II. Des solutions concrètes
1/ Créer des safe places
Ces dernières années, de nouveaux
événements rap 100% féminins ont vu le jour. C'est le cas
du tremplin Rappeuz créé en 2019 et Rappeuse en liberté
créé en 2021. Rappeuz a eu près de 150 candidatures lors
de sa première édition, et Rappeuse en liberté plus de
300. Les événements non mixtes constituent des places pour ces
artistes féminines. Elles y sont plus à l'aise pour
s'exprimer.
«Ça marche à fond. Les rappeuses sont super
demandeuses de ça. J'ai fait beaucoup de tests en
événements mixtes/non mixtes. Ça en rassure certaines
d'être en non mixtes, elles ont tendance à plus se
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lâcher. Devant un public mixte, certaines se censurent,
s'habillent différemment et font des textes différents. Le
problème c'est surtout pour les artistes émergentes, une fois
qu'elles sont confirmées c'est un peu moins compliqué»
(Éloïse Bouton).
En 2021, Transform Festival en Suisse a organisé une
édition de son tremplin spécialement réservée aux
femmes et aux personnes faisant partie des minorités de genre. Cela
partait d'un constat, lors de leur deux premières éditions en
2019 et 2020, ils avaient eu 10% de candidatures féminines.
L'édition 2021 a eu le même nombre de candidatures que les
anciennes, avec uniquement des femmes cette fois. Grâce à l'impact
médiatique qu'à eu cette édition, il ont reçu 10
fois plus de candidatures féminines pour l'édition mixte de
2022.
«Ça leur garantit une sorte de safe place pour
présenter leurs projets. Elles sont prudentes au début de leur
carrière, et osent moins se mélanger aux rappeurs masculins»
(Renaud Durussel, programmateur pour Transform Festival).
En plus de ces événements non mixtes, il est
important de permettre aux rappeuses de rencontrer les bons interlocuteurs pour
leurs projets, et qu'elles puissent bénéficier d'accompagnement
pour se structurer et avancer par la suite. Il y a une difficulté
à se construire un entourage professionnel et à s'informer chez
les artistes indépendants.
J'ai rencontré les rappeuses Nanor et Asfar Shamsi sur
le casting de Rappeuz Paris le 10 mai. Je leur ai demandé quels freins
elles rencontraient et ce qui leur manquait pour développer leur projet.
Ce qui est revenu c'est un besoin d'accompagnement, une aide pour structurer
leur projet, le fait que produire sa musique coûte cher aussi, et enfin
que la plupart des concours et tremplins n'offrent pas de feedbacks sur les
projets non retenus. Dans la mesure du possible, il faut faire un retour aux
artistes qui ne sont pas sélectionnés, pour leur permettre
d'avancer dans leur carrière.
«À partir du moment où tu candidates tu
peux bénéficier de nos conseils. C'est important pour nous de
donner un vrai feedback aux rappeuses et surtout de les rencontrer chez elles.
On veut leur permettre d'avancer dans leur projet.» (Gauthier
Benoît, fondateur du tremplin Rappeuz)
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Le but, en plus de les mettre à l'aise, est de garantir
aux rappeuses un gain de visibilité et un accompagnement pour leurs
projets, tout ça avec une promesse de bienveillance.
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