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Les créanciers face aux impératifs de sauvetage des entreprises en difficulté en droit OHADA


par Ganiyou BOUSSARI
Université Cheikh Anta Diop de Dakar - Master 2 en droit privé et sciences criminelles/Carrières judiciaires 2022
  

Disponible en mode multipage

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UNIVERSITE CHEIKH ANTA DIOP DE DAKAR

-------------

BP : 5005 Dakar-Fann

FACULTE DES SCIENCES JURIDIQUES ET POLITIQUES (FSJP)

MEMOIRE DE FIN DE CYCLE

Présenté en vue de l'obtention du

DIPLOME DE MASTER II RECHERCHE DROIT PRIVE ET SCIENCES CRIMINELLES / OPTION JUDICIAIRE

THEME : Les créanciers face aux impératifs de sauvetage des entreprises en difficulté en droit OHADA

Présenté publiquement par : Directeur de recherche :

M. Ganiyou BOUSSARI Prof. Patrice S. A. BADJI

Agrégé en Droit privé,

Directeur du CREDILA

Année universitaire 2019-2020

AVERTISSEMENT

« L'Université Cheikh Anta Diop de Dakar n'entend donner aucune approbation ni improbation aux opinions émises dans ce mémoire ; ces opinions doivent être considérées comme propres à leur auteur ».

REMERCIEMENTS

Je remercie d'abord le Dieu créateur de l'univers de qui je détiens mon souffle et grâce à qui ce travail a été possible.

J'adresse ensuite mes sincères remerciements à tous mes professeurs qui ont, de près ou de loin, participé à ma formation, et particulièrement au Professeur Samuel Patrice Aristide BADJI, Agrégé de Faculté de Droit-UCAD, Directeur du Centre de Recherche, d'Etude et de Documentation sur les Institutions et les Législations Africaines (CREDILA), qui s'est rendu disponible pour diriger ce travail de recherche, malgré son emploi du temps chargé.

Ma gratitude et mes remerciements vont enfin à toute ma famille qui a été toujours à mes côtés.

SIGLES ET ABRÉVIATIONS

Al. : Alinéa

Art. : Article

Art. L. : Article Loi

AUDCG : Acte uniforme portant sur le droit commercial général

AUM : Acte uniforme relatif à la médiation

AUPC : Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif

AUPSRVE : Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et voies d'exécution

AUS : Acte uniforme portant organisation des sûretés

AUSCGIE : Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d'intérêt économique

Bull. : Bulletin

C/ : Contre

CA : Cour d'appel

Cass. Com. Fr. : Chambre commerciale de la Cour de cassation française

CCJA : Cour Commune de Justice et d'Arbitrage

C. Com. : Code de commerce français

Chap. : Chapitre

COCC : Code des obligations civiles et commerciales du Sénégal

CREDILA : Centre de Recherche, d'Etude et de Documentation sur les Institutions et les Législations Africaines

D. : Dalloz

Ed. : Edition

ERSUMA : Ecole Régionale Supérieure de la Magistrature

Ibid. : Ibidem (au même endroit)

Idem : Même chose

JO : Journal officiel

JORF : Journal officiel de la République française

N° : Numéro

Obs. : Observations

OHADA : Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires

Op. cit. : Opère citato (dans l'ouvrage précité)

OMS : Organisation Mondiale de la Santé

P. : Page

Parag. : Paragraphe

P.p. : Pages

Préc. : Précité (e)

Rev. : Revue

RTD. Com. : Revue trimestrielle de droit commercial

SA : Société anonyme

SARL : Société à Responsabilité Limitée

Sec. : Section

Ss. : Et suivant

T. Com. : Tribunal de commerce

TGI : Tribunal de grande instance

UEMOA : Union Economique et Monétaire Ouest Africain

V. : Voir

Vol. : Volume

SOMMAIRE

INTRODUCTION 2

CHAPITRE 1 : LA TENTATIVE DE REVALORISATION DE LA PROTECTION DES CREANCIERS 11

SECTION I : UNE TENTATIVE DE REVALORISATION DE LA PROTECTION DES CREANCIERS A TRAVERS L'INSTITUTION DE NOUVELLES PROCEDURES 12

SECTION II : UNE TENTATIVE DE REVALORISATION DE LA PROTECTION DES CREANCIERS PAR REMODELAGE DES PROCEDURES EXISTANTES DANS L'AUPC DE 1998 29

CHAPITRE 2 : LA PERFECTIBILITE DE LA SITUATION DES CREANCIERS 46

SECTION I : LA SUBSISTANCE D'UNE MISE A MAL DE LA SITUATION DES CREANCIERS DANS LE SAUVETAGE DE L'ENTREPRISE 47

SECTION II : DES PISTES DE SOLUTIONS POUR UNE MEILLEURE AMELIORATION DE LA SITUATION DES CREANCIERS 59

CONCLUSION 80

INTRODUCTION

A l'instar des êtres humains, qui rencontrent au cours de leur existence des problèmes de santé divers, il arrive aux entreprises de connaitre des maladies économiques et financières qu'il faut guérir rapidement, à défaut de quoi celles-ci disparaissent. C'est pourquoi, pour éviter les disparitions fréquentes des entreprises, le sauvetage de l'entreprise et l'apurement du passif de celles-ci ont été choisiscomme les principaux objectifs des procédures collectives OHADA (Organisation pour l'harmonisation en Afrique du Droit des Affaires)1(*). Ces dernières sont consacrées par l'Acte uniforme portant organisation des procédures collectives et d'apurement du passif (AUPC) adopté le 10 avril 1998 à Libreville (Gabon) et entré en vigueur le 1er janvier 1999. Ce texte a été révisé en 2015 et concentre désormais les procédures collectives au bénéfice du débiteur en reléguant les intérêts des créanciers au second plan2(*). Aujourd'hui comme hier, les procédures collectives mettent en jeu des intérêts, dans une certaine mesure, opposés3(*). D'un côté, l'on a les intérêts du débiteur et de l'autre côté, ceux des créanciers. Le sauvetage de l'entreprise débitrice en difficultés financières ou économiques passe par des entorses légalement admises aux droits des créanciers, même munis de sûretés. Ainsi, au nom de la recherche de sauvetage du débiteur en difficulté, de l'aspiration au développement économique des Etats parties et du maintien des emplois4(*), les intérêts des créanciers, même pris en compte, se trouvent sacrifiés. Cette situation qui rompt avec l'équilibre entre la condition des débiteurs et celle des créanciers a inspiré le choix de mener une réflexion sur le thème « Les créanciers face aux impératifs de sauvetage des entreprises en difficulté en droit OHADA ».

Le créancier est, au sens du Code des obligations civiles et commerciales (COCC) du Sénégal5(*), celui qui peut exiger d'une personne, le débiteur, l'exécution d'une certaine prestation qui peut être une abstention6(*). Le créancier est donc titulaire d'un droit personnel qu'il peut réaliser devant la juridiction compétente contre son débiteur. En droit des entreprises en difficulté, il existe plusieurs catégories de créanciers, à savoir les créanciers antérieurs encore appelés « créanciers dans la masse », les créanciers postérieurs ou contre la masse et les créanciers hors la masse7(*). Ces derniers ne feront pas l'objet de cette étude car leurs créances sont naturellement inopposables à la masse8(*). Hormis, les créanciers hors la masse, le reste des catégories des créanciers est concerné, selon les cas, dans les procédures de sauvetage des entreprises.

Quant au terme « sauvetage », l'Acte uniforme portant organisation des procédures collectives et d'apurement du passif ne le définit pas. Cependant, selon le dictionnaire Larousse 2016, le sauvetage est l'action de soustraire quelqu'un ou quelque chose à ce qui le menace, donc de le sauver d'un danger. Dans le contexte du sujet objet de la présente réflexion, il s'agit du sauvetage des entreprises en difficulté, donc de l'action de sauver des entreprises en difficulté financière ou économique ou encore juridiqueen vue de l'évitement du pire, qui est leur cessation des paiements ou leur disparition. Le sauvetage est donc un terme plus général et englobe les procédures destinées à assurer la pérennité des entreprises qui, à un moment donné de leur existence, connaissent des difficultés financières ou économiques.

S'agissant du vocable« impératif », il désigne une chose ou une situation qui s'impose de façon impérieuse, bref un impératif est une nécessité9(*). Ainsi, le sauvetage des entreprises recherché par le législateur OHADA est fondé sur des nécessités le plus souvent économiques, sociales et politiques10(*). L'usage du pluriel s'explique par le fait qu'il existe plusieurs raisons qui justifient la poursuite de cet objectif. L'entreprise joue un important rôle dans la création des richesses et d'emplois. De ce fait, la disparition d'une entreprise est une lourde perte économique pour les Etats d'où la nécessité de mettre en place un dispositif juridique de protection de « l'entreprise en difficulté ».

La notion d'« entreprise », quant à elle, est définie par plusieurs dispositions légales. Sa définition est à géométrie variable selon les matières qui l'utilisent. En effet, en matière des procédures applicables aux ententes et abus de position dominante dans l'espace UEMOA11(*), « la notion d'entreprise se définit comme une organisation unitaire d'éléments personnels,matériels, et immatériels, exerçant une activité économique, à titre onéreux, de manière durable, indépendamment de son statut juridique, public ou privé, et de sonmode de financement, et jouissant d'une autonomie de décision.»12(*). En outre, aux termes de l'article L.3 du Code du travail13(*), constitue une entreprise « Toute personne physique ou morale, dedroit public ou de droit privé employant un ou plusieurs travailleurs au sens de l'article L.2. (...) ».

Par ailleurs, l'AUPC révisédéfinit, en son article 1-3, l'entreprise comme « toute personne physique ou morale soumise aux dispositions du présent acte uniforme conformément à l'article 1-1 ci-dessus ». Il faut préciser que le renvoi à l'article 1-1 de l'AUPC réviséintègre dans la notion d'entreprise, l'exercice d'une activité professionnelle indépendante, civile, commerciale, artisanale ou agricole, ainsi que le caractère privé et la forme de droit privé de toute entreprise publique. Singulièrement, l'AUPC révisé consacre une nouvelle forme d'entreprise baptisée sous l'expression « petite entreprise », qui quant à elle, est définie comme « toute entreprise individuelle, société ou autre personne morale de droit privé dont le nombre de travailleurs est inférieur ou égal à vingt (20), et dont le chiffre d'affaires n'excède pas cinquante millions (50 000 000) de francs CFA, hors taxes, au cours des douze mois précédant la saisine de la juridiction compétente »14(*).

Ces diverses définitions de la notion d'entreprise bien que présentant, chacune, des traits contextuels, se déclinent comme une organisation unitaire exerçant une activité professionnelle indépendante. Elles revêtent toutes des intérêts pour la présente étude car les procédures collectives constituent une matière qui traverse toutes les autres disciplines du droit. L'entreprise est alors ce que Monsieur SOLAL a appelé « véritable microcosme du monde économique et social d'aujourd'hui »15(*). L'entreprise renvoie en principe aussi bien aux débiteurs qu'aux créanciers, sous réserve des débiteurs ou créanciers personnes physiques qui ne répondent pas aux définitions ci-dessus. C'est le cas, par exemple, des salariés. Sont exclues du champ de la présente étude, les réglementations spéciales16(*) réservées aux entreprises d'assurance et bancaires en raison de leur caractère dérogatoire au droit commun des procédures collectives OHADA. Sont aussi exclus les associés, personnes physiques des sociétés commerciales qui peuvent avoir la qualité de créanciers en compte courant car régis par l'Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et groupement d'intérêt économique (AUSCGIE)17(*). L'impératif premier du droit des procédures collectives OHADA est désormais d'assurer la pérennité de l'entreprise débitrice en lui reconnaissant un droit à la vie et à la croissance18(*).

Au-delà de ces précisions terminologiques, il y a lieu de rappeler que l'idée de mettre en place un dispositif juridique de protection de l'entreprise centré sur son sauvetage, dans l'espace OHADA, a été le fruit d'une évolution législative essentiellement inspirée du droit français des procédures collectives. En France, le droit de la faillite visait principalement à sanctionner le débiteur défaillant et son dirigeant19(*) jusqu'en 1967. En effet, la sanction consistait à punir et à éliminer le commerçant qui n'honore pas ses engagements et visait à protéger les créanciers impayés en ce sens qu'il s'agissait d'abord pour le législateur d'assurer le désintéressement de ceux-ci dans les meilleures conditions possibles. L'orientation donnée au droit de la faillite va révéler ses inconvénients et ses lacunes, à savoir la disparition fréquente des entreprises qui avaient pourtant des chances de survie avec des conséquences économiques et sociales qui l'accompagnaient20(*). Par une loi du 13 juillet 1967, la dynamique va changer pour donner place à une nouvelle orientation21(*). Désormais, dans une perspective macroéconomique22(*), l'accent est mis sur la prévention de la cessation des paiements et de la « mort » de l'entreprise, donc sur le traitement précoce des difficultés du débiteur. Cette politique sera renforcée par des réformes postérieures23(*) dont la plus décisive est celle opérée par la loi française du 26 juillet 2005 mettant en première ligne le sauvetage de l'entreprise. Cette évolution du droit des procédures collectives en France justifie la suppression du « droit de la faillite » au profit de la nouvelle appellation qu'est le «droit des entreprises en difficulté »24(*). Elle a influencé les systèmes juridiques des anciennes colonies françaises en cette matière, dont celles de l'espace OHADA.

Dans les pays de l'espace OHADA, jusqu'en 1998, la matière était régie par des textes hérités pendant la période coloniale, même si après les indépendances, certains de ces pays ont exprimé au fil des temps leur volonté à se démarquer du Code de commerce de 180725(*). Par la suite, poussés par la nécessité d'une intégration juridique dictée par les contraintes du monde économique et la concurrence qui caractérisent le monde des affaires, les Etats africains se sont réunis en une Organisation dénommée OHADA26(*). L'objectif de l'OHADA est de créer à travers des règles communes, simples, modernes et adaptées27(*), un pôle de développement économique attractif en vue d'inciter surtout les investisseurs étrangers à s'intéresser au marché africain28(*). C'est dans le cadre de cette intégration juridique et économique que furent adoptés les différents Actes uniformes dans l'espace OHADA, dont l'AUSCGIE du 17 avril 1997 et l'AUPC du 10 avril 1998 (AUPC). L'AUSCGIE a introduit la procédure d'alerte29(*) dans le droit OHADA avant d'être révisé en 2014. Cette procédure est destinée à la détection de tout fait de nature à compromettre la continuité de l'exploitation d'une entreprise et à prévenir les difficultés par l'information30(*). Cependant, parce qu'elle n'affecte pas les droits des associés-créanciers, cette procédure ne sera pas abordée dans cette étude qui se limite seulement à celles prévue par l'AUPC et sa version révisée. L'AUPC avait pour objectif principal le sauvetage des entreprises viables en vue de favoriser le développement économique et maintenir les emplois au sein des Etats parties, même aux prix d'une certaine paralysie des droits des créanciers. Pour ce faire, à côté de la liquidation des biens du débiteur, l'AUPC avait consacré des procédures collectives que sont le règlement préventif, le redressement judiciaire31(*) qui sont destinées à assurer la continuité des entreprises. Sur ce point, il existe un avis contraire. En effet, certains auteurs32(*) soutiennent que l'AUPC aurait pour objectif premier le paiement des créanciers. Ils soutiennent leur position par le fait que les procédures collectives ouvertes après la cessation de paiement visaient toutes à apurer le passif. A notre avis, cette position doit être accueillie avec beaucoup de réserve dans la mesure où l'idée de prévention de la cessation de paiement et de redressement de l'entreprise en difficulté dominait déjà l'AUPC de 1998. De nombreuses critiques qui ont été dirigées contre ce texte en ce qu'il entrave de manière considérable les droits des créanciers, confortent cette position. Au fil du temps, l'AUPC de 1998 a montré ses insuffisances et a fait, tant dans sa substance que dans son application, l'objet de vives critiques de la part de la doctrine.

En effet, s'agissant de l'interdiction et de la suspension des poursuites individuelles, une doctrine relevait des risques de détournement du règlement préventif dans une intention de fraude aux droits des créanciers, et de durée trop longue de la procédure, ce qui s'observait dans la pratique33(*). Cette situation de nature à prolonger la durée de la suspension des poursuites individuelles34(*) au grand désespoir des créanciers était liée à l'absence d'un statut des mandataires judiciaires et de la grande marge de manoeuvre qui était offerte au débiteur souhaitant demander un règlement préventif35(*) ou toute autre procédure collective. Monsieur DELABRIERE Antoine affirmait qu' « il existerait en effet une grave insécurité juridique et financière pour les acteurs économiques si cette situation de suspension de poursuites individuelles à l'encontre de l'entreprise qui n'est officiellement pas en grave situation financière devait se poursuivre trop longtemps »36(*) . Il faut noter que pour le cas particulier des créanciers réservataires, une doctrine évoque la relativité de leur protection qui ne serait pas encore suffisante en raison de son conditionnement présenté comme un risque pour les créanciers dont la propriété est réservée37(*). Aussi, faut-il relever que le peu de place que le législateur accorde aux créanciers dans le cadre du sauvetage de l'entreprise38(*) est de nature à mettre en jeu les intérêts de ceux-ci, qui espèrent sauver leur potentiel client ou partenaire d'affaires.

A côté de ces précédentes critiques, il était fait également des reproches d'ordre pratique et fonctionnel dans la mise en oeuvre des dispositions de l'AUPC de 1998. En effet, une doctrine indique que les insuffisances de la réglementation des procédures collectives OHADA ont été amplifiées par la non-maitrise de l'AUPC par les acteurs judiciaires ou non, les irrégularités récurrentes entrainant la disparition même des entreprises qui pouvaient être sauvées et des pertes pour les créanciers39(*).De manière générale, le législateur OHADA avait constaté, à la suite d'un diagnostic effectué par des experts, « l'absence de règlementation des mandataires judiciaires, durée trop longue des procédures, lourdeur et inadaptation des procédures pour les micro-entrepreneurs, absence d'une procédure préventive de conciliation moderne pour promouvoir les négociations privées et les accords extrajudiciaires entre le débiteur et ses créanciers et absence d'un régime adéquat pour les faillites internationales ouvertes hors de l'espace OHADA »40(*). Face à ces insuffisances de l'AUPC, le législateur OHADA avait initié depuis 2007 un projet de réforme qui a abouti à la révision de 2015 par laquelle, le législateur OHADA met clairement l'objectif de sauvetage de l'entreprise débitrice au premier rang41(*), tout en essayant de revaloriser la situation des créanciers.

De l'adoption de l'AUPC révisé du 10 septembre 2015 à aujourd'hui, soit six (06) ans après, un bilan s'impose sur la situation des créanciers, laquelle était jugée déplorable sous l'empire du texte du 10 avril 1998. C'est dans cet esprit que le sujet trouve son intérêt. En effet, selon le professeur SAWADOGO Filiga Michel, le législateur OHADA entend par la réforme opérée, créer « un juste équilibre entre la liquidation des biens et le redressement des entreprises. Le choix de la sauvegarde de l'activité sera donc désormais encouragé au détriment de la liquidation des biens lorsque la sauvegarde est à même de maximiser la valeur de l'entreprise pour la société en général et pour les créanciers en particulier »42(*). L'idée d'équilibre qui apparait dans cette affirmation renvoie à la vocation du droit à instaurer la justice et l'équité dans la réglementation des rapports juridiques43(*). Selon les juristes romains, la justice « donne à chacun son dû ». L'injustice est alors ce quirompt cet ordre. L'injustice peut donner trop ou pas assez, donner à qui n'a pas le droit derecevoir, ou ne pas donner à qui doit recevoir. L'injustice brise un ordre normé, qu'il soit religieux,moral, juridique44(*) et peut être source d'une crise sociale ou économique.

Le Covid-19 a été à l'origine d'une crise sanitaire mondiale. Cette crise a impacté considérablement et négativement, à travers la prise de mesures diverses qu'elle a imposées, l'économie des entreprises et par ricochet, celle des Etats. Elle a éprouvé les créanciers qui se sont vus imposer un surplus de sacrifices, malgré ceux que l'AUPC révisé leur imposait déjà dans leur rapport avec leurs débiteurs. Or, les créanciers sont aussi, dans la majorité des cas, des entreprises, personnes physiques et personnes morales, exerçant à titre professionnel une activité économique. Ces dernières sont, pour ainsi dire, juridiquement obligées de satisfaire leurs engagements vis-à-vis de leurs propres créanciers. Le législateur français dont s'inspire le plus souvent son homologue de l'espace OHADA, n'a pas manqué de tirer des leçons de cette crise sanitaire mondiale et ses effets45(*). Il a en effet opéré une réforme de son droit des entreprises en difficulté en prenant en compte les ordonnances prises pendant la crise sanitaire46(*).

Une attitude moins favorable du législateur à l'égard des créanciers revêtirait pour conséquence le risque de créer de nouvelles victimes au sein de cette catégorie. C'est le cas pour un créancier en état économique déjà fragile qui doit se plier sous la discipline collective. Un auteur47(*) affirmait que « C'est l'amoncellement des difficultés qualifiées de mineures qui conduit à la cessation de paiements, qui dans la majorité des cas consomme la disparition de l'entreprise »48(*).

Au-delà de ces aspects, l'on doit s'interroger sur comment concilier les procédures de sauvetage des entreprises en difficulté avec les besoins des créanciers, en d'autres termes les intérêts du débiteur et ceux des créanciers. Dans cet ordre d'idée, il se pose fondamentalement la question de savoir comment se caractérise la situation des créanciers face aux impératifs de sauvetage des entreprises en difficulté en droit OHADA.

L'AUPC, dans sa version révisée, laisse apparaitre une évolution positive de la situation des créanciers. Il est à noter qu'avec l'AUPC révisé, le législateur OHADA a tenté de renforcer le système de sauvetage des entreprises en mettant en place de nouvelles procédures préventives que sont la conciliation et les procédures simplifiées adaptées pour les petites entreprises. L'AUPC révisé offre désormais la possibilité de recourir à la procédure de médiation en vigueur dans les Etats partie jusqu'en 201749(*).Depuis 2017, la médiation est régie par l'Acte uniforme relatif à la médiation (AUM)50(*). La nouvelle orientation de l'AUPC révisé est de prévenir, dans la majorité des cas, la cessation des paiements de l'entreprise51(*). A travers toutes ces procédures innovantes, les créanciers ont vu une certaine amélioration de leur situation. En effet, les intérêts des créanciers ont été de façon implicite ou expresse pris en compte dans une certaine mesure, dans le cadre de la nouvelle politique des procédures collectives, qui met au centre de ses préoccupations le sauvetage de « l'entreprise »52(*).En outre, la protection des intérêts des créanciers a progressé par différentes modifications apportées par le législateur OHADA à l'AUPC du 10 avril 1998. Ces modifications de l'AUPC originel se constatent à plusieurs niveaux, que ce soit dans l'encadrement de l'intervention des mandataires judiciaires ou celle des créanciers dans les procédures préventives ou de traitement des difficultés des entreprises. Il existe plusieurs dispositions du texte de 1998 qui ont été revues et remodelées en vue d'aller vers un certain équilibre entre l'impératif de sauvetage des entreprises et la protection des intérêts des créanciers, qui étaient quasiment absents dans le déclenchement et le déroulement des procédures collectives.

Cependant, une analyse minutieuse de l'AUPC révisé révèle que le déséquilibre entre la protection du débiteur et celle des créanciers s'articule mal avec les impératifs que le législateur OHADA a voulu satisfaire. Les principaux objectifs que poursuit le législateur OHADA est encore en défaveur des créanciers. Cet écart dans la prise en compte des intérêts conflictuels en droit des entreprises en difficulté s'observe dans une apparente protection des créanciers dont les droits sont brimés dans la majorité des cas53(*). Il se constate aussi dans l'incertitude qui peut entourer l'issue des sacrifices que la loi les contraint de consentir dans le cadre du sauvetage d'une entreprise en difficulté.

Plusieurs données54(*), qu'elles soient d'ordre juridique ou factuel, invite à prendre du recul sur les mérites du système de sauvetage des entreprises en difficultés dans les Etats parties de l'OHADA.

S'appuyant sur ces données55(*), la démarche à adopter dans cette étude consistera non seulement à analyser les différents progrès enregistrés dans la prise en compte de la situation des créanciers face aux impératifs de sauvetage des entreprises, mais aussi à relever les insuffisances qui, perdurant, sont incompatibles avec l'objectif central du législateur OHADA dans la réglementation des procédures collectives : sauvegarder les entreprises. C'est au travers de cet idéal que l'économie des Etats de l'espace OHADA pourrait connaitre un essor effectif, en passant par le maintien des emplois. Les investisseurs étrangers tiennent beaucoup compte de la sécurité juridique et judiciaire que leur offre un système juridique avant de s'engager dans des opérations d'investissement sur un marché économique. De façon logique, cette démarche analytique débouchera sur des pistes de solutions pouvant contribuer à un meilleur équilibre entre la protection des intérêts du débiteur et ceux des créanciers dans les procédures collectives d'apurement du passif.

Au regard de tout ce qui précède, l'analyse du droit des entreprises en difficultés régi par l'AUPC révisé laisse apparaitre une tentative de revalorisation de la protection des créanciers (Chapitre I), qui n'occulte pas, cependant, la perfectibilité de la situation de ces derniers (Chapitre II).

CHAPITRE 1 : LA TENTATIVE DE REVALORISATION DE LA PROTECTION DES CREANCIERS

En réponse aux insuffisances révélées de l'AUPC originel dans le rapport de l'auditqui a précédé la révision de 2015, le législateur s'est beaucoup intéressé à la situation des créanciers qui devaient manifestement subir les effets négatifs de l'ouverture d'une procédure collective. Il y a lieu de rappeler que les procédures de sauvetage n'aboutissaient quasiment pas au maintien de l'entreprise à cause de leur lourdeur, lenteur et leur coût56(*). Les acteurs économiques africains correspondent, dans la majorité des cas, aux petites entreprises, des détaillants du secteur informel57(*). Ainsi, il a été constaté que la plupart des entreprises dans les pays africains n'ont pas des actifs importants pour faire face aux contraintes liées à la gestion des procédures collectives. Par exemple, seule la rémunération du syndic peut compromettre le redressement d'une entreprise et conduire à l'élimination de cette dernière de toute chance sérieuse de paiement des créanciers58(*). Les procédures collectives étaient quasiment en perte de leur intérêt pratique. Ce qui avait pour conséquences, dans la majorité des cas, la disparition des entreprises, les pertes des emplois et des manques à gagner pour l'économie des Etats parties à l'OHADA.Pour permettre d'atteindre l'objectif central de sauvetage fixé, le législateur a opté pour la mise en place des procédures simples et allégées d'une part et a opéré d'importantes modifications des dispositions diverses de l'AUPC de 1998. C'est ainsi qu'il a été instauré de nouvelles procédures que sont la conciliation59(*), les procédures collectives simplifiées60(*). L'implication des créanciers dans la recherche du sauvetage des entreprises a été améliorée dans une certaine mesure61(*). Les intérêts des créanciers ont bénéficié d'une attention du législateur qui n'a pas manqué d'exprimer, à travers les dispositions du nouvel AUPC, sa volonté de moraliser le droit des entreprises en difficulté et spécialement le droit des procédures collectives. Ainsi, il convient de relever une tentative de revalorisation de la protection des créanciers à travers l'institution de nouvelles procédures d'une part (Section I) et à travers le remodelage apporté aux procédures existantes dans l'AUPC de 1998 (Section II).

SECTION I : UNE TENTATIVE DE REVALORISATION DE LA PROTECTION DES CREANCIERS A TRAVERS L'INSTITUTION DE NOUVELLES PROCEDURES

Parmi les majeures innovations apportées par le législateur OHADA dans l'Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif de 2015, il est à relever la mise en place de nouvelles procédures. Au titre de ces nouvelles procédures, il a été consacré la procédure de conciliation et des versions simplifiées des procédures collectives traditionnelles. Par ces différentes innovations, le législateur a tenté d'améliorer un peu la situation des créanciers jugée catastrophique jusqu'en 2015. Ainsi, il convient d'analyser d'une part, la mise en place de la procédure de conciliation (A) et d'autre part, l'avènement des procédures simplifiées (B).

PARAGRAPHE 1 : LA MISE EN PLACE DE LA PROCEDURE DE CONCILIATION

Bien qu'il a été développé un scepticisme à l'égard de l'utilité que pourrait revêtir la procédure de conciliation62(*), il est important de souligner l'intérêt des créanciers à participer à une telle procédure (A) avant d'aborder le droit des créanciers à résolution de l'accord de conciliation (B).

A- L'intérêt des créanciers à participer à la procédure de conciliation

Tout part de l'idée que l'entreprise frappée d'une procédure collective, suite à des difficultés de trésorerie, est un partenaire d'affaire à sauvegarder. En effet, les créanciers trouvent aussi leur compte dans la sauvegarde de l'entreprise débitrice en difficulté surtout lorsqu'ils sont fournisseurs de cette dernière63(*). Un bon fournisseur cherchera à élargir le marché sur lequel il peut faire couler ses produits. Ainsi, les créanciers n'ont pas intérêt à ce que leur partenaire, l'entreprise débitrice, ici, se retrouve dans une situation de cessation des paiements, laquelle peut conduire celle-ci dans un état irréversible. C'est dans cet esprit que l'AUPC révisé a accordé une place non négligeable aux intérêts des créanciers en matière de la procédure de conciliation, qui n'est pas une procédure collective, mais une procédure préventive64(*).

La procédure de conciliation est une procédure préventive, consensuelle et confidentielle, destinée à éviter la cessation des paiements de l'entreprise débitrice, au moyen d'un accord amiable avec ses créanciers ou principaux créanciers et grâce à l'intervention d'un tiers appelé conciliateur65(*). Elle vise, en tout ou en partie, la restructuration financière ou opérationnelle de l'entreprise en vue de sauvegarder66(*) cette dernière.

La procédure de conciliation telle que connue en droit OHADA, aujourd'hui, trouve son origine dans la loi française du 26 juillet 2005, qui est le résultat d'une modification de la loi du 1er mars 1984 relative à la prévention et au règlement amiable des difficultés des entreprises67(*). Depuis la loi du 26 juillet 2005, la procédure de règlement amiable a étésubstituée par une nouvelle procédure : la procédure de conciliation, dont le régimejuridique a été revu par l'ordonnance du 18 décembre 2008 et l'ordonnance du12 mars 2014 afin de rendre cette procédure de prévention encore plus attractive68(*).

L'ouverture de la procédure de conciliation est soumise à des conditions de fond et de forme dont l'énumération revêt peu d'intérêt. Parmi les conditions relatives à la forme, certaines peuvent être analysées comme prenant en compte les intérêts créanciers.En effet, les créanciers ont la possibilité d'intervenir conjointement avec le débiteur dans la saisine de la juridiction compétente en vue de l'ouverture d'une procédure de conciliation.Le président de la juridiction compétente est saisi par une requête du débiteur ou par une requête conjointe de ce dernier avec un ou plusieurs créanciers69(*).Cette implication permet aux créanciers de mieux mesurer les conséquences des engagements qu'ils auraient à prendre dans la restructuration de l'entreprise débitrice. Par-là, ils sont mieux et très tôt informés sur la situation du débiteur. Leur association au débiteur dans l'enclenchement de la procédure de conciliation leur permet également de prendre des mesures personnelles pour faire face à la répercussion que les difficultés de celui-ci pourraient avoir sur le recouvrement de leurs créances et l'exécution de leurs propres obligations à l'égard de leurs propres créanciers.

En outre, la durée de la procédure de conciliation est de trois mois prorogeables seulement d'un mois. Passé ce délai, la procédure de conciliation prend fin. Cette règle rend compte de la durée relativement brève de la procédure de conciliation. Elle a pour conséquence d'alléger les entraves aux droits des créanciers qui auront accepté de conclure un accord amiable avec le débiteur. Ainsi, l'interdiction ou la suspension des poursuites individuelles qui peuvent éventuellement être faites aux créanciers s'inscrit dans un temps raisonnable.

En principe, l'ouverture d'une procédure de conciliation n'a pas pour effet d'interdire ou de suspendre les poursuites individuelles contre le débiteur70(*). Les créanciers ont toujours la possibilité d'exercer des actions en recouvrement de créances contre le débiteur objet d'une procédure de conciliation. Ce principe de la non-suspension des poursuites individuelles est une règle salutaire pour les créanciers qui échappent ainsi aux conséquences des jugements déclaratifs des procédures collectives.La suspension des poursuites individuelles a été jugée peu utile car son admission remettrait en cause le caractère confidentiel de la procédure de conciliation71(*). Toutefois et exceptionnellement, cette mesure peut être prise72(*) à l'encontre d'un créancier dont les actions pourraient paralyser la mission du conciliateur73(*).Pour ce qui concerne la prorogation d'un mois, il ne semble pas nécessaire de prévoir des conditions particulières pour la justifier, en raison de la brièveté du délai de la procédure de conciliation74(*). Même en cas d'augmentation d'un mois, la durée de la procédure reste brève, compte tenu du fait que l'ouverture de la conciliation fait obstacle à l'ouverture d'un redressement judiciaire ou de liquidation des biens.75(*)

Le statut du conciliateur est aussi une garantie pour les créanciers car il les protège contre des fraudes ou des abus éventuels,le conciliateur pouvant en complicité avec le débiteur, détourner la conciliation de son objectif premier. Le conciliateur est un tiers qui facilite la conclusion d'un accord amiable entre le débiteur en difficultés financières avérées ou prévisibles et ses principaux créanciers en vue de restructurer la situation et éviter la cessation des paiements de celui-ci. Intervenant ès qualité dans la procédure de conciliation, cet acteur n'a pas été ignoré par le législateur. Tirant des leçons des dérives constatées76(*), sous l'empire de l'Acte uniforme du 10 avril 1998, chez les experts en règlement préventif et les syndics dans le cadre du redressement judiciaire et de la liquidation des biens, il fallait mettre des garde-fous dans la désignation et l'exercice de la mission de conciliateur. C'est ainsi que l'article 5-4 alinéa 2 AUPC révisé exige un certain nombre de conditions pour accéder à la fonction de conciliateur. En effet, le conciliateur doit justifier des compétences professionnelles, être d'une bonne moralité certaine, ne pas avoir une réputation entachée et demeurer indépendant et impartial vis-à-vis des parties concernées par la conciliation77(*).

Toutefois, il peut être reproché au législateur OHADA de n'avoir pas expressément prévu des sanctions à l'encontre du conciliateur qui ne respecte pas ses obligations. Dans le silence du législateur, la responsabilité du conciliateur fautif ne peut être recherchée qu'en recourant au droit commun de la responsabilité civile ou pénale.

Il faut relever que la procédure de conciliation est organisée de telle sorte que les créanciers ne subissent pas le dictat du juge. Les créanciers participent volontairement à la conciliation, trouvant leur compte lorsque leur partenaire en difficultés financières arrive à être épargné du pire. Le caractère volontariste de la conciliation est affirmé dans la jurisprudence78(*).

Toutefois, la procédure de conciliation,se rapprochant du « concordat amiable », n'a pas emporté la confiance de plusieurs acteurs du monde économique79(*) et certains auteurs sont restés toujours réservés sur l'efficacité de celle-ci. En effet, une doctrine80(*) estime que le débiteur en difficulté ayant perdu du crédit auprès de ces créanciers, il serait difficile pour lui de négocier et que l'accord amiable comporterait des risques pour les créanciers qui l'acceptent. Pour soutenir cette position, elle relève qu'en plus des risques économiques, les créanciers courraient également des risques juridiques en cas d'échec et d'ouverture ultérieure d'une procédure collective81(*).

Pour un autre auteur82(*), l'insuccès de la procédure de conciliation est potentiel, compte tenu du fait qu'elle porterait atteinte au principe d'égalité entre les créanciers et le risque de fraude et d'un engagement pris à la légère par le débiteur qui voudra à tout prix obtenir un réaménagement de ses dettes. Cet auteur souligne aussi que « l'exécution d'un concordat amiableest toujours précaire : il ne lie que les seuls créanciers signataires et n'interdit pas aux autres créanciers du débiteur de réclamer leur dû et d'entraîner ainsi la cessation des paiements que le concordat cherchait précisément à juguler ».

En outre, la judiciarisation de la procédure de conciliation peut être un frein à la prévention des cessations de paiement. En effet, l'intervention du juge dans la procédure de conciliation remet en cause la philosophie contractuelle et la simplicité qui semblait animer le législateur dans la révision de l'AUPC de 1998. Par ailleurs, la possibilité pour les parties de recourir à la médiation conventionnelle est un moyen de rendre plus simple le système de la prévention des cessations de paiements83(*).

A notre avis, il semble que malgré les réserves portées sur l'efficacité de la procédure de conciliation, on ne peut nier son utilité dans le sauvetage de l'entreprise du fait qu'elle profite non seulement au débiteur qui y recourt, mais aussi prend en compte de manière significative les intérêts des créanciers.

La procédure de conciliation visant à obtenir un accord amiable avec les créanciers ou les partenaires du débiteur, une fois cet accord conclu, il pourra faire, par la suite, l'objet de résolution sur demande des créanciers, notamment en cas d'inexécution.

B- Le droit à résolution des créanciers parties à l'accord amiable

L'objectif de la procédure de conciliation est pour le débiteur d'obtenir un accord avec ses principaux créanciers ou partenaires. L'issue de cette procédure peut se solder à la suite des négociations par un échec ou un succès.

En effet, lorsque les négociations n'aboutissent pas à la conclusion d'un accord amiable, le conciliateur présente sans délai un rapport écrit au président de la juridiction compétente et met fin à sa mission et à la procédure, après avoir entendu le débiteur84(*).Ainsi, les créanciers recouvrent l'intégralité de leurs créances et sûretés. En telle hypothèse, si le débiteur n'est pas en cessation de paiements, il reste libre et peut demander l'ouverture d'un règlement préventif. Il peut être, en revanche, en cessation de paiement et si cet état de cessation des paiements ressort du rapport du conciliateur, le tribunal se saisit d'office afin de statuer sur l'ouverture d'une procédure collective85(*).

Dans le cas où un accord amiable a pu être obtenu, il doit faire l'objet d'une formalité qui varie selon le choix des parties à l'accord. En effet, à la requête de la partie la plus diligente, l'accord signé peut être soit déposé au rang des minutes d'un notaire86(*), soit homologué ou exequaturé par la juridiction compétente ou l'autorité compétente statuant à huit clos87(*). La prescription de ces formalités par la loi est destinée à donner à l'accord amiable une force obligatoire tant à l'égard des créanciers qu'à l'égard du débiteur88(*).L'accord de conciliation produit des effets à l'égard des créanciers qui ont participé à cet accord et exceptionnellement vis-à-vis de créanciers qui n'ont pas participé à la procédure89(*). L'accord constaté ou même homologué n'a en principe de force obligatoire à l'égard des créanciers qui ne sont pas parties à l'accord90(*).Les créanciers non impliqués à l'accord poursuivent librement le recouvrement de leurs créances.

L'on notera que les parties à l'accord de conciliation sont tenues de se soumettre aux engagements qu'ils ont pris de part et d'autre91(*). Le débiteur est obligé d'exécuter ses engagements dans les termes de l'accord intervenu entre lui et ses partenaires. Lorsque le débiteur bénéficiant d'un accord amiable exécute convenablement ses obligations, aucun problème majeur ne se poserait car il s'agit d'une conséquence logique des démarches de conciliation et l'objectif poursuivi.

Les créanciers trouvent également leurs intérêts dans la conciliation ayant abouti à un accord, en ce qu'ils peuvent être remis dans leurstatut quo ante en recouvrant leur droit de poursuite. Cela n'est possible que dans les cas où le débiteur n'exécute pas ses engagements. En ce sens, l'article 5-13 AUPC révisé dispose que « la juridiction ou l'autorité compétente ayant connu de la conciliation est seule compétente pour connaitre de toute inexécution de l'accord et pour en prononcer la résolution ».L'alinéa 2 ajoute que si la résolution est prononcée, les créanciers recouvrent l'intégralité de leurs créances, déductions faites des sommes perçues. Il résulte de ces dispositions que les créanciers impliqués dans un accord amiable bénéficient d'un droit à résolution qui leur permet d'anéantir rétroactivement l'accord intervenu et d'engager des poursuites en recouvrement de leurs créances contre le débiteur qui n'exécute pas ses obligations contractuelles. Le droit à résolution de l'accord conclu entre débiteur et créanciers n'est pas en soi une nouveauté car il a été prévu également dans le cadre du règlement préventif92(*) et du redressement judiciaire93(*). Le Tribunal de grande instance de Wouri avait, par un jugement, prononcé la résolution d'un concordat conclu entre le débiteur et la majorité des créanciers94(*). Mais sur appel, la Cour d'appel avait annulé ce jugement de résolution et décidé que celui-ci « continue de produire son plein et entier effet » au motif que les prescriptions légales n'ont pas été respectées, notamment celles qui prévoient qu'en cas de cessation de paiements, un délai de trente (30) jours doit être accordé au débiteur pour faire une proposition de concordat, etqu'« aucun créancier, ni le représentant du ministère public, ni les commissaires aux comptes, ni ses représentants légaux ne sont à l'origine de la saisine du tribunal »95(*).L'intérêt d'évoquer cette protection des créanciers dans la conciliation découle de la place qu'elle occupe dans cette procédure qui est une innovation du droit OHADA des procédures collectives.

La résolution d'un contrat est régie par les règles prévues dans chaque Etat partie dans la limite de ses frontières géographiques. Au Sénégal, par exemple, c'est l'article 105 alinéa 1erdu Code des obligations civiles et commerciales, qui consacre la résolution d'un contrat pour inexécution. Cet article disposeque « dans les mêmes contrats, lorsque l'une des parties manque gravement à ses obligations en se refusant de les exécuter, en tout ou en partie, l'autre peut (...) demander en justice soit l'exécution forcée, soit la réduction de ses propres obligations, soit la résolution du contrat ».Cependant, on peut retrouver des régimes juridiques spécifiques relatifs à la résolution. C'est le cas de la résolution des accords destinés au sauvetage d'une entreprise.Ainsi, l'accord de conciliation peut faire l'objet de résolution suivant les règles de l'AUPC révisé.

Par ailleurs, les clauses de résolution peuvent être insérées dans l'accord de conciliation96(*), mais ne peuvent en aucun cas entrainer la résolution de plein droit. Dans cette hypothèse, la juridiction ou l'autorité compétente est la seule habilitée à prononcer la résolution de l'accord de conciliation. L'intervention de la justice fait donc échec au jeu de la « résolution de plein droit et sans sommation » prévue par le droit civil.

Etant en matière commerciale, l'action en résolution se prescrit par cinq (05) ans. C'est ce que prévoit l'acte uniforme relatif au droit commercial général (AUDCG) qui dispose en son article 16 alinéa 1er que « Les obligations nées à l'occasion de leur commerce entre commerçants, ou entre commerçants et non-commerçants, se prescrivent par cinq ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions plus courtes ». Cette règle prévoyant une prescription quinquennale a été reprise par le Code des obligations civiles et commerciales du Sénégal, en son article 22497(*) concernant les obligations à exécution successive.

Parce qu'elle emporte anéantissement rétroactif de l'accord, la résolution entraine la déchéance des délais de paiement accordés dans cet accord et le retour aux conditions d'exigibilité initiales des créances qui sont l'objet de l'accord98(*).En ce qui concerne les créances qui ne sont pas l'objet de l'accord, mais pour lesquelles le juge a octroyé un délai de grâce, le président de la juridiction compétente en présence d'un accord homologué, qui décide la résolution a un pouvoir d'appréciation au cas par cas, le sort des créances susceptibles d'être dissociées des créances visées explicitement dans l'accord.

Lorsque l'accord de conciliation contient un privilège de « new money », le juge doit veiller pour son homologation ou son exequatur, à ce que l'octroi de ce privilège ne porte pas atteinte aux intérêts des créanciers non parties à l'accord99(*). Le prononcé de la résolution d'un tel accord semble limité. En effet,le privilège accordé aux apporteurs de fonds nouveaux qui ont participé à l'accord ne tombe pas et profitera à ceux-ci,qui pourront faire valoir un rang prioritaire très favorable dans le cadre d'une procédure collective ultérieure éventuelle100(*).

Pour ce qui concerne les garants de l'exécution de l'accord, à savoir les coobligés ou des personnes qui avaient consenti, dans cet accord, une sûreté personnelle ou avaient affecté ou cédé un bien en garantie, l'AUPC révisé prévoit que ceux-ci peuvent se prévaloir de l'accord101(*). L'accord mettant fin à la procédure de conciliation, qu'il soit homologué ou simplement déposé au rang des minutes d'un notaire ou encore exequaturé, profite à ces garants. La question s'était longtemps posée de savoir si les cautions des dettes du débiteur bénéficiaient des stipulations de l'accord homologué. La réponse à cette question a été jusqu'à une certaine époque incertaine, une partie de la doctrine distinguant entre les remises de dettes et les délais de paiement102(*). La Cour de cassation française avait par la suite mis fin à ces incertitudes en rejetant toute altérité et en posant un principe très clair et favorable à la caution qui ne pouvait être traitée volontairement par le créancier plus sévèrement que le débiteur lui-même : les remises ou délais accordés par un créancier dans le cadre d'un règlement amiable bénéficient à la caution103(*).

Cela étant, le principe de l'indivisibilité de l'accord de conciliation et des sûretés consenties pour son acceptation par les créanciers revêt une portée tout à fait naturelle sur le terrain de la résolution de l'accord. En effet, s'il est admis que les garants puissent se prévaloir de l'accord de conciliation, la résolution de cet accord emporte-elle anéantissement des sûretés consenties ? La réponse à cette interrogation semble, à notre avis, affirmative pour deux raisons au moins. L'accord de conciliation est un contrat et obéit de ce fait aux règles générales de formation du contrat104(*). Dans le cadre d'une procédure de conciliation, la cause du cautionnement par exemple se trouve dans l'accord amiable dont il garantit l'exécution. Ainsi, la résolution de l'accord amiable correspondrait à la disparition rétroactive de la cause de la garantie qui était consentie. Il est logique qu'on admette que si la cause d'un contrat disparait, ce contrat aussi ne doit plus exister. En outre, par application du principe selon lequel, « l'accessoire suit le principal », les engagements du débiteur constituant le principal, s'ils disparaissent par l'effet de la résolution, les garanties qui l'accompagnaient' étant les accessoires,sont censées être caduques. Cette solution parait conforme à l'esprit des dispositions de l'Acte uniforme portant organisation des sûretés (AUS)105(*) OHADA.

L'idée selon laquelle les règles gouvernant la résolution de l'accord amiable sont favorables aux créanciers doit être nuancée. Elle peut être analysée comme regorgeant une incertitude. C'est le cas, par exemple, si la résolution de l'accord de conciliation débouche sur l'ouverture d'une procédure collective.Si l'accord amiable n'a pu être convenablement exécuté, c'est que le débiteur était déjà, probablement, en difficulté économique ou précisément, en cessation des paiements au moment de la conclusion de cet accord. En effet, le débiteur peut demander l'ouverture d'un règlement préventif ou d'un redressement judiciaire selon qu'il se trouve en état de cessation des paiements ou non106(*). Il n'est plus à démontrer la situation inconfortable dans laquelle les créanciers pourraient tomber dans cette hypothèse, les procédures collectives constituant un cadre très strict de discipline imposée à tous les créanciers antérieurs107(*).

Cependant, ne seront pas concernés les créanciers qui bénéficiaient, au titre de l'accord de conciliation, du privilège de l'argent frais. Ceux-ci, quant à eux, échapperont,dans une certaine mesure, à la discipline collective puisque leurs garanties sont maintenues. Toutefois, les créanciers dont le droit est né après l'homologation de l'accord résolu ne profiteront pas de la faveur évoquée ci-dessus. Dans ce dernier cas, la situation risque de compliquer la recherche de crédit après la mise en place du plan de redressement amiable108(*).

Dans tous les cas, le droit à résolution de l'accord de conciliation est à l'avantage des créanciers parce qu'il permet à ceux-ci de recouvrer leur droit de poursuite individuelle. Cette règle est aussi à l'avantage du débiteur car ellerevêt un caractère incitatif pour une meilleure exécution, par ce dernier, de l'accord de conciliation afin d'aboutir à son redressement. Ainsi, le droit à résolution reconnu aux créanciers parties à l'accord assure implicitement un certain équilibre entre les intérêts conflictuels en présence, même si ce droit, cache derrière lui, quelques faiblesses dans sa portée.

A côté de la procédure de conciliation qui vient revaloriser les droits des créanciers, les procédures simplifiées regorgent également quelques avantages pour ces derniers.

PARAGRAPHE2 : L'AVENEMENT DES PROCEDURES COLLECTIVES SIMPLIFIEES

Les procédures simplifiées sont des procédures collectives d'exception qui viennent alléger un peu le poids des procédures collectives de droit commun et comportent un caractère dérogatoire. Les procédures simplifiées ont un domaine d'application bien délimité (A) et sont d'un avantage temporel pour les parties en présence(B).

A- Le domaine d'application des procédures simplifiées

« Les procédures simplifiées », telle que leur appellation même l'indique, ne sont pas des procédures autonomes. Ce sont des procédures qui existaient déjà et que le législateur OHADA a jugé bon de simplifier dans la mesure du possible. Elles s'inscrivent dans le cadre du règlement préventif, du redressement judiciaire et de la liquidation des biens.

Le règlement préventif est ouvert au débiteur qui, sans être en cessation de paiements, justifie de difficultés financières ou économiques sérieuses109(*). Le redressement judiciaire, quant à lui, est une procédure qui est ouverte lorsque le débiteur, se trouvant en état de cessation des paiements, présente encore des chances d'être redressé, au moyen d'un accord avec ses créanciers, appelé concordat de redressement. Dans le cas où le débiteur en cessation de paiements se retrouve dans une situation irrémédiablement compromise, c'est-à-dire, ne peut plus être redressé, la loi prévoit la procédure de liquidation des biens. Cette dernière consiste à vendre les biens composant l'actif du débiteur pour désintéresser ses créanciers.

Ce sont les trois procédures sus évoquées que législateur a aménagées pour mettre en place les procédures simplifiées. Désormais, à côté de ces procédures, il est consacré le règlement préventif simplifié, le redressement judiciaire simplifié et la liquidation des biens simplifiée. Ces dernières forment le droit des procédures collectives d'exception au droit commun des procédures collectives que sont le règlement préventif, le redressement judiciaire et la liquidation des biens. Les procédures collectives simplifiées partagent les mêmes règles que ces dernières, sous réserves des dispositions dérogatoires qui leur sont consacrées.Ainsi, sont applicables dans les procédures collectives simplifiées, la constitution des créanciers en masse, la suspension et l'interdiction des poursuites individuelles, etc.

Les procédures collectives simplifiées ont vocation à s'appliquer aux petites entreprises au sens de l'article 1-3 AUPC révisé. Cet article définit clairement le champ d'application des procédures collectives simplifiées. En effet, il faut le rappeler, selon cet article, la « petite entreprise » est toute entreprise individuelle, société ou autre personne morale de droit privé dont le nombre detravailleurs est égal ou inférieur vingt (20), et dont le chiffre d'affaire ne dépasse pas cinquante millions (50 000 000) de francs CFA, hors taxes, au cours des (12) mois précédant la saisine de la juridiction compétente.

Sont exclues du champ d'application de la liquidation des biens simplifiée, les entreprises propriétaires d'un actif immobilier. Cette exclusion est liée au fait que la réalisation d'un immeuble exige des délais plus longs. La brièveté de la liquidation des biens simplifiée rend difficile une telle opération.

Chacune des catégories des procédures simplifiées est régie par des dispositions dérogatoires qui ont trait à la saisine de la juridiction compétente et au déroulement. Ce dernier point sera traité plus loin.

S'agissant du règlement préventif simplifié, il y a lieu de relever qu'il ne s'impose pas au débiteur et revêt de ce fait un caractère facultatif.Si le débiteur répond à la définition de petite entreprise, elle peut saisir la juridiction compétente par requête ou par requête conjointe avec un ou plusieurs de ses créanciers, déposée au greffe contre récépissé. Dans cette requête, le débiteur expose ses difficultés financières ou économiques et les perspectives de redressement de l'entreprise et d'apurement du passif. Parmi les documents qui doivent accompagner la requête110(*), le projet de concordat préventif qui devait, en droit commun, être déposé en même temps que la requête, peut faire l'objet d'un dépôt ultérieur lorsque le débiteur demande l'ouverture d'un règlement préventif simplifié.L'acceptation d'un dépôt ultérieur du projet de concordat préventif participe toujours à faciliter aux petites entreprises l'accès au règlement préventif111(*). La qualité de l'offre de concordat requiert le recours à des compétences telles que celles des experts-comptables112(*), etc. En plus, le demandeur de l'ouverture ou de l'application de cette procédure simplifiée doit conjointement avec sa requête produire une attestation sur l'honneur attestant qu'il remplit les conditions d'application exigées.

En ce qui concerne le redressement judiciaire et la liquidation des biens, le débiteur remplissant les conditions d'application de la procédure simplifiée, saisit la juridiction compétente à travers une déclaration prévue aux articles 25 et 26 AUPC révisé en tenant compte des dérogations accordées aux petites entreprises113(*). En effet, l'article 25 alinéa 3 dispose que « le débiteur qui est en cessation des paiements doit faire une déclaration aux fins de l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire ou de liquidation des biens quelle que soit la nature de ses dettes ». Cette déclaration qui était quasi exclusivement utilisée comme mode de saisine dans le cadre de procédure de sauvetage, est devenue de plus en plus celui utilisé par les débiteurs pour demander la liquidation des biens. La fréquence de l'usage de la déclaration de cessation des paiements comme mode de saisine de la juridiction compétente pour demander plus la liquidation des biens plutôt que le redressement judiciaire apparait clairement dans la jurisprudence des Etats parties de l'OHADA. En effet, dans un jugement du 9 février 2022114(*), le Tribunal de commerce de Lomé, saisi par une entreprise,a déclarée celle-ci en cessation des paiements par jugement n° 0113/20 du 24 févier 2020 et fixé la date de la cessation des paiements au 19 décembre 2020. Se fondant sur l'article 145 AUPCrévisé relatif au redressement judiciaire simplifié, les juges du fond ont déclaré recevable la requête pour prononcer la clôture de la liquidation des biens de la Société SINEQUANON SARL pour insuffisance d'actif.

Un autre jugement rendu par la même juridiction prononce la liquidation des biens de la Société GMT SHIPPING SA après avoir constaté la cessation des paiements de celle-ci, alors que la requête a été introduite sur le fondement de l'article 145 relatif au redressement judiciaire simplifié115(*). En l'espèce, la Société GMT SHIPPING semble répondre à la qualification de « petite entreprise » car il peut être déduit du jugement en cause qui vise l'article 145 AUPC révisé, lequel dispose que « La procédure de redressement judiciaire simplifiée est soumise aux règles applicables au redressement judiciaire sous réserve des dispositions de la présente sous-section ». Le caractère simplifié de la procédure en cause se manifeste aussi dans les documents qui ont accompagné la requête du débiteur car le nombre de ceux-ci est réduit au minimum nécessaire.

Le domaine d'application des procédures simplifiées étant passé en revue, il convient d'aborder l'avantage qu'elles offrent aux créanciers, qui, très souvent, sont impatients dans le recouvrement de leurs créances en vue de satisfaire, à leur tour, les partenaires envers qui ils ont pris des engagements.

B- L'avantage temporel des procédures simplifiées

Pour rappel, les procédures collectives de droit commun telles que conçues sont lourdes, empreintes d'une certaine lenteur et sont de nature à impacter négativement la situation des créanciers. Elles permettent, en pratique, difficilement le sauvetage du débiteur116(*) qui, dans la majorité des cas, se retrouve en état irréversible conduisant à la liquidation des biens. Pour remédier à cela, le législateur OHADA a tenté de donner aux procédures collectives une certaine portion de rapidité qui consiste en la simplification des procédures et en la réduction des délais de quelques formalités jugées trop longues et préjudiciables aux créanciers.

En effet, par principe, la requête aux fins d'ouverture d'un règlement préventif doit contenir le projet de concordat préventif au moment de la saisine de la juridiction compétente. Cette exigence résulte de l'article 6 alinéa 3 AUPC révisé, qui dispose que « dans la requête, le débiteur expose (...) les perspectives de redressement de l'entreprise et d'apurement de son passif ». Le dépôt du projet de concordat préventif est donc principiellement appelé à être effectué en même temps que l'introduction de la requête. La même règle s'observe également à travers les dispositions de l'article 6-1 alinéa 1er,treizièmement de l'AUPC révisé. Il découle in fine de cet article que « la requête du débiteur est accompagnée des documents suivants, datant de moins de trente (30) jours : (...) un projet de concordat préventif ».Mais dans un souci d'allègement et de simplification de cette procédure et dans le cadre des « petites entreprises », le législateur admet la possibilité d'une soumission de la requête aux fins d'ouverture de règlement préventif sans la fourniture concomitante du projet de concordat préventif117(*). Il s'agit ainsi d'une nouveauté qui n'existait pas dans l'AUPC du 10 avril 1998. Cette innovation de l'acte uniforme est justifiée par le souci d'aller plus vite et d'économiser le temps. En effet, le projet de concordat préventif nécessite pour son élaboration des études et analyse de la situation du débiteur et des négociations avec les créanciers. Attendre que les négociations, qui peuvent prendre encore du temps, aboutissent à un accord avant d'introduire la requête en vue de l'ouverture du règlement préventif peut conduire le débiteur en cessation des paiements et même à la perte pour les créanciers d'un partenaire d'affaires qui aurait pu être sauvé si on avait agi plus tôt. Certes, l'introduction de la requête aux fins d'ouverture d'un règlement préventif, qui intervient plus tôt, limite les poursuites individuelles des créanciers dont les créances sont arrivées à échéance et donc exigibles. Maiselle n'aggrave pas la situation du débiteur avant la saisine de la juridiction compétente. Pour le législateur OHADA, il faut donc permettre au débiteur de soumettre sa requête en demande de l'ouverture du règlement préventif, sans que celui-ci soit obligé de déposer simultanément le projet de concordat préventif. Le règlement préventif simplifié vient ainsi renforcer les chances de sauvetage du débiteur tout en maintenant la philosophie de cette procédure qui est d'éviter la cessation des paiements de l'entreprise du débiteur.

Il faut noter toutefois que le débiteur doit fournir conjointement à sa requête une attestation sur l'honneur attestant qu'il remplit les conditions d'application du règlement préventif simplifié.

La recherche d'aller plus vite dans le règlement préventif se manifeste dans l'exclusion des voies de recours contre la décision d'application du règlement préventif simplifié118(*). Cette règle est logique dans la mesure où l'admission d'une voie de recours contre cette décision est de nature à retarder la procédure de sauvetage.

On note aussi une simplification du contenu du projet de concordat préventif. En effet, le projet de concordat préventif précise, en principe, les « mesures envisagées pour le redressement de l'entreprise notamment :

- Les modalités de continuation de l'entreprise, telles que la demande de délais et de remises, la cession partielle d'actif avec indication précise des biens à céder ; la cession ou la location-gérance d'une branche d'activité formant un fonds de commerce ; la cession ou la location-gérance de la totalité ou d'une partie de l'entreprise, sans que ces modalités soient limitatives et exclusives les unes des autres ;

- Les noms, prénoms, qualités et adresses des personnes tenues d'exécuter le concordat préventif et l'ensemble des engagements souscrits par elles et nécessaires au redressement de l'entreprise ;

- Les modalités du maintien et du financement de l'entreprise, du règlement du passif né antérieurement à la décision d'ouverture du règlement préventif ainsi que, s'il y a lieu, les garanties fournies pour en assurer l'exécution ; ces engagements et garanties peuvent consister, notamment, en la souscription d'une augmentation du capital social par les anciens associés ou par de nouveaux, une conversion de créances en capital, l'ouverture de crédits par des établissements bancaires ou financiers ou par toute autre personne, y compris tout nouvel apport en trésorerie ou sous forme de nouveau bien ou service dans les conditions de l'article 11-1 ci-dessous ainsi que le montant de l'apport ou valeur du bien ou du service ; la poursuite de l'exécution de contrats conclus antérieurement à la requête, la fourniture de cautions ;

- Le niveau et les perspectives d'emploi, ainsi que les licenciements pour motif économique qui doivent intervenir dans les conditions prévues par les dispositions du droit du travail ;

- Le remplacement de dirigeants »119(*).

Cette liste des informations devant être précisées dans le projet de concordat préventif, introduite par l'adverbe « notamment », indique qu'elle n'est pas limitative. Elle peut donc inclure d'autres mesures et perspectives de redressement de l'entreprise non mentionnées dans les dispositions de l'article précité.

Dans le règlement préventif simplifié, ce contenu du concordat préventif a été simplifié. Il peut être désormais limité « aux mesures et conditions envisagées pour le redressement de l'entreprise débitrice, notamment les modalités d'apurement du passif et en particulier, la demande de délais et de remises, les personnes tenues d'exécuter le concordat préventif, ainsi que, s'il ya lieu, les garanties fournies pour en assurer l'exécution »120(*).De cette disposition, il résulte donc que la liste des contenus du projet de concordat préventif n'est pas toujours exhaustive, mais considérablement réduite. Ce qui est nécessaire, c'est que ce projet doit présenter au moins des preuves de viabilité du débiteur121(*).La participation de l'expert à l'élaboration du projet de concordat préventif est, dans une certaine mesure, une garantie pour le respect des droits des créanciers et facilite la rapidité voulue par le législateur, le débiteur bénéficiant donc d'une expertise et n'étant pas seul à agir122(*).

Outre cette simplification dans la saisine de la juridiction compétente pour l'ouverture d'un règlement préventif, le législateur OHADA a procédé à la réduction des délais des articles 9 alinéa 1er et 13 alinéa 2 de l'acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif. L'article 9 alinéa 1er AUPC révisé prévoit que la durée de la suspension ou de l'interdiction des poursuites individuelles tendant à obtenir le paiement des créances nées antérieurement à la décision d'ouverture du règlement préventif est de trois (03) mois et prorogeable d'un (01) mois. Quant à l'article 13 alinéa 2, l'expert au règlement préventif doit établir son rapport dans la même durée, laquelle est prorogeable, à titre exceptionnel, d'un (01) mois sur décision motivée du président de la juridiction compétente à la demande du débiteur. Ces délais de trois (03) mois et un (01) mois des articles 9 alinéa 1er et 13 alinéa 2 sontrespectivement réduits à deux (02) mois et quinze (15) jours123(*). Il résulte de ces différentes dispositions une amélioration de la situation des créanciers dont les droits apparaissent entravés pour ne pas dire brimés dans le cadre de cette procédure collective visant à éviter la cessation des paiements du débiteur.

Dans le redressement judiciaire simplifié, le débiteur n'est pas obligé de fournir dans sa déclaration124(*) certains documents exigés par les dispositions de l'article 26 AUPC révisé125(*). C'est le cas lorsque lesdits documents ou informations sollicitées n'existent pas ou sont difficiles à obtenir. Dans pareille hypothèse, le débiteur peut fournir dans sa déclaration d'autres documents susceptibles de prouver sa condition économique ou financière. Le délai de soixante jours pour déposer le projet de concordat de redressement judiciaire est réduit à quarante-cinq (45) jours dans le cadre du redressement judiciaire simplifié126(*). Le syndic concourt à l'élaboration dudit projet de concordat. La procédure de redressement se trouve ainsi assouplie et la durée des sacrifices imposés aux créanciers est écourtée. A l'instar du contenu du projet de concordat préventif, le projet de concordat de redressement judiciaire est limité au strict minimum, à savoir des délais de paiements et des remises de dettes127(*). La décision d'appliquer le redressement judiciaire simplifié n'est tout de même susceptible d'aucune voie de recours128(*).

Parallèlement à la tentative de revalorisation de la place des créanciers dans le sauvetage des entreprises, le législateur OHADA n'a pas manqué de remodeler certaines dispositins du texte originel régissant les procédures collectives d'apurement du passif en vue de renforcer peu ou prou la protection des intérêts des créanciers.

SECTION II : UNE TENTATIVE DE REVALORISATION DE LA PROTECTION DES CREANCIERS PAR REMODELAGE DES PROCEDURES EXISTANTES DANS L'AUPC DE 1998

La tentative de revalorisation de la protection des créanciers dans le sauvetage des entreprises s'est manifestée, non seulement par la consécration de nouveaux types de procédures, mais aussi par diverses modifications apportées à l'AUPC originel adopté le 10 avril 1998. Ce remodelage qui a été au centre de la révision de 2015 concerne l'intervention de différents organesdans les procédures collectives (paragraphe 1) et autres dispositions de l'AUPC de 1998 (paragraphe 2).

PARAGRAPHE 1: LE REMODELAGE RELATIF A L'INTERVENTION DES ORGANES DES PROCEDURES COLLECTIVES

Les créanciers ont vu leur situation être positivement revalorisée à travers l'encadrement de l'intervention des mandataires judiciaires (A) et une amélioration de la place accordée particulièrement aux créanciers contrôleurs (B).

A- L'encadrement de l'intervention des mandataires judiciaires

Jusqu'à sa révision en 2015, l'AUPC du 10 avril 1998 laissait apparaitre des failles qui étaient préjudiciables aux créanciers du débiteur bénéficiant de l'ouverture d'une procédure collective. En effet, par exemple, l'expert au règlement préventif jouissait, en pratique, d'une certaine liberté dans l'exercice de sa mission. Cette liberté octroyée à l'expert en règlement préventif était source de plusieurs abus contre les créanciers dont les créances sont nées antérieurement à l'ouverture du règlement préventif. Il s'agissait en effet du détournement de la procédure avec la complicité du débiteur à des fins frauduleuses, du dépôt tardif du rapport de l'expert129(*). Les défaillances ainsi évoquées découlaient des lacunes que regorgeait la règlementation de cette procédure préventive sous l'empire de l'AUPC de 1998. En effet, l'expert au règlement préventif avait l'obligation de déposer en double exemplaire, son rapport contenant le concordat préventif proposé par le débiteur ou conclu entre lui et ses créanciers, dans les deux (02) mois de sa saisine, au plus tard, sauf autorisation motivée du président de la juridiction compétente de proroger ce délai d'un (01) mois130(*). Mais dans la pratique, ce délai n'était pas respecté dans la majorité des cas.

Cette disposition rendait maître le débiteur, qui avait la possibilité de faire échec aux poursuitesindividuelles de certains créanciers en demandant l'ouverture d'un règlement préventif, parfois même en étant déjà dans une situation irrémédiablement compromise. Le débiteur avait le pouvoir de désigner dans sa requête les créanciers envers lesquels il voudrait voir les suspensions des poursuites individuelles s'appliquer en organisant des scénarii.

L'absence d'un statut des mandataires judiciaires avait montré des conséquences fâcheuses. Ces dernières consistaient en la violation de plusieurs dispositions de l'AUPC relatives au règlement préventif. On pouvait relever le non-respect du délai de dépôt du rapport de l'expert, qui était de deux (02) mois prorogeable d'un (01) mois au greffe de la juridiction compétente. Le retard dans le dépôt par l'expert de son rapport prolongeait de façon exagérée la durée des suspensions et interdictions des poursuites individuelles et des sacrifices des créanciers. Cet état de fait était de nature à conduire les créanciers dans des difficultés économiques car il fallait recouvrer leurs créances pour payer ensuite leurs propres dettes à l'égard de leurs fournisseurs ou partenaires d'affaires.

Cette situation excessive que devraient subir les créanciers s'illustre bien dans deux décisions rendues par des juridictions nationales. En effet, la question de la suspension prolongée des poursuites individuelles s'est posée devant les juridictions ivoiriennes dans l'affaire Nordisk c/ Haidar Bois Exotique. Dans cette affaire, l'expert désigné dans le cadre d'un règlement préventif n'avait pas déposé son rapport pendant dix mois après sa désignation au lieu de trois mois131(*). En l'espèce, Nordisk, créancière, avait saisi le Tribunal pour obtenir annulation de l'ordonnance des suspensions des poursuites individuelles, demande qui lui a été refusée. Un appel a été interjeté contre le jugement du tribunal. La Cour d'appel estimait que les dispositions de l'article 8 et 13-2 anciens ne permettaient pas que le délai imparti à l'expert pour déposer son rapport, excède la durée légale de trois mois132(*). Ainsi, le recours de Nordisk aux fins d'annulation de cette ordonnance a pour conséquence de faire perdurer sa situation inconfortable due à cette décision. Le créancier se retrouverait, de ce fait, victime d'une insécurité juridique et financière pouvant le conduire à l'ouverture, contre lui, d'une procédure collective préventive ou même à sa disparition. L'inobservation du délai de dépôt du rapport s'était produite également dans un autre cas. Il s'agit de l'affaire STA Mali133(*).

Pour remédier à ces abus, le législateur a inscrit, parmi ses solutions, l'encadrement de l'intervention des mandataires judiciaires en matière des procédures collectives. Le mandataire judiciaire est « un acteur spécifique » à une procédure collective.

En France, jusqu'en 1985, les créanciers du débiteur dont le droit était antérieur à l'ouverture d'une procédure collective, étaient regroupés automatiquement par la loi en une masse, groupement doté d'un patrimoine et de la personnalité morale et représenté par le syndic, chargé de la défense de leur intérêt collectif134(*). Si la notion de masse a été supprimée en France, cette suppression n'a pas emporté celle du mandataire judiciaire qui reste un représentant des créanciers.

En Afrique, le droit OHADA a, quant à lui, maintenu la notion de masse et celle de mandataire judiciaire. Ce dernier est un acteur important qu'il a été consacré, pour lui, tout un titre, le tout premier d'ailleurs, dans l'AUPC révisé135(*). Chaque Etat adopte, en tant que de besoin, les règles d'application des dispositions de ce titre. Il prévoit, selon les modalités appropriées, la régulation et la supervision des mandataires judiciairesagissant sur son territoire, au besoin en mettant en placeà cet effet une autorité nationale dont il fixe l'organisation, la composition et le fonctionnement136(*).

Sont des mandataires judiciaires au sens de l'AUPC révisé, les experts en règlement préventif et les syndics de redressement judiciaire et de liquidation des biens137(*).Le législateur OHADA a déterminé dans l'AUPC révisé les conditions d'accès et d'exercice de la fonction de mandataire judiciaire, leurs obligations et responsabilité, ainsi que la question de la rémunération.

Une lecture des dispositions consacrées aux mandataires judiciaires, permet de relever plusieurs éléments comme des solutions aux défaillances qui étaient constatées dans la conduite des procédures collectives et évoquées plus haut. En effet, il a été soulevé que parmi les causes des dérives des mandataires judiciaires, il y avait lieu de citer non seulement l'absence d'un statutrèglementant cette fonction, mais aussi précisément l'absence des sanctions en l'encontre du mandataire qui ne respecte pas ses obligations138(*), notamment le délai de dépôt de son rapport par l'expert au règlement préventif.

Le législateur propose des solutions plus globales à l'égard de ces dérives. En effet, l'accès à la fonction de mandataire judiciaire est soumis à des exigences relatives à la qualité professionnelle du candidat, à sa moralité, celui-ci devant s'inscrire sur la liste nationale des mandataires judiciaires139(*). Dans ce sens, le candidat doit être un expert-comptable ou toute autre professionnel habilité par chaque Etat, avoir le plein exercice de ses droits civils et civiques, n'avoir subi aucune sanction disciplinaire autre que l'avertissement ou une condamnation à des peines privatives de liberté pour un crime de droit commun, ou à une peine d'emprisonnement d'au moins trois mois, non assortie de sursis, et en cas de délit contre des biens ou une infraction en matière économique ou financière qui est incompatible avec l'exercice de la fonction de mandataire judiciaire140(*).

L'exigence de la présentation, par le candidat à la fonction de mandataire judiciaire, des garanties de son indépendance, impartialité et de neutralité141(*) justifie la volonté du législateur OHADA d'assurer une bonne exécution de la mission dévolue à cet auxiliaire de justice. Pour faciliter l'existence de ces garanties, il est prévu que « ne peuvent être mandataire judiciaire dans une procédure, les parents ou alliés du débiteur jusqu'au quatrième degré inclusivement, toute personne physique en relation d'affaires, de subordination ou même de conflit avec le débiteur ou les créanciers »142(*).

La solution la plus énergique pour empêcher les abus des mandataires judiciaires est la consécration de dispositions édictant des bases juridiques de leur sanction. En effet, le mandataire qui pose des actes contraires à la probité, à l'honneur ou à la délicatesse s'expose à des poursuites disciplinaires sur une période allant jusqu'à trois ans à compter de la découverte des faits143(*).Les sanctions disciplinaires peuvent aller de l'avertissement au blâme, à la suspension provisoire, à l'interdiction provisoire et la radiation de la liste des mandataires judicaires144(*).

En dehors des sanctions disciplinaires, le mandataire judiciaire peut faire l'objet de poursuite en responsabilité civile145(*) devant la juridiction compétente statuant en matière de procédures collectives146(*) ou en responsabilité pénale147(*). En France, la chambre commerciale de la Cour de cassation avait admis la responsabilité civile d'un mandataire judiciaire, en l'espèce, un liquidateur pour faute d'omission148(*). Il ressort du dispositif de cette décision une censure de l'arrêt d'appel « seulement en ce qu'il avait déclaré irrecevable la demande de la société Bati Lease en paiement de dommages-intérêts au titre de la perte de valeur vénale de l'immeuble fondée sur le défaut de restitution des lieux et la dégradation de l'immeuble après la décision du liquidateur de ne pas poursuivre le crédit-bail » et « en ce qu'il avait rejeté la demande de dommages-intérêts de la société Bati Lease en réparation de la perte de valeur vénale de l'immeuble en raison de l'absence de réaction du liquidateur à la défaillance de la société Alfagomma et aux propositions alternatives de reprise du site ». Pour la Cour de cassation, les juges d'appel devaient rechercher si l'inaction du liquidateur n'était pas fautive, ce que ceux-ci n'avaient pas fait.

L'action en responsabilité civile contre le mandataire judiciaire se prescrit par l'écoulement d'un délai de trois ans à compter de la clôture de la procédure ou de la fin de l'exécution du concordat149(*).

Cette règlementation de l'intervention des mandataires permet d'éviter les abus connus sous le règne de l'AUPC de 1998, d'assurer le déroulement des procédures collectives dans des délais très courts prévus par le texte révisé et le respect de ces délais. Ce qui est avantageux pour les créanciers antérieurs. Ils sont plus ou moins protégés contre les risques de détournement des procédures.

A côté de l'amélioration apportée aux conditions des créanciers par la mise en place d'un véritable statut des mandataires judiciaires, les créanciers contrôleurs bénéficient d'une place qui a connu une avancée dans la révision de l'AUPC.

B- L'avancée de la place des contrôleurs

Le contrôleur n'est pas expressément défini par l'AUPC révisé. Cependant, en tant qu'organe des procédures collectives, il peut être défini à travers le rôle qu'il joue. En effet, il faut d'entrée relever que le contrôleur est nécessairement un créancier150(*) du débiteur en procédure collective. Il est un créancier nommé par le juge-commissaire en vue d'assister celui-ci dans sa mission de surveillance du déroulement de la procédure collective et de veiller aux intérêts des créanciers151(*). A ce titre, la loi leur réserve une place principale dans leur rôle de surveillance et de contrôle de l'exécution du concordat de redressement. Entre les contrôleurs et le syndic, il n'y pas une relation de compétitivité, mais une complémentarité. Car le dispositif précise que lasurveillance de l'exécution du concordat est exercée par les contrôleurs, àdéfaut d'eux, par le syndic152(*). Il en découle donc que les contrôleurs constituentl'organe principal et le syndic l'organe subsidiaire.

L'institution des créanciers contrôleurs trouve son origine dans la pratique en matière commerciale. Ce type de créanciers a été introduit pour la première fois en droit français par une loi du 4 mars 1889 sur la liquidation judiciaire, qui déclarait l'institution également applicable à la faillite. Les contrôleurs sonttraditionnellement des créanciers volontaires et bénévoles, chargés de certaines missions et investies de certaines prérogatives dans les procédures collectives153(*). La redécouverte de cette institution ancienne, qui subsistait dans les textes mais était tombée en désuétude, est due à la réforme française du 10 juin 1994 qui a vu un moyen de renforcer, assez peu, les droits des créanciers154(*).

Le législateur OHADA s'est aussi aligné sur la voie de son homologue français en prévoyant dans la règlementation des procédures collectives curatives, une section relative aux créanciers contrôleurs. L'AUPC du 10 avril 1998 prévoyait leur mode de désignation, les conditions d'accès à la qualité de contrôleur, les incompatibilités avec la qualité de contrôleur et leur mission dans les procédures collectives. En effet, aux termes de l'article 48 alinéa 1erde l'AUPC, « A toute époque, le juge-commissaire peut nommer un ou plusieurs contrôleurs choisis parmi les créanciers, sans que leur nombre puisse excéder trois. Toutefois, la nomination de contrôleurs est obligatoire à la demande des créanciers représentant au moins, la moitié du total des créances même non vérifiées155(*). Dans ce cas, le juge-commissaire désigne trois contrôleurs choisis respectivement parmi les créanciers munis de sûretés réelles spéciales156(*)mobilières ou immobilières, les représentants du personnel et les créanciers chirographaires »157(*). Il résulte de ces dispositions que le nombre de contrôleurs ne peut dépasser trois personnes et que par principe la désignation de ceux-ci est facultative. La nomination de contrôleurs devient obligatoire lorsque la demande est faite par des créanciers représentant au minimum la moitié du total des créances. Dans cette dernière hypothèse, les trois contrôleurs sont désignés de telle sorte qu'il y ait un contrôleur par catégories de créanciers que sont des créanciers munis de sûretés réelles spéciales, celle des représentants des salariés et celle des créanciers chirographaires.

Pour moraliser les procédures collectives et assurer la protection des intérêts des créanciers, il est prévu à l'article 48 alinéa 4 ancien de l'AUPC qu'aucun parent ou allié du débiteur ou des dirigeants de la personne morale, jusqu'au quatrième degré inclusivement, ne peut être nommé contrôleur ou représentant d'une personne morale désignée comme contrôleur.

Avec la réforme de 2015 qui s'est inspirée de la loi française du 26 juillet 2005, il y a eu une revalorisation de la protection des créanciers à travers un renforcement des pouvoirs des contrôleurs. En premier lieu, le nombre des contrôleurs est monté à cinq158(*) au lieu de trois comme auparavant. Ces contrôleurs sont désignés parmi les créanciers non-salariés159(*). La nomination des contrôleurs n'est pas obligatoire à l'instar de l'ancienne disposition, mais elle devient obligatoire dans un délai d'un mois à compter de la décision d'ouverture et à la demande des créanciers représentant au moins un tiers du total des créances même non vérifiées. Cette dérogation au caractère facultatif de la désignation de contrôleurs regorge une nouveauté en ce sens qu'elle est limitée dans le temps, soit un mois suivant la date d'ouvertureet exige un nombre de demandeurs réduit à un tiers du total des créances. Ce qui rend plus facile la désignation des contrôleurs en vue de défendre les intérêts des créanciers.

A l'expiration du délai d'un mois, tout créancier peut demander à être nommé contrôleur, mais toujours dans la limite de cinq contrôleurs.

En cas de pluralité de demandes, la règle demeure la même que dans l'ancien article 48 AUPC. Ainsi, le juge-commissaire veille à ce qu'au moins un contrôleur soit nommé parmi les créanciers munis de sûretés et un autre parmi les créanciers chirographaires. Par ailleurs, il est également possible de désigner un contrôleur parmi les salariés et qui pourrait être assimilé à une sorte de représentant des salariés distinct des pouvoirs accordés au comité d'entreprise ou aux délégués du personnel.

Il a été également procédé au renforcement des incompatibilités des contrôleurs. En plus des incompatibilités évoquées dans l'ancien article 48 AUPC, le législateur OHADA prévoit désormais que « ni aucune personne détenant directement ou indirectement tout ou partie du capital social ou des droits de vote de cette même personne ne peut être nommé contrôleur ou représentant d'une personne morale désignée comme contrôleur ».

Dans un autre sens, l'alinéa 3 du nouvel article 48 prévoit son application aux personnes exerçant une profession libérale160(*) telle que la profession d'avocat, de dentiste, médecin, etc. Il a été jugé plus judicieux que l'ordre professionnel ou l'autorité compétente dont relèvent les personnes exerçant la profession libérale soit nommé contrôleur.

Les créanciers contrôleurs ont toujours le droit de vérifier la comptabilité et l'état de la situation présentés par le débiteur, de demander compte de l'état de la procédure, des actes accomplis par le syndic ainsi que des recettes faites et des versements effectués. Ils sont obligatoirement consultés pour la continuation de l'entreprise au cours de la procédure de vérification des créances et à l'occasion de la réalisation des biens du débiteur en cas de liquidation des biens et ils peuvent saisir de toutes contestations le juge-commissaire161(*).

Ainsi se trouve renforcé le rôle des créanciers dans les procédures collectives à travers l'accroissement de leur implication dans l'atteinte de l'objectif de sauvetage des entreprises en matière du redressement judicaire.De ce fait, un auteur relève qu'« On peut théoriquement, sur la base de l'article 49, soutenir que le contrôle des créanciers, sur le bon déroulement des procédures, est réel à l'observation du volume des missions »162(*).

En tout état de cause, le contrôle de l'exécution du concordat de redressement d'uneentreprise en difficulté par un créancier, qu'il soit une personne physique ou personnemorale, peut toujours se révéler primordial dans la mesure où il faut réduire aumaximum l'opacité qui entoure les procédures concernant les entreprises163(*). Cette impression d'opacité serait renforcée par le fait que beaucoup decréanciers ne connaissent pas les étapes de la procédure, ce qui les conduirait àune attitude de soupçon généralisée164(*).

En dehors de l'encadrement de l'intervention des mandataires judiciaires et de l'implication des contrôleurs dans les procédures de sauvetage, les intérêts des créanciers bénéficient d'une protection assurée par la révision de 2015 à travers des modifications d'autres dispositions de l'AUPC originel.

PARAGRAPHE 2 : LA REVUE DE LA SITUATION DES CREANCIERS A TRAVERS LA MODIFICATION D'AUTRES DISPOSITIONS

Seront essentiellement abordées, les modifications relatives à l'ouverture des procédures collectives (A) et la particulière amélioration de la situation de certaines catégories de créanciers (B).

A- Les modifications relatives à l'ouverture des procédures collectives

Pour tenter de revaloriser la prise en compte des intérêts des créanciers dans les procédures de sauvetage des entreprises, plusieurs modifications textuelles sont intervenues en matière d'ouverture des procédures prévues par l'AUPC. Ces modifications concernent, entre autres, l'élargissement du périmètre des personnes sujettes à l'ouverture des procédures collectives et un renforcement de l'implication des créanciers dans l'ouverture des procédures.

L'AUPC du 10 avril 1998 s'appliquait, au titre des trois procédures qu'il régissait, à toute personne commerçante, à toute personne morale de droit privé et à toute entreprise publique ayant la forme d'une personne morale de droit privé. Ainsi, ce texte originel limitait les procédures collectives aux seules personnes physiques commerçantes. Or, les personnes physiques s'investissent de plus en plus dans les domaines autres que le commerce tel que l'immobilier et la construction. Le domaine de l'immobilier et de la construction représentent des domaines civils qui occupent une place non négligeable dans le secteur économique165(*). Cette limitation du champ des personnes pouvant bénéficier des procédures collectives s'était avérée peu satisfaisante et catastrophique pour les créanciers en raison de l'absence d'organisation de la déconfiture166(*). Avec l'AUPC révisé, « toute personne physique exerçant une activité professionnelle indépendante, civile, artisanale ou agricole » peut demander l'ouverture d'une procédure parmi celles qui sont prévues par le législateur OHADA167(*). C'est dire que l'innovation ne concerne que les personnes physiques168(*).

Sous l'empire de l'AUPC de 1998, il y a lieu de relever que les créanciers étaient quasiment absents dans l'ouverture des procédures préventives. En effet, en matière de règlement préventif, seul le débiteur, qui remplissait les conditions fixées par la loi, avait l'initiative d'une demande aux fins d'un jugement déclaratif ouvrant un règlement préventif. Ainsi, la juridiction compétente était saisie par requête du débiteur exposant sa situation économique et financière et représentant les perspectives de redressement de l'entreprise et d'apurement du passif169(*). Le débiteur agissait unilatéralement et avait la latitude de choisir les créanciers à l'égard desquels il voulait obtenir des suspensions depoursuites individuelles170(*). Il pouvait masquer sa situation économique réelle et utiliser le règlement préventif comme un moyen de fraudes aux droits des créanciers171(*). Ainsi, les créanciers étaient soumis contre vents et marées, selon le gré du débiteur, ce qui était de nature à plonger ceux-ci en difficultés vis-à-vis de leurs propres créanciers. En termes plus clairs, les créanciers partenaires du débiteur ont besoin de recouvrer le montant de leurs créances pour pouvoir faire face à leurs diverses charges et obligations dans le cadre de leurs affaires. C'est un système circulaire qui peut subir l'effet de contamination des difficultés économiques si une seule entreprise du système se retrouve en cessation des paiements.

Pour redonner une place aux créanciers dans la politique de sauvetage des entreprises, le législateur a procédé à une réorganisation de l'ouverture du règlement préventif. De nouvelles conditions de formes de l'ouverture d'un règlement préventif ont été adoptées. Parmi ces conditions, la saisine de la juridiction compétente est désormais prévue par l'article 6 AUPC révisé. Selon l'alinéa 2 dudit article, la requête aux fins d'ouverture du règlement préventif peut être introduite soit par le débiteur agissant seul, soit agissant conjointement avec un ou plusieurs créanciers. Ce qui facilite le contact du débiteur avec ses créanciers en une période difficile de son existence et favorise l'ébauche d'un accord concordataire avec ceux-ci. Le ou les créanciers qui participent à l'ouverture du règlement préventif disposent mieux des informations leur permettant d'anticiper sur les conséquences du retard de paiement dont ils seront à coup sûr victimes et de prendre des mesures idoines pour pouvoir honorer leurs propres engagements envers leurs créanciers.

En matière de redressement judicaire et de liquidation des biens, le débiteur conserve l'initiative de l'ouverture des procédures. C'est l'article 25 alinéa 3 et 4 qui fixe les conditions de saisine de la juridiction compétente. En effet, aux termes de l'alinéa 3 de cet article, le débiteur qui est en cessation des paiements doit faire une déclaration aux fins d'obtenir l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire ou de liquidation des biens quelle que soit la nature de ses dettes. L'alinéa 4 ajoute que cette déclaration doit être faite par le débiteur dans un délai bien défini. Le seul changement réside dans la définition de l'expression « cessation des paiements »172(*). En effet, l'ancien article 25 considérait la cessation des paiements comme « l'impossibilité de faire face à son passif exigible avec son actif disponible. Avec la nouvelle écriture de l'article 25 alinéa 2 AUPC, « La cessation des paiements est l'état où le débiteur se trouve dans l'impossibilité de faire face à son passif exigible avec son actif disponible, à l'exclusion des situations où les réserves de crédit ou les délais de paiement dont le débiteur bénéficie de la part de ses créanciers lui permettent de faire face à son passif exigible ». La nouvelle définition tient compte lege ferenda de la théorie de la réserve de crédit consentie par certains créanciers et largement prise en compte par la jurisprudence internationale.

A titre d'exception et à l'instar de l'article 28 alinéa 1er de l'AUPC originel, la nouvelle formulation prévoit que la procédure collective peut être ouverte sur la demande d'un créancier, quelle que soit la nature de sa créance, pourvu qu'elle soit certaine, liquide et exigible.Cette règle permet d'éviter l'ouverture d'une procédure sur le fondement de créances contestables, à terme non échu ou dont le montant n'est pas déterminé. La saisine par les créanciers aux fins d'ouverture de la procédure de redressement judiciaire ou de liquidation des biens s'effectue par voie d'assignation et non de requête. Ce qui appelle l'intervention d'un huissier de justice173(*).

L'implication améliorée des créanciers dans l'ouverture des procédures de sauvetage des entreprises s'accommode bien avec la philosophie du législateur OHADA qui veut préserver les activités économiques et maintenir les emplois dans son espace géographique.

La tentative de revalorisation de la situation des créanciers ne se limite pas à l'implication accrue de ceux-ci dans l'ouverture des procédures collectives. Elle concerne certaines catégories de créanciers qui jouissent de traitements particuliers.

B- La particulière amélioration de la situation de certaines catégories de créanciers

Certaines catégories de créanciers que sont les créanciers postérieurs et les revendiquants (créanciers propriétaires de biens meubles)bénéficient de protections spéciales qui n'ont pas échappé à l'attention du législateur OHADA dans la révision de l'AUPC.

En effet, les créanciers postérieurs sont ceux dont les droits sont nés régulièrement après la décision d'ouverture, de lacontinuation de l'activité et de toute activité régulière du débiteur ou du syndic. Ils bénéficient du privilège d'être payés en premier lieu car leurs prestations sont présuméesavoir profité à la masse ou au débiteur en désarroi. L'existence de ces créanciers n'a rien d'étonnantà partir du moment où la masse est dotée de la personnalité morale et possède un patrimoine,il est tout à fait normal qu'apparaissent des créanciers qui auront pour gage l'actif de cepatrimoine174(*). Le privilège accordé aux créanciers postérieurs est un privilège de l'argent frais connu sous le vocable de « new money ».Ce privilège était méconnu du droit des procédures collectives OHADA jusqu'en 1998. C'est avec la révision de l'AUPC de 2015 qu'il fit son entrée en droit OHADA qui s'est inspiré du droit français175(*). On le retrouve aussi bien dans les procédures préventives que dans les procédures curatives. Ainsi, le privilège de new money est prévu dans le cadre de la procédure de conciliation176(*), du règlement préventif177(*), du redressement judiciaire et de la liquidation des biens par conversion178(*).

Le privilège de new money est un privilège accordé aux créanciers postérieurs, qui consentent un nouvel apport en trésorerie ou fournissent un bien ou un service en vue d'assurer la poursuite de l'activité de l'entreprise débitrice et sa pérennité. Il consiste pour le créancier bénéficiaire de ce privilège de passer en premier rang lors du paiement des créanciers179(*), notamment en cas de liquidation des biens. Il apparait en effet que le privilège de l'argent frais concourt à la réalisation de l'objectif de sauvetage des entreprises en situation économique ou financière difficile, en passant par une incitation des créanciers à investir dans une entreprise qui connait des difficultés.Il en irait autrement en l'absence de l'intervention du législateur puisqu'il est difficilepour un bailleur de fonds ou un fournisseur d'accepter de mettre son argent ou son bien à la disposition d'un débiteur potentiellement insolvable. Cette idée est d'autant plus logique en ce sens qu'un investisseur ne vise qu'à réaliser des profits les plus élevés possibles. Il n'agit que lorsqu'il obtient des garanties de paiements ou de remboursement de ses mises. Le privilège de new money est donc une contrepartie du risque que prennent des créanciers pour aider le débiteur en difficulté à revenir à meilleure fortune180(*). Un auteur affirme en ce sens que « Ce mécanisme est celui de la continuation du paiementdes créances postérieures, lesquelles sont présumées souscrites dans l'intérêt del'entreprise. »181(*).

Toutefois, pour être pris en compte dans l'homologation des accords qui interviennent en matière des procédures prévues par l'AUPC révisé, le privilège de l'argent frais ne doit pas porter atteintes aux intérêts des créanciers parties à un accord amiable ou concordataire182(*). C'est là une limite au privilège accordé aux créanciers postérieurs qui en remplissent les conditions.

S'agissant du revendiquant, il est le propriétaire qui a vendu à crédit son bien meuble au débiteur, qui a fait ensuite l'objet d'une procédure de redressement judiciaire ou de liquidation des biens. Les biens pouvant être revendiqués ont fait l'objet d'une délimitation par la loi. Il faut d'entrée relever que les immeubles sont exclus du champ du droit à revendication reconnu au propriétaire.

La revendication concerne les effets de commerce ou autres titres non payés qui ont été remis par le propriétaire pour être spécialement affectés à des paiements déterminés183(*). Ainsi, pour être susceptibles de revendication, ces effets de commerce ou titres doivent exister en nature dans le portefeuille du débiteur, ils ne doivent pas faire l'objet d'un paiement et doivent avoir été remis pour être spécialement affectés à des paiements déterminés. Il faut préciser pour la dernière condition que les effets de commerce ne doivent pas avoir fait l'objet d'un endossement translatif.

Peuvent aussi être revendiqués, des marchandises et objets mobiliers remis au débiteur soit pour être revendus pour le compte du propriétaire, soit à titre de dépôt, de mandat, de prêt ou de location ou tout autre contrat à charge de restitution. Ici, encore les biens visés doivent exister en nature dans le patrimoine du débiteur à la date de l'ouverture de la procédure collective184(*).

Quant à la procédure de revendication, il existe également des conditions à respecter par le revendiquant. En effet, la revendication des meubles ne peut être exercée que dans un délai de quatre-vingt-dix (90) jours suivant la deuxième insertion de la décision d'ouverture de la procédure collective (redressement judiciaire ou liquidation des biens), dans un journal d'annonces légales de l'Etat partie concerné185(*). La demande en revendication d'un bien visé par la loi, est faite dans ce délai, au syndic par lettre au porteur contre récépissé ou par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou par tout autre moyen laissant trace écrite186(*). Le syndic a la possibilité d'acquiescer à la demande amiable qui lui est faite. Cela traduit la volonté du législateur OHADA de simplifier la procédure de revendication.

Cependant, le revendiquant est dispensé de l'observation de ce délai si le contrat ayant pour objet le bien revendiqué a été publié. Cette dispense est systématique dans le cadre d'une vente assortie de réserve de propriété car celle-ci doit nécessairement être publiée pour être opposable aux tiers187(*). En pareille hypothèse, même en l'absence d'une demande préalable en restitution faite au syndic, le juge-commissaire peut être saisi à cette même fin par le syndic.

S'il arrivait que le syndic refuse ou s'il ne répond pas à la demande en restitution amiable dans un délai de trente (30) jours à compter de la réception de ladite demande, le revendiquant a la possibilité de saisir le juge-commissaire d'une action en revendication dans un délai de trente (30) jours qui court à « compter de l'expiration du premier délai ou de ce refus »188(*). Si le syndic refuse avant l'expiration du délai de trente (30) jours qui lui est normalement imparti pour répondre, le délai court à compter de ce refus. Cette fixation du point de départ du délai de saisine du juge-commissaire, à la date du refus opposé par le syndic au propriétaire, est soucieuse d'une certaine rapidité dans la procédure collective. Le fait que la demande en revendication ne se limite pas au syndic et peut être effectuée jusqu'à devant le juge compétent traduit la volonté du législateur OHADA à réserver un traitement spécial aux créanciers propriétaires et leur importance dans la survie des entreprises. Ces derniers jouissent ainsi des avantages que les créanciers non-propriétaires ne peuvent bénéficier.

Une fois que le juge-commissaire est saisi, il statue par voie d'ordonnance dans un délai de huit (08) jours qui part de sa saisine et son ordonnance est déposée au greffe qui la communique au syndic et la notifie aux parties. Le juge-commissaire doit également faire communiquer sans délai son ordonnance au ministère public189(*). Cette ordonnance du juge-commissaire est susceptible de faire l'objet d'un recours, dans un délai de huit (08) jours à compter de sa notification ou sa communication, devant le tribunal compétent qui doit statuer à la première audience utile, les intéressés et le syndic avisés.

La protection des vendeurs à crédit de meubles a été amplifiée par la réforme de l'AUPC originel.En effet, l'article 78 alinéa 1erAUPC révisé impose aux créanciers dont les créances sont nées antérieurement à la décision d'ouverture d'une procédure collective, exception faite des créances d'aliments, de produire leurs créances. Cet article dispose en effet qu'à partir de la décision d'ouverture du redressement judiciaire ou de liquidation des biens et jusqu'à l'expiration d'un délai de soixante (60) jours suivant la deuxième insertion dans un journal d'annonces légales de l'Etat parti concerné tel que défini à l'article 1-3 ci-dessus, tous les créanciers composant la masse, à l'exception des créanciers d'aliments, doivent, sous peine de forclusion, produire leurs créances auprès du syndic.

En effet, l'ancien article 101 alinéa disposait que « les actions en revendication ne peuvent être reprises ou exercées que si le revendiquant a produit et respecté les formes et délais prévus par les articles 78 à 88 ci-dessus. ». Mais avec la révision de 2015, cette disposition a été abrogée. Désormais, l'obligation de produire les créances ne s'applique pas au revendiquant. Il n'y a aucune raison de lier ces deux formalités que sont la production de créance et la revendication car elles ont des objets différents. En effet, la revendication a pour objet de faire reconnaître le droit de propriété de la créance tandis que la production vise à rendre la créance opposable à la procédure190(*). En pratique, il est probable que le propriétaire ne se limite pas à revendiquer son bien, mais procédera à la production de sa créance pour le cas où la revendication échouerait191(*). Cette pratique n'est pas nouvelle parce qu'elle existait et était reconnue par la doctrine sous l'empire de l'AUPC du 10 avril 1998. Le propriétaire étant avant tout un créancier du prix du bien vendu, il devait intégrer la masse des créanciers et avait de ce fait, l'obligation de produire sa créance. En cela, un auteur avait relevé que l'obligation de production pèse sur tout créancier dont le droit est antérieur au jugement de la procédure collective. Créancier du prix, le propriétaire devait produire et indiquer s'il entend exercer une action en revendication192(*). Depuis la réforme de l'AUPC, il n'est plus question d'une obligation de production de créance, mais une faculté reconnue au propriétaire d'un bien qui se trouve en possession du débiteur qui fait l'objet d'une procédure collective.

La recevabilité de la demande en revendication est subordonnée au respect du délai prévu à l'article 101 de l'AUPC révisé. Cet article dispose que « Nonobstant les dispositions du présent acte uniforme, la revendication des meubles ne peut être exercée que dans le délai de quatre-vingt-dix (90) jours suivant la deuxième insertion de la décision d'ouverture de la procédure de redressement judiciaire ou de liquidation des biens dans un journal d'annonces légales de l'Etat partie ». Le législateur impose ce délai afin de permettre aux organes de la procédure d'avoir une connaissance rapide de l'actif du débiteur et des biens susceptibles d'être revendiqués.

En résumé, la situation des créanciers postérieurs et des vendeurs de meubles a été améliorée à travers l'introduction des nouveautés et différentes modifications des dispositions de l'AUPC originel.

Toutes ces tentatives pour revaloriser les conditions des créanciers en général, à travers la révision de l'Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif, n'ont pas réussi à faire disparaitre des entorses graves aux droits des créanciers. Ainsi, la situation des créanciers reste perfectible dans unsouci d'assurer le sauvetage des entreprises dans l'espace communautaire OHADA.

CHAPITRE 2 : LA PERFECTIBILITE DE LA SITUATION DES CREANCIERS

La révision du droit des procédures collectives intervenue en 2015 a redonné un nouveau souffle aux créanciers qui n'avaient quasiment plus de pouvoir face au débiteur en procédure de sauvetage. Les droits reconnus aux créanciers par différentes lois en période normale étaient significativement restreints sous l'empire de l'AUPC du 10 avril 1998 au point où un auteur a pu désigner les créanciers comme des « acteurs de la procédure aux droits maltraités »193(*). Cette situation correspondait à une sorte d'injustice, même si l'on peut penser qu'il s'agissait d'une solidarité dictée par l'irruption d'un certain humanisme dans la règlementation du droit des entreprises en difficulté194(*). Cet humanisme se décline comme une sorte de solidarité entre des entreprises. Il est marqué par le souci de protéger la partie faible, qualification qui semble centrée sur le débiteur, même défaillant. S'il est vrai que l'introduction d'un humanisme dans le droit des procédures collectives est salutaire pour le sauvetage des entreprises et par ricochet, pour l'économie des Etats parties à l'OHADA, il ne faut pas cependant occulter le fait que cet humanisme doit s'inscrire dans une idéologie de justice qui implique l'équité et l'équilibre dans les rapports juridiques.

Malgré les efforts fournis par le législateur OHADA pour renforcer la protection des intérêts des créanciers par opposition aux intérêts du débiteur, il y a lieu de relever que cette protection reste encore insatisfaisante. La protection des intérêts des créanciers dans les procédures de sauvetage semble insuffisante dans la mesure où le déséquilibre de protection des intérêts conflictuels est important. Par ailleurs, la soumission des créanciers à une discipline collective quasiment généralisée195(*) n'est pas en partie compatible avec l'objectif privilégié du législateur qui est de sauvegarder les entreprises en vue de maintenir les emplois et favoriser le développement économique des Etats parties.Face à la persistance du mépris des droits des créanciers et son incompatibilité avec le souci de pérenniser les entreprises dans l'espace OHADA, la recherche de solutions s'avère nécessaire. Ces solutions doivent s'orienter vers une meilleure conciliation des intérêts de l'entreprise débitrice et ceux des entreprises des créanciers.

Au vu de ce qui vient d'être exposé, il sera analysé la subsistance d'une mise à mal de la situation des créanciers dans le sauvetage de l'entreprise (Section I) et exploré quelques pistes de solutions pour une meilleure amélioration de la situation de ceux-ci (Section II).

SECTION I : LA SUBSISTANCE D'UNE MISE A MAL DE LA SITUATION DES CREANCIERS DANS LE SAUVETAGE DE L'ENTREPRISE

La révision de l'AUPC196(*) n'a pas réussi à réduire au strict minimum les entorses aux droits des créanciers. Ce qui est de nature à mettre ceux-ci dans des difficultés face à leurs propres engagements envers leurs fournisseurs ou plus généralement envers leurs partenaires d'affaires. La mise à mal des droits des créanciers se traduit par la persistance d'un déséquilibre de protection en défaveur des créanciers (Paragraphe 1) et la subordination de ceux-ci à une discipline collective incompatible avec les impératifs de sauvetage (Paragraphe 2).

PARAGRAPHE 1 : LA PERSISTANCE D'UN DESEQUILIBRE DE PROTECTION EN DEFAVEUR DES CREANCIERS

Le déséquilibre dans la protection des intérêts conflictuels en jeu dans les procédures collectives tient non seulement aux restrictions des droits des créanciers (A), mais également à un manque de clarté des textes qui semblent prendre en compte ceux-ci (B).

A- Un déséquilibre tenant aux restrictions des droits des créanciers

A l'analyse des limites apportées par l'AUPC révisé à la suspension ou l'interdiction des poursuites individuelles et celle des suites des accords amiables ou concordataires, il apparait une sorte d'illusion, voire d'incertitude.

En effet, la suspension et l'interdiction des poursuites individuelles constituent des atteintes graves aux droits reconnus aux créanciers dans le cadre des procédures normales de recouvrement et voies d'exécution. La décision d'ouverture de la procédure collective a pour conséquence de regrouper les créanciers dont les créances sont nées avant son prononcé en une masse. Cette masse est dotée d'une personnalité morale capable d'avoir des droits et des obligations. Ainsi, les créanciers dans la masse ne peuvent plus exercer individuellement des actions en recouvrement de créances. Le traitement des créanciers antérieurs à la décision d'ouverture de la procédure collective devient alors collectif et seul le représentant de la masse, pris en la personne du syndic par principe, est capable d'agir au nom et pour le compte de la masse197(*). C'est dire donc que le droit des procédures collectives fait échec à l'application des voies d'exécution, à l'exception de certaines actions qui sont, quant à elles, recevables après la décision d'ouverture d'une procédure collective198(*).

Pour atténuer les conséquences de cette règle, le législateur limite dans le temps ces atteintes aux droits de poursuites individuelles en principe reconnus aux créanciers.

En effet, en matière de règlement préventif, la décision suspend ou interdit toutes les poursuites individuelles tendant à obtenir le paiement des créances nées antérieurement à ladite décision pour une durée de trois (03) mois, qui peut être prorogée d'un mois dans les conditions définies à l'article 13, alinéa 2 AUPC révisé sans préjudice de l'application de l'article 14 alinéa 3. Ce dernier article prévoit que les créanciers recouvrent l'intégralité de leurs droits, donc celui des poursuites individuelles si la juridiction compétente saisie ne statue pas dans les trente (30) jours de sa saisine.

En matière de redressement judiciaire, la durée de la suspension ou de l'interdiction des poursuites individuelles est de six (06) mois prorogeable de trois (03) mois une seule fois, soit neuf (09) mois au plus199(*). Dansla liquidation des biens, cette durée est de dix-huit (18) mois, prorogeable une seule fois de six (06) mois, soit une durée de vingt-quatre (24) mois ou deux ans au maximum200(*). Cette dernière durée est celle la plus longue au cours de laquelle, les créanciers sont privés de leur droit de poursuites individuelles au nom de la recherche d'une égalité entre ceux-ci, laquelle ne peut être d'ailleurs absolue.

En matière de règlement préventif ou de redressement judiciaire, les durées de suspension ou d'interdiction sont moins longues laissant penser à une brièveté de durée. En réalité, cette vue n'est qu'une illusion dans laquelle le législateur OHADA a plongé les créanciers antérieurs.En dehors des effets de l'exercice des voies de recours contre les décisions de la juridiction compétente sur la durée de la procédure, qui en tout cas, est incluse dans les délimitations des procédures collectives dans le temps, les hypothèses de conversion des procédures prévues par l'AUPC révisé sont illustratives de cette affirmation.

En effet, une procédure de courte durée engagée peut se transformer en une procédure plus longue contre toute attente et aux mépris des droits des créanciers à qui le débiteur avait, au commencement, donné espoir d'être redressé. Dans ce cadre, une procédure de règlement préventif peut se transformer, à tout moment de la procédure, en redressement judiciaire ou en liquidation des biens201(*) lorsque survient en cours d'instance la cessation des paiements. Pareil cas peut se produire à la suite de l'ouverture d'un redressement judiciaire qui se termine en liquidation des biens202(*).

En matière des procédures collectives, le maintien par le législateur de la saisine d'office reconnu à la juridiction compétente203(*) conforte notre position. Le débiteur quant à lui trouve son intérêt à demander la conversion de la procédure déjà engagée en une autre procédure collective lorsque, par exemple, il survient la cessation des paiements de l'entreprise du débiteur.

Il n'est plus à démontrer que ces hypothèses qui arrivent à des moments inattendus par les créanciers sont préjudiciables aux intérêts de ces derniers.

Qui plus est, dans l'hypothèse où une procédure venait à être transformée en liquidation des biens, il faut relever que le risque pour les créanciers antérieurs de demeurer dans une paralysie de leurs droits de poursuites individuelles pendant une période qui peut aller jusqu'à deux ans regorge une portée dangereuse pour l'objectif de sauvetage des entreprises en difficulté. En effet, les créanciers comptent le plus souvent sur les montants à recouvrer auprès de leur débiteur à des échéances bien calculées pour payer leurs dettes vis-à-vis de leurs propres créanciers. Ainsi, maintenir les créanciers dans un état d'impuissance pendant deux ans est susceptible de créer d'autres victimes parmi ceux-ci, qui risquent de se retrouver en difficulté économique ou financière. Le montant des créances que certains créanciers détiennent contre le débiteur est un élément à prendre en compte. Plus ce montant représente une grosse somme d'argent, plus le créancier concerné court le risque de connaitre des difficultés économiques.

En marge de cette illusion de la brièveté des suspensions ou de l'interdiction des poursuites individuelles, les créanciers courent toujours des risques en consentant ou non à l'accord amiable ou à un accord concordataire.

En effet, s'il est vrai que les entreprises qui se redressent, on en cherche, il arrive qu'on en trouve qui se rétablissent quand-même. C'est le cas, par exemple, d'une société dénommée SOCAFI dans une décision du 24 septembre 2014204(*). En l'espèce, un jugement du 09 août 2006 rendu par le TGI de Bobo-Dioulasso avait accordé un règlement préventif à la SOCAFI. Malgré cela, la situation de cette dernière ne connaissait pas d'amélioration et son redressement judiciaire a été prononcé par le tribunal de commerce (créé par une loi du 12 mai 2009), dans sa décision du 13 octobre 2010. Le concordat proposé a été voté à l'unanimité par les créanciers et remplissant les autres conditions, avait fait l'objet d'homologation par jugement n° 32 du 18 mai 2011. Le tribunal de commerce avait ordonné, par la même décision, la clôture du redressement judiciaire ouvert en faveur de la SOCAFI « pour exécution intégrale du concordat. ».

Toutefois, en cas d'obtention d'un accord par le débiteur en difficulté, les créanciers ne sont pas épargnés du risque d'inexécution ou d'une mauvaise exécution du contenu de cet accord. Ce qui permet de mettre en évidence le caractère incertain de l'issue des accords consentis par les créanciers dans le cadre des procédures de sauvetage des entreprises. Certes des contrôles205(*) ont été prévus dans l'AUPC en vigueur dans le but d'assurer une bonne exécution des accords éventuels, mais cela n'empêche pas le débiteur d'être dans l'incapacité d'exécuter ses engagements souscrits dans l'accord envers ses créanciers. Ainsi, les sacrifices consentis par les créanciers se révèlent le plussouvent infructueux car dans la majorité des cas, les tentatives de redressement n'aboutissent pas206(*).

L'illusion sur l'interdiction des poursuites individuelles et les incertitudes dans l'issue des accords concordataires ne présentent plus ainsi aucun doute.

Cette fragilité de la protection des intérêts des créanciers est amplifiée par un manque de clarté de certaines dispositions de l'AUPC révisé.

B- Un manque de clarté dans la prise en compte des intérêts des créanciers

L'AUPC révisé, dans la recherche de sauvetage des entreprises, a majoritairement opté de sacrifier les droits des créanciers antérieurs. En ce sens, il a prévu un système dans lequel il reconnait au juge le pouvoir d'imposer le contenu des accords concordataires aux créanciers qui refusent de consentir tout délai de grâce ou toute remise au débiteur en difficulté. Par ailleurs, dans certains cas où le législateur a manifesté une volonté de considérer les intérêts des créanciers, il semble avoir manqué de clarté.

En effet, il résulte de l'article 15 alinéa 1er, paragraphe 2 que lorsque la situation du débiteur le justifie, la juridiction compétente homologue le concordat préventif, en constatant les délais et remises consentis par les créanciers et en donnant acte au débiteur des mesures proposées pour le redressement de l'entreprise. Les délais et remises consentis par les créanciers peuvent être différents. Ainsi, par principe l'octroi des délais et des remises de dettes sont l'affaire des parties aux négociations en vue de la conclusion du concordat préventif. Cette disposition est conforme à la théorie contractuelle de l'autonomie de la volonté qui veut que l'on s'engage parce qu'il l'a voulu207(*). Le principe de l'autonomie de la volonté a pour conséquence la nullité de l'accord lorsque le contractant a commis une erreur excusable ou a donné son consentement sous l'effet d'une violence ou d'un dol qui consiste à utiliser des tromperies et des manoeuvres frauduleuses pour obtenir le consentement d'un cocontractant208(*).

Il peut arriver que certains créanciers refusent de consentir des délais et remises au débiteur. Sur cette question, l'article 15 alinéa 4 prévoit qu'au cas où des créanciers auraientt refusé de consentir des délais ou remises au débiteur, le président de la juridiction compétente fait ses bons offices entre ces créanciers et le débiteur. Il entend ces derniers sur les motifs de leur refus et provoque une négociation entre les parties en vue de leur permettre de parvenir à un accord. Cette tentative du juge peut ne pas produire l'effet escompté et les nouvelles négociations peuvent ne pas aboutir à un accord entre ces créanciers qui ont refusé de consentir des délais ou remises et leur débiteur.

La solution prévue par le législateurà cet échec est une manifestation de l'impérium du juge. En effet, si malgré les bons offices du président de la juridiction compétente, les parties ne parviennent pas toujours à un accord et dans le cas où le concordat préventif comporte seulement une demande de délai n'excédant pas deux (02) ans, la juridiction compétente peut rendre ce délai opposable aux créanciers qui ont refusé tout délai et toute remise sauf si ce délai met en péril l'entreprise de ces créanciers209(*). Cette disposition porte ainsi atteinte non seulement au principe de l'autonomie de la volonté, mais également au principe de l'effet relatif des contrats210(*). Par ailleurs, elle est aux contours flous dans la mesure où le texte qui consacre cette solution garde le silence sur le sort des créanciers qui ne peuvent pas se voir opposer des délais auxquels ils n'ont pas consentis du fait du risque de péril que leur acceptation pourrait avoir sur leurs propres entreprises. Toute analyse nous conduirait à n'émettre que des présomptions. Ainsi, l'on pourrait penser que les créanciers qui auront refusé tout délai ou toutes remises ont le droit d'exercer des actions en recouvrement de leurs créances puisque que le délai des deux (02) ansne leur sera pas opposable. Dans ce cas, le débiteur qui vient de bénéficier d'un concordat préventif peut se retrouver en cessation des paiements, voire en situation irrémédiablement compromise. D'où il est intéressant de remarquer que l'objectif de sauvetage des entreprises en difficulté recherché au mépris des droits des créanciers n'est pas facile à atteindre.

On retrouve également le pouvoir du juge de rendre opposable les délais aux créanciers qui refusent de consentir tout délai ou remise dans d'autres dispositions de l'AUPC révisé, notamment dans le cadre du redressement judiciaire. En effet, l'article 134 alinéa 2 AUPC révisé dispose que toutefois, les créanciers bénéficiant de sûretés réelles spéciales ne sont obligés que par les délais et remises particuliers consentis par eux ; si le concordat de redressement judiciaire comporte des délais n'excédant pas deux (02) ans, ceux-ci peuvent leur être opposés si les délais par eux consentis sont inférieurs.

Il découle de l'analyse de ces différentes dispositions que l'opposabilité ne concerne que les délais et non les remises. En ce sens, la CCJA a dans un arrêt retenu ce qui suit : « Attendu qu'il ressort des pièces du dossier que la BICICI s'est toujours opposée à la remise des dettes de 80·% proposée dans le concordat ; qu'elle a soutenu que c'est le délai de deux ans qui lui est opposable en cas de refus d'acceptation du concordat ; que conformément à l'article 15.2 de l'Acte uniforme sus indiqué, à l'exception du délai de deux ans qui lui est opposable, la BICICI n'est pas tenue d'accepter la remise proposée dans le concordat, celui-ci ne lui étant pas opposable ; qu'il convient donc d'infirmer partiellement le jugement entrepris en ce qu'il a rendu la remise opposable à la BICICI et dire que seule la durée de deux ans du concordat est opposable à la BICICI laquelle n'a pas accepté la remise proposée par le débiteur. »211(*)

Mais la différence avec l'opposabilité des délais dans le règlement préventif est que dans le redressement judiciaire, cette opposabilité est systématique dans la mesure où elle n'est pas conditionnée par l'absence de péril pour les créanciers212(*). C'est dire que dans le redressement judiciaire, le juge pourrait imposer aux créanciers des délais de grâce demandés par le débiteur dans le projet de concordat et qui n'excèdent pas deux ans alors même que cette décision peut mettre en péril les entreprises des créanciers.

Au-delà du déséquilibre de protection relevé et qui est au détriment des créanciers, la subordination des créanciers à une discipline collective semble incompatible avec les objectifs de sauvetage des entreprises en droit OHADA.

PARAGRAPHE 2 : UNE PROTECTION DES CREANCIERS SUBORDONNEE A UNE DISCIPLINE COLLECTIVE INCOMPATIBLE AVEC LES IMPERATIFS DE SAUVETAGE

Dès le prononcé du jugement déclaratif ouvrant l'une des procédures collectives prévues par l'AUPC révisé, une discipline collective est imposée aux créanciers dont les créances sont nées antérieurement audit jugement. Il importera d'évoquer le caractère quasi-généralisé de la discipline collective à laquelle sontsoumis les créanciers (A) et la marginalisation du rôle des créanciers dans le déroulement des procédures de sauvetage (B).

A- La soumission des créanciers à une discipline collective quasi-généralisée

La soumission des créanciers à une discipline collective dans le traitement des difficultés du débiteur n'est plus à démontrer. Elle reposerait sur le souci d'assurer une égalité entre les créanciers.

Un auteur disait ceci : « A l' opposé du droit commun où les créanciers disposent individuellement des moyensjuridiques pour contraindre le débiteur failli à honorer ses engagements, le droit desprocédures collectives instaure une discipline collective des créanciers en les soumettant auprincipe de l'égalité entre les créanciers. Considéré comme [l'« âme », ou « principefondamental des procédures collectives »], ou encore « principe d'ordre public », le principe d'égalité des créanciers demeure ancien et permanent dans les procédures collectives.Il s'agit d'un principe qui a beaucoup été remis en cause au fil du temps aussi bien par ladoctrine que par la jurisprudence et sa nature juridique demeure à présent un mystèredans le droit des procédures collectives »213(*).

Il découle aisément de l'affirmation précitée que l'argument de l'égalité pour justifierla généralisation et la systématicité de la discipline collective ne tient qu'à un fil au regard des remises en cause doctrinales et jurisprudentielles qu'il ne convient pas d'aborder. On peut même noter son incompatibilité avec les impératifs de sauvetage des entreprises.

D'après une doctrine, « Les règles de la discipline collective sont celles qui permettent à la procédure d'être collective et de la distinguer ainsi d'une procédure civile d'exécution. La discipline collective se caractérise par une réduction des pouvoirs individuels des créanciers, marqués notamment par l'arrêt des poursuites individuelles, l'interdiction des paiements et l'obligation de rendre opposable sa créance à la procédure collective pour être pris en compte par elles »214(*).

Précisément, la discipline collective, faisant suite à l'ouverture d'une procédure collective, affecte aussi bien les créanciers chirographaires que les créanciers munis des sûretés. Il suffit que les créances concernées soient nées avant l'ouverture de la procédure. Ce qui dénote d'ailleurs le caractère général de la formule employée par le législateur.

En matière de conciliation, le problème de la discipline collective ne se pose pas en principe. Cela est dû au fait que la procédure de conciliation n'est pas à proprement parler une procédure collective215(*). C'est d'ailleurs à titre exceptionnelle que la suspension des poursuites y est accueillie.

En revanche, la généralisation de la discipline collective s'observe dans les autres procédures qu'on peut aisément qualifier de procédures collectives. C'est le cas du règlement préventif et du redressement judiciaire même si l'on pourrait parler à titre subsidiaire de la liquidation des biens qui n'est pas une procédure de sauvetage des entreprises. La généralité de la formule utilisée par le législateur cache un caractère quasi systématique de la discipline collective imposée aux créanciers.

En effet, aux termes de l'article 9 alinéa 1er AUPC révisé relatif au règlement préventif, « la décision d'ouverture du règlement préventif suspend ou interdit toutes les poursuites individuelles tendant à obtenir le paiement des créances nées antérieurement à ladite décision (...) ». Cette disposition laisse apparaitre la fameuse question de la généralisation de la suspension et de l'interdiction des poursuites individuelles.

Elle concerne toutes les créances antérieures à la décision d'ouverture. La suspension des poursuites individuelles concerne aussi bien les voies d'exécution que les mesures conservatoires, y compris toute mesure extrajudiciaire216(*). Elle s'applique à toutes les créances chirographaires et à celles garanties par un privilège général, un privilège mobilier spécial, un gage, un nantissement ou une hypothèque, exceptées, les créances de salaires et d'aliments217(*).

Les créances de salaires et celles résultant d'un contrat d'apprentissage, quant à elles, bénéficient d'une protection assez importante. Elles sont garanties par des privilèges en matière de règlement préventif et de redressement judiciaire, voire de liquidation des biens218(*). Il s'agit d'une part, du privilège général qui garantit les sommes dues aux salariés pour exécution ou résiliation de leur contrat de travail durant la dernière année précédant le jugement déclaratif219(*). En outre, la fraction insaisissable et incessible est garantie par un privilège appelé super privilège puisqu'il donne une priorité absolue au salarié. Le salarié n'a pas seulement un droit de préférence, mais aussi celui d'être payé rapidement. C'est pourquoi l'AUPC révisé prévoit que les sommes qui correspondent au super privilège doivent être payées dans les dix jours.A défaut de fonds nécessaires pour le paiement, le salarié est payé dès les premières rentrées de fonds220(*).L'on retrouve quasiment les mêmes dispositions dans le code du travail du Sénégal221(*). Cependant, exceptée la fraction super privilégiée du salaire, le travailleur peut se voir imposer des délais de grâce dans la limite de deux (02) ans lors de l'homologation du concordat judiciaire222(*).

Le caractère général de la discipline collective s'observe plus manifestement dans le redressement judiciaire et la liquidation des biens. En effet, dans ces procédures, la décision d'ouverture constitue les créanciers en une masse représentée par le syndic qui, seul, agit en son nom et dans l'intérêt collectif223(*). La décision d'ouverture du redressement judiciaire ou de liquidation des biens, arrête les cours des inscriptions de toute sûreté mobilière ou immobilière224(*). Elle interrompt (à distinguer de la suspension), et interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers composant la masse tendant : « 1° à la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent ; 2° à la résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent. La décision d'ouverture arrête ou interdit également toute procédure d'exécution de lapart de ces créanciers tant sur les meubles que sur les immeubles ainsi que toute procédure de distribution n'ayant pas produit un effet attributif avant la décision d'ouverture. »225(*).

En outre, les créanciers antérieurs ont l'obligation de produire leurs créances dans les délais prévus à cet effet pour que ces dernières soient prises en compte.

Même si le législateur a prévu dans les deux cas de sauvetage (règlement préventif et redressement judiciaire) des exceptions à la suspension ou l'interruption selon les cas, et l'interdiction des poursuites individuelles226(*), il y a lieu de noter la portée de ces règles sur la situation des créanciers.

En effet, cette discipline collective imposée aux créanciers antérieurs ne pose pas en elle-même un problème majeur. Cependant, c'est le fait qu'elle revêt un caractère généralisé qui pourrait être source de difficulté pour les créanciers. En effet, la discipline collective affecte tous les créanciers antérieurs sans distinction entre les créanciers en situation économique fragile et ceux qui sont économiquement solides au moment du prononcé du jugement emportant,entre autres effets, suspension, interruption et interdiction des poursuites individuelles. Elle englobe également tous les créanciers-entreprises antérieurs à la décision d'ouverture sans la prise en compte de leurs tailles, du nombre de leurs salariés, etc.

Or, la promotion du sauvetage des entreprises dans l'espace OHADA vise à maintenir les emplois et à favoriser le développement économique à travers des contributions fiscales que la loi impose à celles-ci. Il ne faut pas en réalité oublier que les entreprises n'ont pas les mêmes poids économiques et les mêmes tailles par rapport au nombre de salariés qu'elles emploient. Le fait d'ignorer ces différents aspects qui peuvent entrer en jeu dans les procédures collectives est une porte ouverte pour la disparition éventuelle des entreprises en difficulté, quelque que soient leur taille ou leur apport économique dans un Etat partie à l'OHADA.

Par ailleurs, l'extension systématique de la discipline collective aux créanciers munis de sûretés a pour effet le bouleversement du monde du crédit227(*). Elle est de nature à décourager le financement des entreprises qui, le plus souvent, n'ont pas des fonds propres pour étendre ou développer leur exploitation228(*). Le monde du crédit fonctionne sur la base des garanties de recouvrement des créances nées suite au financement accordé aux entreprises pour les besoins de leurs affaires229(*). Admettre le mépris des droits de ces créanciers, c'est décourager le crédit car les sûretés ont perdu leur efficacité à cause du caractère dérogatoire et perturbateur230(*) du droit des procédures collectives.

Il ne faudrait pas alors occulter le fait qu'un débiteur incapable de payer à son créancier le montant de sa créance à la date convenue dans leur contrat peut entrainer ledit créancier, lui-même, en difficulté. Le droit des entreprises en difficulté fonctionne comme dans le domaine de la santé publique. La doctrine n'a pas manqué de l'envisager comme undroit de la maladie et des traitements des entreprises. Pour faire l'analogie, un auteur a écrit que « Le maintien des contrats en cours est un soin curatif qui permettra à l'entreprise, dont l'état de maladie n'est pas très grave, de recouvrer sa santé financière et opérationnelle. »231(*). Cependant, les difficultés d'une entreprise peuvent contaminer les autres entreprises que sont souvent les créanciers, partenaires du débiteur en difficulté.

Ces différentes questions soulevées démontrent à plusieurs titres que le chantier de construction d'un droit des procédures collectives capable d'assurer la sauvegarde des entreprises est encore à une étape d'élévation des murs. Le degré de généralisation de la discipline collective est bien incompatible avec l'objectif de premier rang fixé par le législateur OHADA.

Afin de satisfaire efficacement les impératifs de sauvetage des entreprises, la politique législative de l'OHADA ferait mieux de prendre en compte ces différents aspects.

Dans le déroulement des procédures de sauvetage, il faut souligner que les créanciers occupent plutôt une place marginale.

B- La marginalisation du rôle des créanciers dans le déroulement des procédures de sauvetage

La marginalisation de la place des créanciers dans les procédures de sauvetage se manifeste par l'amenuisement du rôle de ceux-ci dans les plans de redressement d'une part et la limitation des pouvoirs des créanciers contrôleurs d'autre part.

L'implication prépondérante des créanciers dans la recherche de solutions aux difficultés des entreprises est l'une des caractéristiques fondamentales de la procédure de conciliation sur laquelle il ne convient pas de consacrer encore des développements232(*). Mais il importe de noter que dans certains cas, les créanciers sont marginalisés. En effet, comme nous l'avons relevé plus haut, plusieurs tentatives ont été effectuées en vue d'accorder aux créanciers une place qui ne préjudicie pas trop à leurs intérêts. Mais ces tentatives n'ont pas produit une satisfaction complète. Il reste encore quelques insuffisances à palier. Par exemple, si dans l'ouverture des procédures de sauvetage, les créanciers sont impliqués assez233(*), il en va autrement dans le déroulement de ces procédures. Ainsi, le rôle des créanciers connait un amenuisement dans les plans de redressement des entreprises. En pratique, la contribution consiste dans un accord entre ledébiteur et chacun des créanciers sur les délais et les remises234(*). Si les négociations provoquées par les bons offices du président de la juridiction compétente n'aboutissent pas à un accord entre le débiteur et ses créanciers, toujours est-il queles délais qui n'excèdent pas deux ans (02) ans peuvent leur être opposés. Ce qui veut dire que les créanciers n'ont pas le dernier mot. Ils n'ont pas de pouvoir dans l'élaboration des plans de redressement.

Il est vrai qu'avec la révision de 2015, le législateur a apporté une amélioration à la place infime qu'occupaient les créanciers contrôleurs dans les procédures de sauvetage des entreprises. Ceux-ci ont des pouvoirs que la loi leur accorde. Les pouvoirs accordés au syndic, quant à lui, trouvent leur limite en ce que les contrôleursassistentle syndic dans ses fonctions et peuvent lui demander compte de l'état de la procédure, s'assurant ainsi que le syndic accomplit effectivement ses missions. Dans le cas où le syndic n'accomplit pas effectivement ses missions, les contrôleurs peuvent saisir le juge-commissaire en vue du remplacement du syndic235(*). Toutefois, les pouvoirs reconnus aux contrôleurs doivent être nuancés. En effet, on peut admettre l'absence de véritables pouvoirs des contrôleurs car ceux-ci restent révocables. Ils peuvent être révoqués par la juridiction compétente sur proposition du juge-commissaire ou du ministère public sans aucune motivation de la décision de révocation. Après révocation, le juge commissaire nomme leurs remplaçants conformément aux dispositions régissant leur nomination ab initio236(*).

La doctrine soutient dans le même sens que « Si le juge-commissaire acquiesce à sa demande, le syndic cesse ses fonctions. Sinon, le créancier contrôleur est impuissant. À l'inverse, le juge peut évincer le contrôleur sans avoir à motiver sa décision. C'est pourquoi un auteur écrit que « les contrôleurs n'ont aucun pouvoir réel dans le traitement des difficultés de l'entreprise. (...) leurs voeux, au même titre que les observations ou les propositions, n'ont aucune force juridique contraignante». L'influence des créanciers en matière de contrôle des procédures est ainsi, des plus relatives »237(*).

Au regard de ces précédentes observations, la place des créanciers en général reste marginale dans les procédures de sauvetage. C'est pourquoi des pistes de solutions doivent être explorées pour une meilleure amélioration de la situation des créanciers.

SECTION II : DES PISTES DE SOLUTIONS POUR UNE MEILLEURE AMELIORATION DE LA SITUATION DES CREANCIERS

La recherche de solutions à un problème passe par le diagnostic de celui-ci. C'est ce qui a été le cas pour tous les développements qui précèdent cette phase. Les insuffisances de la protection des intérêts des créanciers passés en revue dans le cadre de notre réflexion, les enjeux ne sont plus cachés. Le besoin de renforcement de la protection des créanciers dans le sauvetage des entreprises au sein de l'OHADA se fait sentir. La recherche de ce renforcement de protection des créanciers est justifiée (Paragraphe 1). Pour permettre l'atteinte des objectifs voulus par le législateur dans la quête du sauvetage des entreprises en difficulté, le renforcement souhaité de la prise en compte des intérêts des créanciers, eux aussi, opérateurs économiques ou entreprises sous plusieurs formes doit s'orienter dans un cadre (Paragraphe 2) général puis dans un cadre spécifique.

PARAGRAPHE 1 : LA JUSTIFICATION DE LA RECHERCHE D'UN RENFORCEMENT DE PROTECTION DES CREANCIERS

La recherche d'un renforcement de la prise en compte des intérêts des créanciers rencontre un besoin qui s'observe à travers des données juridico-économiques (A) et des faits ayant marqué la crise sanitaire liée à la covid-19 (B).

A- Un besoin de renforcement de protection des créanciers nécessité par des données juridico-économiques

Plusieurs données justifient la nécessité de booster la protection des intérêts des créanciers. Elles sont d'ordre juridique et statistique.

En effet, sur le plan de la législation,le paragraphe 5 du préambule du traité OHADA dispose que « Conscients qu'il est essentiel que ce droit soit appliqué avec diligence, dans les conditions propres à garantir la sécurité juridique des activités économiques, afin de favoriser l'essor de celles-ci et d'encourager l'investissement ». Le droit communautaire se fixe ainsi comme objectifs, à travers cette disposition, de garantir la sécurité juridique des activités économiques et encourager l'investissement. La réalisation de ces objectifs ne pourrait être effective si les procédures collectives n'assurent pas une meilleure protection des créanciers.

Par ailleurs,la nécessité de renforcementde la protection des créanciers trouve également son fondement dans l'AUPC révisé. Ainsi, l'article 1er, point 1 du ce texte regorge des éléments qui montrent l'idée de justice qui imprègne la philosophie du législateur OHADA. Cet article dispose que « Le présent Acte uniforme a pour objet : d'organiser les procédures préventives de conciliation et de règlement préventif ainsi que les procédures curatives de redressement judiciaire et de liquidation des biens afin de préserver les activités économiques et les niveaux d'emplois des entreprises débitrices, de redresser rapidement les entreprises viables et de liquider les entreprises non viables dans des conditions propres à maximiser la valeur des actifs des débiteurs pour augmenter les montants recouvrés par les créanciers et d'établir un ordre précis de paiement des créances garanties ou non garanties ».

Il ressort de la disposition précitée que le législateur a voulu prendre en compte à la fois les intérêts des débiteurs et ceux des créanciers, même s'il apparait que les premiers sont privilégiés au détriment des seconds. En clair, la prise en compte effective des objectifs du législateur OHADA suppose que les règles régissant les procédures collectives dans cet espace communautaire doivent être centrées sur le souci de «  préserver les activités économiques et les niveaux d'emplois des entreprises débitrices » dans les conditions propres à maximiser la valeur des actifs du débiteur pour « augmenter les montants recouvrés par les créanciers et d'établir un ordre précis de paiement des créances garanties ou non garanties ». Ainsi, le législateur met l'accent sur la nécessité de préserver les activités économiques en privilégiant des solutions tendant à sauvegarder les entreprises en difficulté qui ont encore des chances de survie. Il manifeste, en outre, son désir de tenir compte des intérêts des créanciers dans les procédures de sauvetage, mais tout en les rendant dépendant de la situation du débiteur. Cette disposition semble donc préjudiciable aux créanciers car elle se soucie plus du débiteur que du créancier. Une doctrine fait remarquer qu' « il était crucial de trouver un juste équilibre entre la liquidation des biens et le redressement des entreprises. Le choix de la sauvegarde de l'activité sera donc désormais encouragé au détriment de la liquidation des biens lorsque cette sauvegarde est à même de maximiser la valeur de l'entreprise pour la société en général (aspects économiques et sociaux) et les créanciers en particulier »238(*).Mais cet équilibre ne milite pas assez en faveur des créanciers qui sont renvoyés en dernière position. Les développements effectués plus haut en témoignent plus amplement. Le besoin de renforcer la protection des intérêts des créanciers s'illustre également par des fermetures des entreprises et des pertes d'emplois subséquentes.

Aussi, une analyse des statistiques dans quelques Etats parties de l'OHADA démontre le besoin de rendre plus efficaces les dispositions de l'AUPC révisé. Il s'agit d'évoquer le nombre des entreprises qui ont fermées leurs portes et le nombre des emplois perdus d'une période à une autre dans les Etats parties dont le Sénégal et le Togo.

En effet, au Sénégal, les déclarations de fermeture sont passées de 252 en 2014 à 273 en 2015,soit une détérioration de 8,3%239(*). En ce qui concerne les pertes d'emplois enregistrées par ces fermetures d'entreprises, une hausse a été également observée. En effet, en 2015 les fermetures ont entrainé 1396 pertes d'emplois soit une dégradation de 44.5% entre 2014 et 2015240(*). Il en découle « une perte moyenne de 5 emplois pour chaque établissement fermé en 2015 contre 3,8 emplois perdus par établissement fermé en 2014. Ce qui montre que les établissements fermés en 2015 étaient de taille relativement plus importante »241(*).

Pour l'année 2016, le rapport annuel des statistiques du travail présente des résultats qui font état des données relatives aux établissements fermés.Ces résultats révèlent que 263 unités ont été fermées au cours de l'année 2016. Cet effectif est composé de 152 établissements ayant notifié une cessation d'activité (57,8%) et 111 établissements ayant déclaré une fermeture (42,2%)242(*). Ces déclarations de fermeture ne sont pas sans conséquence sur les emplois. En effet, de ces déclarations résultent 1099 pertes d'emplois. Il s'agit plus précisément de 556 emplois perdus, soit 50,6%, suite aux cessations d'activités et 543 emplois perdus, soit 49,4%, suite aux fermetures d'établissements243(*). Sous l'angle de la moyenne d'emplois perdus par établissement, on note 3,7 emplois perdus par établissements ayant déclaré une cessation d'activité et 4,9 emplois perdus par établissement fermé définitivement, ce qui fait une moyenne globale de 4,2 emplois perdus par établissement fermé244(*).

Les résultats des statistiques en 2017 montrent la situation des emplois perdus en 2017 suite aux cessations d'activités et fermetures d'établissements qui ont été enregistrées. Il est à noter que dans la rubrique « établissements fermés », sontprises en compte les données relatives aux cessations d'activités et aux fermetures d'établissements. Pour ces entreprises qui sont au nombre de 275, les pertes d'emplois s'élèvent à 1764. Comparé à 2016, on note une augmentation des fermetures d'établissements de 4,5% ainsi que des pertes d'emplois de 60,5%. En effet, en 2016, 263 établissements ont été déclarés fermés, avec 1099 emplois perdus245(*).

En ce qui concerne l'année 2018, les « établissementsfermés » et les pertes d'emplois notés sont respectivement 242 et 1 941 faisanten effet un ratio de 8 emplois perdus par établissement fermé. Par rapport à 2017, les« établissements fermés » ont diminué de 12,0% contrairement aux pertes d'emplois quiont connu une hausse de 10,0 %246(*). Les fermetures d'entreprises et les pertes d'emplois ont bondi respectivement à 280 et 1969 en 2019247(*), et ont connu une légère diminution en 2020 par rapport à l'année précédente, faisant état de 233 pour les premières et 1662 pour les secondes248(*).

L'évolution des statistiques sur les fermetures des entreprises et les pertes d'emplois au Sénégal entre 2015, année de révision de l'AUPC et 2020, se présente en dent de scie faisant ainsi apparaitre une instabilité économique et sociale. Ces résultats démontrent que la disparition des entreprises dans l'espace OHADA peine à être maitrisée. Cette tendance étaitobservée de par le passé au Togo.

Au Togo, un rapport sur la survie potentielle et réelle des entreprises pour la période de 2010 à 2015, laissait apparaitre que les entreprises ne manquaient pas de disparaitre provoquant une grande perte économique pour les Etats parties à l'OHADA. En effet, De 2010 à 2015, 70 % des entreprises créées étaient encore en activité. Sur les 40 831entreprises créées de 2010 à 2015 au Centre des Formalités des Entreprises (CFE), 30 %(12 249 entreprises) n'étaient plus en activité. C'est finalement près de 1/3 des promoteursd'entreprises qui avaient dû se résoudre à liquider leur entreprise ou à la céder à un autreexploitant249(*).

Au regard de ces données économiques, il est à noter que l'Acte uniforme portant organisation des procédures collectives et d'apurement du passif n'a pas encore réussi à endiguer les disparitions des entreprises et par ricochet, les pertes d'emplois dans l'espace OHADA.

Les entreprises des créanciers n'étant pas épargnées des risques de disparition du fait des sacrifices qui leurs sont presque systématiquement imposés par la loi, méritent de bénéficier beaucoup plus d'un regard attentif de telle sorte qu'en voulant sauvegarder un débiteur en difficulté, on ne finisse pas par créer de nouvelles victimes pouvant conduire à la disparition de grandes entreprises, qualifiées ainsi du fait de leur taille économique et du nombre d'emplois qu'elles ont créés.

Par ailleurs, le besoin de renforcement de la protection des créanciers est accentué par les récentes expériences de la crise sanitaire liée à la covid-19, qui avait favorisé la liquidation de plusieurs entreprises250(*).

B- Un besoin de renforcement de protection des créanciers accentué par les expériences de la crise sanitaire liée à la covid-19

A une période où le monde est en sortie progressive de la crise sanitaire liée au covid-19, la réflexion sur la condition des créanciers dans le sauvetage des entreprises en difficulté, invite à faire une rétrospection pour mieux se préparer à l'avenir pour un problème similaire éventuel. Cette crise sanitaire s'est montrée d'une particularité incontestable et a eu beaucoup de conséquences aussi bien négatives que positives sur le plan juridique. Conséquences négatives parce que la crise pandémique a bouleversé, voire empêché l'application normale des systèmes juridiques et positives parce qu'elle a révélé les faiblesses de plusieurs de ces systèmes de droit, dont le droit des procédures collectives régi par les dispositions de l'AUPC révisé.Avant une analyse de la situation des créanciers sous le prisme de la crise à coronavirus, un passage en revue des généralités s'avère judicieux.

La Covid-19 (Coronavirus Disease 2019) est une maladie infectieuse, une zoonose, dont l'origine est encore débattue et qui a émergé en décembre 2019 dans la ville de Wuhan, dans la province du Hubei en Chine251(*). Elle est une maladie respiratoire pouvant être mortelle chez lespatients fragilisés par l'âge ou une autre maladie chronique. Elle se transmet par contact rapproché avec des personnes infectées252(*).Elle a bouleversé le monde sur le plan sanitaire253(*). Par sa destruction massive de l'espèce humaine, la Covid-19 a désarticulé les plans de développement et mis à nu l'esprit de grandeur.

Pour endiguer sa progression, les États ont dû prendre des mesures plus ou moins drastiques. Il s'agit, entre autres, de la restriction des déplacements des personnes ou leur interdiction, du confinement ciblé ou généralisé, de la fermeture des frontières, de la suspension des vols, de l'instauration de l'état d'urgence sanitaire avec son cortège de règles254(*).

Ces mesures quoique nécessaires pour inverser ou arrêter la progression alarmante du nombre de malades et de morts à travers le monde, ont impacté négativement l'économie et sont à n'en point douter, sources d'importantes perturbations dans le monde des affaires.

Le fonctionnement de l'entreprise a été en effet perturbé non seulement par les restrictions ou interdictions de déplacement des personnes, mais aussi par les difficultés d'approvisionnement en matières premières, d'indisponibilité temporaire de la clientèle commerciale, de la non-exécution de beaucoup de contrats. Certains ont pu dire que l'économie était en confinement aussi255(*).

Alors que les économistes réfléchissaient sur l'impact de la Covid-19 sur les activités économiques et la croissance, les juristes pensaient à sa répercussion sur le droit.

Les mesures imposées par la lutte contre la propagation rapide de la covid-19 étaient aux antipodes des règles de droit commun, qui régissent les rapports entre les acteurs économiques, et spécialement du droit des affaires en vigueur dans l'espace OHADA. Les délais prévus par les actes uniformes, sous peine de forclusion sont mis à l'épreuve parce que leur respect nécessitait, pour la plupart, des rassemblements des personnes, des déplacements, donc des contacts physiques. Les entreprises, sous l'influence des mesures urgentes qui s'imposaient, ne pouvaient plus satisfaire convenablement à leurs obligations légales et contractuelles256(*). Face à ce contexte de pandémie, la question de la compétence de légiférer s'était posée avec acuité. A qui revenait-il d'adopter les textes portant mesures d'urgence pour adapter le fonctionnement et les activités des entreprises à la situation qui bouleversait le monde entier ?

Le législateur OHADA, n'a pas prévu dans son système juridique des dispositions définissant l'organe compétent à légiférer en cas d'urgence, ni des procédures à observer dans ces cas. Certains parlent de carence révélée en droit des affaires OHADA257(*). En effet, si l'on s'en tient au parallélisme des formes, il peut être admis que l'organe compétent pour adopter des mesures d'urgence est le Conseil des Ministres de l'OHADA qui a adopté lui-même les actes uniformes258(*). Mais il n'était pas évident que cet organe soit en mesure de répondre utilement et dans un bref délai aux impératifs causés par la situation pandémique. Cela était vrai d'autant plus que le droit des affaires OHADA ne contient pas une disposition expresse autorisant le Conseil des Ministres à prendre des mesures dérogatoires aux actes uniformes, sans passer par la procédure de révision prévue à cet effet et qui se trouve être longue259(*).

Par ailleurs, les Etats membres de l'OHADA ne pouvaient pas rester indifférents face à la carence constatée dans le droit OHADA pendant la crise sanitaire liée à la covid-19. Ils avaient l'obligation de garantir et de protéger les vies de leurs citoyens et leurs économies, ainsi que l'exigent leurs Constitutions et les instruments internationaux de protection des droits humains, qu'ils ont ratifiés. Là encore, le droit des affaires OHADA a été défié dans son caractère supranational et sa vocation à uniformiser les règles relevant du domaine des affaires. En effet, les Etats ont, par l'adoption des décrets et ordonnances, pris des mesures exceptionnelles identiques dans leurs formes et dans leurs finalités, mais sans doute, différentes quant aux fonds en raison de leurs réalités sociales et économiques propres. Cette situation n'est pas sans conséquences juridiques. Les mesures d'urgence prises par les Etats membres pour limiter la propagation de la maladie, étaient-elles juridiquement valables ? Dans une certaine mesure, la réponse à cette interrogation semble négative au regard de l'article 10 du traité créant l'OHADA260(*) et le caractère impératif des Actes uniformes. Les Etats ne pouvaient valablement adopter des textes dérogatoires aux Actes uniformes que dans les cas où ces actes eux-mêmes autorisent des dérogations261(*). Le droit des affaires OHADA en vigueur ne contient pas une habilitation des Etats à prendre des mesures exceptionnelles dérogeant aux règles impératives en matière du droit des sociétés commerciales ou des voies d'exécution ou encore des procédures collectives, pour ne citer que celles-là. Leur habilitation doit passer par une révision du traité OHADA pour y être introduite262(*). Ainsi, du point de vue juridique, les mesures prises par les Etats ou les entreprises en violation des Actes uniformes sont, en principe, inopérantes263(*). Or, dans le contexte de la covid-19, les délais légaux d'accomplissement de certains actes ou de certaines formalités obligatoires prescrits à peine de nullité, ne pouvaient plus être observées. Mêmes les règles autorisées à faire l'objet de stipulations contraires par les entreprises n'ont qu'une portée limitée face à la crise sanitaire de la covid-19. Il en est de même des dispositions des actes uniformes compatibles aux exigences imposées par la situation de la covid-19. Nous pouvons évoquer, en exemples, les règles relatives à la tenue de réunions ou de vote par visioconférence ou tout autre moyen de télécommunication.

Le droit des entreprises en difficulté, constitue l'une des matières qui entrent dans le champ du droit des affaires OHADA et n'a pas été épargné des implications de la pandémie, qu'elles soient juridiques ou économiques. Il setrouve que les tous premiers dégâts causés par une crise financière qui frappe uneentreprise ont essentiellement trait aux difficultés de paiement des créanciers et dessalariés, sans lesquels l'entreprise ne peut fonctionner.Ainsi, les créanciers ne sont pas restés en marge des perturbations. En effet, le souci premier des créanciers est de recouvrer leurs créances dans le délai convenu avec le débiteur. Les créanciers prennent également des engagements vis-à-vis de leurs partenaires d'affaires en prévision du recouvrement de leurs créances pour les exécuter au moment venu. Avec la covid-19, tout le cortège des mesures prises par les Etats parties, notamment la fermeturetemporaire de certaines entreprises dans le but d'éviter des rassemblements, a suscité la crainte que ces entreprises aient dumal à faire face aux engagements qu'elles avaientpris à l'égard de leurs créanciers. Le sort dessalariés de l'entreprise semblait encore plus alarmant264(*).Ce qui revient à dire que la crise liée à la covid-19 qui était non seulement sanitaire, mais également économique, était de nature à aggraver la situation des entreprises dont les difficultés étaient naissantes. Ainsi, les créanciersétaient appelés à souffrir doublement. Outre les sacrifices à eux imposés par les dispositions de l'AUPC révisé, ils étaient contraints de se plier aux mesures de lutte contre la propagation rapide du coronavirus, de faire face au retard de paiement de leurs créances. Le risque pour les entreprises des créanciers d'être victimes de difficultés pouvant les conduire à fermer définitivement leurs portes était plus élevé.

Les effets de la pandémie sur la situation des créanciers dans le sauvetage des entreprises doivent attirer l'attention du législateur sur la nécessité d'améliorer de manière significative la condition de ceux-ci en prenant en compte beaucoup plus leurs intérêts.

Plusieurs facteurs justifient donc le besoin de renforcement de la protection des créanciers dans les procédures de sauvetage prévues par l'AUPC révisé, que ce soit les objectifs du législateur OHADA, les données statistiques et les implications de la pandémie liée au covid-19. Il sera alors question de rechercher quelles doivent être les orientations du renforcement souhaité de la protection des intérêts des créanciers.

PARAGRAPHE 2 : LES ORIENTATIONS DU RENFORCEMENT SOUHAITE DE LA PROTECTION DES INTERETS DES CREANCIERS

Après avoir identifié le besoin de renforcement de la prise en compte des intérêts des créanciers dans les procédures de sauvetage, il s'avère important de dégager les orientations de ce renforcement souhaité. Le renforcement de protection souhaité est non seulement dirigé vers les créanciers en général (A), mais aussi vers les créanciers bénéficiaires d'un traitement spécial (B).

A- La nécessité d'un renforcement de la protection des créanciers en général

Il faut rappeler que dans le cadre des procédures de sauvetage, les créanciers dont les droits sont assez malmenés sont les créanciers antérieurs265(*), autrement dit les créanciers dont les créances sont nées avant la décision d'ouverture. Pour atteindre un niveau de protection efficace de ces créanciers, le conditionnement de leur soumission à la discipline collective et un renforcement de leur rôle dans le déroulement des procédures collectives s'avèrent importantes.

L'idée de conditionnement de la soumission des créanciers antérieurs à la discipline collective n'est pas nouvelle. En effet, elle apparait dans la pensée du législateur OHADA lui-même. Ainsi, l'article 15 alinéa 5 AUPC révisé dispose que « Si malgré les bons offices du président, les parties ne parviennent pas à trouver un accord et dans le cas où le concordat préventif comporte seulement une demande de délai n'excédant pas deux ans, la juridiction compétente peut rendre ce délai opposable aux créanciers qui ont refusé tout délai et toute remise sauf si ce délai met en péril l'entreprise de ces créanciers. ».

Il résulte de cette disposition précitée qu'en matière du règlement préventif, si l'opposabilité du délai de deux ans que comporte la demande concordataire du débiteur met en péril « les entreprises des créanciers » concernés, elle ne pourra plus être mise en oeuvre. Malgré les contours peu ou prou flous de cette règle, celle-ci est une véritable prise en compte des intérêts des créanciers en cause. Une fois encore, le législateur met en évidence les répercussions que l'imposition de la discipline collective peut avoir sur la santé économique et financière des entreprises des créanciers.

Il existe également dans le cadre du redressement judiciaire une opposabilité du délai de deux ans aux créanciers qui auraient refusé tout délai et toute remise demandés dans le concordat judiciaire. Cependant, l'on ne comprend pas pourquoi, cette fois-ci, l'AUPC révisé s'est limité à la possibilité donnée au juge d'imposer le délai de deux ans à ces créanciers. L'AUPC révisé ne prend pas en compte les implications négatives de cette option sur la situation des créanciers concernés. Ainsi, en matière du redressement judiciaire, c'est l'article 134 qui prévoit l'hypothèse de l'imposition des délais. En effet, l'article 134 alinéa 1er prévoit que l'homologation du concordat de redressement judiciaire rend celui-ci obligatoire à l'égard de tous les créanciers antérieurs à la décision d'ouverture, quelle que soit la nature de leurs créances, sauf disposition législative particulière interdisant à l'administration de consentir des remises ou des délais. L'alinéa 2 de ce même article ajoute que « toutefois, les créanciers bénéficiant de sûretés réelles spéciales ne sont obligés que par les délais et remises particuliers consentis par eux ; si le concordat comporte des délais n'excédant pas deux ans, ceux-ci peuvent leur être opposés si les délais par eux consentis sont inférieurs ». Bien qu'édictant la possibilité d'imposer des délais n'excédant pas deux ans aux créanciers refusant tout délais et remise et dont les délais consentis sont inférieurs à deux ans, l'article 134 AUPC révisé ne prévoit pas le cas où cette opposabilité serait de nature à mettre en péril les entreprises des créanciers.

La subordination de l'opposabilité des délais n'excédant pas deux (02) ans aux créanciers refusant tout délai et remise à l'absence de péril des entreprises de ceux-ci, dans le cadre du règlement préventif ne peut pas être applicable dans le cadre du redressement judiciaire. Cela découle du fait que le règlement préventif et le redressement judiciaire sont deux procédures distinctes l'une de l'autre. Etendre l'application de l'article 15 alinéa 5 in fine au redressement judiciaire reviendrait à créer une confusion entre le règlement préventif et le redressement judiciaire qui sont des procédures ayant chacune son régime juridique propre266(*).

D'après une doctrine,« Contrairement au législateur français de 2005, qui autonomise la liquidation judiciaire, les procédures judiciaires collectives à caractère curatif du droit OHADA sont presque soumises aux mêmes dispositions. Le règlement préventif est réglementé au titre premier alors que le redressement judiciaire et la liquidation des biens sont organisés au deuxième titre de l'AUPC. Aussi, en droit français, la procédure de sauvegarde est plus substantiellement proche du redressement judiciaire que l'est notre règlement préventif avec le redressement judiciaire. Outre la proximité téléologique entre le règlement préventif et le redressement judiciaire (la recherche du sauvetage du débiteur en difficulté), les deux procédures ont de réels points de rupture sous l'angle de leur aménagement substantiel et technique »267(*).

De ce qui précède, il résulte qu'en l'état actuel du droit OHADA des procédures collectives, l'article 15 alinéa 5 de l'AUPC révisé ne peut s'appliquer en matière de redressement judiciaire. Ainsi, un besoin de légiférer se fait sentir avec beaucoup d'acuité. Il invite à insérer un article dans le régime juridique du redressement judiciaire pour prévoir la subordination de l'opposabilité des délais n'excédant pas deux ans à l'absence de péril des entreprises des créanciers concernés.

Par ailleurs, une solution plus globale est susceptible d'être envisagée en s'inspirant d'autres textes. Il s'agit en effet de la solution consacrée par l'Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et voies d'exécution (AUPSRVE)268(*). En effet, l'article 39 alinéa 1 et 2 AUPSRVE disposeque :

« Le débiteur ne peut forcer le créancier à recevoir en partie le paiement d'une dette, même divisible.

Toutefois, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, la juridiction compétente peut, sauf pour les dettes d'aliments et les dettes cambiaires, reporter ou échelonner le paiement des sommes dues dans la limite d'une année».

A la lecture des dispositions de l'article précité, le législateur a entendu équilibrer la protection des intérêts conflictuels en jeu, ceux du débiteur, qui serait déjà en état économique et financier fragile d'une part et ceux des créanciers face à leurs besoins. Ces besoins des créanciers visés par la loi peuvent varier, mais toujours est-il qu'ils sont directement ou indirectement économiques et financiers. Cette approche semble plus conforme à la vocation du droit en général à assurer la justice, l'égalité et l'équité dans les rapports juridiques. Pour conforter cette approche dans la conciliation des intérêts conflictuels en présence, la Cour Commune de Justice et d'Arbitrage (CCJA) n'est pas restée indifférente.

En effet, dans un arrêt, la CCJA avait retenu que« Doit être cassé, pour violation de l'article 39 de l'Acte uniforme sus énoncé, l'arrêt de la Cour d'appel qui, pour accorder le délai de grâce à la Société INDUSCHIMIE pour le paiement de sa dette à l'égard de Madame KHOURI Marie, n'a fait état, ni donné son appréciation des besoins de la créancière, Madame KHOURI, se bornant à indiquer que c'est pour permettre à celle-ci de percevoir régulièrement sa créance qu'elle ramène à 1.000.000 F la somme mensuelle à payer par INDUSCHIMIE. Ce faisant, la Cour d'appel ne s'est pas conformée aux dispositions de l'article 39 de l'Acte uniforme précité. De même, en ramenant à un million (1.000.000) de francs CFA le montant de la somme à verser mensuellement par INDUSCHIMIE à Madame KHOURI dont la créance totale en principal, intérêts et frais s'élève à 28.910.515 F CFA, la Cour d'appel a décidé d'échelonner le paiement des sommes dues au-delà de « la limite d'une année» fixée par ledit article 39 » 269(*).

Cette jurisprudence affirme ainsi la nécessité de prendre en compte les besoins des créanciers face à un débiteur en état déjà fragile que l'on veut soutenir en vue d'éviter pour lui des difficultés plus graves.Même si la mise en oeuvre de l'article 39 AUPSRVE a soulevé des discussions270(*), son existence est un facteur de promotion de la justice économique.

Dans le cadre des procédures de sauvetage des entreprises régies par l'AUPC révisé, cet équilibre dans la protection des intérêts en conflits n'est pas atteint. L'on peut penser que cette approche serait contraire à la volonté du législateur OHADA qui veut assurer la rapidité des procédures en consacrant des délais plus ou moins courts271(*) car certains créanciers pourraient se cacher derrière cette règle pour demander le paiement de leurs créances et exclure le débiteur de toute chance de sauvetage. Pour écarter un recours abusif à cette proposition de solution, il serait salutaire que le législateur prévoit à côté de celle-ci des sanctions pécuniaires et pénales très lourdes à l'égard des créanciers et des dirigeants des entreprises qui tenteront de jouer au dilatoire. Cet arsenal de répression viserait à dissuader toute tentative d'abus dans le recours à cette solution qui prendrait en compte, de manière efficace, les intérêts des créanciers dans les procédures de sauvetage.

En plus, d'autres aspects doivent entrer en jeu dans la conciliation des intérêts du débiteur et ceux des créanciers. En effet, en présence d'un débiteur présentant des chances de survie et d'un créancier en état économique déjà fragile, que les contraintes de sa soumission systématique à la discipline collective pourraient conduire en cessation de paiements (en raison de l'importance du montant de sa créance) voire en liquidation des biens, que faudrait-il faire ? Quelle devrait être l'attitude de la juridiction compétente ? A notre avis, il serait bienséant de tenir compte de la taille des entreprises du point de vue économique et du nombre des emplois créés. La solution la plus conforme aux objectifs du droit des procédures collectives et de manière générale, des objectifs de l'OHADA serait de préférer le sauvetage de l'entreprise qui rapportera le plus à l'Etat partie concerné dans le cas où on ne peut sauver les deux entreprises à la fois.

Les pistes de solution dans la recherche d'un minimum d'équilibre entre les intérêts en jeu dans les procédures de sauvetage régies par l'AUPC révisé peuvent être inspirées des dispositions des articles 15 alinéa 5 de ce même texte et 39 alinéa 2 AUPSRVE.

D'autres solutions allant dans le sens d'un renforcement de la prise en compte des intérêts des créanciers sont envisageables. En effet, le rôle des créanciers dans la phase du déroulement des procédures collectives, notamment dans l'élaboration du plan de redressement demande un renforcement. Pour améliorer l'implication des créanciers dans l'élaboration des plans de redressement, la doctrine272(*) propose que le législateur s'inspire du droit français des entreprises en difficulté. En droit français, une grande place est accordée aux créanciers pendant les procédures de traitement des difficultés du débiteur. En effet, si jusqu'alors, seul le plan de continuation élaboré par le débiteur etl'administrateur pouvait être soumis au tribunal, désormais, les créanciers membres d'un comité peuvent proposer un projet de planqui sera soumisau tribunal concurremment avec celui du débiteur. Cette place accordée aux créanciers membres du comité découle d'une disposition du Code de commerce français en vigueur en 2014, laquelle prévoit que « Le débiteur, avec le concours de l'administrateur, présente aux comités de créanciers des propositions en vue d'élaborer le projet de plan mentionné à l'article  L. 626-2. Tout créancier membre d'un comité peut également soumettre un projet de plan qui fera l'objet d'un rapport de l'administrateur »273(*). Obligatoire dans les entreprises les plus importantes, seulementfacultative dans les autres hypothèses, la création de comités decréanciers dont le nombre et la composition sont précisés par lestextes, permet à ces derniers d'intervenir dans le déroulement desprocédures de sauvegarde et de redressement judiciaire. Cet article a été modifié par l'ordonnance n° 2021-1193 du 15 septembre 2021 portant modification du livre VI du Code de commerce et publié au Journal officielle de la République française n° 0216 du 16 septembre 2021. L'article L.626-30-2 dispose désormais que « Le débiteur, avec le concours de l'administrateur, présente aux classes de parties affectées des propositions en vue d'élaborer le projet de plan. En deçà des seuils prévus par l'article L. 721-8, les détenteurs de capital du débiteur, s'ils sont affectés par le projet de plan, peuvent apporter une contribution non monétaire à la restructuration, notamment en mettant à profit leur expérience, leur réputation ou leurs contacts professionnels ». Il résulte en effet de cette modification que le « comité des créanciers » de l'ancien article L.626-30-2 a été remplacé par les « parties affectées ».La notion de « partie affectée » vise « les créanciers dont les droits sont directement affectés par le projet de plan », ainsi que les détenteurs de capital si leur participation au capital du débiteur, les statuts ou leurs droits sont modifiés par le projet de plan274(*). Mais toujours est-il que les créanciers participent par leur expérience, leur réputation ou leurs contacts professionnels à l'élaboration des plans de redressement.

Une solution au problème de l'issue incertaine des accords concordataires serait d'impliquer les Etats parties dans la promotion du sauvetage des entreprises en difficulté. Il est vrai que le principe actuellement en vigueur est celui de l'interdiction des aides publiques aux entreprises en difficultés à cause de l'inégalité que celles-ci peuvent créer275(*). Cependant, la mise en place par les Etats parties d'un fonds public pour garantir l'exécution des accords concordataires serait un moyen d'encourager les créanciers à s'investir beaucoup plus dans le redressement des entreprises qui ont des chances de survie.

Pour une meilleure implication des créanciers dans l'élaboration des plans de redressement, le législateur OHADA pourrait bien s'inspirer du législateur français.

Outre ces considérations d'ordre général, des ajustements spécifiques de la condition de certains créanciers sont aussi nécessaires.

B- L'ajustement nécessaire de la protection des créanciers bénéficiaires d'un traitement spécial

Le législateur OHADA a manifesté sa volonté de protéger les créanciers propriétaires de biens meubles à travers des traitements spéciaux qui leur sont réservés. Pour rappel, les vendeurs de meubles sont dispensés de l'obligation de produire leurs créances et les vendeurs de biens bénéficiaires d'une clause de réserve de propriété jouissent d'une certaine protection qui découle du droit à la revendication.

L'exercice du droit à revendication n'est pas pour autant automatique. Il est soumis à la réunion d'un certain nombre de conditions. En effet, la revendication par le propriétaire de son bien dans le patrimoine du débiteur concerne des biens visés par la loi et doit s'effectuer dans un délai déterminé277(*).

Dans la phase contentieuse de la revendication, il peut arriver que le juge-commissaire garde le silence suite à l'action en revendication d'un bien. Quel sens donner alors à ce silence ?Dans une décision rendue par le Tribunal de Grande Instance de Ouagadougou, il est donné au silence du juge-commissaire la signification de rejet de la demande du revendiquant. En l'espèce, « A la requête de la Société des Ciments et Matériaux du Burkina (CIMAT), le Tribunal de grande instance de Ouagadougou a rendu le 8 août 2001 un jugement prononçant la liquidation des biens de ladite société, les cabinets SOFIDEC et SAGNON-ZAGRE ont été nommés syndics liquidateurs et Madame SAWADOGO Maria Goretti Juge au siège désignée en qualité de Juge commissaire chargé de superviser les opérations ; par ailleurs le Tribunal a désigné la Société des Ciments d'Abidjan (SCA) et la Direction générale des impôts du Burkina, contrôleurs ; Le 31 octobre 2001 un avis a été publié dans le Journal « le Pays » en vue de la vente de l'usine par les Syndics liquidateurs ; Le 08 novembre 2001 la Société des Ciments d'Abidjan a adressé au Juge commissaire une contestation et sollicitait que ce dernier rétractât son ordonnance autorisant la vente au motif qu'elle est créancière propriétaire du centre de broyage de clinker et demandait que le Juge constate sa qualité de propriétaire ; Aucune suite n'a été donnée à cette sollicitation »278(*).

Pour répondre à la question de savoir quelle est la signification à donner au silence du juge-commissaire suite à l'action en revendication d'un propriétaire, les juges du fond retiennent ce qui suit :

« Attendu en l'espèce que la SCA a produit une créance à hauteur de 7.243.143.125 francs constatée par une sentence arbitrale tout en sollicitant que lui soit reconnue la réserve de propriété ; que les Syndics, tout en admettant la créance ont rejeté la réserve de propriété sollicitée ; que contre cette position des Syndics, la SCA a fait recours au Juge commissaire par une réclamation datée du 8 novembre 2001 ; Attendu qu'aucune suite n'a été donnée à la réclamation de la SCA, que conformément à l'article 40 de l'acte uniforme OHADA précité, si dans les huit jours de sa saisine le Juge commissaire ne donne aucune suite, il est censé avoir rendu une décision de rejet ; Attendu que la voie de recours de la décision du Juge commissaire est l'opposition faite dans les 8 jours ; Qu'il est de principe que celui qui n'exerce pas de voie de recours a acquiescé la décision ; que pour sa requête datée du 8 novembre, le 17 du même mois le délai de l'opposition a commencé à courir, que n'ayant élevé aucune contestation devant le Tribunal de grande instance dans ce délai, la SCA a abandonné son titre de propriétaire du centre de broyage de clinkers ; que dès lors elle ne peut être considérée que comme un simple créancier dans la masse. »279(*)

Il résulte de cette décision précitée que le silence du juge commissaire est « une décision implicite de rejet ! ». La doctrine s'interroge et se demande si on n'est pas en droit de penser à un piège procédural tendu au créancier revendiquant. En tout état de cause, l'éventualité d'une décision implicite de rejet invite à la prudence et à la diligence des créanciers réservataires qui risqueraient de perdre leur droit de propriété sur la chose objet de revendication280(*).

Au-delà de cette précision de l'exercice du droit à revendication reconnu au propriétaire des biens mobiliers, et qui ne soulève pas un problème majeur, il y a lieu de relever que la protection du propriétaire n'est pas absolue. Une analyse profonde permet de ressortir quelquesinsuffisances auxquelles il faut chercher à remédier. En effet, il est question de la revendication en rapport avec une clause de réserve de propriété.

Historiquement, l'action en revendication visait exclusivement à faire reconnaitre un droit de propriété et à réclamer la restitution du bien objet du contrat assorti d'une clause de réserve de propriété, à son légitime propriétaire. Le propriétaire qui revendiquait un bien devait rapporter la preuve que la chose revendiquée était bel et bien ce qu'il avait remis au débiteur, faute de quoi, celui-ci ne pouvait pas avoir gain de cause. Cela posait alors le problème de la revendication des choses fongibles car il était plus fréquent que le propriétaire ne puisse pas identifier le bien objet de sa propriété parmi les biens de même nature qui se trouvaient dans le patrimoine du débiteur. De ce fait, le caractère fongible de certains biens dressait un mur à la revendication puisque la remise d'une chose fongible conduisait à la disparition du droit de propriété du remettant. Ainsi, le propriétaire ne pouvait que mettre en oeuvre son droit personnel en demandant le paiement du prix du bien. Par conséquent, lorsque le débiteur fait l'objet d'une procédure collective, le propriétaire bénéficiaire d'une clause de réserve de propriété n'était qu'un simple créancier chirographaire qui n'occupait que les derniers rangs dans le paiement des créanciers concurrents. De plus, même quand le bien était identifié, la clause de réserve de propriété était inopposable à la masse des créanciers281(*). La clause de réserve de propriété était ainsi paralysée par l'ouverture de la procédure collective. La Cour de cassation française décidait sous l'empire des textes alors en vigueur en Afrique que la revendication se heurtait à cette règle de droit qui interdit aux vendeurs de marchandises de reprendre, au préjudice de la faillite, les choses livrées avant ladite faillite, en exécution d'une vente même conditionnelle, et devenue, par leur entrée dans les magasins de l'acquéreur, des éléments de la solvabilité apparente de celui-ci282(*). Cette solution classique était retenue en ces termes : « Attendu que les choses mobilières vendues à un commerçant tombé par la suite en faillite ou en liquidation judiciaire ne peuvent, quand elles ont été effectivement livrées à l'acheteur et sont devenues ainsi des éléments de la solvabilité apparente de ce dernier, être revendiquées par le vendeur à l'encontre de la masse des créanciers, ni par la voie de l'action résolutoire des articles 1184 et 1654 du code civil, ni sur le fondement d'une clause du contrat qui aurait suspendu le transfert de la propriété sur la tête dudit acheteur, jusqu'à paiement complet du prix »283(*).

Un autre arrêt avait été rendu dans le même sens. Il s'agissait d'un arrêt de la Chambre des requêtes de la Cour de cassation du 21 juillet 1897 qui avait retenu que la clause de réserve de propriété « n'est pas opposable à la faillite de l'acheteur, aucune revendication ne pouvant être exercée sur des marchandises que le failli a reçues dans ses magasins et qui sont devenues, par la possession ostensible qu'il en avait comme acheteur, l'un des éléments de sa solvabilité apparente»284(*).

Aujourd'hui, la clause de réserve de propriété a connu d'importantes améliorations en France par une loi du 12 mai 1980 reprise par l'article 121 de la loi du 25 janvier 1985285(*).

Dans l'espace OHADA, l'efficacité de la clause de réserve de propriété est subordonnée à sa stipulation dans un écrit au plus tard au jour de la livraison du bien et à la publication régulière au registre du commerce et du crédit mobilier (RCCM)286(*). Cependant, lorsque le débiteur est en difficulté, l'exercice du droit de revendication reconnu au créancier propriétaire du bien objet d'un contrat assorti d'une clause de réserve de propriété, est subordonné à l'existence de ce bien en nature dans le patrimoine du débiteur. Ce qui n'est pas sans effet sur le créancier réservataire qui peut se retrouver dans une situation délicate. Selon la doctrine, cette situation risquerait de paralyser l'action des fournisseurs de matériel professionnel et de marchandises287(*). En effet, l'usage de certains équipements nécessite une solide implantation au sol ou une incorporation à d'autres appareils. Ces biens sont attachés à perpétuelle demeure formant avec le reste du matériel ou le fonds de commerce un bloc indivisible. La nature juridique de ces biens peut subir un changement du fait des travaux d'installation entrepris sur eux. Il en découle que le matériel qui était meuble au moment de la conclusion de la vente devient un immeuble par destination conformément. Dès lors, l'action en revendication devient irrecevable parce que le nouveau statut du bien l'exclut du champ d'application de l'article 103 de l'AUPC révisé.

Le jugement n° 701 du 26 juin 2002 précité illustre bien cette situation. En effet, il ressort de ce jugement que « Attendu que la SCA invoque que les objets constituant le centre de broyage de clinker sont sa propriété qu'il échet d'analyser leurs natures ; Attendu que les biens dont s'agit, acquis à la CIMAT depuis plus de 10 ans ont subi des transformations ; Qu'il s'agit de biens acquis en seconde main que leurs états au moment de l'acquisition n'a pas demeuré du fait des changements des pièces ; Attendu par ailleurs qu'au terme des articles 524 et 525 du code civil, sont immeubles par destination, tous effets mobiliers que le propriétaire a attachés au fonds à perpétuelle demeure ; Que le propriétaire est sensé avoir attaché à son fonds à perpétuelle demeure lorsque les effets mobiliers sont scellés en plâtre où à chaux ou à ciment, ou lorsqu'ils ne peuvent être détachés sans être fracturés et détériorés ; Attendu que les biens réclamés par la SCA sont scellés à perpétuelle demeure à l'usine CIMAT formant avec le reste du matériel un tout indivisible, qu'il s'ensuit que lesdits biens sont devenus immobiliers ; que les conditions de l'article 103 sus-cité ne sont pas réunies et qu'il échet déclarer l'action mal fondée. »288(*).

S'agissant des marchandises, elles sont destinées à la vente. Le fait de soumettre l'action en revendication à l'existence du bien en nature dans le patrimoine du débiteur, à l'ouverture de la procédure collective, rend inefficace la réserve de propriété. En effet, les marchandises ne peuvent pas faire l'objet de marquage spécial qui faciliterait leur identification dans les magasins du débiteur. Même si la procédure collective vient à êtreouverte juste après la livraison des marchandises, il serait toujours difficile pour les créanciers propriétaires de prouver la propriété des biens livrés. Il découle de ces hypothèses que la condition duréservataire ne tient qu'à un seul fil qui peut être facilement coupé.

La protection du réservataire, qui semblait à première vue absolue, se révèle ainsi limitée. De plus, le fait de subordonner la revendication à l'existence en nature du bien objet de la réserve de propriété dans le patrimoine du débiteur risque de paralyser les créanciers. Ces derniers ne pourront plus exercer les actions en revendication lorsque le débiteur aliène, par exemple, le bien dont la propriété est réservée et le remplace par un bien de même nature289(*). Ainsi, les créanciers qui ont vu les sûretés traditionnelles être paralysées par l'ouverture d'une procédure collective contre le débiteur et qui n'ont plus la garantie que devait leur offrir la clause de réserve de propriété, seront de plus en plus réticents à accorder du crédit aux entreprises. Certains auteurs ont pu même dire que la réserve de propriété est devenue « un billet de loterie gratuit »290(*), « une sûreté aléatoire »291(*). Dans l'espace africain, la plupart des entreprises n'ont pas de fonds propres suffisants. Elles s'appuient le plus souvent sur des emprunts de diverses natures et l'achat à crédit de marchandises. La situation des créanciers réservataires n'est donc pas favorable au développement économique des Etats dans la mesure où la prudence des fournisseurs consiste de plus en plus à exiger des garanties beaucoup plus protectrices de leurs intérêts.

Pour une meilleure protection des créanciers réservataires, la doctrine propose un élargissement de l'assiette de la revendication. Cette solution consiste à quitter l'étape de la stabilisation de l'assiette de la revendication. En effet, il ne s'agira plus de conditionner la revendication du bien objet de la réserve de propriété à l'existence en nature dudit bien dans le patrimoine du débiteur. Pour inciter les créanciers à faire davantage confiance à leurs partenaires et à prendre des risques, il serait souhaitable d'étendre le droit à revendication sur les biens semblables se trouvant dans le patrimoine du débiteur292(*).

En somme, la préservation des droits des créanciers s'avère aujourd'hui nécessaire surtout dans un contexte économique défavorable293(*) et où la vie des entreprises est menacée par les effets de la crise sanitaire liée à la covid-19.

CONCLUSION

La condition des créanciers dans le cadre du sauvetage des entreprises en droit OHADA a connu une certaine amélioration à travers l'AUPC révisé. Cependant, elle semble insatisfaisante du point de vue des objectifs recherchés. L'analyse de la situation des créanciers en matière de sauvetage des entreprises fait apparaître sans aucun doute que la notion «d'entreprise» est réduite au seul bénéfice du débiteur. L'objectif de sauvetage que poursuit le législateur OHADA dans l'AUPCrévisé est focalisé sur le débiteur et au détriment des entreprises descréanciers. Ce déséquilibre se révèle dangereux et manifeste dans le traitement des entreprises en matière des procédures collectives. La tendance classique - celle qui consistait à faire primer les droits des créanciers sur ceux du débiteur - semble avoir été renversée en ce que les entreprises des créanciers peuvent être sacrifiées au profit de celle du débiteur, qui même par sa mauvaise gouvernance, a mené celle-ci en état de santé économique critique. N'est-ce pas une porte ouverte pour créer de nouvelles victimes en voulant sauver à tous les prix un débiteur économiquement ou financièrement « malade » ? N'est-ce pas une manière de compromettre l'objectif de sauvetage de l'entreprise placé au coeur de la politique du législateur OHADA en matière des procédures collectives d'apurement du passif ? Si un équilibre absolu ne peut tout de même pas exister entre la protection des intérêts du débiteur et ceux des créanciers, il s'annonce toutefois indispensable d'arrimer les textes de l'AUPC révisé à un traitement satisfaisant des créanciers et de créer, par conséquent, un minimum d'équilibre pour atteindre les objectifs que se sont fixés les États parties de l'OHADA.

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A- Législation communautaire

v Traité OHADA du 17 octobre 1993 relatif à l'Harmonisation du droit des affaires en Afrique, entré en vigueur le 18 septembre 1995 tel que révisé à Québec le 17 octobre 2008 et entré en vigueur le 21 mars 2010, Code Ohada Traité et actes uniformes commentés et annotés, Juriscope 2016.

v Acte uniforme du 15 décembre 2017relatif à la médiation, JOHADA, numéro spécial, https://justice.sec.gouv.sn/wp-content/uploads/textes-reglements/OHADA/Acte-uniforme-relatif-mediation-jo-special-15-dec-2017.pdf.

v Acte uniforme :

- Du 10 avril 1998 portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif,JO OHADA n° 07 du 1er juillet 1998, p. 1 et ss, Code Ohada Traité et actes uniformes commentés et annotés, Juriscope 2012.

- Du 10 septembre 2015portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif, JO OHADA n° spécial du 25 septembre 2015, p. 1 et ss., entré en vigueur le 24 décembre 2015, Code Ohada Traité et actes uniformes commentés et annotés, Juriscope 2016.

v Acte uniforme du 10 avril 1998 portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution, publié au Journal Officiel de l'OHADA n° 6 du 1er juin 1998, p. 1 et ss., et entré en vigueur le 10 juillet 1998,Code Ohada Traité et actes uniformes commentés et annotés, Juriscope 2016.

v Acte uniforme du 15 décembre 2010 portant organisation des sûretés, publié au JO OHADA, n° 22 du 15 février 2011, p 1 et ss. et entré en vigueur le 15 mai 2011, Code Ohada Traité et actes uniformes commentés et annotés, Juriscope 2016.

v Acte uniforme :

- Du 17 avril 1997 relatif au droit des sociétés commerciales et groupement d'intérêt économique, publié au JO OHADA n° 2, le 01 octobre 1997, p. et ss., Code Ohada Traité et actes uniformes commentés et annotés, Juriscope 2012.

- Du 30 janvier 2014, publié au JO OHADA n° spécial du 4 février 2014, p. 1 et ss. et entré en vigueur le 5 mai 2014, in Code Ohada Traité et actes uniformes commentés et annotés, Juriscope 2016.

B- Législation nationale

v Décret n° 2020-1589 du 6 août 2020 portant statut des huissiers de justice, https://www.google.com/url?sa=t&source=web&cd=&ved=2ahUKEwjwqvjchY38AhUvnf0HHSOFBukQFnoECAgQBg&url=https%3A%2F%2Fjustice.sec.gouv.sn%2Fwp-content%2Fuploads%2F2021%2F01%2FDecret-2020-1589-du-06-aout-2020-portant-statut-des-huissiers-de-justice.pdf&usg=AOvVaw1d47zkMAIbGzSCJV0C8FvP.

v Loi n° 97-17 du 1er décembre 1997 portant Code du travail au Sénégal, https://www.google.com/url?sa=t&source=web&cd=&ved=2ahUKEwift9eHh438AhW1hP0HHaWhC3EQFnoECAwQAQ&url=https%3A%2F%2Fwww.ofnac.sn%2Fresources%2Fpdf%2FCodes%2FCode-Travail.pdf&usg=AOvVaw2q10969AdPbhu0C9NsANRP.

v Loi n° 1963-62 du 10 juillet 1963 portant Code des Obligations Civiles et Commerciales (COCC) du Sénégal modifié par la loi n° 1977-64 du 26 mai 1977, https://www.google.com/url?sa=t&source=web&rct=j&url=https://www.snr.gouv.sn/sites/default/files/Senegal%2520Civil%2520%2526%2520Commercial%2520Obligations%2520Code.pdf&ved=2ahUKEwj4w7-KiY38AhWZ87sIHTpFAaYQFnoECBEQAQ&usg=AOvVaw23-G8LpteNBGcTXjCqWqK8.

v Loi n° 2008-26 du 28 juillet portant règlementation bancaire au Sénégal, http://www.droit-afrique.com/upload/doc/senegal/Senegal-Loi-2008-26-reglementation-bancaire.pdf.

C- Législation étrangère

v Loi n°2005-845 du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises, entrée en vigueur le 1er janvier 2006, JORF n° 173 du 27 juillet 2005,

https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000000632645/.

v Loi n°67-563du 13 juillet 1967 sur le règlement judiciaire, la liquidation des biens, la faillite personnelle et les banqueroutes, www.légifrance.gouv.fr.

v Loi n° 84-148du 1er mars 1984 relative à la prévention et au règlement amiable des difficultés des entreprises, www.légifrance.gouv.fr.

v Lois n° 85-98 et n° 85-99 du 25 janvier 1985 relative au redressement et à la liquidation judiciaires des entreprises, JORF du 26 janvier 1985 modifiées par la loi n° 94-475 du 10 juin 1994, www.légifrance.gouv.fr.

v Ordonnance n° 2021-1193 du 15 septembre 2021 portant modification du livre VI du code de commerce, JO du 16 septembre 2021,

https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000044044563/.

V- JURISPRUDENCES

A- Jurisprudences communautaires

v CCJA, arrêt n°026/2015 du 9 avril 2015, affaire BICICI C/ Société DELBAU, https://guilaw.com/cour-commune-de-justice-et-darbitrage-chambre-3-arret-n-026-2015-du-09-avril-2015.

v CCJA, Arrêt n° 035/2005 du 2 juin 2005, Dame KHOURI Marie c/ 1°/ SOCIETE HYJAZI SAMIH ET HASSAN DITE INDUSCHIMIE ; 2°/ SOCIETE GENERALE de BANQUES EN COTE D'IVOIRE DITE SGBCI, www.ohada.com, Ohadata J-06-14.

B- Jurisprudences nationales

v CA d'Abidjan, Chambre civile et commerciale, arrêt n°53, 1er Avril 2005, Penant 864, p.363, note Bakary Diallo.

v CA Yaoundé, arrêt n° 162/C du 19 décembre 2008, obs. sous art. AUPC révisé.

v T. com. Bobo-Dioulasso, jugement n° 057 du 24 septembre 2014, inédit, obs. sous art. 127 AUPC révisé.

v T. Com. Lomé, jugement n° 0084/2022 du 9 février 2022, Société SINEQUANON SARL, inédit.

v T. Com Lomé, jugement n°0691/2021 du 17 novembre 2021, Société GMT SHIPPING SA, inédit.

v T. com. Bamako, jugement n° 113 du 2 mars 2005, V. obs. sous art. 13 AUPC révisé.

v TGI Ouagadougou, jugement n° 701 du 26 juin 2002, Société des ciments d'Abidjan C/ Syndics liquidateurs de la Société des ciments et matériaux du Burkina, www.ohada.com, Ohadata J-04-42.

v TGI Wouri, jugement n° 785 du 3 août 2006, obs. sous art. 21 AUPC révisé. En matière de redressement judiciaire, V. TGI, Ouagadougou, jugement n° 90bis du 24 janvier 2001, www.ohada.com, ohadata J-04-181 (conversion du redressement judiciaire et liquidation des biens suite à la résolution du concordat).

C- Jurisprudences étrangères

v Cass. Com. Fr. 22 septembre 2015 : Rev. sociétés 2015. 761, obs. Ph. Roussel-Galle.

v Cass. Com. Fr., 5 mai 2004,

https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000007047660, consulté le 11 mars 2022.

v Cass. com. Fr., 6 mars 2019, 17-20-545,

https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000038238578, consulté le 11 mars 2022.

v Cass. fr. civ., 28 mars et 22 octobre 1934, https://www.senat.fr/rap/1979-1980/i1979_1980_0014.pdf.

VI- RAPPORTS ET COMMENTAIRES

v Centre de formalités des entreprises du Togo, « Etude sur la survie des entreprises au Togo », p. 17, https://www.cfetogo.tg/etude/RAPPORT_CFE.pdf, consulté le 27 mars 2022.

v Direction générale du travail et de la sécurité sociale du Sénégal :

- Rapport annuel des statistiques du travail 2016 du Sénégal, p. 32, http://www.statsenegal.sn/rapports-d-activites-de-la-dste/item/download/60_896c191371791c2109a65aac1b28e76e.html, consulté le 27 mars 2022.

- Rapport annuel des statistiques du travail en 2017, p. 30, https://www.google.com/url?sa=t&source=web&rct=j&url=https://www.dgtss.gouv.sn/sites/default/files/rrapport_annuel_statistiques_du_travail_2017__0.pdf&ved=2ahUKEwjj4uG5n873AhXv7rsIHQp6AwQQFnoECAgQAQ&usg=AOvVaw2HWdjghfHzB7Qv0NZivjW3, consulté le 27 mars 2022.

- Rapport annuel des statistiques du travail 2018, p. 38,

https://www.dgtss.gouv.sn/fr/mediatheque/documents/rapports-statistiques, consulté le 15 juin 2022.

- Rapport annuel des statistiques du travail 2019,

https://www.dgtss.gouv.sn/fr/mediatheque/documents/rapports-statistiques, consulté le 15 juin 2022.

- Rapport annuel des statistiques du travail 2020, V. lien précédent, consulté le 15 juin 2022.

v Ministère de l'économie, du plan et de la coopération du Sénégal, « Recueil des principaux textes émis depuis le début de la crise sanitaire liée au covid-19 », https://www.economie.gouv.sn/sites/default/files/2021-01/Detail-des-textes-reglementaires-Covid-19-v170520.pdf, consulté le 20 mars 2022.

v SAWADOGO (F. M.), Acte uniforme sur les procédures collectives d'apurement du passif in Code Ohada Traité et actes uniformes commentés et annotés, Juriscope 2012, p. 1127.

v Togofirst, « Togo : la facture de la covid-19 sur les entreprises », publié le 14 septembre 2020, § 1er et 5, https://www.togofirst.com/fr/gouvernance-economique/1409-6236-togo-la-facture-de-la-covid-sur-les-entreprises consulté le 19 Juin 2022.

ANNEXES

Document n° 1

« AU NOM DU PEUPLE TOGOLAIS »

Tribunal de commerce de Lomé, chambre ordinaire, jugement N°0691/2021 du 17 novembre 2021, Société GMT SHIPPING TOGO SA EN LIQUIDATION (SCP AQUEREBURU & PARTNERS)

ENTRE : La société GMT SHIPPING TOGO SA EN LIQUIDATION, société anonyme avec conseil d'administration, inscrite au Registre du Commerce et du Crédit Mobilier (RCCM) de Lomé sous le numéro TG-LOM 2011 B 1916, ayant son siège social à Lomé, agissant poursuites et diligences du liquidateur amiable, la SCP AQUEREBURU & PARTNERS, société d'avocats, juridique et fiscal, sise au 777, avenue Kleber DADJO (Immeuble ALICE), 08 B.P. : 8989 Lomé 08, tél. : 22 21 05 05 / 22 21 49 01, e-mail : contact@aguereburu-partners.com représentée par son gérant Me Alexis Coffi AQUEREBURU ;

Demanderesse, d'une part ;

ET : Quid de droit ;

Sans que les présentes qualités puissent nuire ou préjudicier aux droits et intérêts respectifs des parties en cause mais, au contraire, sous les plus expresses réserves de fait et de droit ;

- POINT DE FAIT : suivant requête en date du 2 novembre 2021, la société GMT SHIPPING TOGO SA EN LIQUIDATION, société anonyme avec conseil d'administration, inscrite au Registre du Commerce et du Crédit Mobilier (RCCM) de Lomé sous le numéro TG-LOM 2011 B 1916, ayant son siège social à Lomé, agissant poursuites et diligences du liquidateur amiable, la SCP AQUEREBURU & PARTNERS, société d'avocats, juridique et fiscal, sise au 777, avenue Kleber DADJO (Immeuble ALICE), 08 B.P. : 8989 Lomé 08, tél. : 22 21 05 05 / 22 21 49 01, e-mail : contact@aguereburu-partners.com représentée par son gérant Me Alexis Coffi AQUEREBURU, a saisi le président du Tribunal de commerce de Lomé aux fins d'ouverture d'une procédure de liquidation des biens ;

Sur cette requête, la cause fut inscrite au rôle général sous le numéro 000781/2021/1101 et appelée à l'audience 10 novembre 2021 au cours de laquelle la requérante a, par le truchement de son conseil, la SCP AQUEREBURU, développé l'affaire et sollicité l'adjudication de sa requête introductive d'instance ;

Le Ministère public qui a eu la parole pour ses réquisitions a déclaré s'en rapporter à Justice ;

POINT DE DROIT : La cause en cet état présentait à juger des différentes questions de droit résultant des déclarations et prétentions de la requérante et des pièces du dossier ; quid des dépens ?

Sur quoi, le tribunal a mis l'affaire en délibéré pour jugement être rendu le 17 novembre 2021 ;

Et ce jour, 17 novembre 2021, vidant son délibéré, le tribunal a rendu le jugement dont la teneur suit :

LE TRIBUNAL

Vu la requête qui précède ;

Vu l'article 145 de l'Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif ;

Le Ministère public entendu ;

Et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Suivant requête en date du 2 novembre 2021, la société GMT SHIPPING TOGO SA EN LIQUIDATION, société anonyme avec conseil d'administration, inscrite au Registre du Commerce et du Crédit Mobilier (RCCM) de Lomé sous le numéro TG-LOM 2011 B 1916, ayant son siège social à Lomé, agissant poursuites et diligences du liquidateur amiable, la SCP AQUEREBURU & PARTNERS, société d'avocats, juridique et fiscal, sise au 777, avenue Kleber DADJO (Immeuble ALICE), 08 B.P. : 8989 Lomé 08, tél. : 22 21 05 05 / 22 21 49 01, e-mail : contact@aguereburu-partners.com représentée par son gérant Me Alexis Coffi AQUEREBURU, a saisi le président du Tribunal de commerce de Lomé aux fins d'ouverture d'une procédure de liquidation des biens ;

Dans sa requête, la société GMT SHIPPING TOGO SA EN LIQUIDATION expose d'abord que la société GMT SHIPPING TOGO SA a connu des difficultés économiques du fait de la baisse sensible de son chiffre d'affaires et des pertes accumulées depuis 2015 ; que cette baisse drastique du chiffre d'affaires est due à diverses causes notamment la situation socio-politique tendue au Togo au cours de l'année 2017 et la rupture des relations professionnelles par les armateurs dont le dernier a rompu son contrat avec la société à la fin de l'année 2017 ; qu'en effet, la société a connu une perte de huit millions (8.000.000) F CFA en 2015, de soixante et un millions (61.000.000) F CFA en 2016 et de onze millions (11.000.000) F CFA en 2017 ; que cette situation a contraint les actionnaires à envisager la fermeture de la société afin de ne pas aggraver sa situation ; qu'à cet effet, la société a procédé à la date du 3 mars 2018 au licenciement pour motif économique de ses sept salariés ; que les actionnaires ont ensuite décidé de procéder à une liquidation amiable et la société civile professionnelle AQUEREBURU & PARTNERS a été nommée liquidateur amiable de la société GMT SHIPPING TOGO SA par une décision de l'assemblée générale mixte en date du 23 janvier 2019 pour une prise d'effet à compter du 25 janvier 2019 ; qu'à la date de la décision de liquidation, la situation financière de la société révélait un actif de dix-huit millions quatre-vingt-quatorze mille six cent cinquante-deux (18.094.652) F CFA contre un passif de vingt millions cinq cent vingt-cinq mille sept cent soixante et un (20.525.761)F CFA ; que, suite à la publication de l'annonce légale de la dissolution dans le quotidien TOGOPRESSE, le Conseil National des Chargeurs du TOGO (CNCT) a transmis au Liquidateur amiable des factures de redevances impayées par la société GMT SHIPPING TOGO SA qui s'élèvent à cinquante-quatre millions sept cent trente-deux mille sept cent soixante-deux (54.732.762)F CFA ; que le 7 mai 2020 le commissaire aux comptes EXCO-FICAO a également évoqué une facture impayée en date du 10octobre 2018 d'un montant de un millions sept cent soixante-dix mille (1.770.000) F CFA ; qu'en définitif, les créances produites à l'encontre de la GMT SHIPPING TOGO SA depuis sa mise en liquidation amiable s'élèvent à un montant total de cinquante-six millions cinq cent deux mille sept cent soixante-deux (56.502.762) F CFA ; que ceci porte le passif de la GMT SHIPPING SA au montant total de soixante-quinze millions deux cent cinquante-huit mille cinq cent vint-un (75.258.521) F CFA ; qu'en conclusion des développements ci-dessus, il est apparu que l'actif disponible de la GMT SHIPPING TOGO SA EN LIQUIDATION qui s'élève à dix-huit millions quatre-vingt-quatorze mille six cent cinquante-deux (18.094.652) F CFA est largement insuffisant pour faire face à son passif qui s'élève à soixante-quinze millions deux cent cinquante-huit mille cinq cent vint-un (75.258.521) F CFA ; que lors de l'Assemblée Générale Extraordinaire du 12 octobre 2020, les actionnaires ont décidé de mettre fin à la liquidation amiable et d'entamer les procédures nécessaires pour une liquidation des biens ;

Ensuite, la société GMT SHIPPING TOGO SA EN LIQUIDATION indique qu'aux termes de l'article 25 alinéa 3 de l'Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif (AUPC), « Le débiteur en cessation de paiements doit faire une déclaration aux fins d'obtenir l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire ou de liquidation des biens quelle que soit la nature de ses dettes » ; que l'article 26 de l'AUPC fait obligation au débiteur de joindre à sa déclaration de cessation des paiements un certain nombre de documents notamment, une attestation d'immatriculation, les états financiers de synthèse, un état des créances et des dettes, un état de trésorerie et une attestation d'absence d'une procédure de liquidation ou d'un concordat préventif ; que conformément à cet article, lesdits documents ont été joints à la présente requête ; que l'article 33 du même acte uniforme dispose que « La juridiction compétente qui constate la cessation des paiements prononce soit l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire, soit l'ouverture de la liquidation de biens » ; que c'est pourquoi elle sollicite qu'il plaise à la juridiction de céans,

Vu les articles 25 alinéas 3, 26 et 33 de l'AUPC,

- Constater sa cessation des paiements, prononcer l'ouverture d'une procédure de liquidation des biens à son encontre et désigner tel juge en qualité de juge commissaire ;

La société GMT SHIPPING TOGO SA en liquidation a joint à sa requête :

1- L'extrait K BIS de la société GMT SHIPPING SA en liquidation ;

2- Les états financiers de synthèse de l'exercice clos le 31 décembre 2019 ;

3- L'état des créances et des dettes ;

4- L'état de trésorerie ;

5- Une attestation d'absence d'une procédure de liquidation ou d'un concordat préventif ;

En la forme :

Attendu que l'action aux fins de déclaration de liquidation de biens, entreprise par la société GMT SHIPPING SA EN LIQUIDATION est régulière et partant recevable ;

Au fond :

Attendu qu'aux termes de l'article 25 alinéas 1 et 2 de l'AUPC :

« La procédure de redressement judiciaire ou de liquidation des biens est ouverte à tout débiteur en état de cessation de payements.

La cessation des paiements est l'état où le débiteur se trouve dans l'impossibilité de faire face à son passif exigible avec son passif disponible, à l'exclusion des situations où les réserves de crédit ou les délais de payement dont le débiteur bénéficie de la part de ses créanciers lui permettent de faire face à son passif exigible » ;

Que l'alinéa 5 énonce que « Sans préjudice des dispositions de l'article 33 ci-dessus, le débiteur précise dans sa déclaration s'il demande l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire ou de liquidation de biens » ;

Attendu que la procédure de dissolution-liquidation en cours n'a pu être conduite à terme en raison de l'absence d'actif suffisant pour combler le passif ;

Attendu qu'il ressort en effet de l'examen des pièces versées au dossier qu'en l'état actuel, la société GMT SHIPPING SA EN LIQUIDATION enregistre un passif exigible de soixante-quinze millions deux cent cinquante-huit mille cinq cent vint-un (75.258.521) F CFA ; que son actif disponible est quant à lui de dix-huit millions quatre-vingt-quatorze mille six cent cinquante-deux (18.094.652) F CFA ; qu'il s'ensuit qu'elle est en état de cessation de payements ;

Attendu qu'aux termes des alinéas 1, 2 et 3 de l'article 33 de l'Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif (AUPC) :

« La juridiction compétente qui constate la cessation des paiements prononce soit l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire, soit l'ouverture de la liquidation des biens.

Elle prononce l'ouverture du redressement judiciaire :

- s'il lui apparaît que le débiteur a proposé un concordat sérieux, au sens de l'article 27 ci-dessus ou qu'un concordat a des chances sérieuses d'être obtenus ;

- ou, si une cession globale est envisageable.

Dans le cas contraire, elle prononce l'ouverture de la liquidation des biens. Dans la décision prononçant la liquidation des biens, la juridiction compétente fixe le délai au terme duquel la clôture de la liquidation est examinée sans que ce délai puisse être supérieur à dix-huit (18) mois après l'ouverture de la procédure. Si la clôture de la procédure ne peut être prononcée au terme de ce délai, la juridiction compétente peut proroger le terme de six mois, une seule fois, après avoir entendu les justifications du syndic, par une décision spécialement motivée. A l'expiration de ce délai, la juridiction compétente prononce la clôture de la liquidation des biens, d'office ou à la demande de tout intéressé ».

Attendu qu'en l'espèce, la société GMT SHIPPING SA EN LIQUIDATION précise dans sa déclaration qu'elle demande l'ouverture d'une procédure de liquidation des biens ; qu'il y a lieu, en application des dispositions ci-dessus de l'AUPC, d'y faire droit ;

Attendu qu'en application de l'article 33 suscité de l'AUPC, il y a lieu de fixer à dix-huit mois à compter de l'ouverture de la procédure, le délai au terme duquel la clôture de la procédure de liquidation des biens est examinée ;

Attendu qu'il résulte de l'article 35 de l'AUPC que dans la décision d'ouverture de la procédure de liquidation des biens, la juridiction compétente désigne un juge-commissaire parmi les juges du siège de la juridiction saisie et au plus trois (3) syndics ; qu'il convient donc, pour les besoins des opérations de liquidation de désigner monsieur KUEVIDJIN Folly Michel, 145 avenue Jean Paul II, tél. 90 04 33 01, en qualité de syndic et monsieur BANDAO Kpekoum, juge au Tribunal de commerce de Lomé, en qualité de juge-commissaire ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et en premier ressort ;

EN LA FORME :

Reçoit la demanderesse, la société GMT SHIPPING SA EN LIQUIDATION en son action ;

AU FOND :

Prononce la liquidation des biens de ladite société ;

Désigne monsieur KUEVIDJIN Folly Michel en qualité de syndic de la liquidation ;

Nomme monsieur BANDAO Kpekoum, juge au Tribunal de commerce de Lomé, en qualité de juge-commissaire chargé de veiller au bon déroulement de la procédure de liquidation ;

Fixe à dix-huit (18) mois à compter de l'ouverture de la procédure, le délai au terme duquel la clôture de la procédure de liquidation des biens est examinée ;

Dit que copie de la présente décision sera transmise au Ministère public à la diligence du greffe du tribunal de céans ;

Ordonne, en outre, la mention de la présente décision au Registre du Commerce et du Crédit Mobilier ainsi que son insertion dans le journal TOGO-PRESSE à la diligence du Greffe du tribunal de céans ;

Met les dépens à la charge de la demanderesse.

Et ont signé le Président et le Greffier./.

Document n° 2

« AU NOM DU PEUPLE TOGOLAIS »

Tribunal de commerce de Lomé, chambre ordinaire, jugement n°0084/2022 du 09 février 2022, Société SINEQUANON SARL

ENTRE : La société SINEQUANON, société à responsabilité limitée, EN LIQUIDATION, au capital de 1.000.000 FCFA, immatriculée au registre du commerce et du crédit mobilier (RCCM) de Lomé sous le N° 2002 B 1064, sise au 776, boulevard Léopold Sédar Senghor, quartier Tokoin Wuiti, 06 BP 61 475 Lomé, Tél : (00228) 70 44 50 39/ 92 81 92 89, représentée par sa gérante, madame COMBEY Combeley Akofa ;

Demanderesse, d'une part ;

ET : Quid de droit ;

Sans que les présentes qualités puissent nuire ou préjudicier aux droits et intérêts respectifs des parties en cause mais, au contraire, sous les plus expresses réserves de fait et de droit ;

POINT DE FAIT : par jugement N° 0113/2020 rendu le 24 février 2020, le Tribunal de commerce de Lomé a, entre autres, prononcé la liquidation des biens de la société SINEQUANON SARL fixé la date de la cessation des paiements au 31 décembre 2019, désigné monsieur KUEVIDJIN Folly Michel, en qualité de syndic et nommé Monsieur WEKA Komlavi Fiamo, juge audit tribunal, en qualité de juge-commissaire chargé de superviser les opérations de la liquidation ;

A l'issue des opérations de liquidation des biens, le syndic désigné, monsieur Folly Michel KUEVIDJIN, a, en date du 20 août 2021, établi à l'attention du président du tribunal de céans, un « RAPPORT DE CLOTURE DES OPERATIONS DE LIQUIDATION DE LA SINEQANON SARL »

Sur ce, la cause fut inscrite au rôle général sous le numéro 000043/2022/1101 et appelée à l'audience du 02 février 2022 ;

Le Ministère public qui a eu la parole pour ses réquisitions a déclaré s'en rapporter à Justice ;

POINT DE DROIT : La cause en cet état présentait à juger des différentes questions de droit résultant des déclarations et prétentions de la requérante et des pièces du dossier ; quid des dépens ?

Sur quoi, le tribunal a mis l'affaire en délibéré pour jugement être rendu le 9 février 2022 ;

Et ce jour, 9 février 2022, vidant son délibéré, le tribunal a rendu le jugement dont la teneur suit :

LE TRIBUNAL

Vu la requête qui précède ;

Vu l'article 145 de l'Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif ;

Le Ministère public entendu ;

Et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu que par jugement N° 0113/2020 rendu le 24 février 2020, le Tribunal de commerce de Lomé a, entre autres, prononcé la liquidation des biens de la société SINEQUANON SARL fixé la date de la cessation des paiements au 31 décembre 2019, désigné monsieur KUEVIDJIN Folly Michel, en qualité de syndic et nommé Monsieur WEKA Komlavi Fiamo, juge audit tribunal, en qualité de juge-commissaire chargé de superviser les opérations de la liquidation ;

Attendu qu'à l'issue des opérations de liquidation des biens, le syndic désigné, monsieur Folly Michel KUEVIDJIN, a, en date du 20 août 2021, établi à l'attention du président du tribunal de céans, un « RAPPORT DE CLOTURE DES OPERATIONS DE LIQUIDATION DE LA SINEQANON SARL » ;

Attendu que le juge commissaire, se fondant sur le rapport susdit, a relevé, dans un « RAPPORT AUX FINS DE CLOTURE DE LA LIQUIDATION DE LA SOCIETE SINEQUANON SARL POUR LA VIE POUR INSUFFISANCE D'ACTIFS » en date du 18 novembre 2021, que la situation financière de la société SINEQUANON SARL est caractérisée par des pertes cumulées d'un montant de vingt-deux millions quatre cent quatre-vingt-sept mille deux cent quatre-vingt- dix (22.497.290) F CFA ; que la liquidation de ladite société n'a disposé que de vingt-trois millions deux cent dix mille deux cent treize (23.210.213) F CFA provenant essentiellement de la cession du matériel roulant de la société et des recouvrements de créances détenues sur ses clients, pour faire face à des dettes estimées à cent quarante-un millions trois cent quatre-vingt-quatorze mille cinq cent vingt-sept (141.394.527) F CFA ; qu'il y a donc insuffisance d'actif de cent dix-huit millions cent quatre-vingt- quatre mille trois cent vingt-quatre (118.184.324) F CFA ; que dans ses conditions, la poursuite de la liquidation n'est plus nécessaire ;

Attendu qu'aux termes de l'article 173 de l'Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif (AUPC) : « Si les fonds manquent pour entreprendre ou terminer les opérations de la liquidation des biens, la juridiction compétente, sur le rapport du juge commissaire peut, à quelque époque que ce soit, prononcer, à la demande de tout intéressé ou même d'office, la clôture des opérations pour insuffisance d'actif ; La décision est publiée dans les conditions prévues aux articles 36 et 37 ci-dessus » ;

Qu'eu égard à tout ce qui précède, il convient, en application de l'article 173 suscité, de procéder à la clôture de la liquidation des biens de la société SINEQUANON SARL pour insuffisance d'actif et d'ordonner, à la diligence du greffier en chef, l'accomplissement des formalités de publicité prescrites aux articles 35, 36 et 37 de l'AUPC ;

Attendu qu'aux termes de l'article 177 de l'AUPC : « Le syndic dépose ses comptes au greffe dans les trois (03) mois de la clôture pour insuffisance d'actif. Le greffier avertit immédiatement le débiteur, contre décharge, qu'il dispose d'un délai de huit (08) jours pour former, s'il y a lieu, des contestations. En cas de contestations, la juridiction compétente se prononce. »

Qu'il convient donc d'ordonner au syndic de déposer ses comptes au secrétariat du greffier en chef de la juridiction de céans dans les trois (03) mois de la clôture.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, contradictoirement, en matière commerciale et en premier ressort ;

Prononce la clôture de la liquidation des biens de la société SINEQUANON SARL pour insuffisance d'actif ;

Ordonne, à la diligence du greffier en chef, l'accomplissement des formalités de publicité prescrites aux articles 35, 36 et 37 de l'AUPC ;

Ordonne au syndic de déposer ses comptes au greffe dans les trois (03) mois de la clôture ;

Met les dépens à la charge de la liquidation. Et ont signé le Président et le Greffier./.

TABLE DES MATIERES

AVERTISSEMENT I

REMERCIEMENTS II

SIGLES ET ABRÉVIATIONS III

SOMMAIRE VI

INTRODUCTION 1

CHAPITRE 1 : LA TENTATIVE DE REVALORISATION DE LA PROTECTION DES CREANCIERS 11

SECTION I : UNE TENTATIVE DE REVALORISATION DE LA PROTECTION DES CREANCIERS A TRAVERS L'INSTITUTION DE NOUVELLES PROCEDURES 12

PARAGRAPHE 1 : LA MISE EN PLACE DE LA PROCEDURE DE CONCILIATION 12

A- L'intérêt des créanciers à participer à la procédure de conciliation 12

B- Le droit à résolution des créanciers parties à l'accord amiable 17

PARAGRAPHE 2 : L'AVENEMENT DES PROCEDURES COLLECTIVES SIMPLIFIEES 22

A- Le domaine d'application des procédures simplifiées 22

B- L'avantage temporel des procédures simplifiées 25

SECTION II : UNE TENTATIVE DE REVALORISATION DE LA PROTECTION DES CREANCIERS PAR REMODELAGE DES PROCEDURES EXISTANTES DANS L'AUPC DE 1998 29

PARAGRAPHE 1: LE REMODELAGE RELATIF A L'INTERVENTION DES ORGANES DES PROCEDURES COLLECTIVES 29

A- L'encadrement de l'intervention des mandataires judiciaires 29

B- L'avancée de la place des contrôleurs 34

PARAGRAPHE 2 : LA REVUE DE LA SITUATION DES CREANCIERS A TRAVERS LA MODIFICATION D'AUTRES DISPOSITIONS 37

A- Les modifications relatives à l'ouverture des procédures collectives 38

B- La particulière amélioration de la situation de certaines catégories de créanciers 40

CHAPITRE 2 : LA PERFECTIBILITE DE LA SITUATION DES CREANCIERS 46

SECTION I : LA SUBSISTANCE D'UNE MISE A MAL DE LA SITUATION DES CREANCIERS DANS LE SAUVETAGE DE L'ENTREPRISE 47

PARAGRAPHE 1 : LA PERSISTANCE D'UN DESEQUILIBRE DE PROTECTION EN DEFAVEUR DES CREANCIERS 47

A- Un déséquilibre tenant aux restrictions des droits des créanciers 47

B- Un manque de clarté dans la prise en compte des intérêts des créanciers 51

PARAGRAPHE 2 : UNE PROTECTION DES CREANCIERS SUBORDONNEE A UNE DISCIPLINE COLLECTIVE INCOMPATIBLE AVEC LES IMPERATIFS DE SAUVETAGE 53

A- La soumission des créanciers à une discipline collective quasi-généralisée 54

B- La marginalisation du rôle des créanciers dans le déroulement des procédures de sauvetage 58

SECTION II : DES PISTES DE SOLUTIONS POUR UNE MEILLEURE AMELIORATION DE LA SITUATION DES CREANCIERS 60

PARAGRAPHE 1 : LA JUSTIFICATION DE LA RECHERCHE D'UN RENFORCEMENT DE PROTECTION DES CREANCIERS 60

A- Un besoin de renforcement de protection des créanciers nécessité par des données juridico-économiques 60

B- Un besoin de renforcement de protection des créanciers accentué par les expériences de la crise sanitaire liée à la covid-19 64

PARAGRAPHE 2 : LES ORIENTATIONS DU RENFORCEMENT SOUHAITE DE LA PROTECTION DES INTERETS DES CREANCIERS 68

A- La nécessité d'un renforcement de la protection des créanciers en général 69

B- L'ajustement nécessaire de la protection des créanciers bénéficiaires d'un traitement spécial 74

CONCLUSION 80

BIBLIOGRAPHIE 81

ANNEXES 90

TABLE DES MATIERES 99

* 1 THERA (F.), L'application et la réforme de l'Acte uniforme de l'OHADA organisant les procédures collectives d'apurement du passif, Thèse, Lyon, 2010, n° 18, p. 17.

* 2 V. art. 1er AUPC révisé.

* 3 TCHAKOTEU MESSABIEM (L.), Droit OHADA-Droit français : La protection des créanciers dans les procédures collectives d'apurement du passif, L'Harmattan, 2015, p. 35.

* 4 BATHILY (D.), Les créanciers des entreprises déclarées en cessation des paiements en droit OHADA, Thèse, Dakar, 2019, n°22, p. 11.

* 5Loi n° 1963-62 du 10 juillet 1963 portant Code des Obligations Civiles et Commerciales (COCC) du Sénégal modifié par la loi n° 1977-64 du 26 mai 1977, https://www.google.com/url?sa=t&source=web&rct=j&url=https://www.snr.gouv.sn/sites/default/files/Senegal%2520Civil%2520%2526%2520Commercial%2520Obligations%2520Code.pdf&ved=2ahUKEwj4w7-KiY38AhWZ87sIHTpFAaYQFnoECBEQAQ&usg=AOvVaw23-G8LpteNBGcTXjCqWqK8, consulté le 04 janvier 2023 à 21H13.

* 6 Art. 1er du COCC.

* 7 BATHILY (D.), préc., n° 36, p. 17.

* 8 Idem.

* 9 Dictionnaire LaRousse, éd. 2016, p. 700.

* 10 CORRIGNAN-CARSIN (D.), L'affaiblissement de la condition des créanciers privilégiés spéciaux dans les procédures collectives, Thèse, Grenoble, 1977, p. 13.

* 11 L'UEMOA se définit comme l'Union Economique et Monétaire Ouest Africain.

* 12 V. Annexe au Règlement n° 03/CM/UEMOA du 23 mai 2002 relatif aux procédures applicables aux ententes et abus de position dominante.

* 13 V. Loi n° 97-17 du 1er décembre 1997 portant Code du travail au Sénégal, https://www.google.com/url?sa=t&source=web&cd=&ved=2ahUKEwift9eHh438AhW1hP0HHaWhC3EQFnoECAwQAQ&url=https%3A%2F%2Fwww.ofnac.sn%2Fresources%2Fpdf%2FCodes%2FCode-Travail.pdf&usg=AOvVaw2q10969AdPbhu0C9NsANRP, consulté le 5 janvier 2023.

* 14 Art. 1-3 AUPC révisé.

* 15 SOLAL (A.), R.T.D. Com., 1971, p. 616, cité par CORRIGNAN-CARSIN (D.), préc.

* 16 V. la loi 2008 portant réglementation bancaire au Sénégal,

http://www.droit-afrique.com/upload/doc/senegal/Senegal-Loi-2008-26-reglementation-bancaire.pdf, consulté le 23 décembre 2022 à 21H14.

* 17 L'AUSCGIE a été adopté le 17 avril 1997, publié au JO OHADA n° 2, le 01 octobre 1997, p. et ss.. Il a été révisé le 30 janvier 2014, et publié au JO. OHADA n° spécial du 4 février 2014, p. 1 et ss. et entré en vigueur le 5 mai 2014.

* 18 CORRIGNAN-CARSIN (D.), préc. p. 13.

* 19 SAWADOGO (F. M.), préc., p. 1127.

* 20 TOH (A.), La prévention des difficultés des entreprises : étude de droit comparé de droit français et droit Ohada, Thèse, Bordeaux, 2015, n° 914, p. 469.

* 21 L'ordonnance française du 23 septembre 1967 marque le début d'un nouveau tournant en droit français des procédures collectives avec l'idée de prévention des difficultés de l'entreprise.

* 22 Dans la pensée de l'analyse économique du droit, les règles de droit doivent avoir des impacts positifs sur l'économie et favoriser l'essor de celle-ci.

* 23La loi française du 13 juillet 1967 a été abrogée en 1984 et en 1985 respectivement par les lois du 1er mars 1984 et les lois n° 85-98 et n° 85-99 du 25 janvier 1985, qui à leur tour, ont subi des modifications par la loi n° 94-475 du 10 juin 1994.

* 24 EVELAMENOU (S.K.), Le concordat préventif en droit OHADA, Thèse, Université Paris-Est, 2012, n° 1, p. 10.

* 25 Le Sénégal, le Mali, le Burkina Faso, le Gabon, la République Centrafricaine, le Cameroun et le Bénin.

* 26 L'Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA) a été instituée par le Traité du 17 octobre 1993 entrée en vigueur le 18 septembre 1995 et par la suite révisé à Québec le 17 octobre 2008 et entré en vigueur le 21 mars 2010.

* 27 Art 1er du Traité OHADA révisé précité.

* 28 Paragraphe 2 et 6 du Préambule du Traité OHADA tel que révisé à Québec le 17 octobre 2008 et entré en vigueur le 21 mars 2010.

* 29 La procédure d'alerte peut être déclenchée par le commissaire aux comptes ou par les associés.

* 30 V. art. 150 et ss. AUSCGIE.

* 31 Art. 1er al. 1 AUPC du 10 Avril 1998.

* 32 SAWADOGO (F. M.), cité par THERA (F.), précité, n° 347, p. 289 et ss.

* 33 ONANA ETOUNDI (F.), « Questions pratiques liées à la suspension des poursuites individuelles dans la procédure de règlement préventif en droit Ohada », Actualités juridiques, N°51, p. 321 ; www.ohada.com, Ohadata D-09-51.

* 34 Soit l'expert au règlement préventif n'a pas déposé à temps son rapport, soit le débiteur veut jouer au dilatoire en vue de retarder le paiement des créanciers.

* 35 Art. 11 de l'AUPC de 1998.

* 36 DELABRIERE (A.), « L'article 11 de l'Acte Uniforme sur les procédures collectives : outil de sauvegarde ou de discrimination », Penant, éd. 2010, n°870, p. 57.

* 37 SOUPGUI (E.), « Protection du créancier réservataire contre les difficultés des entreprises dans l'espace juridique Ohada », Penant, 2010, n°870, p. 66.

* 38 TAKAFO-KENFACK (D.), « Rôle des créanciers dans le sauvetage des entreprises depuis la réforme Ohada », Bull. Joly Entreprises en difficultés, 2017, n°4, p.302.

* 39 WAMBO (J.), « Le nouveau visage des procédures collectives d'apurement du passif depuis la réforme du 10 septembre 2015 à Abidjan », https://jeremiewambo.com/articledetail?id=44, consulté le 1er Février 2022 à 21H04.

* 40 Idem.

* 41 SAWADOGO (F.M.), Acte uniforme sur les procédures collectives d'apurement du passif in Code Ohada Traité et actes uniformes commentés et annotés, Juriscope 2016, p. 1111.

* 42 Idem.

* 43 GOURD (A.), « Le concept de la justice dans la philosophie du droit de GIORGIO DEL VECCHIO », Revue générale de droit, Vol. 1, 1970, p. 341, https://www.erudit.org/en/journals/rgd/1970-v1-n2-rgd04590/1059836ar.pdf, Consulté le 1er Février 2022 à 21H30 ; V. aussi Vie publique, « Qu'est-ce que la justice ? », Fiche thématique, https://www.vie-publique.fr/fiches/38023-quest-ce-que-la-justice-definition-de-la-justice, consulté 1e Février 2022 à 21H37.

* 44 V. « Justice : définition philosophique (Fiche personnelle) », https://dicophilo.fr/wp-content/uploads/fiche-justice.pdf, consulté le 3 Février 2022 à 20H16.

* 45 LEMERCIER (K.), « Réforme du doit des entreprises en difficulté », D. Actualité, éd. Du 22 avril 2022, https://www.dalloz-actualite.fr/dossier/reforme-du-droit-des-entreprises-en-difficulte#.YnWntM3S8W4, consulté le 28 avril 2022 à 20H24.

* 46 V. l'ordonnance 2021-1193 du 15 septembre 2021 portant modification du livre VI du code de commerce, JO du 16 septembre 2021. Elle transpose en droit français la directive « restructuration et insolvabilité ».

* 47 PEROCHON (F.), Entreprises en difficulté, LGDJ 2014, 10è éd., P. 48.

* 48 TOH (A.), La prévention des difficultés des entreprises : étude de droit comparé de droit français et droit Ohada, Thèse, Bordeaux, 2015, n° 167, p. 86.

* 49Art. 1-2 al. 1er AUPC révisé.

* 50Le 15 décembre 2017 le législateur Ohada adopte l'acte uniforme relatif à la médiation (AUM), lequel est publié au journal officiel de l'OHADA. Cet acte uniforme comporte dix-huit (18) articles répartis en trois (03) chapitres, V. le lien : https://justice.sec.gouv.sn/wp-content/uploads/textes-reglements/OHADA/Acte-uniforme-relatif-mediation-jo-special-15-dec-2017.pdf, consulté le 10 janvier 2023 à 20H18.

* 51 TOH (A.), préc., n° 38, p. 29 ; BATHILY (D.), préc., n° 18, p. 10.

* 52 KOUROUMA (M. F.), Le procédé de passerelle entre la conciliation et la sauvegarde approche comparative droit français/droit OHADA, Thèse, Toulon, 2018, n° 9, p. 5.

* 53 TCHAKOTEU MESSABIEM (L.), préc., p. 90.

* 54 V. les différents rapports annuels des statistiques du le travail publiés par le ministère du travail, du dialogue social, des organisations professionnelles et des relations avec les institutions.

* 55 L'AUPC révisé, bien qu'apportant quelques améliorations à la condition des créanciers, n'est pas exempt de reproches, qui peuvent, à plusieurs titres, être justifiés non seulement sur le plan juridique, mais aussi sur le plan économique.

* 56 SAWADOGO (F.M.), préc., p. 1118.

* 57 OKOMEN TSAGUE (R. E.), « La protection du patrimoine de l'entrepreneur dans le droit OHADA », §23, https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01586158v2/document, consulté le 4 février 2022 à 22H15; V. aussi CAMARA (F. K.), « La saisie immobilière », Cours de Voies d'exécution, Master 2, 2018-2019, Université Cheikh Anta Diop, p. 73.

* 58 SAWADOGO (F.M.), préc.

* 59 Art. 5 AUPC révisé.

* 60 Art. 24, 145 et 179 AUPC révisé.

* 61 TAKAFO-KENFACK (D.), « Rôle des créanciers dans le sauvetage des entreprises depuis la réforme Ohada », Bull. Joly Entreprises en difficultés, 2017, n°4, p.302 et ss.

* 62 SAWADOGO (F.-M.), préc., p. 1113.

* 63 PETEL (P.), Procédures collectives, D. 8è éd., 2014, n° 8, p. 5.

* 64 COQUELET (M.-L.), Entreprises en difficulté et instruments de paiement et de crédit, D., 6è éd., n° 20, p. 14.

* 65 Art. 2 alinéa 1er AUPC révisé.

* 66 Idem.

* 67 PETEL (P.), préc., n°32, p.16.

* 68 COQUELET (M.-L.), préc., n°49, p. 35.

* 69 Art. 5-2 alinéa 1er AUPC révisé.

* 70TCHOMTE (E.), « Les innovations du nouvel AUPCAP », https://www.legavox.fr/blog/emily-tchomte/innovations-nouvel-aupcap-20134.htm, consulté le 4 février 2022 à 23H45.

* 71 V. commentaire sous l'article 5-7 AUPC révisé.

* 72 Art. 5-7 AUPC révisé.

* 73 TCHOMTE (E.), préc.

* 74 GALLE (P. R.), Réforme du droit des entreprises en difficulté par la loi de sauvegarde des entreprises du 26 juillet 2005, Litec, 2005, n° 120, p. 76 et ss.

* 75Ibid.

* 76 Selon TCHOMTE (E.), jusqu'à la réforme de 2015, les missions dévolues au mandataire judiciaire étaient exercées dans un certain flou, compromettant gravement l'avenir des entreprises qui pouvaient même être sauvées ou redressées.

* 77 Pour garantir l'indépendance et l'impartialité du conciliateur, l'article 5-4 alinéa 2 dispose que « il ne doit pas avoir reçu, à quelque titre que ce soit, directement ou indirectement, une rémunération ou un paiement de la part du débiteur intéressé, de tout créancier du débiteur ou d'une personne qui en détient le contrôle ou est contrôlée par lui, au cours des vingt-quatre (24) mois précédant la décision d'ouverture. Aucun parent ou allié du débiteur, jusqu'au quatrième degré inclusivement, ne peut être désigné en qualité de conciliateur. Il en va de même pour tout magistrat en fonction ou ayant quitté ses fonctions depuis moins de cinq (05) ans. ».

* 78 Cass. Com. Fr. 22 septembre 2015 : Rev. Sociétés 2015. 761, obs. Ph. Roussel-Galle.

* 79 SAWADOGO (F. M.), préc., p.1113 : « Les Etats de l'espace Ohada et hors de cet espace n'étaient pas favorables à cette conciliation pour son apparente inefficacité ».

* 80 PETEL (P.), préc., n° 32, p. 15.

* 81 Art. 5-14 AUPC révisé : « L'ouverture d'une procédure de règlement préventif, de redressement judiciaire ou de liquidation des biens met fin de plein droit à la conciliation et, le cas échéant, à l'accord.

Dans ce cas, les créanciers recouvrent l'intégralité de leurs créances, déduction faite des sommes perçues ».

* 82 COQUELET (M.-L.), préc., n° 48, p. 35.

* 83 V. art. 1-2 al. 1er AUPC révisé et art 1er al. 2 AUM.

* 84 Art. 5-8 alinéa 1er AUPC révisé.

* 85 Art. 15 alinéa 1er et 16 alinéa 1er AUPC révisé.

* 86 En droit français, le législateur a plutôt opté pour la constatation de l'accord amiable conclu entre le débiteur et ses principaux créanciers (V. art. L. 611-8 Code de commerce français).

* 87 Art. 5-10 alinéa 1er AUPC révisé.

* 88 Une fois l'accord amiable conclu, il reste alors aux parties à exécuter leurs engagements réciproques ; V. GALLE (P. R.), préc., n° 162, p. 101.

* 89 V. art. 5-7 AUPC révisé « Pendant la recherche de l'accord, (...) le président du tribunal peut, à la demande du débiteur, et après avis du conciliateur, reporter le paiement des sommes dues et ordonner la suspension des poursuites individuelles engagées par un créancier ».

* 90 JACQUEMONT (A.), Droit des entreprises en difficulté, Litec, 2011, n° 124, p. 77.

* 91 Art. 5-12 alinéa 1er AUPC révisé : « pendant la durée de son exécution, l'accord interrompt ou interdit toute action en justice et arrête ou interdit toute poursuite individuelle, tant sur les meubles que les immeubles du débiteur, dans le but d'obtenir le paiement des créances qui en font l'objet ». En contrepartie de cette paralysie des droits des créanciers, il leur est accordé une protection qui consiste en l'interruption des délais qui étaient impartis aux créanciers parties à l'accord, à peine de déchéance ou de résolution des droits afférents aux créances mentionnées dans ledit accord.

* 92 Art. 21 alinéa 2 AUPC révisé, qui renvoie aux articles 139 et 143 sur l'annulation et la résolution du concordat de redressement judiciaire.

* 93 Art. 139 et 143 AUPC révisé.

* 94 TGI de Wouri, jugement n° 785 du 3 août 2006, obs. sous art. 21 AUPC révisé. En matière de redressement judiciaire, V. TGI, Ouagadougou, jugement n° 90bis du 24 janvier 2001, www.ohada.com, ohadata J-04-181 (conversion du redressement judiciaire en liquidation des biens suite à la résolution du concordat).

* 95CA Yaoundé, arrêt n° 162/C du 19 décembre 2008, obs. sous art. 21 AUPC révisé.

* 96 Art. 106 alinéa 1er du Code des obligations civiles et commerciales du Sénégal.

* 97 L'article 224 COCC dispose que « Les obligations à exécution périodique telles que loyer, arrérages ou intérêts se prescrivent par cinq ans pour chacun de leurs termes ».

* 98 GALLE (P. R.), préc., n° 133, p. 80. 

* 99 Art. 5-11 alinéa 5 AUPC révisé.

* 100 JACQUEMONT (A.), préc., n° 135, p. 81.

* 101 Art. 5-12 AUPC révisé.

* 102 JACQUEMONT (A.), préc., n° 127, p. 78.

* 103 Cass. Com. Fr., 5 mai 2004, https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000007047660, consulté le 5 mars 2022 à 20H50.

* 104 LE CORE (P.-M.), Droit des entreprises en difficulté, D., 5ème éd., 2013, p. 18.

* 105 L'AUS a été adopté le 17 avril 1997, publié au journal officiel de l'OHADA le 1er juillet 1997 et abrogé le 15 décembre 2010 à Lomé (Togo) par un nouvel acte uniforme entré en vigueur le 15 mai 2011 ; V. JO OHADA, n° 22 du 15 février 2011, p 1 et ss.

* 106 Art. 5-14 AUPC révisé.

* 107 L'ouverture d'une procédure collective à l'encontre d'un débiteur bénéficiant d'un accord de conciliation, qui a par la suite échoué, a pour conséquence l'interdiction et la suspension des poursuites individuelles tendant au recouvrement des créances nées antérieurement.

* 108 JACQUEMONT (A.), préc.

* 109 Art. 6 alinéa 1er AUPC révisé.

* 110 Art. 6-1 AUPC révisé.

* 111 NDONGO C., La prévention des difficultés des entreprises dans l'AUPC révisé, éd. LGDJ, 2018, n° 125, p. 57.

* 112 Ibid.

* 113 Art. 145-2 et 179-2 AUPC révisé.

* 114 T. Com. de Lomé, jugement n° 0084/2022 du 9 février 2022, Société SINEQUANON SARL, inédit.

* 115 T. Com de Lomé, jugement n°0691/2021 du 17 novembre 2021, Société GMT SHIPPING SA, inédit.

* 116 SAWADOGO (F.M.), préc., p. 1118.

* 117 Art. 24-2 alinéa 2 AUPC révisé.

* 118 Art. 24-3 AUPC révisé.

* 119 Art. 7 AUPC révisé.

* 120 Art. 24-5 alinéa 2 AUPC révisé.

* 121 Art. 24-5 alinéa 3 AUPC révisé : «  En tout état de cause, ce projet précise les éléments permettant d'établir la viabilité financière et économique du débiteur ».

* 122 Art 24-5 alinéa 1er AUPC révisé.

* 123 Art. 24-4 AUPC révisé.

* 124 Art. 25 AUPC révisé.

* 125 Les dispositions de l'article 26 AUPC révisé prévoient les différents documents qui doivent accompagner la déclaration du débiteur en cessation des paiements. Ils sont au nombre de onze (11), parmi lesquels une attestation d'enregistrement de l'entreprise au RCCM, les états financiers de synthèse, état de trésorerie, état chiffré des créances et des dettes, l'état détaillé de l'actif et du passif, ainsi que des sûretés données ou reçues, l'inventaire des biens, la liste des travailleurs..., le cas échéant un projet de concordat de redressement judiciaire.

* 126 Art. 145-3 AUPC révisé.

* 127 Art. 145-4 AUPC révisé.

* 128 Art. 145-6 AUPC révisé.

* 129DELABRIERE (A.), préc., p. 54.

* 130 Art 13 alinéa 1er ancien AUPC.

* 131 DELABRIERE (A.), « L'article 11 de l'Acte uniforme sur les procédures collectives : outil de sauvegarde ou de discrimination ? », Penant n° 870, p. 57.

* 132Cour d'appel d'Abidjan, Chambre civile et commerciale, arrêt n°53, 1er Avril 2005, Penant 864, p.363, note Bakary Diallo.

* 133 V. T. com. Bamako, jugement n° 113 du 2 mars 2005, V. obs. sous art. 13 AUPC révisé.

* 134 PERONCHON (F.), BONHOMME (R.), Entreprises en difficulté, Instruments de crédit et de
paiement
, 7è éd., Paris, L.G.D.J., 2006, n° 218, p. 171.

* 135 Le titre premier de l'AUPC révisé « Des mandataires judiciaires » compte en tout sept (07) chapitres.

* 136 Art. 4 AUPC révisé.

* 137 Art 4-1 AUPC révisé.

* 138 V. obs. sous l'article 13 AUPC révisé, in Code Ohada Traité et actes uniformes commentés et annotés, Juriscope 2016, p. 1174.

* 139 TCHOMTE (E.), préc.

* 140 Art. 4-2 AUPC révisé.

* 141 Art 4-4 alinéa 1er AUPC révisé.

* 142 Art. 4-4 alinéa 2 et 3 AUPC révisé.

* 143 WAMBO (J.), préc.

* 144 Art. 4-9 alinéa 1er AUPC révisé.

* 145 Art. 4-12 AUPC révisé.

* 146 Art. 4-13 AUPC révisé.

* 147 V. obs. Sous l'article 243 AUPC révisé, V. aussi introduction au chapitre V du titre I de l'AUPC révisé.

* 148 Cass. com. Fr., 6 mars 2019, 17-20-545, https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000038238578, consulté le 11 mars 2022 à 21H30.

* 149 Art. 4-13 in fine AUPC révisé.

* 150 GAMELEU KAMENI (C.) « Le contrôle de l'exécution du concordat de redressement d'une entreprise en difficulté en droit OHADA », Revue internationale de droit comparé, Vol. 63, 2011, n°13, p. 702, https://www.persee.fr/doc/ridc_0035-3337_2011_num_63_3_20022, consulté le 11 mars 2022 à 22H03.

* 151 Art. 49 ancien AUPC du 10 avril 1998.

* 152 Art. 128 alinéa 1er AUPC révisé.

* 153 PERONCHON (F.), BONHOMME (R.), préc., n° 210, p. 163.

* 154 Ibid.

* 155 Art. 48 alinéa 2 AUPC du 10 avril 1998.

* 156 Les sûretés réelles peuvent être générales ou spéciales. Une sûreté est générale lorsqu'elle porte sur tout le patrimoine du débiteur. Elle est spéciale quand elle porte sur un ou plusieurs meubles particuliers.

* 157 Art 48 alinéa 3 AUPC du 10 avril 1998.

* 158 Art. 48 alinéa 1er AUPC révisé.

* 159 Ibid.

* 160 Art. 48 alinéa 3 AUPC révisé.

* 161 Art. 49 alinéa 2, 3 et 4 AUPC révisé.

* 162 TAKAFO-KENFACK (D.), « Rôle des créanciers dans le sauvetage des entreprises depuis la réforme Ohada », Bull. Joly Entreprises en difficultés, 2017, n°4, p.302 et ss.

* 163 GAMELEU KAMENI (C.), préc., n° 14, p. 702.

* 164 Ibid.

* 165 TCHOMTE (E.), préc.

* 166 Ibid.

* 167 Art. 1-1 AUPC révisé.

* 168 SAWADOGO (F. M.), préc., p. 1119.

* 169 Art. 5 alinéa 1er ancien AUPC.

* 170 FENEON (A.), « Règlement préventif : analyse critique », Penant 870, n° 15, p. 19.

* 171 DELABRIERE (A.), préc., p. 56, V. aussi FENEON (A.), préc., p. 18.

* 172 SAWADOGO (F. M.), préc., p. 1116.

* 173 L'huissier de justice est un auxiliaire de justice dont la profession est régie au Sénégal par le Décret n° 2020-1589 du 6 août 2020, https://www.google.com/url?sa=t&source=web&cd=&ved=2ahUKEwjwqvjchY38AhUvnf0HHSOFBukQFnoECAgQBg&url=https%3A%2F%2Fjustice.sec.gouv.sn%2Fwp-content%2Fuploads%2F2021%2F01%2FDecret-2020-1589-du-06-aout-2020-portant-statut-des-huissiers-de-justice.pdf&usg=AOvVaw1d47zkMAIbGzSCJV0C8FvP, consulté le 4 janvier 2023 à 19H50 .

* 174 BATHILY (D.), préc., n° 36, p. 18.

* 175 AKONO ADAM (R.), « Les clairs-obscurs du régime de faveur des créances postérieures en droit OHADA des procédures collectives », n° 4, Penant 890, Janvier Mars 2015, p. 76.

* 176 Art. 5-11 AUPC révisé.

* 177 Art. 11-1 et 15 AUPC révisé.

* 178 Art. 33-1 AUPC révisé.

* 179 V. art. 166 AUPC révisé pour la répartition des prix provenant de la réalisation des biens immobiliers et l'article 167 du même texte pour la réalisation des biens meubles du débiteur.

* 180 V. obs. sous AUPC révisé, art. 166.

* 181 SALEY SIDIBE (H.), Le sort des créances postérieures en droit français et en droit de l'Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), Thèse, Université de Nice Sophia Antipolis, 2013, n° 21, p. 17.

* 182 5-11 alinéa 5 AUPC révisé.

* 183 Art. 102 AUPC révisé.

* 184 Art. 103 AUPC révisé.

* 185 Art. 101 AUPC révisé.

* 186 Art. 101-1 alinéa 1er AUPC révisé.

* 187 Art. 74 AUS.

* 188 Art. 101-1 alinéa 3 AUPC révisé.

* 189 Art. 101-1 alinéa 4 AUPC révisé.

* 190 V. obs. sous AUPC révisé, art. 101.

* 191 Ibid.

* 192 NGOM (M.), « La situation du propriétaire dans le droit OHADA des procédures collectives d'apurement du passif », Revue Sénégalaise de Droit des Affaires, éd. 2011, p. 34 et ss. ; V. www.ohada.com, Ohadata D-12-54.

* 193 BATHILY (D.), préc., p. 28.

* 194 EVELAMENOU (S.K.), Le concordat préventif en droit OHADA, Thèse, Université Paris-Est, 2012, n° 1, p. 10.

* 195 NGOM (M.), «  La situation du propriétaire dans le droit OHADA des procédures collectives d'apurement du passif », Revue Sénégalaise de Droit des Affaires, éd. 2011, p. 34 et ss. ; V. www.ohada.com, Ohadata D-12-54.

* 196 Intervenue en 2015, la révision de l'AUPC visait à corriger les erreurs, à combler les lacunes et non à réécrire un nouvel acte avec une nouvelle numérotation des articles.

* 197 Art. 72 alinéa 1er AUPC révisé.

* 198 Il s'agit des actions tendant à la reconnaissance des droits ou des créances contestées, des actions cambiaires dirigées contre les signataires d'effets de commerce autres que le bénéficiaire de la suspension des poursuites individuelles (v. art. 9 alinéa 4 AUPC révisé).

* 199 Art. 33 alinéa 5 AUPC révisé.

* 200 Art. 33 alinéa 3 AUPC révisé.

* 201 Art. 15 alinéa 1er et art. 141 alinéa 1er AUPC révisé.

* 202 Art. 33 alinéa 4 et 5 et art. 134 alinéa 2 AUPC révisé.

* 203 Art. 15 alinéa 1er et art. 29 AUPC révisé.

* 204 T. com. Bobo-Dioulasso, jugement n° 057 du 24 septembre 2014, inédit, obs. sous art. 127 AUPC révisé.

* 205 Art. 20 et 128 AUPC révisé.

* 206 BATHILY (D.), préc., note de bas de page n°43, p. 9.

* 207 Art. 42 COCC.

* 208 Art. 61 à 64 COCC.

* 209 Art. 15 alinéa 5 AUPC révisé.

* 210 Art. 96 COCC.

* 211 CCJA, arrêt n°026/2015 du 9 avril 2015, affaire BICICI C/ Société DELBAU, https://guilaw.com/cour-commune-de-justice-et-darbitrage-chambre-3-arret-n-026-2015-du-09-avril-2015, consulté le 5 janvier 2023 à 20H30.

* 212 Art. 134 alinéa 2 AUPC révisé.

* 213 BATHILY (D.), Les créanciers des entreprises déclarées en cessation des paiements en droit OHADA, Thèse, Dakar, 2019, n°173, p. 72.

* 214 LE CORRE (P.-M.), « L'intérêt collectif est-il l'intérêt de tous les créanciers ? », Bull. Joly Entreprises en difficulté, 2016, n° 3, p. 214 et ss.

* 215 COQUELET (M.-L.), Entreprises en difficulté et instruments de paiement et de crédit, D., 6è éd., n°20, p. 14.

* 216 Art. 9 alinéa 2 AUPC révisé.

* 217 Art. 9 alinéa 3 AUPC révisé.

* 218 Art. 95 AUPC révisé.

* 219 Art. 180 de l'Acte uniforme relatif au droit des sûretés (AUS).

* 220 Art. 96 AUPC révisé.

* 221 V. art 119 et suivants de la loi n° 97-17 du 1er décembre 1997 portant Code du travail au Sénégal, op. cit.

* 222 Art. 134 alinéa 3 AUPC révisé.

* 223 Art. 72 alinéa 1er AUPC révisé.

* 224 Art. 73 AUPC révisé.

* 225 Art. 75 AUPC révisé.

* 226 V. respectivement les articles 9 alinéa 4 et 75 alinéas 4 et 5 AUPC révisé.

* 227 AGBENOTO (K. M.), Le cautionnement à l'épreuve des procédures collectives, Thèse, cotutelle, Université de Lomé-Université du Maine, 2008, n°125, p. 68.

* 228 MAGUEU KAMDEM (J. D.), Le financement des entreprises en difficulté en droit OHADA, Thèse, Université de Dschang, 2016, n° 4, p. 5.

* 229 AGBENOTO (K. M.), préc., n° 1, p. 6.

* 230 AKONO ADAM (R.), préc., n° 5, p. 79.

* 231 KOUROUMA (M. F.), op. cit., n° 719, p. 312.

* 232 V. chap 1., Sect. I, Parag. I.

* 233 TAKAFO-KENFACK (D.), préc.

* 234 Ibid.

* 235 Art. 41 alinéa 2 AUPC révisé.

* 236 Art. 48 alinéa 4 AUPC révisé.

* 237 TAKAFO-KENFACK (D.), préc.

* 238 SAWADOGO (F. M.), op. cit., p. 1111.

* 239 Ministère du travail, du dialogue social, des organisations professionnelles et des relations avec les institutions du Sénégal, « Rapport annuel des statistiques du travail 2015 », p. 28,

https://travail.sec.gouv.sn/sites/default/files/DSTE_rapport%20final_2015.pdf, consulté le 27 mars 2022 à 00H24.

* 240 Ibid.

* 241 Ibid.

* 242 V. Rapport annuel des statistiques du travail 2016 du Sénégal, p. 32, http://www.statsenegal.sn/rapports-d-activites-de-la-dste/item/download/60_896c191371791c2109a65aac1b28e76e.html, consulté le 27 mars 2022 à 01H02

* 243 Ibid.

* 244 Ibid.

* 245 V. le rapport annuel des statistiques du travail en 2017 au Sénégal, p. 30,

https://www.google.com/url?sa=t&source=web&rct=j&url=https://www.dgtss.gouv.sn/sites/default/files/rrapport_annuel_statistiques_du_travail_2017__0.pdf&ved=2ahUKEwjj4uG5n873AhXv7rsIHQp6AwQQFnoECAgQAQ&usg=AOvVaw2HWdjghfHzB7Qv0NZivjW3, consulté le 27 mars 2022 à 01H 28.

* 246 V. Rapport annuel des statistiques du travail 2018 au Sénégal, p. 38,

https://www.dgtss.gouv.sn/fr/mediatheque/documents/rapports-statistiques, consulté le 15 juin 2022 à 23H02.

* 247 V. Rapport annuel des statistiques du travail 2019 au Sénégal, https://www.dgtss.gouv.sn/fr/mediatheque/documents/rapports-statistiques, consulté le 15 juin 2022 à 23H05.

* 248 V. Rapport annuel des statistiques du travail 2020 au Sénégal, V. lien précédent, consulté le 15 juin 2022 à 23H10.

* 249 Centre de formalités des entreprises du Togo, « Etude sur la survie des entreprises eu Togo », p. 17, https://www.cfetogo.tg/etude/RAPPORT_CFE.pdf, consulté le 27 mars 2022 à 02H07.

* 250 Togofirst, « Togo : la facture de la covid-19 sur les entreprises », publié le 14 septembre 2020, § 1er et 5, https://www.togofirst.com/fr/gouvernance-economique/1409-6236-togo-la-facture-de-la-covid-sur-les-entreprises consulté le 19 Juin 2022 à 20H10.

* 251Elle s'est rapidement propagée, d'abord dans toute la Chine, puis à l'étranger provoquant une pandémie. 

* 252La maladie pourrait aussi être transmise par des patients asymptomatiques mais les données scientifiques manquent pour en attester avec certitude.

* 253Tous les continents ont subi l'effet dévastateur de cette crise même si la situation est relativement variable d'un continent à l'autre. L'Afrique au départ a semblé être ignorée par la Covid-19. Les semaines qui ont suivi la propagation du virus dans le monde et particulièrement en Europe, ont ouvert les portes de l'Afrique à la pandémie. L'Organisation Mondiale de la Santé (OMS), par la voie de son Directeur, avait appelé l'Afrique à se réveiller face à la menace de ce virus et se préparer au pire.

* 254 Au Sénégal, V. Ministère de l'économie, du plan et de la coopération, « Recueil des principaux textes émis depuis le début de la crise sanitaire liée au covid-19 », https://www.economie.gouv.sn/sites/default/files/2021-01/Detail-des-textes-reglementaires-Covid-19-v170520.pdf, consulté le 02 avril 2022 à 21H40.

* 255 Tout en soulignant la floraison d'une économie liée à la COVID-19 dans les secteurs d'urgence : supermarchés, pompes funèbres, fabrication des gels d'hygiène des mains, des masques etc. (V. NEMEUDEU (R.), « La Covid-19 et le droit », https://www.lequotidienlejoenlejour.info/pr-robert-nemedeu-le-covid-19-et-le-droit , consulté le 02 avril 2022 à 22H18.

* 256 FASSASSI (Q.), « Réflexions sur la qualification juridique de la covid-19 en droit des contrats », Bull. ERSUMA, n° 031, Mars 2020, p.4.

* 257 MARTOR (B.), « Covid-19, un casse-tête pour les sociétés de droit OHADA ? », http://www.ohada.com/imprimer/actualite/5431/covid-19-un-casse-tete-pour-les-societes-de-droit-ohada.html, Consulté le 8 avril 2022 à 20H35.

* 258 MBAYE (M. N.), « Tenir les réunions : le dilemme des organes de gouvernance des sociétés commerciales de l'espace OHADA pendant la crise sanitaire de la covid-19 », Bull. ERSUMA, n° 31, Mars 2020, p. 8.

* 259 V. Art. 6 à 9 et 12 du Traité OHADA tel que révisé à Québec le 17 Octobre 2008 et entré en vigueur le 21 mars 2010.

* 260 L'article 10 du traité OHADA dispose que « Les actes uniformes sont directement applicable et obligatoires dans les Etats parties, nonobstant toute disposition contraire de droit interne, antérieure ou postérieure.».

* 261 MARTOR (B.), péc.

* 262 Ibid.

* 263 MBAYE (M. N.), préc.

* 264 AMENYINU (G.T.S.), « Covid-19 et prévention des difficultés des entreprises en droit OHADA : que faire pour limiter les dégâts ? », https://www.ohada.com/actualite/5404/covid-19-et-prevention-des-difficultes-des-entreprises-en-zone-ohada-que-faire-pour-limiter-les-degats.html, consulté le 9 avril 2022 à 23H10.

* 265 La décision d'ouverture d'une procédure collective produit des effets à l'égard des créanciers antérieurs, qui sont contraints par la suite à se soumettre à une discipline collective qui porte atteinte gravement à leurs droits.

* 266 ONANA ETOUDI (F.), « Questions pratiques liées à la suspension des poursuites individuelles dans la procédure de règlement préventif en droit OHADA », Actualités juridiques, n° 51, p. 321 et ss., www.ohada.com, Ohadata D-09-51.

* 267 AKONO ADAM (R.), préc., n° 47, p. 103.

* 268 L'Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution a été adopté le 10 avril 1998 et publié au Journal Officiel de l'OHADA n° 6 du 1er juin 1998, p. 1 et ss. Il est entré en vigueur le 10 juillet 1998.

* 269CCJA, Arrêt n° 035/2005 du 2 juin 2005, Dame KHOURI Marie c/ 1°/ SOCIETE HYJAZI SAMIH ET HASSAN DITE INDUSCHIMIE ; 2°/ SOCIETE GENERALE DE BANQUES EN COTE D'IVOIRE DITE SGBCI, www.ohada.com, Ohadata J-06-14.

* 270 DE SABA (A.), La protection des créanciers dans le droit uniforme de recouvrement de créances de l'espace OHADA, thèse, Université Panthéon Sorbonne Paris I, 2016, n° 190, p. 204.

* 271 SAWADOGO (F. M.), Acte uniforme sur les procédures collectives d'apurement du passif in Code Ohada Traité et actes uniformes commentés et annotés, Juriscope 2016, p. 1111.

* 272 TAKAFO-KENFACK (D.), préc.

* 273 Art. L.626-30-2 alinéa 1er du Code de commerce français, https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000028724014/2014-07-01, consulté le 12 avril 2022 à 22H38.

* 274 V. C.com. français, art. L. 626-30-1 nouveau.

* 275276 MAGUEU KAMDEM (J. D.), préc., n° 13, p. 14.

* 277 V. Chap. I, Sec. II, Parag. 2, B.

* 278 TGI Ouagadougou, jugement n° 701 du 26 juin 2002, Société des ciments d'Abidjan C/ Syndics liquidateurs de la Société des ciments et matériaux du Burkina, www.ohada.com, Ohadata J-04-42.

* 279 Ibid.

* 280 SOUPGUI (E.), « La protection du créancier réservataire contre les difficultés des entreprises dans l'espace juridique OHADA », Penant 870, p. 75.

* 281 V. obs sous l'article 103 AUPC révisé.

* 282 Cass. fr. civ., 28 mars et 22 octobre 1934, https://www.senat.fr/rap/1979-1980/i1979_1980_0014.pdf, consulté le 19 avril 2022 à 22H09.

* 283 V. Rapport, première session ordinaire de 1979 à 1980, Sénat, annexe au procès-verbal de la séance du 10 octobre1979, n° 14, p. 6, https://www.senat.fr/rap/1979-1980/i1979_1980_0014.pdf, consulté le 20 avril 2022 à 20H57.

* 284 Ibid.

* 285 Ancien art. L. 621-122 et désormais art. L. 624-16 du Code de commerce français.

* 286 Art. 73 et 74 AUS.

* 287 SOUPGUI (E.), préc., p. 77.

* 288 Décision du TGI de Ouagadougou préc.

* 289 SOUPGUI (E.), op. cit., p. 78.

* 290 CABRILLAC (M.), MOLY (C.), Droit des sûretés, 6è éd., Litec Paris, 2002, n° 728, cité par SOUPGUI (E.), préc.

* 291 SOUPGUI (E.), préc.

* 292 SOUPGUI (E.), préc. p. 79.

* 293GUEYE (M.), « Le nouveau visage des contrats en cours dans l'Acte Uniforme portant organisation des
procédures collectives d'apurement du passif », Annales Africaines, nouvelle série, Vol.1, avr. 20016, n° 6, p.
109.






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