Conclusion :
Au terme de ce chapitre qui portait sur lesimpacts
environnementaux de l'exploitation des espèces ligneuses de la
mangroveau bois des singes, force est de constaté que la mangrove au
Bois Des Singes subit une dégradation sans précédent
liée à l'action anthropique et qui se situe à des niveaux
différents. Les principaux impacts de cette dégradation sont
entre autres les impacts socioculturels et économiques d'une part et
d'autre part les impacts environnementaux et écologiques.
Ainsi, au regard de ce diagnostic et face à la
dégradation avancée de la mangrove au Bois Des Singes, il est
urgent que l'on commence à préserver le milieu de mangrove.
Seulementcette préservation, ne nécessite-t-elle pas un mode de
gestion durable des espèces ligneuses de la mangrove au Bois Des Singes
?
CHAPITRE V : VERS UNE
GESTION DURABLE DES ESPECES
LIGNEUSES AU BOIS DES
SINGES.
INTRODUCTION
La pression exercée sur l'écosystème de
mangrove auBois Des Singes s'est intensifiée avec la surexploitation des
espèces ligneuses auBois Des Singes. Il est ainsi indispensable de
soumettre cet écosystème à une gestion appropriée
pour un souci de préservation et d'exploitation de ses avantages
écologiques, et aussi pour garantir un approvisionnement durable des
produits nécessaires à la satisfaction des besoins quotidiens des
populations, à l'instar des différentes espèces ligneuses.
Pour y parvenir il faudrait l'intervention de plusieurs acteurs à
différents niveaux de compétences. Il est donc question dans ce
chapitre d'identifier les acteurs intervenant de prêt ou de loin dans la
gestion des mangroves et d'évaluer les actions entreprises au Cameroun,
pour la gestion durable des écosystèmes de mangroves ; ceci
dans le but d'établir une stratégie d'action pour le cas des
mangroves Bois Des Singes.
I- LES BASES D'UNE
GESTION DES MANGROVES : IDENTIFICATIONDESACTEURS ET LEURS
COMPETENCES.
Les acteurs de la gestion des mangroves sont
éparpillés et multiples. A cet effet, il est de plus en plus
évident que la gestion des écosystèmes de mangrove n'est
pas l'affaire d'une personne, mais de tous les membres de la communauté
sans exception. D'où la nécessité de définir les
rôles et les responsabilités de chaque tranche de la
communauté, pour une gestion des plus harmonieuses. Il s'agit des
acteurs du pouvoir public, des collectivités territoriales
décentralisées, des organisations non gouvernementales (ONG) et
des communautés riveraines villageoises ou urbaines.
Ainsi pour une meilleur compréhension des rôles
et responsabilités que jouent ces acteurs, une nécessité
s'impose à nous de les définir de prime abord sous un angle tel
que proposé par les textes, avant de revenir sur leurs actions pour la
gestion rationnelle de la mangrove.
1) les acteurs de
l'administration publique
L'Etat à travers le gouvernement et les
différents départements ministériels, joue un rôle
de premier plan dans le processus de gestion des mangroves à
l'échelle nationale. A cet effet la gestion de la mangrove est
régie par les dispositions de la Loi forestière et a connu son
essor avec la mouvance de la conférence des Nations Unis sur le
Changement Climatique, tenue en 1992 à Rio de Janeiro. Parmi les accords
internationaux issus de cette conférence, et qui intéressent
particulièrement les mangroves, on peut citer :
- La convention sur la biodiversité
- La convention cadre sur les Changements
Climatiques (CCNUCC)
- Le Traité de Kyoto
- La Convention sur les zones humides et les
espèces migratoires (RAMSAR)
C'est à la suite de ses accords internationaux que le
Gouvernement
Camerounais s'est doté d'une structure
ministérielle à compétence générale en
matière de gestion des ressources naturelles, dont les mangroves.
A ce titre, le ministère de tutelle de la gestion des
mangroves est le Ministère des Forêts et de la Faune. Ce dernier
travaille en étroite collaboration avec le Ministère de
l'Environnementet de la Protection de la Nature ainsi qu'avec plusieurs autres
départements ministériels intervenant directement ou
indirectement sur la gestion des écosystèmes de mangrove.
Le MINEFOF et le MINEP, crées en Décembre 2004
à la suite de la dissolution de l'ancien Ministère de
l'Environnement et des Forets, mis en place à l'époque par le
décret N° 92/069 du 09/04/1992, pour illustrer la prise de
conscience des autorités camerounaises quant aux débats
menés à l'époque au sein des Nations Unies.
Le MINFOF est chargé de l'élaboration, de la
mise en oeuvre, et de l'évolution de la politique nationale en
matière forestière et faunique. Il est également
responsable de la mise au point et du contrôle de l'exécution des
programmes de reboisement, de régénération, d'inventaire
et d'aménagement des forêts, ainsi que du contrôle du
respect de la réglementation dans le domaine de l'exploitation
forestière et des ressources y affectées, par tous les
auteurs.
Le MINEP quant à lui est chargé de la
coordination et du suivi de l'exécution de la politique nationale de
l'environnement. A ce titre il est également responsable :
- De la définition des normes de gestion rationnelle
des ressources naturelles en liaison avec les ministères
concernés ;
- De l'information du public en vue de susciter sa
participation à la gestion, à la protection et à la
restauration de son environnement de proximité ;
- De l'élaboration des plans directeurs sectoriels de
protection des ressources naturelles en liaison avec les départements
ministériels intéressés, et de la négociation des
accords internationaux relatifs à la protection de l'environnement et
à leur mise en place.
- Plusieurs autres départements ministériels,
à travers les missions qui leur sont assignées, interviennent
dans les secteurs précis de la protection de la nature,
complétant ainsi les activités menées par le MINFOF et le
MINEP. C'est ainsi que :
- Le MINATD assure l'élaboration et la mise en oeuvre
de la réglementation et des normes en matière de
prévention, de gestion des risques, et des calamités naturelles
ainsi que la coordination des actions nationales et internationales en cas de
catastrophe naturelle.
- LeMinistère de l'agriculture s'occupe entre autres de
la protection phytosanitaire des
Végétaux.
- Le Ministère de la culture quant à lui est
responsable de la préservation des sites et monuments historiques, et
de la protection du patrimoine culturel.
- Le MINDUH est en charge de la définition des normes
en matière d'assainissement et de drainage ; de la
définition des normes en matière d'hygiène et de
salubrité ; de l'élaboration et du suivi des
stratégies d'aménagement et de restauration des villes.
- Le MINDAF assure la gestion du domaine public et
privé de l'Etat, du domaine national. Il est aussi chargé de
l'élaboration et de la tenue des plans cadastraux.
- Le Ministère de l'Elevage s'occupe de la
salubrité des denrées alimentaires d'origine animale, de la
protection des ressources maritimes et fluviales.
- Le MINTP effectue toute étude nécessaire
à l'adaptation aux écosystèmes locaux, des infrastructures
en relation avec le Ministère de la Recherche scientifique.
2)les
compétences et responsabilités des collectivités
territoriales décentralisées
La décentralisation consiste en un transfert par l'Etat
aux collectivités territoriales décentralisées, des
compétences particulières et des moyens appropriés. Les
collectivités territoriales sont des personnes morales, ayant pour
mission de promouvoir le développement économique, social,
éducatif, culturel et sportif de leur localité. A ce titre, elles
jouent un rôle dans la protection de l'environnement, et par ricochet des
écosystèmes de mangroves, dans l'étendue de leurs
différentes circonscriptions.
La Loi n° 2004/018 du 22/07/2004 fixant les règles
applicables aux communes, et la Loi n° 2004/019 fixant les règles
applicables aux régions, déterminent les compétences
respectives des communes, des communautés urbaines et des Régions
en matière de protection de l'environnement.
Pour ce qui est des communes d'arrondissement et des
communautés urbaines, les compétences suivantes leur sont
transférées :
- La lutte contre l'insalubrité, les pollutions et les
nuisances ;
- La protection des ressources en eaux souterraines et
superficielles ;
- La création, l'entretien et la gestion des
espèces verts et des jardins ;
- Les opérations de reboisement et de la
création des bois communaux et communautaires ;
- La gestion, des lacs, des rivières
d'intérêt communautaire.
Les compétences et les responsabilités suivantes
sont transférées aux Régions :
- La gestion des fleuves d'intérêt
général ;
- La gestion, la protection et l'entretien des zones
protégées et des sites naturels appartenant à la
Région ;
- La création des bois, des forêts et des zones
protégées d'intérêt régional suivant un plan
dument approuvé par les représentants de l'Etat ;
- L'élaboration et la mise en oeuvre des plans
régionaux d'action pour l'environnement ;
- L'élaboration du schéma régional
d'aménagement du territoire en se conformant au plan national.
3) le rôle
stratégique des ONG.
Les organisations non gouvernementales sont, non seulement
le lieu où s'expriment les solidarités multiples, mais aussi un
espace où peuvent survenir la concurrence et les conflits entre les
acteurs. Aussi, reconnaitre et entretenir les potentialités des ONG tout
en faisant preuve de sélectivité parmi celles-ci, constitue un
défi majeur auquel sont confrontées les organisations de
coopération qui interviennent dans la gestion des
écosystèmes à mangrove.
Le rôle des ONG consiste toutefois à
contrôler l'action publique, à exercer une influence sur l'action
des autorités locales, et à améliorer l'offre de service
aux citoyens entre eux. Par ailleurs, les ONG oeuvrent pour la plupart du temps
à former et informer les populations locales sur la
nécessité de s'impliquer dans la gestion durable des mangroves,
à travers de bonscanaux d'informations sur le rôle des mangroves
par exemple. Elle amène ainsi les populations à s'interroger sur
leurs rapports avec les mangroves. A cet effet, elles suscitent la
participation populaire aux activités de préservation des
mangroves aux cotés des collectivités territoriales ; et
à ce titre, elles font à la fois des populations et des
autorités, des partenaires privilégiés chaque fois qu'il
s'agit de promouvoir les actions menés dans le sens de la gestion
rationnelle des écosystèmes de mangroves.
Les ONG intervenant dans la gestion des
mangroves au Cameroun sont pour la plupart membre du Réseau Camerounais
pour la conservation des Mangroves (RCM). Il s'agit d'un Réseau national
crée en janvier 2005 et qui regroupe un peu plus de trente sept (37) ONG
actives dans la conservation et la gestion des mangroves et de la zone
côtière du Cameroun.
Le RCM dont le siège se trouve à Mouanko dans
la Région du Littoral, abrite en même temps le projet de l'ONG
CameroonWildlife Conservation Society (CWCS). Il est à noter que les
activités du RCM s'inscrivent dans le cadre du Réseau Africain
pour la conservation de la mangrove(RAM), dont le siège se trouve
à Dakar au Sénégal.
Pour assurer le relais des missions du « Bureau
national », dans les différentes mangroves de la côte
camerounaise, le RCM travaille en collaboration avec les différents
points focaux que le Réseaux à dénommés
« Groupes de contact zonaux ». A cet effet, le
Réseau compte quatorze (14) groupes de contact zonaux, dont cinq (05) au
Sud-ouest pour les mangroves du Rio Del Rey, sept (07) au littoral pour les
mangroves de l'estuaire du Cameroun, et deux (02) dans la Région du Sud
pour la mangrove du Rio Ntem². La coordination du Réseau est
assurée par l'ONG CWCS. Dans le but d'atteindre les objectifs du RCM,
des plans d'actions sont élaborés à cet effet chaque
année et sont suivis à les Réunions du Comité
Exécutif (RCE) composé du bureau national et des coordinateurs
des différents Groupes de Contact Zonaux tenues de manière
rotative dans les différentes zones, et à travers les visites
d'échanges.
Les ONG membres du RCM travaillent en collaboration avec les
populations dans leurs différentes actions de conservation et de
restauration des écosystèmes de mangroves. Les actions les plus
fréquentes dans ce sens, sont le reboisement et la valorisation des
ressources locales. C'est dans ce sens que le wastershedTack Group (WTG) a
oeuvré pour la restauration avec l'aide des populations de
Bonendalè d'une grande proportion des mangroves dans cette partie de la
berge du Wouri.
II- DES ACTIONS POUR LA
GESTION DURABLE DES MANGROVES AU
CAMEROUN.
La réalité du terrain et l'exploitation abusive
des mangroves montrent qu'il est urgent d'agir de manière
concertée dans le cadre légal et institutionnel adapté.
Cependant, en raison du peu d'intérêt en matière de gestion
durable et intégrée accordé jusqu'ici aux mangroves du
Bois Des Singes, la capacité des acteurs devant s'impliquer dans la
gestion de cet écosystème est faible surtout lorsqu'on sait
qu'une gestion durable des mangroves se base sur la planification et la mise en
oeuvre des programmes de conservations et d'utilisation rationnelle. Les
actions en faveur de la gestion durable des mangroves camerounaise sont
l'oeuvre du gouvernement camerounais, de la société civile ainsi
que des organismes internationaux.
1) L'action de
l'administration publique et des collectivités territoriales
Très peu d'études sur les aménagements
écologiques des zones côtières au niveau de l'estuaire du
Cameroun, ont été effectuées, pour cette raison, les
pouvoirs publics ne disposent pas de données fiables et palpables, afin
d'évaluer de façon systématique, l'impact des
différents causes de dégradation des écosystèmes de
mangrove, et d'assurer le suivie de leur évolution
Toutefois, dans un sens général, le
Gouvernement camerounais à travers la signature de plusieurs textes
liés aux mangroves parmi lesquels : la Convention sur le Changement
Climatique, la Convention sur la diversité biologique, la Convention du
commerce des espèces en voie de disparition, la convention sur la couche
d'ozone et la Convention de RAMSAR sur convention des zones humides qui es un
traité intergouvernemental offrant un cadre d'action nationale et de
coopération internationale pour la conservation et l'utilisation durable
des terres humides, y compris les habitants de mangroves ; ratifiée
par le président l'Etat du Cameroun le janvier de plus, des plans
d'action nationaux ont été élaborés pour la mise en
oeuvre effective de ces conventions à savoir : le plan national sur
la biodiversité, la législation sur la forêt, faune et la
pêche et la législation portant loi-cadre relative à la
gestion de l'environnement cette dernière reconnaît les mangroves
comme zone écologique fragile donc qui doit être
protégée elle stipule d'ailleurs que « la mangrove est
une ressource protégée dont l'exploitation reste
interdite »
C''est ainsi que le Ministère de l'environnement et de
la Protection de la nature a initié un projet de gestion
intégrée des écosystèmes de mangrove au Cameroun,
avec la collaboration de la FAO ; l'Union Internationale pour la
Conservation de la Nature (UICN) ; et la CameroonWildlife Conservation
Society (CWCS). Ce projet a été soumis au financement du Fonds
pour l'Environnement Mondial (FEM). Et qui l'a approuvé en 2009, donnant
ainsi lieu à une subvention pour la préparation de la proposition
complète du projet.
Ce projet a été au préalable
précédé par lui sur la « Gestion participative
et conservation de la biologie des mangroves » élaboré
dans le but de préciser les orientations de la politique, des
stratégies et des mesures prioritaires à mettre en oeuvre pour
gérer de manière durable les ressources biologiques et non
biologiques dont regorgent les écosystèmes de mangrove. A l'issue
de ce projet, un document intitulé « Politique et
stratégie pour la gestion durable des écosystèmes de
mangrove au Cameroun » a été développé
conjointement par le MINFOF et la FAO dans le cadre d'un processus
participatif.
Pour ce qui est de la mangrove du Bois Des Singes l'action de
l'administration publique conjointement avec les collectivités
territoriales, est pour le moment centrée sur la prévision et de
la protection de l'environnement dans cet environnement en proie aux multiples
dégradations.Même si, rien n'est fait de façon
concrète pour ce qui est du sort des mangroves au Bois Des Singes. Dans
les documents que nous avons pu consulté il est juste question des
« sensibilisations » inclus dans le processus de sauvegarde
d'un milieu aussi fragile comme celui du Bois Des Singes.
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