La propriété littéraire et artistique : Commentaire de la loi libanaise du 3 avril 1999par Imane El Sokhn Université Saint-Joseph / Faculté de Droit - DEA de droit privé et droit des affaires 2005 |
Sous Section 1 : L'objet de la protectionNous étudierons dans un premier temps l'objet de la protection tel que défini par le code français et la loi libanaise (A) puis nous nous demanderons si cet objet est identique malgré la différence terminologique, et ce, en en analysant les critères (B). A- La définition 1. Vu l'influence qu'a le droit français sur le droit libanais en général mais aussi et surtout dans le cas particulier des propriétés littéraires et artistiques il est utile de comparer les articles du code français et de la loi libanaise. A première vue ces deux droits se ressemblent fortement. En effet, l'article 2 de la loi libanaise et l'article L112-1 du code de propriété intellectuelle (CPI) français semblent définir les oeuvres protégées ou l'objet de la protection par la délimitation de leur domaine d'application, un domaine à vrai dire assez large car ne tient pas compte de l'affectation de l'oeuvre ( but d'utilité fonctionnelle ou simplement esthétique preuve en est les logiciels sont protégés) ni de son mérite, ni de son importance ( le juge n'a pas à porter de jugement de valeur) ni de son mode et sa forme d'expression (le droit libanais énumère ici limitativement et maladroitement les formes que peuvent revêtir les oeuvres protégées ; entre autres sont cités les logiciels et programmes d'ordinateur dans l' article 2 de la loi libanaise. Ceux-ci sont soumis au droit commun des propriétés littéraires et artistiques ). Le domaine d'application semble donc bien étendu. L'oeuvre, elle même, n'est pas définie dans l'article premier de la loi de 1999, un article qui pourtant comprend plus de ..... définitions et dont l'objet même est de définir les notions fondamentales de la loi ! Mais le droit français n'emploie pas ce terme ( oeuvre) à lui seul, a préféré l'expression « oeuvre de l'esprit » ; le droit libanais a choisi celle de « création intellectuelle » ou du moins c'est ainsi qu'on a traduit ÇäÊÇÌ ÇáÚÞá ÇáÈÔÑí 5(*) Ces deux expressions sont à définir La doctrine5(*) en France semble avoir posé comme équation « création intellectuelle + création de forme = oeuvre de l'esprit ». Cela signifierait-il que le droit libanais, qui n'a utilisé que le terme « création intellectuelle » pour designer l'objet de la protection, n'exige pas la création de forme ? Encore faut-il définir la création de forme. B- Les critères de l'oeuvre protégéeL'oeuvre protégée doit être une création de forme (1) originale (2).
1) L'existence d'une création de forme Définissons tour à tour la forme (a) puis la création (b) a. La forme
2. La première chambre civile de la Cour de Cassation française, dans son arrêt du 17 octobre 2000 définit la création de forme comme étant « la réalisation de la conception de l'auteur ». Les idées étant de libre parcours et ne pouvant être appropriées, leur matérialisation effective est une condition à leur protection. Aujourd'hui, vu le poids financier de la recherche et du développement, la question prête à controverses. Nous nous sommes posés précédemment la question de savoir si, au Liban, la création de forme est exigée malgré l'emploi restrictif du terme « création intellectuelle ». En réalité la matérialisation soit la réalisation effective des idées est exigée par l'al 5 de l'article 4 de la loi du 3 avril 1999.
b. La création 3. Il ne suffit pas d'avoir une idée et de la matérialiser, encore faut-il que cette idée résulte de l'activité de l'auteur. La mise en lumière de choses pré-existantes (l'archéologie, le folklore..) n'est pas une création que ce soit au Liban ou en France. Notons ici que le folklore est cité expressément par la loi libanaise dans son article 4 comme étant non protégé. La création est bien une exigence au Liban, l'emploi du terme « ibtikar »ÈÊßÇÑ le prouve ( article 5). La création et la forme sont exigées ; la création de forme est une condition ;donc l'oeuvre de l'esprit et la création intellectuelle ont la même signification. Il faut alors critiquer la traduction faite par le bureau international de l'OMPI de ÇäÊÇÌ ÇáÚÞá ÇáÈÔÑí : La « production intellectuelle » ou tout simplement « oeuvre de l'esprit » seraient des termes plus appropriés. Le professeur Ibrahim Najjar a, proposé l'expression « création de l'intellect et du cerveau humain »6(*) 2) L'originalité de la création 4. Ni le législateur français ni le législateur libanais n `ont posé, de façon expresse, l'originalité comme condition de protection de l'oeuvre. Seul l'article L 112-4 du droit français l'a, en réalité, évoqué et ce, uniquement pour les titres. Le silence est quant à lui complet en droit libanais mais il n'est pas de doute que l `originalité est une condition implicite dans les deux systèmes juridiques français et libanais. D'ailleurs le terme « création intellectuelle » employé à l'article 2 de la loi libanaise supposerait d'après certains annotateurs une certaine originalité7(*). Nous remarquons, dans tous les cas, que la jurisprudence des deux pays a pallié la lacune de la loi8(*). L'originalité exigée est perçue différemment selon les pays. Le droit français a une vision très classique et traditionnelle: est originale l'oeuvre qui comprend l'empreinte personnelle de l'auteur. Les pays du copyright ont une vision plus objective : est originale l `oeuvre qui n'est pas copiée. Cette conception objective prend des proportions de plus en plus importantes aujourd'hui avec l'avènement des nouvelles technologies. Le droit français lui-même tendrait à «dé-personnaliser » l `originalité de l'oeuvre ( Arrêt Pachot, Cour de Cessation, ass. Plén. 7 mars 19869(*)) Mais cet arrêt est resté isolé ; la conception personnaliste est toujours, de vigueur en France. Le droit libanais , dit-on, s'inspire à la fois du système français et de celui du copyright1(*)0 ; cette loi est un laboratoire, un exemple formidable pour étudier la coexistence entre le droit d'auteur continental et le copyright, issu des pays de tradition de common law. Cette double influence aurait du inciter le législateur libanais à plus de clarté , il y a ici un manque de sécurité juridique -Quel est le degré d'originalité exigé ? « l'originalité n'est pas le fait d'être sans origine, mais de fonder en quelque sorte sa propre origine » ( Michel Schneider ) L'originalité ne se pèse pas, il suffit qu'elle existe, (Le juge n'a pas, rappelons-le, à porter de jugement de valeur.)La loi libanaise protége les traductions et oeuvres dérivées. Elles sont considérées comme originales. Elles ne le sont, en réalité que « relativement», apportant le « petit plus » qui fera de l'oeuvre une création nouvelle. (Le principe de traduction doit cependant être autorisé par l'auteur du texte principal ) .La condition d'originalité est la même pour les logiciels qui n'ont pas de régime de protection spécifique. La loi de 1999 a sûrement le mérite de moderniser les droits d' auteur mais l' on peut émettre certaines critiques quand a l' emploi du terme « créations intellectuelles » et l' absence textuelle d' un concept clair d' originalité (dans le domaine de l' objet de la protection). Nous allons traiter dans notre partie suivante des titulaires de la protection. Sous Section 2 : Les titulaires de la protection La loi libanaise a opté pour le principe de la protection du créateur de l'oeuvre (A) mais a prévu des situations dans lesquelles le titulaire du droit de protection serait une personne autre que le créateur (B) A-le principe 5. L'article 5 de la loi du 3 avril 1999 dispose: « la personne qui a créé une oeuvre littéraire ou artistique jouit, du seul fait de la création de l'oeuvre du droit absolu de propriété sur l'oeuvre et de la protection de ses droits sans aucune formalité ». Il résulte de cet article que le titulaire du droit de la protection c'est le créateur de l'oeuvre. Les tribunaux libanais subordonnent cette protection a la condition d'originalité en ce sens que l'oeuvre doit être le fruit d'un effort personnel de création, porte l'emprise personnelle de l'auteur. L'auteur est en principe et sauf preuve contraire, la personne dont le nom est indique sur l'oeuvre de la manière habituelle, aucune formalité supplémentaire n'est exigée. Cette règle est prévue a l'article 11 de la loi, l'article prévoit donc une présomption de propriété en faveur de l'auteur dont le nom est inscrit sur l'oeuvre, cette présomption étant simple elle admet la preuve contraire. Qu'en est -il des oeuvres anonymes ou pseudonymes, en principe la qualité d'auteur appartient a la personne physique ou morale qui les a publiées sauf si la véritable identité de l'auteur est révélée, il lui reviendra pleinement de jouir de ses droits. (Article 10) L'identification de l'auteur n'est pas toujours chose facile parfois des situations complexes s'avèrent plus délicates. B- Application a des situations complexes La détermination du créateur de l'oeuvre est plus difficile dans deux hypothèses la première étant celle du salarié (1) et la seconde celle des oeuvres de collaborations ou de coopération (2) 1- L'oeuvre créée par un salarié 6. S'agissant des oeuvres créées par un salarie en vertu d'un contrat de travail et dans le cadre de l'exercice de ses fonctions, l'employeur, personne physique ou morale est considéré titulaire des droits d'auteur prévu par l'article 15 a moins d'une convention écrite contraire. Cette règle constitue donc une véritable exception au principe de la protection du créateur de l'oeuvre. Cet article 8 laisse donc la possibilité au salarié créateur de l'oeuvre de conclure une convention avec l'employeur en vertu de laquelle il garde la propriété de l'oeuvre et donc la protection de son droit. Le législateur libanais a donc adopté le principe de la dévolution automatique à l'employeur des oeuvres créées par les salaries et ceci contrairement au droit français qui considère que l'existence ou la conclusion d'un contrat de louage d'ouvrage ou de service par l'auteur d'une oeuvre de l'esprit n'emporte aucune dérogation a la jouissance du droit reconnu. Cette règle posée par le législateur libanais nous semble injuste parce que c'est le salarie qui a pris l'initiative et c'est lui qui a mis du temps pour la réalise sans aucun mérite de la part de l'employeur et pourtant c'est ce dernier qui bénéficie de la protection. 2- L'oeuvre de coopération 7. Le législateur a défini cette oeuvre dans la première partie de la loi consacrée aux définitions : « il s'agit d'une oeuvre à la création de laquelle ont concouru plus d'une personne, à condition qu'elle ne soit pas une oeuvre collective » La loi libanaise distingue entre deux hypothèses pour déterminer les titulaires du droit de protection : - Les oeuvres dans lesquelles les contributions de chacun des différents participants se fond dans l'ensemble sans qu'il ne soit possible d'attribuer a chacun sa part dans la création de l'oeuvre, dans ce cas tous les coauteurs sont considérés comme créateurs a égalité. - Les oeuvres où il est possible d'identifier l'apport de chacun ou sa contribution, dans ce cas, chacun des coauteurs sera considéré comme créateur indépendant de la partie de l'oeuvre a laquelle il a contribué. Dans la première hypothèse les coauteurs détiennent en commun les droits de sur l'oeuvre, alors que dans la seconde hypothèse chacun est considéré comme l'auteur unique de sa contribution (article 6) L'article 6 ajoute qu'aucun des coauteurs d'une oeuvre de collaboration ou de coopération ne peut exercer ses droits d'auteur sans le consentement des autres, ceci sauf convention écrite contraire. C - L'exception : L'oeuvre collective 8. L'oeuvre collective a été définie dans le chapitre introductif comme étant « une oeuvre à laquelle a participé plus d'une personne physique sur l'initiative et sous la coordination de la personne physique ou morale qui a pris la charge de la publier en son nom propre » Donc le titulaire du droit d'auteur c'est la personne physique ou morale qui a pris l'initiative de la créer et qui a dirigé sa réalisation et non pas toutes les personnes qui ont participé à cette création. Section 2 : Les effets de la protection La protection étant accordée par la loi à son titulaire reste à voir quels sont ses effets. La loi accorde au titulaire de la protection des droits (sous section 1) et lui permet de les exploiter (sous section 2). Cependant toute atteinte à ces droits protégés par la loi est soumise à de graves sanctions (sous section 3). Sous Section 1 : Les droites accordés aux auteurs Les droits accordés à l'auteur de l'oeuvre
littéraire ou artistique sont patrimoniaux ou moraux. Paragraphe 1 : Le droit moral
L'article 21 determine les droits moraux attribués
à l'auteur et notamment le droit de divulguer l'oeuvre et de
décider de son mode de divulgation, de revendiquer la paternité
de l'oeuvre et d'exiger que son nom soit sur tous les exemplaires chaque fois
que l'oeuvre est utilisée en public, d'utiliser un pseudonyme ou de
rester anonyme, de s'opposer a toute diffamation, mutilation, altération
ou modification de l'oeuvre qui porte atteinte à son honneur ou à
sa reputation ou à sa renommée ou sa situation artistique
littéraire ou scientifique et de résilier des contrats de cession
de ses droits patrimoniaux même après leur publication si cette
résiliation est necessaire aux fins de la protection de sa
personnalité et de sa réputation ou à la suite d'un
changement de ses opinions ou des circonstances à condition d'indemniser
les tiers du préjudice resultant de cette résiliation.
2- le droit à la paternité 15. L'article 21 de la loi n 75 du 3 avril 1999 édictait que : « L'auteur jouit du droit moral et notamment du droit: - de revendiquer la paternité de l'oeuvre et d'exiger que son nom soit mentionné sur tous les exemplaires de l'oeuvre chaque fois que l'oeuvre est utilisée en public ; - d'utiliser un pseudonyme ou de rester anonyme... » En revanche, l'article L.121-1 du C.P.I. français dispose que « l'auteur jouit du droit au respect de son nom, de sa qualité... » ; il s'agit en fait du droit à la paternité de l'oeuvre, à ce que l'oeuvre soit publiée sous le nom de l'auteur . En l'occurrence, le droit au nom et à la paternité est le droit pour l'auteur de faire reconnaître l'oeuvre comme étant de lui et par conséquent d'exiger que la mention de son nom figure sur l'oeuvre ou soit automatiquement associée à celle-ci. Il faut ainsi noter, que la mention du nom de l'auteur sur l'oeuvre est très important, même primordial parce qu'il permet de constituer ce lien moral entre l'auteur et le public. Le droit au nom et à la paternité existe toujours même si l'oeuvre ne jouit pas de la protection donnée à l'auteur pour l'inexistence de la condition de nouveauté. En effet, l'inexistence du nom de l'auteur sur ses oeuvres peut causer des dégâts soumis à une réparation de dommages. De surcroît, le droit de l'auteur à la paternité de son oeuvre se distingue par un caractère intellectuel et moral et se diffère des droits patrimoniaux. Mais qu'en est-il de la nature du droit à la paternité ? Quelles sont ces caractéristiques ? En outre, quel est l'étendue du droit à la paternité ? Le droit au respect du nom est-il un droit ou au contraire une obligation ? Tout en répondant à cette série de questions nous allons aborder en premier lieu la nature de droit à la paternité (I) afin de pouvoir cerner en un deuxième lieu l'étendue de ce droit (II). I- La nature du droit à la paternité 16. Le droit à la paternité de l'auteur est lié à la personnalité de l'auteur, il est considéré comme un droit de la personnalité. Toutefois, le droit à la paternité comme tout moral se distingue par les caractéristiques suivantes : 1- Le droit à la paternité est un droit perpétuel : autrement dit, il n'est pas limité par le temps mais il demeure même après l'extinction du droit patrimonial. Le droit moral pourra être exercé, aussi longtemps que l'oeuvre survit dans la mémoire des hommes. 2- Le droit à la paternité est inchangeable (incessible) : l'article 22 a édicté que le droit moral est indisponible, c'est-à-dire qu'il ne faut pas le céder à une autre personne. 3- Le droit à la paternité est insaisissable. 4- Le droit à la paternité est imprescriptible : L'auteur peut exiger de mentionner son nom sur son oeuvre et sur les nouvelles copies même après des années de la date de constitution de l'oeuvre, et malgré toute cession de l'auteur de son droit à la paternité, qu'elle soit contractuelle ou tacite. 5- Le droit à la paternité est un droit discrétionnaire : il est entendu mettre en relief le caractère discrétionnaire de l'auteur, il est ainsi seul qualifié pour décider si et selon quelles modalités son oeuvre est soumise à la curiosité du public et aux flèches de la critique. Signalons aussi, qu'il y a une influence du droit au nom sur les droits patrimoniaux. L'article 52 a édicté « que la protection des droits patrimoniaux sur une oeuvre anonyme ou pseudonyme publiée dure 50 ans à compter de la fin de l'année de la première publication légale de l'oeuvre ». Par conséquent, en attribuant mensongèrement la paternité d'une oeuvre, on cause un préjudice moral à l'auteur véritable, car « si le nom de l'auteur est divulgué avant l'expiration de la période de 50 ans susmentionnée, les dispositions de l'article 49 de la présente loi s'appliquent » et d'après l'article 49, « la protection des droits patrimoniaux dure toute la vie de l'auteur et 50 ans à compter de la fin de l'année du décès de l'auteur ». Autrement dit, en prenant la décision de divulgation, l'auteur introduit son oeuvre dans la sphère des valeurs économiques. En droit français, lorsque le pseudonyme ou l'anonymat est conservé, l'article L.123-3 C.P.I. prévoit un mode de calcul spécial des droits patrimoniaux, qui est d'ailleurs commun aux oeuvres collectives, la durée des droits exclusifs est de cinquante années à compter du début de janvier de l'année civile suivant celle de la publication, elle est de soixante-dix ans pour les compositions musicales. En fin de compte, la nature du droit à la paternité renforce sa cohérence, mais qu'en est-il de l'étendue de ce droit ? II- L'étendue du droit à la paternité 17. L'article 21 de la loi du 3 avril 1999 et l'article L.121 C.P.I. français précisent le droit au respect du nom. Cependant, il s'agit d'un droit, il ne s'agit en aucun cas d'une obligation, l'auteur pouvant, s'il le préfère, choisir l'anonymat ou un pseudonyme. Nous allons étudier d'abord l'indication du nom de l'auteur qui est un droit (A), pour aborder par la suite l'indication du nom de l'auteur qui n'est pas une obligation (B). A- L'indication du nom de l'auteur est un droit 18. Le droit pour l'auteur de proclamer sa paternité à l'oeuvre se relie à la création intellectuelle dont l'honneur doit rejaillir sur le créateur ; il faut pour cela que le public puisse connaître l'esprit en lequel l'oeuvre a germé. Ce droit se subdivise d'ailleurs en droit au nom et droit à la qualité. Quant au droit au nom, l'éditeur, par exemple, devra indiquer le nom et aussi le prénom de l'auteur, si celui-ci le désire, non seulement sur les ouvrages édités, mais encore sur les documents publicitaires. Le nom ne saurait être remplacé par une allusion. Quant au droit à la qualité, c'est le complément du précédent, puisque l'auteur peut exiger que figurent sur les éditions de ses ouvrages ses titres, grades et distinctions, l'éditeur pouvant d'ailleurs se borner aux mentions principales si l'énumération était trop volumineuse, et la jurisprudence a pu proclamer que si seule la réputation de l'auteur et non sa qualité se trouvait atteinte l'article L.121-1 n'a pas pour but de défendre cette renommée de l'artiste. Il faut mettre à part le cas où le nom de l'auteur est utilisé pour désigner l'oeuvre d'autrui ; il y a alors usurpation de nom et le droit moral dans ce cas ne peut pas être invoqué pour sanctionner de tels agissements, car le droit moral protège seulement l'auteur à travers ses oeuvres or ce n'est pas le cas lorsqu'il y a usurpation. Quant aux conventions par lesquelles un auteur renoncerait à se prévaloir de son nom et de sa qualité au bénéfice d'un tiers, leur illicéité est flagrante, car elles heurtent le principe de l'inaliénabilité du droit moral. En effet, l'auteur doit conserver le droit de révéler à tout moment sa paternité d'une oeuvre : les conventions abdicatives du droit au nom seraient donc dénuées de toute portée, pouvant voir leur effet annulé par la volonté unilatérale de l'auteur.
En droit libanais, l'article 21 alinéa 3 prévoit: - « Le droit d'utiliser un pseudonyme ou de rester anonyme ». On constate alors que l'auteur jouit certainement du droit de respecter son nom et sa qualité. En réalité, ceci semble normal car ce droit d'auteur se fonde à la base sur le droit moral, qui à son tour s'attache à la personnalité de l'homme, en effet, ce dernier a le choix entre : 1- La révélation de son nom qui sera l'objet de la protection. 2- L'utilisation d'un pseudonyme. 3- Ou bien rester anonyme. Comme en droit français, le droit libanais prévoit que l'indication du nom de l'auteur est un droit et non une obligation, c'est le droit de la révélation du nom. L'auteur a le droit de faire apparaître son nom au public, en échange, le public doit respecter le nom de l'auteur et sa qualité. L'adoption de ce principe est ancienne, il revient à l'article 145 du décret n° 2835 du 17 janvier 1924. Reste à mentionner, le respect du nom de l'oeuvre : il faut faire apparaître ce nom sur une copie libérée au public dans un lieu déterminé, en plus il ne faut pas mettre aucun signal à la place de ce nom. La désignation du nom et de la qualité de l'auteur a pour importance d'informer le public des fondements psychologiques qui ont poussé à l'invention de l'oeuvre, cela donne un pouvoir et une valeur distinguée à l'oeuvre. Toutefois, si l'indication du nom de l'auteur est un droit, elle n'est pas une obligation. Nous expliquerons comment se concrétise ceci. B- L'indication du nom de l'auteur n'est pas une obligation
19. L'auteur peut préférer laisser son oeuvre dans l'anonymat (b) ou la publier sous un pseudonyme (a) ; ce choix n'implique pas qu'il renonce à ses droits d'auteur sous leur double forme, droit moral et droit pécuniaire, mais il sera représenté dans l'exercice de ses droits. L'article L.113-6 C.P.I. édicte que « les auteurs des oeuvres pseudonymes ou anonymes jouissent sur celles-ci des droits reconnus par l'article 1er ; ils sont représentés dans l'exercice de ses droits par l'éditeur ou le publicateur originaire tant qu'ils n'auront pas fait connaître leur identité civile et justifié leur qualité », d'où la possibilité pour l'auteur de renoncer à l'anonymat ou au pseudonyme (c). Nous voyons que le représentant pourra donc être un éditeur mais aussi un publicateur. a- L'utilisation d'un pseudonyme 20. Le pseudonyme adopté par l'auteur et qui ne laisse aucun doute sur son identité civile, défère à son auteur le droit d'exiger son respect comme s'il était son vrai nom. Pour ce qui se rapporte à ceci, le législateur français a envisagé un cas très particulier, celui où le pseudonyme serait à tel point transparent que le public ne saurait se méprendre et reconnaîtrait nécessairement l'auteur. D'après l'article L.113-6 C.P.I., les dispositions des alinéas 2 et 3 ne peuvent pas être appliqués ; c'est le retour au droit commun qui s'imposera comme si l'auteur avait publié l'oeuvre sous son identité. Les dispositions spéciales ne seront pas maintenues si « le pseudonyme adopté par l'auteur ne laisse aucun doute sur son identité civile ». En effet, l'article 52 de la loi libanaise du 3 avril 1999 a précisé que « si le pseudonyme utilisé ne laisse aucun doute sur l'identité de l'auteur ou si le nom de l'auteur, est divulgué avant la période de 50 ans susmentionnée, les dispositions de l'article 49 de la présente loi s'appliquent ». Il faut alors que le pseudonyme identifie ou révèle clairement l'auteur afin de produire des effets équivalents à ceux du nom propre. b- L'anonymat de l'auteur. 21. Il se peut que l'auteur ne revendique à mentionner son nom, et qu'il ne signe pas son oeuvre littéraire ou artistique, il publie alors son oeuvre dans l'anonymat. Dans ce même domaine, l'article 10 de la loi de 1999 a prévu qu'« est réputé auteur d'une oeuvre anonyme ou d'une oeuvre pseudonyme la personne physique ou morale qui a publié l'oeuvre. Lorsque l'auteur révèle son identité, il peut faire valoir ses droits ». Cet article avère que l'auteur qui demeure anonyme, garde toujours ses droits entiers sur son oeuvre, même s'il apparaît après la publication il peut toujours exercer ces droits à l'égard des tiers. Or, avant la publication, la loi considère que l'auteur est celui qui a publié l'oeuvre, pour but de faciliter la communication avec les tiers. Après avoir examiné les effets de la publication anonyme, il est utile de voir les effets qui s'attachent à la levée de l'anonymat. c- Levée de l'anonymat ou retrait du pseudonyme. 22. La décision de l'auteur n'est pas nécessairement définitive et il faut concevoir le cas où son refus de se démasquer serait temporaire. La représentation n'est prévue que tant que l'auteur n'aura pas fait connaître son identité civile, il le fera, dans l'hypothèse la plus fréquente, par une déclaration de son vivant. Mais il a été permis que la déclaration puisse n'être relevée que post mortem. Le projet de la propriété intellectuelle français (juill.1947) prévoyait une procédure aux termes de laquelle la déclaration d'identité devait être faite au siège des organismes professionnels d'auteurs et éditeurs intéressés. Malencontreusement, cette disposition utile a été supprimée sans que soient expliquées les raisons de sa disparition. En cas de litige, les juges devront donc rechercher si le cessionnaire était ou non de bonne foi, ignorant ou connaissant la décision de l'auteur de révéler sa paternité sur l'oeuvre. La levée de l'anonymat ou du pseudonyme aura une incidence sur la durée des droits patrimoniaux. Aux termes de l'article L.123-3, « en ce qui concerne les oeuvres anonymes ou pseudonymes, si les auteurs se font connaître, la durée du droit de l'exploitation est celle afférente à la catégorie de l'oeuvre considérée et la période de la protection légale commence à courir dans les conditions prévues à l'article L.123-1 ». La protection légale a déjà commencé à courir, cette phrase signifie que l'on revient au délai du droit commun, soit une protection pendant la vie de l'auteur et cinquante ans après sa mort au bénéfice de ses ayants droits, tout en rappelant qu'elle est de soixante-dix ans pour les compositions musicales. En fin de compte, le nom est une propriété qui peut faire l'objet d'exploitations diverses, notamment en tant que raison sociale ou marque, il peut être cédé à des tiers à titre onéreux ou gratuit. Nul ne peut, de ce fait, utiliser le nom d'un tiers à des fins commerciales, et l'utilisation par un auteur du nom d'une personne existante, ou ayant existé, pour nommer un de ses personnages peut être répréhensible, dès lors qu'elle est de nature à nuire à la personne considérée. 3- Le droit au respect de l'intégrité de l'oeuvre 23. Le droit au respect de l'intégrité de l'oeuvre, étant un des droits moraux, a été consacré à l'article 21 de cette loi. En effet, selon cet article, l'auteur jouit du droit « de s'opposer à toute déformation, mutilation, altération ou modification de l'oeuvre qui porte atteinte à son honneur ou à sa réputation, ou à sa renommée ou à sa situation artistique, littéraire ou scientifique... » Ce droit est reconnu aussi aux artistes-interprètes (article 44 de la loi de 1999). « L'artiste interprète ou exécutant jouit, sa vie durant,...du droit de s'opposer à toute déformation ou modification de sa prestation... » La question d'atteinte à l'intégrité de l'oeuvre est une question de fait appréciée par les juges du fond, d'une manière absolue. La jurisprudence considère qu'il y a atteinte à l'intégrité de l'oeuvre dans les cas suivants : - Lorsqu'il y a une atteinte objective à l'intégrité de l'oeuvre c'est-à-dire une déformation ou une modification matérielle de l'oeuvre sans l'autorisation de l'auteur. - Lorsqu'il y a atteinte subjective c'est-à-dire toute adaptation qui ne prend pas en considération l'idée principale sur laquelle repose l'oeuvre5(*). Selon M. Edouard Eid6(*), les deux conceptions, objective et subjective, se confondent. La modification matérielle qui ne porte pas atteinte à l'idée principale sur laquelle repose l'oeuvre ne peut être suffisante pour y voir une atteinte à l'intégrité de l'oeuvre. La modification en tant que telle ne constitue pas de plein droit une atteinte au droit moral. En ce qui concerne le logo, par exemple, il est impossible qu'il y ait une atteinte matérielle à l'intégrité de l'oeuvre puisque, par nature, il est anonyme et sa modification ne peut en aucun cas porter atteinte à l'honneur, à la réputation ou à la renommée de l'auteur. Le droit moral ne peut aussi constituer un obstacle à l'utilisation du droit d'adaptation qui est un droit patrimonial. Cependant les tribunaux considèrent que toute modification se résume en une atteinte au droit moral de l'auteur. Ainsi, le droit au respect de l'intégrité de l'oeuvre s'oppose à toute altération ou modification de celle-ci, quelqu'en soit l'importance mais cela sous réserve des limites que peut apporter au droit moral de l'auteur, la nature des conventions conclues par lui au sujet de ses oeuvre (Cass fr, 1ère 17/12/1991, Bull.N.360). Dans ce sens, toute clause du contrat d'édition par laquelle l'auteur laisserait par avance à l'éditeur toute liberté pour modifier son manuscrit est nulle, car c'est exclusivement à l'auteur que revient le droit d'y apporter, s'il estime utile, toute adjonction ou modification. Ce droit donne à l'auteur la faculté de veiller, après la divulgation de son oeuvre au public, à ce que son oeuvre ne soit pas dénaturée ou mutilée. En cas de violation du droit moral de l'auteur au respect de l'intégrité de son oeuvre, il pourra saisir le tribunal qui sanctionnera l'atteinte. Ainsi a été considérée comme atteinte au droit moral de l'auteur la mise à jour d'un ouvrage sans l'autorisation de l'auteur, de même la publication d'un ouvrage dont l'éditeur a supprimé des passages7(*). A noter que selon l'article 15 de la loi de 1999 le titulaire du droit d'auteur jouit du droit exclusif d'autoriser ou d'interdire la traduction dans une langue étrangère, l'adaptation, la modification, la transformation, la réduction ou le remaniement de l'oeuvre, ainsi que tout arrangement de l'oeuvre musicale. Dans certains cas le titulaire n'est pas nécessairement l'auteur (articles 7 et 8 de la loi de 1999). Selon l'article 7 est réputée titulaire du droit d'auteur sur une oeuvre collective la personne physique ou morale qui a pris l'initiative de la création de l'oeuvre et qui en a supervisé la réalisation. Et selon l'article 8 l'employeur est réputé titulaire du droit d'auteur sur les oeuvres créées par des personnes physiques dans l'exercice de leurs fonctions et de leur profession dans le cadre d'un contrat de travail conclu avec une personne physique ou morale. C'est l'employeur qui est habilité à exercer les droits visés à l'article 15. Dans ce cas on se demande comment le titulaire du droit va exercer son droit alors que l'atteinte est faite à l'honneur ou la réputation ou la renommée ou la situation artistique, littéraire ou scientifique de l'auteur de l'oeuvre.
Dans certains cas la jurisprudence française accepte qu'il soit porté atteinte à ce droit. C'est le cas où il s'agit d'une oeuvre collective, alors celui qui est responsable de l'édition de l'oeuvre peut faire certaines modifications et cela dans l'unique but de l'amélioration de l'oeuvre. Mais nous pouvons dire qu'il s'agit de rares exceptions et qu'au cas où l'éditeur veut faire certaines modifications, il doit prendre préalablement l'accord de l'auteur de l'oeuvre. On considère que cette solution est transposable en droit libanais. 4- Le droit de repentir ou de retrait 24. Ce droit est un droit moral qui revient à l'auteur et qui ne peut être invoqué qu'en cas de cession des droits patrimoniaux à un tiers. En effet, l'article 21 de la loi sur la propriété littéraire et artistique, à l'instar, du droit français permet à l'auteur «de résilier les contrats de cession des droits patrimoniaux même après leur publication, si cette résiliation est nécessaire aux fins de la protection de sa personnalité et de sa réputation ou à la suite d'un changement de ses opinions ou des circonstances, à condition d'indemniser les tiers du préjudice résultant de cette résiliation ». Ainsi, si on interprète littéralement l'article 21 on pourrait considérer que l'auteur ne pourra retirer son oeuvre qu'à la condition que sa publication porte atteinte à son honneur. Mais le législateur en reconnaissant à l'auteur le droit de repentir n'a pas voulu l'encadrer dans cette condition ; et cette interprétation n'est pas vraie. En effet, l'auteur peut retirer son oeuvre sans que cette condition ne soit nécessairement remplie. Ce droit de repentir ou de retrait se résume en le droit qui appartient à l'auteur, quand son oeuvre est publiée, de revenir sur sa décision, donc de stopper sa diffusion. L'arrêt de la diffusion se fait ici par la résiliation du contrat de cession des droits patrimoniaux. L'auteur ne peut retirer les copies entre les mains de celui qui les possède d'une manière légale. Ce droit est imprescriptible et ne dépend que de l'inspiration de l'auteur lui-même, sans nécessiter une autre condition. Il est par essence attaché à sa personne. Il disparaît avec lui et ne peut être exercé par les héritiers que si ces derniers agissent en vertu de la volonté explicitement manifestée par l'auteur, avant sa mort, qu'une partie de son oeuvre soit détruite ou ne soit pas publiée, et cela en raison du caractère personnel de son droit. Ce droit ne peut pas être invoqué pour des raisons exclusivement pécuniaires, sinon on serait en présence d'un abus de droit, car comme tout droit, le droit de repentir est encadré dans les limites de la bonne foi et du respect de la force obligatoire des contrats qui existent entre lui et les tiers, et même en revenant aux dispositions de l'article 21, nous remarquons que la raison «pécuniaire » ne figure pas parmi les raisons pour lesquelles l'auteur peut retirer son oeuvre. En tout état de cause, l'auteur doit indemniser la personne à qui il a cédé son oeuvre des pertes réellement subies par elle (tels que les livres édités non vendus) et des chances de gain manqué. Ce droit peut être utilisé aussi au cas où l'oeuvre est collective, mais il doit réparer dans ce cas le préjudice subi aussi par les autres auteurs de l'oeuvre. Ce droit ne peut être utilisé en ce qui concerne les interviews audiovisuels, et cela en raison de la stipulation expresse le concernant figurant dans la loi de 1999. La jurisprudence considère que l'auteur dont l'oeuvre a été insérée dans une autre, composite, n'a pas besoin d'utiliser ce droit. Lorsque l'auteur n'est pas le titulaire des droits d'auteur (article 7 et 8) on se demande si on ne peut pas concevoir une mise en oeuvre plus facile de ce droit. C) Sort du droit moral après la mort de l'auteur 25. L'art 53 de la loi de 1999 de la propriété littéraire et artistique dispose : « La protection du droit moral de l'auteur ou de l'artiste interprète ou exécutant n'est pas limitée dans le temps et se transmet par voie de succession testamentaire ou légale. » A la mort de l'auteur, ses héritiers se trouvent investi d'un droit moral. Le droit moral ayant pour mission de protéger la personnalité de l'auteur, il sera une fonction que ces derniers devront exercer dans le respect des volontés exprimées par l'auteur de son vivant. Ainsi, les héritiers ne se présentent plus comme les continuateurs de la personne du défunt, mais bien comme les gardiens naturels de sa mémoire. L'exercice de ce droit moral doit être dicté par le souci de respecter la volonté de l'auteur avant de servir leurs intérêts propres. Le titulaire du droit d'auteur jouit non seulement d'un droit moral sur son oeuvre mais aussi de droits patrimoniaux. Ces 2 éléments du droit d'auteur coexistent depuis la naissance du droit pécuniaire et pendant toute sa durée. Après quoi le droit moral subsiste seul tant que l'oeuvre existe. Dans son article 21, la loi de 1999 de la propriété littéraire et artistique a définit les divers aspects des droits moraux que le titulaire du droit d'auteur peut avoir sur l'oeuvre. L'auteur peut décider si son oeuvre doit être divulguée et sous quelle forme. Il a le droit d'exiger d'être reconnu comme auteur de l'oeuvre qu'il a créé, et d'exiger aussi le respect de cette oeuvre en s'opposant à toute déformation, multiplication ou autres modifications de celle-ci ainsi qu'à tout acte ou toute atteinte dévalorisant l'oeuvre ou préjudiciable à la réputation de l'auteur. Enfin, il peut retirer son oeuvre du commerce en renonçant aux contrats de cession ou exploitation de ses droits patrimoniaux même après publication. L'article 22 de la même loi vient préciser qu'on ne peut disposer de ces droits moraux (visés à l'article précédent), qu'ils sont insaisissables, et qu'ils sont uniquement transmissibles par voie testamentaire ou par voie de succession. La mort de l'auteur ne transmet pas intact le droit moral. En effet, le droit de retrait et de repentir est exclu : en effet, on ne saurait accorder, aux héritiers de l'auteur, l'expression d'un remords que ce dernier n'a pas exercé de son vivant. Le droit de repentir, premier élément du droit moral, est imprescriptible et ne dépend que de l'inspiration de l'auteur lui-même. Il est par essence attaché à la personne de l'auteur, disparaît avec lui et ne peut être exercer par les héritiers que si ces derniers agissent en vertu de la volonté explicitement manifestée par l'auteur avant sa mort, qu'une partie de son oeuvre soit détruite ou ne soit pas publiée. 26. En ce qui concerne la durée du droit moral, l'art 53 de la même loi parle d'un droit non limité, alors que l'art L. 121-1 du code de la propriété intellectuelle dit que c'est un droit perpétuel. Malgré la différence des termes utilisés, l'objet du législateur libanais allait aussi dans le sens d'un droit perpétuel qui dure toujours, indéfiniment. Ce qui n'est pas limité dans le temps, mène à une éternité et donc à une perpétuité. Nous avons vu que le droit de retrait et de repentir disparaissait avec l'auteur, sauf instructions précises du défunt, alors que le droit de divulgation, s'il est certainement transmissible aux héritiers et légataires universels, n'a pas été défini comme perpétuel par la loi. L'art 53 de la loi de 1999 ne donne aucune précision sur quel droit porte la protection illimitée dans le temps, mais ajoute qu'elle se transmet par voie de succession testamentaire ou légale. On peut donc conclure à contrario que les droits qui se transmettent par voie de succession ont un caractère perpétuel. La nature et les caractères du droit moral changent après la mort de l'auteur. Il y a un changement de finalité, car les intérêts en jeu ne sont plus les mêmes. Ce phénomène est logique, dès lors que la personne à laquelle ce droit est attaché disparaît. La fiction juridique de la continuation de la personne du de cujus par ses successeurs ne suffit pas à combattre la réalité de la mort. C'est ici que l'on s'aperçoit à quel point l'oeuvre est le reflet de la personnalité de l'auteur, que ce bien est éminemment personnel à son créateur. D'après la théorie des droits de la personnalité, celle-ci permet déjà d'assurer la protection de la mémoire du défunt. Elle est fondée sur le fait que l'oeuvre survit elle-même à son auteur, tout en restant marquée de l'empreinte de sa personnalité. Ainsi de simple droit de la personnalité, il devient devoir d'assurer la mémoire et le respect de l'oeuvre du défunt. Les successeurs ne doivent pas utiliser le droit moral à leur profit, mais doivent se mettre au service de l'oeuvre du défunt. Par la même occasion, ils rendront service à la société en perpétuant une image de l'oeuvre fidèle à son auteur. La loi libanaise de 1999 sur la propriété littéraire et artistique n'a pas traité la dévolution successorale du droit moral alors qu'en droit français celle-ci a été abordée par le Code de la propriété intellectuel qui a organisé un ordre de dévolution sensiblement différent de celui instauré par le Code civil. En l'absence de texte spécial, le droit commun libanais est applicable. Etant un droit extrapatrimonial, le droit moral n'est soumis à aucune réserve en cas de testament. L'autonomie de la volonté de l'auteur défunt est totale, il a le libre choix de la personne qui est la plus capable d'assurer le respect de son oeuvre. Et si le défunt n'a pas rédigé de testament, et n'a pas pris aucune précision concernant son droit moral, il se transmet ab intestat à tous ses héritiers. Après la mort du dernier successeur, que devient-il du droit moral ? En vertu du principe que tout droit est susceptible d'abus, qui a la qualité d'intervenir à la protection du droit moral ? Etant un devoir, le droit moral de l'auteur mérite une protection beaucoup plus accentuée après sa mort que celle réservée par la loi de 1999 surtout que la dévolution successorale se fait en référence à la communauté. Paragraphe 2 : Les droits patrimoniaux Ces droits patrimoniaux sont reconnus dans un chapitre V de la loi. Nous allons tout d'abord, procéder à une analyse des textes de la loi (I), nous signalerons ensuite les atteintes en droit libanais à ces droits dûment protégés (II). I- Analyse de la loi Nous allons voir successivement quels sont les caractères de ces droits (A), leur contenu (B) pour ensuite se pencher sur leur sort après la mort de leur auteur (C). A- Les caractères 28. Le titulaire du droit d'auteur jouit d'un droit absolu de propriété. C'est ce que déclare clairement l'article 5 de la loi. Ce caractère absolu vise à permettre au titulaire du droit de se prévaloir de sa pleine propriété et ceci à tout moment sans nécessité d'accomplissement d'une quelconque formalité. 29. Ensuite l'auteur jouit d'un droit exclusif en vertu de l'article 15 . Il est le seul à pouvoir exploiter son oeuvre, en tirer profit. Ce droit exclusif confère à son titulaire le droit d'interdire ou de permettre la reproduction, l'impression, l'enregistrement ou la fixation de l'oeuvre sur un support matériel. Il peut aussi interdire ou permettre toute représentation ou exécution publique de l'oeuvre, toute traduction de l'oeuvre, toute distribution, y compris la vente ou la location, l'importation d'exemplaire de l'oeuvre fabriquée à l'étranger, et la communication publique de l'oeuvre par n'importe quel procédé. 30. Les droits patrimoniaux sont cessibles, cela decoule de l'article 16 qui considère les droits patrimoniaux comme des biens meubles, transmissibles entièrement ou partiellement. 31. Comme tout droit patrimonial, le droit d'auteur est un droit saisissable, il peut faire l'objet d'une saisie de la part des créanciers de l'auteur revendiquant leur droit de créance. 32. Ce droit est aussi un droit temporaire c'est-à-dire il dure toute la vie de l'auteur plus 50 ans après son décès. Cette idée a sa justification dans la particularité de ces droits et ceci pour donner le temps aux auteurs d'être plus connus et pour qu'on puisse valoriser leur oeuvre. 33. Comme tout droit patrimonial, ce droit est susceptible d'abus dans son exercice qui peut mettre l'accent sur la mauvaise foi de l'auteur. Nous allons dans nos développements mettre l'accent sur le contenu de ces droits. B- le contenu Trois prérogatives sont conférées à l'auteur par les droits patrimoniaux : le droit de reproduction (1), le droit de representation (2) et le droit de suite (3). 1) le droit de reproduction Le principe étant que l'auteur jouit d'un droit exclusif à la reproduction de son oeuvre (a), cependant ce principe souffre de quelque exceptions (b). a- le principe 34. L'article 15 donne au titulaire du droit d'auteur un droit exclusif d'autoriser ou d'interdire la reproduction de l'oeuvre par quelque procédé que ce soit. L'article premier de la loi définit la reproduction comme étant la réalisation d'une ou plusieurs copies ou exemplaires d'une oeuvre, de quelque manière et sous quelle forme que ce soit. L'auteur peut confier à un tiers le droit de reproduire son oeuvre par des procédés photographiques, cinématographiques, ou par cassettes vidéo. En principe tout individu n'est pas autorisé à reproduire l'oeuvre par quelque procédé que ce soit, et ceci sans l'autorisation expresse de l'auteur de l'oeuvre. Cette interdiction relève du fait que l'oeuvre artistique est une oeuvre d'esprit et elle est inhérente à la personne de son auteur; toute atteinte à ce droit absolu devra être sanctionnée. S'y ajoute également que les droits patrimoniaux conférés à l'auteur en vertu de cette loi, visent à permettre à l'auteur d'une oeuvre de tirer tous les bénéfices pécuniaires de son oeuvres pour pouvoir encourager les artistes, peintres et écrivains à reproduire le plus souvent des oeuvres artistiques qui pourront non seulement être appréciées dans leur valeur morale mais aussi et surtout de constituer une ressource pécuniaire pour l'auteur. Nous pouvons observer la précision que prend le législateur dans la formulation de ce droit et dans sa protection. Effectivement le législateur fournit une énumération detaillée des divers procédés par lesquels le droit exclusif de l'auteur peut être entravé, nous constatons par exemple qu'il énumère de façon exhaustive la reproduction de l'oeuvre sur un support matériel, « par n'importe quel moyen » que ce soit par procédé photographique ou cinématographique ou même sur des supports phonographiques ou par cassettes vidéo ou Cd-rom, et le texte ajoute « ou par tout autre procédé équivalent ou semblable ». D'où la possibilité pour le juge en examinant l'action en contrefaçon intentée par le titulaire du droit d'auteur, de procéder à un examen lui permettant de qualifier tout procédé comme portant atteinte à ce droit exclusif, donc une marge de liberté est laissée au juge qui dispose ainsi d'un pouvoir souverain d'appréciation. Cependant certaines restrictions ou exceptions sont permises par la loi et ceci sous le chapitre VI intitulé « Exceptions ». Etudions respectivement ces diverses exceptions : b- exceptions Selon Micheline Ferran8(*), il existe en droit libanais des exceptions générales (1) figurant egalement en droit français, et des exceptions specifiques, originales (2). 1- Exceptions générales 35. L'article 23 permet à toute personne physique de copier, d'enregistrer ou de reproduire un exemplaire d'une oeuvre protégée et ceci pour un usage personnel et privé sans le consentement ou l'autorisation du titulaire du droit d'auteur et sans lui verser de remunération. L'usage privé n'est pas celui qui est utilisé au sein d'une entreprise ou tout autre lieu de travail. Cependant cette exception ne joue pas lorsqu'elle porte atteinte aux droits et intérêts de l'auteur et ceci dans les cas suivants :
L'article 27 réserve une place à part pour les bibliothèques publiques à but non lucratif qui sont autorisées de reproduire ou copier un exemplaire supplémentaire de l'oeuvre à condition qu'ils aient conservé l'original, et ceci dans un but de conservation dudit exemplaire en cas de détérioration de l'exemplaire original. 2- Exceptions originales Mme Ferran classe ces exceptions specifiques dans trois contextes differents. a- Une exception particulière touchant les logiciels pour les besoins de l'enseignement 36. Les établissements d'enseignement, ainsi que les universités et les bibliothèques publiques à but non lucratif sont autorisés à reproduire toute copie d'un nombre limité de logiciel, à condition que ces établissements soient en possession d'au moins une copie originale. (article 25 alinea 1) Cette dérogation qui, on le rappelle ne nécessite dans notre cas aucune autorisation préalable du titulaire de la protection, et qui ne justifie d'aucune rémunération, ne peut cependant se réaliser que dans un but exclusif celui de mettre ces copies à la disposition gratuite des étudiants et universitaires. Une condition est aussi requise pour la mise en oeuvre de telles copies, que soient fixes par décret émanant des ministère de l'éducation nationale et de l'enseignement superieur, le procédé de reproduction, les catégories de programmes pouvant être reproduits et le nombre de copies autorisées. L'etudiant peut realiser une copie unique pour son usage privé. Derogeant ainsi au droit commun, une telle exception permet aux etudiants et aux etablissments d'enseignement de pouvoir disposer librement des logiciels, pour que les dispositions de la nouvelle loi n'entravent pas l'accés au savoir et à l'information. M.Caron9(*) reprend la formulation de Mme Ferran en souligant que la loi comprenne « en filigrane une ébauche du droit du public à l'information », et que « ce sujet, plus que sensible en France, semble parfaitement adnis au Liban ». Cette exception a été introduite selon Mme Ferran « en vue de permettre aux établissements d'enseignement et à leurs étudiants d'utiliser plus ou moins librement les logiciels, le législateur ayant voulu éviter que les dispositions de la nouvelle loi n'entravent pas l'accès au savoir et à l'information ». Cela equivaut en fait à l'instauration d'une part, d'un droit de reproduction « d'office » aux établissements et universités et, d'autre part, d'un « visa » accordé aux étudiants de faire une copie privée. Selon M. Kamal Berti10(*), une telle exception constitue une entrave importante au droit absolu de propriété que la loi confère à l'auteur du logiciel. b- Des exceptions ayant des objectifs didactiques et d'information : 37. Une courte citation d'une oeuvre déjà publiée ne requiert aucune autorisation préalable, si la citation a été faite pour des fins d'analyse critique, d'illustration, d'explication d'une opinion ou de recherches scientifiques. Deux conditions étant requises pour mettre en oeuvre cette exception, la première est que la citation empruntée n'excède pas les limites du but poursuivi, et la deuxième est que le nom de l'auteur et la source soient mentionnés. (article 25, alinea 2) L'article 26 fait échapper aussi à l'autorisation préalable de l'auteur toute reproduction d'article de journaux ou d'extrait courts à condition que ces actes s'inscrivent dans un but strictement pédagogique et dans les limites de ce but, l'autre condition étant aussi requise, celle relative à l'indication des noms de l'auteur et de l'éditeur. L'article 30 prévoit l'utilisation, par les organes d'information et aux fins du compte rendu d'un événement d'actualité, de citations d'une oeuvre vue en cours de cet événement, à condition certainement que soit mentionné l'auteur de l'oeuvre. Est egalement autorisée l'exposition d'une oeuvre artistique dans un musée, à condition que ce musée soit propriétaire du support matériel de l'oeuvre et que ne soit pas atteints les intérêts légitimes de l'auteur. (article 33) Enfin est autorisée, par l'article 34, la reproduction d'une oeuvre d'art qui soit destinée à être publiée dans un catalogue pour faciliter la vente de l'oeuvre sans prejudice aux intérêts de l'auteur. Nous constatons que le législateur libanais, soucieux de protéger le droit de l'auteur de l'oeuvre, garde cependant une place à la circulation libre et efficace des informations que l'on retrouve spécialement dans les médias et dans l'enseignement. Bien que nous critiquons le classement de cette exception dans le cadre des exceptions originales, Mme Ferran semble avoir classer ces exceptions « qui vont au-delà de l'exception de courte citation », dans un cadre spécifique qui déroge, selon elle, à l'exception générale celle de la courte citation. c- Des exceptions dans un but général 38. Afin d'être utilisé dans la procédure judiciare et administrative, sont autorisés toute reproduction et enregistrement de l'oeuvre dans les limites necessaires à cette utilisation. En vertu d'un arrêté du ministre de la culture et de l'enseignement supérieur, est licite toute reproduction, enregistrement ou copie d'une oeuvre audiovisuelle qui a une valeur artistique particulière et ceci pour qu'elle soit conservée aux archives du ministère. 2) Droit de représentation 39. L'article 15 confère au titulaire du droit d'auteur un droit exclusif d'interdire ou de permettre la communication de l'oeuvre au public, par fil ou sans fil, par voie hertzienne ou assimilée, par satellite artificiel codé ou non codé, y compris la retransmission au public, par tout moyen permettant de transmettre le son et l'image d'émission télévisés ou radiodiffusés ordinaires ou émis à partir de satellites artificiels. Cependant ce droit exclusif est attenué, et le législateur par l'article 32 a consacré un droit à la representation et à l'exposition de l'oeuvre au public, sans l'autorisation de l'auteur et sans aucune remuneration, et ceci lorsque ces actes sont réalisés dans des cérémonies officielles, dans le cadre de manifestations publiques et dans le cadre des activités des établissements d'enseignement à l'usage des étudiants et enseignants mais à condition que le public soit restreint. Nous devons noter que s'agissant d'une exception, elle doit être interprétée restrictivement, donc on ne peut ajouter des cadres non prévus par la loi, ces actes devant être exclusivement réalises dans les cadres précités. Notons enfin que le législateur libanais n'a pas prévu une exception pour les représentations familiales, l'absence d'une telle exception senble être etrange dans un pays où la famille garde une place primordiale dans la société. 3) L'absenced'un droit de suite 40. Contrairement au droit français qui prevoit qu'en cas de certaines reventes du support materiel de certaines oeuvres, le titulaire du droit d'auteur pourra toucher une perception de 3% du prix de vente à chaque cession ; le droit libanais ne prevoit aucune disposition conferant au titulaire un droit de suite. C- Le sort des droits patrimoniaux après la mort de l'auteur 41. Comme on l'a signalé plus haut, ces droits patrimoniaux durent toute la vie de l'auteur plus 50 ans à compter dès la fin de l'année du décès de l'auteur. Nous constatons que ces droits sont très protégés par le législateur qui a encore une fois essayé de procurer à l'auteur de l'oeuvre le plus de garanties. Un autre intérêt est poursuivi également par le législateur celui, de la procuration du temps necessaire pour que les auteurs soient connus et que leurs oeuvres soient plus valorisées. Bien que la loi libanaise prevoit la protection du droit de l'auteur, on s'apperçoit cependant des atteintes flagrantes à ces droits. II- Les atteintes aux droits d'auteurs au Liban Nous allons étudier tout d'abord, les atteintes aux droits patrimoniaux dans leur contexte économique pour envisager ensuite, les premières sanctions juridiques pratiquées par l'Etat libanais.
42. Le piratage et la contrefaçon des outils et des supports de diffusion des oeuvres ont augmenté considérablement en droit libanais. Ainsi et par une simple promenade en voiture sur les autoroutes libanaises, nous pouvons retrouver des marchands de cassettes, disques, vidéo, programmes et logiciels à des prix dérisoires. Dans un article, dans l'Orient le Jour du 8 avril 2005, M. Jean-Jack Cegarra relève que, selon l'International Intellectual Property Alliance, l'industrie de la contrefaçon engendrait un manque à gagner de 31 millions de dollars pour les fabricants au Liban, cette situation atteint particulierement les fabricants de logiciels et les producteurs de films même les producteurs de disques et de livres. En octobre 2004 les Etats-Unis menacent le Liban de le retirer de la liste des pays bénéficiaires du système généralisé de préférence (GPS), c'est un programme conçu comme une aide pour les pays en voie de développement, et qui autorise l'importation sans droit de douane de quelque 4800 produits, ce benefice pour le Liban augmente chaque année, explique l'ambassadeur américain Jeffery Feltman. Cependant le Liban est dans le top 15 des pays ou ces droits sont violés, bien qu'un progrès ait été fait, en ce qui concerne le piratage des logiciels informatiques et CD, et qui a permis de réduire le taux de piratage de 94% a 74%. Un délai de 6 mois est accordé au Liban et ceci au regard du progrès effectué, ce dossier fut examiné pour la première fois par les autorités commerciales américaines. Des mesures urgentes devraient être prises par les autorités libanaises.
43. Dans une première décision de son genre depuis la promulgation de le loi sur le protection littéraire et artistique, le ministère public procède à l'arrestation d'un ingénieur en informatique qui avait reproduit et installé des logiciels sur ordinateurs et ce, sans autorisation du titulaire de droit. L'ingénieur fut surpris en flagrant délit par la police centrale, dans le lieu de son travail avec une quantité de logiciel non licencié, reproduites de façon illicite. Un autre pas fut franchi par les autorités libanaises en décembre 2004, la police judiciaire a declaré avoir saisi, à Beyrouth, des milliers de DVD et disques compacts piratés d'une valeur de plus de 2 millions de dollars, quatre personnes ont été arrêtées et doivent comparaître devant la justice pour ce piratage jugé comme délit. Des perquisitions dans des depôts et des magasins de Beyrouth où se trouvaient des films, DVD et disques compacts de musique, ont permis la saisie d'un chargement de deux camions. Sous Section 2:L'exploitation des droits 44. Les droits d'auteurs étant l'ensemble des avantages moraux et financier permettant au créateur de profiter de son oeuvre, de la protéger et de contrôler les exploitations qui en sont faites. Ces deux éléments du droit d'auteur coexistent depuis la création de l'oeuvre et pendant toute sa durée. Cependant seuls les droits patrimoniaux concernent le droit exclusif d'exploitation de l'oeuvre. Dans cette approche de la question il faut évoquer la structure quelle que peut étrange choisie par le législateur libanais. Les règles relatives aux contrats d'exploitation figurent dans un chapitre intitulé « droits du titulaire de droit d'auteur », le législateur libanais dans ce chapitre semble confondre délibérément les droits moraux et les droits patrimoniaux. En effet puisqu'il ne les distinguent pas explicitement, cela nous fait croire qu'il à l'intention de les soumettre à un même régime juridique et nous pouvons dire de prime à bord qu'à l'instar des droits patrimoniaux les droits moraux peuvent faire l'objet d'exploitation. Cependant cette affirmation doit être directement démentie et ceci car elle vient à l'encontre de la nature même des droits moraux et de l'esprit de la loi. Donc cet intitulé et cette confusion ne devraient s'analyser que comme une maladresse inopportune qui n'à aucune incidence ou signification. Enfin notons que selon l'article 16, les droits patrimoniaux attachés à l'oeuvre sont soumis au principe de cessibilité, ces droits sont cessibles et temporaires étant donnés qu'ils sont liés à l'idée de propriété, c'est à dire l'auteur tout en respectant le régime de protection établit par la loi libanaise de 1999 peut en céder la propriété à une personne physique ou morale peut importe que la cession soit à titre gratuit ou à titre onéreux. L'article 17 ajoute que la cession doit être faite par écrit, et l'article énumère les mentions que doit contenir l'acte, tels les droits qui font l'objet du contrat, le lieu et la date de la signature du contrat, avec les pourcentages aux recettes découlant de l'exploitation ou de cession des droits, que doit obtenir l'auteur. Il est à noter que cette forme écrite est exigée à peine de nullité, donc nous pouvons en conclure que la forme est exigée ici ad validitatem donc nécessaire pour la validité de l'acte et non ad probationem exigée pour la simple preuve. Ce qui conforte encore plus notre idée est le fait, fort connu, que la forme exigée pour la validité est exigée surtout pour protéger la partie au contrat, dans notre cas le titulaire de la protection est l'auteur de l'acte puisque comme son nom l'indique cette loi concerne la « protection des propriétés littéraires et artistiques ». Donc la loi vise essentiellement la protection de l'auteur, la forme exigée étant requise pour assurer cette protection. L'article 18 prohibe la cession anticipée, totale de l'oeuvre future en la considérant comme nulle. La justification de cette disposition réside dans le fait de garantir la liberté de création de l'auteur en empêchant que ce dernier ne soit lié de « manière irrémédiable à un partenaire économique ». Cependant nous nous posons la question de savoir si la loi envisage aussi le cas de cession partielle de l'oeuvre, si oui, pourquoi n'a-t-il pas parlé de cession tout court sans précision ? Le terme « global » prête à équivoque, et à notre avis ce sont les oeuvres futures qui ne peuvent pas faire l'objet d'une cession et non pas le caractère global ou partiel de la cession qui est prohibé. Toute cession, globale ou partielle fut elle, est interdite. Ainsi cette exploitation est soumise à des règles générales (paragraphe 1) et elle connaît des applications particulières (paragraphe 2). * 5 Lucas (A.), « Propriété littéraire et artistique », Dalloz 2e ed.2002, p.10 * 6 Najjar (I), « La réglementation de la propriété littéraire et artistique et de la propriété industrielle » In Chroniques de droit privé libanais 2001, p.293 * 7 Ferran (M.), « La propriété littéraire et artistique : Derniers développements en droit libanais » Publication de la CCI de Paris, ACCOMEX Juillet/Août 2002 p.58 * 8 « la protection des oeuvres de l'esprit bénéficie également aux logiciels pour autant qu'ils revêtent une originalité reflétant l'empreinte de la personnalité de leur auteur » , Cour de Paris, 4eme ch., 4 février 2004. in Annales de la Propriété Industrielle Artistique et Littéraire, 2004, p.117 * 9 Dalloz 1986, p.405, note de B. Edelman * 10 Caron (Ch.), « Le droit d'auteur libanais : entre copyright et conception personnaliste », in Proche Orient- Etudes Juridiques, p.5-6 * 5 TGI Paris, 11/5/1988 CA Paris, 20/2/1990, D.1990, p.72 TGI Paris, 27/11/1985, Gaz Pal., 19862, sommaire 369 * 6 Edouard Eid: droit d'auteur et droit voisin en droit libanais et droit des pays arabes, edition Sader 2001 page 356 et suiv. * 7 TGI Paris, 10/11/1971, D.1972 som.147 CA Paris, 7/6/1982, D.1983 IR 97 * 8 Extrait: Micheline Ferran sur la propriété littéraire et artistique : dernier développements en droit libanais. Accomex Juillet/Aout 2002 No.46, p.9 * 9 Christophe Caron: le droit d'auteur libanais: entre copyright et conception personnaliste. Proche Orient, Etudes juridiques, No.56, p.10 * 10 Kamal Berty: Aperçu de la nouvelle loi sur le droit d'auteur au Liban. Conférence donnée à l'Université de Nantes 1999 |
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