Paragraphe 2 : Revue de littérature
A. Définition de concept Aide Publique au
Développement
L'aide publique au développement (APD) est l'aide
fournie par les États dans le but exprès de promouvoir le
développement économique et d'améliorer les conditions de
vie dans les pays en développement. L'APD comprend l'ensemble des
apports financiers des organismes publics aux pays bénéficiaires
listés par l'OCDE. Seuls les pays et territoires en développement
figurant sur la liste de l'OCDE sont éligibles à l'APD.
Les Investissements Directs Etrangers
Les investissements directs étrangers (IDE) sont les
investissements réalisés par une entité résidente
d'un pays (l'investisseur direct) dans le but d'établir une relation
durable et d'exercer un contrôle significatif sur une entité
résidente d'un autre pays (l'entreprise d'accueil). Les IDE peuvent
assurer la stabilité financière et promouvoir le
développement durable et le bien-être des sociétés.
Ils peuvent créer de l'emploi, développer des technologies et de
nouvelles capacités de production, et aider les entreprises locales
à accéder à de nouveaux marchés internationaux. Les
IDE sont mesurés en termes de flux (entrants ou sortants) ou de stocks
(actifs ou passifs) selon la balance des paiements ou la position
extérieure globale.
B. Synthèse des travaux empiriques sur l'effet
des IDE sur la croissance économique En essayant, de tester
l'effet des IDE sur la croissance économique, Borensztein, De Gregorio
et Lee (1998) ont utilisé des données de panel en utilisant les
flux d'IDE des pays industriels vers 69 pays en développement sur les
deux dernières décennies. Ils ont utilisé un modèle
de croissance endogène à la Römer (1990), où le
progrès technique est le résultat de l'accumulation de
connaissances. Ils ont utilisé comme variables le taux de croissance du
PIB réel par habitant, le ratio des IDE au PIB, le ratio du capital
humain au PIB, le taux d'investissement domestique, le taux d'ouverture
commerciale et le taux de croissance de la population. Ils ont trouvé
que les IDE avaient un effet positif et significatif sur la croissance
économique des pays en développement, mais que cet effet
dépendait du niveau de capital humain du pays d'accueil. Ils ont donc
suggéré que les IDE étaient un important vecteur de
transfert de technologie, contribuant relativement plus à la croissance
que l'investissement domestique.
Esquil MEKPOE & Gildas SAGBO EDOH 26
Analyse de l'effet de l'APD et des IDE sur le
bien-être au Bénin
Balasubramanyam, Salisu et Sapsford (1996) ont examiné
le rôle que l'investissement direct étranger (IDE) joue dans le
processus de croissance et dans le contexte des pays en développement
caractérisés par des régimes commerciaux
différents. Ils ont aussi utilisé comme modèle un
modèle de croissance endogène à la Römer (1990). Ils
ont utilisé comme variables le taux de croissance du PIB réel par
habitant, le ratio des IDE au PIB, le ratio du capital humain au PIB, le taux
d'investissement domestique, le taux d'ouverture commerciale et le taux de
croissance de la population. Ils ont également introduit une variable
muette pour distinguer les pays qui suivent une stratégie commerciale
orientée vers la promotion des exportations (EP) de ceux qui suivent une
stratégie commerciale de substitution aux importations (IS). Ils ont
utilisé des données en coupe instantanée relatives
à un échantillon de 46 pays en développement pour la
période 1970-1985. Cette étude montre que les IDE avaient un
effet positif et significatif sur la croissance économique des pays EP,
mais pas sur celle des pays IS. Ils ont donc confirmé l'hypothèse
de Bhagwati selon laquelle l'effet bénéfique des IDE, en termes
de croissance accrue, est plus fort dans les pays qui poursuivent une politique
commerciale extérieure qu'il ne l'est dans les pays qui adoptent une
politique commerciale intérieure.
En Afrique, Aka B. & Ndiaye A. S. (2018) ont
utilisé un modèle de données de panel dynamiques pour
analyser l'effet des IDE sur la croissance économique dans un
échantillon de 45 pays d'Afrique subsaharienne, dont le Bénin,
sur la période 1996-2015. Ils ont utilisé comme variables le taux
de croissance du PIB réel par habitant, le ratio des IDE au PIB, le
ratio du capital humain au PIB, le taux d'investissement domestique et le taux
d'inflation. Ils ont trouvé que les IDE avaient un effet positif et
significatif sur la croissance économique en Afrique subsaharienne, mais
que cet effet était plus faible que celui de l'investissement
domestique. Ils ont donc suggéré que les pays d'Afrique
subsaharienne devaient diversifier leurs sources de financement pour soutenir
leur croissance économique.
Tous ces auteurs ont montré que les IDE ont un effet
positif et sont des facteurs déterminants de la croissance
économique. Cependant, des études supplémentaires ont
été menées et infirment l'idée selon laquelle les
IDE améliorent la croissance économique.
Parmi les antagonistes se trouvent Brian J. Aitken et Ann E.
Harrison (1999). Ils ont utilisé un modèle de régression
linéaire multiple pour estimer l'effet des IDE sur la
productivité des
Esquil MEKPOE & Gildas SAGBO EDOH 27
Analyse de l'effet de l'APD et des IDE sur le
bien-être au Bénin
entreprises locales au Venezuela sur la période
1976-1989. Ils ont utilisé comme variables le taux de croissance de la
productivité totale des facteurs, le ratio des IDE au capital total, le
ratio du capital humain au capital total, le ratio du capital physique au
capital total et le taux d'ouverture commerciale. Ils ont trouvé que les
IDE avaient un effet négatif et significatif sur la productivité
des entreprises locales, en particulier dans les secteurs où la part des
IDE était élevée. Ils ont donc suggéré que
les IDE entraînaient une concurrence accrue et une perte de parts de
marché pour les entreprises locales, sans générer de
transferts de technologie ou d'effets d'entraînement positifs. Mais,
l'étude de Brian J. Aitken et Ann E. Harrison comporte quelques limites.
Notamment, ils se sont basés sur un échantillon de données
qui est limitées aux entreprises manufacturières du Venezuela,
qui peuvent ne pas être représentatives des autres pays ou des
autres secteurs. D'autre part, leur mesure de la productivité est
basée sur la valeur ajoutée par travailleur, qui peut être
biaisée par les différences de prix entre les secteurs et les
entreprises.
De même, Alaya, M., Ben Hamida, L., et Ben Ali (2009)
ont utilisé un modèle de données de panel à effets
fixes et aléatoires pour analyser l'effet des IDE sur la croissance
économique dans un échantillon de 40 pays en développement
sur la période 1980-2004. Ils ont utilisé comme variables le taux
de croissance du PIB réel par habitant, le ratio des IDE au PIB, le
ratio du capital humain au PIB, le taux d'investissement domestique, le taux
d'ouverture commerciale et le taux d'inflation. Ils ont également
trouvé que les IDE avaient un effet négatif et significatif sur
la croissance économique dans les pays en développement, mais que
cet effet était atténué par le niveau de capital humain et
d'ouverture commerciale du pays d'accueil. Ces auteurs ont alors
recommandé que les pays en développement doivent s'ouvrir au
commerce international et renforcer leur capital humain.
C. Synthèse des travaux empiriques sur
l'effet de l'APD sur la croissance économique Plusieurs
études ont été menées sur l'efficacité de
l'aide publique au développement sur la croissance économique.
Le premier courant de recherche sur l'efficacité de
l'Aide Publique au Développement regroupe les économistes
Papanek, Chenery, Strout, Burnside, Dollar, etc.
En 1966, les économistes Hollis Chenery et Alan Strout
ont analysé l'effet de l'« aide étrangère» sur
la croissance économique. Ces auteurs ont émis l'hypothèse
selon laquelle il
Esquil MEKPOE & Gildas SAGBO EDOH 28
Analyse de l'effet de l'APD et des IDE sur le
bien-être au Bénin
existe une relation positive entre l'investissement et la
croissance économique. On peut s'attendre à ce que l'APD
destinée aux investissements dans les pays en voie de
développement stimule la croissance économique. Ils justifient
l'octroi de l'APD aux pays en voie de développement à partir des
années 1960 par le déficit de devises.
En 1997, l'étude menée par les
économistes Burnside et Dollar a significativement marqué les
chercheurs dans le domaine de l'aide publique au développement. Les
résultats de recherche de ces auteurs montrent que l'aide publique au
développement a un effet positif sur la croissance économique
dans les pays qui ont une bonne politique économique. Selon Burnside et
Dollar, l'impact de l'aide publique au développement dépend de la
manière dont cette dernière est utilisée et des
distorsions en matière de politiques économiques. Ils ont
réalisé une étude en utilisant des données de 56
pays sur six (6) périodes de 4 ans. Quatre (4) variables ont
été utilisées pour mener cette étude à
savoir : « le revenu initial du pays », « les politiques
économiques mises en oeuvre », « l'aide publique au
développement» et « l'interaction entre l'APD et les
politiques économiques ». La relation est la suivante :
Ä = -0,60 (log PIB/hab) + 0,71 x POL - 0,021 (Aide/PIB) +
0,19 (Aide/PIB x POL) + ãX + ågit
Pour estimer la qualité des politiques
économiques mises en oeuvre, ils ont décidé de prendre en
compte 3 politiques à savoir : « le surplus budgétaire
», le « taux d'inflation» et « l'ouverture
économique ». Selon cette étude, les pays
bénéficiaires de l'APD qui ont de meilleures politiques
économiques ont de meilleurs résultats en matière de
croissance. Mais ces résultats sont toutefois uniquement valables pour
l'aide multilatérale, car, contrairement à cette dernière,
l'aide bilatérale est souvent dépendante des
intérêts des pays donateurs. D'après leurs estimations, une
augmentation de 10 milliards de dollars de l'aide publique au
développement pourrait faire passer 25 millions de personnes au-dessus
du seuil de la pauvreté. On peut donc conclure que l'APD peut avoir une
influence positive sur le PIB par habitant si de bonnes politiques
économiques sont mises en oeuvre. Mais ceci serait réalisable si
de bonnes politiques économiques sont mises en place par les pays
bénéficiaires.
Les travaux de Burnside et Dollar ont connu un grand
succès notamment par l'augmentation des montants d'APD alloués
aux pays en voie de développement et ayant de bonnes politiques
économiques.
Esquil MEKPOE & Gildas SAGBO EDOH 29
Analyse de l'effet de l'APD et des IDE sur le
bien-être au Bénin
Collier et Dollar (2001) ont aussi montré que l'APD
avait un impact positif sur la croissance économique. Ils ont
présenté un modèle pour déterminer l'allocation
optimale de l'aide en fonction de son impact sur la réduction de la
pauvreté. Ils ont utilisé un modèle de croissance
endogène à la Römer (1990). Pour leur étude, ils ont
utilisé le taux de croissance du PIB réel par habitant, le ratio
de l'aide au PIB, le ratio du capital humain au PIB, le taux d'investissement
domestique, le taux d'ouverture commerciale et l'Indice de Qualité des
Politiques et des Institutions. Ils ont utilisé des données en
coupe instantanée relatives à un échantillon de 56 pays en
développement pour la période 1992-1997. Ils ont trouvé
que l'aide avait un effet positif et significatif sur la croissance
économique des pays en développement, mais que cet effet
dépendait du niveau de qualité des politiques et des institutions
du pays bénéficiaire.
Cependant, d'autres auteurs ont relevé les
insuffisances de la thèse de Collier et Dollar en montrant que l'octroi
de l'aide publique au développement ne doit pas se reposer sur les
critères de politiques économiques. En 2004, EASTERLY W., LEVINE
R., ROODMAN D. ont conclu qu'en intégrant de nouvelles informations dans
le modèle de Collier et Dollar, les bonnes politiques économiques
n'améliorent plus l'effet de l'APD sur la croissance. Ainsi, on ne
trouve plus une relation entre l'APD et la croissance.
Contrairement à ces auteurs pour qui l'aide publique au
développement aurait un effet sur la croissance, certains antagonistes
montrent qu'il n'y a aucune relation entre APD et la croissance
économique.
Dans son ouvrage intitulé Aid as imperialism, Teresa
Hayter (1971) dénonce une instrumentalisation de l'aide pour maintenir
les pays bénéficiaires sous domination. Selon l'auteur, les aides
de la Banque Mondiale et des pays de l'Organisation de coopération et de
développement économiques servent à priori les
intérêts de ces organisations et de leurs entreprises
multinationales.
De même, Peter Bauer (1971) et William Easterly (2006)
soutiennent qu'il n'y a aucune relation significative entre l'APD et la
croissance économique. Selon eux, l'APD a conduit à une expansion
de bureaucratie étatique, une mauvaise gouvernance, la corruption, et
l'enrichissement de l'élite des pays pauvres. Ces auteurs soulignent
l'inefficacité de l'aide et l'ampleur de la pauvreté dans les
pays africains et asiatiques en dépit de 30 ans d'aide et le cas
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Analyse de l'effet de l'APD et des IDE sur le
bien-être au Bénin
des pays qui ont reçu de gros apports d'aide et qui ont
pourtant affiché un bilan désastreux comme la RDC, la Somalie,
l'Haïti. Selon eux, l'APD devrait être réduit, voire
abolis.
Quant aux défenseurs de l'APD, ils contestent
(infirment) ces arguments. Parmi eux, on peut citer Jeffrey Sachs (2004),
Joseph Stgitz (2002) et Nicolas Stern (1990) qui ont souligné qu'en
dépit de quelques échecs, l'APD a contribué au recul de la
pauvreté et une légère croissance dans les pays
africains.
Cependant, toutes ces études ont été
menées dans un environnement de non-conflit et de sécurité
qualifiée de situation normale. En situation de postconflit, les
études sont portées sur le timing de l'aide. Parmi les auteurs
qui ont mené ces études, on peut distinguer Collier et Hoeffler
(2004), Suhrke et al (2005), Esso (2008).
Collier et Hoeffler (2004) ont analysé l'effet de l'APD
sur la croissance économique en période postconflictuelle. Les
analyses ont montré qu'il n'existe pas de fondements théoriques
permettant de déterminer si l'aide est plus ou moins efficace dans les
situations postconflictuelles. Ces auteurs montrent que l'APD devrait
être moins important dans les pays ayant de mauvaises politiques
économiques. Suhrke et al (2005) ont estimé que le timing
nécessaire pour que l'APD impacte positivement la croissance soit de 4
à 7 années après la fin du conflit. Contrairement aux
résultats de Collier et Hoeffler, Suhrke et al ont conclu que la
variable politique économique est le mécanisme par lequel l'APD
influence la croissance économique.
Il n'existe donc pas un consensus clair sur
l'efficacité de l'aide publique au développement sur la
croissance économique. Les études empiriques ont donné des
résultats contradictoires et dépendent des méthodes, des
données et les périodes de l'étude.
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Analyse de l'effet de l'APD et des IDE sur le
bien-être au Bénin
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