SOMMAIRE
1
LISTE DES ABRéVIATIONS
ET DES SIGLES UTILISES 2
INTRODUCTION
4
PARTIE I : LES DIFFICULTES
D'ADAPTATION DE L'ACTION EN CONTREFAçON
a L'EVOLUTION DES
ŒUVRES D'ART. 12
CHAPITRE
I: DIFFICULTES
D'ADAPTATION DES CONDITIONS PERMETTANT A UNE ŒUVRE D'ART D'ÊTRE
PROTEGEE PAR LA CONTREFAçON.
13
Section I : L'exigence désuète d'une œuvre d'art de forme
originale. 13
Section II : Limites à l'œuvre d'art protégeable.
23
CHAPITRE II : LES PROBLEMES D'APPLICATION
DE L'ACTION EN CONTREFAçON.
30
Section I : Un délit mal adapté à l'évolution
artistique et technologique. 31
Section II : Une répression affaiblie.
42
PARTIE
II: VERS UNE ADAPTATION DE L'ACTION EN CONTREFAçON AUX ŒUVRES D'ART.
49
CHAPITRE
I : VERS UNE ACTION EN CONTREFACON PLUS EFFICACE. 50
Section
I : Adapter l'action en contrefaçon à l'évolution artistique et
technologique. 50
Section
II : L'adaptation au caractère international de la contrefaçon
des œuvres d'art. 58
CHAPITRE 2: VERS UNE MEILLEURE PREVENTION.
65
Section I : La prévention et les professionnels.
65
Section II : La prévention et le public.
69
LEXIQUE
73
BIBLIOGRAPHIE
75
TABLE DES MATIERES
85
LISTE DES ABREVIATIONS ET DES SIGLES UTILISES
A.N
Assemblée Nationale
art.
Article
Bull.
Bulletin d'information de la cour de cassation
Bull. civ.
Bulletin de la cour de cassation, chambre civile
Bull. crim.
Bulletin de la cour de cassation, chambre criminelle
CA
Cour d'appel
Cass. civ.
Cour de cassation, chambre civile
Cass. com.
Cour de cassation, chambre commerciale
Cass. crim.
Cour de cassation, chambre criminelle
ch.
Chambre
chr.
Chronique
CPI
Code de la propriété intellectuelle
D. Dalloz
doc. Document
éd.
Edition
Gaz.
Pal. Gazette
du palais
Ibid
Au même endroit
JCP
(G) Semaine
juridique édition générale
JO
Journal officiel
JOCE
Journal officiel des communautés européennes
jur.
Jurisprudence
L.
Loi
n°
Numéro
obs.
Observation
OMPI
Organisation mondiale de la propriété intellectuelle
op. cit.
Dans l'ouvrage précité
ord.
réf. Ordonnance
de référé
p.
Page
RIDA
Revue internationale du droit d'auteur
RTD
com. Revue
trimestrielle de droit commercial
s.
Et suivants
sect.
Section
somm.
Sommaire
t.
Tome
T. com. Tribunal
de commerce
T.
corr. Tribunal
correctionnel
TGI
Tribunal de grande instance
trib.
Tribunal
INTRODUCTION
"C'est
l'ignorance qui fait les résignés. C'est assez dire que l'art
doit faire des révoltés." Pelloutier
Au 21ème siècle de profondes transformations artistiques
risquent de voir le jour en raison entre autres d'évolutions techniques
récentes. Avec l'émergence d'une société de l'information et de
la communication, de nouvelles formes d'art sont appelées à remplacer
les précédentes. Elles accompagnent les avancées qui se font jour
dans les sciences techniques, et informatiques. C'est notamment
le cas de l'art numérique qui selon Jean-Pierre Balpe "joue
avec la vie et la mort de l'art"
et qui selon le même auteur, correspond à "des œuvres dont
la forme et le contenu sont, en partie ou totalement, le produit
d'un processus informatique".
Cet art connaît un développement incontestable, comme peuvent
en témoigner les manifestations internationales telles que Ars
Electronica, tous les ans à Linz (Autriche), ou l'ISEA (International
Symposium of Electronic Arts) qui se tient dans une ville différente
chaque année.
Un vocabulaire particulier auquel on doit se familiariser accompagne
l'art numérique. Ainsi parle-t-on de Cyberespace, de Cyberculture
.
L'art numérique s'étend à toutes les formes d'art, musique incluse.
Les musique électroniques, comme par exemple le rap ou la techno,
permettent des possibilités de mixages et de transformations diverses
qui sont infinies. Chaque musicien devient à la fois producteur
de matière première, transformateur, auteur, interprète et auditeur.
Dans le domaine numérique, l'art devient totalement technique
et symétriquement la technique, par certains aspects de son approche,
s'apparente à la démarche artistique.
D'autre
part, l'Art lui-même conteste la notion d'œuvre d'art. On remarque
que tout ce qu'il y a de plus provoquant dans l'Art contemporain
semble se rallier sous le drapeau du non-art. L'art conceptuel
et l'art minimal produisent des objets qui n'ont rien de surprenant,
hormis le fait qu'ils soient exposés dans des galeries; il faut
alors en apprendre le mode d'emploi d'après les commentaires qu'en
donnent leurs auteurs. Déjà Duchamp avec ses ready-made nous avait
interrogé sur la notion d'œuvre et l'idée que nous nous en faisions.
Les techniques numériques bouleversent la compréhension qu'on se fait de
cette notion puisqu'il est possible de faire intervenir des internautes
dans la création, ou bien même de la générer directement grâce
à un ordinateur (c'est le cas du roman génératif).
Les pages de celui-ci ne sont écrites nulle part avant l'instant
précis de leur matérialisation sur un espace donné. Un roman inachevé
est, par exemple, programmé pour s'autodétruire dès lors qu'il
aura affiché trois cent mille pages. Les lectures de ces pages
sont donc très variées, et différentes d'un lecteur à l'autre
selon le contexte dans lequel il a été mis en contact avec l'œuvre
.
Si la numérisation donne une grande qualité de reproduction, elle n'est
pas neutre pour autant. Une des particularités de cette technologie
réside dans le fait que les œuvres enregistrées en numérique peuvent
être modifiées, subdivisées, remaniées, découpées et combinées.
Cependant le droit au respect de l'intégrité des œuvres permet
au détenteur des droits de s'opposer à toute modification ou dénaturation
de leurs contributions. Or l'auteur en raison de l'ère numérique,
va de plus en plus être amené à créer des œuvres d'art de manière
non autonome. En effet, un auteur moderne se sert de son Paintbox,
assis devant son ordinateur et utilise des banques de données
pour créer son œuvre d'art.
Finalement
la contrefaçon qui permet entre autre de sanctionner toute violation
au droit moral d'un auteur ne risquerait-elle pas de devenir dans
ce contexte numérique une très forte limite à la création ?
Le
droit moral semble également menacé par les risques de conflits
avec le copyright. Or la communauté européenne dans sa dernière
directive du 22 mai 2001 sur l'harmonisation de certains aspects
du droit d'auteur et des droits voisins dans la société de l'information
ne fait pas de référence au droit moral. Dans ce contexte d'harmonisation
européenne la question du droit moral et encore plus de l'application
de la contrefaçon devient préoccupante.
De plus, le droit d'auteur vit de la communication des œuvres
au public. Dès lors, les auteurs sont fondés à se réjouir de l'apparition
d'un nouvel espace d'exploitation pour leurs œuvres d'art. Cependant,
force est de constater que le droit d'auteur n'a pas toujours
été accueilli avec réjouissance sur le net. Nombreux sont les
sites à proposer des reproductions d'œuvres d'art en ligne. Il
se pose alors dans le cadre d'une action en contrefaçon la question
de la responsabilité mais également celle du droit pour l'internaute
à l'accès à l'information. Quant aux droits patrimoniaux, ils
ne semblent pas épargnés par ces évolutions artistiques et technologiques
et on peut s'interroger sur la pertinence des règles relatives
au fonctionnement de ces droits dans un univers artistique de
plus en plus numérique.
Comme nous l'avons signalé, il n'y a atteinte aux droits d'auteur que si
l'œuvre d'art peut, au regard des critères retenus par la loi,
entrer dans le cercle des œuvres protégées. Elle devra de ce fait
revêtir un double caractère : être une création de forme, et être
originale.
Or l'évolution de l'art, tant par ses méthodes de création que par les œuvres
d'art réalisées nous questionne sur la pertinence de ces critères
et nous amène à penser que l'exigence d'une œuvre d'art de forme
originale est désuète (section I).
Section I : L'exigence désuète d'une œuvre d'art de forme originale.
Il est des notions que le législateur a employées dans la loi du 11 mars
1957 sans même en préciser le sens. Evidemment, il est toujours
possible de se référer aux autres textes législatifs pour obtenir
des précisions sur une définition. Or ce n'est pas le cas du terme
"forme" qui à en croire Philippe Gaudrat est "sans
conteste, un concept central de la propriété littéraire et artistique".
Sans s'étendre sur ce paradoxe bien juridique, il nous faut pourtant
souligner à quel point cette notion est problématique lorsqu'on
s'intéresse à l'œuvre d'art. Force est en effet de constater que
certains courants artistiques vont à l'encontre des théories jurisprudentielles
sur la non protection des idées. On citera notamment le cas de
l'art conceptuel dont les tenants reprennent à leur compte l'affirmation
de Sol Lewitt selon laquelle "les idées peuvent être des
œuvres d'art".
Viennent s'ajouter à cela, les questions relatives à la numérisation
des œuvres d'art. On perçoit alors les difficultés d'application
du critère de forme à l'œuvre d'art (I).
Et
puis il y a la nécessité pour l'œuvre d'art d'être originale même
si cette affirmation sonne comme un pléonasme. Pourtant l'œuvre
d'art devra se soumettre à ce contrôle juridique si elle veut
être protégée par le droit d'auteur et donc par le droit pénal.
Or cette notion est également au centre de polémiques doctrinales,
certains auteurs
lui attribuant des tares que notre étude ne peut taire. Ainsi
évoquerons nous l'originalité de l'œuvre d'art comme
un critère en perdition (II).
I
. Les difficultés d'application du critère de forme à l'œuvre
d'art.
Nous constaterons dans un premier temps l'inexistence d'une protection des
idées (A) avant de mettre en évidence les difficultés d'adaptation
de ce principe à l'évolution des œuvres d'art (B).
Selon le Petit Robert, la forme est "une apparence, un aspect
visible, l'ensemble des contours d'un objet, d'un être, résultant
de la structure de ses parties".
On se rapproche alors de la définition juridique de Cornu selon
laquelle "il faut pour que l'œuvre existe, que, sous une
forme ou une autre, la conception s'extériorise, qu'elle prenne
corps hors l'esprit de son auteur, qu'elle existe en dehors de
lui".
En d'autres termes, selon Gautier, " la mise en forme de
l'idée, ce n'est pas l'écriture du roman ou de son plan détaillé,
consigné sur une feuille de papier, c'est le fait de parvenir
à une précision suffisante quant à l'œuvre future dans l'exposé
que l'on peut en faire à autrui, oralement ou de tout autre façon".
La forme serait alors l'expression de la création, et il faudrait
la distinguer du support de celle-ci. On approche subséquemment
des limites de cette théorie car la définition juridique de la
forme s'éloigne très largement de celle du dictionnaire.
Aujourd'hui, la forme numérique, est tellement inaccessible que
l'on pourrait sans difficulté douter qu'elle existe. S'agit-il
même d'une forme?
Si l'on adhère à la vision large de la notion de forme, on peut
en conclure que l'état numérique donne bien naissance à une forme
particulière, technique, occulte. Pour reprendre les propos de
Philippe Gaudrat, "les éléments comme les corps sont bien
des formes dont l'ordre interne caractéristique (ordre atomique
ou moléculaire) ne peut être appréhendé directement par les sens,
mais seulement par les propriétés qu'il confère. Conçu de la sorte,
le concept de forme prend une extension autre et s'applique sans
difficulté à l'état digital".
Cependant si l'on réserve comme dans la définition usuelle le
terme de forme à tout ce qui tombe directement sous le sens de
l'Homme, la question est tranchée: la forme numérique n'en est
pas une. Cette conception réductrice pour certains, remet tout
de même en cause l'application de la notion de forme aux œuvres
d'art numériques et nous questionne sur la pertinence de ce critère
de protection.
2.
Principe.
La Cour de cassation a consacré dans un arrêt célèbre du 29 novembre 1960
la théorie de la matérialisation fondée au siècle dernier qui
consiste à nier que l'idée soit un objet de droit.
Les raisons seraient double: l'idée risque d'être puisée dans
le fond commun, appartenant à tous et elle ne représenterait que
la conception de l'œuvre s'opposant à l'expression de celle-ci
.Or selon Gautier l'art L112-1 CPI qui emploie le terme "expression"
irait dans ce sens. Certains auteurs estiment que par le biais
de la responsabilité civile et de l'agissement parasitaire , le
vol d'idée pourrait être sanctionné.
Cependant, il est aisé de se rendre compte que sans idée , il n'y aurait
pas d'œuvre du tout. La jurisprudence semble d'ailleurs éprouver
des difficultés dans l'application de ce principe comme en témoigne
l'affaire Christo du 13 mars 1986 qui n'a pas hésité à admettre que l'idée "d'habiller"
le Pont-Neuf, à Paris, puisse être protégée en soi, même si elle
a par la suite été matérialisée. Jean Cocteau a également été
reconnu co-auteur d'un ballet, dont il n'avait pourtant fait que
"raconter" l'argument au chorégraphe selon un jugement
du 2 juillet 1958.
Dans l'affaire "Guino", la Cour de Cassation
a reconnu sans autre difficulté à Renoir la qualité de co-auteur
de sculptures réalisées par un jeune élève sur ses directives.
Ces décisions illustrent la difficulté à distinguer forme et idée, en particulier
pour les œuvres d'art contemporaines où la frontière peut être
ténue, voire inexistante. La conséquence est d'importance pour
l'artiste : dans le premier cas, l'œuvre est concrétisée dans
une forme considérée comme originale, et bénéficie donc de la
protection car toute représentation, reproduction ou adaptation
partielle ou totale de l'œuvre effectuées sans le consentement
de l'artiste sont interdites et constituent un acte de contrefaçon.
Dans le second cas, le procédé de réalisation de l'œuvre, bien
que concrétisé dans une œuvre de forme originale, ne bénéficie
pas de la protection, car il relève seulement du style de l'artiste,
de l'idée. N'importe qui peut donc utiliser cette idée pour créer
une autre œuvre.
Bien que cette position du droit appelle l'approbation sous l'angle de l'impératif
de sécurité juridique et de la préservation de la liberté de création,
on peut néanmoins émettre une réserve sur une telle absence de
reconnaissance lorsque c'est le style de l'artiste, précisément,
qui constitue l'œuvre. Car selon H. Braun-Vega, le "style
est inhérent à l'œuvre de l'artiste, c'est par lui qu'on l'identifie".Ce
refus de protection des idées par le droit d'auteur contredit
la réalité artistique contemporaine. Aujourd'hui les idées sont
en effet revendiquées comme œuvres par les artistes.
B.
Difficultés d'adaptation du principe de non protection des idées
à l'évolution des œuvres d'art .
Tout d'abord, on se rattache aux constats précédents pour s'apercevoir
que l'œuvre d'art est dépendante de l'idée et qu'il serait injuste
de priver un artiste qui a des idées de la protection qu'on réserve
aux œuvres matérielles. Certains auteurs tels que Raymond Lindon
se positionnent en faveur d'une protection des idées. Sans nier
le fait qu'il y a un fonds commun où l'on peut considérer que
tombent toutes les idées et dans lequel on peut se servir sans
craindre une contrefaçon, on ne peut nier certaines situations.
C'est par exemple le cas lorsque l'idée artistique est fournie
à un tiers en vue de sa réalisation. Dans cet exemple, le concepteur
peut avoir droit à beaucoup ou à peu et nous nous rallions à la
position de Raymond Lindon selon laquelle il ne devrait jamais
avoir droit à rien.
De plus certains arts reposent principalement sur l'idée, la matérialisation
ayant un rôle moindre. Les concepteurs publicitaires qui font
profession d'avoir des idées ne peuvent avoir recours à la contrefaçon.
Or comme le souligne Rainer Rochlitz,
les différences entre œuvres d'art et publicité sont très atténuées
par le caractère artistique de nombre de publicité (Ben , Toscani
le photographe de Benetton pour ne citer qu'eux).
Dans certains cas, l'idée constitue à elle seule une œuvre: l'art conceptuel.
Selon Sol LeWitt
"les idées peuvent être des œuvres d'art. Elles s'enchaînent
et finissent parfois par se matérialiser mais toutes les idées
n'ont pas besoin d'être matérialisées.". Catherine Millet
explique que "l'art conceptuel dans les années 70 a milité
d'une manière parfois très radicale pour la disparition de l'objet
d'art. Comme son nom l'indique l'art conceptuel entendait remplacer
la circulation des œuvres d'art par une circulation des idées.
Les artistes conceptuels ont donc révélé qu'après tout, l'œuvre
d'art n'avait peut-être pas de valeur en elle-même, contrairement
à ce qu'on avait pensé […].L' œuvre d'art n'était que le résidu
d'un processus très vaste qui en avait permis l'existence. L'objet
d'art n'était que le déchet d'une pensée."
Force est donc de constater que l'exclusion des idées de la protection du
droit d'auteur semble contestable au regard de l'évolution de
la création artistique.
L'art contemporain nous interroge également sur la pertinence de la notion
d'originalité appliquée à l'œuvre d'art.
II.
l' originalité de l'œuvre d'art: un critère en perdition.
Les textes régissant le droit d'auteur n'énoncent pas de critère positif
de protection, mais la doctrine s'accorde pour penser, conformément
à la jurisprudence antérieure, que c'est autour de la notion d'originalité
que doit se faire la distinction entre les œuvres qui sont investies
de droits d'auteur et les autres. Il s'agit d'une condition nécessaire
à l'octroi du droit d'auteur et la Cour de cassation censure,
lorsqu'elle en a l'occasion, les décisions qui auraient appliqué
le régime du droit d'auteur à une œuvre sans se prononcer sur
le caractère original.
La question se pose alors de déterminer d'une part comment concevoir
cette notion et d'autre part si elle est applicable à toutes les
œuvres d'art.
Il apparaît alors qu'il s'agit d'une notion subjective (A). Pour qu'une
œuvre d'art soit reconnue originale, une exigence d'exécution
personnelle doit être constatée. On verra qu'il s'agit en raison
de l'évolution artistique actuelle , d'un critère superflu (B).
A.Une
notion subjective.
Deux constats nous amènent à qualifier l'originalité de notion
subjective: il s'agit d'une notion mal définie (1) qui éprouve
des difficultés d'application lorsqu'elle a trait aux œuvres d'art
(2).
1.
Une notion mal définie.
Selon le vocabulaire Cornu "est original, ce qui est le résultat d'une
création, qui porte la marque de la personnalité de son auteur.".
On perçoit ici les idées doctrinales du 19ème siècle. Cette définition
abstraite doit être cernée, selon Pierre-Yves Gautier, par son
antonyme, la banalité. Il propose de la définir comme "l'apport
artistique propre à l'auteur de la création, qui vient, au minimum,
se superposer à un patrimoine intellectuel préexistant, qu'il
appartienne privativement à un autre auteur ou qu'il soit le lot
commun de tous les créateurs"
Cependant, il n'est pas satisfait de sa définition et estime que
la seule véritable sécurité consisterait à protéger automatiquement
toutes les œuvres, par une sorte de présomption d'originalité
qu'il appartiendrait au défenseur de combattre, ou d'instaurer
un contrôle administratif minimum d'originalité comme pour les
brevets.
On peut donc affirmer que l'originalité ne jouit pas d'une définition légale
ou jurisprudentielle limpide.
Ces difficultés de définition deviennent intrigantes lorsqu'on
s'interroge sur l'évolution de la création artistique. Techniquement,
une œuvre d'art comme un tableau pouvait être considérée comme
un tout. Dorénavant, la numérisation entraîne un questionnement
par rapport à cette unité technique de l'œuvre d'art. Ne serait-il
pas possible de considérer un tableau enregistré en numérique
comme la réunion de millions de points ? En effet dans un tableau
numérisé, la plus petite partie isolable semble être le point.
Cependant, comme le fait remarquer Thomas Dreier
, ce n'est peut-être pas dans la logique de notre système de droit
d'auteur que de considérer un unique petit point comme un objet
protégeable.
Si
l'on ne peut, en raison de l'imprécision des frontières des œuvres
d'art protégées , déterminer ce qu'est le tout, on ne peut donner
de définition correcte d'une partie de ce tout. Comment pourrait-on
alors déterminer l'originalité de l'œuvre d'art, la qualité d'auteur,
l'étendue de la protection et en ce qui nous concerne la contrefaçon
partielle de l'œuvre protégée ?
Il
ne s'agit pas ici de simples hypothèses d'école, ainsi que nous
le montre l'exemple du sampling
de la musique, auquel risque fort de succéder bientôt un sampling
de l'image.
Un des problèmes lié à l'originalité et qui se pose en jurisprudence,
est dû à l' article L.112-1 CPI interdisant au juge de tenir compte
du "mérite ou de la destination" de l'œuvre. Or nous
pouvons, comme le fait une partie de la doctrine,
nous interroger sur l'efficacité de ce critère négatif posé par
le Code, du fait que le juge est, en revanche, fort libre d'utiliser
l'autre critère, positif cette fois, que lui reconnaissent la
doctrine et la jurisprudence: l'originalité. Lorsqu'on étudie
la jurisprudence attentivement, même s'il ne s'agit pas toujours
d'œuvre d'art, on s'aperçoit que les juges, hantés par la crainte
d'être taxés de tenir compte du mérite, se libèrent en revanche
dans l'appréciation de l'originalité, se montrant parfois désespérément
libéraux.
Comme le fait remarquer Pierre-Yves Gautier, "ou
bien la jurisprudence recherche le mérite, sous couvert d'originalité,
ou bien elle ne recherche ni l'un , ni l'autre, se contentant
d'utiliser formellement l'adjectif "original", selon
une clause de style propre à satisfaire la Cour de Cassation".
Faut-il alors arrêter de contrôler cette notion comme un arrêt
le proposait ?
Quant à Claude Colombet
, il estime que la référence à cette notion est obsolète. Il faudrait
selon lui, soit renier ce concept, soit tenir compte du mérite
des auteurs, soit de la nouveauté de leur création.
De plus ce critère mal défini suscite les plus vives difficultés d'application
lorsqu'une œuvre d'art est concernée.
2.
Les difficultés d'application de ce critère aux œuvres d'art.
Lorsque l'on considère l'originalité sous son aspect subjectif, l'œuvre
doit être "le fruit d'une expression consciente, maîtrisée
et dirigée par l'auteur".
Or les artistes, dans leur volonté d'élargir les frontières de
l'art, ont eu recours à des objets manufacturés : un simple objet
utilitaire devenait œuvre d'art. Aujourd'hui les ready-made sont
présentés comme œuvres et reconnus comme telles par les acteurs
du milieu de l'art : institutions, artistes, critiques, galeries,
collectionneurs… La protection du droit d'auteur serait refusée
à ces œuvres parce qu'elles ne résultent pas d'une activité intellectuelle
propre à l'artiste.
La peinture monochrome se caractérise par une surface peinte d'une
seule couleur. Une partie de la doctrine relève la difficulté
à déceler dans les peintures contemporaines l'empreinte personnelle
de l'artiste.
En fait l'œuvre doit être considérée autrement: l'émotion ressentie
par le spectateur dépendra de son regard, de sa sensibilité propre
et de son attitude face à la peinture. L'empreinte de la personnalité
de l'artiste n'a pas pour autant disparu; elle est seulement d'une
perception plus fine et plus tenue.
Ces limites sont de deux ordres: il est tout d'abord impossible
d'intenter une action en contrefaçon lorsque la titularité des
droits fait défaut (I); il existe également dans certains cas
déterminés par le droit d'auteur des limites à la protection de
l'œuvre d'art par la contrefaçon. Or nous constatons un décalage
entre les limites fixées par le droit d'auteur et l'évolution
technique et artistique (II).
I.
Limite due à un défaut de titularité des droits.
Rappelons que le délai de prescription en matière délictuelle
est de trois ans. Celui-ci court à compter de la réalisation de
l'acte illicite et non du jour où il a été découvert. Il peut
donc sembler bref compte tenu du fait que la reproduction ou la
représentation illicite sont généralement considérés comme des
infractions instantanées. En réalité la prescription en matière
de débit et de façon plus générale, de diffusion de la contrefaçon,
court à compter de chaque nouvel acte de mise à disposition du
public et évite ainsi une dispersion en toute impunité des contrefaçons.
Nous nous intéresserons tout d'abord aux auteurs et à leurs ayants
droit (A), pour ensuite voir quelle est la situation des groupements
(B).
A.
Les auteurs et leurs ayants droit.
Nous étudierons d'abord le cas des auteurs(1) avant de traiter
celui des ayants droit (2).
1.
Les auteurs.
"La qualité d'auteur appartient, sauf preuve contraire,
à celui ou à ceux sous le nom de qui l'œuvre est divulguée"
selon l'article L. 113-1 CPI.Un auteur bénéficie sur l'œuvre d'un
droit patrimonial selon l'article L.122-1 CPI, "le droit
d'exploitation appartenant à l'auteur comprend le droit de représentation
et le droit de reproduction" et d'un droit moral selon l'article
L.121-1 CPI, "l'auteur jouit du droit au respect de son nom,
de sa qualité, et de son œuvre, ce droit est attaché à sa personne,
il est perpétuel, inaliénable et imprescriptible. Il est également
transmissible à cause de mort aux héritiers de l'auteur, mais
son exercice peut être confié à un tiers".
La durée des droits patrimoniaux se révèle être une protection
pendant un laps de temps égal à la vie de l'auteur et au-delà
de l'année civile en cours, pendant 70 ans (art L123-1 CPI).
La reconnaissance du statut de l'œuvre par la ou les sociétés
de gestion collective dont l'auteur dépend est indifférente selon
un arrêt de Cour d'appel.
En ce qui concerne les œuvres de collaboration, la jurisprudence
pénale,
estime que "l'article L.113-1CPI duquel résulte que le coauteur
d'une œuvre de collaboration qui prend l'initiative d'agir en
justice pour la défense de ses droits patrimoniaux est tenu, à
peine d'irrecevabilité de sa demande, de mettre en cause les auteurs
de cette œuvre, ne fait pas obstacle à la recevabilité de la constitution
de partie civile en contrefaçon".
2.
Ayants droit.
Le descendant d'un auteur
doit prouver sa qualité d'héritier pour pouvoir disposer de l'action
en contrefaçon. Notons que l' article L. 121-2 al 2 CPI règle
le sort de la divulgation des œuvres posthumes. Pourtant un héritier
légalement investi, ne pourra pas dans tous les cas invoquer le
droit moral pour mener à bien une action en contrefaçon, la Cour
de cassation ayant récemment affirmé que le droit moral "n'est
pas absolu et doit s'exercer au service de l'œuvre, en accord
avec la personnalité et la volonté de l'auteur telle que révélée
et exprimée de son vivant".
Victor Hugo qui avait largement critiqué les droits des héritiers
des auteurs
verraient donc ses volontés respectées.
En ce qui concerne les cocontractants de l'auteur, il faut pouvoir
justifier de cette qualité. Il faut au moins prouver une simple
référence à la cession des droits
.
Pour qu'un ayant droit puisse faire valoir ses droits sur une
œuvre d'art, celle-ci semble devoir être juridiquement correcte.
Ainsi est ce que le caractère pornographique de l'œuvre arguée
de contrefaçon n'exclut pas la validité des droits acquis par
le producteur dès lors que "l'ensemble ne constitue pas un
étalage délibéré de violences et de perversions sexuelles dégradantes
pour la personne humaine, susceptible d'exclure ces films de la
permission légale".
Nous venons de citer deux des principaux acteurs du droit d'auteur,
intéressons-nous donc au troisième: les groupements.
B.
Les groupements.
La situation des sociétés de gestion collective (1) doit être
distinguée de celle d'autres groupements (2) à caractère essentiellement
professionnel.
1.
Sociétés de gestion collective.
En ce qui concerne le cas des sociétés de gestion collective,
l' article L.321-1 al 2 CPI prévoit que " Ces sociétés civiles
régulièrement constituées ont qualité pour ester en justice pour
la défense des droits dont elles ont statutairement la charge".
Signalons que la Cour de cassation a rejeté le pourvoi formé contre
un arrêt admettant "que les auteurs et éditeurs ayant adhéré
à la SACEM, n'en conservaient pas moins l'exercice de leurs droits
sur l'œuvre, dont ils pouvaient demander la protection, notamment
par l'action en contrefaçon".
Pour certains auteurs,
cette décision est sûrement transposable en matière pénale. On
observera cependant qu'elle reste fragile dès lors qu'elle a été
rendue dans une instance à laquelle la SACEM n'était pas partie
et n'a donc pas pu se faire entendre.
Les sociétés de gestion collective ne sont pas les seuls groupements
puisqu'il existe des groupements professionnels.
2.
Groupements professionnels.
L'article
L.331-1 CPI "les organismes de défense professionnelle régulièrement
constitués ont qualité pour ester en justice pour la défense des
intérêts dont ils ont statutairement la charge". Un problème
s'était posé avec le Centre national de la photographie car la
Cour de cassation avait estimé qu' "aucune disposition ne
donnant au Centre national de la cinématographie la faculté d'invoquer
l'existence d'un préjudice indirect, cet établissement ne saurait
se constituer partie civile dans une poursuite du chef de contrefaçon,
ce délit ayant pour objet la protection des droits d'auteur".
Le législateur est alors intervenu pour mettre fin à ces errements
dans l'article L. 331-3 CPI: "Le centre national de la cinématographie
peut exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui
concerne le délit de contrefaçon, au sens de L. 335-3, d'une œuvre
audiovisuelle lorsque l'action publique a été mise en mouvement
par le Ministère public ou la partie lésée".
Enfin
rajoutons que les syndicats professionnels peuvent agir dans le
cadre de L.411-11 CPI.
II.
Décalage entre les limites fixées par le droit d'auteur et l'évolution
technique et artistique.
Dans l'article L.122-5 CPI,
le législateur a posé expressément la liste des exceptions aux
droits d'auteur. On en tire alors le principe de libre reproduction
et libre communication (A). Quoi de plus normal, en effet,
que de faire découvrir aux membres de sa famille une œuvre d'art
qu'on apprécie ou de copier sur cassette un morceau de musique
auquel on est sensible. Pourtant des voix s'élèvent, réclamant
plus de fermeté lorsqu'on aborde le cas de la copie. D'autres
se préoccupent de la fermeté jurisprudentielle en matière de citation,
et réclament plus de liberté. On en vient alors à conclure aux
vues des arguments des uns et des autres à l'inadaptation de
la libre reproduction à l'évolution artistique et technique (B).
A.
Le principe de libre reproduction et libre communication.
Nous étudierons
ici principalement les limites que le Code de la propriété intellectuelle
fixe aux droits de l'auteur. Elles correspondent à des situations
de fait particulières qui échappent à la maîtrise dont le créateur
dispose sur le plan patrimonial et moral.
L'article
L. 122-5 CPI prévoit que "lorsque l'œuvre a été divulguée,
l'auteur ne peut interdire" : "les représentations privées
et gratuites effectuées exclusivement dans un cercle de famille".
L'art peut donc être partagé entre parents sans que la contrefaçon
puisse avoir le moindre impact.
Le droit du public à l'information est également une limite à l'action en
contrefaçon. Cette notion est reconnue par la jurisprudence comme
en témoigne ce jugement du TGI de Paris
"le droit du public à l'information, reconnu par la Convention
européenne des droits de l'homme, doit être compris comme "droit
de savoir" mais aussi "droit de voir", d'où il
résulte que la représentation, de courte durée, de l'œuvre d'un
artiste à l'occasion d'un journal télévisé, tendant à illustrer
le reportage fait, doit être tenu pour licite, dès lors qu'il
s'agit d'informer le public rapidement et "de manière appropriée"
d'un événement culturel".
La liberté de communication est donc préservée par l'article L. 122-5 CPI
au même titre que la liberté de reproduction.
En effet, l' article L.122-5 CPI prévoit le droit pour le bénéficiaire
d'un support dans lequel serait incorporée une œuvre de faire
une copie pour lui-même et par ses propres moyens sous trois réserves
, dont une concerne notamment les œuvres d'art reproduites de
manière intégrales ou partielles dans le catalogue d'une vente
aux enchères publiques effectuée en France.
Il est également possible d'utiliser des courtes citations, traditionnellement
d'œuvres littéraires, sans s'exposer à une action en contrefaçon.
Enfin, signalons que la parodie, le pastiche et la caricature
sont visés par l'article L. 122-5, 4° CPI et de ce fait jouissent
de la même immunité que les copies et autres courtes citations.
Cette mesure, si certains en doutaient, permet entre autres de
ne pas trop limiter le champ de la création en matière humoristique.
Ces exceptions aux droits de l'auteur, qui paraissent à première
vue insipides, se révèlent en réalité explosives, lorsqu'elles
ont trait à la liberté de reproduction.
B.
L'inadaptation de la libre reproduction à l'évolution artistique
et technique.
Les analyses et courtes citations ne peuvent également être interdites
une fois l'œuvre divulguée.
La question est alors de définir une citation. Or ce n'est pas
une mince affaire. Pour Desbois,
la citation ne peut exister que dans l'ordre littéraire. Pour
cet auteur, en matière picturale, la reproduction est soit intégrale
et ne peut être en ce cas une citation, soit partielle et dénature
par là-même l'œuvre, portant atteinte au droit moral de son auteur.
Selon Michel Vivant
"il faut bien reconnaître que des fragments d'une œuvre peuvent
être insérés dans une autre, au demeurant de même genre ou d'un
genre différent, mais en tout cas, en d'autres domaines que littéraire".
Nous ne pouvons que nous rallier à cette position car l'évolution
des techniques dans le domaine artistique permet l'utilisation
de citations musicales, cinématographiques, photographiques et
bien sûr picturales.
La Cour de cassation
continue pourtant à estimer que le texte légal doit être interprété
de manière restrictive, c'est à dire limité aux citations d'ordre
littéraire.
Il serait certainement bienvenu de permettre, dans l'environnement
numérique, un droit de citer des images ou des sons afin de favoriser
la créativité. N'a-t-on pas du reste déjà reconnu, sans même s'en
rendre compte, la légitimité des citations dans le domaine des
œuvres plastiques, en admettant les collages des peintres de l'entre-deux
guerres, amalgamant des morceaux de journaux : certaines des œuvres
de Picasso ou de Braque illustrent ainsi, avant la lettre, le
droit de citation pour les images.
On l'aura compris, les conditions préalables
à la protection de l'œuvre d'art par l'action en contrefaçon nourrissent
en leur sein de véritables inadaptations aux œuvres d'art et à
la technologie. Ce constat, inquiétant, doit-il pour autant être
dressé pour la contrefaçon?
Il
semblerait, hélas, que celle-ci ne soit pas dépourvue d'imperfections
et notamment de problèmes d'application.
CHAPITRE II. LES PROBLEMES D'APPLICATION DE L'ACTION EN CONTREFAçON. |
Nous touchons ici au cœur de notre étude pour quelques raisons
essentielles que nous diagnostiquons comme des problèmes d'application.
Tout d'abord, la contrefaçon en matière artistique cause de nombreux soucis
aux artistes. La création artistique, ces dernières années, s'oriente
vers un recyclage de l'Art: les "nouvelles" musiques
utilisent toutes le sampling, celui-ci existant également dans
le domaine de l'image. La contrefaçon peut alors être utilisée
comme une censure à l'égard de ces nouvelles créations. Or l'œuvre
d'art n'est pas un objet de droit comme les autres. Elle remplit
des fonctions sociales et intellectuelles au sein de notre société
qui permettent à tout un chacun de rêver, de se questionner, d'exprimer
sa sensibilité bref d'accéder au bonheur. Ces valeurs ont trait
à la Démocratie et doivent être préservées. Il est donc impératif
que le Droit se garde d' empiéter sur la liberté de création artistique.
La question est alors de déterminer si la pratique doit influencer
la loi ou si au contraire c'est à la loi de s'adapter à la pratique.
A en croire M. Larroumet "souvent le législateur intervient
pour mettre en accord la règle de droit avec la réalité sociale.
En effet, il y a des comportements qui contredisent ce qu' affirme
la règle de droit rendant celle-ci difficile à faire respecter.
Il convient alors de modifier la règle existante".
Ajouté à ces considérations le fait que dans la pratique, la contrefaçon
est à l'origine de pertes colossales pour l'industrie artistique
française, et l'on comprend aisément que nous sommes en présence
d'un délit mal adapté à l'évolution artistique et technologique
(section 1).
La contrefaçon des œuvres d'art
est loin d'être un monopole français, comme le démontre certains
chiffres.
Or l'efficacité de cette action ne résulte pas seulement de sa
capacité à limiter la contrefaçon sur notre territoire, elle dépend
surtout de sa capacité à faire respecter les droits moraux et
patrimoniaux des artistes. On verra hélas que cette répression
est affaiblie (section 2) par la volatilité des nouvelles
technologies et le peu d'application des peines principales.
Section
I: Un délit mal adapté à l'évolution artistique et technologique.
La contrefaçon est une infraction qui englobe la quasi-totalité
des atteintes aux droits des auteurs et qui en plus jouit d'un
élément moral pré-établi. Les éléments constitutifs de la contrefaçon
(I) sont donc en théorie très efficaces. Pourtant, l'évolution
artistique et technologique affaiblissent largement l'intérêt
de cette infraction (section 2).
I. Les éléments
constitutifs de la contrefaçon.
C'est de manière classique que nous aborderons ces éléments
constitutifs de la contrefaçon, en étudiant l'élément matériel
(A) puis l'élément moral qui est en l'occurrence la présomption
de mauvaise foi (B).
A. L'élément matériel de la contrefaçon.
Nous verrons que le fait matériel de reproduction (1) et la communication
de l'œuvre (2) constituent les éléments matériels de ce délit.
1.
Reproduction.
Selon l'article L.122-3 CPI, "la reproduction consiste dans
la fixation matérielle de l'œuvre par tous procédés qui permettent
de la communiquer au public d'une manière indirecte". Cet
article présente ensuite quelques procédés pouvant être utilisés
pour une reproduction. Citons à titre d'exemple l'imprimerie ou
la photographie.
On dénombre en pratique deux formes de reproduction: la reproduction
à l'identique dite aussi servile, et la reproduction par imitation
qui reproduit les éléments essentiels d'une œuvre protégée tout
en s'en détachant par certains aspects.
Lorsqu' on est en présence d'une duplication pure et simple, la
qualité de cette reproduction importe peu.
On peut se demander s'il existe un seuil d'exemplaires à partir
duquel la reproduction deviendrait fautive. A ce questionnement,
une réponse négative doit être apportée. La doctrine et la jurisprudence
s'accordent en effet sur ce point. "La reproduction en un
seul exemplaire peut donc constituer une contrefaçon ",
comme l'avait fait remarquer en son temps une Cour d'appel à des
prévenus qui tentaient de remettre en cause cette solution. Par
ailleurs, on peut se demander si cette reproduction doit faire
l'objet d'un début de communication au public. Encore une fois
une réponse négative semble devoir être apportée même si une
mince partie de la doctrine partage un avis différent.
Si
en matière artistique "le public se réjouit de voir dupé
le riche amateur, se gausse de la confusion des experts et, secrètement,
sympathise avec l'artiste faussaire dont il admire l'habileté",
n'oublions pas que la contrefaçon d'œuvres d'art "peut atteindre
des sommes considérables. D'après Madame Guillotreau "un
million de faux Dali en tous genres (sanguines, dessins, lithographies,
peintures) seraient en circulation et représenteraient une valeur
d'environ 2,5 milliards d'Euros contre 760 millions d'Euros dans
les années 1980 aux Etats-Unis".Cependant,
les enjeux de la contrefaçon rapportée aux œuvres d'art ne se
jouent pas ici et c'est dans le cas d'une reproduction par imitation
que des problèmes singuliers se posent.
On rappellera préalablement que l'article L.122-4 CPI assimile
à la reproduction servile: "la traduction, l'adaptation ou
la transformation, l'arrangement ou la reproduction pour un art
ou un procédé quelconque". Autant dire qu'il n'est pas nécessaire
que la copie ait été faite à l'identique pour être punissable.
Dans le cas d'une reproduction par imitation, il faut que les
caractéristiques essentielles de l'œuvre originale aient été reproduites.
C'est précisément autour de cette appréciation jurisprudentielle
de la reproduction qu'un débat doctrinal non dénué d'intérêt pratique
est né comme nous le verrons plus loin.
De plus, il est impossible de traiter de la reproduction partielle
en éludant la question du sampling. Certaines formes de musique
(rap, house…) utilisent beaucoup ce procédé, qui permet de façon
générale de reconstituer, à partir d'archives ou de bibliothèques
de sons, le "timbre musical" d'un groupe connu. En dehors
des cas où cette pratique s'accompagne d'une contrefaçon pure
et simple, par exemple de la reprise de passages entiers,
la question essentielle est de savoir si l'échantillonnage en
tant que tel relève du monopole de l'auteur de l'œuvre échantillonnée.
Selon les professeurs Lucas,
il semble que cela ne soit pas le cas. Lorsque l'œuvre dérivée
n'inclut aucune partie reconnaissable, le droit exclusif de l'auteur
n'est pas en cause.
Enfin , il faut se pencher sur l'épineux problème de la numérisation
des œuvres de l'esprit et a fortiori des œuvres d'art.
Il est intéressant de constater que des approches très variées
ont été proposées dans différents pays, la plupart se ralliant
sous le principe de la numérisation-reproduction.
La France, à la vue des premières décisions rendues semble adhérer
à ce principe. C'est ainsi qu'une affaire a permis au TGI de Paris
d'affirmer que "la numérisation d'une œuvre, (…), constitue
une reproduction de l'œuvre qui requiert en tant que telle lorsqu'il
s'agit d'une œuvre originale, l'autorisation préalable de l'auteur
ou de ses ayants droit".
Il est à noter que l'exception de copie privée avait été écartée
par le TGI, estimant que si l'œuvre numérique figurait bien sur
des pages privées, l'accès à ces pages se faisait sans aucune
restriction et dès lors, le défendeur favorisait l'utilisation
collective de l'œuvre qu'il avait reproduite par le biais de la
numérisation.
A côté de la reproduction existe un autre élément matériel de
la contrefaçon: il s'agit de la communication.
2. Communication.
Nous avons à dessein employé ce terme
dans son sens le plus large qui recouvre ici toutes les autres
hypothèses d'atteinte au droit d'auteur, qu'elles soient réalisées
au travers d'une communication directe ou indirecte de l'œuvre.
Visée à l'article
L.122-2 CPI, la représentation correspond à l'hypothèse d'un
prévenu qui s'est procuré une œuvre de l'esprit et la transmet
au public sans qu'il y ait démultiplication de son support.
La communication indirecte vise notamment la diffusion dont
l'autonomie est soulignée par l'art L335-3 CPI. Cette notion recouvre
en réalité la notion "d'édition" dans son sens commun
et s'étend au débit , recel, importation et exportation illicite.
In fine l'article L.122-2 CPI vise précisément les procédés de télécommunication,
dont il est impossible d'exclure internet. Des débats doctrinaux
ont été tenus autour de la notion de public- l'œuvre devant être
communiquée à un public-, qui serait étrangère au système
de communication qui préside au net.
La
notion de public pour l'exploitation en ligne est en effet critiquable:
faute de réunion en un même lieu des personnes destinataires,
il est difficile d'utiliser la notion de public. Mais l'arrêt
Novotel donne
une redéfinition du public: il est la somme des consommateurs
isolés, la réunion se fait par la communication, le public est
dissocié d'un lieu commun.
Intéressons-nous
maintenant à l'élément moral de l'infraction censé renforcer l'efficacité
de cette action.
B.
La présomption de mauvaise foi.
La chambre
criminelle de la Cour de Cassation a établi depuis le 19ème
siècle,
une présomption de mauvaise foi du prévenu contrefacteur et l'entrée
en vigueur du Nouveau Code pénal n'y a rien changé. Or notre Droit
présume la bonne foi et assure, encore plus avec la loi du 15
juin 2000, la présomption d'innocence. Ce qui fit dire à
Nicolas Ros de Lochounoff que "l'idée d'une présomption
de culpabilité du présumé contrefacteur semble admise, ce qui
est troublant en démocratie".
Pourtant la jurisprudence, pour faciliter la tâche à l'accusation,
a établi des présomptions ne reposant sur aucun texte, mais sur
le lien étroit qui semble unir l'élément moral et l'élément matériel
dans l'infraction de contrefaçon. Intéressons-nous donc à son
principe (1) avant d'examiner son difficile renversement (2).
1.
Principe.
Nous allons
d'abord étudier les sources (a)de cette présomption avant de constater
que la sévérité de la jurisprudence à l'égard des contrefacteurs
se manifeste par l'étendue de son domaine (2).
a.
Les sources de la présomption de mauvaise foi.
La présomption
de mauvaise foi repose sur une double idée : d'une part les contrefacteurs
mènent par ailleurs des activités tout à fait licites de sorte
qu'ils ont les compétences nécessaires pour déjouer le piège de
la contrefaçon qui leur serait proposée et connaissent les exigences
propres de leur métier; d'autre part s'ils ne connaissent pas
les règles , ils peuvent au moins s'informer.
La
Cour de cassation a donc dès le début du siècle dispensé les juges
du fond de la recherche de l'élément moral, en établissant à l'encontre
de l'auteur du fait matériel, une présomption de mauvaise foi.
Or la Cour Suprême se permet beaucoup de liberté, comme l'illustre
ce morceau choisi: "en déclarant le prévenu coupable, la
décision attaquée a affirmé l'existence de l'élément intentionnel
du délit; qu'elle n'avait pas à s'expliquer autrement sur la mauvaise
foi du prévenu…".
Cette présomption porte donc atteinte à la présomption d'innocence et renverse
le fardeau de la preuve. Rappelons que " toute personne suspectée
ou poursuivie est présumée innocente tant que sa culpabilité n'a
pas été établie.
Ici le doute profite à l'accusation. Le prévenu se voit donc contraint
de prouver son absence d'intention coupable, c'est à dire d'apporter,
ce qui est difficile, une preuve négative. La Cour est, de plus,
fort sévère puisque selon elle "en droit, le doute sur l'intention
frauduleuse, lorsque comme en matière de contrefaçon celle-ci
est présumée…, ne saurait équivaloir à la preuve de la bonne foi".
Or pour citer Pierre Bouzat
"toute présomption est une schématisation, une simplification
et simplifier c'est parfois s'aveugler et passer à côté des réalités
[…] et lorsqu'un doute existe précisément sur l'intention, c'est
que par définition le fondement qui justifie la présomption ne
s'applique pas au cas envisagé."
Evidemment, il est des cas dans lesquels les juges établissent positivement
l'existence de cette présomption, mais lorsqu'ils utilisent celle-ci
lors d'une preuve difficile , les dangers sont réels.
b.
Le domaine de la présomption.
En ce qui concerne la compétence professionnelle, la jurisprudence
retient souvent deux qualifications pour décrire le prévenu: professionnel
averti ou cocontractant avisé.
Dans le cas d'un professionnel averti, l'idée retenue par la jurisprudence
est que certaines circonstances exceptionnelles auraient nécessairement
dû inquiéter le contrefacteur dont l'absence de toute interrogation
témoigne en réalité d'une acceptation tacite, si ce n'est de la
contrefaçon, du moins d'un risque éventuel de porter atteinte
au droit d'auteur ou aux droits voisins, ce qui suffit à le faire
tomber sous le coup de la loi pénale.
Il peut également s'agir d'un cocontractant avisé, qui connaît
parfaitement les limites de ses droits et les a donc nécessairement
outrepassées en connaissance de cause. Une hypothèse fréquente
en jurisprudence est celle du gérant de discothèque qui rompt
le contrat général de représentation passé avec la SACEM mais
continue à exploiter son répertoire.
Il ne peut alors prétendre qu'il ignorait la nécessité d'une autorisation
qui était en l'espèce subordonnée au paiement des redevances.
La preuve de la mauvaise foi est parfois facultative. Il est des
hypothèses où la juridiction de jugement relève expressément des
faits faisant preuve de la mauvaise foi du prévenu. L'application
de la présomption est alors écartée au profit d'une preuve directe
et positive de cette mauvaise foi comme le fait de vendre des
copies de mauvaise qualité,ou
bien le fait de continuer à vendre des enregistrements contrefaits
malgré un premier contrôle et une première saisie.
Cependant la preuve de la mauvaise foi peut s'avérer obligatoire
quand elle correspond à des exigences jurisprudentielles ou légales
spécifiques. La jurisprudence a ainsi décidé que ce serait le
cas pour les infractions de débit, importation ou exportation
illicite.
La conscience de la violation des droits, lors de l'utilisation
sans autorisation d'une œuvre protégée, doit en revanche être
expressément établie dans deux hypothèses dont les modalités sont
exclusivement régies par le droit commun: la complicité et le
recel.
En plus d'avoir un domaine étendu, la présomption de mauvaise
foi est très difficile à renverser.
2.
Le difficile renversement de la présomption.
Il ne suffit pas pour échapper à la condamnation, d'exciper de
sa bonne foi, encore, faut-il produire des faits dont les juges
pourront examiner la pertinence. La jurisprudence écarte comme
inopérantes la plupart des circonstances alléguées pour n'admettre
que l'erreur de fait comme susceptible de renverser la présomption.
Mais il convient de préciser que cette sévérité n'est pas propre
à la contrefaçon et découle en la matière des principes du droit
pénal général.
C'est ainsi qu'au regard de l'intention, les juges n'accordent
pas de place aux mobiles. En vertu des mêmes principes classiques,
l'ordre des supérieurs, même s'il émane d'une autorité administrative,
n'a pas d'effet exonératoire.
L'erreur de droit n'a pas non plus de succès auprès des tribunaux
comme le montre cette formule catégorique de la Cour de cassation:
"l'erreur dans l'interprétation de la loi ne saurait constituer
une excuse légale".
La seule considération propre à faire disparaître l'intention
et à relever totalement le prévenu de la présomption, reste l'erreur
de fait. Elle constitue une juste cause d'impunité lorsqu'elle
est excusable, c'est à dire "lorsque le prévenu a de justes
motifs de se croire autorisé à agir sans recherches et informations
préalables".
C'est le cas de l'exploitant d'une salle de cinéma qui projette
un film sans demander l'autorisation de l'auteur des bandes sonores.
Cependant, l'erreur de fait devient inexcusable, et donc inopérante,
"lorsque le prévenu n'aurait pas dû y succomber, parce qu'un
instant de réflexion et d'attention l'eût amené à se représenter
qu'il violait le droit exclusif de l'auteur".
Ainsi pouvons-nous constater l'extrême austérité de la Cour de
Cassation dans l'admission de la bonne foi du prévenu, en dehors
de la mince hypothèse de l'erreur de fait excusable. On serait
donc tenter de dire que la contrefaçon en matière d'œuvres d'art
est efficace mais ce serait oublier les conséquences de l'évolution
artistique et technologique sur son utilisation.
II.
Une infraction affaiblie par l'évolution artistique et technologique.
La contrefaçon doit protéger le droit des artistes. Pourtant par
les critères jurisprudentiels retenus et l'opportunité offerte
aux ayants droits d'utiliser la contrefaçon pour la moindre atteinte
au droit moral, la contrefaçon se révèle être une menace pour
l'évolution artistique (B). Or l'œuvre d'art est déjà menacée
par l'évolution technologique(A).
A.
La protection de l'œuvre d'art menacée par l'évolution technologique.
Comme
il a été précisé précédemment, l'article L.122-1 CPI dispose que
"le droit d'exploitation appartenant à l'auteur comprend
le droit de représentation et le droit de reproduction".
Dans la majeure partie des cas une autorisation de l'ayant droit
est nécessaire.
Signalons
au passage que le dépassement d'autorisation est considéré comme
une circonstance aggravante de la contrefaçon.
Ces droits patrimoniaux sont menacés en raison de l' utilisation toujours
plus large de la numérisation et de la diffusion d'œuvres d'art
sur le net sans l'accord des ayants droit. Il existe d'ailleurs
un véritable marché mondial de la "piraterie"comme
peuvent le démontrer ces quelques chiffres:
"la Chine serait le premier pays au monde pour la fabrication
de disques compacts contrefaits avec une production pouvant aller
jusqu'à 80 millions de CD; en 1996, un support sur cinq dans le
monde constituait une copie ou un enregistrement clandestin, soit
un volume annuel d'environ 955 millions d'unités; en France, le
préjudice causé aux industries cinématographiques, et audiovisuelles
est estimé à plus de 600 millions de francs(91,47 millions d'
euros) par an ".
L'art audiovisuel n'est en effet pas épargné. Avant l'avènement
de la vidéo, les infractions aux droits des auteurs étaient peu
importantes en matière d'œuvres cinématographiques. Le développement
de cette nouvelle technologie (l'enregistrement sur bande magnétique)
a ainsi facilité le vol des auteurs et de leurs œuvres. La facilité
de contrefaire, par le biais de la technique de la vidéo, est
à l'origine de l'explosion de la piraterie audiovisuelle dans
la première moitié des années 80. Aux vidéocassettes du marché
parallèle s'ajoutent les projection publiques illicites. D'après
certaines sources,
le préjudice causé représenterait 25 % des sommes investies dans
la production cinématographique française. L'enjeu est important
: il est économique, social, et culturel.
Nous
signalerons également qu'avec l'Internet, il est donné une chance
à chacun de monter son propre site et qu'il risque de se poser
un sérieux problème dans les années à venir car chaque internaute
est un contrefacteur en puissance.
B.
L'évolution artistique menacée par la contrefaçon.
Tout d'abord, le droit moral des auteurs ou de leurs ayants droit
risque de poser de nombreux problèmes aux créateurs de toutes
sortes qui aiment à utiliser d'autres œuvres pour créer la leur.
Il faut donc s'intéresser au droit moral et à l'évolution artistique
(1). L'inadéquation du critère de ressemblance (2) utilisé par
les juges pour déterminer s'il y a contrefaçon d'œuvre d'art risque
lui aussi de freiner quelques peu l'évolution artistique.
1.
Le droit moral et l'évolution artistique.
Heureusement
la Cour suprême a déjà montré sa sagesse en la matière. Si l'art
est parfois élitiste par son accessibilité, nul doute qu'il l'est
par les prix pratiqués. C'est pourquoi un patron de galerie s'était
spécialisé dans la vente de copies, faites à la main de chefs-d'œuvre
de grands maîtres en prenant la précaution d'apposer au dos de
ces toiles, un tampon à l'encre indélébile et une inscription
au crayon indiquant qu'il s'agissait d'une copie. L'héritier d'Auguste
Renoir estimaient ces précautions insuffisantes et voulait voir
reconnaître une atteinte au droit moral, ce que ne fit pas la
Cour de cassation.
Le droit moral ne doit donc pas servir à empêcher une large diffusion
des œuvres d'art tombées dans le domaine public. Mais cet exemple
démontre qu'un rien peut entraîner une action en contrefaçon
pour violation d'un droit moral. Or il n'est pas bon pour la création
que les artistes soient facilement menacés d'une action pénale.
Dans une ère
numérique comme la nôtre, la technique même de reproduction des
œuvres d'art par numérisation représente une source majeure de
difficultés, en ce qu'elle ne fournit pas une photographie fidèle
de l'œuvre, mais implique son retraitement, et permet tous les
arrangements, modifications et manipulations de l'œuvre, dans
des conditions qui ne permettent guère d'en préserver l'intégrité.
Les œuvres
d'art graphiques et les œuvres musicales ont des qualités - couleur,
définition, son – qui peuvent se trouver largement altérées à
l'occasion de leur numérisation.
A en croire
Laurence Tellier-Loniewski,
"l'interactivité, caractéristique des œuvres numérisées diffusées
sur le réseau Internet, apparaît par essence contraire au principe
même du respect de l'œuvre, puisqu'elle permet les apports extérieurs
et les transformations de toute nature"
Dans le cas
du sampling, certains artistes-interprètes, particulièrement exigeants,
pourraient en outre considérer que le seul fait de numériser leurs
prestations d'origine constituerait une atteinte à leur intégrité.
C'est ainsi, que dans l'affaire des "Inconnus",
le TGI de Paris a relevé l'atteinte au droit à la paternité des
auteurs sans difficulté. Sur le plan du droit au respect de l'intégrité,
les juges ont également constaté, sans problème majeur, l'atteinte
portée à l'œuvre préexistante, du seul fait de son découpage par
l'utilisation de la méthode de l'échantillonnage musical.
Comme le souligne
Christine Nguyen Duc Long
, " la création par numérisation d'œuvres préexistantes et
les droit au respect de l'intégrité des œuvres et des interprétations
ne manqueront donc pas de s'opposer à l'avenir".
Or en matière de droit d'auteur les évolutions sont lentes comme
en témoigne les controverses doctrinales à propos de la sanction
pénale du droit moral qu'une jurisprudence confuse n'a, pendant
longtemps, pas permis d'arbitrer. Le droit moral n'était en effet
jamais sanctionné indépendamment d'une atteinte principale au
droit pécuniaire de l'auteur. Finalement la Cour de cassation
a consacré la protection pénale du droit moral et ce après de
longues tergiversations. Une partie de la doctrine à laquelle
adhère le Professeur Françon
semblait opposée à la protection pénale du droit moral. M. Lalignant
a même déclaré qu' "en raison du caractère assez flou de
certaines prérogatives du droit moral, il conviendrait d'écarter,
jusqu'à nouvel ordre, toute protection pénale du droit moral".
On peut donc
craindre qu'une évolution du droit d'auteur concernant le droit
moral n'intervienne pas avant très longtemps. Les mêmes craintes
peuvent êtres exprimées à l'égard du critère jurisprudentiel retenu
pour déterminer si une œuvre d'art a été contrefaite.
2.
L'inadéquation du critère de ressemblance.
Une autre question se pose aujourd'hui en matière de contrefaçon
des œuvres d'art: doit-on prendre en compte les différences essentielles
ou les ressemblances entre deux œuvres d'art pour conclure à la
contrefaçon?
La Cour de cassation
a tranché puisqu'elle estime que seules les ressemblances essentielles
doivent être prises en compte.
Si l'on s'intéresse à la production artistique actuelle, on s'aperçoit
d'abord qu'il existe une évolution quantitative par la production
toujours accrue d'œuvres d'art. Or la création artistique dominante,
celle qui fait la loi du marché, évolue vers l'indifférencié,
le ressassement des formes, la répétition des genres. Par la loi
de la concurrence et de l'économie de marché, la standardisation
des produits et la sérialité de l'œuvre d'art se sont imposées,
la répartition du profit engendré par la production artistique
devenant un but en soi. Pour reprendre les propos de Xavier Daverat
"dans cette optique, la ressemblance entre les œuvres n'est
pas un risque : la récurrence d'éléments porteurs en fonction
du public visé est un impératif".
Or
loin de nous l'idée d'imposer une définition élitiste de l'œuvre
d'art car souvenons-nous que l'œuvre d'art est un "ensemble
dont la beauté nous procure une satisfaction désintéressée".
Imposer sa propre conception de la beauté serait d'une rare ineptie.
Comme le fait remarquer M. Daverat,
"on peut certes s'insurger contre la banalité érigée en système
ou le confort commercial du"ciblage", mais il n'appartient
au droit d'auteur de sanctionner des nouveaux types de création,
par inadaptation des critères de la contrefaçon aux évolutions
des techniques contemporaines".
C'est
pourquoi à la lecture de certains arrêts de censure
concernant des œuvres d'art, dans lesquels des différences importantes
et des ressemblances banales pouvaient être constatées, nous considérons
comme inadapté ce critère de ressemblance.
L'infraction de contrefaçon vit donc son adaptation à l'évolution
artistique et technologique de manière douloureuse, la protection
des œuvres d'art n'en sortant pas renforcée. On peut d'ailleurs
affirmer qu'avec la faible répression qui existe, l'action en
contrefaçon d'œuvres d'art se dessine un futur sombre.
Section II: Une répression affaiblie.
La répression est affaiblie
car la poursuite est difficile (I) et les sanctions rarement appliquées
(II) .
I.
Une poursuite difficile.
Intéressons-nous d'abord à
la compétence et à la qualité pour agir (A) avant d'étudier la
preuve de la contrefaçon (B).
A.
Compétence et qualité pour agir.
Il convient de rappeler que
l'article 113-2 du Code pénal prévoit expressément que "la
loi pénale française est applicable aux infractions commises sur
le territoire de la République. L'infraction est réputée commise
sur le territoire de la République dès lors qu'un de ses faits
constitutifs a eu lieu sur ce territoire". En matière de
contrefaçon "elle est réputée commise sur le territoire de
la République lorsque, bien que l'œuvre protégée ait été reproduite
à l'étranger, l'atteinte portée aux droits de l'auteur a eu lieu
en France".
En théorie, les juridictions françaises jouissent donc d'une large
compétence en matière de contrefaçon. En outre, le demandeur au
procès pénal est le titulaire du droit d'exploitation sur l'œuvre.
Il s'agit donc en premier lieu de l'auteur ou de ses ayants droit.
Toutefois, s'agissant d'un droit pécuniaire, il peut faire l'objet
de cessions (article L. 131-4 CPI), soit du fait de la loi (article
L.132-23 et s pour les œuvres audiovisuelles), soit du fait de
contrats conclus entre l'auteur et un exploitant, ou entre l'auteur
et son employeur. Précisons que la Cour de cassation est intervenue
pour affirmer qu'en l'absence de revendication des auteurs, la
société exploitant commercialement les œuvres est présumée, à
l'égard des tiers contrefacteurs, titulaire des droits
car les entreprises oubliaient la plupart du temps de se faire
céder par les créateurs les droits sur les œuvres qu'elles exploitaient.
Enfin se pose la question de savoir si dans l'hypothèse d'une
œuvre de collaboration, un seul des coauteurs peut agir en contrefaçon.
La Cour de cassation estime sur cet épineux sujet que "le
coauteur d'une œuvre de collaboration qui prend l'initiative d'agir
en justice pour la défense de ses droits patrimoniaux, est tenu,
à peine d'irrecevabilité de sa demande, de mettre en cause les
autres coauteurs de cette œuvre" tout en précisant que ce
principe ne concerne pas les droits moraux.
Mais les véritables difficultés résident bien plus dans l'exercice
pratique de l'action en contrefaçon, que dans son principe. C'est
pourquoi, ce sont des questions de preuve et de mode de sanction
qui se poseront le plus souvent.
B.
Preuve de la contrefaçon.
La propriété intellectuelle connaît un mode particulier de preuve:
la saisie-contrefaçon. Les organes compétents sont le juge d'instance
ou le commissaire de police d'une part, le président du TGI, d'autre
part. Le point de partage de leur compétence a trait à l'urgence,
c'est à dire à la crainte que le contrefacteur ne fasse disparaître
les objets contrefaits, mais aussi à la gravité du préjudice auquel
serait exposé l'exploitant dans le cas où la saisie serait frauduleuse.
Dans le cas du commissaire de police ou du juge d'instance, la
compétence est limitée au cas de reproduction opérée en fraude
des droits de l'auteur ou de ses ayants droit (art. L332-1 CPI).
Le président du TGI, dans les hypothèses où il est compétent (art.
L.332-1, al. 2 et 3), autorise la saisie-contrefaçon dans une
ordonnance rendue sur requête à la demande de l'auteur ou de ses
ayants droit. Il est également loisible à celui qui s'estime victime
d'une contrefaçon de demander, en référé, des mesures provisoires
de protection. Contrairement au commissaire de police ou au juge
d'instance, le président du TGI a un pouvoir d'appréciation sur
l'opportunité de la mesure qui lui est réclamée de manière à faire
échec au caractère automatique de la saisie dont l'usage abusif
pourrait entraîner de graves conséquences financières. C'est ainsi
par exemple que le TGI de Paris a refusé d'ordonner, à la demande
de l'un des coauteurs, la saisie d'un film;
il relève que les conséquences de la mesure sollicitée sont particulièrement
graves puisqu'elles aboutiraient à empêcher la divulgation du
film, portant ainsi atteinte aux droits incontestés du réalisateur.
Lorsqu'on est en face d'une violation du droit de reproduction,
la saisie des exemplaires contrefaits va avoir pour effet de suspendre
des exécutions publiques en cours ou déjà annoncées. Notons que
la plupart des espèces intéressent le cinéma. Lorsqu'il s'agit
d'une violation du droit de représentation, la saisie va avoir
pour effet de suspendre des représentations en cours ou déjà annoncées
parce que l'usage de l'œuvre reproduite est intervenu contrairement
aux intentions de l'auteur ou de ses ayants droit.
Pour être complet sur ce sujet, il nous faut préciser que le saisi
ou le tiers saisi peuvent demander au président du TGI statuant
en référé, le cantonnement de la saisie, sa mainlevée ou encore
la reprise de l'exploitation sous l'autorité d'un administrateur
séquestre des produits de l'exploitation (art.L.332-2 CPI )
La preuve de la contrefaçon peut également résulter du constat
opéré par les agents assermentés des organismes professionnels
d'auteurs et des organismes de gestion collective des droits d'auteurs.
La loi n° 94-102 du 5 février 1994 sur les contrefaçons a étendu
au domaine du droit d'auteur une disposition qui, à l'origine,
ne s'appliquait qu'aux marques : la possibilité, pour l'administration
des douanes de retenir, dans le cadre de ses contrôles les marchandises
contrefaites (article L.335-10 CPI).
Enfin, et cela paraît logique, les officiers et agents de police
judiciaire, peuvent procéder à des perquisitions et à des saisies
dans le cadre de l'enquête préliminaire (article 75 et s Code
de procédure pénale) et de l'enquête de flagrance (article 53
Code de procédure pénale)
Pourtant dans la pratique, ces mesures permettant l'établissement
de la preuve sont malmenées par la réalité technologique et géographique.
Dans le cadre d' Internet, la preuve est la condition déterminante
pour faire valoir ces droits. Comme le font remarquer certains
avocats
"à la différence de l'écrit papier, la reproduction numérique
peut-être modifiée, voire supprimée, dans des délais particulièrement
brefs, par le contrefacteur, qui peut d'autant plus facilement
faire disparaître la trace du délit". Le concours de l'Agence
pour la protection des programmes (APP), qui dispose d'agents
assermentés, a été à ce titre capital dans la preuve de la matérialité
de toute infraction de contrefaçon lors des décisions de justice
rendues.
La contrefaçon étant une infraction dans laquelle un élément d'extranéité
est souvent présent, la preuve est rendue extrêmement difficile.
Le principe de souveraineté des états interdit à la juridiction
saisie du procès pénal d'exercer ses attributions en dehors de
ses frontières et de recueillir elle-même dans un état étranger
les preuves dont la production importe à la solution du litige.
Il faut donc que le juge pénal saisi sollicite le concours ou
l'entraide de l'Etat étranger. Soit il sera demandé par commission
rogatoire à une autorité se trouvant à l'étranger de réunir les
preuves et de communiquer le résultat de ses recherches, soit
un transfert des objets ou documents pour qu'ils soient examinés
ou des personnes pour qu'elles soient entendues seront sollicités.
Théoriquement tout semble au point. Hélas la pratique montre que
de sérieuses lenteurs dans ces procédures existent. Les nombreuses
conditions juridiques et politiques au bon déroulement de ces
procédures sont autant de freins à la rapidité et l'efficacité
de la justice lorsque des contrefaçons à l'étranger sont signalées.
Pour assurer la crédibilité de l'action en contrefaçon auprès
des citoyens , encore faudrait-il que les sanctions pénales soient
correctement appliquées, ce qui est loin d'être le cas.
II. Des sanctions peu appliquées.
Le législateur a comme pour toute infraction prévu des peines
lorsqu'une contrefaçon est reconnue. Or les peines principales
sont rarement appliquées dans la pratique(A), ce qui n'est pas
pour renforcer une répression déjà affaiblie par des problèmes
de preuve et d'extranéité. On évoquera ensuite le cas des peines
complémentaires (B).
A.
Peines principales rarement appliquées dans la pratique.
Aux termes de l'article L.335-2, dans la rédaction que lui a donnée
la loi du 5 février 1994, les peines encourues sont désormais
de deux ans d'emprisonnement et de 150000 euros (1000000 F) d'amende
(art. L335-2, L335-3, L335-4 CPI. ). En
cas de non versement de la rémunération prévue pour la copie privée,
seule la peine d'amende est applicable. Selon l'article L.335-4
al 3 CPI le défaut de la rémunération due à l'auteur, à l'artiste
interprète ou au producteur de phonogrammes ou de vidéogrammes
est puni d'une amende de 150000 euros (1000000F). Les personnes
morales peuvent également être responsables pénalement des violations
du droit d'auteur d'après l'article L. 335-8 CPI. On rappellera
tout au plus qu'en vertu de l'article 131-38 du Code pénal, la
peine d'amende pouvant leur être appliquée est de 750000 euros
(5000000 F ). L'article 131-39 Code pénal prévoit également pour
les personnes morales la dissolution, l'interdiction temporaire
ou définitive d'exercice professionnel ou social, le placement
sous surveillance judiciaire, la fermeture définitive ou temporaire
du ou des établissements ayant servi à commettre les faits incriminés,
l'exclusion des marchés publics etc…
En
l'absence de toute précision contraire, la tentative n'est pas
punissable.
D'après le rapport Béteille,
la peine d'emprisonnement est relativement peu prononcée. Lorsqu'elle
l'est, c'est pour de relativement courtes peines (de 6 mois à
1 an) avec la plupart du temps un sursis total. et l'amende est
le plus souvent comprise entre 5000F et 50000F. Des sanctions
plus sévères sont exceptionnelles: 18 mois d'emprisonnement avec
sursis pour l'antiquaire qui diffuse des bronzes faussement attribués
à des artistes connus violant ainsi leur droit moral.
Il est alors possible de s'interroger sur l'adéquation de ces
sanctions pénales à la contrefaçon. Loin de nous en tous cas l'idée
d'une élévation de la peine, car la dissuasion par l'emprisonnement
reste encore à démontrer. Au contraire, les faibles peines prononcées
par les juridictions répressives, évoquées précédemment, et l'évolution
incroyable de la contrefaçon en matière artistique
doivent nous faire envisager des solutions autres. Notons tout
de même que les peines encourues sont portées au double en cas
de récidive.
B.
Peines complémentaires spécifiques.
Nous ne présenterons ici que les peines complémentaires visées
expressément par le CPI ou la loi des 9-12
février 1895 qui peuvent présenter un caractère spécifique.
C'est le cas de la publicité et de l' affichage prévus par l'
article L335-6 al 2 CPI. La jurisprudence semble sur ce point
s'adapter aux nouvelles technologies puisque la publication de
la condamnation sur la page d'accueil d'un site web contrefacteur
est possible.
Il peut également y avoir une confiscation des recettes comme
des supports d'après l'article L.335-7 CPI.. Enfin, une fermeture
d'établissement temporaire est envisageable selon L.335-5 CPI,
les salariés de l'établissement fermé restant heureusement protégés.
En cas de fermeture définitive, le licenciement du personnel peut
être envisagée et donne lieu, en dehors de l'indemnité de préavis
et de l'indemnité de licenciement, aux dommages-intérêts prévus
aux articles L.122-14-4 et L. 122-14-5 du Code du travail. Selon
un document de l'Assemblée nationale
"La fermeture du ou des établissements exploités par les
délinquants est ainsi une arme redoutable pour combattre la fabrication
et le commerce des produits de contrefaçon".
On le voit
donc que l'action en contrefaçon lorsqu'elle doit protéger une
œuvre d'art produit des effets qui ne vont pas toujours dans le
sens de la protection et qui peuvent même s'avérer dangereux pour
la création artistique. Certains militent par ailleurs, pour un
recentrage, une évolution de notre conception personnaliste du
droit d'auteur, inadaptée au monde numérique:"Alors que les
techniques numériques et des réseaux comme Internet permettent
de dupliquer à l'infini et à un coût marginal, presque nul, n'importe
quel type de documents, il semble anormal que cette immense richesse
collective potentielle soit empêchée de se développer du fait
de "droit d'auteur" datant d'un univers de la rareté,
nimbé d'une mystique de l'objet unique…S'accrocher aujourd'hui
à une conception étriquée et crispée du droit d'auteur évoque
irrésistiblement les privilèges des siècles passés comme la gabelle
et les péages à chaque carrefour".
A la vue de ces différentes constatations, on en déduit que des
adaptations sont alors nécessaires.
PARTIE II : VERS UNE ADAPTATION DE LA CONTREFAçON A L'EVOLUTION DES ŒUVRES D'ART |
Adapter oui, mais comment? Doit-on se contenter d'attendre de la jurisprudence
qu'elle évolue? Certes non, ce serait oublier que le Droit évolue
également grâce à l'action du législateur. C'est pourquoi, celui-ci
doit prendre en compte la spécificité des œuvres d'art contemporaines.
Cependant, il est nécessaire que cette évolution ne se traduise
pas uniquement sur un plan purement national. Tous ceux qui ont
été confrontés aux "pirates" ou autres contrefacteurs
le savent bien: ceux-ci tentent de jouer des différences de durée
ou de niveaux de protection d'un pays à l'autre pour prétendre,
à tort, que ce qui serait licite dans un état membre de l'Union
européenne serait ipso facto licite dans les autres états.
Le succès de la lutte contre la contrefaçon passe donc entre autres
par une harmonisation des niveaux de protection et de répression.
Toutes ces mesures devraient nous amener vers une action en
contrefaçon plus efficace (chapitre 1)
Pour améliorer l'efficacité de l'action en contrefaçon des œuvres
d'art il est nécessaire d'adopter une vision globale. Il s'agit
par conséquent d'une part, d'adapter l'action en contrefaçon à
l'évolution artistique et technologique (section 1) et d'autre
part de s'adapter au caractère international de la contrefaçon
des œuvres d'art (section 2);
Section
I: Adapter l'action en contrefaçon à l'évolution artistique et
technologique.
Nous avons souligné dans nos développements précédents à quel
point en matière d'œuvre d'art les conditions préalables à une
action en contrefaçon vivaient des difficultés d'adaptation. Nous
avons également pointé les problèmes d'application de l'action
en contrefaçon lorsqu'elle a trait aux œuvres d'art.
C'est pourquoi une révision des conditions préalables à l'action en contrefaçon
(I) et une transformation de certains éléments de la contrefaçon
et de sa répression (II) sont envisageables.
I. Une révision
des conditions préalables à l'action en contrefaçon.
Il serait souhaitable qu'en matière d'œuvre d'art
l'exigence de forme originale soit assouplie ( A) et qu'il y ait
un renouvellement des exceptions au droit d'auteur (B).
A. Pour un assouplissement de l'exigence de forme originale.
Comme le fait remarquer Nadia Wararens
"la spécificité de la création contemporaine change toutes
les données du droit". L'œuvre peut être exécutée par l'artiste,
ou bien par une personne non déterminée à l'avance, ou bien ne
pas être réalisée du tout. Seul le concept est vraiment important.
L'exigence d'une œuvre de forme originale est ainsi mise à mal
:"lorsque vous vous attachez à la forme de l'œuvre, à sa
réalisation concrète, c'est comme si vous étiez insensible à l'aspect
critique, intellectuel de l'œuvre et ne réagissiez (bêtement)
qu'aux sensations plastiques; comme si, au lieu d'adorer le créateur,
vous vous étiez entichée de l'artisan; comme si, par analogie
avec la musique, vous préfériez au compositeur l'un de ses multiples
interprètes".
On peut d'ailleurs citer quelques œuvres comme le Vide
d'Yves Klein
qui du point de vue du droit d'auteur ne sont pas reconnues et
n'ont pas d'existence juridique alors que cette œuvre d'art pour
le milieu artistique existe bien: elle a été exposée dans une
galerie, et des collectionneurs l'ont achetée. Comme Sylvie Hans,
nous pensons que "l'exclusion des idées devrait en effet
à notre sens fournir dans les années à venir la matière à nombre
de débats et l'objet de bien des litiges; les revendications des
créateurs contemporains seront à ce prix".
Une partie de la doctrine propose une position
radicale et prône une conception objective de l'originalité, qui
aboutit à occulter l'approche personnaliste du droit d'auteur.
Cette proposition ne semble pas tenir véritablement compte de
la spécificité de la création artistique et c'est pourquoi un
affinement de la conception subjective comme le propose Nadia
Walravens serait plus adéquat.
Si l'œuvre d'art est envisagée indépendamment
de la personnalité de son auteur, dans le cadre d'une conception
objective de l'originalité, le critère de la nouveauté (déterminant
dans la propriété industrielle) se substituerait à celui de l'empreinte
personnelle. Le caractère personnel de la création disparaîtrait,
et certains attributs chers au droit d'auteur tel que le droit
moral seraient remis en question car le rapport qu'entretient
l'auteur avec son œuvre serait nié. Or nous l'avons vu, l'œuvre
d'art est "mis(e)en forme par un esprit créateur"
. Il paraît donc nécessaire d'envisager un affinement de la conception
subjective de l'originalité, afin de prendre en compte l'évolution
de l'art.
Si lorsqu'on regarde des tableaux monochromes
"l'émotion vient moins d'eux-mêmes que de ce qu'ils désignent",
la personnalité de l'artiste n'est pas moins présente. L'empreinte
de la personnalité de l'artiste qui auparavant transparaissait
uniquement dans l'objet matériel, se manifeste aujourd'hui également
par la démarche mentale de création. Il est donc anormal que les
ready-mades de Duschamp ne soient pas reconnus comme des œuvres
par le droit.
Cet affinement de la notion d'empreinte de la
personnalité a d'ailleurs été perceptible en jurisprudence lorsqu'il
faut se prononcer sur l'originalité de photographies. Un arrêt
de la Cour d'appel de Dijon du 7 mai 1996 a reconnu l'originalité
à des photographies compte tenu "d'un certain nombre de choix,
notamment quant à l'éclairage et à l'utilisation corrélative du
matériel".
Il est donc souhaitable que le juge prenne en compte ce nouvel
éclairage de la notion d'empreinte de personnalité lorsqu'il doit
décider de l'originalité d'œuvres d'art contemporaines.
L'exigence d'exécution personnelle de l'artiste
doit également disparaître car "ce critère rajouté par une
partie de la doctrine ne coïncide pas avec la réalité".
La jurisprudence semble aujourd'hui indifférente à ce critère,
ce qui constitue un point positif.
Enfin, nous avions évoqué le problème posé par
la non-protection des idées. Ce constat nous amène logiquement
à réclamer son assouplissement lorsqu'il touche aux œuvres d'art.
On ne devrait certes pas poser un principe de protection
des idées, les conséquences qui en découleraient pouvant être
dramatiques. Par contre, l'évolution de l'art autorise les juges
à accorder une certaine protection à des idées artistiques susceptibles
d'être considérées en tant que telles comme des œuvres d'art,
la forme n'étant plus un critère très pertinent.
Les efforts à fournir pour améliorer l'efficacité
de la contrefaçon des œuvres d'art ne résident pas seulement dans
un élargissement du cercle des œuvres d'art protégeables. On doit
également s'évertuer à repenser les exceptions au droit d'auteur.
B. Pour un renouvellement des exceptions au droit d'auteur.
Deux points problématiques seront ici abordés:
il s'agit de la question de la copie numérique et de la courte
citation.
Rappelons que l'article 13 de l'accord ADPIC
(Accord relatif aux aspects de droits de propriété intellectuelle
qui touchent au commerce, y compris le commerce des marchandises
de contrefaçon) dispose, sous l'intitulé "limitations et
exceptions" que: "les membres restreindront les limitations
des droits exclusifs ou exceptions à ces droits à certains cas
spéciaux qui ne portent pas atteinte à l'exploitation normale
de l'œuvre ni ne causent un préjudice injustifié aux intérêts
légitimes du détenteur du droit". La même solution a été
adoptée dans l'article 10 du traité OMPI (Organisation mondiale
de la propriété intellectuelle) du 20 décembre 1996 relatif au
droit d'auteur, également sous l'intitulé "limitations et
exceptions" Quant à la Directive CE du 22 mai 2001,
dans son article 5, elle mentionne toutes les exceptions connues
dans les états membres.
Une solution proposée par deux auteurs
consiste à supprimer l'exception de copie privée dans le monde
numérique. Ils constatent qu'en matière de copie privée, l'exception
paraît être fondée sur l'impossibilité matérielle de l'empêcher.
Ils ajoutent que "si des moyens techniques avaient existé
pour contrôler la confection de copie sur support analogique,
cela à des coûts raisonnables et sans porter atteinte à l'intimité
de la vie privée, une telle exception n'aurait peut-être pas vu
le jour. En effet, l'exception de copie privée n'est pas un droit
mais une simple tolérance accordée aux usagers de confectionner
une copie d'une œuvre pour leur usage personnel". Ces deux
auteurs se fondent sur les textes internationaux pour en conclure
qu'aucun de ces textes ne qualifie la copie privée comme étant
un "droit". Et ajoutent-ils "puisque ces textes
qui statuent en matière de prestations numériques ne prévoient
pas l'exception pour copie privée, il est tentant de conduire
la même analyse à propos des œuvres diffusées sous forme numérique
et de conclure que la reproduction privée sur support numérique
n'est pas possible sans l'autorisation des ayants droit".
Cette solution n'apparaît pourtant pas salvatrice,
car elle aurait à n'en pas douter des effets néfastes sur l'accès
au public à l'information, et serait en inadéquation flagrante
avec les pratiques actuelles.
Par contre, admettre le principe de rémunération
pour copie privée numérique au profit de l'auteur à titre de dédommagement
serait beaucoup plus respectueux des intérêts en balance. Les
usagers pourraient bénéficier d'un droit de copie numérique et
les artistes ou l'industrie artistique se verraient rétribuer.
Quelques mots enfin, sur la question du domaine
d'application de la courte citation. Il semble normal que cette
exception s'applique à d'autres arts que la littérature comme
le démontraient nos développements antérieurs.
Dans ce domaine, l'évolution viendra sûrement de la jurisprudence.
Une transformation de certains éléments de la
contrefaçon et de sa répression semblent également nécessaires
pour que celle-ci soit plus efficace.
Selon Thomas Dreier,"il
ne suffit pas toutefois, pour trouver une solution, de se cacher
la tête dans le sable ni de transposer tout simplement au monde
digital les concepts conçus pour le monde analogue: il convient
plutôt de les développer selon les critères de ce monde digital".
Or il convient d'empêcher que le modèle juridique et la réalité
pratique ne s'éloignent trop l'un de l'autre. La contrefaçon est
une institution qui ne fait pas exception à la règle. Il serait
donc de bon ton d'assouplir le régime de la contrefaçon appliqué
aux œuvres d'art numériques. Une solution imaginable serait la
création d'une exception légale pour les œuvres numériques. Avant
d'aborder certaines propositions expliquons la raison d'être d'une
exception légale aux seules œuvres numériques: d'une part les
arts numériques utilisent le sample et celui-ci est une atteinte
au droit moral, d'autre part l'Internet permet sans aucun coût
autre qu'une connection la création de site alors que dans le
monde analogique d'importants moyens financiers sont nécessaires
pour éditer ou exposer.
Le premier intérêt de cette mesure serait de ne pas entraver la
création artistique. A titre d'exemple, l'atteinte au droit moral
lors de l'utilisation d'un sample sans autorisation n'en serait
plus une.
Le TGI de Paris a statué en référé le 14 août 1996,
et a reconnu qu'il y avait contrefaçon d'œuvres protégées par
le droit d'auteur, dès lors que celles-ci étaient mises à disposition
des utilisateurs de l'Internet sans autorisation des titulaires
des droits. Il s'agissait de textes et d'extraits de chansons
de Jacques Brel que deux étudiants, l'un élève de l'Ecole nationale
supérieure des télécommunications et l'autre élève de l'Ecole
centrale de Paris, avaient numérisés puis installés sur leur page
"web". Nous avions également cité l'affaire concernant
la consultation en ligne de poèmes de Raymond Queneau,
qui avait donné lieu à condamnation pour contrefaçon. Nous déplorons
ces condamnations car le but des condamnés n'étaient pas de s'enrichir
aux dépends des ayants droit mais de faire mieux connaître ces
œuvres. Ces mobiles n'ont aucune valeur juridique lorsqu'il s'agit
de contrefaçon. Il est regrettable de ne pas prendre en compte
cet aspect. C'est pourquoi, nous proposons qu'en matière d'œuvre
d'art la reproduction sur Internet soit admise dans des conditions
rigoureuses:
-pas
de reproduction intégrale (pour reprendre l'exemple des chansons
de Brel, l'intégralité des chansons de Brel ne pourrait être reproduite,
un seuil devant être fixé par le législateur comme par exemple
30 % de l'œuvre d'art).
-
pas de but lucratif direct ( par exemple faire payer l'accès
à l'œuvre d'art) ou indirect ( par exemple gagner de l'argent
grâce aux publicités).
-
une indication obligatoire du titre de l'œuvre d'art et de
ses références.
-mention
obligatoire d'un lien hyper-texte avec le site officiel de l'artiste
s'il existe.
Nous ne prétendons pas à l'exhaustivité de ces conditions, d'autres pouvant
être ajoutées. En tous les cas, la renommée de l'artiste n'en
sortirait que grandit. Si on n'était pas entièrement convaincu
par cette proposition, rappelons que des sites sur les œuvres
d'art peuvent être créés dans des pays étrangers qui ne connaissent
pas les mêmes protections du droit d'auteur, ceux-ci pourront
perdurer et les internautes français y auront accès: le préjudice
sera le même pour les ayants droit.
S'il est vrai que les peines d'emprisonnement en matière de contrefaçon
sont rarement appliquées,
ce n'est peut-être pas un hasard. Tout d'abord, la vertu pédagogique,
et dissuasive de la peine n'est pas si évidente. En plus, le fait
de prononcer des peines sévères, a fortiori d'emprisonnement,
signifierait l'envoi en prison des contrefacteurs. Or c'est oublier
ou méconnaître l'état des prisons françaises. Il nous semble que
l'avenir en matière de contrefaçon se situe vers un juste dédommagement
des victimes. L'organisation sociale de la société serait ainsi
préservée. Gautier prône d'ailleurs l'utilisation d'une peine
privée comme cela se fait aux Etats-Unis.
Aux adaptations du droit d'auteur sur
un plan purement national devrait succéder une adaptation de celui-ci
sur le plan international par le biais d'une harmonisation. Or
celle-ci est insuffisante au niveau de la nature du droit d'auteur
(A) et inexistante sur les sanctions qui découlent de sa violation
(B)
A. Harmonisation insuffisante de la nature du droit d'auteur.
Dès que l'œuvre d'art est numérisée, les ayants droit peuvent déceler une
atteinte à l'intégrité de l'œuvre. Or les législations varient
selon les pays. Il existe une opposition entre le droit continental
et le droit anglo-saxon en matière de propriété littéraire et
artistique. Ce dernier connaît le copyright et ignore le droit
moral de l'auteur. Dans un univers numérique de plus en plus prégnant,
en raison notamment d'Internet, le droit moral saura-t-il s'imposer
au plan européen?
Fruit de longues et difficiles discussions, la directive CE sur le droit
d'auteur et les droits voisins dans la société de l'information
a pour objet, d'une part, d'harmoniser les prérogatives des ayants
droit dans la Communauté afin essentiellement de favoriser les
exploitations en réseaux dans le marché intérieur, d'autre part,
de renforcer l'efficacité des monopoles d'exploitation en imposant
une protection juridique des mesures techniques de prévention
et d'identification que les facilités de reproduction et de diffusion
dans l'environnement numérique rendent bien souvent indispensables.
Le processus engagé en juillet 1995 avec la publication du Livre vert de
la Commission des Communautés sur le droit d'auteur et les droits
voisins dans la société de l'information,
suivie le 20 novembre 1996 d'une communication de la Commission
sur les réactions suscitées par le livre vert,
de deux propositions de directive des 10 décembre 1997
et 25 mai 1999,
d'une position commune du Conseil du 28 septembre 2000
amendée par le Parlement européen le 14 février 2001, a touché
au but le 22 mai 2001.
Long
et complexe, le texte est néanmoins lacunaire et pour cette raison
quelque peu décevant. Si on en croit Jérôme Passa
"outre que les dispositions consacrées aux exceptions aux
droits exclusifs ne constituent en aucune manière la base d'une
harmonisation, le silence de la directive sur le droit moral ou
les contrats d'exploitation, notamment, maintient la menace que
les divergences des législations des Etats membres font peser
sur la fluidité des exploitations en réseaux." Et on ne peut
qu'agréer avec ce commentaire lorsqu'on étudie la directive.
Dans
l'article 5 de la directive, on dénote une série d'exceptions
facultatives et une seule exception obligatoire. Cet article mentionne
toutes les exceptions connues dans les états membres. Il n'y a
donc aucune harmonisation.
Selon Jérôme Passa
"on ne regrettera toutefois pas forcément ces lacunes, tant
l'harmonisation sur les points sensibles se serait nécessairement
faite au prix d'un abaissement du niveau de protection des auteurs
par rapport à l'état actuel de la législation française, l'une
des plus protectrices d'Europe".
Un deuxième point positif serait le fait que la Cour de justice pourra,
saisie par voie préjudicielle, exercer un contrôle accru sur les
législations et interprétations nationales pour imposer progressivement
ses positions.
Toujours est-il que cette directive n'harmonise pas les législations
nationales en matière de propriété intellectuelle et artistique
et ne résout en rien les problèmes qui peuvent se poser lors de
la numérisation des œuvres d'art.
La lutte contre la contrefaçon des œuvres d'art suppose une démarche globale.
Le droit pénal, dans un cadre aussi spécifique, ne peut juguler
cette délinquance à lui seul. D'autres actions sont alors nécessaires.
Celles-ci revêtent un caractère de prévention. On peut distinguer
deux catégories de personnes visées par ces mesures: il s'agit
des professionnels (section I), notion large qui recouvre tous
les intervenants du monde artistique, et le public (section II).
Section I: La prévention et les professionnels.
Depuis quelques années, nous assistons à une véritable mutation
de l'art à laquelle succède celle de la contrefaçon. Nous sommes
passés d'un support analogique à un support numérique, et les
réseaux d'échange d'informations véhiculent désormais des signaux
numériques. Les artistes, mais également toute l'industrie qui
les entoure sont prévenus, la contrefaçon s'inspire elle aussi
des techniques les plus récentes. C'est pourquoi, dans un premier
temps les professionnels peuvent avoir recours à des techniques
de protection (I) pour empêcher une éventuelle contrefaçon.
Dans
un second temps, il leur est loisible d'agir pour prévenir la
contrefaçon des œuvres d'art et ce par le biais d'un lobbying
actif (II).
I. Les techniques
de protection.
Balzac disait que "la loi de l'intérêt général…est détruite
par la loi de l'intérêt particulier… qui engendre l'égoïsme".
Ne peut-on pas voir dans la contrefaçon des œuvres d'art une parfaite
illustration de cet aphorisme? Nous le pensons, car cette prévention
en quête de légitimité (I) éprouve de nombreuses difficultés (II).
I. Une prévention
en quête de légitimité.
A. Ne pas contrefaire: un acte négatif
Cette prévention touche essentiellement l'Internet, espace dans
lequel loin d'être de simples consommateurs, les utilisateurs
sont en réalité de véritables acteurs. Ils sont à ce titre concernés
par tous les problèmes de contrefaçon qui peuvent se poser sur
la toile.
Une première tendance consiste à considérer la liberté de l'usager
comme la source d'une prise de responsabilité. L'internaute limite
de lui-même sa liberté, en fonction de règles de bonne conduite
qui se dégagent de l'ensemble de la communauté, et réagit en allant
parfois jusqu'à la censure. Il s'agit à n'en pas douter d'un pari
sur la nature vertueuse de l'homme.
La Netiquette qui est un ensemble de règles civiles de comportement, non
écrites a été adoptées par tous les utilisateurs de l'Internet
dans le monde. Ces règles rédigées en 1995, présentent un ensemble
minimum de lignes de conduite pour les utilisateurs et les professionnels.
Selon la Netiquette, il est également prescrit de respecter les droits d'auteur
lors d'une reproduction, afin de prévenir les poursuites en contrefaçon.
Les plus âpres discussions concernant cette charte ont été tenues,
certains doutant de sa légitimité. Ainsi pour M. Vivant cette
autorégulation ne peut avoir lieu que dans "les interstices
d'un droit contraignant".
Pourtant cette autorégulation, notamment en matière de contrefaçon,
semble bien être le symbole de la prise de conscience du public
des préjudices causés par ce délit.
B.
Signaler les contrefaçons: une action positive.
Des systèmes d'alerte ont également été mis en place pour que les utilisateurs
qui constatent une infraction puisse le signaler. Ces systèmes,
dont le plan d'action communautaire "Europe 2000" encouragent
les utilisateurs à une plus grande responsabilité et à une participation
à la lutte contre la criminalité internétique en amont de la répression.
Dans le cas de la contrefaçon, cette démarche pourrait être intéressante.
II. Les difficultés
en matière de prévention.
S'il apparaît en effet normal aux professionnels d'utiliser la prévention
comme une arme contre la contrefaçon, c'est en raison de l'impérieuse
nécessité pour eux de sauvegarder leur industrie. Mais on peut
se demander ce qui pousserait le public à respecter les règles
du droit d'auteur.
Pour certains, la réponse se trouve dans la sévérité des peines requises
contre les contrefacteurs. Certes la peine pourrait avoir une
fonction dissuasive. Dans ce cas, la personne tentée par la contrefaçon
ferait ce calcul d'intérêt si cher à Beccaria
et choisirait entre le profit réalisable et le risque auquel elle
s'expose. Hélas, il est peu probable que le citoyen lambda réfléchisse
de la sorte car rares sont les personnes capables de connaître
le droit d'auteur et la contrefaçon, l'utopie de l'adage "nul
n'est censé ignorer la loi" n'étant plus à prouver dans cette
époque d'extrême inflation législative. Et quand bien même une
personne serait au fait des peines, est-elle véritablement dissuadée
alors qu'au moment de la commission de l'acte délictuel aucune
conséquence n'est perceptible? Nous nous permettons d'en douter.
Le problème principal de la contrefaçon, vient sûrement du manque de lisibilité
de ce délit. La contrefaçon est un vol, une soustraction frauduleuse
de la chose d'autrui, celle-ci étant le travail d'un créateur
matérialisé par des droits. Il faut donc connaître ces droits
pour ne pas avoir l'occasion de se transformer en contrefacteur.
Or les droits d'auteur sont méconnus du grand public. La prévention
devrait donc attirer l'attention du public sur l'existence de
ces prérogatives, les artistes pouvant intervenir pour user de
leur notoriété à des fins de communication. Il serait alors souhaitable
que de grandes campagnes de publicité aient lieu comme cela avait
été le cas pour la contrefaçon de marque.
Pour que la contrefaçon soit comprise par le grand public, il nous semble
que celle-ci doit également être légitimée. Légitime, elle l'est
assurément aux yeux des professionnels du monde de l'art mais
un profond doute subsiste quant au grand public. Le droit d'auteur
devrait peut-être se questionner sur la pertinence actuelle de
ces concepts fondateurs. Il pourrait alors en sortir un usage
des droits simplifiés. L'Europe et le mouvement d' harmonisation
juridique qu'elle insuffle est une autre justification à ce questionnement.
Il apparaît en effet que la législation française en matière de
droit d'auteur est une des plus protectionniste, ce qui à notre
époque est aussi rare que fragile. Si l'optimisme qui peut caractériser
certains idéalistes laisse à penser qu'une harmonisation européenne
se fera par le haut, le réalisme qui doit parfois s'emparer du
juriste nous pousse à ne pas sombrer dans les affres du chauvinisme
juridique. Le droit d'auteur français et par conséquent la contrefaçon
doivent peut-être s'assouplir pour espérer plus tard pouvoir préserver
l'empreinte de leur personnalité.
Sans une prise de conscience collective du préjudice crée par la contrefaçon,
celle-ci risque de se banaliser toujours plus. La prévention en
matière de contrefaçon est donc une nécessité.
Conclusion
Cette étude de la contrefaçon des œuvres d'art suscite deux types de réactions.
La première concerne la nécessité d'une réflexion globale de la société
sur la place occupée par l'art dans notre monde. En France
l'accès du public à l'art est facilité, entre autres moyens, par
l'existence de nombreuses manifestations culturelles ou la richesse
des collections nationales. L'état n'est évidemment pas le seul
à promouvoir l'art. Les radios, les chaînes de télévision, les
livres ainsi que l'ensemble des vecteurs de communication jouent
un rôle non négligeable dans la proximité relationnelle entre
l'art et le public.
Le
dénominateur commun de ces portes culturelles est leur faible
coût d'accès. Il est évident que le spectateur ne paie pas lorsqu'un
film est dévoilé à la télévision ou lorsqu'une chanson est diffusée
à la radio. C'est en effet à ces entreprises de trouver des subventions
ou de générer des recettes pour payer les droits d'auteur. Rares
sont donc les contacts entre la propriété littéraire et artistique
et le public. On comprend alors aisément le lien qui est fait
entre consommation culturelle et gratuité. Hélas cette conception
qui assimile l'art à un service public engendre des comportements
qui vont à l'encontre du but poursuivi par le droit d'auteur et
la contrefaçon. La société dans son ensemble doit donc s'interroger
sur le coût des œuvres d'art sous peine d'une lente asphyxie des
droits reconnus à l'artiste.
La seconde réaction a trait à la réalité de la contrefaçon des
œuvres d'art et plus précisément à la place tenue par ce phénomène
dans le cadre d'une politique criminelle.
A
l'heure actuelle il n'y a pas à proprement parler de politique
criminelle globale et cohérente en matière de contrefaçon des
œuvres d'art. Celle-ci est donc à inventer car le bon fonctionnement
de l'incrimination de contrefaçon est à ce prix.
Gageons
que le développement actuel des technologies saura convaincre
les pouvoirs publics d'envisager le phénomène de la contrefaçon
des œuvres d'art sous un aspect plus stratégique.
·
Art numérique: Des œuvres dont
la forme et le contenu sont, en partie ou totalement, le produit
d'un processus informatique.
·
Cyber-art: Art du cyberespace.
·
Cyberculture : L'ensemble des
techniques (matérielles et intellectuelles), des pratiques, attitudes,
modes de pensée et valeurs qui se développent conjointement à
la croissance du cyberespace.
·
Cyberespace : Terme utilisé
pour la 1ère fois en 1984 dans un roman de science
fiction et qui désigne l'espace virtuel (Internet par exemple)dans
lequel évolue la cyberculture.
·
Musique techno : Musique créée
à partir de l'échantillonnage (sampling) et du réarrangement des
sons, voire de morceaux entiers, prélevés sur le stock des enregistrements
disponibles.
·
Rap : Musique créée à partir
de l'échantillonnage (sampling), du réarrangement de sons prélevés
sur le stock des enregistrements disponibles, mais également de
véritables compositions originales sur laquelle un rappeur
parle en rythme de manière musicale.
·
Roman génératif : Roman généré
par ordinateur.
·
Sample: Echantillon d'une œuvre.
·
Sampling : Action consistant
à échantillonner des extraits d'œuvres (musicales, visuelles,
etc…), pour créer une infinité d'œuvres dérivées.
·
Piraterie :Au sens strict,
elle désigne la duplication non autorisée de sons contenus dans
un ou plusieurs enregistrements légitimes.
·
Paintbox: Boîte à dessin électronique
qui permet de créer numériquement des œuvres d'art mais également
des modifications graphiques de nombreux supports.
Documents officiels français
Lois
et règlements
§
Loi n°57-298 du 11 mars 1957;
§
Loi n°85-660 du 3 juillet 1985;
§
Loi n° 94-102 du 5 février 1994;
§
Loi n° 2000-516 du 15 juin 2000;
Propositions
et projets de lois
§
Projet de loi n° 3143, déposé à l'Assemblée
nationale le 14 juin 2001, disponible en ligne sous http://www.assemblee-nationale.fr/projets/pl3143.asp
;
§
Décret n° 2000-405 du 15 mai 2000,
J.O. n° 113 du 16 mai 2000.
Chroniques et articles
§
Balpe Jean-Pierre, Les concepts
du numérique, LCN, n°4-2000, p.13 ;
§
Bécourt Daniel, Commentaire
de la loi n°95-4 du 3 janvier 1995 sur la reprographie, D.1995,
commentaires législatifs p.59 ;
§
Bongiovanni Pierre, Création
artistique et révolution numérique, LCN, n°4-2000, p.37 ;
§
Bouzat Pierre, La présomption
de mauvaise foi en matière de contrefaçon de propriété littéraire
et artistique, RIDA, juillet 1972, n°73, p. 171;
§
Braun-Vega , Du style et
de l'image de marque, paroles d'artistes, nourritures du corps
et de l'esprit, Arts et lettres, n° 6, éd. Verso, 1997, p.
28 ;
§
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La problématique du watermarking, mai 2000, consultable
sous http://www-rocq.inria.fr/codes/Watermarking/intro.html
;
§
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LCN, n°4-2000, p.93 ;
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Rapports et journée
d'étude
Journée d'étude:
§
La protection des idées, Journées
d'étude Sitges du 4 au 7 octobre 1992 organisée par l'Association
Littéraire et Artistique Internationale, Publicaciones y Editiones
de la Sociedad General de Autores de Espana;
Rapports:
§
Rapport R. Béteille, doc.
AN n° 785, du 2 déc. 1993,
§
Rapport présidé par Sirinelli Pierre,
Industries culturelles et nouvelles technologies, La documentation
française, 1994 ;
§
Proposition de directive du 10 décembre
1997, COM (1997) 628 final: JOCE n° C 108, 7 avril 1998;
§
Proposition de directive du 25 mai
1999,COM (1999) 250 final: JOCE n° C 180/6, 25 juin 1999;
Jurisprudence française
Juridictions
judiciaires :
Premier degré, référés
- Trib.
civ. Seine, 2 juill. 1958, JCP, 1958 II 10762, obs. Plaisant;
- T.
corr. Lyon, 31 mars 1978, RIDA n°100, avr. 1979, p.218 ;
- T.
corr. Mâcon, 14 nov. 1962, D. 1963, jur. p. 710, note P. Greffe
;
- TGI
Paris, 10 mai 1980, RIDA juill. 1980, p.182 ;
- TGI,
21 janv. 1983, D. 1984, j. somm. comm., p. 286, obs. C. Colombet
;
- TGI
Paris 13 mars 1986, D. 1987, somm. 150, obs. Colombet;
- TGI
Paris, 3ème ch., 2 déc. 1993, inédit cité in Rapport
Sirinelli, note 25, p. 95 ;
- TGI
Paris, 13 sept. 1995, D., 1997, somm. 92, obs.
Cl. Colombet;
- TGI
Paris réf., 14 août 1996, Brel et Sardou, D. 1996, I, jurisprudence,
p. 493, JCP (G), 1996, II, n°22727 ;
- TGI
Paris réf., 3 mars 1997, D. aff, p.674 ;
- T.
com. Paris, ord. réf., 3 mars 1997, JCP 1997, éd. G, II-22840,
note F. Olivier et E. Barbry ;
- TGI
Paris, ord. réf., 5 mai 1997, JCP 1997, éd. (G), II-22906, note
Frédéric Olivier ;
- TGI
Paris, ord. réf. , 10 juin 1997, D.1997, p1156 ;
- TGI
Lyon, 1ère ch., 4 avril 2001, Buren et a c/ Tassin
et a, JCP (G), n°28, 11 juillet 2001, II, 10563,p.1377 ;
- TGI
Paris, 1ère ch., 1ère sect., 12 sept.
2001, Hugo contre SA Plon, JCP (G), n°49, 5 déc. 2001, II 10636,
p.2253 ;
Second degré:
- CA
Bourges, ch. acc. , 1er juin 1965, RIDA, n° LI, 1966,
p.40 ;
- CA,
Paris, 13ème ch corr, 27 janv 1994, Juris-Data n°
020123 ;
- Cass. com., 29 nov. 1960, Bull. civ. III, n.389 ;
- Cass.
1ère civ. 13 nov. 1973, D. 1974, 533, note Colombet
;
- Cass. civ.1er 6mars 1979, Bull. civ. I, n°82 ;
- Cass.1ère
civ. , 18 juillet 2000, JCP (G) n°26, 2001, II 10 555, p.1283
;
Sites Internet consultés
- Observatoire
des pratiques contrefaisantes sur Internet :
http://www.anti-piraterie.com.fr/;
- Sites
de documentation juridique:
http://www.légifrance.gouv.fr/
, http://www.petites-affiches.presse.fr/
, http://www.juriscom.net/
, http://www.canevet.com, http://www.planet.net/code-internet/
;
- Le
site du gouvernement consacré à la société de l'information:
http://www.internet.gouv.fr ;
Mémoires
et Thèses
- Gindre
Emmanuelle, L'Internet et le droit pénal, mémoire
de DEA droit pénal et sciences criminelles, sous la direction
de M. Didier Thomas, Montpellier septembre 2001 ;
- Hans
Sylvie, L'originalité au sens du droit d'auteur: contribution
à l'étude de la notion, thèse, Paris I, 1991;
- Lalignant
Olivier, La divulgation des œuvres artistiques et littéraires
en droit positif français, Paris 1983, LGDJ ;
- Raynard
Jacques, La contrefaçon de l'œuvre de l'esprit et l'adéquation
de la sanction pénale, mémoire de DEA droit pénal et sciences
criminelles, sous la direction de Mme Christine Lazerges, Montpellier,
octobre 1988.
Articles de presse
- Alberganti
Michel, Les industriels du disque intensifient leur combat
pour le droit d'auteur, trois questions à Christiane
Feral-Schuhl, Le Monde du 20 octobre 2000, p.33 ;
- Aubert
Fabrice, Des peines rarement appliquées, Le Monde
du 21 septembre 1998, p.34 ;
- Blumenfeld
Samuel, Guerrin Michel, "Le numérique, c'est l'ère
de l'hyperindustrialisation de la culture", Le Monde
du 26 novembre 1999, p.15 ;
- Blumenfeld
Samuel, Guerrin Michel, Le sacrifice de l'art? les œuvres
seront dupliquées, dématérialisées et admirées, Le Monde
du 26 novembre 1999, p.14 ;
- Communication,
Lionel Jospin contre les "prédateurs" numériques,
Le Monde du 14 février 2001, p.19 ;
- Hazan
Alain, La génération MP3 cherche ses marques juridiques,
Qui est responsable?, Le Monde du 21 juin 2000, p.3 ;
- Inciyan
Erich, La police française lutte avec difficulté contre
la "cybercriminalité", Le Monde du 22 septembre
1998, p.9 ;
- Kechichian
Patrick, Une atteinte inédite à la propriété littéraire,
Le Monde du 25 janvier 1996, p.28 ;
- Labbe
Christophe, Recasens Olivia, cyberdouaniers, Le Monde
du 22 juin 1998 , p.33 ;
- Lecluyse
Eric, L'industrie du disque tarde à prendre position
sur le Net, Le Monde du 21 juin 2000, p.2 ;
- Mlekuz
Nathalie, L'"œuvre" et le numérique, Le
Monde du 28 février 1996, p.3 ;
- Ros
de Lochounoff Nicolas, Internet, vers un goulag juridique
?, Le Monde du 1er février 1996, p.15 ;
TABLE DES MATIERES
SOMMAIRE
1
Liste des abréviations
et sigles utilisés
2
INTRODUCTION
4
PARTIE I : LES DIFFICULTES
D'ADAPTATION DE L'ACTION EN CONTREFAçON
a L'EVOLUTION DES
ŒUVRES D'ART. 12
CHAPITRE I : DIFFICULTES D'ADAPTATION DES CONDITIONS PERMETTANT A
UNE ŒUVRE D'ART D'ÊTRE PROTEGEE PAR LA CONTREFAçON.
13
Section
I : L'exigence désuète d'une œuvre d'art de forme originale.
13
I. Les difficultés d'application
du critère de forme à l'œuvre d'art.
14
2. Principe.
15
B.
Difficultés d'adaptation du principe de non protection des idées
à l'évolution des œuvres d'art .
17
II. L' originalité de
l'œuvre d'art: un critère en perdition.
18
A.Une notion subjective.
18
1. Une notion mal définie.
18
2. Les difficultés d'application de ce critère
aux œuvres d'art.
20
I. Limite due à un défaut
de titularité des droits.
23
A. Les auteurs et leurs ayants droit.
23
1. Les auteurs.
23
2. Ayants droit.
24
B. Les groupements.
25
1. Sociétés de gestion collective.
25
2. Groupements professionnels.
25
II.
Décalage entre les limites fixées par le droit d'auteur et l'évolution
technique et artistique.
26
A. Principe de libre reproduction
et libre communication. 26
B. L'inadaptation de la libre reproduction
à l'évolution artistique et technique. 28
CHAPITRE II : LES PROBLEMES D'APPLICATION
DE L'ACTION EN CONTREFAçON.
30
Section
I : Un délit mal adapté à l'évolution artistique et technologique.
31
I. Les éléments constitutifs
de la contrefaçon.
31
A. L'élément matériel de la contrefaçon.
31
1. Reproduction.
31
2. Communication.
33
B. La présomption de mauvaise foi.
34
1. Principe.
35
a.
Les sources de la présomption de mauvaise foi.
35
b. Le domaine de la présomption.
36
2. Le difficile
renversement de la présomption.
37
II. Une infraction
affaiblie par l'évolution artistique et technologique.
38
A. La protection de l'œuvre d'art menacée par l'évolution technologique.
38
B. L'évolution artistique
menacée par la contrefaçon.
39
1.
Le droit moral et l'évolution artistique.
40
2. L'inadéquation du critère de ressemblance.
41
Section II : Une répression affaiblie.
42
I. Une poursuite difficile.
43
A. Compétence et qualité pour agir.
43
B. Preuve
de la contrefaçon.
44
II. Des sanctions peu appliquées.
46
A. Peines principales rarement appliquées
dans la pratique. 46
B. Peines complémentaires spécifiques.
47
PARTIE
II: VERS UNE ADAPTATION DE L'ACTION EN CONTREFAçON AUX ŒUVRES D'ART.
49
CHAPITRE
I : VERS UNE ACTION EN CONTREFACON PLUS EFFICACE. 50
Section
I: Adapter l'action en contrefaçon à l'évolution artistique et
technologique.
50
I.
Une révision des conditions préalables à l'action en contrefaçon.
50
A. Pour un assouplissement de
l'exigence de forme originale.
50
B. Pour un renouvellement des exceptions au droit d'auteur.
52
II.
Une transformation de certains éléments de la contrefaçon et de
sa répression. 54
A. Harmonisation insuffisante
de la nature du droit d'auteur.
58
A. Un renforcement
de la coopération judiciaire internationale.
61
B. Un renforcement
de la coopération policière internationale.
62
CHAPITRE II: VERS UNE MEILLEURE PREVENTION.
65
Section
I: La prévention et les professionnels.
65
I.
Les techniques de protection.
I.
Une prévention en quête de légitimité.
69
A. Ne pas contrefaire:
un acte négatif.
69 B. Signaler les contrefaçons:
une action positive.
70
II. Les difficultés
en matière de prévention.
70
Conclusion.
72
LEXIQUE
73
BIBLIOGRAPHIE
75
TABLE DES MATIERES
85