La mondialisation des échanges entraîne dans un
même mouvement un commerce nocif en pleine expansion, celui des
déchets d'équipements électriques et électroniques.
Ces flux de matériaux usagés augmentent de jour en jour naviguant
entre la sphère économique formelle et informelle. Les pays du
Nord font un usage exponentiel d'équipements électriques et
électroniques en tous genres augmentant ainsi le nombre de DEEE sur le
marché. Ce matériel arrive par conteneurs entiers dans les grands
ports des pays en voie de développement sous diverses épellations
; « matériels de seconde main », « don » .... Ils y
sont « recyclés » à moindre coût, dans des
conditions précaires. Le recyclage est principalement assuré par
le secteur informel dans des décharges sauvages. Coups de marteau,
fracas et incinération tels sont les moyens pour récupérer
le fer, l'aluminium, le zinc, le plomb... par la plupart des recycleurs du
secteur informel. A la différence de ce dernier, celui formel est
beaucoup plus réglementé et plus organisé mais peu
représenté au Sénégal. Cependant, cela n'exclut pas
le niveau d'exposition chimique très élevé observés
dans les entreprises de recyclage.
Les nombreuses substances dangereuses qu'ils contiennent sont
toxiques pour les travailleurs et l'environnement à certaines doses. Ils
contaminent la chaîne alimentaire ainsi que les habitants vivant à
proximité de ces points de récupération. Les dispositions
actuelles du droit international et des régulations régionales ou
étatiques ne permettent pas d'éliminer ce commerce inégal
et dangereux pour la santé des plus pauvres.
Dans les filières de traitement des déchets
d'équipements électriques et électroniques (DEEE), de
nombreux risques sont présents et notamment le risque chimique qui est
particulièrement préoccupant. Le manque d'éco-conception,
l'augmentation des flux ainsi que l'organisation des postes de travail et des
procédés de traitement de ces équipements en fin de vie
sont en grande partie responsables des expositions professionnelles. Le terme
« affections pulmonaires liées au travail » désigne
toute affection pulmonaire provoquée ou aggravée par l'exposition
à des substances présentes sur le milieu de travail.
En conséquence, bien qu'il existe indiscutablement,
dans le cas des substances cancérogènes comme dans celui des
substances toxiques en général, une relation entre les doses
absorbées et les réponses obtenues, il est difficile de fixer,
pour des expositions répétées pendant une grande partie de
la vie, des doses seuils en deçà desquelles il n'y a plus de
danger. En effet, si l'on admet la persistance de l'effet après
l'élimination de la substance qui en est responsable, même des
doses infimes peuvent être dangereuses, si leur absorption se
répète pendant une période
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suffisamment longue ou si un temps suffisant s'écoule
leur permettant de manifester leur activité, ce qui les rend
particulièrement redoutables lorsque l'exposition commence dès
les premiers stades de la vie.
L'étude menée à la DSN a permis
d'évaluer qualitativement les risques liés au recyclage des DEEE.
Les résultats obtenus globalement attestent de la présence de
dangers potentiels liés à la manipulation de DEEE. Plus
spécifiquement, la manipulation des imprimantes les exposait à la
poussière et aux odeurs des encres. Le niveau d'exposition étant
très élevé, ce qui nécessiterait une
amélioration des procédés de recyclages et la protection
des travailleurs.
L'exploration de la fonction respiratoire (EFR) a permis de
déceler des troubles ventilatoires chez les agents chargés du
recyclage à la DSN. La comparaison de ces résultats avec ceux
obtenus chez des témoins nous a permis de voir que l'apparition de
troubles ventilatoire semblait ne pas être liée à
l'exposition aux D3E. Le tabagisme semble influencer ce phénomène
chez les témoins contrairement aux cas. En effet, nous avons plus de cas
d'asthme chez les agents non-fumeurs, ce qui nous laisse croire que
l'exposition pourrait influencer l'apparition d'asthme chez les agents. Le port
d'équipement de protection adéquat et une bonne hygiène au
travail pourraient diminuer les risques de troubles ventilatoires dans un
milieu pollué par des particules.
Cependant, toutes les conclusions tirées après
chaque étape de notre étude, ne peuvent affirmer avec certitude
l'influence potentiellement dangereuse des DEEE sur les agents chargés
du recyclage. Il faudrait une analyse judicieuse des matrices environnementales
tout en veillant aux suivis des agents pour voir d'éventuelles
manifestations cliniques dans le futur.
En l'absence de données d'exposition, il est important
d'avoir une connaissance sur la nature des agents chimiques présents
dans les atmosphères de travail par des campagnes de métrologie.
Cette connaissance est nécessaire car ces équipements
électriques et électroniques peuvent être anciens, de
provenance diverse et donc contenir des substances qui sont actuellement
interdites ou réglementées.
D'autres domaines de recherche spécialisée peuvent
se révéler très fructueux en évaluation de risques
chimiques professionnels. Pour certains toxiques, il faudrait élargir le
champ d'action de la recherche en incluant par exemple d'autres domaines de
recherche comme : l'histochimie, l'immunochimie et la biologie
moléculaire afin d'apporter des renseignements utiles pour
établir des seuils de nocivité, tout en contribuant à
révéler les mécanismes d'action toxique. De plus,
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cela permettrait de prendre des mesures de protection
collective et individuelle afin de garantir la santé et la
sécurité des travailleurs.