WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

La protection des mineurs sur internet


par Max Amégée
 - DESS de Droit des Nouvelles technologies et systèmes de l'information - DEA de Théorie générale et philosophie du droit 2004
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

2.Le filtrage et la classification des contenus 

L'illicéité du contenu des données diffusées sur Internet constitue l'objet d'une jurisprudence particulièrement récente et progressive.

Hormis la pédophilie, les juridictions françaises ont eu, entre 1996 et 2003, à se prononcer sur une vingtaine d'affaires particulièrement repoussantes. C'est le lieu de discuter la définition qui doit être donnée à la notion de contenu illicite.

En effet, la notion de contenu illicite doit s'entendre de façon la plus large possible et couvrir toute sorte de support possible. Ainsi, tout message ou toute image livrée sur n'importe quel support (papier ou numérique dont Internet) est soumis, à un principe de licéité. C'est l'existence ou la reconnaissance du contenu illicite qui légitime toute idée de censure.

Le filtrage, de par sa finalité, fait office de censure. Qu'en est-il en réalité ?

C'est une solution qui consiste à installer un logiciel qui fait écran aux contenus jugés inappropriés. En l'occurrence, il aura pour but de bloquer l'accès aux contenus à caractère pornographique pour les enfants. A contrario, seuls les majeurs identifiés comme tels auront accès à la pornographie sur Internet.

Plusieurs méthodes sont disponibles mais elles sont souvent sous-utilisées, méconnues ou inefficaces.

Un grand nombre de logiciels de filtrage sont proposés. On note aussi la création d'un statut légal particulier pour des tiers de confiance chargés d'évaluer la classification des contenus des sites Internet aux fins de reconnaissance par les logiciels de filtrage.

Au niveau européen, la décision du Parlement européen et du Conseil du 25 janvier 1999 adoptant un plan d'action communautaire pluriannuel est destiné à inciter à une utilisation plus sûre d'Internet. Elle préconise des systèmes de filtrage et de « rating » des sites Internent. Le but de cette opération est d'éradiquer les contenus illégaux ou préjudiciables sur l'Internet.

Les systèmes les plus connus, et soutenus par l'Union européenne, sont ceux développés par :

- la plate-forme PICS (Platform for Internet Content Section)(30(*)), langage commun pour décrire le contenu, élaborée en 1995 par le World Wide Web Consortium ;

- l'association de classification du contenu de l'Internet (31(*)), organisation indépendante à but non lucratif avec des bureaux aux Etats-Unis et en Europe. Le but de l'ICRA est de protéger les enfants des contenus potentiellement nuisibles tout en défendant la liberté d'expression des fournisseurs de contenu. L'ICRA possède et gère le système d'étiquetage ICRA et son prédécesseur RSACI.

Le 11 mars 2003, le Parlement européen a décidé de prolonger de deux ans le plan d'action communautaire afin d'y introduire de nouveaux éléments et d'y apporter divers ajustements.

Il est ainsi question d'étendre la couverture du projet aux nouvelles technologies en ligne : le contenu mobile et haut débit, les jeux en ligne, le transfert de fichier de poste à poste communément appelé peer to peer et toutes les formes de communication en temps réel.

A ce stade, il convient de s'interroger sur l'intérêt réel du filtrage.

Bien que conçu dans un but légitime, le filtrage est aujourd'hui loin d'être la panacée de la calamité du contenu illicite sur Internet et se voit la légitimité comme l'efficacité contestées.

Si le filtrage est, dans sa conception, très protecteur contre les contenus illicites, il n'en reste pas moins attentatoire aux libertés fondamentales dans son principe. Il peut être perçu comme une atteinte illégitime à la liberté de communication et à la vie privée.

D'abord, en ce qui concerne la liberté de communication, il est un obstacle :

La liberté de communication qui est une notion plus englobante que la liberté d'expression est un objectif à valeur constitutionnelle comme l'a précisé le Conseil constitutionnel dans ses décisions des 10 et 11 octobre 1984. Elle est non seulement une liberté d'émission mais surtout une liberté de réception. Or le filtrage du contenu illicite peut avoir pour effet d'empêcher non seulement les mineurs mais parfois des majeurs qui n'arriveraient pas à prouver leur majorité en ligne d'accéder à l'information. Le filtrage est, au demeurant, critiquable dans la mesure où il constitue une censure a priori.

Ensuite, pour ce qui est de la vie privée, le filtrage est liberticide :

En principe, toute personne a droit au respect de sa vie privée. En posant, le principe du droit au respect de la vie privée, ni le législateur communautaire (l'article 8 de la CEDH), ni le législateur national (article 9 du Code civil) ne semblent faire aucune distinction entre le majeur et le mineur. De là, il est possible de déduire que toute personne y a droit quel que soit son âge. Le filtrage en raison de l'âge ou de l'illicéité du contenu semble nécessairement attentatoire à la vie privée des internautes.

Le filtrage est également critiquable dans la mesure où il est souvent confié à des fournisseurs d'accès Internet (FAI) qui ne sont que des personnes de droit privé qui ne sont investie d'aucun pouvoir de police.

Cette position doit, cependant, être nuancée car le contrôle des parents des contenus accessibles aux enfants, loin d'être perçu comme une atteinte à la vie privée de ceux-ci, se trouve être une obligation : on ne peut pas au nom du droit au respect de la vie privée laisser les enfants seuls face aux contenus dangereux et illicites. Il convient de rappeler que l'éducation des enfants reste une obligation légale pour les parents en vertu des articles 371-1 et 371-2 du code civil. Il faut dans cette logique privilégier la notion de vie privée familiale dans laquelle les parents tiennent un rôle légitime de censeur.

La doctrine a eu le mérite de distinguer à cet égard la responsabilité intrafamiliale et la responsabilité extrafamiliale à propos de la question des contrôle et identification des contenus illicites et dangereux.32(*)

D'ailleurs, il faut signaler que la loi « économie numérique » prévoit à de conférer à un juge le pouvoir d'ordonner aux FAI de filtrer l'accès de leurs abonnés aux contenus jugés illicites.

Mais cette position de la future loi pose un problème de fond si l'on retient que le fournisseur d'accès est une autoroute de l'information. A l'opposé de l'hébergeur qui peut décider du sort des contenus qu'il stocke, le FAI n'a aucune maîtrise des contenus.

L'article 15 de la Directive européenne « commerce électronique »33(*) que la loi « économie numérique » va transposer interdit aux Etats membres d'imposer aux prestataires une obligation de surveillance des contenus qu'ils transmettent ou stockent.

Cet article 15 rappelle également que le secret de communication est un impératif posé par l'article 5 de la Directive 97/66/CE.

Cet article 15 rappelle également que le secret de communication est un impératif posé par l'article 5 de la Directive 97/66/CE.

A cet égard, se pose la question de savoir si la loi économie numérique à naître sera en adéquation avec la Directive «commerce électronique» qu'elle va transposer. Une réponse négative à cette question réduirait de facto la légitimité même de cette loi.

Enfin, le filtrage est techniquement inefficace car il ne permet pas de mettre un terme ni de prévenir le contenu illicite. L'architecture informatique de la plupart des pays ne permet pas un contrôle centralisé des contenus. Pareillement, le filtrage qui n'est pas universel mais très localisé ne peut permettre d'enrayer le message ou l'image illégale. Résultat : le contenu défendu qui est toujours en ligne continuera d'être accessible de tous les autres endroits du monde et même du pays du filtrage. Il suffit de changer de connexion !

On s'accorde désespérément à partager l'opinion suivante : « si vous croyez que la technique va résoudre vos problèmes, c'est que vous n'avez rien compris à la technique, ni à vos problèmes ».

Mais face à l'enjeu, il n'y a plus de place dans l'indifférence. C'est dans cette perspective et toujours en quête de confiance pour Internet que la question de la labellisation des noms de domaine se pose.

* 30 http://www.w3.org/PICS/

* 31 www.icra.org

* 32 DREYER E., Progrès techniques et vie privée, la protection des mineurs accédant à Internet, adopter la loi française comme modèle ? , Revue trimestrielle des droits de l'Homme, 2003, n°54, p.582, 45 pages

* 33 Directive 2000/31/CE du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2000 relative à certains aspects juridiques des services de la société de l'information, et notamment du commerce électronique, dans le marché intérieur

J.O. n° L 178 du 17/07/2000 p. 0001 - 0016

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Le don sans la technique n'est qu'une maladie"