MINISTERE DE L'ENSEIGNEMENT
SUPERIEUR ET DE LA
RECHERCHE
SCIENTIFIQUE
REPUBLIQUE GABONAISE
UNION-TRAVAIL-JUSTICE
Université Africaine des sciences
U.A.S
En vue de l'obtention du master droit des
affaires
MEMOIRE
Sujet :
L'obligation d'informer la caution durant
l'exécution du
contrat de cautionnement : analyse comparative entre
le
droit français et le droit de l'OHADA.
par : ESSONE ZANG Fabrice
Présenté et soutenu
publiquement
Sous la direction de :
M. LOUBA
Térence,
Docteur en droit privé
Année universitaire : 2015-2016
DEDICACE
À Mba Mvé Étienne
REMERCIEMENTS
Je tiens tout d'abord à remercier Monsieur LOUBA non
seulement pour avoir dirigé mon travail, mais aussi pour ses conseils
avisés et sa grande disponibilité.
Ensuite, mes remerciements vont à l'Université
Africaine des Sciences et à tout le corps enseignant, plus
particulièrement aux enseignants de la filière de Droit qui m'ont
tenu depuis la première année.
Je tiens enfin à remercier tous les membres de ma famille
et ma grande soeur Prisca en particulier.
LISTE DES PRINCIPALES ABREVIATIONS
AUS Acte uniforme portant organisation des
sûretés
Bull. Civ Bulletin civil
CA Cour d'appel
Cass. Civ Chambre civile de la Cour de cassation
française
Cass. Com Chambre commerciale de la Cour
de cassation française
CCJA Cour commune de justice et d'arbitrage
CMF Code monétaire et financier français
JCP Juris Classeur périodique
OHADA Organisation pour l'harmonisation en Afrique du droit
des affaires
TGI ..Tribunal de grande instance
5
SOMMAIRE
Introduction
|
7
|
Première partie :
Généralités sur les obligations d'information de la
caution
|
.13
|
Chapitre 1 : L'information entre contractants
|
.14
|
Chapitre 2 : Les obligations d'information au profit de la
caution : du droit français au droit de
l'Afrique francophone 32
Deuxième partie : Le champ d'application des
obligations d'information et réflexions
sur les obligations de source extracontractuelle
54
Chapitre 1 : Le manque de précision de l'article 25 de
l'Acte uniforme 55
Chapitre 2 : Réflexions sur les obligations
d'information au profit de la caution 80
Conclusion .105
6
INTRODUCTION
L'organisation pour l'harmonisation en Afrique du droit des
affaires (OHADA) a été créée par la signature du
Traité de Port-Louis du 17 octobre 1993 et comprend actuellement 17 pays
d'Afrique francophone que sont le Bénin, le Burkina Faso, le Cameroun,
la République Centrafricaine, les Comores, le Congo, la Côte
d'Ivoire, le Gabon, la Guinée, la Guinée-Bissau, la Guinée
Équatoriale, le Mali, le Niger, la République démocratique
du Congo, le Sénégal, le Tchad et le Togo.
L'idée d'harmoniser le droit des affaires des pays de
la zone franc vient du constat qu'au sortir des indépendances l'on
remarque une stagnation de l'économie africaine due notamment d'une part
à une insécurité juridique à cause d'une multitude
de législations hétérogènes, disparates,
imprécises et mal connues1. D'autre part, cette stagnation
est due à une insécurité judiciaire causée par une
dégradation de la façon dont est rendue la justice, tant en droit
qu'en matière de déontologie, notamment en raison d'un manque de
moyens matériels, d'une formation insuffisante des magistrats et des
auxiliaires de justice2.
Dans les faits, l'harmonisation des législations
africaines est réalisée au moyen d'instruments nommés
actes uniformes. Le droit de l'OHADA comprend donc une dizaine d'actes
uniformes réglementant aussi bien le droit commercial, les
sociétés commerciales que les sûretés. Rappelons que
« les sûretés désignent les garanties que la
convention des parties, la loi ou le juge peuvent accorder au créancier
pour le prémunir contre le risque d'insolvabilité de son
débiteur »3.
En ce qui concerne la nécessité d'une
réforme du droit des sûretés en Afrique francophone, P.
CROCQ et son équipe font remarquer qu'avant la réforme de 1997,
« hormis le Sénégal et le Mali qui avaient
procédé à des réformes de leur droit des
sûretés, tous les autres États membres de la zone franc
connaissaient un droit des sûretés vieillissant de presque deux
cents ans »4. Pourtant, les juristes signalent avec justesse
que « le droit OHADA des sûretés, en tant
1 Anonyme, Présentation de l'OHADA, p.
2, fichier au format PDF disponible sur
www.ohada.com/content/presentations/Presentation-OHADA.pdf
2 Ibid.
3 Ph. Simler, Ph. Delebecque, Droit civil,
les sûretés, la publicité foncière, 6e
éd., coll. Droit privé, Précis Dalloz, 2012, n° 1,
P.1.
4 P. CROCQ, L. BLACK YONDO, M. BIZOUA-BI, O. FILLE
LAMBIE, L-J. LAISNEY et A. MARCEAU-COTTE, Le nouvel acte uniforme portant
organisation des sûretés, la réforme du droit des
sûretés de l'OHADA, Lamy, 2012, n° 3, p. 19.
7
qu'instrument indispensable à la mobilisation des
ressources financières, doit nécessairement évoluer de
manière ambitieuse et adaptée pour contribuer à rendre la
zone OHADA économique attractive »5.
Ainsi, l'acte uniforme portant organisation des
sûretés (AUS ou AUOS) a été adopté le 17
avril 1997 à Cotonou (Bénin) et est rentré en vigueur le
1er janvier 1998 dans l'ensemble des pays membres. Une modification
de l'AUS a été adoptée le 15 décembre 2010 à
Lomé (Togo) et est rentrée en vigueur le 16 mai 2011.
D'ailleurs, au cours des dix dernières années,
la réforme du droit des sûretés n'est pas la seule
observable dans le droit de l'OHADA étant donné que l'Acte
uniforme relatif au droit commercial (AUDCG) a également
été modifié le 15 décembre 2010. Plus
récemment, ce sont les procédures collectives et le droit des
sociétés commerciales qui ont fait l'objet de nouveaux actes
uniformes respectivement le 10 septembre 2015 et le 30 janvier 2014. Tous ces
changements témoignent du besoin d'adaptation du droit de l'OHADA aux
normes internationales. En effet, à ce sujet P. CROCQ et son
équipe affirment que « l'OHADA, de par son originalité
institutionnelle et son rayonnement géographique, ne peut demeurer
figée sur ses acquis et sourde aux appels du large ; néanmoins,
elle ne doit pas se détacher de ses propres racines
»6.
En outre, le professeur P. CROCQ et son équipe vantent
les mérites de l'uniformisation du droit des sûretés en
Afrique francophone. Ainsi, selon eux, « il est communément admis
que la création d'un droit uniforme des sûretés OHADA par
l'adoption d'un Acte uniforme en date du 17 avril 1997 (AUS) a constitué
en son temps un progrès considérable et significatif pour les
économies des États membres »7.
Notre étude porte essentiellement sur le cautionnement
qui est une sûreté dont l'importance dans le monde des affaires
n'est plus à démontrer. En effet, TROPLONG faisait
déjà remarquer en son temps que « L'utilité du
cautionnement le met en grande pratique dans les affaires civiles et
commerciales ; il facilite les transactions et élargit le crédit
; il ouvre la
5Ibid., n° 2,
p. 18.
6 P. CROCQ et
al., op. cit., p. 17,
n° 1.
7 Ibid., n° 3,
p. 19.
8
carrière des affaires à des inconnus ; il
favorise des établissements nouveaux et des entreprises utiles qui
avorteraient »8.
Nous comprenons d'ores et déjà l'importance du
cautionnement dans le développement des petites et moyennes entreprises
ainsi que celui des petites et moyennes industries dans les États
membres de l'organisation africaine.
Aussi, notre sujet a pour intitulé « L'obligation
d'informer la caution durant l'exécution du contrat de cautionnement :
analyse comparative entre le droit français et le droit de l'OHADA
». En procédant à la lecture du sujet, l'on relève
d'emblée les termes « obligation », « informer »,
« caution », « contrat » et « cautionnement ».
Arrivé à ce stade, il conviendrait de se poser
la question de savoir non seulement ce qu'est une caution et par extension ce
qu'est le cautionnement, mais aussi ce que l'on entend par obligation, par
contrat ou par informer.
Tout d'abord, le mot « obligation » renvoie au
« lien de droit entre deux ou plusieurs personnes en vertu duquel l'une
des parties, le créancier, peut contraindre l'autre, le débiteur,
à exécuter une prestation »9.
Ensuite, le dictionnaire Le Robert définit le mot
« informer » comme étant le fait de « transmettre des
connaissances, des renseignements à quelqu'un ».
Puis, Marc MIGNOT définit le « cautionnement
» comme étant « le contrat par lequel une personne,
appelée caution, s'engage à l'égard d'un créancier
à exécuter l'obligation de son débiteur au cas où
celui-ci ne l'exécuterait pas lui-même »10.
En outre, on entend par contrat, une « convention faisant
naître une ou plusieurs obligations ou bien créant ou
transférant un droit réel »11.
Enfin, concernant l'expression « obligation d'information
», Raymond GUILLIEN12 la définissait comme étant
« un devoir légal pesant sur le professionnel, vendeur de biens ou
prestataire de services, d'informer son partenaire sur les
caractéristiques de la chose commercialisée ou de
l'opération projetée au moyen, notamment de mentions informatives
et
8 Troplong, Traité de droit civil
(le droit civil expliqué suivant l'ordre du Code depuis et y
compris le titre de la vente -- du cautionnement et des transactions), tome
XIVe, éd. Paris, 1846, Charles Hingray, libraire-éditeur.
9 Raymond Guillien et al., Lexique des
termes juridiques, 19e éd., Dalloz, 2012, p. 590.
10 Marc Mignot, droit des
sûretés, coll. Cours, Montchrestien, éd. 2008, n°
70, p. 29.
11 Raymond Guillien et al., op. cit., p.
227.
12 Ibid., p. 593.
9
de documents annexes ». Dès lors, nous comprenons
que si l'idée de l'obligation d'information de la caution prend racine
dans l'obligation d'information en général, elle s'en distingue
rapidement.
En effet, l'obligation d'information de la caution que nous
étudions n'est pas à confondre avec le devoir de mise en garde du
banquier ou avec le devoir de conseil de celui-ci ou encore avec une obligation
de renseignement puisque ceux-ci sont des informations précontractuelles
alors que les informations faisant l'objet de notre travail sont
communiquées à la caution durant la vie du cautionnement ou, en
des termes plus juridiques, durant l'exécution du contrat de
cautionnement.
Ainsi, notre sujet traite alors du « lien de droit
existant entre la caution et le créancier en vertu duquel la caution
pourrait contraindre ledit créancier à lui transmettre des
renseignements sur la situation financière du débiteur principal
».
Une fois la phase définition terminée, ce qui
nous frappe le plus, lorsque l'on prend la peine de comparer les dispositions
françaises en matière d'obligations d'information avec les
dispositions de l'OHADA, c'est la forte ressemblance entre elles. C'est
à cause de ce constat qu'une analyse comparative s'est imposée
d'autant plus que non seulement la France n'est constituée que d'un seul
pays mis à part les territoires et domaines d'outre-mer (DOM-TOM) alors
que l'OHADA est une organisation communautaire constituée de dix-sept
pays, mais aussi parce que les réalités vécues en France
ne sont pas les mêmes que celles vécues en Afrique.
De quelle manière se caractérisent donc les
obligations d'information durant l'exécution du contrat du cautionnement
en droit français et en droit de l'OHADA ?
Une telle question peut paraître banale, mais au vu de
l'abondante jurisprudence de l'information de la caution en France (il y avait
1073 résultats pour les recherches intitulées « information
de la caution » sur le site
legifrance.gouv.fr au 2
février 2017), l'on ne saurait se demander si les dispositions de l'AUS
ont également engendré un contentieux tout aussi important dans
les pays membres de l'organisation africaine et à la Cour Commune de
Justice et d'Arbitrage (CCJA).
En effet, François-Xavier LICARI se fait le
témoin d'un véritable phénomène en France : «
Si l'information de la caution est aujourd'hui au centre de toutes les
attentions, c'est qu'elle se trouve au croisement de deux questions fortement
empreintes de politique et de philosophie
10
du droit : d'une part, celle de l'information et de la
transparence, «regardées comme la panacée des tensions
sociales», et, d'autre part, celle de la protection de la caution,
véritable «mot d'ordre» législatif et prétorien
de ces vingt-cinq dernières années ».13
Qu'en est-il en droit africain ? L'information de la caution
en Afrique est-elle également « au centre de toutes les attentions
» ?
Loin de nous la prétention de vouloir faire un compte
rendu sur l'information de la caution dans les 17 États membres de
l'OHADA, nous n'en avons ni les moyens ni les compétences. En revanche,
nous voulons cerner les caractéristiques des informations de la caution
dans deux ordres juridiques différents d'autant plus que nos recherches
nous ont permis de comprendre à quel point le fait de détenir une
bonne information dans le monde des affaires pouvait s'avérer
crucial.
Nous relaterons une petite histoire afin d'illustrer nos propos
:
« Au lendemain de la bataille de Waterloo, le 20 juin
1815, Nathan Rothschild informé de la défaite
napoléonienne bien avant les autorités grâce à son
réseau d'espionnage et de courrier, se rend à la bourse de
Londres et met en vente tous ses titres. Tous pensent alors que Napoléon
est sorti victorieux du combat et chacun, gagné par la panique, suit
l'exemple de Rothschild. Au bout de quelques heures, la valeur des actions
tombe à 5 cents, c'est alors que Nathan les rachète pour une
bouchée de pain... En une nuit, la fortune déjà
gigantesque des Rothschild est multipliée par vingt, et obtient de fait
le contrôle de l'économie anglaise : c'est un fameux «coup de
bourse» !
Ensuite, en 1818 grâce à des agents et à
ses réserves «illimitées», il achète une
énorme quantité d'obligations du gouvernement français.
Ensuite il inonde le marché libre des principales places commerciales
d'Europe d'obligation française, ce qui provoque une panique. À
Paris, la maison Rothschild s'empare ainsi du contrôle de la France et de
ses finances, et à Londres, Nathan Rothschild en contrôlant la
«Banque d'Angleterre», exerce une influence directe sur le Parlement
britannique »14.
13 F-X. Licari, « Charge de la preuve de
l'exécution de l'obligation d'information qui incombe à
l'établissement de crédit », JCP G 2002, II 10043.
14 Robert Gil, le fameux « coup de bourse
» de Nathan Mayer Rothschild, publié le samedi 25 juin 2011,
disponible sur le site
http://www.agoravox.fr/actualites/economie/article/le-fameux-coup-de-bourse-de-nathan-96544
, [consulté le 2 février 2017]
11
Au vu de ce qui précède, l'on peut conclure que
l'information financière n'est donc pas une banalité, car elle
peut causer des préjudices considérables à ceux contre
lesquels elle est utilisée. Si Rothschild a pu duper des milliers de
personnes grâce à une simple information, le créancier ne
pourrait-il pas abuser de la caution en conservant pour lui seul une
information capitale ? La réponse est évidemment positive.
Afin de mener à bien notre étude, nous tenterons
de nous interroger sur quelques critères de distinction ou de
ressemblance entre le droit français et le droit de l'OHADA en ce qui
concerne les informations obligatoires. Toutefois, il convient de signaler que
notre travail comporte très peu de documentations africaines sur le
sujet en dépit des efforts fournis avec les maigres ressources dont nous
disposions. En effet, les obligations d'information ayant pour
bénéficiaire les cautions ne semblent pas intéresser grand
monde en Afrique où certains les perçoivent davantage comme une
gêne15.
Donc, nous verrons tout d'abord des
généralités sur les obligations d'information de la
caution (Première partie). Puis, d'une part, nous
aborderons le champ d'application desdites obligations d'information et d'autre
part nous nous interrogerons sur la véritable nature des obligations
extracontractuelles (Deuxième partie).
15 Nkou Mvondo Prosper, L'information de la
caution dans le nouveau droit des sûretés des États
africains, Ohadata D-06-33, p. 29, n 69, fichier au format PDF disponible
sur
ohada.com ; « la caution
bénéficiaire de l'obligation d'information peut-elle y renoncer ?
»
12
Première partie :
Généralités sur les obligations d'information de la
caution
Tout d'abord, nous verrons les différents fondements
sur lesquels reposent les obligations d'informer le cocontractant qu'est la
caution (Chapitre 1). Ensuite, nous ferons une analyse
comparative entre le droit de l'OHADA et le droit français afin de mieux
comprendre non seulement l'origine, mais aussi la pertinence des informations
extracontractuelles imposées par le législateur africain
(Chapitre 2).
13
Chapitre 1 : L'information entre contractants
Si le contrat est une rencontre de volontés, il n'en
demeure pas moins que le plus souvent lesdites volontés sont
contradictoires puisque les parties n'ont pas les mêmes
intérêts. En effet, dans le contrat de vente par exemple, bien que
les parties s'entendent sur le prix et la marchandise, elles n'ont pas le
même objectif : le vendeur veut réaliser un profit alors que
l'acheteur veut satisfaire un besoin.
Le problème qui est posé au législateur
et au juge est donc celui de faire coïncider des intérêts
différents. Ainsi, on constate que l'information entre contractants ne
coule pas de source au vu de la divergence des intérêts des
cocontractants (Section 1), mais que l'information est
fondée sur des éléments que le droit positif ne peut
ignorer (Section 2).
Aussi, l'ancien article 1135 du Code civil français
disposait que « les conventions obligent non seulement à ce qui y
est exprimé, mais encore à toutes les suites que
l'équité, l'usage ou la loi donnent à l'obligation
d'après sa nature », ce qui sous-entend que lorsqu'un individu
conclut un contrat, il s'engage au-delà de sa propre volonté et
il semblerait que ce soit sur cette idée que le législateur s'est
fondé afin de s'immiscer dans la sphère contractuelle.
Section 1 : la société libérale et
la non-prise en compte des intérêts du cocontractant
Nous verrons que les cocontractants ne sont pas
automatiquement considérés comme des associés du seul fait
du contrat, car chacun se doit de veiller à ses propres
intérêts (paragraphe 1). En effet, le professeur
François Terré fait remarquer que « dans une
société libérale composée d'hommes libres et
responsables, la règle est le devoir de s'informer soi-même
»16. Toutefois, lorsque des conditions sont réunies, il
se peut que des obligations légales d'information soient imposées
à l'une des parties afin de créer, entre les parties, une
égalité juridique (paragraphe 2).
Paragraphe 1 : Le principe de la limitation de la
responsabilité contractuelle
Comme la responsabilité civile ou la
responsabilité délictuelle, l'on peut constater des limites
à la responsabilité contractuelle. En effet, il est tout à
fait logique de supposer que la responsabilité d'un contractant ne
saurait être engagée qu'en raison de manquements à des
obligations contractuelles (A). Aussi, c'est dans cette
optique que le principe de
16 F. Terré, Ph. Simler, Y. Lequette,
Droit civil, les obligations, Coll. Droit privé, 11e
éd., Précis Dalloz, n° 258, p. 284.
14
l'individualisme est réaffirmé, un
individualisme qui veut que chacun veille à ses propres
intérêts (B).
A- La limite de la responsabilité contractuelle aux
engagements réciproques
Le professeur François TERRE affirme que «
longtemps on a enseigné que, sauf obligation légale
précise, nul n'était tenu de renseigner son cocontractant
»17. En matière de cautionnement, on pourrait
déduire que le créancier ne doit donc aucune information à
la caution en dehors de celles que la loi lui impose, sauf si bien sûr le
contrat de cautionnement prévoit une information à la charge du
créancier.
D'ailleurs, cette limite de responsabilité
contractuelle est rappelée dans l'affaire opposant Mademoiselle Fadiga
NADIANI et la Bank of Africa Cote d'ivoire18. En l'espèce,
Mademoiselle Fadiga prétendait qu'en tant que caution elle était
la bénéficiaire d'une information annuelle que lui devait la
BOA-CI, mais dont celle-ci ne s'était point acquittée. Cependant,
le cautionnement de la demanderesse au pourvoi avait été
contracté en 1990, c'est-à-dire 8 ans avant l'entrée en
vigueur du premier acte uniforme portant organisation des sûretés
(AUS). De ce fait, ledit cautionnement n'était pas régi par les
dispositions de l'AUS, mais par celles du droit ivoirien. Aussi, aucune clause
du contrat de cautionnement ne stipulait une obligation d'information annuelle
à la charge de la BOA-CI et au bénéfice de mademoiselle
Fadiga NADIANI.
En outre, la demanderesse au pourvoi excipait d'une
information annuelle alors que ladite information à
périodicité annuelle n'existe pas en droit de l'OHADA, mais en
droit français.
À Mademoiselle Lolita HUPRELLE d'expliquer que «
le créancier doit être tenu d'une obligation d'informer la caution
pour que la non-délivrance de l'information soit fautive
»19.
La responsabilité contractuelle dans une
société libérale est donc réduite aux seules
obligations contractuelles et ledit individualisme isole alors les contractants
en les rendant seuls maîtres de leur destinée. En effet, chaque
contractant doit être responsable et faire preuve de vigilance.
17 F. Terré, Ph. Simler, Y. Lequette, Op.
cit., idem.
18 CCJA, arrêt n° 29 du 15 juil. 2004 aff.
Fadiga NADIANI c/ BANK OF AFRICA Cote d'Ivoire; Ohadata J-04-387.
19 L. Huprelle, « La caution dirigeante
», Thèse Montpellier I, 2014, n° 130, p. 184.
15
B- La vigilance du contractant dans la société
libérale
Il s'agit d'un principe qui n'est pas désuet de nos
jours en dépit de l'interventionnisme des législateurs africain
et français dans le droit des contrats.
D'ailleurs, à ce sujet, PORTALIS déclarait
déjà en son temps qu'« On gouverne mal quand on gouverne
trop. Un homme qui traite avec un autre homme doit être attentif et sage
; il doit veiller à son intérêt, prendre les informations
convenables, et ne pas négliger ce qui est utile. L'office de la loi est
de nous protéger contre la fraude d'autrui, mais non pas de nous
dispenser de faire usage de notre propre raison. S'il en était
autrement, la vie des hommes, sous la surveillance des lois, ne serait qu'une
longue et honteuse minorité ; et cette surveillance
dégénérerait elle-même en inquisition
»20.
PORTALIS encourageait ainsi le libéralisme contractuel
et un certain individualisme dans le droit des contrats au lieu de
l'ingérence du législateur.
Aussi, plus récemment, la Cour de cassation
française a jugé en décembre 2000 que les cautions ont
donc, en principe, le devoir de s'informer par eux-mêmes et de veiller
à leurs intérêts avant de s'engager21, elles
doivent être sages et ne jamais s'engager à la
légère. D'ailleurs, le professeur SIMLER va dans le même
sens que la haute juridiction en précisant que « la caution, comme
tout contractant, a d'abord le devoir de veiller à ses propres
intérêts, donc de s'informer avant de s'engager et de ne passe
désintéresser de l'évolution de la situation du
débiteur qu'elle accepte de garantir »22. L'auteur
remarque également que paradoxalement, « souvent (la caution) est
autant, sinon mieux à même que le créancier de
connaître cette évolution, notamment si elle est proche du
débiteur ou le dirigeant ou un associé de la
société garantie »23.
Cependant, le professeur CROCQ, quant à lui, fait
remarquer un élan de solidarité envers les cautions quelles
qu'elles soient en déclarant que si « naguère aucun devoir
de conseil notamment sur l'intérêt du cautionnement ou son
opportunité ne pesait en principal sur le créancier professionnel
(...) il est aujourd'hui jugé que dans certaines circonstances, le
20 Portalis, Discours préliminaire sur le
projet de Code civil.
21
Cass. Com., 19 déc. 2000 : RJDA
2001, n° 560.
22 Ph. Simler, Op. cit., n° 428,
p.440.
23 Ibid.
16
créancier professionnel commet une faute s'il n'attire
pas l'attention non avertie sur l'absence de viabilité de
l'opération de financement »24.
Ainsi, c'est dans l'optique de protéger les
intérêts des contractants inexpérimentés que l'on
constate de nos jours une profonde immixtion du législateur dans les
contrats mettant en scène un contractant profane et un professionnel.
À ce sujet, les professeurs Anne-Sophie BARTHEZ et Dimitri HOUTCIEFF se
demandent même si le créancier n'aurait pas le devoir de
privilégier les intérêts de la caution25. Cette
prise en compte des intérêts du contractant le plus faible est le
corollaire de l'ingérence de l'État dans les rapports
contractuels.
Paragraphe 2 : la protection d'un contractant et
l'État interventionniste
Monsieur Laurent BRUNEAU remarque une invasion dans la
sphère contractuelle depuis l'avènement de l'État
providentiel qui est interventionniste contrairement à l'État
libéral, abstentionniste. En effet, l'État providentiel s'immisce
jusque dans les rapports entre contractants afin d'« imposer le respect
des valeurs qu'il juge primordiales »26. C'est ainsi que
naît un corps de règles spéciales et impératives :
le droit de la protection du contractant (A). Toutefois, dans
le droit des contrats, les règles protectrices et exorbitantes du droit
commun sont soumises à certaines conditions notamment en matière
de cautionnement (B).
A- Le droit de la protection du contractant
Monsieur Laurent BRUNEAU définit le droit de la
protection du contractant comme « l'ensemble des règles juridiques
qui ont pour objet ou pour effet de protéger, dans un contrat
donné, l'un des contractants »27.
En effet, le juriste fait remarquer qu'en ce qui concerne la
France, il existe une multitude de dispositions légales qui tendent
à protéger une catégorie de personnes en particulier et
qui ne légifèrent que sur les rapports de ceci avec des
justiciables particuliers souvent plus riches et plus puissants (employeur,
créancier professionnel). Lesdites lois sont souvent codifiées et
portent alors des intitulés évocateurs tels que Code du travail
ou encore Code de la consommation.
24 L. Aynès, P. Crocq et Ph. Malaurie
(dir.), Les sûretés : la publicité
foncière, 7e éd., Coll. Droit civil, Defrénois, 2013,
n ° 297, p. 136-137.
25 A. S. Barthez et D. Houtcief, Les
sûretés personnelles, LGDJ, 2010, n° 662 et s.
26 L. Bruneau, Contribution à
l'étude des fondements de la protection du contractant,
Thèse de l'université des sciences sociales de Toulouse, 2005,
n° 6, p. 9-10.
27 Ibid., n° 8, p. 11.
17
L'auteur constate également que « le contractant
protégé est un contractant soustrait au droit commun
»28. En effet, « les règles classiques qui
régissent le contrat sont remplacées par d'autres, qui vont avoir
pour objet ou pour effet de protéger l'une des parties
»29.
Toutefois, l'ingérence de la loi dans le domaine du
travail et celui de la consommation n'est pas injustifiée, car il s'agit
de domaines très sensibles dans lesquels les travailleurs et les
consommateurs doivent être protégés contre de nombreux
abus, voilà pourquoi l'autonomie de la volonté dans les rapports
entre employeurs et employés et ceux entre créanciers
professionnels et consommateurs est souvent contrôlée.
On constate que le législateur français est
fortement inspiré par la citation d'Henri LACORDAIRE « Entre le
fort et le faible, entre le riche et le pauvre, entre le maître et le
serviteur, c'est la liberté qui opprime et la loi qui affranchit ».
En effet, c'est afin de prévenir les abus que le législateur
s'immisce dans les rapports contractuels inégaux.
Monsieur Laurent BRUNEAU ajoute que, relevant de l'ordre
public de protection, « le droit de la protection du contractant est un
droit impératif : les contractants ne peuvent déroger aux
règles qui le composent »30.
D'ailleurs, en France, en ce qui concerne notre sujet
d'étude, à savoir les obligations d'information de la caution, il
convient de signaler que lesdites obligations sont d'ordre public et que les
cautions ne peuvent y renoncer31. En droit de l'OHADA, les clauses
contraires aux dispositions des actes uniformes sont réputées non
écrites.
En outre, on constate de manière chronologique que les
obligations d'information durant l'exécution du cautionnement en droit
de l'OHADA s'inspirent fortement de l'article 48 de la loi française
n° 84-184 du 1er mars 1984 relative à la
prévention et au règlement amiable des difficultés des
entreprises (une loi spéciale). Lesdites obligations d'information sont
par conséquent des règles dérogeant au droit commun et
visant à la protection du contractant.
Si les obligations d'information sont des dispositions d'ordre
public dérogeant au droit commun et visant à la protection d'un
contractant, il n'en demeure pas moins que certaines
28 Ibid.
29 Ibid.
30 Ibid.
31
Cass. Com., 14 déc. 1993, Bull.
Civ. IV, n° 467, p. 340.
18
conditions doivent être remplies pour que la
communication d'une information spécifique à un contractant soit
obligatoire.
B- Les conditions de l'obligation d'information
Le professeur TERRE nous explique que « L'existence d'une
obligation d'information dépend de la nature du contrat et de la
qualité des contractants. Se rencontrant principalement dans les
rapports professionnels-consommateurs, elle est de manière
générale, appelée à jouer chaque fois que l'une des
parties «ignore légitimement des informations qui lui
étaient utiles et que l'autre connaissait ou se devait de
connaître»32 ». Nature du contrat, qualité
des parties et ignorance légitime des informations sont alors les
conditions de l'imposition d'une ou plusieurs obligations d'information
à un contractant.
Dans le cautionnement, on conçoit donc que l'obligation
d'information est légitime.
En effet, tout d'abord, en ce qui concerne la nature du
contrat, le professeur Séverine CABRILLAC nous explique que « le
fait que la caution n'ait guère de possibilités de
défendre elle-même ses intérêts, en raison de son
absence de contribution à la dette entraîne pour le
créancier un devoir original : prendre en charge, pour partie, la
protection des intérêts de la caution »33. Le
cautionnement est donc bel et bien un engagement qui oblige l'un des
contractants à transmettre des renseignements à son
cocontractant.
Ensuite, en ce qui concerne la qualité des parties, si
le professeur TERRE nous enseigne que « l'obligation d'information
trouvera un domaine d'application naturel dans les rapports entre professionnel
et profanes »34. Toutefois, si, dans le droit du cautionnement,
il existe des cautions profanes, il existe également des cautions
professionnelles. En conséquence, on pourrait déduire que les
cautions professionnelles de par leur professionnalisme ne sont pas
bénéficiaires de l'information. Or, il a été
jugé (en France) que toutes les cautions étaient
créancières de l'obligation d'information35. Ce qui
explique que même entre créancier professionnel et caution
professionnelle, l'obligation d'information est due. Ici, la qualité des
parties ne justifie donc en rien la transmission de l'information
obligatoire.
Aussi, nous verrons plus infra ce que l'on entend par cautions
professionnelles.
32 F. Terré, Ph. Simler, Y. Lequette, Op.
cit., n ° 455, p.506 ; Viney et Jourdain, Les conditions de la
responsabilité, n° 512.
33 M. Cabrillac, Ch. Mouly, S. Cabrillac, Ph.
Pétel, Droit des sûretés, 10e éd., 2015,
LexisNexis, n° 78, p. 65.
34 F. Terré, Ph. Simler, Y. Lequette, Op.
cit., n° 259, p. 287.
35
Cass. Com., 25 mai 1993, Bull. civ. IV,
n° 203.
19
Enfin, en ce qui concerne l'ignorance légitime de
l'information par l'une des parties et la présomption de connaissance de
l'autre partie, il convient de signaler que l'information
réclamée au créancier garanti est une information que le
créancier garanti connaît ou se doit de connaître :
l'information de la défaillance du débiteur principal et celle
sur l'évolution de la dette cautionnée. D'ailleurs, le professeur
TERRE affirme que « les tribunaux n'hésitent pas à
considérer que, de par sa qualification, le professionnel connaissait ou
devait connaître l'information »36.
Toutefois, en ce qui concerne l'information spécifique
de la caution, on constate que l'exclusivité de la connaissance de
ladite information par le créancier est discutable puisque la caution
peut être au courant de la situation du débiteur surtout lorsque
ladite caution est par exemple le dirigeant social de la société
cautionnée.
L'on constate donc que seule la nature du contrat a
été prise en compte par le législateur français
pour imposer l'obligation d'information de la caution au créancier. Un
tel comportement de la part législateur ne semble pas se
préoccuper de la doctrine, mais prend plutôt sa source dans
d'autres considérations.
Section 2 : les fondements de l'information
obligatoire
Les fondements des informations de la caution sont de deux
ordres. D'une part, nous avons ceux liés à la morale
(Paragraphe 1) et d'autre part, ceux relatifs à un
déséquilibre entre les deux parties (Paragraphe
2).
Paragraphe 1 : Les fondements liés à la
morale
« Un fondement est une notion première qui
explique d'une manière théorique une règle juridique
existante »37. Aussi, il faut signaler que la règle
juridique est souvent viscéralement attachée à la
règle morale voilà pourquoi c'est dans la morale que le fondement
de certaines lois se trouve. D'ailleurs, le professeur Georges RIPERT faisait
état d'une véritable corrélation entre les deux
règles en affirmant que « le droit ne peut se développer que
par une montée continue de la sève morale »38.
Nous verrons donc tout d'abord la bonne foi (A), puis une
extension de celle-ci : le solidarisme contractuel (B).
36 Civ. 1re civ., 18 avr. 1989, Bull. Civ.
I, n° 150, p. 99.
37 L. Bruneau, Op. cit., p. 122, n°
116.
38 G. Ripert, La règle de morale dans les
obligations civiles, LGDJ, 1949, p. 11.
20
A- La bonne foi
Afin d'éviter tout amalgame, nous commencerons par
définir la bonne foi dont il est ici question (1), puis
nous verrons la bonne foi comme fondement à l'obligation d'information
(2).
1) La bonne foi contractuelle
Tout d'abord, il convient de préciser qu'il existe
deux acceptions de l'expression « bonne foi » en droit. L'une d'entre
elles veut que la bonne foi soit « la croyance erronée et non
fautive en l'existence ou l'inexistence d'un fait, d'un droit ou d'une
règle juridique »39. Mais, l'acception dont nous faisons
allusion dans notre travail est la première acception de l'expression,
autrement dit celle qui veut que la bonne foi soit « la loyauté
dans la conclusion et l'exécution des actes juridiques
»40.
Ensuite, nous devons ajouter que la bonne foi qui fait
l'objet de notre étude est une bonne foi contractuelle qui évoque
un comportement loyal et une attitude intègre durant l'exécution
du contrat. En effet, il convient d'opérer une distinction étant
donné que la bonne foi règne en droit des contrats, et ce, bien
avant la formation du contrat.
Ainsi, si, en France, l'article 1134 alinéa 3 de
l'ancien Code civil français disposait que « [les conventions]
doivent être exécutées de bonne foi », aujourd'hui, le
nouveau Code civil français (rentré en vigueur le 1er
octobre 2016), en son article 1104, dispose que « Les contrats doivent
être négociés, formés et exécutés de
bonne foi ».
Cette partie de notre travail porte sur la bonne foi
tirée de l'article 1134 de l'ancien Code civil français, une
bonne foi contractuelle qui cesse lorsque la condition suspensive à
laquelle étaient soumis les liens contractuels a
défailli41.
2) La bonne foi comme fondement de l'obligation
d'informer son cocontractant
Monsieur François CAMPAGNOLA nous enseigne qu'«
Historiquement, le principe de bonne foi est né de la
nécessité de faire contrepoids à la toute-puissance du
formalisme juridique qui caractérisait alors le contrat de droit romain.
À l'autre bout du spectre, l'émergence de la théorie de
l'autonomie de la volonté au début du XIXe siècle signifia
un
39 Raymond Guillien, Op. cit., p. 116.
40 Idem.
41 Cass. Civ. 3e, 14 sept. 2005, n° 04-10856, RID
civ. 2005, p. 776, obs. J. Mestre et B. Fages.
21
temps le glas juridique du principe de bonne foi. Entre les
deux périodes, le principe de bonne foi trouva matière à
consolidation au Moyen-âge et à l'époque moderne avant de
resurgir à nouveau dans les années 1980. Sans en surestimer
l'impact, le principe de bonne foi constitue un phénomène
particulièrement prégnant du droit des contrats
»42. En effet, avant la prise en compte des
intérêts des cocontractants dans le droit positif, chacun des
contractants n'était responsable que du fait des obligations
contractées et seulement du fait de celles-ci.
Ainsi, Mademoiselle Myriam MEHANNA constate que « [la
bonne foi] a donc stimulé un nombre important d'obligations, de normes
de comportement qui traversent le contrat de sa formation à son
extinction ou même après »43.
Cette montée en puissance de la bonne foi dans le droit
positif fait dire aux professeurs Rémy CABRILLAC, Philippe SIMLER,
Philippe DELEBECQUE, Séverine CABRILLAC, Murielle FABRE-MAGNAN, NKOU
MVONDO Prosper et plusieurs membres de la doctrine française et
d'Afrique francophone que la bonne foi est le fondement des obligations
légales d'information.
Toutefois, nous observons une certaine dérive ou une
« hypertrophie »44 de la notion de bonne foi contractuelle
qui se transforme alors en altruisme ou en solidarisme contractuel.
B- Le solidarisme contractuel
Plusieurs auteurs français font état d'un
brusque changement dans le droit des contrats amorcé dans les
années 1980 (1), ledit phénomène se
traduit par une hypertrophie du devoir de loyauté entre les parties
durant les rapports contractuels (2).
1) La résurgence du solidarisme contractuel en
France
Le professeur Rémy CABRILLAC remarque qu'« un
courant de pensée aux racines anciennes quoique floues, le solidarisme
contractuel, a récemment ressurgi, porté par de jeunes et
talentueux auteurs, pour considérer le contrat non plus comme la
rencontre d'intérêts égoïstes
42François Campagnola, Bonne foi et
loyauté en droit des contrats, 16 sept. 2016, article
consulté le 24 janv. 2017, disponible sur
http://www.village-justice.com/articles/Bonne-foi-loyaute-droit-des-contrats,23007.html
43 M. Mehanna, La prise en compte de
l'intérêt du contractant, Thèse Paris II, 2014, p.
105.
44 Ibid., p.104.
22
mais une oeuvre de coopération entre partenaires. Cette
conception se traduirait en particulier par un devoir de loyauté et de
coopération des parties pour la bonne exécution du contrat
»45.
Toutefois, comme le fait remarquer l'auteur « le
solidarisme contractuel est loin de faire l'unanimité en doctrine
»46.
Certains auteurs tels que le professeur Manuela BOURASSIN
pensent en effet que « le solidarisme contractuel dans les contrats
unilatéraux n'a pas de sens. (...) Dans la mesure où ces contrats
ont pour fonction de protéger les intérêts d'une seule
partie, il est encore plus contestable dans les contrats synallagmatiques de
justifier le devoir de solidarité par l'union des intérêts
des parties. Si des raisons pratiques et idéologiques permettent de
discuter le bien-fondé de la justification du devoir de
coopération par le solidarisme en matière de contrats
synallagmatiques, ce sont des raisons purement juridiques qui imposent
d'écarter cette justification en matière de contrats
unilatéraux »47.
Ainsi, tout d'abord, le professeur rejette le solidarisme dans
un contrat synallagmatique étant donné que l'union des
intérêts des contractants est insensée - les
intérêts étant divergents. Ensuite, le professeur BOURASSIN
rejette le solidarisme contractuel dans le contrat unilatéral puisque
dans ledit contrat il n'y a qu'un seul contractant qui s'engage envers l'autre
-- il n'y a que les intérêts d'une seule partie qui doivent
être pris en compte.
Toutefois, si le solidarisme contractuel est contesté,
le droit positif français exige une prise en compte des
intérêts du cocontractant le plus faible même si le
contractant dominant ne s'est pas engagé envers celui-ci - cas de
l'engagement unilatéral. D'ailleurs, ce principe est clairement mis en
exergue dans le cautionnement à travers les informations obligatoires
imposées au créancier.
2) Le solidarisme contractuel et l'obligation
d'information
Le professeur Murielle FABRE-MAGNAN constate que « comme
la morale, [le droit] est passé d'une exigence de loyauté entre
les parties à une volonté d'aider la partie la plus faible,
45 Remy Cabrillac, Droit des obligations,
11e éd., Coll. Cours Dalloz (série Droit privé), Paris,
Dalloz, 2014, n ° 27, p. 30-31.
46 Ibid.
47 M. Bourassin, L'efficacité des
garanties personnelles, préf. V. Brémont et M-N.
Jobard-Bachellier, coll. Bibliothèque de droit privé, Paris,
LGDJ, 2006, n° 156, p. 77.
23
impliquant un devoir positif d'informer celui qui ne peut pas
s'informer »48. L'on constate déjà une certaine
hypertrophie de la bonne foi.
En effet, « entendu comme l'union des cocontractants en
vue d'atteindre un but commun, le solidarisme contractuel implique un certain
altruisme de l'un, qui doit prendre en considération, voire en charge,
les intérêts de l'autre, lui consentant au besoin quelques
sacrifices »49, telle est la définition du
phénomène proposée par l'avocat général de
la Cour de cassation française, Maître Jean CEDRAS. Les
contractants ne sont donc plus contraints de se débrouiller tout seuls,
mais de collaborer en faisant preuve d'altruisme, de solidarité, voire
de fraternité50.
Le juriste affirme donc que pour le courant solidariste,
« la liberté postule l'égalité des parties, or
celles-ci sont bien souvent de facto inégales. Le contrat n'est donc pas
librement formé et sa force obligatoire doit être assouplie au
bénéfice du plus faible »51.
D'ailleurs, le professeur Friedrich KESSLER mettait
déjà le monde en garde contre les contrats standardisés
qui, selon lui, peuvent devenir des « instruments efficaces dans les mains
de seigneurs industriels et commerciaux puissants en leur permettant d'imposer
à une foule de vassaux un nouvel ordre féodal de leur propre
création »52.
Aussi, Mademoiselle Sophie LE GAC-PECH établit un lien
direct entre obligations d'information et solidarisme contractuel puisque
l'auteure définit l'obligation d'information comme « une exigence
de transparence en matière contractuelle, elle interdit de dissimuler
des éléments intéressant la relation contractuelle,
d'adopter un comportement opaque ou tendancieux à l'égard de son
cocontractant en ne lui révélant pas toutes les informations
connues »53.
48 M. Fabre-Magnan, De l'obligation
d'information dans les contrats, Thèse, bibliothèque de
droit privé, 1992, n° 5.
49 Jean Cédras, Le solidarisme
contractuel en doctrine et devant la Cour de cassation, article disponible
sur le site
https://www.courdecassation.fr/publications
26/rapport annuel 36/rapport 2003 37/deuxieme partie tud es documents 40/tudes
diverses 43/doctrine devant 6260.html [consulté le 3 février
2017]
50 Ibid.
51 Idem.
52 Friedrich Kessler, Columbia Law Review,
vol. 43, 1943, p. 640. Traduit de l'anglais par Alice Dhonte dans son
mémoire intitulé « Le contrat dans la pensée
américaine de Friedrich Kessler », Mémoire de
l'université de Lille II, 2001.
53 S. le Gac-Pech, L'obligation
omniprésente, mais en mal de connaissance ? ; RLDC 2012/97, n°
4828, p. 87.
24
L'auteur ajoute que lesdites obligations légales «
[imposent] également aux parties d'agir avec clarté et
honnêteté au moment de la conclusion du contrat comme lors de son
exécution »54.
Au professeur MALAURIE et son équipe de
surenchérir en disant que « l'obligation d'information consiste
à communiquer à son contractant une information de manière
compréhensible par lui »55. Les juristes montrent ainsi
l'altruisme exacerbé exigé par le législateur
solidariste.
Le solidarisme contractuel est donc un courant
idéologique qui prône l'égalité juridique entre
contractants inégaux en fait. Mais, en ce qui concerne le contrat de
cautionnement, nous verrons plus infra que l'inégalité entre le
fort et le faible n'est pas uniquement une inégalité de fait.
Paragraphe 2 : le fondement lié au
déséquilibre entre la caution et le créancier
La recherche d'égalité entre les cocontractants
trouve sa raison dans le constat de déséquilibre entre les
parties à un contrat. Tantôt, ledit déséquilibre est
causé par le droit lui-même (A), tantôt le
manque d'équilibre est plutôt dû à des
inégalités socioéconomiques (B).
A- Le déséquilibre psychologique et
juridique : le caractère unilatéral de l'engagement et l'oubli de
l'engagement
Le plus curieux c'est lorsque le droit provoque lui-même
des déséquilibres entre les parties à un contrat
spécifique (1) et que ce déséquilibre
entraîne des désagréments tels que l'oubli
(2).
1) Le caractère unilatéral du
cautionnement
La spécificité du contrat de cautionnement
oblige le législateur français (puis le législateur OHADA)
à imposer des règles supplémentaires à l'une des
parties.
En effet, les professeurs Séverine CABRILLAC et
Philippe PETEL observent qu'« en règle général, le
cautionnement ne fait naître d'obligation qu'à la charge de la
caution ; il est pour cela unilatéral. Le fait que la caution n'ait
guère de possibilités de défendre elle-même ses
54 Ibid.
55 Ph. Malaurie (dir.), L. Aynès, P. Crocq,
Les sûretés, la publicité foncière, 7e
éd., coll. Droit privé, Defrénois, 2013, n° 297, p.
136-137.
25
intérêts, en raison de son absence de
contribution à la dette, entraîne pour le créancier un
devoir original : prendre en charge, pour partie, la protection des
intérêts de la caution »56.
Aussi, le professeur Stéphane PIEDELIEVRE explique que
« les obligations d'information ont pour but de contrebalancer le
caractère unilatéral du contrat de cautionnement qui peut
n'être établi qu'en un seul exemplaire, même si cela devient
rare en pratique »57.
En effet, comme en dispose l'article 1326 de l'ancien Code
civil français, « l'acte juridique par lequel une seule partie
s'engage envers une autre à lui payer une somme d'argent ou à lui
livrer un bien fongible doit être constaté dans un titre qui
comporte la signature de celui qui souscrit cet engagement ainsi que la
mention, écrite par lui-même, de la somme ou de la quantité
en toutes lettres et en chiffres (...) ». L'instrumentum constatant le
cautionnement peut donc légalement n'être tiré qu'en un
seul exemplaire souvent gardé par le créancier.
Toutefois, en dépit de la dangerosité des
contrats unilatéraux, certains auteurs contestent le comportement
protecteur du législateur français. Ainsi, le professeur Manuela
BOURASSIN s'insurge en rappelant que « le solidarisme contractuel dans les
contrats unilatéraux n'a pas de sens. (...) Dans la mesure où ces
contrats ont pour fonction de protéger les intérêts d'une
seule partie »58. Mais, l'on constate que ces auteurs ne
s'appuient que sur des arguments purement juridiques sans tenir compte de la
réalité.
Les informations obligatoires dans le contrat de cautionnement
qui est un engagement unilatéral servent alors de contrepoids et
tiennent leur essence dudit caractère unilatéral du cautionnement
qui nuit à la caution qui oublie souvent son engagement...
2) La possibilité d'oubli de l'engagement par
la caution
Le doyen SIMLER regrette d'une part que « Le formalisme
du contrat de cautionnement en un seul original, conséquence de son
caractère unilatéral, [ne soit] pas sans inconvénient.
L'acte ainsi dressé est destiné au créancier, seul
censé en avoir besoin en tant qu'instrument
56 M. Cabrillac, Ch. Mouly, S. Cabrillac, Ph.
Pétel, Op. cit., 10e éd., 2015, LexisNexis, n° 78,
p.65.
57 S. Piedelièvre, obs. sous Cass. Civ.1re, 9
nov. 2004, n° 01-03-772, Bull.I n° 252, p. 210.
58 M. Bourassin, L'efficacité des garanties
personnelles, préf. V. Brémont et M-N. Jobard-Bachellier,
coll. Bibliothèque de droit privé, Paris, LGDJ, 2006, n°
156, p.77.
26
de preuve. Il se peut donc que la caution n'en conserve aucune
trace. Or, le contentieux révèle une singulière
faculté d'oubli de la part des cautions ».59
Pourtant, d'autre part, le professeur note que dans la
pratique les établissements de crédit suppléent alors la
loi en remettant un exemplaire du contrat de cautionnement à la
caution60.
À l'instar des professeurs PIEDELIEVRE et SIMLER, le
juriste NKOU MWONDO Prosper constate les mêmes inconvénients en
droit de l'OHADA qu'en France ; « dans la pratique, on a observé
que généralement, la caution s'engage en signant simplement un
document que conserve seul le créancier. Pourtant, la caution qui n'a
pas un exemplaire du contrat dans ses propres archives peut oublier qu'elle
s'est engagée quelque part »61.
Le juriste déplore également que « le
législateur africain (OHADA) n'[ait] pas profité des nouveaux
textes pour imposer la rédaction du contrat de cautionnement en double
exemplaire, dont un sera détenu par la caution »62.
L'oubli de l'engagement provoqué par le
caractère unilatéral du cautionnement peut être un
fondement ou du moins l'une des raisons d'être de l'obligation
d'information de la caution surtout dans le cas d'un cautionnement de longue
durée ou à durée indéterminée. L'information
obligatoire tient alors le rôle de sonnette d'alarme contre l'oubli de
l'engagement souscrit par la caution. Toutefois, au-delà de l'oubli et
du caractère unilatéral de certains engagements un état de
fait est pris en considération pour imposer des obligations aux
contractants dominants.
B- Le déséquilibre de fait : La
vulnérabilité de la caution au fondement de l'obligation
d'information
Avec la montée des mouvements solidariste et
consumériste marquant la France en ce XXIe siècle, nous pouvons
relever comme dernier fondement de l'obligation d'information de la caution, la
vulnérabilité de la partie la plus faible au contrat, en
l'occurrence la caution qui est alors assimilée à un
consommateur.
La vulnérabilité d'une partie au contrat renvoie
en pratique à la relation entre profane et professionnel, voilà
pourquoi, les auteurs J. CALAIS-AULOY et F. STEINMETZ estiment
59 Ph. Simler, Op. cit., n° 57, p.69.
60 Ibid.
61 NKOU MVONDO P., Op. cit., n ° 47, p.
20.
62 Ibid.
27
que « les consommateurs sont naturellement en position de
faiblesse vis-à-vis des professionnels »63. Or, pour les
auteurs, « la loi a pour fonction de protéger les faibles contre
les forts »64.
Pour mener à bien notre travail, il convient
d'expliciter non seulement le terme vulnérabilité, mais aussi les
notions de consommateurs et de professionnels au sens juridique
(1). Aussi nous ferons mention d'une certaine animosité
de la part de certains auteurs au sujet de la notion de
vulnérabilité (2).
1) Définitions et notions
Tout d'abord, il n'existe aucune définition
particulière du terme vulnérabilité en droit, ce mot est
donc employé au sens courant. Ainsi, selon le dictionnaire Larousse, la
vulnérabilité signifie le caractère de ce qui est
vulnérable et le mot « vulnérable » désigne
celui ou celle qui est susceptible d'être attaqué.
Ensuite, le lexique des termes juridiques du Raymond GUILLIEN
indique que le consommateur est « une personne qui conclut avec un
professionnel un contrat lui conférant la propriété ou la
jouissance d'un bien ou d'un service destiné à un usage personnel
ou familial, à l'exclusion de toute finalité professionnelle
»65, aussi la définition ajoute que « la
jurisprudence assimile parfois au consommateur le professionnel qui conclut un
contrat sans lien direct avec son activité »66.
Enfin, le professionnel est une « personne physique ou
morale qui, dans le cadre de sa profession, exerce une activité de
fabrication, de distribution ou de prestation de service », le lexique des
termes juridique ajoute que le professionnel est réputé
compétent et avisé voilà pourquoi il est soumis à
des règles dérogatoires protectrices du consommateur
profane67.
Mais, si cette présomption de
vulnérabilité du consommateur est tolérée par
certains auteurs, elle est également largement critiquée en
doctrine en dépit de la justesse de ce principe.
63 J. Calais-Auloy et F. Steinmetz, Droit de la
consommation, Précis Dalloz, 1996, 4e éd., n° 18.
64 Ibid.
65 Raymon Guillien et al., Op.cit.,
p. 221.
66 Idem.
67 Ibid., p.691
28
2) La critique de la notion de
vulnérabilité des contractants en tant que fondement de la
protection exorbitant du droit commun
La vulnérabilité comme fondement de la
protection du contractant ne fait pas l'unanimité. En effet, en
dépit de l'état de dépendance économique de l'une
des parties (a), certains auteurs ne trouvent guère ce
fondement pertinent (b).
a. La violence économique et la
vulnérabilité du consommateur
Pour les partisans de la vulnérabilité comme
fondement de la protection du contractant, la situation de fait du
débiteur justifie les obligations pesant sur la partie la plus forte au
contrat. Toutefois, comment se manifeste concrètement cette
vulnérabilité du contractant ?
Dans le milieu du crédit par exemple, Mademoiselle
Audrey HUYGENS constate une certaine violence économique exercée
par les créanciers sur les débiteurs et cautions. Il faut
signaler que la violence économique n'est pas une notion nouvelle, car
il s'agit tout simplement du vice de consentement qu'est la violence à
laquelle l'on a rajouté le terme « économique » afin
d'identifier la nature de la violence subie par le contractant et distinguer
ladite violence économique de la violence physique ou morale.
Ainsi, tout d'abord, dans le contrat de prêt, la juriste
fait remarquer que « l'établissement de banque dispose d'un pouvoir
déséquilibrant dont il peut faire usage lorsqu'il affronte un
emprunteur économiquement fragile »68, puisque « le
prêteur sait que la menace d'un refus de prêt et la position
économique embarrassante qui s'en suivrait, exerce une pression que la
volonté de l'emprunteur telle qu'il acceptera les termes imposés
(sic) »69.
Ensuite, dans la relation triangulaire du cautionnement,
Mademoiselle Audrey HUYGENS explique comment le débiteur est contraint
de fournir une caution. En effet, selon la juriste, « Un débiteur
en situation d'infériorité, du fait de ses difficultés
financières, se voit obliger par [le pouvoir
déséquilibrant de l'établissement de banque] d'offrir une
garantie personnelle dont l'étendue est déterminée par ce
dernier, la caution quant à elle tant à l'égard du
débiteur principal que de cette dernière se trouver
également en état de dépendance (sic)
»70.
La vulnérabilité de la caution et celle du
débiteur principal créent alors un déséquilibre
considérable entre ceux-ci et le créancier.
68 Audrey Huygens, La violence
économique, Mémoire de l'université de Lille II,
2001, n° 68, p. 39.
69 Ibid.
70 Ibid.
29
En effet, le professeur Georges RIPERT confirmait une telle
pensée lorsqu'il affirmait que « si l'un des contractants peut
imposer sa volonté, si l'autre est obligé par la
nécessité d'adhérer sans discuter, le contrat n'est que la
loi du plus fort »71.
Au vu de la situation précaire des consommateurs par
rapport à celle des créanciers professionnels, la jurisprudence a
jugé que « le consommateur moyen, au regard notamment du Code de la
consommation, ne peut plus être considéré comme l'homme
actif, instruit, diligent, avisé qu'était le bon père de
famille, dans le Code Napoléon, mais comme un être plus
vulnérable auquel doivent être présentés de
façon claire tous les termes du marché et tous les risques
auxquels il s'expose »72.
Mais, certains auteurs se sont insurgés contre le
solidarisme contractuel au profit des consommateurs naturellement
vulnérables.
b. La contestation de la vulnérabilité
comme fondement de la protection des contractants
En ce qui concerne la vulnérabilité
économique de l'une des parties au contrat, le professeur Jacques
GHESTIN estime avec pertinence que « le droit positif ne peut tenir compte
de toutes les contraintes sociales et économiques qui s'exercent sur la
volonté »73. En effet, c'est nécessairement un
état de nécessité qui force les individus à
développer des rapports de droit entre eux, en conséquence cet
état de nécessité ne saurait servir à annuler ce
qu'il a lui-même engendré.
Aussi, certains auteurs vont plus loin en déclarant
qu'« on ne voit pas pourquoi une catégorie de citoyens
bénéficierait seule des règles de protection exorbitante
du droit commun par le fait qu'elle se situe au bout de la chaîne de
distribution »74. Si l'on constate ici un véritable
refus de l'idée d'une prise en compte de la vulnérabilité
des consommateurs, ce refus est dû à la surprotection d'un seul
contractant. En effet, les auteurs semblent contester un certain
déséquilibre juridique provoqué par le législateur
et le juge solidaristes dans les contrats conclus entre profanes et
professionnels, un déséquilibre au détriment desdits
professionnels.
D'autres auteurs reprochent au législateur de vouloir
infantiliser les consommateurs. D'ailleurs pour Monsieur Pascal BRUCKNER «
l'infantilisme combine une demande de
71 G. Ripert, Aspects juridiques du capitalisme
moderne, LGDJ, coll. Reprint, Paris, éd. 2e, 1951, p. 40.
72 CA Bourges, 5 oct. 2008, JCP E 1999, p. 1417 ;
JurisData n° 043611.
73 J. Ghestin, Traité de droit civil-
la formation du contrat, LGDJ, 3e éd., Paris, 1993, n° 582, in
fine, p. 565.
74 J. Mazeaud et F. Chabas, Leçons de droit
civil, T.2, 1er vol., Théorie Générale,
2éd., 1998, n°32-3.
sécurité avec une avidité sans borne,
manifeste le souhait d'être pris en charge sans se voir soumis à
la moindre obligation »75. En effet, la Cour d'appel de Bourges
avait jugé que « le consommateur moyen (...) ne peut plus
être considéré comme l'homme actif, instruit, diligent et
avisé qu'était le bon père de famille, dans le Code
Napoléon »76. Le consommateur moyen est alors comparable
à un enfant.
Néanmoins, en dehors de tout état de
nécessité, s'il est vrai que le principe veut que «
l'acheteur [doive] être curieux »77 et que l'on ne
saurait dispenser le consommateur ou la caution de faire usage de son bon sens,
il convient toutefois de constater que la technicité de certains
contrats de la vie courante demande des aptitudes que le consommateur moyen, en
l'occurrence la caution lambda, ne possède pas.
30
75 P. Bruckner, La tentation de l'innocence,
Grasset 1995, p.15.
76 CA Bourges, 5 oct. 2008, préc.
77 P. Jourdain, Le devoir de se renseigner,
D. 1983, D. 1983. 139.
Chapitre 2 : les obligations d'information au
profit de la caution : Du droit français au droit de l'Afrique
francophone
Une analyse comparative et chronologique entre les
dispositions du droit de l'OHADA et les dispositions françaises en la
matière fera l'objet de la première partie de ce deuxième
chapitre (Section 1). La seconde partie du chapitre sera
consacrée aux modalités d'application des obligations
d'information au profit de la caution (Section 2).
Section 1 : Analyse chronologique et comparative de
l'information obligatoire de la caution en France et en droit de l'OHADA
Le droit de l'OHADA s'inspire fortement du droit
français, voilà pourquoi une comparaison entre les dispositions
du droit français et celles du droit de l'OHADA s'impose. Ainsi, nous
parlerons des obligations d'information dans leur contexte originel
(Paragraphe 1), puis dans leur contexte secondaire
(Paragraphe 2).
Paragraphe 1 : Les obligations d'information au profit
de la caution en droit français
En France, le professeur SIMLER vante les mérites des
obligations d'informations mises à la charge du créancier. En
effet, pour le doyen, « ces mesures tendant à une meilleure
information des cautions en cours de contrat sont assurément dans leur
principe, utiles. Elles corrigent opportunément certains
inconvénients du caractère unilatéral du cautionnement et
de l'établissement d'un seul original de l'acte. Elles portent
remède au risque d'oubli par les cautions des engagements pris et, pour
les héritiers, d'ignorance de l'existence même de tels engagements
de leur auteur. Elles rendent attentives à la possibilité de
mettre fin à la garantie, si elle a été conclue pour une
durée indéterminée, spécialement s'il y a eu une
modification dans la situation qui a déterminé leur engagement
(cessation des fonctions, divorce, perte d'emploi...) »78.
À la lecture de ce qui précède, l'on comprend rapidement
l'importance des obligations d'information imposées au créancier
durant l'exécution du cautionnement.
Ainsi, après avoir pris conscience de l'utilité
des informations obligatoires et afin de mieux cerner l'évolution de
l'information de la caution en France, il convient de faire un bref
exposé chronologique tout d'abord sur l'information sur l'état de
la dette (A), puis sur celle relative à la
défaillance du débiteur principal (B).
31
78 Ph. Simler, Op. cit., n° 430, p.
443.
32
A- L'information périodique en France
L'information périodique de la caution est celle qui a
pour objet la communication de l'état de la dette à la caution.
En France, la communication de l'information périodique est souvent
effectuée à fréquence annuelle et concerne non seulement
une multitude de cautions (caution profane, caution avertie, personne physique,
caution professionnelle), de débiteurs (entreprise sociétaire,
entreprise individuelle, personne physique) et de créanciers
différents (établissement de crédit, créancier
professionnel, créancier non professionnel), mais aussi des situations
différentes (concours financier, dette professionnelle, engagement
indéfini, crédit à la consommation).
Toutefois, comme nous l'avons mentionné plus haut, au
XVIIIe siècle en France et dans les sociétés
libérales en général, la règle veut que les parties
s'informent toutes seules. Ainsi, une chronologie de l'obligation d'information
périodique en France doit être effectuée
(1) afin de mettre en exergue l'évolution du droit
positif en la matière. En effet, depuis le milieu des années
1980, nous constatons un certain engouement du législateur
français pour imposer aux créanciers des obligations
d'information (2).
1) L'historique de l'information périodique en
France
Tout d'abord, nous avons découvert que l'information
périodique de la caution trouvait son origine dans une loi
spéciale (a) qui subit des modifications au fil du
temps, puis nous avons constaté que celle-ci ouvrit la voie à
d'autres informations de la caution (b).
a. La première obligation d'information
périodique
Le droit français connaît l'information de la
caution sur l'évolution de la dette depuis le 1er mars 1984, soit
quatorze ans avant l'entrée en vigueur du premier acte uniforme portant
organisation des sûretés (1er janvier 1998). En
revanche, depuis 1998, le droit de l'OHADA a le mérite de ne
connaître qu'une seule obligation d'information périodique
contenue dans un seul et même texte. En effet, en France, il existe
plusieurs obligations d'information périodique au profit de la caution,
mais elles sont toutes issues de l'article 48 de la loi n° 84184 du
1er mars 1984 relative à la prévention et au
règlement amiable des difficultés des entreprises. Cette loi a
donc subi une extension de son champ d'application et une mutation pour
s'appliquer à tout type de cautionnements (cautionnement limité
et illimité en montant, à durée déterminée
et à durée indéterminée) et à tout type de
cautions.
33
La loi de 1984 se présentait comme suit :
« Les établissements de crédit ayant
accordé un concours financier à une entreprise, sous la condition
du cautionnement par une personne physique ou une personne morale, sont tenus
au plus tard avant le 31 mars de chaque année de faire connaître
à la caution le montant du principal et des intérêts,
commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre
de l'année précédente au titre de l'obligation
bénéficiant de la caution ainsi que le terme de cet engagement.
Si l'engagement est à durée indéterminée, ils
rappellent la faculté de révocation à tout moment et les
conditions dans lesquelles celle-ci est exercée.
Le défaut d'accomplissement de la formalité
prévue à l'alinéa précédent emporte, dans
les rapports entre la caution et l'établissement tenu à cette
formalité, déchéance des intérêts
échus depuis la précédente information jusqu'à la
date de communication de la nouvelle information ».
L'article 48 de loi de 1984 fut donc le précurseur en
matière d'information périodique de la caution en France, mais
ledit article dut évoluer afin de protéger un maximum de
cautions.
b. L'évolution de l'information sur
l'état de la dette en France
L'évolution de l'information périodique de la
caution s'est effectuée en deux phases. Premièrement, l'article
48 de loi de 1984 évolua (1°).
Deuxièmement, l'article 48 fut repris en substance par d'autres lois
(2°).
1°) L'évolution de la loi de
1984
D'une part, la loi de 1984 fut l'objet d'un amendement avec
l'entrée en vigueur de la loi n° 99-532 du 25 juin 1999 relative
à l'épargne et à la sécurité
financière puisque l'article 114 de la loi de 1999 ajouta un
alinéa à ladite loi de 1984. Ledit alinéa disposait que
« les paiements effectués par le débiteur principal sont
réputés, dans les rapports entre la caution et
l'établissement, affectés prioritairement au règlement du
principal de la dette ». Il convient de noter que ce dispositif a
été mis en place afin de déroger à l'article 1254
du Code civil français ancien qui impute les paiements partiels
effectués par le débiteur principal aux intérêts en
priorité -- ledit article de droit commun aurait inévitablement
causé la disparition de l'assiette de la sanction du défaut
d'information périodique (les intérêts échus).
34
D'autre part, à partir du 1er janvier 2001,
l'article 48 de la loi de 1984 (et son amendement) intégra le Code
monétaire et financier (CMF) et devint l'article L.313-22
récemment modifié par l'article 84 de la loi n° 2016-1691 du
9 décembre 2016.
En outre, nous pouvons relever que si la loi de 1984 ne
concernait que les entreprises (débiteurs), les établissements de
crédit (créanciers) et les personnes physiques ou morales
(cautions), l'article 47-II de la loi n° 94-126 du 11 février 1994
relative à l'initiative et à l'entreprise individuelle
élargit le champ d'application de l'information périodique de la
loi de 1984 aux entreprises individuelles -- les cautions desdites entreprises
sont désormais bénéficiaires de l'information
périodique. Les dettes garanties étaient alors des dettes
professionnelles au lieu de concours financier.
Cependant, l'évolution de l'information
périodique ne se limita pas à une simple intégration dans
le CMF, à un ajout ou à une extension de son champ d'application.
En effet, la loi de 1984 donna naissance à d'autres obligations
d'information qui reprirent son objet en s'étendant à d'autres
situations ou à d'autres catégories de cautions.
2°) Les lois émanant de la loi de
1984
En 1998, non seulement le législateur français
reprit en substance la loi de 1984 en l'appliquant à d'autres cautions
et d'autres créanciers, mais aussi il fit de l'information
périodique de la caution une disposition de droit commun. En effet,
l'article 101 de la loi n° 98-657 du 29 juillet 1998 d'orientation
relative à la lutte contre les exclusions qui reprit le principe de
l'information périodique des cautions devint l'article 2293 du Code
civil français ancien. Aussi, l'article du Code civil élargit
considérablement le nombre de bénéficiaires de
l'obligation d'information -- l'information périodique était
désormais due à toute personne physique ayant souscrit un
cautionnement indéfini, peu importe la qualité du
créancier.
Il convient de préciser qu'un cautionnement
indéfini est celui dont « la caution garantit des dettes dont
personne ne connaît l'étendue, ni souvent la nature ou le montant
»79 étant donné que « la caution garantit
toutes les dettes qui naîtront entre le débiteur et le
créancier, notamment par le compte courant »80.
Puis, en 2003, apparut l'article 11-II de la loi n°
2003-721 du 1er août 2003 pour l'initiative économique
qui accorda le bénéfice de l'information périodique
à un type particulier de
79 M. Cabrillac, Ch. Mouly, S. Cabrillac et Ph.
Pétel, Op. cit., n° 199, p. 146.
80 Ibid., n° 199, p. 147.
35
personnes physiques : les consommateurs. Le débiteur de
l'information de ladite loi est alors le créancier professionnel. Notons
que la loi de 2003 a été intégrée à l'ancien
Code français de la consommation afin de devenir l'article L.341-6, puis
l'article L.333-2 du Code de la consommation de 2016.
Donc, l'information périodique de la caution est une
obligation d'origine française. Toutefois, la prodigalité du
législateur français en matière d'obligations
d'information n'est pas perçue d'un très bon oeil.
2) La critique de la multiplicité des
obligations d'information périodique en France
Tout d'abord, il convient de noter que la doctrine
française n'est pas très tendre avec le législateur
lorsqu'il s'agit d'obligations d'information en général. Ainsi,
au sujet de l'inflation des dispositions imposant l'information obligatoire de
la caution, la juriste Séverine CABRILLAC est assez partagée
puisqu'elle déclare qu'« astreindre le créancier à
informer la caution de l'évolution du risque qu'elle a pris est une
idée excellente qui recueille l'adhésion générale.
La mettre en page aurait pu être relativement simple
»81.
Aussi, le professeur de la faculté de Montpellier
déplore « la maladresse et la légèreté
persistantes du législateur [qui] ont introduit en la matière une
inutile complication »82. En effet, le professeur remarque que
le législateur « a multiplié les interventions sans se
préoccuper de les coordonner et d'élaguer ce qui devenait inutile
»83.
Quant au doyen SIMLER, il va également dans le
même sens que la juriste alors qu'il vantait tout d'abord le
mérite des mesures tendant à informer les cautions puisqu'il fait
remarquer que « l'empilement et l'enchevêtrement de ces diverses
obligations, qui se recoupent partiellement, alors que leurs modalités
de mise en oeuvre et leurs sanctions ne sont pas identiques, sont
particulièrement regrettables »84.
Cependant, certains juristes sont profondément contre
l'idée d'une obligation d'information en droit positif. En effet, le
professeur François TERRE déclare que « l'information des
contractants est sans doute l'un des meilleurs exemples de ce que juge et
législateur jouent trop souvent, à l'époque actuelle, leur
rôle à contre-emploi. Multipliant au gré des variations de
l'opinion et des pressions de certains groupes les dispositions
catégorielles, le législateur
81 M. Cabrillac et al., Op.cit,
idem, préc.
82 Ibid., n° 317, p. 224.
83 Idem.
84 Ph. Simler, Op. cit., n° 430, p.
443.
36
développe un formalisme informatif minutieux, dont la
cohérence n'est pas la qualité première
»85.
Puis, en ce qui concerne les obligations spéciales
d'information de la caution, le professeur va encore plus loin en affirmant que
« le cautionnement est désormais l'objet d'une multiplicité
d'obligations spéciales d'information qui se chevauchent et
s'interpénètrent au gré des inspirations et des
improvisations sans que la situation des intéressés en soit
améliorée »86.
Enfin, allant dans le même sens que le professeur TERRE,
le professeur Séverine CABRILLAC, d'abord modéré au sujet
des informations obligatoires de la caution, souligne « la pauvreté
de l'information légale, figée et déjà
périmée lorsqu'elle est émise, ainsi que la
légèreté de la sanction qui l'assortit, indice de la
futilité que le législateur lui attribue »87.
D'ailleurs, madame CABRILLAC se montre aussi amère que le professeur
TERRE lorsqu'elle affirme que « l'on s'apitoie non plus sur les cautions
négligentes, mais sur les débiteurs et les cautions
sérieux, qui doivent pouvoir éviter le coût
injustifié d'une mesure dont l'efficacité reste à
démontrer »88.
Pourtant, au-delà du manque de cohérence dans la
mise en oeuvre des obligations d'information des cautions, l'obligation
d'information sur l'évolution de la dette cautionnée est
très importante en France non seulement au vu de la multiplicité
des textes qui la régissent, mais aussi au vu de l'immensité du
contentieux relatif à l'information annuelle des cautions. En effet, au
25 janvier 2017, le site
legifrance.gouv.fr comptait
près de 434 résultats pour les recherches intitulées
« information annuelle des cautions ».
L'information périodique est donc une obligation
d'origine française qui couvre une multitude de cautions, mais dont la
mise page est incohérente. Il en est de même pour l'information
ponctuelle de la caution.
B- L'information ponctuelle en France
En tant que garant du paiement de la dette, la caution se doit
d'être informée de la défaillance du débiteur
principal afin qu'elle puisse se préparer à rembourser le
créancier (1). Cependant, l'on constate qu'une fois de
plus le législateur français a multiplié les obligations
d'information de la caution (2).
85 F. Terré, Ph. Simler et Y. Lequette, Op.
cit., n° 257, p. 284.
86 Ibid. , , n° 261 p. 292.
87 M. Cabrillac et al., Op. cit., n°
329, p. 239.
88 Idem.
37
1) L'information ponctuelle de la caution : une
formalité émanant du caractère accessoire du cautionnement
L'information ponctuelle de la caution est non seulement une
formalité à laquelle le créancier ne peut déroger
(b), mais aussi elle découle du caractère
accessoire du cautionnement (a).
a. Information ponctuelle et caractère
accessoire du cautionnement
Mademoiselle Samira MERBAKIA, en faisant la chronologie du
cautionnement, opère une distinction entre la « sponsio » et
le « fidejussio ». Ainsi, la « sponsio » était une
garantie par laquelle « le sponsor donnait sa parole de
désintéresser le créancier si le débiteur principal
venait à ne pas le faire. Ce faisant, ce tiers à l'obligation
principal devenait en somme un deuxième débiteur (...).
Hélas, le sponsor ne disposait d'aucun recours contre le débiteur
(...) le créancier avait donc tout le loisir de le poursuivre à
la place de débiteur sans que le sponsor ne puisse riposter
»89. Quant au « fidejussio », apparut après le
sponsio, la doctoresse nous enseigne que le fidejussor « s'engage envers
le créancier à endosser l'obligation du débiteur principal
dans le cas où ce dernier ne puisse s'exécuter
»90. Ainsi, la fidejussio « fait naître une
dissociation entre les deux obligations, celle attachée à la
dette (passée entre le créancier et le débiteur), et celle
relative à la garantie qui marquait l'engagement individuel, propre du
fidéjusseur à l'égard du créancier
»91.
En outre, le professeur Séverine CABRILLAC nous
explique le caractère accessoire du cautionnement en affirmant que
« le cautionnement est assujetti à l'opération principale
qu'il garantit par la règle de l'accessoire. Elle signifie que si, par
exemple, la créance principale est prescrite, ou déjà
payée, la caution est libérée »92.
L'auteur fait ainsi savoir qu'il existe une « opération principale
» à laquelle est assujettie l'opération secondaire qu'est le
cautionnement, de ce fait le débiteur principal et la caution ne sont
pas obligés envers le créancier par une même obligation :
ce ne sont pas des coobligés.
Vu ce qui précède, on comprend mieux la
pertinence de l'information ponctuelle de la caution. En effet, l'information
ponctuelle est donc le corollaire du caractère accessoire du
cautionnement et celui-ci ne se confond aucunement à l'obligation
principale qu'il garantit. Cependant, si l'information ponctuelle
découle du caractère accessoire du cautionnement, l'on
89 S. Habbassi-Mebarkia, La protection de la
caution, Thèse université de Valenciennes et du Hainaut
Cambresis, 2016, p. 10-11.
90 Ibid.
91 Ibid.
92 M. Cabrillac, Ch. Mouly, S. Cabrillac et Ph.
Pétel, Op. cit., n° 63, p. 55.
38
remarque également que tout créancier doit
s'astreindre à certaines formalités au moment de
l'exigibilité de la créance.
b. L'information ponctuelle : une formalité
à respecter
La nécessité d'informer la caution sur la
défaillance du débiteur principal tient aussi son fondement au
principe selon lequel le créancier doit mettre en demeure son
débiteur de payer avant d'exercer toute poursuite contre lui.
En effet, d'une part, l'article 2288 du Code civil
français ancien disposait que « celui qui se rend caution d'une
obligation se soumet envers le créancier à satisfaire à
cette obligation, si le débiteur n'y satisfait pas lui-même
». Ledit article impose tacitement l'information ponctuelle de la caution,
car la caution ne peut être poursuivie qu'à condition que le
débiteur principal soit défaillant. Le créancier doit
alors constater cette défaillance et la prouver à la caution en
la lui rapportant.
D'autre part, nous pouvons constater que la caution doit
nécessairement être informée par le créancier sur la
défaillance de débiteur. En effet, le nouvel article 1344 du
Nouveau Code civil français de 2016 dispose que « le
débiteur est mis en demeure de payer soit par une sommation ou un acte
portant interpellation suffisante, soit, si le contrat le prévoit, par
la seule exigibilité de l'obligation ». Or, la caution est
également le débiteur du créancier même si elle
n'est pas tenue par la même obligation que le débiteur principal.
En conséquence, le créancier doit la mettre en demeure de payer
au même titre que le débiteur principal.
Donc, l'information ponctuelle de la caution découle
non seulement du fait que le cautionnement soit une obligation accessoire qui
ne se confond pas à l'opération principale, mais aussi par le
fait que le créancier se doit d'informer ses débiteurs.
Toutefois, une fois encore, le législateur français a
multiplié les obligations d'information ponctuelle.
2) Le foisonnement des obligations d'information
ponctuelle en France
À l'instar des dispositions de l'obligation
d'information périodique, les textes sur l'obligation d'information
ponctuelle sont nombreux. Ainsi, la première disposition imposant au
créancier la communication de la défaillance du débiteur
principal date de 1989. Il s'agissait alors de l'article 7-3 de la loi
française n° 89-1010 du 31 décembre 1989 relative à
la prévention et au règlement des difficultés liées
au surendettement des particuliers et des familles et elle se présentait
comme suit (elle fut abrogée) :
39
« Toute personne physique qui s'est portée caution
à l'occasion d'une opération de crédit relevant de la
présente loi doit être informée par l'établissement
prêteur de la défaillance du débiteur principal dès
le premier incident de paiement caractérisé susceptible
d'inscription au fichier institué à l'article 23 de la loi
n° 89-1010 du 31 décembre 1989 relative à la
prévention et au règlement des difficultés liées au
surendettement des particuliers et des familles. Si l'établissement
prêteur ne se conforme pas à cette obligation, la caution ne
saurait être tenue du paiement des pénalités ou
intérêts de retard échus entre la date de ce premier
incident et celle à laquelle elle en a été informée
».
En outre, l'article 7-3 de la loi de 1989 a été
intégré dans l'ancien Code de la consommation en son article
L.313-9.
Ensuite, une autre obligation d'information ponctuelle a vu le
jour en 1994 par le biais de l'article 47 II de la loi n° 94-126 du 11
février 1994 citée plus haut. Ledit article pose les mêmes
bases que la loi de 1989, mais la dette cautionnée est maintenant
d'ordre professionnel et appartient à une entreprise individuelle ou
sociétaire.
Aussi, ladite loi précise l'incident de paiement
faisant l'objet de l'information ponctuelle ainsi que le point de départ
de la communication de ladite information en notant que « le
créancier informe la caution de la défaillance du débiteur
principal dès le premier incident de paiement non
régularisé dans le mois de l'exigibilité de ce paiement
».
Puis, il y a eu l'article 102 de la loi n° 98-657 du 29
juillet 1998 citée plus haut, qui fait du créancier professionnel
le débiteur de l'obligation d'information ponctuelle. Ladite loi a
été intégrée dans l'ancien Code de la consommation
en son article L.341-1, aujourd'hui L.333-1.
Le reproche fait par les professeurs Séverine CABRILLAC
et François TERRE sur la multiplicité des obligations
d'information est à peu près le même pour les informations
ponctuelles. En effet, une fois de plus, il y a un enchevêtrement des
lois et aucune abrogation des dispositions devenues inutiles.
D'ailleurs, comme le faisait remarquer le doyen SIMLER pour
les obligations d'information périodique de la caution, sur le plan de
la sanction, les omissions d'informations ponctuelles sont toutes punies par la
déchéance des pénalités et des
intérêts de retard échus alors qu'elles ne concernent
même pas les mêmes situations ni les mêmes protagonistes,
à l'exception du bénéficiaire des obligations
d'information ponctuelle qui est, à chaque fois, une personne
physique.
40
Ainsi, le zèle du législateur français en
matière d'obligations d'information de la caution est loin de faire
l'unanimité en doctrine. Pourtant, le droit français en
matière d'obligation d'information a dépassé les
frontières françaises.
Paragraphe 2 : Sources et objet des informations
obligatoires en droit de l'OHADA
Les obligations d'information prévues par le droit de
l'OHADA existent depuis près de vingt ans en dépit du faible
contentieux dont elles sembleraient faire l'objet en Afrique francophone en
comparaison au contentieux français (surtout en ce qui concerne le
contentieux de l'information périodique). Une fois de plus, l'on
distinguera l'information périodique (A) et
l'information ponctuelle (B) de la caution.
A- Sources et objet de l'information périodique en
droit de l'OHADA
En droit de l'OHADA, l'obligation d'information
périodique n'est prévue que par un seul et même article
contenu dans un seul et même Code (1). En revanche, son
objet ne diffère pas de celui des obligations du droit français
(2).
1) La source de l'information périodique en
droit de l'OHADA
La source de l'information périodique en droit de
l'OHADA est l'article 25 de l'acte uniforme portant organisation des
sûretés de 2010 (rentré en vigueur en 2011). Ledit article
25 a remplacé l'article 14 alinéa 2 de l'AUS de 1997
(rentré en vigueur en 1998).
En 1997, l'article 14 en ses alinéas 2 et 3 disposait que
:
« lorsque le cautionnement est général, le
créancier est tenu, dans le mois qui suit le terme de chaque trimestre
civil, de communiquer à la caution l'état des dettes du
débiteur principal précisant leurs causes, leurs
échéances et leurs montants en principal, intérêts,
commissions, frais et autres accessoires restant dus à la fin du
trimestre écoulé, en lui rappelant la faculté de
révocation par reproduction littérale des dispositions du
présent article et de celles de l'article 9 ci-dessus.
À défaut d'accomplissement des formalités
prévues au présent article, le créancier est déchu
vis-à-vis de la caution, des intérêts échus depuis
la date de la précédente information jusqu'à la date de
communication de la nouvelle information, sans préjudice des
dispositions de l'article 18 ci-après.
Toute clause contraire aux dispositions du présent article
est réputée non écrite ».
41
À la fin de la lecture de l'article 14 de l'AUS de
1997, nous constatons déjà une restriction des
bénéficiaires de l'information périodique sur
l'état de la dette cautionnée. En effet, en droit de l'OHADA,
seules les cautions générales peuvent revendiquer l'information
périodique.
En 2010, lors de l'adoption du nouvel AUS, l'information
périodique a eu droit à son propre article vu qu'en 1997 il
partageait l'article 14 avec l'information ponctuelle. Aussi, nous pouvons
noter quelques changements. En effet, tout d'abord, il y a la fréquence
de l'information qui est passée de trimestrielle à semestrielle.
Puis, il y a le point de départ de la communication de l'information
obligatoire qui a été précisé : « le
créancier est tenu, dans le mois qui suit le terme de chaque semestre
civil à compter de la signature du contrat de cautionnement ».
Ensuite, les intérêts échus faisant
l'objet de la déchéance en cas de défaut d'information ont
été davantage précisés : il s'agit
dorénavant « des intérêts contractuels échus
», les intérêts moratoires courant depuis la mise en demeure
de la caution étant dus.
Enfin, nous notons un allégement du formalisme
informatif puisque l'article 14 de 1997 exigeait la « reproduction
littérale des dispositions du présent article (14 AUS) et de
celles de l'article 9», alors que l'information de 2010 exige uniquement
la « reproduction littérale des dispositions de l'article
19».
Donc, en droit de l'OHADA, la source de l'obligation
d'information sur l'état de la dette cautionnée a donc subi une
évolution 13 ans après son adoption. Il ne nous reste qu'à
déterminer le contenu et la portée de ladite information.
2) L'objet de l'information
périodique
Nous avons déjà vu l'objet de l'information
périodique lors de la partie consacrée au droit français
de l'information de la caution et nous avons vu que cet objet est
l'évolution de la dette cautionnée, mais aussi la faculté
de révocation de l'engagement. Sur ce point, le législateur OHADA
est plus formaliste que le législateur français. En effet, le
droit africain exige que la faculté de révocation soit
exprimée par la reproduction littérale de l'article 9 de l'AUS de
1997 (article 19 de l'AUS de 2010).
Toutefois, les articles 9 de l'AUS de 1997 et 19 de 2010 ne se
contentent pas d'indiquer à la caution qu'elle peut révoquer
l'engagement.
42
Ainsi, les articles 9 et 19 précités
définissent le cautionnement général (seul cautionnement
concerné par l'information périodique). Lesdits articles
expliquent tout d'abord que le cautionnement général est le
cautionnement « conclu, sous peine de nullité, pour une somme
maximale librement déterminée entre les parties, incluant le
principal, les intérêts et autres accessoires93 ».
Il s'agit dès lors d'un cautionnement limité en
montant94.
Puis, lesdits articles conçoivent ledit cautionnement
général non seulement comme étant un cautionnement
renouvelable par reconduction expresse lorsque le maximal est atteint, mais
aussi comme celui qui peut être révoqué à tout
moment même si le maximal n'est pas atteint. En revanche, l'on constate
en pratique que plusieurs cautionnements généraux peuvent se
cumuler faute de dénonciation de l'un d'eux95.
Cependant, l'article 19 prévoit subtilement que «
tous les engagements du débiteur garanti nés avant la
révocation restent garantis par la caution ». Il s'agit alors d'un
cautionnement à durée indéterminée96,
sauf qu'en pratique, il peut également être à durée
déterminée97.
Enfin, le cautionnement général se
présente comme celui qui garantit soit tous les engagements du
débiteur, soit celui qui garantit solde débiteur d'un compte
courant soit celui qui garantit des engagements pris sous toute autre forme.
Comme vous avez dû le remarquer, nous avons fait le lien
entre certaines dispositions de l'article 19 de l'AUS de 2010 et la
jurisprudence et la doctrine françaises (en
référençant) tout simplement pour rappeler que le
législateur OHADA s'inspire du droit français du cautionnement
lors de la rédaction de l'AUS.
En droit de l'OHADA, même si l'objet de l'information
périodique est identique à celui de l'information
française, l'information périodique africaine n'a qu'une seule
source et n'est due qu'à une seule catégorie de cautions.
L'information ponctuelle de la caution a également été
mieux mise en page en droit africain qu'en droit français.
93 Cass. 1re civ., 24 déc. 1987 : D.
1988, somm. 276, obs. L. Aynès.
94
Cass. Com., 28 mai 1991, Bull. Civ. IV,
n° 181 ; en l'espèce il s'agit d'un plafond fixé de
manière contractuelle.
95 TGI de Ouagadougou (Burkina Faso), Jugement
n° 085/ 2007 du 27 juin 2007, EBTPE & PAOLI Daniel Vincent c/
Société Générale des Banques du Burkina (SGBB) ;
Ohadata J-03-389 ; en l'espèce deux cautionnements respectivement de 15
millions FCFA et 35 millions FCFA ont été cumulés
malgré la demande de caducité du premier par la caution, faute de
dénonciation du premier cautionnement en temps utile.
96
Cass. Com., 3 déc. 1979, Bull. civ.
IV, n° 317; JCP G 1980, IV, 67.
97 D. Legeais, Sûretés et garanties
du crédit, 5e éd., 2006, LGDJ, n° 188, p.
155.
43
B- Source et objet de l'information ponctuelle de la
caution en droit de l'OHADA
En droit de l'OHADA, la source de l'information ponctuelle de
la caution est l'article 24 de l'AUS de 2010 et avant 2010, ladite information
prenait sa source dans l'alinéa 1er de l'article 14 de l'AUS
de 1997.
Ledit article 14 alinéa 1er se
présentait comme suit :
« le créancier doit aviser la caution de toute
défaillance du débiteur, déchéance ou prorogation
du terme en indiquant le montant restant dû par lui en principal,
intérêts et frais au jour de la défaillance,
déchéance ou prorogation du terme ».
Toutefois, les conditions relatives à la poursuite de
la caution par le créancier faisaient l'objet de l'article 13
alinéas 1er et 2e de l'ancien AUS. En effet, d'une part,
ledit article disposait que « la caution n'est tenue de payer la dette
qu'en cas de non-paiement du débiteur principal ». D'autre part, il
disposait que « Le créancier doit aviser la caution de toute
défaillance du débiteur et ne peut entreprendre de poursuites
contre elle qu'après une mise en demeure de payer adressée au
débiteur et restée sans effet ».
Ainsi, en 2010, on remarque une fusion entre certaines
dispositions des articles 13 et 14 pour former l'actuel article 24 de l'AUS.
Mais, on ne constate aucune innovation dans le contenu de l'article 24 si ce
n'est une petite précision sur le moment de communication de
l'information ponctuelle. En effet, ledit article 24 de l'AUS de 2010 dispose
dans ses premières lignes que c'est « dans le mois de la mise en
demeure de payer adressée au débiteur principal et restée
sans effet » que « le débiteur doit informer la caution de la
défaillance du débiteur principal (...) ».
En comparaison, l'article 13 de 1997 n'encadrait pas
temporellement la communication de l'information, mais se contentait de la
conditionner. On constate donc une précision non négligeable de
l'article de 2010.
En ce qui concerne l'objet de l'information ponctuelle, on
peut tout simplement dire qu'il s'agit évidemment d'alerter la caution
de la défaillance du débiteur principal et de lui faire un
décompte des sommes dues par ledit débiteur en principal,
intérêts et autres accessoires. Aucun formalisme informatif n'a
été prévu pour l'information ponctuelle de la caution.
44
Les obligations d'information imposées au
créancier en droit de l'OHADA trouvent ainsi leur origine en droit
français. Toutefois, l'on constate que le droit français est plus
riche et plus méticuleux que le droit de l'OHADA sur plusieurs
aspects.
Section 2 : les modalités d'application des
obligations d'information au profit de la caution
Tout d'abord, une modalité de l'information
périodique en particulier fera l'objet de notre étude
(Paragraphe 1). Puis, nous traiterons des modalités de
l'information ponctuelle de la caution (Paragraphe 2). Nos
réflexions seront menées à l'aune du droit
français.
Paragraphe 1 : la durée de l'information
périodique : un silence africain
Le texte africain ne précise pas la durée de
l'obligation du créancier, mais tout porte à croire que
l'extinction du cautionnement ou de la dette mette fin à l'obligation
d'information. En effet, les dettes du débiteur sont la raison
d'être du cautionnement et le contrat de cautionnement (de toutes les
dettes) est la raison d'être de l'obligation d'information
périodique, par conséquent s'ils venaient à
disparaître, l'obligation d'information disparaîtrait
également, c'est le principe de l'accessoire. Ce serait logique.
Toutefois, ce raisonnement ne fut pas d'emblée celui de
la Cour de cassation française. En effet, en France, plusieurs
circonstances particulières ont laissé penser que l'obligation du
créancier avait cessé alors même que la dette et le contrat
de cautionnement demeuraient : la poursuite de la caution (A)
et le décès de celle-ci (B).
A- L'obligation d'information périodique et la
poursuite de la caution
La poursuite de la caution est ici entendue comme étant
d'une part sa mise en demeure (1) et d'autre part, sa
condamnation définitive de payer (2). Notre travail
consistera ainsi à montrer le comportement du juge français
envers l'information périodique face à ces deux situations.
1) Information périodique et mise en demeure de
la caution
La Cour de cassation française a adopté deux
comportements après la mise en demeure de la caution. Tout d'abord, la
haute juridiction a refusé la continuité de l'obligation
d'information (a), puis elle a jugé que ladite
obligation devait se poursuivre en dépit de la mise en demeure de payer
(b).
a.
45
La cessation de la communication de l'information
périodique après mise en demeure
En 1991, il avait été jugé que «
l'exécution de l'obligation d'information prescrite par la loi du
1er mars 1984 n'avait plus lieu d'être après la mise en
demeure de la caution ou engagement de poursuites contre elles
»98. D'un côté, nous avons l'information
ponctuelle qui a été adressée à la caution et de
l'autre, ladite caution réclamait l'information périodique, ce
qui nous paraît tout à fait illogique. En effet, si la caution est
sommée de payer, comment pourrait-elle encore réclamer une
information sur l'évolution de la dette puisqu'elle sait
déjà ce qu'elle doit payer ?
Aussi, il convient de rappeler que ladite information
périodique de l'article L.313-22 du CMF prévoit, en cas
d'engagement à durée indéterminée, la mention de la
faculté de révocation de l'engagement. Or, cette faculté
de révocation est une formalité insensée en cas de mise en
demeure de payer adressée à la caution vu que le créancier
réclame déjà le paiement des dettes au lieu de se
contenter de prévenir la caution sur l'aggravation de l'état
financier du débiteur. D'ailleurs, en réclamant le paiement, le
créancier ne souhaiterait-il pas (de façon tacite) cesser
d'apporter son concours financier au débiteur défaillant vu que
celui-ci présente clairement un risque d'insolvabilité ?
Donc, dans l'espèce précitée, on
comprend une certaine surprotection de la caution et une extension
(exagérée ?) du devoir de loyauté du créancier.
Toutefois, en raisonnant de la sorte, en rejetant
l'idée de l'information périodique de la caution après la
mise en demeure de payer adressée à celle-ci, l'on oublie
l'état de la dette cautionnée qui peut s'aggraver entre la date
de la mise en demeure adressée à la caution et le paiement
effectif de ladite dette.
b. La continuité de l'obligation du
créancier
Ce n'est pas parce que la caution a été mise en
demeure de payer que celle-ci a les moyens de désintéresser le
créancier au moment où elle a été
interpellée.
Ainsi, en France, dans l'arrêt de la Cour de cassation
rendu le 25 juin 1991 cité plus haut, la caution avait été
mise en demeure de payer le 27 juillet 1987 et elle n'avait pas
été informée depuis 1429 jours (près de 4 ans)
alors qu'il avait été décidé que le comptage des
intérêts de la
98
Cass. Com., 25 juin 1991 : Bull. civ.,
1991, IV, n° 233, p. 163.
46
dette au taux légal (intérêts moratoires)
avait débuté le 1er août 1987 et la demande de
capitalisation des intérêts avait été faite le 26
octobre 1988.
On comprend alors que ladite caution aurait dû, si la
Cour de cassation française avait reconnu la continuité de
l'obligation du créancier, être informée sur l'état
de la dette les 31 mars 1988, 1989, 1990 et 1991. Ainsi, le créancier
aurait dû informer la caution des intérêts de retard
échus en plus des autres accessoires de la dette.
Donc, au vu de la dangerosité d'une brusque cessation
de l'information périodique avant la fin du cautionnement ou de la
dette, la Cour de cassation en 199399 décida alors que «
l'article 48 de la loi du 1er mars 1984 était applicable pour la
première fois avant le 31 mars 1985 (...) et jusqu'à l'extinction
de la dette ». En effet, la mise en demeure de payer adressée
à la caution n'équivaut pas à l'extinction des obligations
légales du créancier - le cautionnement n'étant pas
résilié.
En outre, en France, la Cour de cassation a jugé que ni
la mise en demeure ou l'assignation, ni l'ouverture d'une procédure
collective du débiteur principal ne suspendent ou n'éteigne
l'obligation d'information périodique100.
Le droit français impose donc au créancier de
poursuivre l'information de la caution jusqu'à l'extinction de la dette,
peu importe les incidents qui surviennent durant l'exécution du
cautionnement. Cependant, le doute sur la continuité de l'information
périodique a pesé lorsque la caution a été
condamnée à rembourser la dette.
2) Information périodique et condamnation
définitive de la caution
Le problème s'est posé avec une décision
de la Cour de cassation française de 2005101 qui contredisait
la décision de 1993 en révoquant l'idée selon laquelle
l'information de la caution est due jusqu'à l'extinction de la dette au
motif que ladite information ne saurait perdurer après la condamnation
définitive de la caution étant donné que «
l'obligation découlant de la condamnation irrévocable de la
caution se substituait à l'obligation contractuelle primitive
»102. Cependant, un tel raisonnement ne reposait que sur une
innovation prétorienne puisqu'aucun texte ne prévoyait une
substitution de la condamnation définitive de la caution à
l'obligation d'être informé par le créancier.
99
Cass. Com., 2 nov. 1993, Bull. civ. IV,
n° 370 et
Cass. Com., 30 nov. 1993, Bull. civ. IV,
n° 434.
100
Cass. Com., 25 avr. 2001: JCP E 2001,
1276, note D. Legeais.
101 Cass. 1re civ., 13 déc. 2005 : JurisData
n° 2005-031474 ; bull. Civ. 2005, I, n° 488.
102 Observation de Ph. Simler sur la précédente
jurisprudence ; JCP G 2006, I, 131, n° 6.
47
Ainsi, l'année suivante, en 2006, la Cour de cassation
française se réunit en chambre mixte afin de réaffirmer le
principe de 1993103. En effet, l'arrêt de la Cour d'appel de
Caen alors censuré en 2006 par la chambre mixte retenait que « si
l'obligation d'information doit être respectée, même
après l'assignation de la caution en paiement, il en va
différemment une fois que le jugement condamnant celle-ci au paiement du
principal et des intérêts a acquis force de chose jugée
»104. La chambre mixte a fait remarquer qu'un tel raisonnement
du juge du fond était incohérent puisque la force de chose
jugée ne concerne que les éléments ayant fait l'objet de
l'instance à savoir la condamnation définitive de payer et non
l'information de la caution qui ne peut être révoquée
durant l'exécution du cautionnement, ladite information étant
d'ordre public.
Pourtant le professeur Séverine CABRILLAC soutient la
décision de la Cour d'appel de Caen et critique la décision de la
Cour de cassation de 2006 en faisant remarquer que « l'information [de la
caution] n'a [dans le cas de la condamnation définitive de la caution]
aucune utilité »105 étant donné que «
la dette ne pouvant plus évoluer que mécaniquement (par
application des intérêts de retard applicables à la caution
entre sa condamnation et son paiement) et la résiliation étant
hors de propos »106. Le professeur de Montpellier fait
remarquer qu'en cas de condamnation définitive de la caution, les
intérêts contractuels de la dette ne peuvent plus être
appliqués et que s'il s'agit de cautionnement indéterminé,
la faculté de révocation dudit cautionnement n'a plus lieu
d'être. En conséquence, l'information périodique de la
caution ne pourrait plus porter sur lesdits intérêts contractuels
ni sur la faculté de révocation. D'ailleurs, si une telle
information était communiquée à la caution, il s'agirait
alors d'une information incomplète, une information viciée.
En droit français, l'information de la caution est donc
due jusqu'à l'extinction de la dette ou celle de la garantie. L'on ne
suggère pas que le droit de l'OHADA s'inspire de ce principe
problématique. En revanche, il serait souhaitable que le
législateur africain précise la durée de l'information
périodique. Toutefois, ledit législateur africain pourrait
également et de façon explicite, prendre position sur le devenir
de l'information périodique après le décès de la
caution.
103 Cass. ch. mixte, 17 nov. 2006 : JurisData n° 2006-035991
; JCP G 2006, IV, 3410.
104 CA Caen , 6 janvier 2004
105 M. Cabrillac, Ch. Mouly et al., Op. cit.,
n° 319, p. 229.
106 Ibid.
48
B- L'obligation d'information périodique et le
décès de la caution
Nous constaterons qu'en droit français l'information
périodique de la caution ne s'éteint pas avec la mort de la
caution (1), mais qu'elle est transmissible aux
héritiers de la caution (2).
1) La survie du cautionnement
L'article 768 alinéa 1er du Code civil
français ancien dispose que « l'héritier peut accepter la
succession purement et simplement ou y renoncer », l'alinéa
poursuit en précisant que l'héritier « peut également
accepter la succession à concurrence de l'actif net lorsqu'il a une
vocation universelle ou à titre universel », de ce fait le contrat
de cautionnement conclu par le de cujus se transmet à ses
héritiers.
Ainsi, une décision de la Cour de cassation
française veut qu'en cas de décès de la caution,
l'information survive au profit de ses héritiers107.
D'ailleurs, l'article 2294 du Code civil français dispose que « les
engagements des cautions passent à leurs héritiers (à
l'exception de la contrainte par corps), si l'engagement était tel que
la caution y fût obligée »108.
En droit de l'OHADA, l'article 36 alinéa 4 dispose que
« les engagements de la caution simple ou solidaire passent à ses
héritiers uniquement pour les dettes nées antérieurement
au décès de la caution », alors l'on ne peut que
déduire, par analogie, que l'information due par le créancier se
transmettrait également aux héritiers.
Donc, en droit français comme en droit de l'OHADA, le
cautionnement est transmissible par voie de succession, mais le droit
français maintient l'information de la caution
décédée en cédant cette prérogative à
ses héritiers. En droit de l'OHADA, nous souhaiterons une expression
plus claire du législateur à ce sujet. En effet, les
héritiers ont également le droit de savoir.
2) Le droit de savoir des
héritiers
En cas d'acceptation de la succession, les héritiers de
la caution bénéficient tout d'abord d'une information visant au
renseignement sur l'existence du cautionnement. En effet, l'alinéa 2 de
l'article 786 du Code civil français (ancien) dispose que l'ayant cause
universel peut nonobstant son incapacité à refuser le passif du
de cujus « demander à être déchargé
en
107
Cass. Com., 9 déc. 1997 : Bull.
civ. 1997, IV, n° 323 ; RD bancaire et fin. 1998, n° 67, 102, obs.
Crédot et Gérard, préc.
108 Ph. Simler, Op. cit., n° 823, p. 824.
49
tout ou partie de son obligation à une dette
successorale qu'il avait des motifs légitimes d'ignorer au moment de
l'acceptation lorsque l'acquittement de cette dette aurait pour effet
d'obérer gravement son patrimoine personnel ».
D'ailleurs, au motif de la perte d'une chance, la Cour d'appel
de Paris avait engagé la responsabilité du banquier qui
s'était abstenu, lors de la liquidation d'une succession, de
révéler au notaire l'existence d'un cautionnement vieux de
plusieurs années109.
Aussi, les héritiers peuvent se prévaloir de
l'information sur l'évolution de la dette
cautionnée110. En effet, rappelons que l'information
périodique de la caution doit contenir, à peine de sanction pour
manquement à l'obligation d'informer, la faculté de
révocation de l'engagement si celui-ci est à durée
indéterminée (une révocation essentielle pour les
héritiers de la caution décédée).
En outre, en ce qui concerne l'information
générale des héritiers, le docteur Wenceslas Ella ANDOUME
déplore l'« absence d'une disposition spécifique aux
héritiers d'autant qu'ils disposent d'un délai relativement court
pour accepter la succession »111. En effet, le juriste
précise que non seulement « l'article 771 du Code civil
français [ancien] limite (...) ce délai à quatre mois
»112, mais aussi que « ce délai est une disposition
impérative qui s'applique aux héritiers d'une caution, quel que
soit le caractère déterminé ou indéterminé
de la dette »113.
Arrivés à cette base, on constate que la
durée de l'information périodique devrait donc être prise
en considération par le législateur africain. En effet, si en
France, la jurisprudence a développé les modalités
d'application de l'information périodique, cette tâche incombe,
selon nous, au législateur africain dans le droit de l'OHADA
étant donné que non seulement celui-ci, contrairement au
législateur français, ne peut pas se permettre d'être vague
vu le nombre de pays dans lesquels il légifère, mais aussi parce
que le droit de l'OHADA est viscéralement lié au droit
français.
Il incombe donc au législateur africain d'accueillir
les aspects les plus pertinents du droit français notamment sur le droit
de savoir des héritiers. Cependant, l'on constate que, contrairement au
législateur français, le législateur OHADA est
également imprécis en matière d'information ponctuelle.
109 CA Paris, 23 juin 1977, RJC 1979, p. 175, note Y.
CHARTIER.
110
Cass. Com., 9 déc. 1997, Bull. civ.
IV, n° 323, p. 280.
111 W. E. Andoume, Le cautionnement donné à une
société, Thèse Nancy II, 2010, n° 443, p.
322.
112 Ibid.
113 Ibid.
50
Paragraphe 2 : les modalités d'application de
l'information ponctuelle
En droit français et en droit africain, la
défaillance du débiteur porte le nom d'incident de paiement
(A), sauf qu'en droit de l'OHADA, le législateur n'a
pas pris la peine de déterminer avec précision l'incident de
paiement qui devrait être rapporté à la caution
(B).
A- L'incident de paiement caractérisé
Avant 1998, en France, aucun délai n'encadrait
l'information ponctuelle de la caution. D'ailleurs, en droit OHADA, l'article
13 de l'AUS de 1997 ne prévoyait aucun délai non plus : « le
créancier doit aviser la caution de toute défaillance du
débiteur principal et ne peut entreprendre de poursuites contre elle
qu'après une mise en demeure (...) ».
Puis, en France, avec la loi n° 98-657 du 29 juillet 1998
relative à la lutte contre les exclusions (ajoutée à
l'article 47-II de la loi du 11 février 19994) vient préciser
qu'il n'y a incident de paiement caractérisé qu'à
défaut de régularisation dans le mois. La loi disposait que
« lorsque le cautionnement est consenti par une personne physique pour
garantir une dette professionnelle d'un entrepreneur individuel ou d'une
entreprise constituée sous forme de société, le
créancier informe la caution de la défaillance du débiteur
principal dès le premier incident de paiement non
régularisé dans le mois de l'exigibilité de ce paiement
(...) ».
Ainsi, de manière corrélative, dans l'AUS de
2010 apparaît l'ajout de la loi française relative à la
lutte contre les exclusions ; l'alinéa 1er de l'article 24
dudit AUS dispose alors que « dans le mois de la mise en demeure de payer
adressée au débiteur principal et restée sans effet, le
créancier doit informer la caution de la défaillance du
débiteur principal (...) ».
Donc, en droit OHADA, comme en droit français, il y a
incident de paiement caractérisé à défaut de
régularisation de paiement dans le mois de l'exigibilité de la
dette. En effet, si les dispositions communautaire et française
diffèrent dans leur énoncé, elles disent la même
chose puisqu'il ne peut avoir mise en demeure du débiteur principal
qu'à condition que la dette soit exigible.
Au sujet de l'exigibilité de la dette, tout d'abord,
l'article 23 de l'AUS de 2010 est très clair, « la caution n'est
tenue de payer la dette qu'en cas de non-paiement du débiteur principal.
Le créancier ne peut entreprendre de poursuites contre la caution
qu'après mise en demeure de payer adressée au débiteur
principal et restée sans effet (...) ».
51
Ensuite, le créancier ne peut pas poursuivre le
débiteur alors que la dette n'est pas exigible114, sauf en
cas de déchéance du terme. Toutefois, l'article 23
précité dispose également que « nonobstant toute
clause contraire, la déchéance du terme accordé au
débiteur principal ne s'étend pas automatiquement à la
caution qui ne peut être requise de payer qu'à
l'échéance fixée à l'époque où la
caution a été fournie (...) ».
En France et en droit de l'OHADA, la défaillance du
débiteur principal est le synonyme de l'incident de paiement
caractérisé. Toutefois, on remarque que le législateur
africain a été vague sur certains points.
B- L'absence de détermination de l'incident de
paiement visé par l'article 24 de l'AUS
Nous notons une imperfection dans l'article 24 de l'AUS de
2010 dès qu'on la compare aux dispositions françaises en la
matière. En effet, le texte ne précise pas de quel incident de
paiement il fait allusion pour déclencher l'information sur la
défaillance du débiteur principal. En effet, cela
sous-entendrait-il que le créancier pourrait choisir l'incident de
paiement qu'il compte rapporter à la caution ? Nous répondrons
à cette interrogation plus bas.
Si l'article 23 de l'AUS exige que toute poursuite de la
caution soit précédée d'une mise en demeure du
débiteur principal restée sans effet, ledit article n'oblige en
aucun cas le créancier d'être diligent et d'effectuer la poursuite
de la caution après un incident de paiement déterminé
comme c'est le cas en France. En effet, l'article 24 alinéa 1er dispose
seulement que « Dans le mois de la mise en demeure de payer
adressée au débiteur principal et restée sans effet, le
créancier doit informer la caution de la défaillance du
débiteur principal (...) ». Le créancier cupide ou indolent
pourrait alors attendre une multitude d'incidents de paiement du
débiteur principal avant de mettre en demeure celui-ci. Le
créancier pourrait alors poursuivre la caution alors que la dette aurait
énormément évolué.
Pourtant, en droit français, afin d'obliger le
créancier à agir dans les temps, le législateur fait
mention du « premier incident de paiement non régularisé
(dans le mois) » dans l'article L.341-1 de l'ancien Code de la
consommation (articles L.333-1 et L.343-5 du nouveau Code de la consommation de
2016) et du « premier incident de paiement caractérisé
susceptible d'inscription au fichier institué à l'article L.333-4
» dans l'article L.313-9 dudit Code (actuel article L.314-17) comme
élément déclencheur de l'information ponctuelle.
114 Ph. Simler, Op. cit., n° 489, p. 513.
D'ailleurs, la caution pourrait engager la
responsabilité du créancier négligent qui attendrait avant
de poursuivre le débiteur principal en temps utile115. En
l'espèce, la Cour de cassation avait jugé que :
« Attendu, [cependant] qu'il résultait des
circonstances de la cause qu'en laissant s'accroître la dette de loyers
des époux X... sans agir en temps utile ni contre eux, ni contre M.
Y..., M. Z... avait privé ce dernier de la possibilité
d'acquitter lui-même les sommes dues et d'exercer, en qualité de
caution subrogée dans les droits du créancier
désintéressé, l'action en résolution du bail qui
lui eût permis, sinon de recouvrer les sommes versées, du moins
d'éviter que les nouveaux loyers ne viennent à
échéance et de limiter, ainsi, le montant de la dette
cautionnée ».
Pourquoi une telle omission de la part du législateur
OHADA qui pourtant s'abreuve dans l'étang du droit français ?
Nous pouvons dire qu'il s'agit en fait d'une omission de report dans l'article
24 de l'AUS de 2010 des dispositions de son prédécesseur. En
effet, l'article 14 (alinéa 1) de l'AUS de 1997 obligeait le
créancier à communiquer à la caution « toute
défaillance du débiteur principal » contrairement à
l'article 24 de l'AUS de 2010 qui est imprécis. L'on observe alors une
régression en droit de l'OHADA.
52
115 Cass. 1re civ. 16 juin 1998, pourvoi n°
96-17.476.
53
Deuxième partie : Le champ d'application des
obligations d'information et réflexions sur les obligations de source
extracontractuelle
Le droit de l'OHADA se caractérise par un conformisme
au droit positif français notamment dans la détermination du
champ d'application de l'information périodique (Chapitre
1) qui, en France, a posé plus de difficulté à
être déterminé que celui de l'information ponctuelle.
Aussi, l'on remarque que certains problèmes relatifs à
l'information de la caution n'ont pas été résolus en
traversant les frontières françaises (Chapitre
2).
54
Chapitre 1 : Le manque de précision de l'article
25 de l'Acte uniforme
Il est clair pour tout le monde que le débiteur de
l'information périodique est le créancier du débiteur
principal, en conséquence le bénéficiaire est
évidemment la caution. Toutefois, le simple fait de cautionner la dette
de quelqu'un ne fait pas de nous un bénéficiaire de l'information
périodique. En effet, d'une part, l'article 25 de l'AUS de 2010
réduit le nombre de destinataires de ladite information. D'autre part,
Mademoiselle Samira MERBARKIA nous rappelle que, pour le cas de la France,
« pour savoir si une caution peut bénéficier de
l'information annuelle encadrée strictement par le Code monétaire
et financier, il est essentiel de déterminer la nature de
l'activité économique du débiteur cautionné,
d'établir la qualité du prêteur avec lequel ce dernier
s'est engagé, et enfin le type de cautionnement souscrit
»116. Pourtant, en droit de l'OHADA, s'il précise le
type de cautionnement souscrit faisant l'objet de l'information
périodique, l'article 25 de l'Acte uniforme portant organisation des
sûretés ne fait mention que des termes « créancier
» et « caution » sans donner de précision.
Donc, c'est dans le but de cerner le champ d'application de
l'information périodique de la caution qu'une étude sera
menée sur les différents protagonistes de ladite information
(Section 1). Aussi, nous tenterons de résoudre le
problème lié à l'information de cautions oubliées
en droit de l'OHADA et en droit français (Section
2).
Section 1 : les débiteurs et
bénéficiaires de l'information périodique en droit de
l'OHADA
Les protagonistes de l'information périodique se
déduisent aisément bien que le législateur OHADA ait
été silencieux sur la qualité de ceux-ci. Ainsi, les
débiteurs (Paragraphe 1) et les créanciers de
l'information sur l'état de la dette (Paragraphe 2)
feront l'objet de notre étude.
Paragraphe 1 : les débiteurs des informations
obligatoires
Notons tout d'abord que les débiteurs des informations
ponctuelle et périodique de la caution sont exactement les mêmes,
mais que seuls les bénéficiaires de celles-ci diffèrent
étant donné la restriction du champ d'application de
l'information périodique en droit de l'OHADA. Ainsi, dans les pays
membres de l'organisation africaine, les débiteurs des informations
obligatoires en général (information périodique et
information ponctuelle) sont les établissements de crédit et des
établissements financiers spécifiques (A) qui ne
peuvent en aucun cas être des entreprises unipersonnelles
(B).
116 Mebarkia Samira, op. cit., p. 168.
55
A- Les établissements de crédit
soumis aux obligations d'information de la caution en droit
OHADA
Sans se substituer au législateur OHADA ou à la
haute juridiction communautaire, on peut tout de même déduire que
les informations de la caution sur l'évolution de la dette
cautionnée et sur la défaillance du débiteur principal
sont dues par les établissements de crédit, seules organisations
légalement habilitées pour consentir des prêts à
intérêt.
D'ailleurs, en France, les articles L.511-5 et L.571-3 du Code
monétaire et financier interdisent à toute personne autre qu'un
établissement de crédit de réaliser des opérations
de banque à titre habituel, sous peine de sanction pénale. Dans
la zone OHADA, nous ferons appel à la réglementation de la
Communauté économique et monétaire de l'Afrique centrale
(CEMAC) et à celle de la Communauté économique des
États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) pour démontrer que seuls
les établissements de crédit ont le monopole en matière de
prêt d'argent puisque législateur OHADA ne le précise
guère.
Ainsi, les établissements de crédit reconnus par
la CEDEAO et la CEMAC sont essentiellement de deux catégories : les
banques et les établissements financiers à caractère
bancaire. Toutefois, ce ne sont pas tous les établissements financiers
à caractère bancaire qui sont débiteur de l'obligation
d'information de la caution, voilà pourquoi nous ne verrons que les
sociétés d'affacturage (2). Mais, avant de
commencer notre analyse, nous procéderons tout d'abord à la
définition d'un terme clé (1).
1) Les banques
Aucun des textes communautaires que nous avons
consultés ne définissait ce qu'était une banque. En effet,
tous définissent plutôt ce qu'est un établissement de
crédit. Ainsi, en droit de la CEMAC, la définition
d'établissement de crédit est évoquée dans
l'article 1er du règlement la Commission bancaire d'Afrique
centrale (COBAC) R-2009/02/ portant fixation des catégories des
établissements de crédit, de leur forme juridique et des
activités autorisées. Ledit article dispose que « les
établissements de crédit sont les organismes qui effectuent
à titre habituel des opérations de banque. Celles-ci comprennent
la réception de fonds du public, l'octroi de crédits, la
délivrance de garanties en faveur d'autres établissements de
crédit, la mise à la disposition de la clientèle et la
gestion de moyens de paiement ».
Néanmoins, l'article 8 dudit règlement
communautaire compte la banque parmi les établissements de
crédit. En effet, aux termes dudit article, « les
établissements de crédit sont
56
agréés en qualité de banques
universelles, banques spécialisées, établissements
financiers ou sociétés financières ».
Cependant, en ce qui concerne l'étymologie et la
définition du mot banque, nous nous fonderons sur celles
proposées par l'encyclopédie en ligne WIKIPEDIA. Ainsi, ladite
encyclopédie nous apprend qu'au XVIe siècle, la banque
désignait « la table de changeur ou de commerçant, le lieu
où se fait le trafic, le commerce de l'argent ». Le mot correspond
alors à une forme féminine de « banc » et dérive
de l'italien « banca » introduit en France lors de l'installation des
banques italiennes à Lyon117.
Le site encyclopédique définit la banque comme
étant à la fois, une entreprise qui non seulement produit des
services bancaires, en fait le commerce, mais aussi fait commerce d'autres
services financiers ou connexes118.
Les banques sont donc les débitrices par excellence de
l'information de la caution. Seulement, de nos jours, au vu du succès de
l'activité bancaire et financière, les banques ne sont plus les
seuls établissements de crédit, de ce fait elles ne peuvent plus
être les uniques débitrices des informations obligatoires de la
caution. En effet, les opérations de banque peuvent désormais
être exercées par plusieurs entités qui ne sont pas
nécessairement des banques.
2- Les établissements financiers à
caractère bancaire soumis à l'obligation d'information : les
sociétés d'affacturage
L'affacturage est « une opération de crédit
par laquelle un établissement de crédit, appelé
«factor» ou «affactureur» règle, moyennant
rémunération, les créances commerciales de l'un de ses
adhérents. L'affactureur en devient alors titulaire par subrogation,
mais ne dispose d'aucun recours contre son adhérent en cas de
défaillance du débiteur cédé
»119.
Aussi, notons que la subrogation est une «
opération qui substitue une personne ou une chose à une autre
(subrogation personnelle et subrogation réelle), le sujet ou l'objet
obéissant au même régime juridique que
l'élément qu'il remplace »120.
Ainsi, par voie de subrogation, la société
d'affacturage devient créancière garantie à la place du
créancier d'origine et devient par conséquent débitrice de
l'obligation d'information de la
117
https://fr.wikipedia.org/wiki/Banque
118 Ibid.
119 Raymond Guillien et al., Op. cit., p.
38.
120 Ibid., p.821.
57
caution fournie au créancier d'origine. En effet, la
jurisprudence française a consacré l'obligation d'information des
sociétés d'affacturage121.
En outre, il convient d'opérer une distinction entre
l'escompte d'effet de commerce et l'affacturage. En effet, l'escompte est une
« technique de mobilisation de créances par laquelle un banquier
endossataire paie le montant de l'effet de commerce à l'endosseur, avant
l'échéance prévue par l'effet, sous déduction d'une
somme représentant les intérêts du montant de l'effet de
commerce »122. Ainsi, dans l'escompte, la créance de
l'endosseur est cambiaire alors que dans l'affacturage, la créance de
l'adhérent est d'ordre général. L'escompte est donc soumis
au régime des effets de commerce contrairement à
l'affacturage.
Au Gabon, nous savons que plusieurs établissements de
crédit pratiquent l'affacturage notamment la Banque gabonaise et
française d'investissement (BGFI) ou la Société gabonaise
de Factoring (SGF).
Les débiteurs de l'information périodique sont
alors des établissements de crédit, mais ceux-ci ne peuvent pas
être des personnes physiques.
B- L'exclusion du créancier-personne physique
Nous avons démontré que seules les banques et
les sociétés d'affacturage sont les débiteurs de
l'obligation d'informer la caution. Or, si en pratique, l'on dit par exemple
« aller voir son banquier », le plus juste serait de dire «
aller voir sa banque », car une banque ne peut être
constituée sous la forme unipersonnelle (1) et une
personne physique ne peut être tenue responsable à elle seule des
obligations d'une banque (2). En effet, la banque est une
organisation et jamais un individu.
1) Les incompatibilités entre les
opérations de crédit et la personne physique
Nous mettrons en exergue les incompatibilités entre
d'une part les fonctions de la banque avec la personne physique
(a) et d'autre part celles entre les établissements
financiers à caractère bancaire avec la personne physique
(b).
121
Cass. com., 30 nov. Et 14 déc. 1993
: Bull. civ. 1993, IV, n° 434 et 467 ; RD bancaire et bourse 1994, p. 131,
obs. Contamine-Raynaud.
122 Raymond Guillien et al., Op. cit., p.
372.
a. 58
La banque et la personne physique
Tout d'abord, en droit de la CEMAC, l'article 7 du
règlement COBAC cité plus haut dispose qu'« un
établissement de crédit est obligatoirement constitué sous
la forme juridique d'une société anonyme dotée d'un
conseil d'administration, au sens de l'Acte uniforme OHADA relatif au droit des
sociétés commerciales et du groupement d'intérêt
économique à l'exception des succursales d'établissements
de crédit ayant leur siège à l'étranger ».
Nous constatons qu'aucune banque ne peut être constituée sous la
forme d'une société unipersonnelle. D'ailleurs, l'exception
évoquée dans la disposition précédente ne concerne
que la forme d'administration de la succursale de l'établissement de
crédit ayant son siège à l'étranger -- une
succursale n'a pas de personnalité juridique.
Ensuite, en droit de la CEDEAO dont plusieurs membres
appartiennent à l'OHADA, l'article 31 de la loi-cadre portant
réglementation bancaire dispose en son alinéa 1er que
« les banques sont constituées sous la forme de
sociétés anonymes à capital fixe ou, par autorisation
spéciale du Ministre chargé des Finances donnée
après avis conforme de la Commission bancaire, sous forme de
sociétés coopératives ou mutualistes à capital
variable ».
Enfin, l'article précité dispose au
deuxième alinéa qu'« elles (les banques) ne peuvent
revêtir la forme d'une société unipersonnelle ».
Aucune banque ne peut donc être constituée sous
la forme d'une société unipersonnelle, il en est de même
pour les autres établissements de crédit.
b. Les établissements financiers à
caractère bancaire et la personne physique
L'article 32 de la loi-cadre précitée fait
mention, en son alinéa 1er, des établissements
financiers à caractère bancaire comme secondes organisations
habilitées à réaliser les opérations bancaires.
Aussi, ledit article impose que lesdits établissements soient
constitués soit sous la forme d'une société anonyme
à capital fixe, soit sous la forme d'une société à
responsabilité limitée, soit sous la forme d'une
société coopérative ou mutualiste à capital
variable.
Aussi, l'alinéa 2 de l'article 32 interdit lui aussi,
pour les établissements financiers à caractère bancaire,
la forme de la société unipersonnelle.
59
La personne physique est alors exclue non seulement en tant
qu'établissement de crédit, mais aussi en tant que
débiteur potentiel de l'information de la caution. Toutefois, il
convient d'effectuer une précision.
2) L'impossible information par les
intermédiaires bancaires
Afin de prévenir tout imbroglio, dans la CEDEAO, en
procédant à la lecture de l'article 105 alinéa
1er de la loi uniforme portant réglementation bancaire, on
pourrait penser que des personnes physiques puissent être des
établissements bancaires. En effet, ledit article dispose que «
toute personne physique ou morale autre qu'un établissement de
crédit, qui fait profession habituelle de service d'intermédiaire
en tant que courtier ou autrement, en apportant des affaires aux
établissements de crédit exerçant leur activité
dans l'UMOA ou à l'étranger ou d'opérer pour leur compte
même à titre d'activité accessoire, ne peut exercer son
activité sans l'autorisation préalable du Ministre des Finances
».
Mais, si le texte fait allusion aux personnes physiques, il ne
s'agit ici que d'intermédiaires bancaires et non de banques, par
conséquent lesdits intermédiaires ne sont pas des
établissements de crédit et ne peuvent en aucun cas être
débiteur de l'information de la caution au sens de l'article 25 de
l'Acte uniforme précité.
Ainsi, les débiteurs de l'information de la caution
sont exclusivement les banques et les Sociétés d'affacturage.
Cependant, les destinataires de ladite information sont plus nombreux et ont
des statuts souvent très différents.
Paragraphe 2 : les bénéficiaires des
informations obligatoires
En ce qui concerne les bénéficiaires des
informations obligatoires de la caution, il n'y a pas de restrictions majeures,
sauf lorsqu'il s'agit de l'information sur l'évolution de la dette. En
effet, si presque toutes les cautions sont bénéficiaires de
l'information sur la défaillance du débiteur principal ayant
contracté un prêt dans un établissement de crédit,
des interrogations subsistent quant à la nature de certains
bénéficiaires de l'information sur l'évolution de la dette
(A). Toutefois, nous constatons, toujours dans le cadre de
l'information sur l'état de la dette, que le législateur OHADA a
étendu le bénéfice de ladite information à des
cautions que le législateur français ne considère pas
comme telles (B).
60
A- La pluralité de bénéficiaires des
informations obligatoires
Si les débiteurs des obligations d'information sont peu
nombreux et facilement reconnaissables, il n'en est pas de même pour les
bénéficiaires qui forment un ensemble plus
hétéroclite d'où une certaine bienveillance du
législateur qui souhaite alors que toutes les cautions soient
informées en temps utile (1) et que certaines d'entre
elles bénéficient d'une protection optimale au moyen de
l'information (2).
1) L'immensité du champ d'application de
l'obligation d'information ponctuelle
En droit de l'OHADA comme en droit français, presque
toutes les cautions sont bénéficiaires de l'information sur la
défaillance du débiteur principal. En effet, en tant que
débitrice potentielle du créancier, la caution doit être
mise en demeure123 lorsque le débiteur est défaillant
et la mise en demeure vaut information ponctuelle124.
Il n'y a donc aucune difficulté en ce qui concerne le
champ d'application de l'information ponctuelle de la caution dès lors
que ladite caution a un lien de droit avec le créancier et le
débiteur principal. En revanche, pour des raisons de
sécurité juridique, le champ d'application de l'information
périodique a été largement réduit.
2) La restriction du champ d'application de
l'obligation d'information périodique
Si en France, l'information sur l'évolution de la dette
est presque généralisée, il n'en est rien en droit de
l'OHADA (a). D'ailleurs, l'on se demande pourquoi certaines
cautions revendiqueraient la communication d'une telle information
(b).
a. L'information exclusive des cautions
générales
Comme nous l'avons signalé, seules les cautions
générales sont les bénéficiaires de l'information
périodique sur l'état de la dette en droit de l'OHADA. En droit
communautaire africain, l'information périodique de la caution est donc
liée uniquement à la nature du
123 L'article 1139 du Code civil français ancien
disposait que « Le débiteur est constitué en demeure, soit
par une sommation ou par autre acte équivalent, telle une lettre missive
lorsqu'il ressort de ses termes une interpellation suffisante, soit par l'effet
de la convention, lorsqu'elle porte que, sans qu'il soit besoin d'acte et par
la seule échéance du terme, le débiteur sera en demeure
».
124 CA Paris, 31 oct. 1998 : JurisData n° 1998-023660.
61
cautionnement souscrit. Toutefois, nous n'avons pas
précisé ce que l'on entendait par cautionnement
général.
Ainsi, le professeur Dominique LEGEAIS prévient que le
cautionnement général est « le plus dangereux qui puisse se
concevoir »125. En effet, la caution peut garantir les dettes
présentes et à venir du débiteur principal pour une
durée indéterminée et comme nous le fait remarquer le
professeur Séverine CABRILLAC, « l'accroissement du montant des
dettes garanties peut être brutal et se dérouler sur un laps de
temps inférieur à un an »126 -- en France la
fréquence de l'information périodique étant annuelle.
D'ailleurs, il se peut qu'au début du cautionnement, le débiteur
principal ne doive rien au créancier.
En France, en 2003, à cause de la dangerosité
d'un tel engagement, le législateur a pris certaines mesures visant
à protéger les personnes physiques surtout par le biais du Code
de la consommation.
Ainsi, le législateur français a, tout d'abord,
limité l'engagement de la caution :
« Toute personne physique qui s'engage par acte sous
seing privé en qualité de caution envers un créancier
professionnel doit, à peine de nullité de son engagement, faire
précéder sa signature de la mention manuscrite suivante, et
uniquement de celle-ci : "En me portant caution de X..., dans la limite de la
somme de ... couvrant le paiement du principal, des intérêts et,
le cas échéant, des pénalités ou
intérêts de retard et pour la durée de ..., je m'engage
à rembourser au prêteur les sommes dues sur mes revenus et mes
biens si X... n'y satisfait pas lui-même" »127.
Ensuite, le législateur français a
créé une proportionnalité de l'engagement de la caution
par rapport aux biens de celle-ci :
« Un créancier professionnel ne peut se
prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique
dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement
disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le
patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée,
ne lui permette de faire face à son obligation »128.
125 D. Legeais, Op. cit., n° 188, p.155.
126 M. Cabrillac, et al., Op. cit., p. 238,
n° 328 in fine ; TGI de Ouagadougou, 27 juin 2007, préc. ; en
l'espèce, le créancier présente à la caution une
somme plus importante que celle due à cause des « forçages
de paiement assortis de frais élevés ».
127 Article L.341-2 du l'ancien Code de la consommation, actuel
article L.331-1.
128 Article L.341-4 de l'ancien Code de la consommation, actuel
article L.332-1.
62
En droit de l'OHADA, bien qu'il soit moins attentionné
que le législateur français, le législateur africain s'est
largement inspiré des innovations françaises. En effet, non
seulement, le cautionnement doit être constaté par un écrit
signé et rédigé en partie par la caution129,
mais aussi tout cautionnement prévoit toujours la mention d'une somme
maximale garantie130 à peine de nullité de
l'engagement131.
Ainsi, si la caution générale est l'unique
bénéficiaire de l'information périodique en droit de
l'OHADA, l'on pourrait se poser la question de savoir si certaines cautions ne
pourraient pas se passer de l'information sur l'état de la dette dont
elles garantissent le paiement.
b. L'information des cautions intégrées
et intéressées
On entend par cautions intégrées, les dirigeants
sociaux, les associés et les actionnaires qui auraient consenti un
cautionnement à leur entreprise. Les cautions intéressées,
quant à elles, sont celles qui sont intéressées par
l'activité économique du débiteur principal, celles qui
s'impliquent d'une manière ou d'une autre dans ladite activité.
Toutefois, contrairement aux cautions intégrées, ces cautions
intéressées sont nombreuses, voilà pourquoi nous ne
retiendrons parmi celles-ci que les cautions professionnelles que sont les
établissements de crédit et les sociétés de
cautions mutuelles.
Dès lors, l'on comprend l'interrogation sur la
pertinence ou la nécessité d'informer lesdites cautions de
l'évolution de la dette. En effet, dans le cas des dirigeants sociaux,
on ne saurait comprendre pourquoi le créancier serait tenu de les
informer sur l'état de la dette de la société qu'ils
cautionnent et dont ils ont la gestion.
Ainsi, le doyen SIMLER remarque que « plusieurs cours
d'appel françaises ont dans un premier temps jugé que ces
dirigeants, par ailleurs parfaitement informés de par leurs fonctions
des encours de leur société, ne pouvaient se retrancher
derrière un prétendu manque d'information pour échapper au
paiement des accessoires de la dette garantie »132.
En ce qui concerne l'incohérence de l'information des
cautions intéressées que sont les établissements de
crédit et les sociétés de caution mutuelle, il convient de
noter tout d'abord
129 Article 14 de l'AUS de 2010.
130 Articles 14 et 19 de l'AUS.
131 TPI Yaoundé Centre Adm., ordonnance n° 794/c du 8
juillet 2004, affaire Tioma Hélène, Kamche c/ Mme Chembou Annie,
Sobze Emilienne Madeleine et autres ; Ohadata J-04-418.
132 Ph. Simler, Op. cit., n° 436, p.449. ; Le
professeur Simler cite, entre autres, les décisions : CA Poitiers, 13
déc.
1989 : JurisData n° 1989-051393 ; CA Pau, 31 janv. 1991 :
LPA 22 nov. 1991, n° 140, obs. Luby ; CA Paris, 25 avr. 2003 : JurisData
n° 2003-214466.
63
que « la caution bancaire permet notamment aux
entreprises d'obtenir certaines facilités en matière fiscale et
douanière, en matière de marchés publics et privés,
de commerce extérieur, d'opérations de construction (...) le
cautionnement bancaire procure au créancier une très grande
sécurité »133.
Ensuite, le professeur Séverine CABRILLAC explique que
« la caractéristique commune à toutes les cautions
professionnelles est d'avoir, envers le cautionnement, une attitude beaucoup
plus réaliste que les cautions profanes »134. En effet,
« évaluant et limitant le risque, la caution professionnelle exclut
tout sentiment de sa relation avec le débiteur principal
»135, voilà pourquoi « elle se conduit en
créancier potentiel du remboursement et à chaque occasion
vérifie la solvabilité du débiteur
»136.
Vu ce qui précède, on comprend pourquoi «
l'Association française des établissements de crédit a
recommandé à ses membres, le 8 juillet 1985, de ne pas appliquer
entre eux la prescription légale »137. Pourtant, la Cour
de cassation française avec d'autres Cours d'appel a jugé que
l'information était due à toutes les cautions, peu importe leur
qualité138. Donc, si l'information périodique des
cautions intégrées ou intéressées est contestable,
elle est due par le créancier.
Ainsi, en droit français comme en droit de l'OHADA,
législateur ne fait aucune discrimination du point de vue de la
qualité de la caution. En effet, l'AUS ne fait aucune distinction entre
les cautions générales. Aussi, nous remarquons qu'en dépit
de la restriction de son champ d'application en matière d'information
périodique de la caution, le droit de l'OHADA est plus large quant
à la notion de cautionnement.
B- Les exceptions du droit de l'OHADA : l'information
des cautions réelles et des avalistes
On constate que bien que le droit français soit
très développé, il n'en demeure pas moins qu'il peut se
montrer rigide à bien des égards surtout lorsqu'il s'agit de
notions juridiques. Ainsi,
133 Ph. Simler, Op.cit., n° 2, p.2.
134 M. Cabrillac et al., Op. cit., n° 49,
p. 44.
135 Idem.
136 Ibid.
137 Ph. Simler, Op.cit., n° 436, p. 449.
138
Cass. Com., 25 mai 1993, Bull.civ. IV,
n° 203 ; CA Orléans, 30 juin 1992 : JurisData n° 1992-043151 ;
CA Nîmes, 18 févr. 1998 : JurisData n° 1998-030605.
64
pour des raisons très subtiles, le droit
français ne reconnaît pas le cautionnement réel
(1) et s'interroge sur l'identité de nature de l'aval
(2).
1) L'information de la caution
réelle
En France, la Cour de cassation a estimé que « la
sûreté réelle constituée en garantie de la dette
d'un tiers n'est pas un cautionnement »139, par
conséquent le cautionnement réel n'existe pas en droit positif
français. Cependant, le professeur Simler rappelle que
l'opération juridique traditionnellement appelée «
cautionnement réel » n'est autre que la constitution d'une
sûreté réelle par un tiers140.
La caution réelle n'est donc pas
bénéficiaire de l'information périodique prévu pour
les autres cautions pour refus de reconnaissance du cautionnement réel
en droit français.
En droit OHADA, le problème ne se pose guère.
En effet, l'article 22 de l'Acte uniforme relatif aux sûretés de
2010 reconnaît l'existence du cautionnement réel lorsqu'il dispose
que « la caution peut garantir son engagement en consentant une
sûreté réelle sur un ou plusieurs de ses biens ».
D'ailleurs, le second alinéa dudit article dispose que « (la
caution) peut également limiter son engagement à la valeur de la
réalisation du ou des biens sur lesquels elle a consenti une telle
sûreté ».
Donc, en droit de l'OHADA, non seulement la caution
réelle existe, mais aussi elle est l'une des
bénéficiaires, sous certaines conditions, des informations de la
caution. La première exception en matière de destinataire de
l'information obligatoire est donc la caution réelle, l'autre exception
donne encore plus de fil à retordre aux juristes et aux juridictions
français quant à sa nature et au régime auquel elle
devrait être soumise.
2) L'information de l'avaliste
Afin de déterminer si l'avaliste fait partie ou non des
bénéficiaires des informations obligatoires, nous ferons une
comparaison entre la notion de l'aval en droit français
(a) et celle de l'aval en droit de l'OHADA
(b). En effet, la notion d'aval crée un imbroglio quant
au régime auquel il devrait être soumis.
139 Ch. mixte, 2 déc. 2005, JCP 2005. II. 10 183, note
Simler ; D. 2006, p. 729, avis Sainte-Rose et note Aynès.
140 Ph. Simler, Op. cit., n° 19, p. 23.
65
a. L'aval et le cautionnement en droit
français
En droit français, l'aval est une garantie personnelle
similaire au cautionnement (1°). Cependant, si le
mécanisme de l'aval ressemble à celui du cautionnement, pour le
législateur et le juge français, l'avaliste ou le donneur d'aval
n'est pas une caution (2°), mais celui-ci pourrait
cumuler la qualité de caution sous certaines conditions
(3°).
1°) Définition et identité de
nature
L'aval est une « garantie donnée sur un effet de
commerce par une personne appelée «donneur d'aval» ou
«avaliste», qui s'engage à payer tout ou partie de son montant
à l'échéance, si le ou les signataires pour lesquels
l'aval a été donné, appelés les
«avalisés», ne le font pas »141.
D'emblée, on note des similitudes avec le cautionnement qui,
rappelons-le, se définit comme étant le « contrat par lequel
la caution s'engage, envers le créancier qui accepte, à
exécuter une obligation présente ou future contractée par
le débiteur, si celui-ci n'y satisfait pas lui-même
»142.
Aussi, le professeur Sévérine CABRILLAC explique
que le cautionnement et l'aval sont intimement liés. En effet, «
avant la loi du 31 décembre 1953, les sociétés de caution
mutuelle ne pouvaient donner leur garantie que par aval » et que
même « si la forme de leur garantie est aujourd'hui libre, la
pratique de l'aval reste vive »143. D'ailleurs, le professeur
SIMLER affirme que « la jurisprudence sur l'aval a contribué dans
une large mesure à la détermination des solutions relatives au
cautionnement solidaire »144. L'aval s'apparente alors à
un « cautionnement cambiaire »145, tandis que le
professeur Laurent AYNES affirme clairement que l'aval est le cautionnement
d'un effet de commerce146.
Du côté des juridictions, une Cour d'appel
française avait retenu l'identité de cautionnement à
l'aval en décidant « que le donneur d'aval est par
définition une caution et que, sous réserve de son
caractère commercial et cambiaire, le contrat qu'il souscrit suit les
règles du cautionnement »147. Il revint ensuite à
la Cour de cassation148 de voir dans l'aval un
141 Raymond Guillien et al., Op. cit., p.
93.
142 Article 13 de l'acte uniforme OHADA portant organisation des
sûretés de 2010.
143 M. Cabrillac, Ch. Mouly, S.Cabrillac, Ph. Pétel,
Op.cit., n° 416, p. 298.
144 Ph SIMLER, Op. cit., n° 108, p.116.
145 Raymond Guillien, idem.
146 Ph. Malaurie, L. Aynès, P. Crocq, Les
sûretés, la publicité foncière, 2e éd.,
2006, Defrénois, n° 232, p. 85.
147 CA Besançon, 13 févr. 1974 : D. 1975, p.230,
note Crionnet ; RTD com. 1975, p. 331, obs. Cabrillac et Rives-Lange.
66
cautionnement solidaire étant donné que
l'alinéa 7 de l'article L511-21 du Code de commerce dispose que «
le donneur d'aval est tenu de la même manière que celui dont il
s'est porté garant ».
Ainsi, le caractère de solidarité du
cautionnement cambiaire tient du fait que le cautionnement soit
réputé solidaire en l'absence de précision149,
par conséquent en tant que caution solidaire, l'avaliste ne dispose donc
pas du bénéfice de discussion ni celui de division de la caution
simple. L'aval est alors « une variété de cautionnement
solidaire »150.
Toutefois, en droit français tout comme en droit OHADA,
le cautionnement et la solidarité ne se présument pas 151.
Ainsi, en droit français, l'aval est donc
considéré comme étant un cautionnement solidaire, mais
curieusement l'on constate une différence flagrante entre le
régime de la caution et celui de l'avaliste.
2°) L'information périodique et
l'avaliste
Ayant pourtant qualifié l'aval de cautionnement
solidaire en 1994, la Cour de cassation française a récemment
refusé d'accorder à l'avaliste l'information annuelle de la
caution152 aux motifs que « l'aval qui garantit le paiement
d'un titre cambiaire ne constitue pas le cautionnement d'un concours financier
accordé par un établissement de crédit à une
entreprise »153. Rappelons qu'en France, le « concours
financier » est l'une des conditions de l'information périodique de
l'article L.313-22 du CMF. En effet, seuls « les établissements de
crédit ayant accordé un concours financier à une
entreprise sous la condition du cautionnement par une personne physique »
sont débiteur de l'information périodique.
Aussi, toujours en France, d'autres prérogatives de la
caution ont été refusées à l'avaliste : le devoir
de mise en garde de la caution « non avertie »154 et
l'exception de disproportion de
148
Cass. Com., 25 oct. 1994 ,Bulletin 1994
IV, n° 312 p. 253,IR ; JCP E 1995, I, 482, n° 2, obs. Ph.SIMLER et
Ph. DELEBECQUE.
149 Article 20 al. 1 de l'AUS dispose que « le cautionnement
est réputé solidaire ».
150 D. LEGEAIS, Op. cit., n° 76, p.56.
151 Sur le caractère exprès du cautionnement :
Article 14 de l'Acte uniforme portant organisation des sûretés et
l'article 2292 du Code civil français ancien ; sur la solidarité
: al.1 de l'article 1202 du Code civil français.
152
Cass.com., 16 juin 2009, n°
08-14532, Bulletin 2009, IV, n° 79.
153 Ibid., « le concours financier à une
entreprise » étant la condition de l'information de la caution dans
l'article L.313-22 du Code monétaire et financier français.
154
Cass. Com., 30 oct. 2012, n °
11-23519, Bulletin civ. 2012, IV, n° 195.
67
l'engagement155. L'aval serait donc un
cautionnement vidé de sa substance, à savoir les exceptions de la
caution. À ce sujet, le professeur SIMLER affirme qu'« il est vrai
que l'autonomie de l'effet de commerce par rapport au rapport de base rend
l'obligation d'information malaisée, voire impossible si
l'établissement de crédit n'est devenu porteur que par voie
d'endossement »156.
Toutefois, le professeur Sévérine CABRILLAC
prévient que « ces décisions ne mettent pas en
lumière une différence de nature entre le cautionnement et
l'aval, mais simplement l'existence de dispositions propres à ce dernier
» étant donné que « l'abandon de la qualification de
cautionnement (à l'aval) obligerait à reconstruire le
régime de cette garantie, ouvrant une période de forte
incertitude »157.
L'affirmation du professeur SIMLER (plus supra) laisse
subsister un doute puisque celui-ci fait tacitement référence
à une situation dans laquelle l'établissement de crédit
pourrait devenir porteur d'effets de commerce par une autre voie que celle de
l'endossement. En effet, nous pouvons déduire alors que si l'avaliste
n'est pas bénéficiaire de l'information périodique, un
cumul de qualités pourrait octroyer à l'avaliste le droit
d'être tenu informé.
3°) L'aval par acte séparé et le
cautionnement omnibus
Les professeurs Séverine CABRILLAC et Philippe PETEL
font remarquer que « certains établissements de crédit ont
recours [à l'aval par acte séparé] pour les cautionnements
omnibus afin de bénéficier des avantages du droit cambiaire pour
le cas où des effets de commerce seraient émis
»158. Ainsi, l'aval par acte séparé « vaut
cautionnement solidaire pour toutes les dettes ordinaires et aval pour les
dettes cambiaires »159.
Sur l'efficacité de la nature duale de l'aval, le
professeur LEGEAIS disait que si le créancier bénéficiaire
de l'aval doit prouver que le garant s'est engagé comme caution à
son égard, se prévalant du seul cautionnement, il peut faire
échec au jeu de la prescription rapide des engagements
cambiaires160.
155 Cass. 1re civ. 19 déc. 2013, n°
12-25.888 : Bulletin civ. 2013, I, n° 255.
156 Ph. SIMLER, Op. cit., n° 437,
p.451.
157 M. Cabrillac, Ch. Mouly, S. Cabrillac, Ph. Pétel,
Op.cit., n° 415, p.298.
158 Ibid., n° 418, p.299.
159 Ibid.
160 D. Legeais, Op. cit., idem.
68
Ce besoin de preuve de la nature de l'engagement souscrit par
l'avaliste est encore plus marqué dans un aval par acte
séparé valant cautionnement. En effet, le doyen SIMLER remarque
que « même lorsque les conditions de forme sont remplies, il y a
cautionnement et non aval si le signataire a manifesté clairement son
intention de ne pas s'engager cambiairement » et qu'« à
l'inverse, si l'acte qualifié aval par son signataire ne répond
pas au formalisme cambiaire, il ne peut valoir comme tel ». En revanche,
le professeur SIMLER précise qu'il est « cependant possible de voir
dans un tel acte un cautionnement de droit commun ou au moins, suivant les
circonstances, un commencement de preuve d'un tel cautionnement
»161.
Aussi, la Cour de cassation française a imposé
pour la validité des avals par acte séparé qu'il faut que
les effets garantis soient précisés en montant, en nature et
durée, au moins sur un acte complémentaire162.
Si l'information de l'avaliste pose donc un certain nombre de
difficultés en droit français, il n'en est rien en droit
communautaire africain du moins dans la pratique du droit.
b) L'aval et le cautionnement en droit communautaire
OHADA
En droit OHADA, l'article 12 de l'AUS de 2010 ne compte
aucunement l'aval parmi les sûretés personnelles. En effet, ledit
article dispose que « les sûretés personnelles régies
par le présent acte uniforme sont le cautionnement et la garantie
autonome ».
Cependant, on constate que les juridictions africaines
confondent l'aval et le cautionnement, l'un étant employé pour
l'autre163. En effet, dans l'espèce citée en
référence, d'une part on remarque que le défendeur a
avalisé des dettes cambiaires et le Tribunal de grande instance du
Mfoundi (Cameroun) le considère comme une caution hypothécaire
solidaire qui aux termes de l'article 39 de l'AUPSRVE ne
bénéficie pas de délais de grâce à cause du
caractère cambiaire de la dette cautionnée.
D'autre part, sur le refus de délais de grâce,
après avoir refusé le paiement échelonné du
créancier, l'article 39 précité dispose que «
toutefois, compte tenu de la situation du débiteur et en
considération des besoins du créancier, la juridiction
compétente peut, sauf pour les
161
Cass.com., 19 février 1991, Bull.
civ. IV,1991, n° 81 p. 55 ; l'aval par acte séparé
garantissait le remboursement d'un prêt et non d'effets de commerce et a
été implicitement requalifié en cautionnement de droit
commun.
162 Cass. Civ., 7 mars 1944 : D. 1945, note J.Hamel ;
Cass. Com., 16 mars 1970, Bull. civ., IV,
1970, n° 99, p.93.
163 TGI du Mfondi, jugement civil n° 516 du 28 mai 2003,
affaire Amougou Kono c/ BICEC, Ohadata J-08-111.
69
dettes d'aliments et les dettes cambiaires, reporter ou
échelonner le paiement des sommes dues dans la limite d'une année
».
L'aval est donc un cautionnement en droit OHADA, par
conséquent l'avaliste en zone OHADA compterait sûrement parmi les
bénéficiaires des informations de la caution durant
l'exécution du contrat de cautionnement.
La largesse du droit de l'OHADA permettrait donc à
certaines garanties personnelles d'être considérées et
traitées comme des cautions même si elles se distinguent plus ou
moins du cautionnement et des sûretés personnelles. Toutefois, une
telle conclusion est bien sûr à prendre au conditionnel puisque le
législateur africain aurait, semble-t-il, emboîté le pas du
législateur français concernant l'information de certaines
cautions dont l'information posait en effet un certain nombre de
difficultés.
Section 2 : la difficile information de la sous-caution
et du certificateur de caution
Il convient de préciser d'emblée que si le
cautionnement est une garantie de paiement, le sous-cautionnement et la
certification de caution sont des contre-garanties. Pourtant, le droit
français du cautionnement a oublié la sous-caution et le
certificateur de caution comme en témoigne le professeur Bernard
SAINTOURENS164. Toutefois, les professeurs Séverine CABRILLAC
et Philippe PETEL font remarquer non seulement que « le sous-cautionnement
est très fréquent lorsque la caution est un professionnel
étant donné qu'elle exige que le débiteur lui fournisse
des contre-garanties »165, mais aussi que « le plus
souvent la sous-caution est le dirigeant de la société
débitrice principal » 166.
En droit de l'OHADA, nous constatons que l'Acte uniforme de
2010 a également oublié ces deux grands acteurs du monde des
affaires. En effet, d'une part si la certification de caution est
présente à l'article 21 de l'AUS de 2010, l'information du
certificateur n'y est nullement consacrée. D'autre part, il n'y a aucune
trace du sous-cautionnement.
Ainsi, afin de mieux comprendre les contre-garanties
citées plus haut, les mécanismes du sous-cautionnement et de la
certification de caution seront expliqués (Paragraphe
1). Puis, nous verrons dans quelles mesures lesdits garants pourraient
bénéficiers des informations obligatoires (Paragraphe
2).
164 B. Saintourens, Certificateurs de caution et
sous-cautions : les oubliés des réformes du droit du
cautionnement, in mél. M. Cabrillac, Dalloz-Litec, 1999, n°
397 et s.
165 M. Cabrillac, Ch. Mouly et al., Op. cit.,
n° 62, p.53.
166 Ibid.
70
Paragraphe1 : Définition et notion
Nous expliquerons tout d'abord la notion de sous-cautionnement
(A), puis celle de certification de caution
(B).
A- Le sous-cautionnement
Créancier
initial
Débiteur principal
Sous caution
Caution
Le sous-cautionnement (les flèches indiquent le sens
des actions en paiement)
Pour le professeur Dominique LEGEAIS, « le
sous-cautionnement consiste pour une caution à se faire garantir par une
tierce personne, la sous-caution, le remboursement de ce qu'elle peut avoir
à payer en cas de défaillance du débiteur principal
»167. En d'autres termes, il s'agit du cas dans lequel le
risque d'insolvabilité du débiteur principal à
l'échéance est tellement grand que la caution veut d'une part
prévoir le payement de la dette en lieu et place du débiteur
principal et d'autre part, elle veut prévenir le remboursement de la
dette par la fourniture d'une caution d'où l'expression «
sous-caution ». La caution sait qu'elle va payer la dette, mais elle veut
que le débiteur lui garantisse le remboursement des sommes qu'elle
déboursera.
Donc, une conséquence juridique importante est
observable. Ainsi, la Cour de cassation française a décidé
que « la sous-caution ne peut pas se prévaloir des exceptions
inhérentes à la dette du débiteur principal au profit du
créancier »168. En effet, la sous-caution n'a aucun
lien
167 D. Legeais, Op. cit., n° 85, p.63.
168
Cass. Com., 27 mai 2008 : D. 2008, act.
Jurispr. 1546, obs. V. Avena-Robardet et p. 2398, note crit. O. Gout.
71
de droit avec le créancier initial (le créancier du
débiteur principal) puisque la sous-caution ne souscrit aucun engagement
envers ledit créancier, mais s'engage envers la
caution169.
Aussi, lesdites exceptions inhérentes à la dette et
appartenant au débiteur principal sont, aux termes de l'article 29 de
l'AUS, celles qui « tendent à réduire, éteindre ou
différer la dette ». L'information de la caution en fait donc
partie de par la sanction qui en frappe le défaut.
La première contre-garantie que nous avons vue est donc
une sûreté personnelle donner par le débiteur principal en
faveur de sa caution, la seconde contre-garantie est une sûreté
personnelle donner par la caution en faveur du créancier initial.
B- La certification de la caution
Caution
Certificateur
Débiteur principal
Créancier initial
La certification de caution (les flèches indiquent le
sens des actions en paiement)
Le professeur LEGEAIS précise non seulement qu'«
il n'existe aucun lien de droit entre le certificateur de caution et le
débiteur principal »170 contrairement au
sous-cautionnement, mais aussi que « dans les rapports entre le
certificateur et la caution, ce sont les règles du cautionnement qui
s'appliquent »171. Toutefois, le juriste explique que « le
certificateur qui a payé le créancier dispose d'un recours
subrogatoire contre le débiteur principal ou la caution»
172(voir schéma ci-dessus). Le certificateur de caution est
ainsi le créancier potentiel de la caution ou du débiteur
principal, alors que la sous-caution n'est le créancier potentiel que du
débiteur principal.
169 D.Legais, Op. cit., n° 85, p.63,
préc.
170 D. Legeais, Op. cit., n° 84, p.62-63.
171 Ibid.
172 Ibid.
72
Le professeur SIMLER explique « le créancier qui a
exigé d'être garanti par une caution, par crainte de la
défaillance du débiteur principal, peut redouter que la caution
soit elle aussi défaillante et vouloir faire garantir ce risque
subsidiaire par une autre caution »173.
Toutefois, il faut préciser que l'usage de la
certification de caution est rare, car, comme le fait remarquer le professeur
SIMLER, « il est plus avantageux pour le créancier d'exiger
l'engagement d'une ou plusieurs autres cautions en qualité de
cofidéjusseurs, autant possible solidaires, que de mettre en place une
pluralité de cautionnements en cascade »174.
En droit de l'OHADA, c'est l'alinéa 1er de
l'article 21 de l'Acte uniforme relatif aux sûretés de 2010 qui
dispose que « la caution peut, elle-même, se faire cautionner par un
certificateur désigné comme tel dans le contrat ».
Le certificateur est, aux termes de l'article 21 de l'AUS, la
caution simple de la caution certifiée. Mais, les professeurs
Sévérine CABRILLAC et Philippe PETEL nous rappellent le
caractère accessoire du cautionnement et que dans la pratique « le
créancier peut exiger le paiement du certificateur en premier
»175 (voir schéma ci dessus).
Arrivé à ce stade, il convient maintenant
d'étudier le comportement du droit positif français à
l'égard de la sous-caution et du certificateur de caution lorsqu'il
s'agit d'information obligatoire. Puis, faute de textes recueillis sur le
sujet, nous déduirons, au moyen de la réglementation OHADA et du
droit français, le comportement de la Cour commune de justice et
d'arbitrage.
Paragraphe 2 : l'information des sous-cautions et des
certificateurs de caution
Nous tenterons de comprendre le comportement du droit positif
français vis-à-vis des sous-cautions (A) et des
certificateurs de caution (B) à propos des obligations
d'information. En effet, le certificateur de caution et la sous-caution sont
certes des contre-garanties, mais ils sont également des cautions. Nous
suggérerons dans chaque partie un moyen d'informer la sous-caution et le
certificateur.
173 Ph. Simler, Op. cit., n° 116.
174 Ph. Simler, Op. cit., idem.
175 M. Cabrillac, Ch. Mouly et al., Op. cit.,
n° 61, p.52.
73
A- L'improbable information de la sous-caution
Nous verrons pourquoi la communication, par le
créancier initial, de l'information périodique
(1) et celle de l'information ponctuelle (2)
serait incohérente dans le sous-cautionnement.
1) L'information périodique de la
sous-caution
En droit de l'OHADA, tout comme en droit français, nous
avons relevé qu'il n'existe aucun lien de droit entre la sous-caution et
le créancier initial [voir schéma], par conséquent la
sous-caution n'étant liée qu'à la caution de premier
degré et au débiteur principal, elle ne peut pas réclamer
que le créancier initial l'informe au même titre que la caution de
premier degré.
D'ailleurs, le défaut de lien de droit est mis en
exergue dans un arrêt du 3 décembre 1985 de la chambre commerciale
de la Cour de cassation française qui a jugé que « la
caution ne peut pas se prévaloir à l'encontre de la sous-caution
de la subrogation dans les droits du créancier, ces droits existant
contre le débiteur principal et non contre la sous-caution qui n'a aucun
rapport avec le créancier »176. Ainsi, le
créancier initial ne peut pas être l'obligé d'un tiers au
contrat de cautionnement.
Aucune obligation d'informer la sous-caution ne peut donc
peser sur le créancier initial. En revanche, la sous-caution a un lien
de droit avec le débiteur principal (b) et la caution
(a) -- l'état de la dette du premier étant
communiqué à la seconde.
a. L'information périodique de la sous-caution
à la charge de la caution
Comment imposer une information à la charge de la
partie que le législateur entend protéger ? Telle est la
difficulté à laquelle on est confronté lorsque l'on veut
que l'information périodique soit communiquée par la caution.
En France, le professeur LEGEAIS fait remarquer que « les
dispositions légales concernant les cautions telles que les obligations
d'information ne peuvent être étendues par analogie aux
sous-cautions »177. D'ailleurs, la Cour de cassation
française a jugé que « la caution n'est pas tenue d'informer
la sous-caution »178. Néanmoins, en droit de l'OHADA, le
législateur pourrait faire une entorse à ce principe afin que les
sous-cautions soient elles aussi bénéficiaires de l'information
périodique.
176
Cass.com., 3 déc. 1985, Bull. civ.
IV n° 288, p.245.
177 D. Legeais, Op. cit., n° 86, p. 65.
178 Le professeur Dominique Legeais cite à la page 86 de
son ouvrage l'arrêt
Cass. Com., 3 déc. 2003, Bulletin
2003 IV N° 188 p. 211.
74
Ainsi, afin de résoudre le problème de
l'information de la sous-caution, il faudrait tout d'abord rejeter
l'idée de la surprotection de la caution et accepter que celle-ci ait
également des devoirs notamment un devoir de loyauté envers la
sous-caution. D'ailleurs, c'est la caution qui exige au débiteur
principal de lui fournir une sûreté personnelle, par
conséquent on ne voit pas pour quelles raisons le législateur
africain refuserait de prévoir une information de la sous-caution.
Ensuite, dans les rapports entre le débiteur principal
et la caution, il faudrait imposer une attitude active à la caution dans
la recherche de l'information sur l'état de la dette afin qu'elle puisse
transmettre celle-ci à la sous-caution. D'ailleurs, la caution devrait
être tenue d'informer la sous-caution de la même manière que
le créancier initial est lui-même tenu d'informer ladite caution.
Pour ce faire, la caution devrait faire preuve de vigilance et être
à l'affût de l'information.
Toutefois, avec un tel raisonnement, seules les cautions
professionnelles pourraient entreprendre les investigations nécessaires
pour acquérir l'information sur l'état de la dette afin de
communiquer celle-ci à la sous-caution. Il s'opérerait ainsi une
discrimination au détriment des cautions profanes qui seraient
injustement tenues à une obligation d'informer la sous-caution alors
qu'elles en sont incapables.
Donc, en droit de l'OHADA, afin d'informer la sous-caution de
l'évolution de la dette, le législateur devrait opérer une
dérogation au principe de la protection des contractants. Cependant, la
sous-caution pourrait s'informer à la source.
b. L'information périodique de la sous-caution
à la charge du débiteur principal
Cette obligation est peu orthodoxe. En effet, dans le
cautionnement, le débiteur n'est tenu d'aucune obligation d'information
envers la caution. Or, la sous-caution est la caution du débiteur
principal vis-à-vis de la caution de premier degré qui est alors
un potentiel créancier du débiteur principal.
Toutefois, le débiteur principal est très bien
placé pour informer la sous-caution voire la caution, mais le principe
en droit des contrats est d'imposer des obligations d'information aux
contractants dominants et non aux contractants les plus faibles.
Ainsi, une information due par le débiteur ne serait
pas juste d'un point de vue moral. L'on comprend alors que l'information de la
sous-caution est assez délicate à mettre en place vu
75
que l'on ignore à qui l'imposer sans heurter la vibre
morale du législateur OHADA qui s'inspire du législateur
français. En effet, le professeur Murielle FABRE-MAGNAN fait remarquer
que l'obligation d'informer n'a de sens que lorsqu'une partie ne peut pas
s'informer d'elle-même179.
Donc, en droit de l'OHADA, seules les cautions
professionnelles devraient être tenues d'informer les sous-cautions sur
l'état de la dette étant donné qu'elles seules peuvent se
procurer l'information du fait de leur professionnalisme. En effet, les
cautions dirigeantes sont parfois dans l'incapacité de récolter
puis fournir l'information périodique, car ce ne sont pas des
professionnels avertis180. Si l'information périodique de la
sous-caution pose des problèmes d'ordre moral, l'information ponctuelle
ne pose aucun problème majeur.
2) L'information ponctuelle de la
sous-caution
En ce concerne l'information ponctuelle de la sous-caution, il
est clair que la celle-ci ne peut pas être mise en demeure par le
créancier initial avec lequel elle n'a aucun rapport. Par
conséquent, la sous-caution n'est pas en droit de revendiquer une
information ponctuelle de la part du créancier du débiteur
principal. Toutefois, la sous-caution peut exiger ladite information de la part
de la caution de premier degré, son créancier potentiel.
Ainsi, si l'information de la sous-caution pose des
difficultés mineures en droit positif français et africain,
l'information du certificateur de caution est encore plus difficile à
imposer.
B- L'information du certificateur de caution
Nous verrons pourquoi la communication, par le
créancier garanti, de l'information périodique
(1) serait inconvenante dans la certification de caution. En
revanche, il n'y a aucune difficulté en ce qui concerne l'information
ponctuelle (2).
1) L'information périodique du certificateur de
caution
En France, alors que la certification de caution fait partie
intégrante du Code civil181, l'information du certificateur
de caution est inexistante.
179 M. Fabre-Magnan, Op. cit., idem.
180
Cass. Com., 11 avr. 2012, Bull. Civ. IV,
n° 76.
181 L'alinéa 2 de l'article 2291 de l'ancien Code civil
français dispose qu'« on peut aussi se rendre caution, non
seulement du débiteur principal, mais encore de celui qui l'a
cautionné »
76
Ainsi, de manière corrélative, l'Acte uniforme
relatif aux sûretés de 2010 fait mention de la certification de la
caution dans son article 21. En effet, ledit article 21 de l'AUS fait des
certificateurs de caution, « les cautions simples de la caution
certifiée ».
Toutefois, si l'alinéa 1er de l'article 29
de l'AUS dispose que « toute caution ou tout certificateur de caution peut
opposer au créancier toutes les exceptions inhérentes à la
dette qui appartiennent au débiteur principal et tendent à
réduire, éteindre ou différer la dette [...] », cette
disposition ne permet pas de faire du certificateur un
bénéficiaire de l'information semestrielle. En effet, le
certificateur ne peut opposer au créancier que les exceptions
inhérentes à la dette et appartenant au débiteur principal
alors que l'information périodique est une exception appartenant
à la caution poursuivie et non au débiteur principal.
Nous avons vu que le certificateur de caution n'avait aucun
lien de droit avec le débiteur principal, par conséquent le
créancier pourrait lui opposer le secret bancaire pour lui refuser le
droit à l'information des cautions (a). Or, le
certificateur de caution est en relation avec la caution qui est
bénéficiaire de l'information (b). Nous
essaierons donc de déterminer dans quelle mesure, en droit de l'OHADA,
le certificateur de caution pourrait être informé de
l'évolution de la dette en dépit du fait qu'il ne soit pas un
bénéficiaire de l'information de la caution en droit
français.
a. L'information périodique du certificateur
à la charge de créancier initial
Le principal obstacle à l'information périodique
du certificateur est le secret bancaire. Le secret bancaire représente
le secret professionnel de la banque. Il s'agit donc d'une « obligation
dont le respect est sanctionné par la loi pénale, imposant
à certains professionnels de taire les confidences recueillies au cours
de l'exercice de leur profession »182. En France, l'article
226-13 du Code pénal dispose que « La révélation
d'une information à caractère secret par une personne qui en est
dépositaire soit par état ou par profession, soit en raison d'une
fonction ou d'une mission temporaire, est punie d'un an d'emprisonnement et de
15 000 euros d'amende ».
Au Gabon, aux termes de l'article 289 du Code pénal de
1963, la violation du secret professionnel entraîne une peine privative
de liberté d'un à six mois et une sanction pécuniaire
allant de 24 000 à 240 000 francs.
182 Raymond Guillien et al., Op. cit., p.
791.
77
Pourtant, en ce qui concerne l'information du certificateur et
le secret bancaire, nous constatons que le secret bancaire ne serait pas une
barrière à l'information du certificateur.
En effet, en raisonnant par analogie, nous remarquons qu'en
France, il a été jugé que « le secret bancaire,
prévu à l'article L.511-33 du Code monétaire et financier
n'est pas absolu et, notamment, ne saurait être valablement
opposé, par un établissement de crédit, à la
caution à laquelle il réclame paiement, pour se dispenser
d'établir la preuve de l'existence et du montant de la créance
qu'il allègue »183. En effet, « la caution n'est
pas un tiers à l'égard de la banque ni à l'égard du
débiteur principal »184.
Aussi, dans la même affaire, la haute juridiction a
jugé que « dès lors qu'il appartient au banquier
d'établir l'existence et le montant de la créance dont il
réclame le paiement à la caution ou à ses ayants droit,
ceux-ci sont en droit d'obtenir la communication par lui des documents
concernant le débiteur principal nécessaires à
l'administration d'une telle preuve, sans que puisse leur être
opposé le secret bancaire »185. Donc, en matière
de preuve, le secret professionnel n'est pas opposable aux ayants droit de la
caution, or l'éventuel certificateur de caution est un ayant droit de
celle-ci eu égard le recours subrogatoire qu'il possède envers
ladite caution.
En outre, il suffirait d'imposer le secret bancaire au
certificateur de caution pour que celui-ci puisse bénéficier lui
aussi de l'information périodique sans menacer la confidentialité
de l'information. D'ailleurs, en France, l'article 511-33 du Code
monétaire et financier dispose que « Les personnes recevant des
informations couvertes par le secret professionnel, qui leur ont
été fournies (...) doivent les conserver confidentielles
».
Mais, le certificateur de caution pourrait lui aussi être
informé d'une manière peu orthodoxe. b. L'information
périodique du certificateur à la charge de la
caution
Cette information se déduit très facilement
puisque la caution étant bénéficiaire de l'information,
pourquoi ne pourrait-elle pas en faire profiter son certificateur ? Toutefois,
ce procédé bouleverserait le principe de loyauté dans le
cautionnement du moins en matière d'obligation d'information.
183
Cass.
Com., 16 déc. 2008, Bull. civ. IV,
n° 206.
184 Ibid.
185
Cass.
Com., 16 déc. 2008,
préc.
78
En effet, en ce qui concerne l'information de la caution, le
devoir de loyauté n'existe que dans les rapports entre la caution et le
créancier et non pas dans les rapports existant entre la caution et le
débiteur principal. D'ailleurs, le débiteur initial n'est soumis
à aucune obligation d'information au profit de la caution qu'il offre au
créancier. Comment donc concevoir que la caution devrait informer son
certificateur alors que celui-ci est son créancier potentiel?
Nous comprenons qu'une information communiquée par la
caution dans la certification ne serait pas très orthodoxe. En effet,
dans l'hypothèse où le créancier initial manquerait
à son obligation envers la caution, le certificateur ne pourrait pas
exercer de recours pertinent ni contre la caution qui n'a pas été
informée ni contre le créancier qui a omis d'informer la caution.
Toutefois, une telle information serait cohérente si la caution est un
véritable professionnel capable de collecter, traiter et communiquer
l'information.
Donc, le certificateur de caution ne pourrait être
informé (sur l'évolution de la dette) que par le créancier
initial ou par une caution professionnelle. Cependant, on ne rencontre aucune
difficulté pour la communication de l'information ponctuelle au
certificateur.
2) L'information ponctuelle du certificateur de
caution
En droit de l'OHADA comme en droit français et en ce
qui concerne l'information ponctuelle, le certificateur de caution, de par la
relation qu'il a le créancier, peut réclamer d'être
informé sur la défaillance du débiteur principal bien
qu'il n'ait aucun lien de droit avec lui au sens de l'article 13 de l'AUS de
2010.
En effet, d'une part, comme nous l'a fait remarquer le
professeur Séverine CABRILLAC186, le créancier initial
peut, en cas de défaillance du débiteur principal, saisir soit la
caution soit son certificateur, quitte au certificateur d'opposer au
créancier son bénéfice de discussion. D'autre part, toute
poursuite du créancier doit toujours être
précédée d'une mise en demeure valant alors information
ponctuelle187.
Néanmoins, concernant l'objet de l'information
ponctuelle dans la certification de caution, l'on pourrait se poser la question
de savoir si ce n'est pas la défaillance de la caution certifiée
qui devrait être communiquée au certificateur plutôt que
celle du débiteur principal avec
186M. Cabrillac, Ch. Mouly et al., Op.
cit., n° 61, p.52, préc. ; article 1344 du Nouveau Code civil
français d'octobre 2016 : « le débiteur est mis en
demeure de payer soit par une sommation ou un acte portant interpellation
suffisante, soit, si le contrat le prévoit, par la seule
exigibilité de l'obligation ».
187 CA Paris, 31 oct. 1998, JurisData n° 1998-023660.
79
lequel le certificateur n'a aucun lien. Cependant, dans les
deux cas, le certificateur serait tenu informé et serait
protégé au moyen de l'information.
80
Chapitre 2 : Réflexions sur les obligations
d'information au profit de la caution
L'étude des obligations d'information au profit de la
caution amène à s'interroger en particulier d'une part sur des
difficultés à informer les cautions dans la pratique
(Section 1) et d'autre part sur l'identité de nature
des « obligations » d'information (Section 2).
Section 1 : L'effectivité et le coût de
l'information
Malgré l'imposition de certaines obligations
onéreuses (Paragraphe 2), on constate que ni le
législateur français ni le législateur africain n'ont
souhaité s'assurer de l'effectivité des mesures prises afin
d'informer les cautions (Paragraphe 1).
Paragraphe 1 : l'absence de formalisme de
l'information de la caution : une incompréhension vicennale
Imposer des obligations contraignantes à un
professionnel est sans doute ce qu'il convient de faire vu
l'inégalité patente entre celui-ci et le profane. Mais, en ce qui
concerne la communication d'une information essentielle, comment le
législateur peut-il oublier de s'assurer que le profane puisse
réellement recevoir l'information (A), alors même
que des procédés permettant une meilleure communication de
l'information existent (B) ?
A- L'absence de formalisme de l'article 24 de l'AUS
En France, il a été jugé que
l'information ponctuelle de la caution peut résulter de la mise en
demeure adressée à celle-ci suite à la défaillance
du débiteur188.
D'ailleurs, la Cour d'appel d'Abidjan a reconnu ladite
procédure en jugeant qu'« il demeure qu'un seul exploit peut bien,
comme en l'espèce constater la défaillance du débiteur et
réclamer le paiement à la caution ; de sorte que la
Société africaine de crédit automobile (SAFCA) n'a pas
violé les articles 13 et 14 de l'AUS (de 1997) »189.
Notons que l'information de la caution est une obligation
portable et non quérable190. En effet, une créance
quérable est une créance dont le créancier doit aller
réclamer l'exécution au domicile du débiteur alors qu'une
créance portable est une créance que le débiteur doit
188 CA Paris, 31 oct. 1998, préc.
189 CA Abidjan, arrêt n° 370 du 28 mars 2003,
Daniel BRECHAT et Alain MASSOULIER c/SAFCA ; Ohadata J-03280.
190 CA Grenoble, 11 sept. 1996 : JurisData n°
1996-044625.
81
spontanément acquitter au domicile du créancier
ou dans le lieu fixé par la convention191. C'est donc au
débiteur de l'obligation d'information (le créancier garanti) de
faire parvenir l'information jusqu'au bénéficiaire de
l'information (la caution).
En droit de l'OHADA, comme en droit français, l'article
24 de l'AUS de 2010 ne prévoit pas de formalisme pour la mise en demeure
de la caution bien qu'en pratique plusieurs créanciers
préfèrent recourir aux services d'un huissier de justice sans
doute à cause de la force probante des actes authentiques. Au demeurant,
une simple lettre suffit pour tenir la caution informée.
Toutefois, nous avons constaté que certains
créanciers trop diligents annexaient directement la lettre de mise en
demeure de la caution à une ordonnance d'injonction de payer
adressée elle aussi à ladite caution. Or, le Tribunal de Grande
Instance de Ouagadougou (Burkina Faso) a jugé « que l'ordonnance
d'injonction de payer est un titre qui permet d'engager les procédures
d'exécution et ne saurait être assimilée à une mise
en demeure »192.
Donc, si l'information ponctuelle de la caution n'est soumise
à aucun formalisme en droit de l'OHADA, l'autre information de la
caution étudiée dans notre travail paraît plus complexe
d'où la suggestion d'une information au moyen d'un procédé
permettant une meilleure effectivité de l'information. Ledit
procédé pourrait également être imposé pour
prouver la communication de l'information ponctuelle.
B- La nécessité de la lettre
recommandée avec avis de réception pour la communication de
l'information périodique
En France, en dépit des avantages de la lettre
recommandée avec avis de réception (2),
l'utilisation de la lettre recommandée n'a pas été
imposée par la Cour de cassation. En effet, selon la haute juridiction
non seulement « l'information de la caution constitue un fait qui peut
être prouvé par tous moyens »193, mais aussi la
Cour a jugé qu'« il n'incombe pas à l'établissement
de crédit de prouver que la caution a effectivement reçu
l'information envoyée »194, ce qui est une contradiction
flagrante avec la volonté de tenir la caution informée de
l'état de la dette. En revanche, la suggestion, en droit de l'OHADA, du
courrier
191 Raymond Guillien et al., Op. cit., p. 652
et 707.
192 TGI de Ouagadougou, jugement n° 53/2005 du 16
février 2005, NIKIEMA Arouna c/PNAR-TD ; Ohadata J-07227.
193
Cass. Com., 17 oct. 2000, Bull. civ. IV,
n° 154, p. 138.
194 Ibid.
82
en recommandé permettrait au créancier de
s'acquitter du formalisme informatif imposé par l'Acte uniforme en plus
de vérifier l'effectivité de la communication de l'information
(1).
1) Le formalisme informatif de l'article 25 de
l'AUS et l'absence de forme dans la communication de l'information
périodique
Mention manuscrite obligatoire, signature et contenu
précis du contrat sont des mesures formelles de protection du
contractant profane qu'est la caution (a). Lorsqu'une lettre
est soumise à un tel formalisme, il est évident qu'elle devrait
impérativement parvenir jusqu'à son destinataire
(b).
a. Définition
Le professeur François Terré explique que le
formalisme informatif est le fait en vertu duquel « l'une des parties,
fréquemment un professionnel, est obligée de rédiger le
contrat par écrit et d'y insérer des mentions destinées
à informer son cocontractant, le plus souvent, mais pas toujours un
consommateur, sur les droits et les obligations qui en sont issus, sur l'objet
même du contrat ou encore sur l'existence de dispositions légales
protectrices »195.
Toutefois, l'auteur met en garde le législateur contre
l'indolence des consommateurs à qui bénéficie ce
formalisme informatif. En effet, François Terré explique que
« celui-ci [le consommateur] est ainsi mis en mesure de s'engager en
connaissance de cause s'il a pris la peine de lire attentivement le contrat
avant de le signer, ce qui est loin d'être toujours le cas
»196.
Si en droit français des mentions spéciales
sont insérées dans l'information destinée à un
contractant, il en est de même en droit de l'OHADA.
b. Le formalisme informatif de l'article 25 de
l'AUS
Il est assez paradoxal de constater que l'information de
l'article 25 n'impose aucun formalisme dans sa communication, mais qu'il existe
tout de même un formalisme informatif qui devrait être
respecté par le créancier.
195 F. Terré, Ph. Simler et Y. Lequette, Op.
cit., n ° 262, p.292.
196 Idem.
83
En effet, si l'article 25 de l'AUS n'impose d'emblée
aucun formalisme en ce qui concerne la manière utilisée pour
communiquer l'information à la caution197, l'alinéa
1er de l'article 25 impose la « reproduction littérale
des dispositions de l'article 19 du présent acte uniforme » dans la
notification.
En outre, l'article 19 de l'AUS de 2010 circonscrit tout
d'abord l'information de la caution au seul cautionnement tous engagements et,
sauf clause contraire, aux dettes contractuelles directes et nées
après la conclusion du contrat de cautionnement. Puis, ledit article
évoque non seulement le plafonnement de la somme garantie à peine
de nullité de l'engagement, mais aussi le renouvellement de celle-ci.
Enfin, l'article 19 met en exergue la faculté de révocation
unilatérale de l'engagement.
Il est donc clair que, contrairement à l'information
ponctuelle de l'article 24 de l'AUS, l'information périodique de
l'article 25 renferme un formalisme dont le défaut entraîne la
sanction du défaut d'information : la déchéance des
intérêts contractuels. En effet, une information incomplète
ne vaut pas information, du moins en théorie198.
Au vu de ce qui précède, l'on comprend que si
l'information périodique de la caution doit contenir des
éléments destinés à mieux renseigner la caution sur
le type d'engagement qu'elle souscrit, alors des procédés
adéquats devraient être imposés par le législateur
afin de garantir que l'information parvienne jusqu'à ladite caution.
2) Le besoin d'une communication par lettre
recommandée avec avis de réception
Bien que la communication de la lettre d'information en
recommandée avec avis de réception offre plusieurs avantages au
créancier (a), il n'en demeure pas moins que c'est
à la caution qu'elle pourrait causer des désagréments sur
le plan de la preuve si elle est mal utilisée (b).
Toutefois, nous constatons également une certaine marginalisation de la
caution en droit de l'OHADA (c).
197 Le législateur africain semble s'être
rangé du côté de la Cour de cassation française qui
a toléré l'absence de formalisme de l'information
périodique :
Cass. Com., 27 nov. 1991 : JCP G 1992, IV,
367 ; RJDA 1992, n° 182.
198 TGI de Ouagadougou, 27 juin 2007, préc. ; Le TGI de
Ouagadougou a violé le formalisme de l'information périodique en
ayant autorisé une information périodique communiquée au
moyen de simples relevés de compte bancaire ;
84
a. Les avantages de la lettre recommandée avec
avis de réception
D'une part, le site WIKIPEDIA nous enseigne que « par sa
nature et ses implications juridiques, le courrier envoyé en
recommandé avec avis de réception est adapté à la
préparation d'un dossier de type contentieux lorsque l'on souhaite
être en mesure de prouver juridiquement l'envoi d'un courrier, d'une mise
en demeure, ou de prendre date concernant un événement
particulier encadré par des dispositions contractuelles
»199.
D'autre part, en dépit de l'inflexibilité de la
Cour de cassation française200, le tribunal de grande
instance de Saint-Étienne avait jugé qu'il était «
inadmissible, en raison de leur importance, que les avis à caution aient
été, dans un établissement de crédit,
adressés par lettre simple sans récépissé, soumis
à toutes les vicissitudes et à toutes les
dénégations »201. La Cour d'appel de Paris, quant
à elle, avait retenu que l'usage de la lettre recommandée avec
avis de réception s'imposait202.
Ainsi, nous comprenons que le formalisme latent de l'article
25 de l'AUS devrait imposer la communication de l'information périodique
au moyen de la lettre recommandée avec accusé de
réception. En effet, d'une part l'imposition du formalisme de la lettre
recommandée aurait pour effet d'étouffer dans l'oeuf le
contentieux de la preuve de l'envoi et celui du contenu de la lettre
d'information - en France, le débiteur de l'information doit prouver
l'envoi de la lettre d'information ainsi que le contenu de
celle-ci203 .
D'autre part, ledit formalisme a le mérite de permettre
à la caution d'être réellement informée ou du moins
sur un plan juridique. En effet, « L'utilisation d'un courrier en
recommandé avec avis de réception permet de disposer d'une preuve
de l'envoi, d'une preuve de la réception par le destinataire (avis de
réception retourné), et donc de prendre date dans
l'hypothèse d'une utilisation de ces preuves dans un contexte juridique
»204.
De manière plus explicite et juridique, nous pouvons
démontrer la pertinence de l'usage dudit formalisme au moyen du Code de
procédure civil français. Ainsi, tout d'abord, l'article 668
du
199
https://fr.wikipedia.org/wiki/Lettrerecommand%C3%A9eavecaccus%C3%A9der%C3%A9ceptionenFr
ance
200
Cass. Com., 27 nov. 1991, préc.
201 TGI Saint-Étienne, 30 juin 1987 : RD bancaire et
bourse 1987, p. 124, obs. Crédot et Gérard.
202 CA Paris, 29 et 30 mai 1997 : JurisData n° 1997-021354
et 1997-021367.
203
Cass. Com., 25 nov. 1997, Bull. civ. IV,
n° 326.
204
https://fr.wikipedia.org/wiki/Lettre
recommand%C3%A9e avec accus%C3%A9 de r%C3%A9ception en Fr ance
85
Code de procédure civile français dispose que :
« la date de réception d'une notification faite par lettre
recommandée avec demande d'avis de réception est celle qui est
apposée par l'administration des postes lors de la remise de la lettre
à son destinataire ».
Ensuite, l'article 670 dudit Code de procédure dispose
que « La notification est réputée faite à personne
lorsque l'avis de réception est signé par son destinataire. La
notification est réputée faite à domicile ou à
résidence lorsque l'avis de réception est signé par une
personne munie d'un pouvoir à cet effet ». L'effectivité de
l'information de la caution est alors établie.
Donc, grâce à la lettre recommandée avec
avis de réception, le créancier pourrait prouver (de
manière pertinente) non seulement l'envoi et la réception de
l'information, mais aussi le respect du formalisme informatif de l'article 25
de l'AUS (la reproduction littérale de l'article 19 dudit Acte
uniforme). Le droit de l'OHADA pourrait ainsi résoudre les
problèmes français en la matière. En effet, d'une part, en
France, la Cour de cassation avait retenu qu'« il n'incombe pas à
l'établissement de crédit de prouver que la caution a
effectivement reçu l'information envoyée »205 --
seul l'envoi de la lettre d'information devant être prouvé.
D'autre part, la Cour d'appel d'Angers avait retenu maladroitement que la
preuve de l'envoi de l'information emportait présomption de
conformité de son contenu206.
Cependant, la communication par lettre recommandée ne
présente pas que des avantages. b. Les inconvénients
de la lettre recommandée avec avis de réception
Les inconvénients de la lettre recommandée avec
avis de réception tiennent d'abord à son caractère
onéreux, puis au renversement de la charge de la preuve.
Premièrement, en ce qui concerne le caractère
onéreux du procédé susmentionné, le professeur
Séverine CABRILLAC, en citant l'exemple de la France, explique qu'«
en pratique, l'information est adressée par lettre simple, car la lettre
recommandée avec accusé de réception serait d'un
coût prohibitif et se prête mal au traitement automatique qu'impose
la masse des destinataires. Avec cette formule, la preuve de la
réception serait impossible à rapporter, aussi la Cour de
cassation en a-t-elle dispensé les banquiers »207.
Cependant, en droit de l'OHADA, la « masse de destinataires » est
considérablement réduite par la restriction des
bénéficiaires de l'information périodique étant
donné que seules les cautions générales sont
concernées, alors qu'en France plusieurs cautions
bénéficient de ladite
205 Civ. 1re, 25 nov. 1997, préc.
206 CA Angers, 27 janv. 2009 : jurisData n° 2009-378354.
207 M. Cabrillac, et al., Op. cit., n°
319, p.229, préc.
86
information208. Ainsi, en droit communautaire
africain, le caractère onéreux de ce procédé de
communication ne se fera pas ressentir.
Deuxièmement, concernant le renversement de la preuve,
le site WIKIPEDIA nous informe que « lors de l'envoi d'un courrier en
recommandé avec avis de réception, le destinataire est
supposé avoir pris connaissance de la notification qui lui a
été faite, et il y a inversion de la charge de preuve. Si le
destinataire prétend que l'enveloppe reçue était vide, il
lui incombe alors de prouver que celle-ci était effectivement vide (ce
qui, de fait, sera difficile à établir). Il en va de même
si le destinataire allègue que le contenu de l'enveloppe était
autre que ce qu'indique l'expéditeur : ce sera au destinataire de
prouver ses dires, et non à l'expéditeur de prouver sa bonne foi
»209.
En effet, un arrêt de la Cour de cassation
français confirme les propos de l'encyclopédie en ligne : «
la notification par la voie postale est réputée faite à
personne lorsque l'avis de réception est signé par son
destinataire et qu'en cas de notification sous enveloppe, il appartient au
destinataire de prouver que celle-ci était vide et non pas à
l'expéditeur d'établir que l'acte notifié était
contenu dans cette enveloppe »210.
Donc, la caution devra vérifier la conformité du
contenu de l'enveloppe avant d'accuser réception de la lettre
d'information au risque d'être dans l'impossibilité de prouver
qu'elle n'a pas reçu l'information ou que l'information reçue
n'était pas conforme. Cependant, au-delà des avantages et
inconvénients de la lettre recommandée avec avis de
réception, l'on remarque une attitude incompréhensible de la part
du législateur africain à l'égard de certains acteurs du
monde des affaires.
c. La marginalisation de la caution par le
législateur OHADA
Il semblerait exagéré ou impertinent de dire que
la caution est marginalisée par le législateur africain. En
effet, l'information de la caution démontre bien que la caution est
protégée en droit de l'OHADA. Néanmoins, dans les faits
l'on constate que cette marginalisation est réelle non seulement
lorsqu'il s'agit de l'effectivité de l'information de la caution, mais
aussi lorsque l'on prend la peine de comparer le régime appliqué
à la caution avec celui appliqué à
208 En France, l'obligation d'information périodique fait
l'objet de 3 lois visant chacune des cautions dans des situations
déterminées : l'article L.313-22 CMF, l'article L.341-6 du C.
Cons. et l'article 2293 du C. civ. 209
https://fr.wikipedia.org/wiki/Lettre
recommand%C3%A9e avec accus%C3%A9 de r%C3%A9ception en Fr ance
210 Civ 1re, 15 juillet 1993, pourvoi n°
92-04092.
87
d'autres individus dont la situation est également
réglementée par le législateur communautaire.
Ainsi, nous avons signalé que l'AUS a été
adopté le 17 avril 1997 puis modifié le 15 décembre 2010,
or au même moment, en 1997, il y a également eu l'adoption de
l'Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du
groupement d'intérêt économique (AUSCGIE) -- l'AUSCGIE a
été modifié le 30 janvier 2014. Cependant, contrairement
à l'AUS, l'ancien AUSCGIE de 1997 comptait déjà pas moins
de 35 articles qui faisaient état d'obligations d'information
effectuées soit au moyen de la lettre au porteur contre
récépissé soit au moyen de la lettre recommandée
avec demande d'avis de réception notamment lorsqu'il s'agissait
d'informer le gérant (article 150), le commissaire aux comptes (article
151), l'assemblée générale (article 286) ou encore les
héritiers des associés décédés (article
321). Mais, au moment où ces lignes sont écrites, on constate que
curieusement il n'existe aucune obligation d'information au profit de la
caution effectuée au moyen de tels procédés.
Aussi, afin de mieux saisir la marginalisation de la caution
en droit de l'OHADA, nous pouvons étendre la comparaison avec d'autres
Actes uniformes. Ainsi, nous avons analysé tout d'abord l'Acte uniforme
relatif au droit commercial général (AUDCG) du 17 avril
1997211, puis l'Acte uniforme portant organisation des
procédures collectives d'apurement du passif (AUPCAP) du 10 avril
1998212 et enfin l'Acte uniforme portant organisation des
procédures simplifiées de recouvrement et des voies
d'exécution (AUPSRVE) de la même date213. Lesdits Actes
uniformes imposent également des obligations d'information au moyen de
la lettre recommandée avec avis de réception.
La Caution aurait-elle moins d'importance que le gérant
d'une société commerciale, le commissaire aux comptes de ladite
société, l'acheteur indélicat, le nouveau syndic, le
créancier saisissant ou bien le créancier opposant ? Sinon,
comment alors expliquer que treize ans après son adoption en 1997, la
modification de 2010 de l'Acte uniforme portant organisation des
sûretés ne prenne toujours pas en considération
l'effectivité de l'information de la caution ?
211 Article 263 de l'AUDCG du 17 avril 1997.
212 L'AUPCAP du 10 avril 1998 compte 25 articles imposant la
lettre recommandée avec avis de réception, notamment les articles
8, 14, 24, 40 et 44.
213 L'AUPSRVE du 10 avril 1998 compte 21 articles imposant la
lettre recommandée avec avis de réception, notamment les articles
25, 75, 76 et 109.
88
L'on ne peut pas répondre à ces interrogations
de manière objective sans critiquer vertement l'attitude du
législateur OHADA. En revanche, on peut constater que si la forme de la
communication des informations ponctuelle et périodique a
été ignorée, certains acteurs du monde des affaires sont
nettement mieux lotis en matière d'information.
En effet, l'article 459-1 de l'AUSCGIE de 2014 s'assure de
l'effectivité de l'information des administrateurs de
sociétés commerciales en disposant que « le président
du conseil d'administration s'assure que les procès-verbaux du conseil
d'administration sont remis aux administrateurs en mains propres ou leur sont
adressés par lettre au porteur contre récépissé,
lettre recommandée avec demande d'avis de réception,
télécopie ou courrier électronique dans les meilleurs
délais et au plus tard lors de la convocation du prochain conseil
d'administration ».
La caution serait alors le parent pauvre en matière
d'obligation d'information dans le droit de l'OHADA. Pourtant, si le
législateur africain marginalise la caution, cette indifférence
ne s'arrête pas qu'à l'effectivité de l'information.
Paragraphe 2 : le silence du législateur OHADA
sur le coût de l'information
Il convient de rappeler qu'en pratique l'information
ponctuelle de la caution est souvent communiquée à la caution par
exploit d'huissier de justice et aux frais de celle-ci, voilà pourquoi
nous n'évoquerons que le coût de l'information périodique
qui pose davantage problème bien qu'il serait utile que le
législateur intervienne également dans le coût de
l'information ponctuelle.
Ainsi, notre travail nous conduira tout d'abord à
mettre en exergue les conséquences du vide juridique laissé par
les législateurs français et OHADA (A). Puis,
nous suggérerons une information périodique de la caution
générale aux frais exclusifs du créancier
(B).
A- Les conséquences du mutisme des
législateurs français et africain
Le refus de prise en compte du coût de l'information de
la caution par le législateur français et africain provoque
inévitablement de fâcheuses conséquences. En effet, en
absence de loi, l'on ne sait pas qui devrait supporter le coût de
l'information (1) voilà pourquoi le créancier
profite du vide juridique pour agir de manière discrétionnaire
(2). Toutefois, une idée issue de la doctrine
française fait son chemin, mais ne trouve ni écho auprès
des créanciers, ni auprès des juridictions françaises et
encore moins auprès du législateur (3).
89
1) La partie devant supporter les frais de
l'information périodique en droit de l'OHADA
Pour de nombreux débiteurs africains et
français, il n'y a que la lettre et son envoi qui leur sont
facturés dans l'optique d'informer la caution, voilà pourquoi ils
s'insurgent systématiquement contre la facturation supplémentaire
dudit service. Cependant, l'on constate avec les professeurs MODI KOKO BEBEY
Henri Désiré et JAMES Jean Claude que « ce formalisme [celui
de l'article 25 de l'Acte uniforme portant organisation des
Sûretés] pèse énormément sur les banques par
l'augmentation subséquente de leurs charges d'exploitation (en
personnel, moyens de communication...) que les clients concernés
refusent de supporter à travers la facturation de communication de
commissions supplémentaires »214.
Mais, déjà au niveau de l'envoi, le professeur
Sévérine CABRILLAC précise que « même par
lettre simple, l'envoi généralisé de l'information
coûte cher »215. Toutefois, précisons que
l'affirmation du professeur Sévérine CABRILLAC ne vaut que pour
la France, car en droit de l'OHADA, nous avons déjà
démontré que la masse des destinataires de l'information
périodique était fortement réduite (seuls les
cautionnements tous engagements sont concernés).
Cependant, si en droit de l'OHADA l'envoi
généralisé de l'information périodique revient
moins cher au créancier, l'article 25 de l'AUS ne prend pas en
considération le caractère onéreux de l'obligation
d'information, il reste notamment muet sur l'identification de la partie qui
devrait assumer ledit caractère onéreux, alors qu'il s'agit d'une
exigence que ledit texte impose aux créanciers.
Pourtant, l'on constate que le législateur OHADA a
déjà eu à identifier la partie qui devrait prendre en
charge le coût des obligations imposées par ladite organisation
communautaire. En effet, par exemple, l'alinéa 1er de
l'article 283 in fine de l'Acte uniforme relatif au droit commercial
général (AUDCG) dispose que le « vendeur a la faculté
d'imposer, à ses frais exclusifs et sans délai, à
l'acheteur le remplacement des marchandises défectueuses par des
marchandises conformes ».
214 Ersuma, École Supérieure de la magistrature
formation de juristes béninois en droit OHADA (magistrats groupe I),
droit bancaire : contentieux des sûretés et du
crédit, du 07 au 11 avril 2008, Porto Novo, animateurs : Pr MODI
KOKO BEBEY Henri Désiré et Pr JAMES Jean Claude. Séminaire
de formation disponible en format PDF sur le site
biblio.ohada.org
215 M. Cabrillac et al., Op. cit., n° 319,
p.229, préc.
90
Si le remplacement des marchandises défectueuses au
frais exclusif du contractant dominant au contrat de vente commerciale est une
réalité en droit de l'OHADA, pourquoi l'obligation d'information
semestrielle au profit de la caution ne pourrait-elle pas être
supportée par la partie dominante au contrat de cautionnement ?
Vu le silence du législateur, les habitudes du
créancier ne peuvent donc que perdurer. 2) La liberté
de facturation de l'information périodique de la caution
Le problème du manque de prise en compte du coût
de l'information périodique de la caution n'est pas exclusif à
l'OHADA. En effet, ledit problème existe également en France
où le législateur n'a pas pris en considération le
coût de l'obligation annuelle des cautions, alors qu'il l'avait
imposée aux établissements de crédit et aux
créanciers professionnels.
Aussi, en France, afin d'éviter les abus des
établissements de crédit dans la facturation de l'information de
la caution, un sénateur avait proposé le chiffrage de
l'information annuelle des cautions, sans succès.
En effet, en 1996, le Sénat français avait
introduit la question dudit Sénateur comme suit :
« M. Louis Souvet attire l'attention de M. le ministre de
l'Économie et des Finances sur l'importance des frais
prélevés à l'occasion de l'information par les
établissements bancaires vis-à-vis des cautions. Cette obligation
n'a pas donné lieu à un chiffrage précis de la part des
pouvoirs publics et laisse de ce fait la place à de nombreux abus. Il
demande si pour éviter de tels abus le Gouvernement entend instituer une
limite quant à la facturation d'une telle information, par ailleurs
nécessaire »216.
Mais, telle fut la réponse du ministre français de
l'Économie et des Finances de l'époque :
« L'envoi annuel d'une telle information à la
caution est générateur de frais de recherche et de gestion non
négligeables pour les établissements de crédit. Par
ailleurs, le fait que l'obligation soit imposée par la loi n'est pas en
soi un élément de nature à rendre injustifiée la
facturation du service rendu. Bien que les établissements de
crédit soient libres de facturer les services rendus aux cautions comme
à leur clientèle, ils doivent respecter les dispositions de
l'article 7 du décret du 24 juillet 1984 relatif à
l'activité et au contrôle des établissements de
crédit, qui dispose que «les établissements de crédit
sont tenus de porter à la connaissance de leur
216 Question écrite n° 16170 de M. Louis Souvet
(Doubs-RPR) publiée dans le JO Sénat du 20/06/1996 -- page 1491.
Disponible sur le site
www.senat.fr
91
clientèle et du public les conditions
générales de banque qu'ils pratiquent pour les opérations
qu'ils effectuent». Cette obligation d'information préalable
s'applique à toutes les opérations de banque ; elle est la
contrepartie nécessaire de la liberté de facturation des services
bancaires. Le Gouvernement n'entend par revenir sur le principe de la
liberté de facturation de ces services, puisque celle-ci a comme
corollaire le développement de la concurrence et la transparence des
conditions de banque »217.
Le ministre de l'Économie faisait donc tout d'abord
ressortir l'augmentation des charges d'exploitation des établissements
de crédit que les professeurs MODI et JAMES avaient
évoquée plus supra (l'envoi de l'information de la caution est
« générateur de frais de recherche et de gestion non
négligeables pour les établissements de crédit »).
Mais, ensuite ledit ministre alla plus loin en rejetant le
caractère gratuit de l'information de la caution du fait de son
caractère légal. Ce n'est donc pas parce que la loi oblige le
créancier à informer la caution qu'il doit le faire à ses
propres frais. Pis, le ministre de l'Économie continua en faisant de
l'obligation d'information sur les conditions générales de la
banque une condition sine qua non à de la liberté de facturation
de l'information des cautions. Il suffit donc que le débiteur eût
été informé au préalable du coût des services
bancaires qu'il sollicite (ou en l'occurrence ceux que la loi veut qu'il
assume) pour que lesdits services bancaires légalement prescrits
(information de la caution) lui soient facturés par le
créancier...
Enfin, le ministre rejette le chiffrage gouvernemental
préalable de l'information annuelle de la caution en évoquant la
liberté de la concurrence.
Toutefois, le blog de la banque et du patrimoine rappelle que
les motifs du ministre de l'Économie de 1996 à savoir les «
frais de recherche et de gestion non négligeables pour les
établissements de crédit » sont aujourd'hui désuets.
En effet, le blog constate que « l'informatisation des banques et
l'automatisation des systèmes font que les recherches sont aujourd'hui
nulles ou quasi nulles et qu'il ne reste plus aux banques que les frais
d'affranchissement et d'édition »218.
217 Réponse du ministère : Économie
publiée dans le JO Sénat du 29/08/1996 - page 2219. Disponible
sur
www.senat.fr
218 Le blog de la Banque et du patrimoine, les frais de lettre
d'information aux cautions, article disponible sur
http://leblogdelabanqueetdupatrimoine.blogspot.com/2014/06/frais-lettre-dinformation-aux-cautions.html
[site consulté le 04 janvier 2017]
92
Pour revenir à l'OHADA et à ses pays membres,
nos investigations nous ont permis de constater qu'aucune banque parmi les
banques gabonaises avec lesquelles nous sommes rentrés en contact ne
facturait l'information semestrielle de la caution.
En effet, par exemple, pour un chargé d'appui juridique
à Banque internationale du commerce et de l'industrie du Gabon (BICIG)
dont nous tairons le nom pour des soucis de confidentialité,
l'élaboration de l'information de la caution ne pose aucune
difficulté majeure puisque la banque dispose d'un fichier à
même de fournir en temps les informations de chaque client. Toutefois,
ledit chargé d'appui juridique évoque des difficultés
quant à la transmission de l'information dès lors que le client
change d'adresse ou lorsque celui-ci ne possède aucune adresse
personnelle certaine...
À ce sujet, nous pouvons dire que
l'établissement de crédit n'est pas tenu pour responsable du
défaut de réception de l'information de la caution en cas de
changement d'adresse qui n'a pas été au préalable
notifié à l'établissement de
crédit219.
En revanche, en ce qui concerne l'arbitraire dans la
facturation de l'information périodique, sur internet, nous avons eu
accès à un document en format PDF de la Banque commerciale
internationale de la République du Congo (BCI) qui renseignait sur les
tarifs des services bancaires proposés par ladite banque et l'on a
constaté que celle-ci facturait l'information semestrielle au client
à 19.230 FCFA220 pour l'année 2016. Cette facturation
discrétionnaire de l'information de la caution d'une banque à une
autre et d'un état membre à un autre met en évidence le
vide juridique sur la prise en considération du coût de
l'information semestrielle de la caution par le législateur OHADA.
Donc, au vu de l'arbitraire régnant dans la facturation
de l'information périodique, une idée a germé dans
l'esprit de plusieurs juristes français.
219 CA Bastia, 5 mars 2014, n° de RG 12/00726.
220 Conditions générales des principales
opérations de la clientèle professionnelles et entreprises,
fichier PDF disponible sur
www.bci.banquepopulaire.com/.
93
3) L'inclusion des frais relatifs à
l'information de la caution dans le taux effectif global
Le taux effectif global est le taux incluant, outre les
intérêts proprement dits, les frais, commissions ou
rémunérations de toute nature, directs ou indirects, y compris
ceux destinés à des intermédiaires intervenus dans
l'octroi du prêt221.
Toujours en France, selon l'avocat Marcelin SOME, « Les
frais d'information annuelle de la caution prélevés sur le compte
de l'emprunteur sont des débours au sens de l'article L.331-1 de
[l'ancien] Code de la consommation et le banquier doit impérativement
les inclure dans le calcul du taux effectif global. En effet, l'apport d'une
caution est très souvent une garantie exigée par les banques
avant l'octroi du crédit par conséquent les frais d'information
annuelle de la caution sont une charge liée à l'opération
de prêt. Lorsque la banque omet d'inclure les frais d'information
annuelle dans le calcul du taux effectif global il encourt la
déchéance du droit aux intérêts conventionnels ou de
substitution du taux légal ou taux conventionnel
»222.
Donc, afin d'éviter la variabilité des frais de
l'information périodique, l'avocat considère ceux-ci comme
étant des débours que le banquier devrait inclure dans le calcul
du taux effectif global, autrement dit lesdits frais seraient des
dépenses destinées à des intermédiaires intervenus
dans l'octroi du prêt.
Toutefois, l'avocat au barreau de Lyon précise que son
raisonnement est fondé sur la jurisprudence de plusieurs Cours
d'appel223 françaises et non sur la
jurisprudence de la Cour de cassation française elle-même. De ce
fait, une telle jurisprudence n'est pas représentative du droit positif
français du cautionnement dans sa généralité.
Cependant, l'idée de l'inclusion des frais relatifs
à l'information de la caution dans le calcul du taux effectif global
permettrait d'éviter la surfacturation de l'information au cours de
l'exécution du contrat de cautionnement ainsi que les abus, à
défaut d'un chiffrage gouvernemental précis comme le
suggérait le Sénateur SOUVET au ministre de l'Économie de
l'époque.
221 Raymond Guillien et al., Op. cit., p.
840.
222 Marcelin Some, les frais d'information annuelle de la
caution doivent être inclus dans le calcul du TEG, article
disponible
www.some-avocat.com.
223 C.A Lyon, Civ.3, Section A, 12 juin 2008,
n° 07/03698 et CA, Poitiers, 19 juillet 2011, n° 10/03218.
94
La prise en compte du coût de l'information de la
caution aurait alors lieu à la formation du contrat de prêt
puisque les frais de l'information de la caution seraient calculés
à ce moment.
Ainsi, en France, aucune banque ne pourrait plus affirmer
« qu'aucun texte ni la jurisprudence n'imposent à la banque
d'intégrer les frais relatifs à l'information annuelle des
cautions pour calculer le taux effectif global -- que cette information
n'existe que pour autant que la caution subsiste -- que les frais s'y
rapportant sont facturés à la caution qui est seule
bénéficiaire de cette information -- que ces frais ne
relèvent donc pas du TEG »224.
En zone OHADA, étant donné que le
législateur communautaire demeure silencieux sur le coût de
l'information, l'inclusion dudit coût dans le taux effectif global n'est
pas encore envisageable d'un point de vue juridique du moins, car cette
inclusion pourrait toujours se faire de manière discrétionnaire
par le créancier voilà pourquoi nous recommandons une information
aux frais exclusifs du contractant dominant qu'est ledit créancier.
B- L'information de la caution générale
au frais exclusif du créancier en droit de l'OHADA
Si la BICIG au Gabon ne facture pas l'envoi de l'information
périodique de la caution générale, alors pourquoi la BCI
au Congo ne pourrait-elle pas faire de même ? Nous recommandons donc au
législateur OHADA d'alléger le poids de la dette de la caution
générale (qui se porte déjà garant de tous les
engagements du débiteur principal) en mettant les frais de l'information
à la charge du créancier.
D'ailleurs, il est reconnu que le législateur prenne
souvent le parti des contractants les plus faibles en faisant payer les
contractants les plus forts. En effet , par exemple, l'article 189 de la loi
n° 12/2000 portant Code du travail gabonais fait supporter les frais du
déplacement du travailleur à l'employeur lorsque
l'exécution du contrat de travail entraîne un changement de lieu
ou de localité.
Nous suggérons alors un déséquilibre au
profit de la caution qui est le contractant vulnérable dans le contrat
de cautionnement d'autant plus qu'il serait injuste de lui imposer le
coût de l'information. En effet, le principe en droit des contrats veut
que l'on impose des obligations à la partie dominante au contrat.
224 C.A Lyon, Civ.3, Section A, 12 juin 2008,
n° 07/03698, préc.
95
Donc, les problèmes que nous avons relevés dans
la communication de l'information de la caution sont l'effectivité de
l'information de la caution et le caractère onéreux de celle-ci.
Mais, lesdits problèmes sont également dus à la nature
même de l'obligation d'information, une nature qui ne permet pas aux
bénéficiaires des informations de contraindre le créancier
à les tenir informés.
Section 2 : Réflexion sur l'identité de
nature des informations obligatoires
Le caractère limité de la sanction du manquement
à une obligation extracontractuelle d'information (Paragraphe
1) nous conduit à nous interroger sur la véritable
nature des informations obligatoires (Paragraphe 2).
Paragraphe 1 : la sanction forfaitaire et
limitée des obligations extracontractuelles
Priver le créancier de sa rémunération
(A) est le moyen que le législateur a trouvé
pour obliger ledit créancier à respecter son obligation
d'information. En dépit de la gravité apparente de cette
sanction, en réalité ladite sanction ne ressemble en rien
à celles sanctionnant le manquement à une obligation civile
(infra), voilà pourquoi nous nous sommes interrogés sur les
raisons de cette différence de régime (B).
A- La déchéance des
intérêts et pénalités périodiques comme
sanction du défaut d'information
En droit français, le caractère limité de
la sanction du manquement à l'obligation d'information ponctuelle est
compensé par la possibilité laissée à la caution de
cumuler la sanction avec des dommages-intérêts en cas de
préjudice subi (1). Toutefois, en droit français
du cautionnement, ce cumul de sanctions n'est pas autorisé en ce qui
concerne le défaut d'information périodique (2).
En droit de l'OHADA, nous ne pourrions procéder que par analogie en
faisant des suggestions au vu du manque de documentation sur le sujet.
1) Le possible cumul de sanctions avec celle de
l'article 24
L'alinéa 2 de l'article 24 de l'AUS prévoit que
la sanction du manquement à l'information ponctuelle de la caution est
la déchéance « des pénalités ou
intérêts de retard échus entre la date de l'incident de
paiement et la date à laquelle la caution en a été
informée ».
En effet, la caution qui n'aurait pas été
informée sur la défaillance du débiteur aurait perdu la
chance de se préparer à payer le créancier, ce qui
pourrait lui causer un préjudice étant donné
96
que la jurisprudence française a décidé
que « le point de départ de la prescription de l'obligation de la
caution est le même que celui de l'obligation principale
»225, autrement dit que le cautionnement est exigible
dès que la dette principale l'est aussi226.
Ainsi, la sanction du défaut d'information ponctuelle
est très limitée puisqu'elle ne frappe que les
intérêts et pénalités de retard, sauf qu'elle ne
pose pas de problème d'interprétation.
Aussi, en droit français, la sanction du défaut
d'information ponctuelle n'est pas exclusive d'autres sanctions telles que la
responsabilité civile du créancier en cas d'abus. En effet, en
France, le professeur LEGEAIS relève que « la Cour de cassation a
considéré qu'un créancier engageait sa
responsabilité contractuelle s'il s'abstenait de poursuivre la caution
en temps utile »227. En l'espèce, le créancier a
été condamné pour avoir laissé s'accumuler les
dettes de loyers.
En droit de l'OHADA, l'article 24 de l'AUS ne précise
guère si la sanction du manquement à l'obligation d'information
ponctuelle est exclusive ou cumulative voilà pourquoi nous ne pourrions
qu'inciter le législateur OHADA à faire de la sanction du
défaut d'information ponctuelle une sanction cumulative en permettant
à la caution d'engager la responsabilité du créancier qui
voudrait obérer la situation financière de celle-ci en laissant
par exemple les dettes du débiteur s'accumuler avant de la saisir.
Donc, si en droit de l'OHADA, l'article 24 de l'AUS n'exclut
pas expressément l'engagement de la responsabilité du
créancier indélicat, l'article 25, par analogie à
l'obligation d'information périodique en droit français, ne
pourrait peut-être pas permettre d'engager la responsabilité du
créancier en plus de la déchéance des
intérêts.
2) La sanction personnelle et exclusive de
l'information périodique et l'article 25
L'exclusivité (a) et la
personnalisation (b) caractérisent la sanction du
défaut d'information périodique en droit français.
Toutefois, rien ne garantit la reprise desdites caractéristiques en
droit communautaire africain.
225
Cass. Com., 19 févr. 1979, Bull.
civ. IV, n° 65, p.50.
226 M. Mignot, Droit des sûretés, Coll.
Cours, éd. 2008, Montchrestien, n° 387, p. 143.
227 D. Legeais, Op. cit., n ° 237, p. 192 ; Cass.
1re civ., 16 juil. 1998 : JCP E 1999, p. 128, note B. FAGES,
préc.
97
a. Le caractère exclusif de la sanction du
défaut d'information périodique
En droit français, la chambre commerciale de la Cour de
cassation française a jugé que « sauf dol ou faute lourde du
dispensateur de crédit, l'omission des informations prévues par
l'article 313-22 CMF est sanctionnée par la seule
déchéance des intérêts »228 ce qui
fait de cette sanction une sanction exclusive. Toutefois, le professeur
Séverine CABRILLAC prévient qu'en matière d'information
obligatoire « la faute lourde n'est guère concevable sauf à
qualifier ainsi toute omission de l'obligation »229. Quant au
dol, la professeure déclare qu'« il se heurte à des
difficultés de preuve quasi rédhibitoires
»230.
En droit de l'OHADA, la sanction du défaut
d'information n'est pas exclusive puisque l'article 25 de l'AUS dispose que la
déchéance des intérêts contractuels échus est
faite « sans préjudice des dispositions de l'article 29 [dudit]
acte uniforme ». Cependant, l'article 29 ne présente que les cas
relatifs à l'opposabilité des exceptions inhérentes
à la dette et les cas relatifs à la subrogation impossible du
fait du créancier.
Toutefois, pour des raisons que nous invoquerons infra nous ne
sommes pas de ceux qui militent pour un cumul de sanctions en matière
d'information périodique de la caution. En conséquence, selon
nous, l'engagement de la responsabilité du créancier
indélicat ne devrait en aucun cas être cumulé à la
déchéance des intérêts dus audit
créancier.
Mais, nous constatons avec un jugement du Tribunal de grande
instance de Ouagadougou231 qu'un simple relevé de compte
bancaire peut servir à communiquer l'information périodique en
dépit du formalisme de l'article 14 de l'AUS de 1997 et que certaines
cautions évoquent le défaut d'information périodique non
pas pour réclamer la déchéance du droit aux
intérêts du créancier, mais pour annuler une ordonnance
d'injonction de payer. L'on s'aperçoit alors que la sanction du
défaut d'information périodique semble tellement ridicule que les
cautions dans la zone OHADA ne la réclament même pas.
Ainsi, afin de pallier à cette indifférence,
nous recommanderons au législateur OHADA d'aggraver la
déchéance sanctionnant le défaut d'information
périodique en étendant la déchéance des seuls
intérêts à tous les accessoires de la dette. En effet, le
législateur
228
Cass. Com., 25 avr. 2001, Bull. civ. IV,
n° 75, p. 72; D.2001, AJ p.1793, obs. V. Avena-Robardet.
229 M. Cabrillac, Ch. Mouly et al., Op. cit.,
n° 324, p. 233 ; S. Cabrillac fait référence, entre autres,
à la décision
Cass. Com., 20 oct. 1992, JCP E 1993, II,
390, note D. Legeais.
230 Ibid.
231 TGI Ouagadougou, 27 juin 2007, préc. ; la caution a
été condamnée à payer la somme maximale
cautionnée en dépit de l'absence de formalisme informatif dans
les correspondances envoyées par le créancier.
98
communautaire aurait pu s'inspirer de la sanction
prévue à l'article 2293 du Code civil français ancien qui
étend la déchéance à « tous les accessoires de
la dette, frais et pénalités », d'autant plus que les textes
français et africain conditionnent l'obligation d'information
périodique à la souscription d'un engagement
indéfini...
Donc, le caractère exclusif de la sanction du
défaut d'information périodique existe en droit français,
mais aucune jurisprudence parmi celles que nous avons pu consulter en droit de
l'OHADA ne fait état de l'exclusivité de la
déchéance prévue à l'article 25 de l'AUS.
Toutefois, selon nous, l'exclusivité de la sanction devrait exister en
droit de l'OHADA si la juridiction communautaire n'en a pas encore
décidé ainsi. Toutefois, le caractère personnel de la
sanction, quant à lui, se déduit plus aisément que
l'exclusivité de celle-ci.
b. Le caractère personnel de la sanction du
défaut d'information périodique
En droit français, le caractère personnel de la
sanction du défaut d'information périodique intervient surtout en
cas de pluralité de cautions. En effet, le professeur Séverine
CABRILLAC précise que « par nature cette sanction est personnelle
(puisqu'elle découle du comportement de l'établissement financier
à l'égard de la caution) ce qui entraîne une double
conséquence : elle ne profite qu'à la caution concernée :
elle ne peut être invoquée au profit de ses cofidéjusseurs,
même solidaires »232.
Quant au droit de l'OHADA, le texte communautaire africain ne
donne aucune précision concernant un caractère personnel de la
sanction du défaut d'information. Toutefois, l'article 25 de l'AUS
dispose bien que « le créancier est déchu, vis-à-vis
de la caution, des intérêts contractuels échus » et ne
fait aucunement allusion à une pluralité de cautions.
La déchéance des intérêts
contractuels échus est donc la sanction du défaut d'information
périodique, il s'agit d'une sanction personnelle et exclusive. Cette
sanction prive le créancier de sa rémunération, mais cette
sanction est limitée étant donné qu'elle ne permet pas
à la caution de se dégager ou de réparer le
préjudice.
B- Les raisons de la limitation de la sanction du
défaut d'information de source
extracontractuelle
Avant de commencer, il est important de signaler que le
professeur CROCQ justifie la déchéance comme sanction du
défaut d'information de la caution parce que « la
déchéance
232 M. Cabrillac, Ch. Mouly, S. Cabrillac et Ph. Pétel,
Op. cit., n° 320, p. 230.
99
(...) constitue non pas la réparation d'un
préjudice subi, mais la sanction d'un comportement fautif
»233, ce qui explique en partie le caractère peu
dissuasif de cette sanction. En effet, c'est le comportement fautif du
créancier qui est incriminé et puni, pas les conséquences
qui en découlent.
En droit OHADA, il semblerait que ce soit la
déchéance prévue à l'article L.313-22 du Code
monétaire et financier qui a été reprise en substance par
l'article 25 de l'AUS. Quant à la sanction de l'information ponctuelle
de l'article 24, elle découlerait de celle prévue à
l'article L.313-9 du Code français de la consommation. Nous tenterons de
comprendre le choix d'une telle sanction ainsi que les raisons pour lesquelles
le défaut d'information de la caution est frappé par une sanction
aussi forfaitaire que la déchéance des intérêts.
Pour ce faire, nous réaffirmerons le caractère unilatéral
du cautionnement (1), mais nous mettrons également en
exergue la puissance de l'autonomie de la volonté grâce à
laquelle un contrat peut devenir ce que les parties ont décidé
qu'il soit, à condition bien sûr de demeurer dans la
légalité (2).
1) L'obligation d'information et le caractère
unilatéral de l'engagement
Le professeur SIMLER signale que « les obligations que la
loi impose au créancier à l'égard de la caution, notamment
d'information ou de mise en garde, ne confèrent pas au cautionnement un
caractère synallagmatique »234. D'ailleurs, le
professeur PIEDELIEVRE fait remarquer que « les obligations d'information
ont pour but de contrebalancer le caractère unilatéral du contrat
de cautionnement »235.
D'ailleurs, confortant le point de vue de la doctrine
française, la Cour de cassation française a jugé
clairement que « les diverses obligations mises à la charge du
créancier professionnel ne sont que des obligations légales
sanctionnées par la déchéance du droit aux accessoires de
la créance et non la contrepartie de l'obligation de la caution
»236. Par conséquent, la sanction du défaut
d'information de la caution ne saurait être plus sévère que
la déchéance des intérêts qui sanctionne une
omission.
Donc, le fait que la caution soit la seule partie qui s'engage
envers le créancier et que l'obligation d'information ne constitue pas
une contrepartie de l'engagement de la caution ne
233 P. CROCQ, « Les développements
récents de l'obligation d'information de la caution »,
mélanges CABRILLAC, 1999, p. 349.
234 Ph. Simler, Op.cit., n° 38, p.393.
235 S.Piedelièvre, obs. sous cass.civ. 1re,
9nov.2004, n° 01-03-772, Bull.civ I, n° 252, p.210, préc.
236
Cass.com., 8 avr. 2015, n° 13-14.447
; JurisData n° 2015-007651.
100
permet pas de punir plus sévèrement ledit
créancier en cas de manquement à l'obligation d'information.
D'ailleurs, une information conventionnelle de la caution ne permet pas non
plus d'aggraver la sanction du manquement du créancier.
2) Le cautionnement synallagmatique et l'obligation
d'information
Le caractère conventionnel du cautionnement permet
à la caution d'imposer à son tour des obligations au
créancier et ces aménagements impriment alors un caractère
synallagmatique au contrat cautionnement en dépit de l'essence
unilatérale de celui-ci.
À ce titre, les professeurs Séverine CABRILLAC
et Philippe PETEL expliquent que « si le cautionnement est donc le plus
souvent unilatéral, les parties peuvent convenir d'obligations majeures
(de simples obligations d'information ne pourraient suffire) à la charge
du créancier, leur contrat devenant alors synallagmatique
»237.
Au professeur SIMLER de déclarer que le contrat de
cautionnement peut revêtir un caractère synallagmatique lorsqu'il
« prévoit la diminution du taux d'intérêt de la dette,
le rapport du terme, la main levée d'une hypothèque ou autre
sûreté, l'obligation faite au créancier de présenter
les effets garantis à la caution ou de lui adresser des relevés
périodiques du compte cautionné, l'engagement du créancier
de poursuivre d'abord et à ses frais le débiteur principal ou de
ne poursuivre la caution que sur certains biens, ou encore de veiller à
l'affectation des fonds prêtés, ou tout autre engagement
constituant une contrepartie convenue de la garantie »238.
Ainsi, nous constatons qu'une obligation contractuelle
d'information ne suffirait pas à rendre un contrat de cautionnement
synallagmatique, donc de permettre une sanction plus lourde en cas de
manquement à ladite obligation contractuelle.
L'obligation conventionnelle d'information de la caution
n'étant pas une contrepartie majeure dans un cautionnement
synallagmatique, alors le manquement à celle-ci ne pourrait être
sanctionné plus sévèrement que celui à une
obligation légale d'information. D'ailleurs, à ce sujet, la
nature des obligations légales fait naître des doutes au sein de
la doctrine.
237 M. Cabrillac, Ch. Mouly, S. Cabrillac et Ph. Petel, Op.
cit., n°78, p. 65.
238 Ph. Simler, Op.cit., n° 57, p. 69.
101
Paragraphe 2 : la contestation de la qualification
d'obligation
La question à laquelle nous tentons de répondre
dans ce paragraphe est celle de savoir si les obligations d'information au
profit de la caution sont réellement des obligations au sens juridique
du terme. En effet, d'une part on constate de grandes différences quant
au régime propre aux obligations civiles et à celui des
obligations dites légales (A). D'autre part, la
doctrine conteste la qualification desdites dispositions normatives comme
étant des obligations (B).
A- L'impossible application du régime des
obligations dites civiles aux obligations de source extracontractuelle
L'on constate tout d'abord que les obligations d'information
imposées au créancier ne prennent pas leur source dans le
contrat, mais à l'extérieur. En effet, les obligations
d'information au profit de la caution ont leur source dans des textes
législatifs (en France) et communautaires (en droit de l'OHADA).
Ensuite, les obligations d'information d'origine
extracontractuelle ont une sanction totalement différente de celle
prévue en cas de manquement à une obligation dite civile,
à savoir l'exécution forcée, la résolution du
contrat, les dommages-intérêts et l'exception
d'inexécution.
En effet, en ce qui concerne les dommages et
intérêts, l'article 1142 de l'ancien Code civil français
disposait que « toute obligation de faire ou de ne pas faire se
résout en dommages et intérêts, en cas d'inexécution
de la part du débiteur ». Or, la sanction du défaut
d'information est la déchéance des intérêts
contractuels échus (information périodique) ou celle des
pénalités et intérêts de retard échus
(information ponctuelle).
Puis, il convient de noter que l'exécution
forcée pour manquement à l'obligation légale d'information
est hors de propos puisque le contrat de cautionnement est par essence
unilatéral, seule la caution s'engage.
Ensuite, le contrat de cautionnement ne peut pas être
suspendu pour défaut d'information périodique ou ponctuelle. En
effet, même en cas de défaut d'information, la caution reste tenue
par son engagement239.
239
Cass. Com., 26 oct. 1999, Bull. civ. IV,
n° 189 ; JurisData n° 1999-003673 ; JCP G 1999, IV, 3040,
préc.
102
En conséquence, arrivés à cette base,
nous pouvons à nouveau nous poser la question de savoir si les
obligations légales (ou réglementaires dans le cas de l'OHADA)
d'information sont de réelles « obligations ».
B- La requalification doctrinale des obligations
légales et réglementaires d'information
Refusant le terme « obligation » employé par
le juge de cassation dans l'attendu : « les diverses obligations mises
à la charge du créancier professionnel ne sont que des
obligations légales sanctionnées par la déchéance
du droit aux accessoires de la créance et non la contrepartie de
l'obligation de la caution »240, la doctrine française a
réagi en proposant sa propre qualification des contraintes pesant sur le
créancier garanti.
Toutefois, précisons que cette requalification n'est
pas nécessairement due à cette décision de la Cour de
cassation française. En effet, certains auteurs ont refusé cette
qualification bien avant le prononcé de la décision, mais ladite
décision datant de 2015 permet de mettre en exergue une banalisation du
terme obligation même au sein des juges.
Ainsi, le professeur Séverine CABRILLAC qualifie
lesdites « obligations » d'information de « devoirs
d'information ». La juriste s'explique en affirmant que « ce terme
est le seul correct, même si par facilité de langage, par habitude
(par faiblesse pour ne pas donner l'impression de manquer de vocabulaire), il
nous arrive d'employer celui d'obligation »241.
Le professeur Michel SEJEAN parle plutôt de «
sujétions » au lieu d'obligations lorsqu'il affirme que « le
plus souvent, les sujétions légales mises à la charge du
créancier sont qualifiées d'obligations par la loi
elle-même, voire d'obligations légales par les auteurs et le juge.
Cette qualification d'obligation est regrettable, en ce qu'elle suscite
inutilement une ambiguïté sur le caractère unilatéral
du cautionnement. Le vrai est qu'il y a tout lieu de penser que ces
sujétions n'ont rien de commun avec les obligations civiles
»242.
Quant au professeur LAFONTAINE, il se réfère au
droit allemand et voit plutôt des « incombances » plutôt
que des obligations légales243. En effet, le juriste belge
remarque que
240
Cass.com., 8 avr. 2015, préc.
241 M. Cabrillac, Ch. Mouly, S. Cabrillac, Ph. Pétel,
Op. cit., n° 318, p. 225.
242 M. Séjean, La bilatéralisation du
cautionnement, le caractère unilatéral du cautionnement à
l'épreuve des nouvelles contraintes du créancier, LGDJ,
2011, n° 124.
243 M. FONTAINE, « Le droit des contrats à
l'écoute du droit comparé », in Liber Amicorum Michel
Coipel, Bruxelles, Kluwer, 2004, p. 305.
103
« là où l'incombance suffit à
atteindre le résultat souhaité, nul besoin d'imposer une
obligation au sens plein »244. Qu'est-ce donc qu'une incombance
?
Mademoiselle Fanny LUXEMBOURG, explique que «
l'incombance désigne l'exigence de diligence ou de probité
imposée pour conserver le bénéfice d'un droit, dont le
seul non-respect, bien que ne pouvant faire l'objet d'une exécution
forcée ni d'une action en réparation, est toutefois juridiquement
sanctionné. Elle se distingue ainsi de l'obligation civile en ce que sa
méconnaissance ne peut justifier une action en exécution
forcée et ne donne pas lieu, en principe, à réparation
»245.
Aussi, « de façon schématique, l'incombance
prendrait place quelque peu à la croisée de deux notions bien
connues de notre droit, bénéficiant d'une force obligatoire plus
importante que les obligations naturelles, mais sans être aussi
contraignante que l'obligation civile »246.
Le professeur FONTAINE indique ainsi que « dans une
échelle décroissante quant au caractère contraignant,
l'incombance se situe entre l'obligation civile et l'obligation naturelle
»247.
Enfin et entre autres, TROPLONG désignait les «
obligations légales » comme étant des « concessions
»248.
Ainsi, la cause de la limitation de la sanction d'une
obligation dite légale est l'impossible soumission de ladite obligation
au régime des obligations dites civiles. On peut donc déduire que
la sanction tient sa nature de l'obligation dont elle sanctionne le manquement.
En effet, c'est le législateur qui incrimine le manquement à une
obligation légale, alors que c'est le contractant à travers le
juge qui sanctionne le manquement à une obligation civile.
244 Ibid.
245 F. LUXEMBOURG, La déchéance des droits -
Contribution à l'étude des sanctions civiles, Paris,
Éditions Panthéon Assas, 2007, n° 1168, p. 430.
246Texte anonyme lu sur
https://www.uclouvain.be/cps/ucl/doc/drt/.../Thesed
Doctorat-Les incombances.pdf
247 M. FONTAINE, « Obliegenheit, incombance ?
»[Obligation, incombance ?], in Liber Amicorum Hubert Claassens,
Antwerpen - Bruxelles, Maklu - Académia Bruylant, 1998, pp. 159 et
160.
248 R.T. Troplong, Droit civil expliqué, du
cautionnement, 1846.
104
CONCLUSION
Le devoir de loyauté entre contractants et la
protection de contractants vulnérables sont des mots d'ordre en droit
des contrats et c'est au nom de ceux-ci que le législateur s'immisce
dans la sphère contractuelle en imposant des obligations à la
charge de la partie dominante au contrat. En effet, les contractants ne sont
plus égaux comme le pensait Portalis d'où la recherche d'un
équilibre contractuel, voilà pourquoi des obligations à la
charge du créancier ont été intégrées dans
le contrat de cautionnement étant donné que ledit contrat
crée un déséquilibre entre les parties du fait qu'il n'y
ait que la caution qui s'engage envers le créancier.
Toutefois, les obligations légales mises à la
charge du créancier ne suivent pas le même régime que les
obligations issues de la convention des parties, d'où la faible sanction
qui les caractérise. En effet, seule la déchéance de
droits punit le manquement à une obligation légale.
En droit de l'OHADA, le législateur communautaire s'est
inspiré du droit français des sûretés et a
imposé à son tour l'obligation d'informer la caution.
Cependant, si l'Acte uniforme portant organisation des
sûretés (AUS) a été adopté le 17 avril 1997,
puis modifié le 15 décembre 2010, l'on constate que 13 ans
après son adoption, le législateur communautaire africain n'a pas
pris la peine d'améliorer la situation des cautions en matière
d'information obligatoire. En effet, ni l'article 24 ni l'article 25 de l'AUS
de 2010 ne garantissent que le destinataire reçoive la lettre
d'information, alors que le législateur OHADA s'est assuré de
l'effectivité de l'information obligatoire de plusieurs acteurs du monde
des affaires (commissaire aux comptes, créancier saisissant,
administrateurs, actionnaires, etc.), et ce, depuis 1997.
D'ailleurs, depuis 1997 et 1998, les Actes uniformes relatifs
au droit commercial général, au droit des sociétés
commerciales, aux procédures collectives et aux procédures
simplifiées de recouvrement contiennent tous des obligations
d'information devant impérativement être effectuées au
moyen de procédés permettant de vérifier que le
destinataire a réellement reçu l'information (lettre
recommandée avec avis de réception, lettre au porteur contre
récépissé, etc.).
105
Aussi, en zone OHADA comme en France, bien que rien ne
garantisse qu'il la reçoive, le débiteur ou la caution doit
assumer le coût de l'information puisque la facturation de celle-ci reste
à la discrétion du créancier vu que le droit positif
considère l'information périodique et ponctuelle de la caution
comme étant un service bancaire...
Nous constatons alors un conformisme regrettable entre le
droit de l'OHADA et le droit français en dépit du fait que ce
dernier ne soit pas exempt d'imperfections en matière d'information de
la caution. En effet, le législateur communautaire s'est contenté
de recopier la législation française sans prendre la peine de
résoudre les problèmes d'application de la loi importée
(problèmes qui n'ont été traités que partiellement
par les juridictions françaises) à savoir l'effectivité de
l'information, la durée et le coût de celle-ci et l'information
des contre-garanties personnelles.
Pourtant, le législateur africain n'a pas suivi
aveuglement le droit positif français, voilà pourquoi l'on ne
sait toujours pas avec exactitude, dans la zone OHADA, quel incident de
paiement du débiteur principal devrait faire l'objet de l'information
ponctuelle de la caution. En revanche, le droit de l'OHADA a le mérite
de reconnaître la notion de cautionnement réel ainsi que
l'information de la personne qui a consenti une sûreté
réelle en vue de garantir le paiement de la dette d'autrui : la caution
réelle. En sus, le législateur africain a le mérite non
seulement d'avoir circonscrit le nombre de bénéficiaires de
l'information périodique, mais aussi il a le mérite d'avoir
évité l'écueil de la pluralité de dispositions
imposant l'information obligatoire de telle sorte à ce que le principe
selon lequel l'homme responsable de la société libérale
s'informe tout seul ne soit pas désuet. On peut donc affirmer qu'il
n'existe pas de surprotection de la caution en droit de l'OHADA.
Au vu de ce qui précède, on ne saurait
qu'encourager une refonte des articles 24 et 25 de l'AUS de 2010 afin que les
difficultés liées à l'information des cautions soient
prises en compte. En effet, nous pensons que le législateur OHADA, de
par la multitude de pays pour lesquels il légifère, ne devrait
pas se contenter de rédiger des textes imprécis et incomplets,
puis laisser le soin à la CCJA et aux juges nationaux de faire preuve de
créativité.
106
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Cass.com., 8 avr. 2015, n° 13-14.447
; JurisData n° 2015-007651.
·
Cass. Com., 29 avr. 2003, Bull. Civ. IV,
N° 62 p. 71.
·
Cass. Com., 20 oct. 1992, JCP E 1993, II,
390, note D. Legeais.
· TGI de Ouagadougou, jugement n°53/2005 du 16
février 2005, NIKIEMA Arouna c/ PNAR-TD ; Ohadata J-07-227.
111
? TGI du Mfondi, jugement civil n° 516 du 28 mai 2003,
affaire Amougou Kono c/ BICEC, Ohadata J-08-111.
? TGI Saint-Étienne, 30 juin 1987 : RD bancaire et
bourse 1987, p. 124, obs. Crédot et Gérard.
? TGI de Ouagadougou (Burkina Faso), Jugement n° 085/
2007 du 27 juin 2007, EBTPE & PAOLI Daniel Vincent c/ Société
Générale des Banques du Burkina (SGBB) ; Ohadata J-03-389
ANNEXES
Annexe 1
Tableau comparatif des frais annuels d'information aux
cautions en France au 13 juin 2014249
Banque
|
Montant des frais de lettre d'information aux
cautions
|
HSBC (Particuliers)
|
20 € / engagement
|
|
HSBC (Professionnels)
|
55 € minimum / engagement
|
|
HSBC (Entreprises)
|
57 €
|
|
CIC (Particuliers)
|
Non indiqué dans la brochure tarifaire
|
|
CIC (Professionnels)
|
43 €
|
|
CIC (Entreprises)
|
43 €
|
|
BNP Paribas (Particuliers)
|
47 € / Caution, pour les prêt >200.000
|
€
|
BNP Paribas (Professionnels)
|
49 € / Caution
|
|
BNP Paribas (Entreprises)
|
49 € / Caution
|
|
Crédit Mutuel Ile de France (Particuliers)
|
Non indiqué dans la brochure tarifaire
|
|
Crédit Mutuel Ile de France (Professionnels)
|
1 à 3 lettres : 44 €
4 à 9 lettres : 110 €
10 lettres et plus : 220 €
|
|
Société Générale (Particuliers)
|
Non indiqué dans la brochure tarifaire
|
|
Société Générale (Professionnels)
|
43 € / lettre
|
|
Société Générale (Entreprises)
|
43 €
|
|
Crédit Agricole Ile de France (Particuliers)
|
Non indiqué dans la brochure tarifaire
|
|
Crédit Agricole Ile de France (Professionnels)
|
46,92 €
|
|
Crédit Agricole Ile de France (Entreprises)
|
46,92 €
|
|
Caisse d'épargne (Particuliers)
|
Gratuit
|
|
Caisse d'épargne (Professionnels)
|
Non indiqué dans la brochure tarifaire
|
|
Caisse d'épargne (Entreprises)
|
Gratuit
|
|
112
249
http://leblogdelabanqueetdupatrimoine.blogspot.com/2014/06/comparatif-frais-annuels-dinformation-cautions.html
113
Annexe 2
Conditions générales des principales
opérations de la clientèle professionnelle et entreprises de la
Banque commerciale internationale ou BCI (Congo-Brazzaville)
114
Annexe 3
Conditions générales des principales
opérations des clients particuliers de la BCI (Congo-Brazzaville)
115
TABLE DES MATIERES
Sommaire 5
Introduction 6
Première partie : Généralités
sur les obligations d'information de la caution 12
Chapitre 1 : L'information entre contractants
13
Section 1 : la société libérale et
la non-prise en compte des intérêts du cocontractant
13
Paragraphe 1 : Le principe de la limitation de la
responsabilité contractuelle 13
A- La limite de la responsabilité contractuelle aux
engagements réciproques 14
B- La vigilance du contractant dans la société
libérale 15
Paragraphe 2 : la protection d'un contractant et
l'État interventionniste 16
A- Le droit de la protection du contractant 16
B- Les conditions de l'obligation d'information 18
Section 2 : les fondements de l'information obligatoire
19
Paragraphe 1 : Les fondements liés à la
morale 19
A- La bonne foi 20
1. La bonne foi contractuelle 20
2. La bonne foi comme fondement de l'obligation d'informer son
cocontractant 20
B- Le solidarisme contractuel 21
1. La résurgence du solidarisme contractuel en France
21
2. Le solidarisme contractuel et l'obligation d'information
22
Paragraphe 2 : le fondement lié au
déséquilibre entre la caution et le créancier
.24
A- Le déséquilibre psychologique et juridique : le
caractère unilatéral de l'engagement et l'oubli
de l'engagement 24
1. Le caractère unilatéral du cautionnement 24
2. La possibilité d'oubli de l'engagement par la caution
.25
B- Le déséquilibre de fait : La
vulnérabilité de la caution au fondement de l'obligation
d'information 26
1. Définitions et notions 27
116
2. La critique de la notion de vulnérabilité des
contractants en tant que fondement de la
protection exorbitant du droit commun 28
a. La violence économique et la
vulnérabilité du consommateur 28
b. La contestation de la vulnérabilité comme
fondement de la protection des contractants 29
Chapitre 2 : les obligations d'information au profit de
la caution : Du droit français au droit de
l'Afrique francophone 31
Section 1 : Analyse chronologique et comparative de
l'information obligatoire de la caution en
France et en droit de l'OHADA 31
Paragraphe 1 : Les obligations d'information au profit de
la caution en droit français 31
A- L'information périodique en France 32
1. L'historique de l'information périodique en France
32
a. La première obligation d'information périodique
32
b. L'évolution de l'information sur l'état de la
dette en France 33
1°) L'évolution de la loi de 1984 .33
2°) Les lois émanant de la loi de 1984 34
2. La critique de la multiplicité des obligations
d'information périodique en France 35
B- L'information ponctuelle en France 36
1. L'information ponctuelle de la caution : une formalité
émanant du caractère accessoire du
cautionnement 37
a. Information ponctuelle et caractère accessoire du
cautionnement 37
b. L'information ponctuelle : une formalité à
respecter 38
2. Le foisonnement des obligations d'information ponctuelle en
France 38
Paragraphe 2 : Sources et objet des informations
obligatoires en droit de l'OHADA .40
A- Sources et objet de l'information périodique en droit
de l'OHADA 40
1. La source de l'information périodique en droit de
l'OHADA 40
2. L'objet de l'information périodique .41
B- Source et objet de l'information ponctuelle de la caution en
droit de l'OHADA 43
Section 2 : les modalités d'application des
obligations d'information au profit de la caution.....44
Paragraphe 1 : la durée de l'information
périodique : un silence africain .44
A- L'obligation d'information périodique et la poursuite
de la caution .44
117
1. Information périodique et mise en demeure de la caution
44
a. La cessation de la communication de l'information
périodique après mise en demeure 45
b. La continuité de l'obligation du créancier
45
2. Information périodique et condamnation
définitive de la caution 46
B- L'obligation d'information périodique et le
décès de la caution 48
1. La survie du cautionnement 48
2. Le droit de savoir des héritiers .48
Paragraphe 2 : les modalités d'application de
l'information ponctuelle 50
A- L'incident de paiement caractérisé 50
B- L'absence de détermination de l'incident de paiement
visé par l'article 24 de l'AUS 51
Deuxième partie : Le champ d'application des
obligations d'information et réflexions sur les
obligations de source extracontractuelle 53
Chapitre 1 : Le manque de précision de l'article
25 de l'Acte uniforme 54
Section 1 : les débiteurs et
bénéficiaires de l'information périodique en droit de
l'OHADA.....54
Paragraphe 1 : les débiteurs des informations
obligatoires 54
A- Les établissements de crédit soumis aux
obligations d'information de la caution en droit
OHADA 55
1. Les banques 55
2. Les établissements financiers à
caractère bancaire soumis à l'obligation d'information : les
sociétés d'affacturage .56
B- L'exclusion du créancier-personne physique 57
1. Les incompatibilités entre les opérations de
crédit et la personne physique 57
a. La banque et la personne physique 58
b. Les établissements financiers à
caractère bancaire et la personne physique 58
2. L'impossible information par les intermédiaires
bancaires 59
Paragraphe 2 : les bénéficiaires des
informations obligatoires 59
A- La pluralité de bénéficiaires des
informations obligatoires 60
1. L'immensité du champ d'application de l'obligation
d'information ponctuelle .60
2. La restriction du champ d'application de l'obligation
d'information périodique 60
a. L'information exclusive des cautions générales
60
b. L'information des cautions intégrées et
intéressées .62
B- Les exceptions du droit de l'OHADA : l'information des
cautions réelles et des avalistes.....63
1.
118
L'information de la caution réelle 64
2. L'information de l'avaliste 64
a. L'aval et le cautionnement en droit français 65
1°) Définition et identité de nature 65
2°) L'information périodique et l'avaliste 66
3°) L'aval par acte séparé et le
cautionnement omnibus 67
b. L'aval et le cautionnement en droit communautaire OHADA 68
Section 2 : la difficile information de la sous-caution
et du certificateur de caution .69
Paragraphe1 : Définition et notion 70
A- Le sous-cautionnement 70
B- La certification de la caution 71
Paragraphe 2 : l'information des sous-cautions et des
certificateurs de caution 72
A- L'improbable information de la sous-caution 73
1. L'information périodique de la sous-caution 73
a. L'information périodique de la sous-caution à
la charge de la caution 73
b. L'information périodique de la sous-caution à
la charge du débiteur principal .74
2. L'information ponctuelle de la sous-caution 75
B- L'information du certificateur de caution
|
...75
|
1.
|
L'information périodique du certificateur de caution
|
75
|
a.
|
L'information périodique du certificateur à la
charge de créancier initial
|
76
|
b.
|
L'information périodique du certificateur à la
charge de la caution
|
77
|
2.
|
L'information ponctuelle du certificateur de caution
|
78
|
Chapitre 2 : Réflexions sur les obligations
d'information au profit de la caution .80
Section 1 : L'effectivité et le coût de
l'information 80
Paragraphe 1 : l'absence de formalisme de l'information
de la caution : une incompréhension
vicennale 80
A- L'absence de formalisme de l'article 24 de l'AUS 80
B- La nécessité de la lettre recommandée
avec avis de réception pour la communication de
l'information périodique 81
119
1. Le formalisme informatif de l'article 25 de l'AUS et
l'absence de forme dans la communication de l'information
périodique....82
a. Définition...82
b. Le formalisme informatif de l'article 25 de l'AUS...82
2. Le besoin d'une communication par lettre recommandée
avec avis de réception...83
a. Les avantages de la lettre recommandée avec avis de
réception...84
b. Les inconvénients de la lettre recommandée avec
avis de réception....85
c. La marginalisation de la caution par le législateur
OHADA....86
Paragraphe 2 : le silence du législateur OHADA sur
le coût de l'information 88
A- Les conséquences du mutisme des législateurs
français et africain...88
1. La partie devant supporter les frais de l'information
périodique en droit de l'OHADA....89
2. La liberté de facturation de l'information
périodique de la caution....90
3. L'inclusion des frais relatifs à l'information de la
caution dans le taux effectif global....93
B- L'information de la caution générale au frais
exclusif du créancier en droit de l'OHADA...94
Section 2 : Réflexion sur l'identité de
nature des informations obligatoires .95
Paragraphe 1 : la sanction forfaitaire et limitée
des obligations extracontractuelles 95
A- La déchéance des intérêts et
pénalités périodiques comme sanction du défaut
d'information...95
1. Le possible cumul de sanctions avec celle de l'article
24....95
2. La sanction personnelle et exclusive de l'information
périodique et l'article 25...96
a. Le caractère exclusif de la sanction du
défaut d'information périodique...97
b. Le caractère personnel de la sanction du
défaut d'information périodique...98
B- Les raisons de la limitation de la sanction du défaut
d'information de source
extracontractuelle 98
1. L'obligation d'information et le caractère
unilatéral de
l'engagement...99
2. Le cautionnement synallagmatique et
l'obligation
d'information...100
Paragraphe 2 : la contestation de la qualification
d'obligation 101
A- L'impossible application du régime des obligations
dites civiles aux obligations de source extracontractuelle....101
B- La requalification doctrinale des obligations
légales et réglementaires d'information....102
120
Conclusion 104
Bibliographie 106
Annexes 112
Table des matières 116