3.2.4 Les taux de prélèvements nets de
transferts
Pour leur obtention, on prend en compte le fait qu'une partie
des prélèvements est directement redistribuée aux
ménages sous forme de bourses et allocations et aux entreprises sous
forme de subventions. En éliminant ces flux on obtient donc le montant
des prélèvements qui est investi dans le fonctionnement propre
des administrations publiques.
Ce type de taux a le mérite de montrer que l'Etat
redistribue directement une large part des sommes qu'il a
prélevé. Mais il peut présenter le risque de faire croire
que l'autre partie est tout simplement retirée du circuit
économique alors qu'elle y retourne sous forme de
rémunération de fonctionnaires, dépenses d'investissements
et autres achats de biens et services.
3.2.5 Les taux de prélèvements
élargis
Ils résultent de la prise en compte de certaines
sources de financements des dépenses publiques, autres que les
prélèvements obligatoires tels qu'ils sont habituellement
définis. Ainsi peut-on inclure au numérateur du rapport
l'ensemble des cotisations fictives, ou meme des cotisations sociales
obligatoires, fictives et effectives, qui ne sont pas perçues par les
administrations publiques.
Dans une conception dépassant plus largement le cadre
des prélèvements obligatoires, on peut être amené
à prendre en compte le besoins de financement des administrations
publiques, c'est-à-dire les sommes qu'elles peuvent être
amenées à emprunter pour exercer leurs fonctions. On obtient
ainsi, en considérant que les emprunts sont des recettes fiscales
« différées », le niveau de
prélèvements obligatoires qui assurerait l'équilibre des
finances publiques.
De ce qui précède, il en découle qu'il
n'existe pas un seul indicateurs de la pression fiscale reconnu à
l'échelle internationale. Cela ne veut toutefois pas dire qu'il faille
pour autant laisser tomber les indicateurs existants. Ça veut juste dire
qu'il est impératif de prendre leur interprétation avec
modération.
3.3 Les obstacles à l'augmentation de la pression
fiscale
Outre les difficultés d'élaboration d'un seul
indice reconnu au plan international pour exprimer la pression fiscale,
l'augmentation de cette dernière est confrontée à
plusieurs obstacles qui sont souvent à la base de plusieurs analyses
dont la fameuse théorie de la courbe de Laffer qui a été
l'un des fers de lance des thèses néo-libérales aux Etats
Unis.
3.3.1 La courbe de Laffer
L'économiste américain A. B. Laffer s'est rendu
célèbre en cherchant à démontrer, en 1980, à
l'aide d'un graphique qui porte désormais son nom, une vieille
idée déjà exprimée par d'autres économistes
comme Adam Smith en 1776 « L'impôt peut entraver
l'industrie du peuple et le détourner de s'adonner à certaines
branches de commerce ou de travail » (Adam
Smith, 1776, P. 106), Jean Baptiste Say
«Un impôt exagéré détruit la base
sur laquelle il porte» (Jean Baptiste Say, p.
320), et qui veut montrer qu'à partir d'un certain
montant, les prélèvements obligatoires incitent les
contribuables, soit à réduire leur activité, soit à
frauder, à tel point qu'ils aboutissent à des montants de
prélèvements plus faibles que ceux qui pourraient être
obtenus avec des taux plus modérés. C'est ce qu'il traduit par la
célèbre citation « trop d'impôt tue
l'impôt ».
3.3.1.1 « Trop d'impôt tue
l'impôt »
Selon la courbe de Laffer, le montant des recettes fiscales
est d'abord une fonction croissante du taux de pression fiscale, mais seulement
jusqu'à un certain seuil maximal M, correspondant au sommet de la
courbe, au-delà duquel le montant des recettes fiscales devient une
fonction décroissante du taux de pression fiscale. C'est dire que les
recettes fiscales vont croitre avec le taux de pression fiscale jusqu'à
atteindre un seuil M au-delà duquel tout accroissement du taux de
pression fiscale aura pour conséquence directe de réduire le
montants des recettes fiscales, il irait meme jusqu'à s'annuler pour le
niveau hypothétique du taux de pression de 100%, toute activité
économique disparaissant dans ce cas limite.
Deux effets contradictoires rentrent en jeu: un effet de
substitution qui incite un agent à diminuer son temps de travail, et un
effet de revenu qui incite les agents à travailler plus afin de
retrouver le niveau de salaire qu'il disposait avant l'augmentation des
impôts. Selon Laffer, pour des taux d'impositions élevés
l'effet de substitution l'emporte sur l'effet de revenu.
Par ailleurs les effets de la taxation élevée
pénalisent l'épargne car les prélèvements sur les
revenus du travail et du capital sont croissants alors que les taxes sur la
consommation sont fixes. Substitution de la consommation à
l'épargne et même consommation ostentatoire.
Ceci s'explique, selon A. B. Laffer, par le fait qu'une
pression fiscale excessive exerce une influence négative sur les
incitations au travail, à l'épargne et à
l'investissement ; elle peut donc avoir pour effet de réduire
l'activité économique dans des proportions telles que le produit
des prélèvements fiscaux s'en trouve diminué.
La courbe de Laffer se subdivise en deux zones : la zone
de gauche dite zone admissible et la zone de droite dite zone inadmissible.
Dans la zone normale, tout accroissement du taux de pression fiscale a pour
conséquences une augmentation des recettes fiscales, et dans la zone
inadmissible toute augmentation du taux de la pression fiscale entraine une
baisse des recettes fiscales. En outre, un meme montant N des recettes fiscales
peut être obtenu avec un taux t1 situé dans la zone
admissible et un taux t2 situé dans la zone inadmissible,
d'où l'inutilité qu'il y'a d'adopter des taux d'imposition trop
élevés.
Graphique1: représentation graphique de la
courbe de Laffer
Recettes
Fiscales
Taux
Normaux
Taux
Dissuasifs
Optimum
100
3.3.1.2 Les critiques adressées au
modèle de Laffer
La courbe de Laffer constitue une représentation
formelle ne permettant pas de déterminer le seuil d'imposition M
au-delà duquel la pression fiscale peut être
considérée comme excessive. De plus, elle se fonde sur
l'hypothèse non vérifiée que tout alourdissement du taux
de pression fiscale portant sur les revenus du travail ou du capital
réduit l'offre de ces facteurs de production. D'autre part, il
n'envisage les prélèvements fiscaux que sous un aspect
négatif, négligeant ainsi leur contrepartie, c'est-à-dire
les dépenses publiques qu'ils servent à financer.
En outre, Selon des théoriciens non libéraux
comme Peter Lindert, les exemples des pays scandinaves, dont l'imposition a pu
dépasser les 70% du PIB à une certaine époque, sans
entraîner les conséquences que prévoyait Laffer, montrerait
que si la courbe de Laffer s'y appliquait, le niveau d'imposition pour
l'atteindre serait très élevé et jamais atteint à
ce jour par un quelconque pays.
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