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Les difficultés des armées nationales à  lutter contre le terrorisme. Cas de l'armée camerounaise.


par Germain GaàƒÂ«tan ABOMO BENGONO
Université de Yaoundé 2 - Master 2 en sciences politiques 2016
  

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B-L'EMULATION DU TRYPTIQUE PEUPLE-ARMEE-NATION DANS LA LUTTE CONTRE BOKO HARAM

L'émulation du triptyque Peuple-Armée-Nation ici, fait référence à la consolidation et à l'objectivation du lien entre l'armée et la nation contre la secte terroriste Boko Haram. Face à la montée en puissance des actions violentes de Boko Haram au Cameroun, l'on a observé une mobilisation de toutes les couches sociales de la population pour condamner les actes terroristes de la secte Boko Haram. Il était également question de soutenir l'action des forces de défense engagées au front et de démontrer la solidarité de la Nation aux populations de l'Extrême-Nord du Cameroun soumises au terrorisme de Boko Haram.

Cette mobilisation populaire a donné naissance à des opérations de collecte des fonds et de dons en particulier, mais aussi les meetings. Les marches politiques et les offices religieux ont été organisés en l'honneur des disparus et aux militaires engagés dans cette lutte200(*). Cette mobilisation nationale contre Boko Haram vient objectiver le concept de défense du Cameroun qui est « la défense populaire », et l'émulation du couple Armée-Nation. Au Cameroun, les actions de Boko Haram sont considérées par la population camerounaise comme une agression de la secte islamiste contre le peuple camerounais. Malgré comme en stratégie le terrorisme aussi violent soit-il ne peut-être assimilé à une agression. Car, selon Jean Pierre Queneudec, « pour qu'il y ait agression stricto sensu, il faut, qu'il y ait, emploi de la force armée par un Etat. Selon la formule retenue par la résolution 3314 portant définition de l'agression par l'Assemblée Générale de l'ONU le 14 décembre 1974 »201(*). L'union sacrée au tour de l'action des forces armées camerounaises constitue donc un avantage stratégique pour l'armée camerounaise.

Pour assécher la base de soutien et de recrutement des jihadistes au Cameroun, les autorités de Yaoundé en collaboration avec les autorités religieuses, notamment le Conseil des Imans et des Dignitaires Musulmans du Cameroun (CIDIMUC)202(*) et l'Association Camerounaise pour le Dialogue interreligieux (ACADIR)203(*), ont mis en place des initiatives allant dans le sens de lutter contre la radicalisation et le fondamentalisme religieux. L'objectif est la réalisation du dialogue interreligieux et de l'implication des musulmans et des chrétiens dans la construction de la paix au Cameroun. Ces associations constituent un rempart contre la radicalisation et un contre-discours pour les terroristes de Boko Haram au Cameroun en quête de militants et de soutien local.

A l'épreuve des actions asymétriques, les autorités camerounaises ont eu recours à l'action des comités de vigilance. Une sorte de milice populaire formée et encadrée par les autorités administratives et militaires pour conjuguer les efforts contre le groupe terroriste. Outre le renseignement prévisionnel et opérationnel apporté par les comités de vigilances, ceux-ci sont également chargés de mener des opérations de repérages, de pistages et de sécurité civile204(*). D'après un témoignage reçu d'un militaire du BIR-Alpha à Maroua, « Les membres des comités de vigilance sont nos yeux et nos oreilles dans la lutte contre Boko Haram. Ils nous fournissent le renseignement qu'aucun appareil ne pourra nous fournir, ils veillent jour et nuit à pister les potentiels Kamikazes »205(*). A cet effet, l'importance des comités de vigilances est décisive dans la lutte contre les attentats suicides, notamment dans le repérage des kamikazes.

Dans l'optique de gagner les coeurs et les esprits des populations locales, les militaires camerounais ont organisés des opérations de charme envers les populations civiles, à travers, les Actions Civilo-Militaires (ACM). Ces actions sont menées par les militaires du BIR-Alpha et de l'Emergence4 auprès des populations locales. Il s'agit des opérations de distribution des médicaments, des vivres ou des consultations médicales et de construction des routes, des salles de classe dans les localités touchées par les actions de Boko Haram.

CONCLUSION DU CHAPITRE

Au regard de l'évolution polémologique de Boko Haram, qui tend vers un système revendicatif et insurrectionnel, ceci rappelle les trois phases de la guerre révolutionnaire théorisée par Mao Zedong206(*). « 1) Attaques sporadiques et escarmouches contre les forces et les symboles du gouvernement afin de lancer l'insurrection, s'entrainer au combat, harasser l'adversaire, recruter et préparer des actions de grande envergure ; 2) Constitution de bases, expansion des poches de résistance, ouverture d'un ou plusieurs fronts parallèlement à la poursuite et à la sophistication des opérations de la phase 1 ; 3) Au moment opportun et de l'affaiblissement, voire de la délégitimation des autorités établies, attaques massives pour battre militairement lesdites autorités et proclamer un nouveau régime ou un nouveau système sociopolitique »207(*).

Ainsi, ce chapitre était axé sur les mécanismes de défense mises en oeuvre par l'armée camerounaise dans la lutte contre Boko Haram. Dans la progression de notre étude nous nous sommes attelés à présenter les mesures militaires prises par le Cameroun durant ce conflit. De ce fait, le Cameroun a su adapter son format de force selon les différentes phases du conflit et en fonction des méthodes de combat utilisées par Boko Haram. C'est ce qui justifie l'affaiblissement considérable de la secte terroriste au Cameroun en particulier, et dans tout le bassin du lac Tchad en général. Le maillage stratégique des forces des pays de la ligne de front participe également à la décapitation de la secte terroriste, et la tournure du conflit à l'avantage du Cameroun. Toutefois, les forces armées camerounaises n'arrivent toujours pas à remporter la victoire décisive dans ce conflit face à la nature irrégulière qu'a prise le conflit. Boko Haram fait toujours preuve de résilience et d'adaptation au conflit.

CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE

Au sortir de cette partie, où il a été question de faire l'analyse de l'action des forces armées nationales dans la lutte contre le terrorisme. Durant notre étude nous avons pu analyser certains conflits majeurs de lutte contre le terrorisme, ayant impliqué l'action des forces armées nationales (l'Afghanistan, le Sahel et le bassin du lac Tchad). Dans ce sens, il ressort que l'action des forces armées nationales dans la lutte contre le terrorisme reste confrontée par de grandes difficultés. Du moment où, la victoire décisive dans cette lutte ne peut s'obtenir sur le plan militaire. En effet, les forces armées ont été conçues pour remporter la victoire décisive dans le champ de bataille, a travers, la possession d'une grande puissance de feu. Malgré une meilleure adaptation de la force sur le théâtre d'opérations, une armée aussi puissante que soit-elle ne peut combattre efficacement contre les groupes terroristes. Car, cette menace n'entre pas dans le cadre d'actions classiques d'une armée. La lutte contre le terrorisme international est une lutte globale qui ne peut-être l'apanage des militaires, ou d'une armée. C'est en mutualisant les efforts que la lutte contre les mouvements terroristes ne pourra trouver une efficacité certaine.

Dans un contexte de montée en puissance du terrorisme international, il apparait urgent de renforcer les capacités opérationnelles des forces armées nationales, dans le souci de leur permettre de garder durablement l'initiative face aux terroristes. Il s'agit surtout de promouvoir de nouvelles stratégies pour adapter de nouvelles doctrines d'emploi des forces des pays confrontés au terrorisme.

* 200 Le 30 avril 2015, le compte d'affectation spécial ouvert par le comité interministériel de gestion des dons affichait un montant de 1 milliard 29 millions, selon le président de ce comité.

* 201 Jean-Pierre Queneudec, Société Française pour le Droit Internationale, Les nouvelles menaces contre la paix et la sécurité internationale, Paris, éd A. Pedone, 2004, p.290.

* 202 Le CIDIMUC depuis sa création a organisé trois conférences qui ont réuni, à chaque fois des leaders religieux musulmans et chrétiens autour des thématiques paix et coexistence pacifique entre les peuples du Cameroun. La première conférence a eu lieu en 2009 sous le thème : « paix au Cameroun : une culture à enrichir », la 2e tenue en 2010 sous le thème : « la paix au Cameroun : une culture à consolider ». La troisième conférence s'est tenue en 2014 sous le thème : « Sécurité et paix au Cameroun : Enjeux, défis et responsabilité des acteurs sociaux ». Elle a vu la participation des autorités administratives et le chef de l'Etat camerounais a envoyé un représentant. Les discussions ont tourné autour de trois sous thèmes : 1. « De la construction à la consolidation de la paix » ; 2. « «les Imams : acteurs du maintien de la paix » et 3. «Le rôle du sermon de vendredi : théories et pratiques ».

* 203 Elle a organisé un colloque interreligieux dans la ville de Maroua, le 23 au 24 avril 2014 sous le thème « Chrétiens et Musulmans, ensemble pour la Paix. Fruit, défit et perspectives du dialogue interreligieux dans la Région de l'Extrême Nord » disponible sur internet sur l'adresse, fr.allafrica.com/stories/200801170614.html, « Association Camerounaise pour le Dialogue Interreligieux (ACADIR), colloque interreligieux. Maroua, 23-24 avril 2014.

* 204 Ibid.

* 205 Entretien avec un militaire du BIR-Alpha à Maroua-Salack, 5 mai 2016.

* 206 Voir entre autres, Le Petit livre rouge : citations de Mao Tsé-toung, chapitre VIII : « la guerre populaire ».

* 207 Cité par Jean Eudes Biem, op.cit.

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"Des chercheurs qui cherchent on en trouve, des chercheurs qui trouvent, on en cherche !"   Charles de Gaulle