I. AEROPORT ET DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE :
APPROCHE THEORIQUE ET METHODOLOGIQUE
D
epuis les années 1980, on assiste à une
transformation de l'appareil productif dans laquelle les fonctions de
production et de services industriels et tertiaires sont remplacés par
des fonctions de distribution et d'échanges qui, à l'approche du
marché unique et de la mondialisation, deviennent le moteur en terme de
croissance d'emplois et de locaux d'activités.
Avec la mondialisation des échanges et de
l'économie, les voies aériennes sont le moyen le plus efficace de
communication.
Les aéroports représentent alors de
véritables relais commerciaux pour les sociétés
internationales car ils favorisent largement la politique des flux tendus dans
les relations interentreprises.
A. L'aménagement du système
aéroportuaire : constitution d'un pôle de développement
économique
Le transport aérien répond à une nouvelle
stratégie d'entreprises. A côté des activités
aéroportuaires obligatoires (zones de fret, aérogares), de plus
en plus d'entreprises nationales ou internationales tournés vers les
échanges s'implantent sur ou au voisinage des grandes plates-formes
aéroportuaires. Le transport aérien constitue un vecteur
fondamental de pénétration commerciale.
La mondialisation de l'économie influence les
déplacements à longue distance, provoque une croissance des
relations interentreprises, une forte progression des activités de
service et une dispersion des entreprises individuelles.
Tous ces facteurs d'intensification des échanges
internationaux, d'intégration des préoccupations logistiques dans
les stratégies de production ou dans les stratégies commerciales
des entreprises font que le transport du commerce extérieur est devenu
un élément capital pour la compétitivité
économique.
Les transports aériens ont donc un poids
économique et un rôle stratégique importants dans
l'économie.
L'aéroport est un élément d'insertion
dans les échanges mondiaux : le transport aérien contribue par sa
rapidité à l'expansion internationale des entreprises tout en
rationalisant leur technique de gestion. De nombreuses entreprises souhaitent
donc implanter sur un aéroport, soit leur siège social, soit leur
direction à l'exportation.
Les ZALA (Zones d'Activités Liées à un
Aéroport) sont alors des centres de gestion, d'entreposage, de
manutention, de logistique des échanges, de transaction mais aussi des
parcs de bureaux et de conseil.
Pour répondre aux nouvelles stratégies des
entreprises, les autorités aéroportuaires lancent des programmes
de construction de bureaux "intelligents" de haut de gamme dont la
diversité des produits offerts visent à attirer les entreprises
internationales prestigieuses, des sociétés locataires à
forte valeur ajoutée et des sièges sociaux. Les grands
aéroports développent ainsi leurs capacités d'accueil et
de gestion aussi bien dans le domaine du tertiaire supérieur que dans
celui du fret et du transport de passagers.
Ces parcs d'affaires sont des lieux dotés de
système de communication et d'information par satellites. Ils permettent
aux entreprises dont les activités sont basées sur les
échanges d'être connectées à tout moment aux centres
décisionnels du monde entier.
La proximité d'un équipement
aéroportuaire est devenu essentielle pour les entreprises
« high tech » dans la mesure où le transport
aérien est devenu l'unique moyen de déplacement des hommes
d'affaires sur de grandes distances. Par conséquent les aéroports
fournissent des lieux de rencontre pour hommes d'affaires pressés
arrivant du monde entier. Ces hommes d'affaires se déplacent
d'aéroport en aéroport, y tenant leur réunion de travail
dans des locaux loués à cette fin.
Dans un système économique où le temps
représente de l'argent, des lieux de rencontres multiples permettent aux
hommes d'affaires et aux industriels d'éviter les pertes de temps de
l'accès aux centres des villes.
Dans le domaine du fret, les aéroports s'efforcent de
développer au mieux l'intermodalité du transport afin d'assurer
une connexion facile et très rapide entre les types de transport de
fret. Ils doivent avoir la possibilité d'implanter des activités
liées à une gestion compétitive du fret, des zones
d'entreposage et des bureaux.
L'aéroport tend ainsi à devenir un centre
logistique international performant (traiter comme un tout la circulation et le
stockage des matières, sorte de tertiarisation du transport dans
laquelle l'informatique et la télématique rendent possible une
utilisation plus judicieuse des infrastructures), un complexe
d'activités tertiaires situé sur un noeud de communication
très dense : un véritable pôle industrialo-tertiaire.
L'aéroport apparaît comme la promotion d'un noeud
de communication multimodal exceptionnel attractif pour les entreprises.
Par ailleurs, l'image de marque des espaces est de plus en
plus prise en compte par les entreprises quand elles cherchent à
s'implanter. Un environnement de qualité est une condition
impérative pour les entreprises internationales : l'entreprise a besoin
de donner d'elle-même une image de qualité et de modernisme,
facteur objet de succès commercial.
Les autorités aéroportuaires tentent ainsi de
donner un environnement de qualité (aménagement paysager et
urbanisme moderne) à leur plate-forme. Les aéroports offrent un
cadre de vie symbolique par leur modernité et attirent dans ce sens des
entreprises chères, concurrentes sur le marché mondial du
travail.
Pour être performants, attractifs et surtout
compétitifs, les grands aéroports internationaux doivent
posséder plusieurs équipements complémentaires et d'autres
atouts :
· la qualité des transports terrestres
· des infrastructures de télécommunication
performantes
· la présence d'un environnement professionnel
performant et prestigieux
· la qualité de l'habitat, du cadre de vie, des
loisirs et de l'environnement essentiels pour les cadres supérieurs.
· une fiscalité intéressante ainsi que le
coût d'une main d'oeuvre dynamique et abondante
Ces critères qualitatifs sont très importants
car la localisation près d'un aéroport pour
bénéficier spécifiquement de son usage, n'intéresse
qu'un panel restreint d'entreprises.
On assiste donc à l'installation
d'établissements sans liens directs avec le transport aérien.
C'est là que le pôle de développement agit : le transport
aérien n'est plus le facteur d'attraction, c'est le potentiel
économique du site, l'image, la présence d'entreprises
prestigieuses qui crée un marché économique plus vaste.
Véritables noeuds de communication, les
aéroports sont des pôles ou des outils de développement
économiques et entrent dans des logiques urbaines. Dans un contexte de
mondialisation de l'économie, l'importance des plates-formes
aéroportuaires est évidente, à la fois comme porte
d'entrée-sortie de territoires et comme lieux de polarisation et de
développement économique. Lieux de passage, lieux de travail,
lieux attractifs, les grands aéroports font l'objet
d'aménagements permanents aussi bien en leur sein qu'en
périphérie.
Les aéroports cherchent constamment à
développer leurs capacités pour augmenter leur trafic afin
d'augmenter l'attraction de leur pôle d'activités car plus le
trafic traité est important, plus les potentialités d'accueillir
des hommes d'affaires et des entreprises sont importantes et plus l'influence
économique du pôle est forte.
L'importance du pôle de développement
dépend en effet de l'importance du trafic : l'activité
aéroportuaire entraîne avec elle tout un territoire puisqu'un
emploi naît en dehors du site à chaque création de poste
interne. Comme chaque million de passagers supplémentaires
génère plus de 1000 emplois et que la croissance de ce trafic est
constante, le développement économique ainsi suscité
devient considérable.
Le territoire bénéficie aussi de ce
phénomène : un grand nombre de sociétés s'y
installent pour profiter de la proximité de ce carrefour aérien
dynamique. Le développement du système aéroportuaire
amplifie ses propres retombées économiques (emplois, flux
monétaires) et exerce une fonction d'aménagement constituant un
pôle attractif pour l'économie locale. Le secteur est alors
attractif aussi bien pour les grandes entreprises internationales que pour les
PME-PMI qui font gain du dynamisme du site et contribuent à
l'agrandissement du marché du travail.
La présence des PME, par ailleurs, est très
importante car elles sont la base du tissu productif régional et local.
Elles symbolisent un atout précieux pour les grandes entreprises car
elles constituent la richesse d'un environnement économique dans
l'espace, un support économique diversifié.
Les aéroports ont donc désormais une vocation
nouvelle, celle de porte d'agglomération et de porte régionale
sur l'extérieur, la vitrine internationale d'une métropole.
L'aéroport représente la volonté d'assurer à la
région une desserte aérienne de qualité et de contribuer
au développement du rayonnement international de ses activités.
Cependant, il est nécessaire de rappeler que le
développement économique autour de l'aéroport ne se
produit que s'il existe sur le site d'autres facteurs majeurs de
développement auxquels l'aéroport apporte de surcroît une
image valorisante.
La présence d'une infrastructure de transport est une
condition nécessaire mais non suffisante au développement
économique. La "qualité" des hommes et de leurs relations
prévaut sur les infrastructures et les équipements. Si
l'aéroport peut être l'élément initiateur du
développement, il ne peut le réaliser seul.
Les atouts nécessaires au développement
économique autour d'un site aéroportuaire (cités
précédemment) sont les conséquences non de
l'infrastructure seule, mais aussi du comportement des autorités
publiques cherchant à aménager et mettre en valeur le site. Les
aéroports sont donc un nouveau concept d'intercommunication et de
localisation des entreprises : le terme "d'aéroville" leur est
souvent attribué et met en valeur l'émergence de nouveaux
pôles prenant place sur des plates-formes aéroportuaires c'est
à dire un secteur où l'on peut faire l'objet d'un projet de
développement urbain et tertiaire à partir d'un potentiel
aéroportuaire, d'un noeud de communication multimodal.
Cet interport valorise le site aéroportuaire et lui
donne une valeur urbaine nouvelle. L'aéroville est comme son nom
l'indique une ville offrant autour de l'aéroport :
· des capacités d'accueil des entreprises
· un centre d'expositions
· des capacités hôtelières de grand
standing
· un centre de télécommunications
international
qui feront de l'aéroville une Z.T.A (Zone de
Télécommunications Avancée), mais aussi un centre
commercial luxueux, des équipements de loisirs, autres critères
de localisation des entreprises internationales.
L'aéroville est un secteur dans lequel la vie
professionnelle et sociale peut se dérouler sans quitter le
périmètre de l'aéroport. Cependant, le concept
d'aéroville est contesté en raison des lacunes existantes,
à savoir l'absence totale des résidences, l'absence de vie
sociale extra professionnelle et la sous-estimation des nuisances sonores.
Les caractéristiques de ces nouveaux pôles
industrialo-tertiaires se retrouvent dans plusieurs grands aéroports
internationaux. Même si les phénomènes observés
diffèrent géographiquement, on trouve dans l'environnement des
aéroports des activités tertiaires supérieures telles que
centres décisionnels des entreprises, services sociaux, centres
d'expositions, salles de congrès, de formations et de conférences
et centre logistique international.
Près de l'aéroport de Heathrow à Londres,
par exemple, se situe la prestigieuse opération de Stockley Park,
à dix minutes au nord de l'aéroport et sur un noeud de transport
routier avec un axe qui rejoint directement le centre de Londres. Le but de
l'opération est d'attirer des directions internationales et des
sièges sociaux internationaux d'entreprises industrielles et de services
dans un parc d'affaires de grande qualité, avec des espaces paysagers de
qualité.
CARTE N°1 : STOCKLEY PARK , DES LOCAUX
D'ACTIVITÉS À FAIBLE DENSITÉ INSÉRÉS DANS UN
CADRE PAYSAGER EXCEPTIONNEL ARTICULÉ AUTOUR D'UN GOLF 18
TROUS.
CARTE N°2 : STOCKLEY PARK À
PROXIMITÉ IMMÉDIATE DE L'AÉROPORT D'HEATHROW ET D'UN AXE
DE COMMUNICATION RELIANT RAPIDEMENT LE CENTRE DE LONDRES .
Près de l'aéroport de Schipol, à
Amsterdam, se trouve la ville nouvelle de Hoofddorp avec des parcs d'affaires
aux bureaux « intelligents » dominés par la
distribution et les compagnies aériennes. On y trouve un grand nombre de
sièges internationaux notamment dans les parcs d'affaires de Transpolis
et Commerce Center.
A Francfort, le Francfurt Airport Centre (FAC) regroupe 31000
m² de bureaux, un centre d'expositions permanentes. Le centre de
conférence constitue le succès du FAC grâce à des
rencontres de petits groupes d'affaires entre deux vols. Le FAC est de plus
très facilement accessible : seule une passerelle sépare le
centre du terminal.
L'aéroport de Francfort se situe sur un noeud routier
important où se situe une véritable ville logistique :
Kelsterbach. C'est un centre logistique international très important
séparé de l'aéroport en raison de la saturation spatiale
de la plate-forme, mais qui a permis à Francfort d'être leader en
Europe dans le transport aérien du fret.
A cinq kilomètres de l'aéroport se situe
également le pôle d'affaires de Niederrad qui accueille de
nombreux sièges sociaux d'entreprises internationales ayant des filiales
à l'étranger.
SCHEMA N°1 : LE FRANKFURT AIRPORT CENTER
COTOIE HOTELS ET TERMINAUX AEROPORTUAIRES ET ACCUEILLE LES HOMMES D'AFFAIRES
PRESSÉS DANS DES SALLES DE REUNION.
Carrefours de communication attractifs pour les entreprises,
les aéroports deviennent de plus en plus des pôles importants de
développement économique. Les autorités
aéroportuaires accompagnent le développement de leurs
capacités d'accueil par la réalisation d'opérations
immobilières qui offrent une gamme de produits très
diversifiés allant des entrepôts aux immeubles intelligents
groupés autour des téléports.
L'aéroport international représente donc
désormais un enjeu économique très important non seulement
pour les entreprises mais aussi pour les collectivités pour qui
l'aménagement de la plate-forme aéroportuaire représente
un enjeu économique et territorial certain.
B. L'aéroport : un enjeu économique
à tous les niveaux
L'aéroport représente donc un enjeu
économique très important. C'est un secteur qui va faire l'objet
d'un projet de développement économique et urbain à partir
du potentiel aéroportuaire.
Le transport aérien devient donc un outil
privilégié d'aménagement territorial de l'Etat et de la
Région mais aussi des collectivités locales qui cherchent
grâce à la proximité du pôle économique
à développer leurs ressources (dans toutes ses composantes).
L'intersection entre le développement local et l'aménagement du
territoire réside dans le fait qu'ils cherchent tous les deux à
influencer la localisation des entreprises et celle de l'emploi afin d'agrandir
leurs ressources. L'aéroport est donc concerné par tous les
échelons de l'administration territoriale.
Il sera fait dans cette partie, l'étude de
l'organisation spécifique des collectivités territoriales autour
de l'aéroport Charles de Gaulle.
1. Un développement économique dominé
par la volonté de l'Etat
L'aéroport international constitue désormais une
fonction économique nationale et internationale, il symbolise la porte
d'entrée européenne et internationale où figurent :
· l'accueil des visiteurs et des hommes d'affaires
étrangers
· un centre d'affaires et de rencontres
internationales
· une zone d'implantation d'entreprises
étrangères ou françaises ayant une forte activité
exportatrice
· une vitrine de la technologie et du savoir-faire
français
· un centre logistique international
Paris est en effet, dans le réseau mondial
aérien, une remarquable porte d'entrée en Europe et un atout pour
la France et le Grand Bassin parisien. Le Schéma Directeur de l'Ile de
France, a affirmé le rôle de l'aéroport Roissy-CDG dans
l'objectif d'ambition européenne qui a été retenu par
l'Etat.
Avec onze millions d'habitants, près de cinq millions
d'emplois et une production de l'ordre de 1700 millions de francs, l'Ile de
France constitue un puissant pôle de développement
économique. Entre l'Europe du nord et du sud, elle est un lieu
d'échanges privilégié innervé par un réseau
de communication dense (routes, chemins de fer (TGV),air).
De plus, l'aéroport Roissy-CDG est reconnu comme le
seul aéroport français à disposer d'espace pour se
développer et constituer ainsi un atout pour l'essor en Ile de France
des activités et services de haute valeur ajoutée.
La desserte aérienne de la région capitale est
donc d'un intérêt économique vital. Le pôle de
Roissy-CDG est reconnu par l'Etat comme un site stratégique de tout
premier ordre, un élément d'insertion économique dans les
échanges mondiaux. Le transport aérien international acquiert
donc un poids économique et un rôle stratégique importants
dans l'économie nationale :
ð il facilite le commerce extérieur et surtout les
exportations
ð il réalise des économies de devises
ð il assure le développement de branches
industrielles liées aux transports
ð il crée des emplois dans les activités de
transport et celles qui lui sont liées et dans les industries en
amont
Bref, il permet la réalisation d'une croissance
économique.
L'aménagement aéroportuaire révèle
donc un enjeu particulièrement important pour l'économie
française.
L'Etat qui est meneur de jeu de l'économie de son pays
(il est censé apporter les solutions optimales pour la
collectivité) est alors tout spécialement intéressé
par le développement de ce pôle qui permettrait de réaliser
une croissance économique au sein de sa région la mieux
équipée.
L'Etat est seul responsable de l'augmentation des
capacités en pistes et en aérogares, de la recherche d'une
amélioration de leur accessibilité par l'interconnexion des
réseaux de transports rapides et urbains sur le site, élargissant
ainsi leur rôle régional, national et européen. Dans les
pays à économie de marché, l'intervention de l'Etat est
capitale : un des domaines privilégiés d'intervention du pouvoir
concerne la réalisation des infrastructures, il en est le
propriétaire (ou l'actionnaire). L'Etat peut agir sur la localisation
des entreprises par l'intermédiaire des infrastructures de transport. Il
est l'acteur principal dans l'aménagement d'infrastructures de transport
visant à amorcer le développement d'un pôle
d'activités de si grande envergure.
Rappelons que l'enjeu européen conféré
à ce grand aéroport international répond également
à une stratégie économique d'avenir. En effet, les Etats
de l'Union Européenne perdront leur spécificité
économique, et s'unifieront en matière de politique fiscale,
monétaire et budgétaire. Les personnes, les capitaux et les
services seront de plus en plus mobiles et ressentiront moins les
frontières. Alors, de plus en plus, la bonne dotation en infrastructures
d'un pays deviendra un atout économique encore plus important, avec un
effet de localisation préférentielle par rapport aux autres pays.
Ainsi, dans un marché communautaire dont les règles de
fonctionnement échapperont de plus en plus aux Etats, la politique
d'infrastructures risque de devenir une des rares armes économiques dont
ils puissent disposer à leur gré et qui présentera pour
eux d'autant plus d'intérêts qu'elle est efficace.
Ainsi , en raison de leur rôle stratégique,
les aéroports ont souvent une personnalité juridique propre et un
statut public. Tel est le cas d'ADP (Aéroports De Paris) qui gère
les aéroports et aérodromes dans un rayon de 30 kilomètres
autour de Paris. ADP se comporte comme une entreprise commerciale très
dynamique. Son rôle d'acteur central et incontournable du site s'articule
autour de :
ð l'aménagement de l'ensemble socio-technique du
site
ð la responsabilité du développement et de
la bonne intégration dans l'environnement
ð la gestion au quotidien de la qualité de vie
ADP est chargé de l'aménagement de la
plate-forme aéroportuaire et de sa gestion. Et bien qu'ADP n'ait pas de
responsabilités en matière d'aménagement en dehors de ses
plates-formes, ses options s'organisent autour de 2 idées
force :
ð le développement de la capacité de
l'aéroport avec la volonté d'assurer à la région
une desserte aérienne de qualité et de contribuer au
développement du rayonnement international de ses activités
ð l'assurance d'une synergie entre le
développement aéroportuaire et les activités
environnantes
Cependant, si ADP a une personnalité juridique et
fonctionne comme une entreprise commerciale privée, cette
société n'est que l'instrument mis en place par l'Etat pour
gérer et développer efficacement ses aéroports. Les
objectifs de l'Etat sont imposés à ADP et définis dans des
contrats pluriannuels (plans quinquennaux) que l'entreprise doit respecter. La
domination de l'Etat dans le développement et la gestion des
aéroports est là aussi très explicite.
L'exemple de Roissy en France est très : la
réalisation des projets d'aménagement sur le territoire communal
de Roissy en France a toujours été lancée par ADP sans
jamais aucune concertation avec la municipalité roisséenne. ADP
est souveraine sur la plate-forme aéroportuaire au sein de laquelle la
décentralisation n'existe pas, l'entreprise fait absolument de qu'elle
veut. Elle a récemment autorisé la construction du
« hub » FEDEX sur les terres roisséennes et dans le
périmètre des sites historiques communaux et ce, sans aucune
concertation avec la municipalité.
Pourtant, outre l'Etat qui domine l'économie de son
pays par l'aménagement de grandes infrastructures de transport, d'autres
collectivités sont dotées de compétences en matière
d'aménagement et de développement économique autour de
l'aéroport.
La loi du 2 mars 1982 relative « aux droits et
libertés des communes, départements et régions »
lance la décentralisation. Ces trois échelons territoriaux
deviennent des collectivités territoriales de plein exercice et
concourent avec l'Etat à l'administration et à
l'aménagement du territoire, l'Etat gardant néanmoins un droit de
contrôle et un pouvoir de décision toujours peu discutable.
2. Un outil pour le développement
régional
Un aéroport tel que Roissy-CDG représente un
formidable outil d'aménagement pour l'espace régional. Les
possibilités de développement du pôle de Roissy-CDG sont un
atout majeur pour l'Ile de France et ses enjeux urbanistiques et
économiques. Ce secteur deviendrait l'un des principaux moteurs du
développement économique de la région qui lui permettrait
de renforcer la position du Bassin Parisien comme future plaque tournante de
l'Europe et participerait au rééquilibrage de la région au
Nord-Est caractérisé par un fort déficit d'emplois.
L'aéroport, lui-même pôle industriel a un
effet multiplicateur sur l'économie de la région, il en
émane une forte attraction vis à vis des zones
d'activités. Dans l'ensemble, les infrastructures de transport suscitent
le développement de leur voisinage soit par croissance sur place des
entreprises déjà installées, soit par localisations
nouvelles. La région doit ainsi aménager sur son site les
principaux facteurs de localisation des entreprises :
ð l'amélioration de l'accessibilité
générale de tout le secteur de Roissy-CDG
ð programmer des grands équipements et des
structures d'accueil pour les activités high-tech
ð valoriser le cadre de vie générale
ð offrir un marché de qualité et une main
d'oeuvre abondante
L'aéroport matérialise par ailleurs la porte
régionale et la porte d'agglomération grâce à
l'interconnexion des réseaux de transport qui permet à la fois
une meilleure accessibilité réciproque de l'aéroport et de
sa région et une extension des aires d'attraction.
La fonction régionale réside donc dans le
développement des capacités de ce pôle de
développement économique situé sur un noeud de
communication exceptionnelle relié aux autres pôles de
développement et qui alimente l'ensemble de l'espace régional.
La fonction logistique de ce secteur s'avère
très importante. Les infrastructures de transport aérien sont une
opportunité pour l'essor régional et nécessitent des
actions spécifiques d'accompagnement.
La région est ainsi dotée de compétences
en matière d'animation et de planification du développement
économique de son espace depuis le transfert des préoccupations
territoriales vers les niveaux décentralisés de
collectivité publique.
La région est dès lors une collectivité
chargée de l'avenir puisqu'elle est compétente en matière
de planification économique, de programmation des équipements,
d'aménagement du territoire. C'est un organe de réflexion,
d'incitation et d'impulsion indépendant.
Cependant, les compétences de la région Ile de
France connaissent néanmoins des limites. Si la loi du 2 mars 1982 sur
la décentralisation a donné compétence à la
région pour promouvoir l'aménagement de son territoire, les
moyens juridiques de cet exercice restent du domaine de l'Etat. La
région n'a qu'un rôle consultatif à l'élaboration de
son SDAU (Schéma Directeur d'Aménagement et d'Urbanisme), tout
comme le reste des collectivités.
L'Etat, pour qui le développement de Roissy-CDG est de
première importance, a le pouvoir de décision suprême. La
région conduit tout de même sa propre réflexion en
matière d'aménagement et d'urbanisme. Elle s'est dotée
d'un chargé de mission pour le pôle stratégique de
Roissy-CDG qui exprime pour elle un outil privilégié du
développement régional dans toutes ses composantes.
L'enjeu économique que représente
l'aéroport concerne aussi les collectivités qui sont directement
touchées par les mesures de développement et d'aménagement
prises par le pouvoir central. Il s'agit des collectivités locales pour
qui le développement à venir doit avoir un effet
d'entraînement sur « l'amélioration » des
conditions de vie de la population locale.
3. Une préoccupation majeure pour les
collectivités locales
Les collectivités locales bénéficient
aussi de la décentralisation qui leur confère la gestion de
l'aménagement de leur territoire. La fonction locale est donc de
profiter du dynamisme économique engendré par le pôle de
Roissy-CDG. En effet, les noeuds de transports sont importants pour les
collectivités locales car ce lieu d'interconnexion est un
élément susceptible de véhiculer une image identitaire
forte et d'être saisis comme opportunités de valorisation
foncière.
Des projets de développement urbain sont mis en place
autour des aéroports car le milieu est favorable au développement
économique. L'objectif pour ces collectivités est de mettre en
place par l'intermédiaire du développement économique une
qualité de cadre de vie et des services pour l'ensemble des habitants et
des actifs du secteur. Il s'agit d'améliorer la
compétitivité et l'attrait du territoire, favoriser
l'intégration économique et la cohésion sociale.
En général, les élus locaux jouent la
carte de la revitalisation des milieux des PME, développent l'action sur
le terrain des services aux entreprises. Les collectivités locales sont
ainsi chargées de :
· connaître le milieu économique urbain
· promouvoir la ville et prospecter auprès
d'entreprises nouvelles
· défendre et développer l'emploi
On assiste alors à une volonté de valorisation
économique des ressources locales de la part des élus dans la
politique d'aménagement et d'équipement qui est tourné
vers l'accueil d'entreprises (Z.A. et Z.I.), le soutien aux initiatives locales
créatrices d'activités.
Les villes ont toujours cherché à attirer des
activités économiques, elles investissent dans des structures
d'accueil aux entreprises pour augmenter les ressources fiscales locales mais
doivent aussi développer l'accessibilité de leurs structures afin
qu'elles soient réellement attractives.
Les pouvoirs publics locaux ont donc un rôle d'animation
économique et sociale qui repose sur la connaissance des projets et la
mise en relation des acteurs. Le développement local est en effet,
étroitement lié aux liens qui s'établissent entre les
différents agents économiques, publics et privés. En
résumé, de par leur vocation à prendre en charge
l'intérêt public local, les collectivités locales
interviennent dans la vie économique pour un objectif : le
développement local dans toutes ses composantes.
Les services publics locaux apportent ainsi satisfaction aux
besoins collectifs de la population et au bon fonctionnement des
entreprises.
On comprend aisément pourquoi l'aéroport de
Roissy-CDG et l'enjeu économique qu'il représente rendent les
collectivités environnantes très entreprenantes. Le secteur de
Roissy-CDG constitue pour elles une préoccupation majeure dans la mesure
où les conditions propices au développement local sont optimales.
Les facteurs de valorisation économique sont en effet bien
présents :
· la proximité d'un marché professionnel
de plus en plus important et de qualité
· la proximité de grands axes de communication
qui offre au secteur une très bonne accessibilité
Les collectivités locales sont
représentées par plusieurs divisions administratives dont les
idées-forces sont semblables.
Il s'agit des départements, des communes, des
structures intercommunales mais aussi d'associations diverses.
Le département ne dispose
d'aucune compétence en matière d'aménagement, c'est une
collectivité gestionnaire, tournée vers les services et les
actions de solidarité en matière d'aide sociale, d'enseignement,
de logement, de développement économique, de voiries, de
transports. Le département a aussi un rôle consultatif à
l'élaboration du SDAU, sa consultation est obligatoire pour
l'élaboration des schémas locaux émanant des communes.
Au niveau départemental, le développement
économique est souvent pris en charge par les Comités
d'Expansion. Financés en grande partie par les Conseils
généraux, ils sont les spécialistes de l'aide aux
infrastructures, de l'accueil des entreprises, de l'image du département
et de l'assistance technique auprès du Conseil général
pour traiter les dossiers d'aide aux entreprises. Les comités
d'expansion développent aussi des actions de conseil à la
création et à la gestion d'entreprises.
Le rôle de ces comités est donc de dynamiser
l'expansion économique de leur département, dynamiser les actions
et pousser à la coopération, rendre visibles et intelligibles les
structures et les acteurs économiques locaux et systématiser,
pour les rendre plus efficaces, les relations entre partenaires
économiques locaux.
Les communes sont responsables de
l'aménagement de leur territoire. La compétence en matière
d'élaboration et d'approbation des schémas directeurs et des POS
leur est transférée. Elles sont chargées de la gestion des
équipements locaux et de la maîtrise de leur sol. Circonscriptions
administratives de l'Etat, de proximité ou de contact, les communes se
chargent de l'intérêt public communal par l'intermédiaire
du développement économique.
Les structures intercommunales sont un
moyen d'accroître l'influence des collectivités locales qui
jouissent par ces structures de moyens légaux de regroupement pour
promouvoir leurs propositions d'aménagement (schémas locaux
d'aménagement). Les structures de coopération intercommunale sont
une mise en commun des moyens techniques et humains, un partenariat qui
concrétise, entre certaines collectivités locales, une
communauté d'intérêts économiques, sociaux,
culturels définissant un projet commun de développement.
L'intercommunalité propose une solution au morcellement
extrême des communes en France, mais elle permet aussi une
répartition équitable des retombées économiques sur
les communes : les inégalités de richesses fiscales entre
collectivités locales apparaissent comme un obstacle au
développement local, dans la mesure où elles avantagent les
collectivités les mieux dotées en entreprises. La
coopération intercommunale peut être aussi une solution aux
concurrences généralisées entre les politiques publiques
locales.
La loi ATR (Administration Territoriale de la
République) du 6 février 1992 a crée deux
catégories nouvelles d'établissements publics de
coopération intercommunale : les communautés de villes et les
communautés de communes. La loi réside dans un couplage entre
réforme territoriale et réforme fiscale.
La communauté de communes par exemple, a pour but
d'associer les communes au sein d'un espace de solidarité, en vue de
l'élaboration d'un projet collectif de développement et
d'aménagement de l'espace. Le fonctionnement se caractérise par
une spatialisation plus adéquate des compétences
économiques et d'aménagement de l'espace, une fiscalité
propre et un système de redistribution partielle de la Taxe
Professionnelle aux communes membres.
Il existe par ailleurs, de petites organisations qui
travaillent à agrandir les ressources locales liées au tissu
économique : des lieux d'échanges horizontaux se constituent sous
forme d'associations, de clubs d'entrepreneurs, de comités de bassin
d'emploi ou de comités locaux d'expansion afin de produire des
stratégies de développement en faveur du milieu local.
Il apparaît ainsi clairement que depuis la loi sur la
décentralisation de 1982, les collectivités territoriales sont de
plus en plus responsables de leur aménagement et notamment de leur
développement économique. Cependant, l'Etat reste l'indiscutable
responsable de la politique économique et social. Et si les lois de
décentralisation, la loi sur la coopération intercommunale ont
été crées sur l'initiative de l'Etat et confèrent
aux collectivités un pouvoir administratif certain, c'est pour mener une
politique économique et sociale plus performante intégrant les
divers enjeux nationaux, régionaux et locaux.
Les comportements des collectivités locales
s'avèrent tout de même fondamentaux. Tous les acteurs sont
conscients de l'obligation qu'il y a de concilier le développement local
avec des stratégies qui relèvent d'intérêts
régionaux et internationaux. Les collectivités concourent alors
avec l'Etat à l'administration et à l'aménagement du
territoire.
L'Etat intervient par exemple dans l'économie locale
par l'intermédiaire des aides à l'entreprise (très
importantes pour les collectivités locales). Le FRILE (Fonds
Régional d'aide aux Initiatives Locales pour l'Emploi), la Prime
Régionale à la création d'entreprises, la Prime
Régionale à l'emploi concernent les municipalités mais
c'est la Région et l'Etat qui ont un rôle prioritaire pour les
aides. On a en effet un quasi-monopole régional en matière
d'aides directes aux entreprises (très utile pour la localisation des
entreprises) mais la région ne peut agir qu'en coordination
étroite avec l'Etat.
Autre exemple : les schémas directeurs locaux doivent
être impérativement compatibles avec le SDAU régional qui
traduit essentiellement les enjeux définis par l'Etat. Le préfet
est chargé de contrôler cela.
L'entreprise joue donc un rôle très important
dans le développement économique bien sûr, mais aussi dans
l'aménagement du territoire. Un secteur ne peut être
économiquement attractif que s'il dispose d'un réseau
d'entreprises performantes permettant l'existence d'un dynamisme
économique. L'aménagement du pôle de Roissy-CDG
répondant à un enjeu économique de tout premier ordre, la
qualité des entreprises présentes sur le site redouble
d'importance.
4. Un secteur au service d'entreprises performantes et
modernes
L'entreprise est facteur d'organisation de l'espace car elle
provoque des flux qui vont déterminer les lieux environnants. Il
apparaît clairement que la valeur des entreprises et des relations
qu'elles ont entre elles va avoir des conséquences qualitatives sur
l'organisation de l'espace.
Avec la mondialisation des échanges et de
l'économie, les voies des airs sont les moyens les plus efficaces de
communication, les abords des aéroports sont devenus de
véritables relais pour les entreprises internationales utilisant les
modes de gestion et de fonctionnement les plus modernes et les plus
performants. La rapidité du transport aérien et le cadre de vie
moderne symbolique des aéroports sont facteurs d'attraction vis à
vis des entreprises internationales high-tech.
Il s'agit donc de profiter de ce nouveau rôle
qu'acquiert le système aéroportuaire afin de développer
à partir de ce potentiel un projet d'aménagement de pôle
économique. Cet aménagement consiste à développer
la possibilité d'implanter des activités, des entrepôts et
des bureaux au service des entreprises internationales : sont alors
lancés des programmes de bureaux « intelligents »
pour des entreprises de haute technologie, des centres d'exposition, des
capacités hôtelières avec salles de conférence ; les
produits offerts et leur fonctionnement étant les plus performants
possibles pour une attraction optimale vis à vis du marché
mondial.
Le but est donc d'attirer dans le secteur des entreprises
internationales exportatrices à haute valeur ajoutée afin
d'aboutir vers un grand pôle tertiaire de renom international, un
pôle de croissance et de développement dont les effets
d'entraînement pourront se diffuser à travers un espace
très large.
Le secteur s'efforce donc de posséder tous les atouts
favorables à la localisation des grandes entreprises de haute
technologie, à savoir des infrastructures de
télécommunication performantes, la qualité des transports
terrestres, une image valorisante du site, une main d'oeuvre abondante et
dynamique, la qualité de l'environnement, la présence d'un
environnement professionnel performant et prestigieux, un habitat de
qualité et des parcs de loisirs.
Ce secteur affiche donc la volonté de renforcer
l'attrait de l'espace géographique gravitant autour de
l'aéropôle. Ainsi la présence d'entreprises modernes et
performantes détermine la qualité de l'espace environnant.
Même si l'aménagement territorial du pôle
de Roissy-CDG est largement dominé par la volonté de l'Etat, il
constitue néanmoins un enjeu à tous les échelons de
l'administration française et notamment pour les collectivités
locales pour qui l'aéropôle exprime une formidable
opportunité de développement local. Ainsi, avant d'étudier
les effets économiques de l'aéroport de Roissy-CDG sur les
collectivités locales, nous allons procéder à la
description de la plate-forme aéroportuaire pour mieux comprendre
l'importance économique du site.
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