Aix-Marseille Université (AMU) Faculté
des Sciences du Sport de Marseille
Master 1 EOPS
Année 2021 - 2022
Mémoire présenté par Léo
GAGNEPAIN
Évaluation de l'effet
d'une étude posturale dynamique cycliste
sur le rendement énergétique,
à court terme, chez le cycliste entraîné
Tuteur universitaire
Jérôme LAURIN
Maître de Conférences - Faculté des
Sciences du Sport
Responsable de stage Joël STEVE
Fondateur - Président - Ergonome
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Table des matières
I. Mise en contexte 3
II. Cadre théorique 3
II.1. Etude posturale cycliste 4
II.2. Amélioration du confort et prévention des
pathologies 8
II.3. Amélioration de la performance 9
III. Méthode 10
III.1. Participants 10
III.2. Tâches et matériel 10
III.2.1. Phase de test cardiorespiratoire cycliste 11
III.2.2. Phase d'étude posturale dynamique cycliste 12
III.3. Analyse des données 15
III.3.1. Echelle d'ajustements du vélo 15
III.3.2. Fréquence cardiaque 15
III.3.3. Consommation d'oxygène 16
III.3.4. Rendement énergétique 16
IV. Résultats 17
IV.1. Ajustements du vélo 17
IV.2. Fréquence cardiaque 17
IV.3. Consommation d'oxygène 18
IV.4. Rendement énergétique 19
IV.5. Synthèse 20
V. Discussion 21
V.1. Analyse des résultats 21
V.2. Limites 23
V.3. Perspectives d'amélioration 23
VI. Conclusion 23
VII. Bibliographie 24
VIII. Annexes 27
I. 3
Mise en contexte
Ce mémoire présente le travail de recherche
effectué lors de mon stage de Master 1 en Entraînement et
Optimisation de la Performance Sportive chez Velofitting, à Nice et
Marseille. Ce travail découle de questions liées aux
études posturales cyclistes réalisées par Joël STEVE
pour Velofitting, auxquelles j'ai pu assister en mai 2021. Cette
société a pour objectif d'optimiser le positionnement des
cyclistes sur leur vélo en proposant des études posturales
dynamiques en 3 dimensions, et s'occupe notamment de l'équipe
professionnelle cycliste AG2R Citroën et de la Fédération
Française de triathlon. C'est alors que ce projet de stage a pris forme,
au contact de cyclistes aux morphologies, niveaux et disciplines
variées.
Cette expérience professionnelle m'a permis de mettre
en pratique de nombreuses connaissances théoriques en découvrant
le milieu passionnant de l'optimisation de la performance sportive par le biais
de l'ergonomie cycliste. La mise en place et la gestion d'un protocole
expérimental de la réalisation des tests physiologiques aux
études posturales cyclistes, ont fait partie de mon quotidien de
chercheur-ergonome-stagiaire de fin mars à début mai dernier. Mon
investissement ne s'est pas seulement résumé à ce mois et
demi d'expérimentation, mais aussi à l'amélioration et
à la validation bibliographique du support de présentation de
Velofitting, dédié à la formation des nouveaux
franchisés. Sous la tutelle du président et fondateur de
Velofitting, Joël STEVE, j'ai pu bénéficier de
l'expérience d'un ergonome accompli, de ses connaissances
aiguisées ainsi que de nombreux conseils éclairés. Je
tiens à le remercier tout particulièrement pour son soutien et
pour les opportunités qu'il a su m'offrir.
II. Cadre théorique
En cyclisme, l'Homme et la machine interagissent constamment
ainsi il est essentiel d'adapter le vélo aux caractéristiques du
sportif et de sa pratique.
Dans ce contexte, il convient d'étudier un ensemble de
variables liées à l'optimisation de la performance comme la
biomécanique, l'aérodynamique, la physiologie et la psychologie,
variant selon le type de pratique (vélo de route, vélo de
triathlon, vélo de contre-la-montre) et les motivations de l'individu
(pratique en compétition ou en loisir). L'optimisation de la position
sur le vélo nécessite des ajustements aux interfaces
mains-guidon, bassin-selle et pied-pédale afin d'assurer une synergie
harmonieuse entre l'activité des muscles et la cinématique
articulaire des membres inférieurs et supérieurs (Holliday et
al., 2019). Une position inappropriée peut, dans un premier temps,
affecter la perception de confort et de douleur pendant la pratique, puis, dans
un second temps, provoquer des
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pathologies entraînant un arrêt temporaire ou
définitif du cyclisme (Priego Quesada et al., 2019). Les
principales pathologies se manifestent au niveau du genou et concernent 15
à 33 % des individus (Bini et Bini, 2018). Les maux de dos et les
douleurs aux cervicales touchent quant à eux près de 60 % des
cyclistes (Mellion, 1991). La gestion des blessures implique
généralement, entre autres, un ajustement de la position. En
parallèle, de nombreuses études ont montré une relation
entre la position sur le vélo et la performance, pouvant se
caractériser notamment par une meilleure efficacité dans la
technique de pédalage (Menard et al., 2016). En outre, la
position sur le vélo peut impacter les variables physiologiques et
notamment la consommation d'oxygène et le rendement mécanique
(Ferrer-Roca et al., 2014). Enfin, il est essentiel d'optimiser la
position du cycliste sur le plan aérodynamique afin de minimiser la
résistance de l'air à l'avancement (Debraux et al.,
2011). Outre la position, le matériel utilisé est primordial
à prendre en compte pour optimiser l'interaction entre l'individu et sa
machine. Dans cette optique, plusieurs évolutions technologiques, telles
que les pédales automatiques et l'ergonomie des selles, ont
entrainé une amélioration significative de la performance, de la
santé et du confort des cyclistes (Hintzy et al., 1999 ;
Toth et al., 2005). Les recherches et les évolutions
technologiques présentées ci-dessus montrent les avancées
notables au cours de ces dernières années en termes d'ergonomie
en cyclisme. Cependant, il apparait qu'une multitude de variables peuvent
impacter la position d'un individu sur le vélo : la morphologie, les
motivations, le type de pratique, le matériel utilisé, le
terrain, les déséquilibres posturaux... De plus, nombre d'entre
elles ont pour l'instant été très peu explorées ou
sont souvent négligées. L'objectif de ce travail consistait
dès lors à développer de nouvelles connaissances sur les
études posturales cyclistes, mettre en lumière leurs impacts sur
la performance cycliste (route et triathlon) et ainsi générer un
faire-valoir pour l'entreprise de positionnement cycliste Velofitting. Ces
connaissances ont pour ambition de s'adresser aussi bien aux chercheurs qu'aux
pratiquants, entraîneurs et ergonomes cyclistes.
II.1. Etude posturale cycliste
L'intensification des recherches dans le domaine de
l'étude posturale a permis des avancées scientifiques et
technologiques considérables ces dernières années
(Braeckevelt et al., 2019). Secteur d'activité en forte
croissance, l'ergonomie cycliste travaille avec 3 types de systèmes
d'études posturales s'appuyant soit sur des mesures
anthropométriques en statique (e.g Morphologics, Saint-Malo, France),
soit sur des mesures de la cinématique articulaire en 2 dimensions
(e.g. Motion Metric, Scottsdale, USA ; Cycling 2DMA, Stt Systems,
Saint Sébastien, Espagne) ou en 3 dimensions (e.g. Cycling
3DMA, Stt Systems, Saint Sébastien, Espagne ; Retül, Boulder,
Colorado, USA). Des équipements complémentaires sont parfois
utilisés par les ergonomes cyclistes comme des outils pour optimiser le
réglage des cales de chaussures (e.g. ML Cleat, Morphologics).
Quel que soit le système utilisé, la
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première étape d'une étude posturale
consiste à réaliser un entretien avec le cycliste afin
d'identifier sa pratique plutôt récréative ou
compétitive (Braeckevelt et al., 2019). Il est également
nécessaire d'examiner cliniquement l'individu afin de déceler
d'éventuelles limitations articulaires, raideurs musculaires (Sauer
et al., 2007) et déséquilibres posturaux (Dinsdale &
Dinsdale, 2011). Si le cycliste souhaite être conseillé pour
l'achat d'un vélo, les informations obtenues lors de cet entretien et de
cet examen clinique permettent de définir une géométrie de
cadre adaptée en termes de longueur, de largeur et d'angles (Cf. Figure
1). Les principales cotes à prendre en considération dans la
géométrie du vélo sont l'angle du tube de selle
(lié au recul de selle), la longueur du tube horizontal (liée
à la longueur selle-cintre) et la hauteur de la douille de direction
(liée à la différence de hauteur selle-cintre). Depuis
quelques années, les constructeurs de cycles s'appuient sur le
reach (distance horizontale entre le boîtier de pédalier et
le sommet de la douille de direction) et le stack (distance verticale
entre le boîtier de pédalier et le sommet de la douille de
direction) pour décrire la géométrie d'un vélo (Cf.
Figure 1). L'empattement, qui correspond à la distance entre les moyeux
avant et arrière, est également à prendre en compte quant
à la maniabilité du vélo. Il est également
essentiel de prendre en compte le type de matériau qui compose le
vélo car celui-ci influence à la fois la masse et la
rigidité de la machine. La rigidité du cadre, liée
à la déformation du matériau pendant la pratique, doit
être adaptée au niveau et aux attentes de l'individu. Un cadre
très rigide permet d'optimiser la transmission de puissance tandis qu'un
cadre plus souple absorbe mieux les vibrations et est donc en principe plus
confortable à piloter.
1 Longueur tube de selle (mm)
2 Longueur tube sup (axe/axe)
3 Hauteur boîtier de pédalier
4 Longueur base
5 Angle du tube de selle (°)
6 Angle de direction (°)
7 Déport de fourche (mm)
8 Chasse (mm)
9 Axe BP - axe roue AV (mm)
10 Empattement (mm)
11 Hauteur dégagement entre-jambe (mm)
12 Hauteur douille de direction (mm)
13 Stack (mm)
14 Reach (mm)
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Figure 1 : Exemple de la géométrie d'un
cadre de vélo
En complément du type de cadre et de sa
géométrie, il est nécessaire de choisir les composants du
vélo qui s'adapteront au mieux à la morphologie de l'individu
telles que la forme du cintre (largeur, hauteur et profondeur), la longueur des
manivelles et le type de selle (De Vey Mestdagh, 1998). L'étude
posturale consiste ensuite à régler les trois zones de contact
entre l'individu et sa machine : l'interface
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cale-chaussure-pédale, l'interface bassin-selle et
l'interface mains-guidon (Silberman et al., 2005). Avant d'ajuster les
périphériques du vélo, l'expert doit optimiser le
réglage des cales de chaussure (si le vélo du cycliste est muni
de pédales automatiques). Pour ce faire, trois réglages sont
nécessaires : (1) l'engagement (position antéropostérieure
selon la morphologie des deux pieds), (2) la rotation et (3) la position
médio-latérale ou Q-Factor (Cf. Figure 2).
Figure 2 : Paramètres de réglages des
cales de chaussure en cyclisme (1) engagement, (2) rotation et (3) position
médio-latérale ou Q-Factor
Ensuite, l'expert doit réaliser plusieurs
réglages sur le vélo (Cf. Figure 3). Tout d'abord, l'interface
bassin-selle, englobant la hauteur et le recul de selle, doit être
ajustée. En cas de modification de la longueur des manivelles, du type
de selle, du type de pédale ou du type de chaussure, la hauteur et le
recul de selle doivent être réajustés. Le
Q-Factor, correspondant à la distance entre les deux faces
externes des manivelles dans le plan horizontal, est quant à lui
dépendant de la géométrie du vélo. Cependant,
l'écartement médio-latéral entre les pieds peut être
légèrement adapté de façon à assurer un bon
alignement entre la hanche, le genou et la cheville. La réunion de ces
paramètres va permettre d'optimiser la cinématique articulaire
des membres inférieurs lors du pédalage. Dans un second temps, le
positionnement du cintre (guidon) doit être réglé dans
l'axe horizontal et dans l'axe vertical afin d'optimiser la longueur
selle-cintre et la différence de hauteur selle-cintre. La longueur
selle-cintre peut être modifiée en faisant varier la longueur de
la potence (liaison entre axe de direction et cintre) ou la profondeur du
cintre (i.e. reach). La différence de hauteur selle-cintre peut
quant à elle être modifiée en ajoutant ou en enlevant des
bagues entre le jeu de direction et la potence. De plus, cette variable est
influencée par la hauteur du cintre (i.e. drop) lorsque le
cycliste utilise une position des mains au creux du cintre. Le type de cintre
et sa position horizontale/verticale sont déterminant dans l'inclinaison
du buste.
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Figure 3 : Paramètres de réglages d'un
vélo de route/triathlon : (1) centre de selle et inclinaison, (2)
hauteur
de selle, (3) recul de selle, (4) longueur des
manivelles, (5) longueur selle-cocotte, (6) longueur selle-axe direction, (7)
différence de hauteur selle-cintre, (8) Q-Factor, (9) longueur
axe roue-cintre, (10) longueur axe roue-commandes freins, (11) longueur axe
roue-prolongateur, (12) longueur selle-prolongateur, (13) largeur
de cintre, (14) drop, (15)
reach
Comme précisé préalablement, tous ces
réglages sont fondés sur des mesures anthropométriques
prises en statique ou des mesures de la cinématique articulaire en
dynamique (Bini, 2016). Néanmoins, Bini et Hume (2018) estiment que les
angles articulaires mesurés en statique ne représentent pas
véritablement ceux du pédalage et seraient ainsi moins
précis. Cependant, la littérature présente des plages
d'angles optimales relativement étendues (Ferrer-Roca et al.,
2011) et différentes d'une société à l'autre
(e.g. Retül ; Shimano Bikefitting, Shimano Inc., Sakai City,
Osaka, Japon). Il faut alors être conscient qu'une position optimale,
combinant performance, santé et confort, se trouve entre deux valeurs et
qu'un écart de quelques millimètres n'est pas dommageable pour le
cycliste (Braeckevelt et al., 2019). De plus, notre organisme -
précisément pour recruter les muscles des membres
inférieurs - s'adapte aux changements mineurs s'il lui est
accordé une période d'adaptation avec une baisse de la charge
d'entraînement, pour intégrer le nouveau schéma moteur
(Bini, 2016). Braeckevelt et al. (2019) ont évalué les
ajustements de position réalisés avec des systèmes de
positionnement dynamiques par des entreprises d'étude posturale cycliste
utilisant soit la même technologie, soit des technologies
différentes. Ils ont observé des écarts importants de
réglages (de l'ordre de plusieurs centimètres pour la hauteur de
selle notamment) suivant le système utilisé. Etonnamment, cet
article a également mis en exergue une grande variabilité des
réglages d'un bikefitter (technicien réalisant des
études posturales cyclistes) à l'autre, utilisant la même
technologie.
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A partir de là, plusieurs questions peuvent se poser :
Certains d'entre eux ont-ils commis des erreurs dans le protocole
d'étude posturale en raison d'un manque de formation ? Ces
bikefitters intégraient-ils une dimension subjective dans
leur(s) réglage(s) ? Serait-il trop complexe, pour les bikefitters
revendeurs/mécaniciens cycles sans formation à la
biomécanique, d'utiliser un système de mesure dynamique ? Autant
de questions suggérant qu'un choix minutieux du professionnel en charge
de l'étude posturale cycliste est primordial. Cette récente
étude montre qu'il est nécessaire de poursuivre les recherches
dans le domaine de l'étude posturale en cyclisme afin d'accroître
les connaissances scientifiques, de standardiser les différentes
approches mais également de mieux former les professionnels de
l'ergonomie cycliste.
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