Les difficultés des armées nationales à lutter contre le terrorisme. Cas de l'armée camerounaise.par Germain GaàƒÂ«tan ABOMO BENGONO Université de Yaoundé 2 - Master 2 en sciences politiques 2016 |
B-L'OPERATIONNALISATION ET LE REDEPLOIEMENT DES UNITES DE COMBAT DE L'ARMEE REGULIEREFace à la montée en puissance des activités terroristes de Boko Haram dans le septentrion camerounais, le président de la république avait également pris une série de mesures promulguées par décrets. Les décrets pris par lu président de la république concernent également, l'activation de la 31e et la 32e BRIM (Brigade d'Infanterie Motorisée)165(*). Celles-ci sont des unités tactiques de combat de l'armée de terre dont les zones d'opérations englobent les localités touchées par les activités criminelles de la secte terroriste. Par la suite, nous avons également, le transfèrement du poste de commandement de la 41e BRIM de Maroua à Kousseri. Dans la foulée, pour une gendarmerie de proximité proche des populations, de nouvelles brigades de gendarmerie ont été créées dans la ville de Maroua et dans les localités touchées par les incursions de la secte terroriste, notamment à Fotokol et Kolfata. Dans un souci de coordination de l'action des forces sur le terrain, des « commandements opérationnels »166(*) ont vu le jour dans l'Extrême-Nord. L'ensemble de ces mesures apparaissent ici à ce qui est commun d'appeler « le réajustement du concept d'emploi des forces », pour une meilleure utilisation de la force. Le déploiement de ces séries de mesures va en droite ligne avec la nature de la menace qui prévalait. En effet, les combats entre l'armée et les membres de Boko Haram étaient plus conventionnels qu'asymétriques et la victoire décisive semblait être basée sur le rapport de force, ou sur la détention d'une grande puissance de feu. C'est dans ce sens que les autorités camerounaises ont cherché à palier à ces déficits par un réaménagement du concept d'emploi des forces en l'adaptant à la nature des combats. Toutefois, les résultats de ces mesures n'ont pas été automatiques sur le théâtre des opérations. En effet, certaines mesures prises lors du sommet de Paris du 17 mai 2014 n'ont pas été mises en oeuvre. On peut relever la décision de mener les patrouilles conjointes avec le Nigéria le long de la frontière commune167(*). Cette mesure, durant cette période aurait de toute façon difficilement pu être appliquée. En effet, une grande partie de la frontière commune du nord des deux pays était déjà passée sous le contrôle de Boko Haram. A cela s'ajoute des lacunes sur le plan tactique et opératif, couteuses en vies pour les soldats : sous-équipements (armements non adaptés en zone sahélienne, gilets pare-balles non appropriés, armes non fonctionnelles, manque de lunettes à vision nocturne pour les opérations en profondeur). L'on a également la vétusté du matériel, qui est parfois non adapté pour les combats en milieu sahéliens et les disfonctionnements dans la chaîne de commandement et dans la chaîne logistique168(*). Fort de cette position avantageuse, le leader du groupe terroriste menaçait directement Paul Biya président de la république du Cameroun dans un enregistrement vidéo diffusé le 5 janvier 2015. Aboubakar Shekau chef du groupe jihadiste disait: « Paul Biya, si tu ne mets pas fin à ton plan maléfique, tu vas avoir droit au même sort que le Nigéria (...) tes soldats ne peuvent rien contre nous »169(*). De ce qui précède, nous constatons que, malgré la mise en oeuvre d'une série de mesure par les autorités de l'armée camerounaise pour mieux coordonner les actions sur le terrain, les résultats escomptés n'ont pas été concrétisés. Vu la régionalisation et la transnationalité de cette menace terroriste, nous verrons donc par la suite, la montée en puissance de l'armée camerounaise dans une action coalisée de lutte contre Boko Haram. * 165 Les BRIM sont des unités tactiques de combat de l'armée de terre, dont la création remonte à la réforme de l'armée camerounaise en 2001 et dont l'activation a été faite en 2014. * 166 La création des commandements opérationnels permet de confier, à titre provisoire, des missions spéciales de police aux militaires placés sous le commandement des généraux. * 167 Libye, Mali, Cameroun, Centrafrique...l'effet domino du terrorisme, op.cit. * 168 Entretien avec un officier militaire au ministère de la défense, op.cit. * 169 FIDH, Nigéria : les crimes de masses de Boko Haram, op. cit. p.27. |
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