutte idéologique imposée par la guerre froide ainsi que la menace de l'emploi de l'arme nucléaire a laissé la place à des préoccupations plus élémentaires, mais non moins importantes. Les incertitudes liées aux maladies, à la faim, au chômage, à la criminalité, les conflagrations sociales, la répression politique, les catastrophes naturelles et le terrorisme font plus partie du quotidien des individus que les questions relatives aux armements. Ces dernières n'en sont toutefois pas exclues car, les conflits ethnico-religieux prolifèrent. La communauté internationale ne semble pas récuser la prolifération des armes en tant que tel. Mais elle recherche plus de mesures capables d'aider les pays pauvres à se développer tout en maintenant la croissance des pays riches. Or, tandis que les menaces énoncées par le PNUD1(*) semblent être maîtrisables dans ces pays riches, elles s'accroissent de jour en jour dans les pays pauvres, aidées en cela par l'instabilité politique qui y règne. La notion de sécurité humaine apparaît dès lors sur la scène internationale comme une préoccupation majeure à laquelle il faut répondre. Cette notion semble être un concept nouveau, qui émerge à peine et qui ne se retrouve pas encore réellement dans les instruments internationaux. Mis à part le PNUD2(*) et le Canada3(*) qui se prononcent comme étant les pionniers, le concept fait progressivement son entrée aussi bien sur la scène des relations internationales que dans le domaine des droits de l'homme. En effet, l'évolution des relations internationales, marquée par la mondialisation et la prolifération des échanges entre les peuples, a poussé la communauté internationale à jeter un regard nouveau sur les menaces qui pèsent sur les individus. La fin de la guerre froide a marqué une nette évolution dans le climat politique international et a permis d'attirer l'attention sur divers problèmes qui mettent en danger le genre humain, problèmes qui étaient asphyxiés sous les conflits armés. Un constat a été fait, ces conflits engendrent d'énormes coûts, aussi bien matériels qu'humains, dont les conséquences peuvent se prolonger à long terme. En outre, les facteurs comme la pollution, la déforestation, la pauvreté, la prolifération des endémies et des pandémies telles que le VIH/SIDA engendrent des conséquences semblables et même pires que celles d'une guerre. Ces fléaux dépassent les frontières étatiques et ont une incidence transnationale dont la portée n'est pas encore clairement définie : d'où la nécessité de redéfinir les objectifs de l'ONU à savoir la paix et la sécurité. La sécurité ne se définit plus seulement par opposition aux situations de conflits armés, mais par la recherche d'un certain bien être des individus à travers ce qu'ils ont de fondamental et de commun, leur dignité. En ceci, elle rejoint l'un des objectifs poursuivis par la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme du 10 décembre 1948 qui dispose dans son préambule que : « la reconnaissance de la dignité inhérente à tous les membres de la famille humaine et de leurs droits égaux et inaliénables constitue le fondement de la liberté, de la justice et de la paix dans le monde ». Devant l'émergence de cette notion dans le domaine de la protection des droits de l'homme, il se pose de prime abord la question de savoir quels sont les rapports entre la sécurité humaine et les droits de l'homme. Beaucoup de débats sont nés depuis l'émergence de cette notion. Ses précurseurs insistent sur la nécessité de faire une précision : sécurité humaine et droits de l'homme ne signifient pas la même chose ; il ne s'agit pas de concepts qui se recoupent, mais d'idées différentes aux visées distinctes4(*). En outre, les droits de l'homme et la sécurité humaine peuvent être complémentaires, les premiers énoncent les droits auxquels peuvent prétendre tous les individus, la seconde repère les droits qui sont en péril dans une situation particulière5(*). Mais avant de pousser plus loin une quelconque analyse, il convient d'apporter quelques précisions terminologiques. * 1 Rapport du PNUD de 1994 sur le Développement humain, Paris, Economica, * 2 Ibid. * 3 Le Canada a fait de la sécurité humaine son champ de bataille et veut obtenir sur le plan international un certain leadership comme le fait remarquer Béatrice PASCUAL, Charles Philippe DAVID et HEINBECKER dans leurs différents articles sur la sécurité humaine en général et l'exemple du Canada. De ce fait, il a inséré la sécurité humaine comme un des objectifs principaux de sa politique publique. * 4 Kevin BOYLE et Sigmund SIMONSEN, « La sécurité humaine, les droits de l'homme et le désarmement », Les droits de l'homme, la sécurité humaine et le désarmement, Forum du Désarmement n°3, UNIDIR, 2004, p.7 * 5 Ibid |
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