L'existence d'une conception des droits de l'homme propre aux états musulmanspar Peggy Hermann Faculté de Droit de Montpellier 1 - DEA de Droit International 1999 |
TITRE II : La limitation de la portée universelle des droits de l'Homme par les Etats musulmansL'Islam fondé sur des principes éternels, n'est compatible avec rien d'autre qu'avec lui-même. En ce sens, il refuse, rejette et combat jusqu'au bout l'universalité des droits de l'Homme - conception laïque - ( Chapitre I). Mais les Etats musulmans dynamiques, s'adaptent à des environnements très différents et à des circonstances historiques changeantes. Ils se sont révélés compatibles avec les principaux types d'Etat et les formes diverses d'organisation sociale que l'histoire a produit. De même que l'Islam en tant que religion appartenant à l'histoire mondiale s'étendant sur quatorze siècles, a incontestablement réussi à s'implanter dans une grande diversité de société, de culture, de mode de vie. Une nouvelle fois, comme souvent au cours de l'histoire, les Etats musulmans sont appelés à s'adapter à une situation inédite et aux défis de la modernisation. Ils sont prêts à consentir à l'universalité des droits de l'Homme. ( Chapitre II). Chapitre I : Une hostilité de principeLes Etats musulmans vont pouvoir s'adapter et accepter l'universalité des droits de l'Homme tout en observant un sentiment de méfiance en toutes circonstances. S'ils en relativisent la portée, il n'y a rien qui puisse empêcher les Etats musulmans de consentir à l'élaboration du corpus juridique de l'universalité des droits de l'Homme. Section I : L'élaboration du corpus juridique de l'universalité des droits de l'Homme§ 1 : La difficile universalitéLes droits de l'Homme se sont forgés à travers l'histoire et depuis la philosophie grecque. Il serait erroné de nier l'apport du siècle des Lumières et de la Révolution française de 1789, et par conséquent de nier l'apport de l'Occident dans la formulation universaliste des droits de l'Homme. Il est intéressant de relever que ce long processus d'universalisation a avancé de façon lente sur le plan conceptuel ( A). Sur le plan de l'effectivité, les droits de l'Homme ont connu des progrès ainsi que des reculs qui ont marqué l'universalité qui reste encore aujourd'hui inachevée (B).
Même si les développements conceptuels en matière de droits de l'Homme ne sont pas véritablement parvenus à une universalisation matérielle, il existe un consensus international sur l'universalisation du noyau dur, un standard minimum impératif en tout lieu et toutes circonstances. En dépit des divergences qu'on a signaler plus haut, on a vu émerger progressivement un noyau restreint de valeurs et de droits universellement admis par tous les Etats. Le problème d'un noyau intangible des droits de l'Homme inclut la question relative à une priorité de certains droits par rapport à d'autre. La définition de ce noyau intangible des droits de l'Homme ne va pas pourtant sans difficulté. Existe-t-il des droits auxquels les Etats ne peuvent déroger quelles que soient les circonstances, droits qui seraient considérés- selon la définition donnée par le professeur Frédéric Sudre - comme les droits constituants «les attributs inaliénables de la personne humaine, fondés comme tels sur des valeurs que l'on retrouve en principe dans tous les patrimoines culturels et systèmes sociaux »58(*), droits applicables à toute personne quelles que soient les circonstances de temps et de lieu ? La réponse est certainement négative en raison de la cohérence et de l'indivisibilité des droits de l'Homme liées à l'intégrité de la personne humaine. Cette indivisibilité et cette unité des droits de l'Homme ont d'ailleurs été consacrées dans la Proclamation de Téhéran adoptée à l'unanimité par la Conférence internationale des droits de l'Homme en 1968 annonçant dans son article 13 que les droits de l'Homme et les libertés fondamentales sont indivisibles. Il n'existe pas, en droit international des droits de l'Homme, de hiérarchie des droits. Mais la législation internationale relative aux droits de l'Homme a été marquée par une séparation, à la fois artificielle et trompeuse, entre les droits civils et politiques, d'une part, et les droits économiques, sociaux et culturels, d'autre part. Il est indéniable que les droits économiques sociaux et culturels ont bénéficier de moins d'attention de la part des Nations-Unies et de ses organes constitutifs. Les normes adoptées dans ce domaine ainsi que les mécanismes destinés à les faire appliquer sont beaucoup moins développés. Or la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme appelle" tous les individus et tous les organes de la société" à apporter leur contribution au respect universel des droits de l'être humain. Chaque pays n'a pas les mêmes priorités concernant les droits de l'Homme. Il est difficile d'imaginer que dans un pays sous-développé, les gouvernants vont proclamer un droit à la liberté d'expression, alors que la presse et les autres moyens de diffusion d'information n'existent pas réellement. Leur priorité serait pour un droit en développement. Apparaissent surtout sur le plan international, les obstacles de l'application des droits de l'Homme. Comment tendre le mieux possible vers cette universalisation des droits de l'Homme ? Pour cela, les Nations-Unies ont élaboré des instruments internationaux spécifiques aux droits de l'Homme.
* 58 Sudre (Frédéric), Droit international et européen des droits de l'Homme, P.U.F, 1997, p.20 |
|