B- L'adoption d'une loi fixant les bases de calcul de la
valeur des biens expropriés
Pour satisfaire au principe de l'indemnisation juste, il est
nécessaire que soit déterminé aussi exacte que possible,
la valeur des biens, notamment des immeubles qui sont frappés par
l'expropriation pour cause d'utilité publique. Pour ce faire, il est
important que le législateur tchadien mette en place une loi qui fixe
les bases légales de calcul de la valeur des biens expropriés. La
même loi doit régir la composition, le fonctionnement et les
missions de la Commission de constat et d'évaluation des biens. Dans la
composition de cette
95 Art 13 du décret n° 187 : « Un
mois après paiement, fourniture d'équivalence ou consignation des
indemnités, l'administration peut prendre possession, au besoin par
expulsion des occupants, sans nouvel avis ».
96 Art L. 231-1 du Code de l'expropriation pour cause
d'utilité publique.
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Commission, une place importante doit être
réservée aux victimes. Celles-ci doivent participer activement
à cette opération, pour des besoins de transparence. L'importance
de la mise en place de cette loi est bien évidemment de garantir aux
victimes une indemnisation juste, c'est-à-dire une indemnisation qui
compensera à juste titre les biens perdus du fait de l'expropriation.
Car dit-on, l'indemnisation des expropriés ne doit constituer un moyen
d'enrichissement ni pour l'administration, ni pour les victimes.
En plus d'être juste, l'indemnisation des
expropriés doit surtout être préalable. Paragraphe
II : La valorisation du principe de l'indemnisation
préalable
Cette valorisation du principe implique d'une part que
l'indemnisation soit la condition sine qua none de la prise de possession (A)
et d'autre part, la suppression de la notion d'urgence (B).
A- L'indemnisation préalable comme condition sine
qua none de la prise de possession
L'indemnisation des victimes, comme nous l'avons
précédemment souligné est la principale garantie du droit
au logement des personnes expropriées pour cause d'utilité
publique, en dehors du relogement qui n'est point envisagé par le
législateur tchadien. Cette indemnisation peut être soit
pécuniaire, soit en nature (attribution de terrain). La règle
fondamentale en la matière consiste à indemniser
préalablement les expropriés avant la prise de possession des
immeubles par l'Etat. Le législateur et le juge doivent faire de ce
principe d'indemnisation préalable une condition sine qua non de la
dépossession des victimes de leurs propriétés. Il est vrai
que le décret n° 187 du 01 août 1967 fixe cette règle
comme condition de la prise de possession, mais aucun mécanisme n'a
été prévu par les textes pour permettre aux victimes de
faire face à un éventuel abus de pouvoir de la part de
l'administration. Le législateur doit prévoir un recours en
annulation de la décision portant expropriation, avec un effet suspensif
en cas de non indemnisation préalable des victimes.
Pour ce qui est de l'ordonnance d'expropriation, le juge ne
doit la rendre qu'après s'être assuré, grâce à
un contrôle qu'il effectuera à l'occasion, de la
disponibilité des fonds pour indemniser les victimes. Cela
nécessite la mise sur pied d'une Commission qui sera chargée
d'enquêter afin d'établir d'une part, qu'un site a
été effectivement aménagé pour le recasement des
victimes, et d'autre part que des fonds sont véritablement disponibles
pour leur indemnisation.
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En toute circonstance, les victimes doivent obligatoirement
bénéficier de l'indemnité d'expropriation et d'un
délai raisonnable pour quitter les lieux et se réinstaller
ailleurs. Lorsque l'autorité expropriante opte pour le recasement des
expropriés, le local de remplacement doit être
aménagé et fourni à priori, et l'indemnité
représentant la valeur des investissements doit également
être payée. Ce n'est qu'à cette seule condition que les
expropriés ne pourront céder leurs fonds immobiliers à
l'administration.
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