Les difficultés des armées nationales à lutter contre le terrorisme. Cas de l'armée camerounaise.par Germain GaàƒÂ«tan ABOMO BENGONO Université de Yaoundé 2 - Master 2 en sciences politiques 2016 |
B-ADAPTER LE MODELE DE FORCESMême s'il serait irresponsable de se départir des moyens de répondre à la résurgence d'une menace militaire majeure au cas où l'on n'aurait pas su le prévenir. Il n'y aura pas, au cours du quart de siècle à venir des armées nationales capables de rivaliser avec les coalitions sous régionales. Il faut pourtant conserver les capacités utiles d'action conventionnelle248(*). Elles sont pourtant nécessaires pour prévenir la remontée de ce type de menace en dissuadant l'adversaire éventuel d'une course éventuelle à la puissance. Mais aussi, pour conforter l'indispensable diplomatie coercitive en crédibilisant la dissuasion militaire par la complétude du spectre des menaces et permettre, autant que de besoin, d'imposer la force contraignante dans les opérations extérieures de soutien à la paix. Cependant, l'effet pervers de cet excès de puissance, est d'engendrer à la fois son rejet des modèles sociétaux qui l'on produite et l'improbabilité des guerres dont le mode lui est naturel ; diminuant lui-même l'éventualité des vastes actions antiforces. Il trouve paradoxalement dans le déséquilibre des arsenaux la limite même de son utilité. A force de dissuader, il décourage, et conduit même à des pratiques qui vont là contester et là contourner. La guerre, passée d'une logique capacitaire à une logique finalitaire, ne fonde plus le succès des rapports de forces classiques. Elle suppose, pour le règlement des crises, la mise en oeuvre des instruments militaires sophistiqués, mais aussi politiques, diplomatiques, sociaux, à travers l'existence des forces capables de jouer, dans les conflits modernes, de ces différents registres. Dans ce sens, les nouveaux engagements, comme la lutte antiterroriste modifient l'activité stratégique et nivellent les avantages nés de la haute technologie. L'influence remplace la puissance. Il s'agit souvent moins de conquérir l'espace que de pacifier les coeurs et les esprits, de gagner l'adhésion de la population à l'action que l'on mène. L'aptitude n'est plus à la destruction, mais la capacité d'assurer le contrôle politique de l'espace et d'établir, grâce à la maîtrise de la violence d'une action perçue comme légitime, les conditions d'émergence d'un nouveau contrat social. Il s'agit de montrer une indispensable détermination dans la volonté de résolution d'une crise. A l'aube de la deuxième Grande Guerre, la plupart des guerres se sont déroulées à l'intérieur des Etats et le mouvement s'amplifie de nos jours. Ce constat remet en cause les concepts et les modèles traditionnels qui valaient pour les guerres interétatiques et diminue l'apport de la haute technologie aux nouvelles applications de la diplomatie. Le nouveau paysage conflictuel estompe ainsi progressivement les certitudes quantitatives, rationnelles et classiques du 20ème siècle : la dérégulation de la guerre a donné naissance à des formes de conflits qui replacent l'homme au coeur du dispositif de défense249(*). Pour les armées nationales, le principe d'adaptation doit dominer en imposant les arbitrages internes et externes nécessaires, afin que les modèles de forces soient capables de coercition, mais également de produire sur le terrain de l'efficacité politique. L'expérience montre que les Armées Nationales qui gagnent, sont des armées qui apprennent, celles qui s'adaptent, celles qui tirent du réel leur efficacité pour l'avenir. « Learn and adapt » disent les anglo-saxons : c'est un impératif. L'armée camerounaise doit aller plus loin que là ou elle est aujourd'hui ; elle ne doit pas se contenter d'écrire les leçons qu'elle a apprise. Elle doit surtout apprendre les leçons qu'elle a écrites et en tirer toutes les conséquences pour le modèle de forces, leur équilibre, l'entrainement des unités, l'équipement des forces, la formation des hommes aux mentalités des conflits modernes. * 248 Vincent Desportes, op.cit. p. 189. * 249 Vincent Desportes, op.cit, p. 7. |
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