La spécialisation fiscale, éléments de refondation de l'action publique locale: reflexion sur les concepts d'efficacité et de gouvernance territorialepar Bajer Joma Amada Université Aix-Marseille 3 - 2005 |
PREMIÈRE PARTIE : LES FINANCES LOCALES : MIROIR DES DEFIS ET DES ENJEUX DE LA NOUVELLE ACTION PUBLIQUE LOCALELa notion de « action publique locale » est passée de la phase de concept à celle de réalité. Nous nous proposons de réfléchir ici sur les incidences de cette notion en matière de finances et de fiscalité locale. En fait, on peut très vite se rendre compte que la volonté politique qui a accompagné le processus de décentralisation en France s'est manifestée, dans le domaine de la fiscalité locale, par une certaine prudence de la part du législateur à ne pas trop renforcer les pouvoirs des institutions politiques locales. Et pourtant, il est difficile de poser la question de l'action publique sans poser celle de l'impôt. En effet, cette question concerne aussi bien l'efficacité de l'action que la problématique de la gouvernance des institutions locales. En survolant tous les questionnements relatifs à la faiblesse de volonté politique dans le renforcement du processus de décentralisation par une nouvelle architecture financière et fiscale locale (Chapitre 1), on peut prendre toute la mesure de l'urgence et de la nécessité d'engager une véritable réforme qui répond aux défis actuels de la décentralisation. Des défis nés de l'affirmation du concept de politique publique locale (Chapitre 2). Compte tenu de ces nouveaux défis mais aussi de l'urgence et de la nécessité de réformer en profondeur la fiscalité locale, il apparaît que la spécialisation fiscale répond plus ou moins parfaitement à de nombreuses problématiques propres à cette nouvelle action publique locale. CHAPITRE 1. FINANCES ET FISCALITÉ LOCALES, LES PARENTS PAUVRES DE LA DECENTRALISATIONNotre réflexion sur la spécialisation fiscale part d'un constat simple et partagé par tous les observateurs : la décentralisation à la française ne cherche pas à transformer les collectivités locales en institutions politiques à part entière à l'instar des régions espagnoles et italiennes ou des landers allemands. C'est comme si l'Etat décentralisateur a tenté de répondre à certaines questions conjoncturelles sans réellement vouloir prendre la mesure des nouvelles contraintes qui s'imposent à l'action publique. En effet, la réflexion et les débats sur la décentralisation ont toujours porté sur la relation exclusive Etat- Collectivités territoriales alors même que les nouvelles contraintes de l'action publique sont souvent issues de la mondialisation ou de la construction européenne. C'est la raison pour laquelle après avoir posé le diagnostic actuel de la fiscalité locale (Section 1 ), nous nous efforcerons de situer la question fiscale dans une perspective globale qui est celle de l'avenir de la fiscalité locale (Section 2 ) et l'affirmation du concept d'action publique locale. Section 1. Les fondements de la fiscalité localePour mieux appréhender les problématiques actuelles en matière de fiscalité locale, il faut situer celle-ci dans leur contexte d'évolution historique. En effet, la fiscalité locale est un aspect de l'évolution historique de la fiscalité nationale qui est elle-même un aspect de l'évolution de la démocratie et du contexte politique général en France. C'est seulement sur la base de ces éléments que l'on peut comprendre pourquoi la spécialisation fiscale ne constituerait pas une révolution intégrale mais plutôt un aspect de l'évolution compte tenu du contexte politique et institutionnel actuel. §1. Origines et fondements de la fiscalité locale Les origines et les fondements de la fiscalité locale en France, sont liés à l'histoire de la décentralisation. On peut dire que, paradoxalement, celle-ci occupe une place centrale dans le projet politique lié à la volonté de décentralisation sans que, pour autant, la réalisation concrète de ce projet ces vingt dernières années soit accompagnée d'une véritable reconnaissance de l'autonomie financière et fiscale des collectivités locales. A ce sujet, la problématique de l'autonomie fiscale des collectivités locales est révélatrice de l'état du processus de décentralisation. Il faut reconnaître que toute l'ambiguïté de cette question provient de ce que l'on n'est pas en mesure de situer les enjeux. Autrement dit, s'agit-il de l'autonomie financière ou bien de l'autonomie fiscale ? Bien évidemment, nous pensons que les deux sont liées. Cependant, il existe un courant que l'on peut qualifier de minimaliste qui pose seulement la question des marges de manoeuvre financières et budgétaires des collectivités locales comme une fin en soi et qui considère, de ce fait, que l'autonomie financière est un moyen d'augmenter ces marges. Pour les tenants de ce courant, l'autonomie fiscale n'est pas une nécessité. Par ailleurs, un autre courant envisage l'autonomie financière et l'autonomie fiscale comme à la fois liées et comme moyens de faire émerger un véritable pouvoir institutionnel local. Pour les partisans de ce courant, il faut dépasser la simple problématique financière et engager une véritable réflexion politique sur le rôle et la place des collectivités locales dans la conception et la réalisation des politiques publiques. On pourrait même affirmer que l'autonomie financière est une condition de l'autonomie fiscale. D'ailleurs, en posant la question des origines et des fondements de la fiscalité locale, on se rend bien compte que si les collectivités locales ont pu acquérir certaines prérogatives qui ont renforcé leur autonomie financière, l'organisation actuelle, le fonctionnement et la nature même de la fiscalité locale semblent constituer un véritable frein au renforcement des pouvoirs locaux. On rappelle ici que la fiscalité locale est constituée d'impôts directs et d'impôts indirects. Puisque la problématique centrale de notre travail ne porte pas sur la fiscalité mais sur la capacité de celle-ci à impulser une refondation de l'action publique locale, il ne sera pas de notre propos de mener une réflexion exhaustive et détaillée sur l'ensemble des impôts locaux. D'ailleurs, la plupart des analyses portera sur la seule fiscalité directe et notamment ce que l'on appelle les quatre « vieilles » constitués par : · La Taxe Professionnelle (TP) · La Taxe d'Habitation (TH) · La Taxe Foncière sur les Propriétés non bâties (TFPNB) · La Taxe Foncière sur les Propriété bâties (TFPB) L'ensemble des impôts directs locaux constitue la ressource principale des collectivités locales. Au sein de ces impôts, les quatre vieilles représentent plus du tiers des recettes budgétaires des communes et plus de 80% de leurs ressources fiscales. En ce qui concerne les départements et les régions, ces quatre impôts représentent environ respectivement plus de 65% et plus de 55% des ressources fiscales. On verra au cours de nos développements que parmi les critiques faites à ces quatre impôts, il y a leur archaïsme. En effet, l'histoire des quatre vieilles est très ancienne. Elle trouve ses origines à la Révolution française. A l'origine, il s'agissait d'impôts d'Etat qui ont été transférés par la suite aux collectivités locales. Le principe politique qui a sous tendu la création de ces impôts est l'égalité. L'objectif était de supprimer les impôts indirects de part leur absence d'équité. En d'autres termes, les quatre grands impôts directs devaient imposer l'ensemble des citoyens sans distinction d'ordre social. Il est particulièrement intéressant de s'arrêter sur le cas de la Taxe Foncière. Impôt issu d'une période pendant laquelle les idées économiques étaient dominées par thèses des physiocrates pour lesquels, la source de la richesse nationale résidait dans l'agriculture, cet impôt correspondait à une époque qui est bien évidemment révolue depuis très longtemps. Et pourtant, la nature et la substance même de la taxe foncière sont restées inchangées. Mais en même temps, toutes ces raisons nous renseignent sur les motivations de l'Etat de transférer aux collectivités territoriales des impôts qui n'étaient pas rentables. Ø La Taxe Foncière sur les Propriétés bâties La Taxe Foncière sur les Propriétés bâties ne semble pas présenter un handicap particulier. Représentant le quart du produit global des quatre taxes, elle est due par tous les propriétaires fonciers à l'exception des propriétés de l'Etat, des régions, des départements, des communes et de certains établissements publics lorsque ceux-ci sont affectés à un service public ou d'utilité générale non productif de revenu. Par ailleurs, les édifices de culte, les ambassades, les bâtiments ruraux à usage agricole en sont également exonérés. D'une manière temporaire, les constructions nouvelles et certaines entreprises nouvelles ne paient pas la taxe foncière. On fait remarquer enfin que le système d'exonération et de dégrèvement est plus complexe que cette présentation. D'autres types d'exonérations de taxe foncière sur les propriétés bâties sont prévus par la loi. Le lieu d'imposition de la taxe foncière sur les propriétés bâties est la commune où est situé le bien. Sa base d'imposition est constituée par la moitié de la valeur locative. A cette valeur locative, chaque commune applique le taux qu'elle a décidé. Ø La Taxe Foncière sur les Propriétés non bâties Représentant environ 1,5% du produit total des quatre taxes, la taxe foncière sur les propriétés non bâties est due par les propriétaires de terrains. La base d'imposition est constituée, comme pour la taxe foncière sur les propriétés bâties, de la valeur locative mais diminuée d'un abattement de 20%. A cette base, la collectivité applique son taux d'imposition. La Taxe d'Habitation représente environ 20% du produit des quatre taxes. Elle est due par tous les occupants propriétaires ou locataires d'un local à usage d'habitation. Sa base d'imposition est constituée de la valeur locative. Le produit s'obtient en appliquant à cette base le taux voté par la collectivité. Il faut noter que la loi prévoit de nombreux abattements, dégrèvements et exonérations. En 2003, la taxe professionnelle représentait 22,7 milliards d'euros, soit la moitié du produit total des quatre taxes. Elle constitue la ressource fiscale la plus importante pour les collectivités locales. C'est la taxe professionnelle qui concentre l'essentiel des critiques à l'égard du système fiscal local. De part son poids mais aussi par ce qu'elle touche le coeur même de l'activité économique, c'est-à-dire, l'entreprise, les critiques à l'égard de la taxe professionnelle se fondent sur le fait que cet impôt constituerait un frein à l'investissement et à l'emploi. C'est la raison pour laquelle, la Loi de Finance pour 1999 a introduit un mécanisme de suppression progressive de la part salariale de la taxe professionnelle. En 2003, la part salariale a totalement disparu de l'assiette de la taxe professionnelle. La taxe professionnelle est acquittée par toutes les personnes physiques et morales qui exercent à titre habituel une activité non salariée. Son assiette est composée (à partir de 2003) des immobilisations corporelles retenues pour les deux taxes foncières. La valeur locative est la même que pour les deux taxes foncières à la seule différence qu'elle ne connaît pas les abattements de 50% et 20% appliqués respectivement à la TFPB et à la TFPNB. On doit noter que, dans l'optique de soutenir certaines activités économiques, un système d'exonérations est prévu. 2. Les mécanismes des quatre taxes Nous verrons au cours du développement de notre problématique de travail l'importance de la Loi du 10 janvier 1980. Cette loi a introduit des changements concernant les modalités de fonctionnement des impôts locaux. D'autre part, la Loi du 28 juin 1982 a introduit des modifications visant à adapter les impôts locaux à l'évolution du contexte économique et financier. Bien que le début des années quatre-vingt, correspondant aux débuts du processus de décentralisation, a marqué une certaine prise de conscience de la nécessité de modifier l'architecture et le fonctionnement du système fiscal local, on ne peut pas affirmer à ce jour, que ce système se trouve réellement bouleversé. Depuis ces deux lois majeures, on assiste essentiellement à des modifications « homéopathiques » non pas de l'ossature mais de quelques règles de fonctionnement de la fiscalité locale. D'ailleurs, on peut noter que ces changements passent le plus souvent par des lois de finance et non pas par une véritable loi de réforme de la fiscalité locale. Le dernier épisode des suites réservées par le gouvernement au rapport de la Commission Fouquet sur la réforme de la Taxe Professionnelle est assez significatif à cet égard. Les mécanismes de fonctionnement des impôts locaux reposent sur les bases (ou assiettes) d'imposition et sur les taux. Les élus locaux votent directement les taux appliqués à chaque impôt. Deux mécanismes de vote annuel des taux par les assemblées locales existent : un premier mécanisme qui consiste à faire varier proportionnellement tous les impôts d'une année à l'autre. En d'autres termes, il s'agit de voter globalement la masse de l'impôt. Un deuxième mécanisme repose sur une variation différenciée des taux et consiste à faire évoluer librement les taux entre eux. Cette liberté de vote des taux que l'on peut considérer comme un principe majeur de l'autonomie fiscale des collectivités locales est bien sûr encadrée par la loi. En effet, il existe des taux plafonds que les communes doivent respecter. En outre, les taux de la taxe d'habitation et ceux des deux taxes foncières ne peuvent dépasser une limite fixée à 2,5% fois la moyenne nationale de l'année précédente ou 2,5% fois la moyenne départementale. Le taux de la taxe professionnelle ne peut être supérieur à deux fois le taux moyen national de l'année précédente. En ce qui concerne la taxe d'habitation et les deux taxes foncières, il n'existe aucune limitation à l'égard des départements et des régions. La question que l'on peut se poser est de savoir si le vote des taux par les collectivités locales a contribué à renforcer l'autonomie fiscale des collectivités locale. Il semblerait que non même si juridiquement, il renforce le principe de libre administration. Dans son Xeme rapport, le Conseil des Impôts constate que l'autonomie fiscale des collectivités locales est en moindre que ce que l'on attendait de la liberté de vote des taux. §2. De la libre administration à l'autonomie financière : la quête inachevée La France, Etat traditionnellement jacobin, s'est engagée depuis une vingtaine d'années dans un processus de décentralisation qui s'est manifesté par des transferts considérables de compétences de l'Etat vers les collectivités locales et surtout par la disparition de la tutelle étatique sur ces mêmes collectivités locales. Au regard de ces évolutions que les quelques vingt années ne peuvent suffire pour mesurer toute la portée, on doit se demander pourquoi cette décentralisation quasi parfaite ne s'est pas traduit par des reformes en matières de finances et de fiscalités locales. Pour M. Bouvier, « les finances locales se présentent à maints égards comme un parfait révélateur des évolutions que connaissent les sociétés contemporaines. Elles apparaissent tout d'abords comme l'un des éléments essentiels pour juger de l'accomplissement de la réforme de la décentralisation engagée en 1982 et relancée en 2003 ».2(*) Par ailleurs, le même auteur fait remarquer que le pouvoir fiscal local ne saurait se limiter à la simple gestion des moyens financiers déterminés par l'Etat. La question de l'autonomie fiscale et financière des collectivités locales soulève un certain nombre d'enjeux politiques majeurs. La question principale est celle de l'incidence du principe de libre administration reconnue par la Constitution sur la décentralisation financière. Il apparaît que la lecture fournie par les différentes décisions du Conseil Constitutionnelle en la matière est minimaliste dans la mesure où le lien entre pouvoir fiscal local et principe de libre administration est interprété selon une logique de marges de manoeuvre financières. A plusieurs reprises, le Conseil Constitutionnel a jugé que certaines décisions fiscales en l'occurrence la suppression de la part salariale de la taxe professionnelle ne constituaient pas une entrave au principe de libre administration. Dans l'optique constitutionnelle, le pouvoir fiscal, c'est-à-dire, le pouvoir de disposer d'une ressource financière dont la collectivité locale peut maîtriser le taux n'est pas crucial pour juger de la force du principe de libre administration des collectivités locales. C'est quelque peu paradoxal lorsqu'on sait que la reconnaissance constitutionnelle du principe de libre administration est perçue comme un renforcement de celui-ci et qu'en même temps, ce principe ne trouve pas de répercussions fortes en matière de fiscalité locale. On ne peut poser la question de la décentralisation et de la politique publique locale sans faire une interpellation concernant la problématique de l'autonomie fiscale. Or, en matière politique et institutionnelle, qui dit autonomie dit pouvoir. De fait, le principe de libre administration ne s'appréhende que dans ce cadre du pouvoir fiscal. Contrairement à la logique minimaliste qui soumet l'autonomie fiscale et financière à une interprétation extensive du principe de libre administration, la véritable question de la refondation de l'action publique autour du rôle et de la place des collectivités locales envisage le principe de libre administration comme un pendant de l'émergence d'un pouvoir fiscal local. Malgré les évolutions de ces dernières années, on ne peut pas affirmer que les collectivités locales maîtrisent totalement leurs politiques fiscales et financières. L'impôt local est, en réalité, du ressort de l'Etat au regard même de sa gestion. En effet, c'est l'Etat qui assure, à travers sa Direction Générale des Impôts, l'assiette et le recouvrement. Comment donc peut -on parler d'autonomie financière alors que les collectivités locales n'assurent pas directement la charge et la responsabilité de la gestion de l'assiette et du recouvrement de l'impôt. En outre, le système du « compte d'avances » du Trésor Public, bien qu'il présente des avantages pour les collectivités locales, soumet celles-ci à une forme de tutelle administrative et financière qui est tout à fait contraire au principe d'autonomie. Un autre aspect de la question de l'autonomie financière et fiscale locale : la nature des rapports financiers entre l'Etat et les collectivités territoriales. Cette question est au coeur de notre réflexion sur la spécialisation fiscale comme instrument de refondation de l'action publique locale. L'histoire des relations financières de l'Etat et des collectivités locales est révélatrice de « l'histoire chaotique »3(*) de la décentralisation. En fait, l'un des enjeux majeurs pour l'avenir de la décentralisation se situe au niveau de la volonté de l'Etat d'accorder un pouvoir financier et fiscal total aux collectivités locales ou bien de se réapproprier ce pouvoir fiscal. Dans le premier cas, on parle de « décentralisation fiscale » tandis que dans le second, il s'agit d'une « recentralisation fiscal ». Bien que cette seconde configuration marque un net retour en arrière, certains observateurs en sont partisans. En se situant dans la première configuration, on est obligé de poser la question de la spécialisation des impôts locaux. Tel n'est pas notre propos à ce stade de l'analyse. Il s'agit de montrer que la recentralisation fiscale obéit à une logique et est caractérisée par des modalités de mise en oeuvre dont la prise en compte nous permettra par la suite de mieux comprendre les fondements de la spécialisation fiscale. On dit que l'Etat est le premier contribuable des collectivités locales. En effet, chaque année, l'ensemble des concours financiers de l'Etat aux collectivités locales représente près de 60 milliards d'euros. Les dotations de l'Etat répondent à quatre objectifs : tout d'abords, il s'agit d'aider au fonctionnement courant des collectivités locales. Par ailleurs, les dotations cherchent à soutenir les investissements, à financer les augmentations de charges induites par les transferts d compétences et à compenser les exonérations et dégrèvements consentis par l'Etat. Il faut rappeler que dans sa volonté de maîtriser l'évolution de ces dotations, l'Etat a mis en place depuis 1996, « un pacte de stabilité » remplacé, en 1999, par « un contrat de croissance et de solidarité » qui devait prendre fin en 2001 mais qui a été reconduit pour 2002, 2003 et 2004. Notons qu'il s'agit là d'une forme de substitution du contribuable national au contribuable local. Ce fait nous servira de base de réflexion pour introduire la problématique de la spécialisation fiscale. Les concours de l'Etat aux collectivités locales se présentent sous la forme de subventions, de compensations d'exonérations et de dégrèvements législatifs. Nous présentons ici les différentes formes de concours financiers de l'Etat aux collectivités locales : A. Dotations et subventions de fonctionnement 1. La Dotation Globale de Fonctionnement (DGF) La DGF est perçue par les communes et les départements. Elle représente la subvention la plus importante de l'Etat, soit près de 19 milliards d'euros pour l'année 2003. C'est la loi du 3 janvier 1979 qui instaure la DGF en prévoyant un système de répartition basé sur trois tranches de la DGF : une première tranche constituée par la dotation forfaitaire, une seconde par la dotation de péréquation et une dernière tranche constituée par les concours particuliers. La dotation de péréquation est, elle-même, basée sur deux critères : le potentiel fiscal et l'impôt sur les ménages. Nous reviendrons plus en détail sur la question du potentiel fiscal. La loi du 13 décembre 1993 a intégré dans la DGF le fait intercommunal. D'autres part, la Loi de Finance initiale pour 2004 a crée une DGF pour les régions. 2. La Dotation Spéciale Instituteur (DSI) 3. La Dotation Générale de Décentralisation (DGD) Dès les premières années de la décentralisation, la loi a prévu que les transferts de compétences seraient financés par l'Etat. Ainsi, les lois de 2 mars 1982, du 7 janvier 1983 et du 22 juillet 1983 ont reconnu ce principe. On notera qu'en 2004, ce principe est reconnu par la Constitution. 4. La Dotation Elu Local (DEL) 5. La Dotation pour Compensation des Pertes de Base de Taxe Professionnelle La Dotation pour compensation des pertes de base de taxe professionnelle est l'un des deux piliers (avec la Dotation de développement rural) du système qui a remplacé le Fonds National de Péréquation de la Taxe Professionnelle supprimé par la Loi de Finance Initiale pour 2004. 6. La Dotation de Développement Rural 7. Les autres subventions de fonctionnement Il s'agit essentiellement de subventions spécifiques accordées par divers ministères aux collectivités territoriales et qui ont représenté en 2004 près de 700 millions d'euros. B. Dotations et subventions d'équipement 1. La Dotation Globale d'Equipement C'est la loi du 2 mars 1982 qui a posé le principe de la globalisation des subventions d'investissement et a institué ainsi, la dotation globale d'équipement pour les communes et départements. 2. Les Dotations de Transferts de Compétences 3. Les Subventions spécifiques 4. Les Fonds de Compensation pour la TVA 5. Le Produit des Amendes de la Police et de la Circulation Ces concours financiers ne sont-ils pas un moyen pour l'Etat d'agir directement ou indirectement sur les politiques locales ? Si la réponse à cette question n'est pas évidente, il y a un grand intérêt à poser une telle question compte tenu des menaces qui peuvent se présenter pour la décentralisation de certaines compétences. D'ailleurs, une reforme efficace de la fiscalité locale passe nécessairement par une « mise à plat » des dotations de l'Etat aux collectivités locales. En effet, les conditions actuelles d'organisation et de fonctionnement des dotations étatiques ne permettent pas de lire clairement l'action publique du fait des imbrications de dotations et de complexité dans les modes de calcul. Ici, c'est la question de la transparence qui est posée. Par ailleurs, compte tenu des différents critères de calcul des dotations (et notamment de la Dotation Globale d'Equipement et de la Dotation Globale de Fonctionnement), il semble que les concours financiers de l'Etat ne jouent pas parfaitement leur rôle péréquater. C'est ainsi que le Président du Sénat Christian Poncelet pense que « le défi des prochaines années résidera donc dans l'avènement de concours de l'Etat respectueux de l'autonomie locale, c'est-à-dire stables, pérennes, lisibles et permettant une réduction des inégalités, sans pénaliser les collectivités les plus dynamiques ».4(*) * 2 M. BOUVIER : Les Finances Locales (2004) * 3 C. GIRAULT : Les relations financières de l'Etat et des collectivités locales : mode d'emploi (1993) * 4 Ch. PONCELET : « Concours de l'Etat aux collectivités territoriales et libre administration des collectivités locales » in MOREAU (1993) |
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