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L'application du concept de la responsabilité de protéger


par Grâce AWAZI
Université de Goma  - Licence 2019
  

Disponible en mode multipage

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EPIGRAPHE

«Les enfants d'Adam font partie d'un corps

Ils sont créés tous d'une même essence

Si une peine arrive à un membre du corps

Les autres aussi, perdent leur aisance

Si, pour la peine des autres, tu n'as pas de souffrance

Tu ne mériteras pas d'être dans ce corps»1(*).

Saadi, le poète humaniste du XIIIème siècle

IN MEMORIAM

Dans notre parcours universitaire nous avions connu des bons moments et des moments de tristesses. Les premiers caractérisés par des bons souvenirs de réussite et les seconds causés par les décès des personnes qui nous étaient chères, dont nous ne cesserons de nous souvenir, notamment :

Notre oncle paternel KITAMBALA Fidèle ;

Notre oncle maternel BARUANI AMISI ;

Notre Directeur de travail de fin de cycle de graduat CT LUNGENYI Liévin qui nous a quitté un mois après qu'il nous ait remis le feu vert pour le dépôt de notre travail à la faculté ;

Nos collègues de classe avec qui nous avions obtenu le diplôme d'Etat : LOMPOKE Justin, AMUNAZO KASONGO et OLEKO LUNGONGU.

Que vos âmes reposent en paix, vous resterez gravé dans nos mémoires.

DEDICACE

A notre famille

GrâceAWAZI KITAMBALA

REMERCIMENTS

Emu et exulté pour l'accomplissement de cette oeuvre scientifique, sanctionnant la fin de notre cycle de licence en droit, nous ne pouvons pas être indifférents pour passer sous silence la générosité de ceux grâce à qui nos recherches ont abouti à la rédaction du présent travail.

En premier lieu, nous remercions le DIEU Tout Puissant, Créateur des cieux et de la terre, qui a permis à ce que nous puissions franchir cette étape importante de notre vie académique.

Nos remerciements s'adressent au Professeur MINGASHANG qui, malgré ses occupations, a consenti àdiriger le présent travail. Nous présentons nos gratitudes à l'Assistant Olivier BAHOZE qui s'est sacrifié pour l'aboutissement de notre travail.

Les mots ne suffiront pas pour remercier celui que nous appelons le Héros de la famille, notre Père Edmond KITAMBLA qui, nonobstant des moments difficiles de la vie, n'a cessé de nous soutenir moralement, financièrement, spirituellement,... nous disons simplement MERCI PAPA !

Nos remerciements s'adressent en particulière a maman Adolphine AMUNDALA qui ne nous a jamais abandonnée quel que soit les moments difficiles.Nos remerciements s'adressent également à la grande dame maman MWANVUA, qui a beaucoup peiné pour notre réussite

Nos remerciements s'adressent à tous nos camarades avec qui nous avons luttés jusqu'à la fin des études universitaires notamment : NGENA, TAMASHA, MUGISHA, NZILA, ALPHA, MBULA, LUSE, HANGI, HERI, SADIKI, MINANE, MUTAMBA, KITENGE, BOLONGI, KASEREKA, ADJOYO, KANINGINI, KAMBALE, SIKULI, MAPENDO, RUZA, AKITOWA.

Nos remerciements s'adressent à tous nos frères dans la fois notamment : BRAHIM, MARIAM, ALIMASI, BARUANI, BATUMIKE, KIGHOMA, MUSHAGALUSA, YUMA, DORISE, BISIMWA, BLAISE, RAMAZANI, KASIMU, WENDO, NADEGE, MIHIGO.

Nous disons enfin merci à tous ceux qui ont de près ou de loinont contribués pour notre réussite dans notre cursus universitaire.

Grâce AWAZI KITAMBALA

SIGLES ET ABREVIATIONS

A/RES : Résolution de l'Assembléegénérale

Al : Alinéa

APC : Alliance pour lechangement

APO : Accord Politique de Ouagadougou

Art : Article

BAE : Brigade anti-émeute

CAI : Conflit armé international

CANI : Conflit armé non international

CECOS : Centre de commandement des opérations de sécurité

CEDEAO : Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest

CEI : Conseil électoral indépendant

CICR : Comité international de la Croix-Rouge

CIISE : Commission internationale de l'intervention et de la souveraineté des Etats

CIJ : Cour internationale de justice

CPI : Cour pénale internationale

CPS : Conseil de paix et de sécurité

CRS : Compagnie républicaine

DIP : Droit International Public

DIH : Droit International Humanitaire

ECOMOG : Economiccommunity of West African state cease-fire Monitoring Group (Brigade de surveillance du cessez-le-feu de la CEDEAO appelé les «casques blanc»

FDS : Forces de défense et de sécurité

FDS-CI : Forces de défense et de sécurité de la Côte d'Ivoire

FESCI : Fédération estudiantine et scolaire de Côte d'Ivoire

FRCI : Forces républicaines de Côte d'Ivoire

HRW : HumanRights Watch

MFA : Mouvement des forces de l'avenir

OI : Organisation Internationale

ONG : Organisation non gouvernementale

ONU : Organisation des Nations Unie

ONUCI : Opération des Nations Unies en Côte d'Ivoire

OTAN : Organisation du traité de l'Atlantique Nord

PNUD : Programme des Nations Unies pour le Développement

RHDP : Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix

R2P : Responsabilité de protéger

RDR : Rassemblement des républicains

RTI : Radiotélévision ivoirienne

S/RES : Résolution du Conseil de Sécurité

TPIR : Tribunal pénal international pour le Rwanda

TPIY : Tribunal pénal international pour l'Ex-Yougoslavie

UA : Union Africaine

UDCI : Union démocratiquede Côte d'Ivoire

0. INTRODUCTION

0.1. PROBLEMATIQUE

Rarement, dans l'histoire du droit international contemporain, une question n'aura fait l'objet d'autant d'intérêt et de controverses que celle de l'intervention humanitaire ou, plus récemment, de la responsabilité de protéger (R2P) depuis sa création en 2001 par la Commission internationale de l'intervention et de la souveraineté des États2(*).

La responsabilité de protéger a commencé à susciter le débat, dès son apparition sur la scène internationale quand à ce qui concerne sa mise en oeuvre ; la boite à outil du droit international pour utiliser une expression à laquelle on recourt souvent dans le cadre de la protection de la population civile contre les violations des droits de l'homme, lorsque l'Etat lui-même en est l'auteur ou est incapable d'assurer sa responsabilité de protéger sa population, celle-ci est incomplète, elle ne permet pas de réagir à des situations de ce type, parce qu'elle est fondée sur un principe sacro-saint du Droit International, qui est celui de la souveraineté des Etats qui s'oppose à ce que des tiers, des Etats, des Organisations Internationales se préoccupent à des situations qui se développent à l'intérieur d'un Etat et mettent en oeuvre des mesures pour apporter une assistance à ces populations, il s'agit donc, d'une conception rigide de la souveraineté selon laquelle, l'Etat a droit à la vie et à la mort des populations se trouvant à l'intérieur de son territoire, sans que quiconque à l'extérieur de l'Etat, puisse trouver à dire.

Les relations en Droit International sont fondées sur le principe de non-ingérence dans les affaires intérieures des Etats. Le droit d'ingérence humanitaire étant déjà critiqué, il était alors question de trouver un consensus, quand à ce qui concerne, l'intervention aux fins de la protection de la population civile. Peut-on alors parler d'un vide juridique, que la responsabilité de protéger vient combler ?

La problématique de l'intervention, dans le but de protection de la population civile contre les atrocités de masse a pris beaucoup d'importance à la suite de l'adoption massive par des Etats des normes de Droit International de Droits de l'Homme ; des normes de Droit International Humanitaire et enfin les normes du Droit International Pénal.

La question ici est celle de savoir, aux regards de toutes ces normes, est-il acceptable qu'au nom du respect du principe de la souveraine étatique, les gouvernements restent immobiles face à une violation massive des droits de l'homme ?

Nous tenons à préciser que c'est aux années 1980 que le « devoir d'ingérence » a été évoqué et conceptualisé pour la première fois par Jean-François REVEL. Il est ensuite reformulé lors d'un colloque organisé en 1987 par Bernard KOUCHNER, homme politique français et fondateur de Médecins sans frontières, et par Mario BETTATI, professeur de droit international.3(*) Il en ressort que la notion de « droit d'ingérence» considère que la souveraineté traditionnelle des États ne peut pas constituer un obstacle à l'assistance d'une population en danger, ni un abri pour une violation massive des droits de l'homme. Plusieurs opérations motivées par des considérations humanitaires et autorisées par le Conseil de sécurité ont ensuite été menées sur la base de ce nouveau concept.4(*)

Cependant, les concepts de droit ou de devoir d'ingérence sont critiqués. Un premier reproche est le flou conceptuel de ces notions, trop vagues, sans base ni définition juridiques, ce qui laisse la porte ouverte aux abus. En outre, divers outils existent déjà pour justifier une intervention à des fins humanitaires, notamment les Conventions de Genève ainsi que le Chapitre VII de la Charte des Nations unies, si la situation est qualifiée par le Conseil de sécurité de menace contre la paix et la sécurité internationales. Un autre argument, présenté notamment par Jean BRICMONT, est la crainte d'un « impérialisme humanitaire »5(*). Christian NADEAU, lui, exprime cette critique d'une manière plus radicale : « L'ingérence humanitaire est par définition impérialiste, puisqu'elle remet en cause la souveraineté des États »6(*). Une autre critique porte sur la neutralité de l'action et sur ses motivations. CROUZATIER s'interroge : « Comment ne pas soupçonner que l'assistance au nom de l'humanitaire, repose sur des motifs politiques et opportunistes ? »7(*).

D'autres auteurs tels que Michel FOUCHER ou Antoine ROUGIER affirment que, les États auront plus tendance à intervenir, lorsque leurs intérêts vitaux sont en jeu et ne pourront dissocier leurs motifs politiques de l'intervention8(*). Philippe Moreau DEFARGES arrive aux mêmes conclusions, et estime qu'un État ne parviendra jamais à faire abstraction du politique, même lorsque son ingérence se veut humanitaire. Il soutient que, l'ONU est constituée d'États souverains et que par conséquent, ses actions dépendent de leur bon vouloir et de leur niveau d'entente. Tous ces auteurs reconnaissent finalement la même réalité ; le problème reste fondamentalement le même : les intérêts et les motivations des États auront toujours une partie cachée9(*) ; comment faire alors lorsque les populations sont victime des violations graves ?

Plusieurs résolutions de l'Assemblée Générale, soutiennent la nécessité de la protection de la population civile, et attribue cette responsabilité à l'Etat et à la communauté internationale, notamment : la résolution 59/141 sur lerenforcement de la coordination de l'aide humanitaire d'urgence fournie parl'Organisation des Nations Unies, qui affirme la responsabilité principale qui incombe aux États à l'égard des victimes des situations d'urgence humanitaireà l'intérieur de leurs frontières, ... en analysant cette résolution, elle appelle les Etats à prendre leur responsabilité sur la question de la protection de la personne humaine10(*).

Nous avons également, la résolution 59/124, sur les pratiques israéliennes affectant les droits de l'homme du peuple palestinien, dans le territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, qui affirme la responsabilité qui incombe à la communauté internationale de défendre les droits de l'homme11(*) ; nous avons aussi la résolution 59/187 sur le renforcement de la coopération internationale dans le domaine des droits de l'homme, à son point 2 affirmeque, «outre les responsabilités particulières, qu'ils ont à l'égard de leurs propres sociétés, les États ont la responsabilité collective de faire respecter les principes de la dignité humaine, de l'égalité et de l'équité au niveau mondial»12(*).

La question fondamentale qui se pose ici est de savoir, si les États jouissent d'une souveraineté inconditionnelle sur leurs propres affaires, comme le droit à la vie et à la mort de ses populations, ou si la communauté internationale a le droit, d'intervenir dans un pays donné à des fins humanitaires. Conscient de la nécessité, de trouver une fois pour toutes un consensus autour de l'intervention aux fins de protection humaine, KOFI ANNAN, alors Secrétaire général des Nations Unies, lance à l'Assemblée générale de celles-ci, en 1999 puis en 2000, un défi dans le but d'atteindre une unité, sur les questions fondamentales de principe et de procédure. Il soulève la question en ces termes :«si l'intervention humanitaire constitue, effectivement une atteinte inadmissible à la souveraineté, comment devons-nous réagir face à des situations, comme celles dont nous avons été témoins au Rwanda ou à Srebrenica, devant des violations flagrantes, massives et systématiques des droits de l'homme, qui vont à l'encontre de tous les principes sur lesquels sont fondés notre condition d'êtres humains ?»13(*)

Conscient de la gravité de ces manquements, mais aussi des contradictions que révélaient les critiques émises dans chacune de ces situations, le Secrétaire général, Koffi ANNAN, interpellait l'ensemble de la communauté internationale en demandant à l'Assemblée générale des Nations Unies: «Que faire? lorsque des populations sont victimes de la part de leur propre Etat, de crimes de génocide ou d'autres crimes et exactions, pour les en protéger, si la souveraineté étatique est un obstacle infranchissable à une action de la communauté internationale?»

«Plus jamais cela» s'était écrié le Secrétaire Général de l'ONU après le génocide rwandais. Mais «Plus jamais commecela», aurait-on pu dire également après le Kosovo. Que faire alors pour sortir de cette impasse politique et juridique, s'il était entendu, et c'était là l'aspect essentiel, qu'il n'était plus envisageable de rester passif et indifférent devant les crimes de masse perpétrés par un Etat derrière ses frontières14(*).

C'est en réponse à cet appel que, le gouvernement du Canada annonça la création, d'une Commission internationale de l'intervention et de la souveraineté des Etats (ci-après CIISE ou Commission), chargée de concilier d'une part, le principe de souveraineté, et, d'autre part, la nécessité d'intervenir en cas de violations graves des droits de l'homme15(*).

C'est en décembre 2001 que la CIISE délivra son rapport intitulé « La responsabilité de protéger »16(*). Les conclusions dudit rapport servirent de fondement à l'engagement consenti par la communauté internationale lors du Sommet du millénaire en 2005. Celle-ci reconnut pour la première fois un fondement juridique au devoir d'agir, face à la transgression continue des droits les plus fondamentaux de la personne humaine. La résolution 63/308adoptée par l'Assemblée générale des Nations Unies le 14 septembre 2009 sur la responsabilité de protéger,rappelle égalementle document final du Sommet mondial de 2005et particulièrement, ses paragraphes 138 et 139 qui consacrent, la responsabilité première de l'Etat à protéger sa propre population, puis la communauté internationale, en cas de la défaillance de celui-ci et décide de continuer d'examiner, la question de la responsabilité deprotéger ;17(*) nous avons également la résolution 1674 du conseil de sécurité qui réaffirme les dispositions des paragraphes 138 et 139 du document final du sommet mondial de 200518(*).

L'un des mérites du concept de responsabilité de protéger, est en effet de dépasser l'opposition qui a dominé les années 1990, entre les États attachés à une stricte application du principe de souveraineté et ceux qui défendent les interventions militaires à des fins humanitaires : l'émergence du concept part de l'idée que, la sécurité internationale doit être pensée, non plus uniquement en fonction de la sécurité des États, dans le cadre d'un conflit interétatique, mais également en fonction de la sécurité des populations civiles victimes d'un conflit armé, surtout interne19(*).

La responsabilité de protéger, marque cependant un changement de perspective : elle n'oppose pas protection des populations et souveraineté de l'Etat, mais affirme la complémentarité ces deux notions. Cécile DUBERNET souligne à ce propos que, pour les promoteurs de la responsabilité de protéger, la souveraineté n'implique pas seulement des droits notamment celui de résister aux ingérences extérieures, mais aussi des devoirs, et au premier chef celui d'assurer, la paix civile et la protection de la population. Inciter ou même contraindre un Etat à protéger sa population, contre les violations les plus graves des droits humains, c'est l'amener à exercer pleinement et authentiquement sa souveraineté.

C'est pourquoi, le document prévoit une action collective de la communauté internationale, au cas où les moyens pacifiques, seraient insuffisants et où les autorités nationales, s'avéreraient incapables d'agir ou se refuseraient à le faire.

Dans la déclaration, adoptée par la Xème conférence des chefs d'État et de gouvernement ayant le français en partage à Ouagadougou, le 27 novembre 2004 : « Nous réaffirmons que les États sont responsables de la protection des populations sur leurs territoires. Nous reconnaissons cependant que lorsqu'un État n'est pas en mesure ou n'est pas disposé à exercer cette responsabilité, ou qu'il est lui-même responsable de violations massives des droits de l'Homme et du droit international humanitaire ou de la sécurité, la communauté internationale a la responsabilité de réagir pour protéger les populations qui en sont victimes, en conformité avec les normes du droit international, selon un mandat précis et explicite du Conseil de sécurité des Nations unies et sous son égide»20(*).

L'engagement contracté par les États membres de l'ONU, laisse cependant en suspens nombre de questions quant aux incidences de la responsabilité de protéger et notamment aux critères d'une intervention. C'est la raison pour laquelle le principe ne fait pas l'unanimité dans les enceintes internationales. Certains craignent que trop de réserves soient prévues qui rendraient ce principe pratiquement inopérant ; d'autres redoutent qu'il serve de prétexte pour promouvoir des objectifs politiques (il ne faudrait pas que la responsabilité de protéger soit une illusion supplémentaire, c'est-à-dire que l'on assiste à un supplément de violence internationale au nom de la sécurité pour les populations). Le Secrétaire général des Nations unies lui-même reconnaît la nécessité de définir plus clairement la portée et l'applicabilité du principe : en d'autres termes d'engager un processus de « normativisation» qui permettrait la substitution d'une logique juridique à une logique politique. Comment le principe peut-il être concilié avec des concepts traditionnels tels que celui de souveraineté de l'État ? Comment ce principe doit-il être mis en oeuvre et comment garantir qu'il n'en sera pas fait un usage contraire aux règles des Nations Unies ?21(*)

L'Organisation des Nations unies a-t-elle les moyens de rendre ce principe opérationnel ? L'enjeu est de définir les conditions de mise en oeuvre de la responsabilité de protéger, sachant que ce concept n'est défini ni dans la charte, ni dans les résolutions du Conseil de sécurité ou de l'Assemblée générale.

Dans l'optique de répondre à la problématique de notre thématique portant sur « l'application du concept de la responsabilité de protéger à la lumière de la souveraineté étatique : cas de la Côte d'Ivoire », nous allons orienter notre recherche au tour des questions suivantes :

1) Comment la responsabilité de protéger a-t-elle émergée et quelle est la valeur ajoutée apportée par elle en droit international dans le cadre de la protection de la personne humaine ?

2) Dans quelle circonstance, la responsabilité de protéger fut appliquée dans la crise ivoirienne de 2010 à 2011 ? A quel seuil de conformité au Droit international peut-on apprécier celle-ci ?

0.2. HYPOTHESES

L'hypothèse étant une proposition visant à fournir une explication vraisemblable d'un ensemble de faits, et qui doit être soumise au contrôle de l'expérience ou vérifiée dans ses conséquences ; une supposition22(*), nous allons pour notre cas avancer les réponses sur des questions que nous nous sommes posé dans la problématique :

1) Le concept de la responsabilité de protéger, aurait émergé, à la suite des multiples violations des droits de l'homme qu'ont connu plusieurs Etats dans le monde et la nécessité de l'intervention, par la communauté des Etats aux fins de la protection de la population, victime des violations massives des droits de l'homme, lorsque son Etat est incapable de la protéger, ou soit il est lui-même auteur de cette violation ; la valeur ajoutée qu'elle aurait apportée en Droit International, serait la relativisation de la souveraineté des Etats et sa subordination à la responsabilité de protéger à l'interne la population civile. Ainsi, la responsabilité première de la protection de la population incombe à l'Etat et à titre subsidiaire la communauté internationale.

2) Etant donné que, la responsabilité de protéger s'applique dans le cadre des violations manifestes des droits de l'homme, celle-ci aurait été appliquée suite à des violations massives de droit de l'homme durant la période poste électorale de 2011 qui aurait occasionné plusieurs pertes des vies humaines en Côte d'Ivoire. Pour ce qui est de la conformité de la mise en oeuvre de la responsabilité de protéger au droit international, la direction de l'action par le Conseil de Sécurité qui est le garant du maintien de la paix et de la sécurité au niveau international donnerait des gages dans ce sens.

0.3. CHOIX ET INTERET DU SUJET

Le choix et l'intérêt de cette thématique se justifie aussi bien du point de vue théorique que pratique.

Sur le plan théorique, notre volonté de cerner les contours de la souveraineté étatique en droit international contemporain est à la base de notre motivation. Ainsi, il a été cerné que la souveraineté constitue un moyen efficace pour chaque Etat, d'éviter toutes sortes d'ingérences extérieures, ce qui veut dire que ni la communauté internationale, ni un autre Etat qui qu'il soit ne peut intervenir, dans les affaires qui relèvent essentiellement de la compétence de l'Etat, tel que prévu à l'article 2 paragraphe 1 et 7 de la charte des Nations Unies. En vertu de cette souveraineté, certains Etats se sont prétendu avoir le droit à la vie et à la mort de leurs populations, comme est le cas de la Côte d'Ivoire que nous examinons. C'est ainsi, cette étude pourrait contribuer, sur le plan théorique, à une meilleure compréhension du contenu, et des contours du concept de la « responsabilité de protéger » à la lumière de la souveraineté étatique.

Sur le plan pratique, l'application du concept de la responsabilité de protéger, au cas choisi dans le cadre de cette étude, permettra de comprendre comment ce principe émerge, du fait de son utilisation dans le système onusien de maintien de la paix et de la sécurité internationale. Ce système, dans ses dernières évolutions, s'est courageusement ouvert aux questions des droits de l'homme. Désormais, le Conseil de sécurité fonde son action en vertu du Chapitre VII sur les liens entretenus entre violation des droits de l'homme et du droit international humanitaire et menace à la paix et la sécurité internationales.

0.4. APPROCHE METHOLOGIQUE

La méthodologie étant, une démarche rationnelle de l'esprit pour arriver à la connaissance ou à la démonstration d'une vérité.23(*)

Pour notre cas, S'agissant de la méthode d'approche, qui est le chemin emprunté pour atteindre un objectif précis, nous allons faire recours à la dogmatique juridique, à la sociologie du droit et à la méthode historique ; nous ferons aussi usage à la technique documentaire.

La dogmatique juridique, vise à exposer l'état du droit tel qu'il existe et à en déterminer le contenu. Il s'agit donc d'établir et d'interpréter une règle juridique, non de l'évaluer ou de la critiquer.24(*) Elle a été choisie parce qu'elle sera utilisée pour arriver à déterminer, le contenu du concept de la responsabilité de protéger à la lumière de la souveraineté étatique.

S'agissant de la sociologie du droit, le droit lui-même étant décrit « soit par un de ses traits formels, soit par un fait social qui l'explique, soit encore par une vision idéale de sa finalité »25(*), la sociologie du droit, quant à elle, a été choisie parce qu'elle permettra de confronter ce principe à la réalité sociale existante. Elle permettra, en effet, d'examiner le contexte politique, qui explique l'émergence de la responsabilité de protéger. Cette approche va conduire à expliquer pourquoi ce principe est d'application au détriment de ses prédécesseurs.

Pour ce qui est de la méthode historique, il s'agit de la méthode employée pour constituer l'histoire ; elle sert à déterminer scientifiquement les faits historiques, puis à les grouper en un système scientifique.26(*) Ainsi cette méthode nous permettra, de décrire l'évolution qui a conduit à l'aboutissement de la responsabilité de protéger, ainsi que sa mise en oeuvre dans la crise ivoirienne.

Ainsi ces méthodes seront accompagnées par la technique documentaire qui nous permettra d'accéder aux différents documents.

0.5. DELIMITATION DU SUJET

Dans la plupart des cas, les conditions de recherche obligent le chercheur, à restreindre son champ d'action et son espace temporel. C'est ainsi que, notre sujet de travail, de par sa formulation même, se délimite géographiquement sur la Côte d'Ivoire.

Quant à ce qui concerne le temps nous allons nous fixer à la période allant de la délivrance du rapport de la CIISE intitulé la responsabilité de protéger ; jusqu'à l'application en Côte d'Ivoire dans la crise poste électorale du concept de la responsabilité de protéger, soit une période allant de 2001 à 2011.

0.6. SUBDIVISION DU TRAVAIL

Hormis l'introduction et la conclusion, il sera donc question d'une part de la responsabilité de protéger en Droit International (chapitre un) qui comprendra deux sections à savoir l'évolution de la responsabilité de protéger (section une) en premier lieu, et en second lieu la valeur ajoutée qu'apporte la responsabilité de protéger en droit international (section deux), et d'autre part nous aborderons la mise en oeuvre de la responsabilité de protéger (chapitre deux) dont nous aborderons aussi en premier lieu les conditions de la mise en oeuvre de la responsabilité de protéger, ses piliers et moments triptyques(section une) et en second lieu nous analyserons l'application de la responsabilité de protéger dans la crise ivoirienne de 2010-2011 (section deux).

CHAPITRE I. RESPONSABILITE DE PROTEGER EN DROIT INTERNATIONAL

Avant d'aborder la question relative à la valeur ajoutée qu'apporte la responsabilité de protéger en droit international (section 2), nousallons tout d'abord aborder la notion de l'évolution du concept de la responsabilité de protéger (section1).

Section 1. EVOLUTION DE LA RESPONSABILITE DE PROTEGER

Dans le cadre de cette section concernant l'évolution de la responsabilité de protéger, nous envisagerons d'une part la source de la responsabilité de protéger (§1), et d'autre part son fondement juridique et ses notions voisines (§2).

§1. SOURCE DE LA RESPONSABILITE DE PROTEGER

Pour ce qui est de la responsabilité de protéger, elle est désormais bien connue : c'est la responsabilité de protéger les civils du génocide, des crimes de guerre, du nettoyage ethnique et des crimes contre l'humanité, qui incombe d'abord à l'Etat sur le territoire duquel les exactions ont lieu et, à titre subsidiaire, si celui-ci ne peut ou ne veut la mettre en oeuvre, à la « communauté internationale » qui peut alors intervenir seulement après une autorisation du Conseil de sécurité sous Chapitre VII pour la version onusienne de 200527(*), alors que la version initiale de 2001 (rapport de la CIISE) considérait le Conseil de sécurité comme une autorité prioritaire mais pas exclusive. Si la question de l'intervention militaire cristallise tous les débats, il faut prendre garde à ne pas y réduire la R2P qui est en réalité beaucoup plus large puisqu'elle inclut non seulement l'intervention le cas échéant mais aussi la prévention et la reconstruction, et que l'usage de la force militaire n'est envisagé qu'en dernier recours. Contrairement à un préjugé répandu, l'idée d'une « responsabilité de protéger » ne date pas du rapport éponyme de la CIISE qui l'a fait connaître en 2001. Elle a plusieurs sources.28(*)

La première, ancienne, est l'idée de souveraineté conditionnelle, déjà théorisée par les juristes de la fin du XIXe siècle. Le principe de non-intervention ne protège que les Etats « réellement dignes de ce nom ». On parle alors d'« intervention pour cause d'abus de souveraineté » ou de « détournement de souveraineté »29(*).

Durant cette période, marquée par la non-intervention coupable au Rwanda en 1994 et l'intervention au Kosovo en 1999, quelques idées préparent à la R2P. notamment la notion de « sécurité humaine », apparue au début des années 90, d'abord définie par le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) comme la somme de sept éléments (sécurité économique, sécurité alimentaire, sécurité sanitaire, sécurité environnementale, sécurité personnelle, sécurité collective et sécurité politique), de façon beaucoup trop large, puis restreinte à la fin de la décennie au coût humain d'un conflit violent30(*).

La deuxième est la redéfinition de la souveraineté comme responsabilité opérée par Francis DENG, alors représentant du Secrétaire général sur les personnes déplacées. Deng affirme notamment que, « pour mériter le nom de gouvernement, un gouvernement doit désormais satisfaire certaines conditions, qui impliquent toutes des limitations de l'usage du pouvoir » ; et que « la communauté internationale » a « l'obligation » de s'en assurer31(*).

La troisième est ce qui est parfois appelé la « doctrine Annan », selon laquelle la souveraineté ne constitue plus un rempart derrière lequel peuvent se commettre toutes les exactions. En 2000, Annan note, d'une part, « qu'aucun principe juridique pas même celui de la souveraineté ne saurait excuser des crimes contre l'humanité » et, d'autre part, qu'« il s'agit au fond d'un problème de responsabilité : en cas de violations massives des droits de l'homme universellement acceptées, nous avons la responsabilité d'agir ». Au tournant du millénaire, il articule clairement la question en montrant les limites du vocable classique de l'intervention humanitaire et l'intérêt d'une reformulation en termes de responsabilité d'agir (R2P)32(*).

La R2P a été avalisée par le Secrétaire général des Nations Unies et bénéficie d'un large soutien auprès des différents groupements de la société civile internationale. En 2006, le Conseil de sécurité y a fait explicitement référence au paragraphe 4 de l'importante résolution 1674 du 28 avril 2006 relative à la protection des populations civiles en période de conflit armé, qui « réaffirme les dispositions des paragraphes 138 et 139 du Document final duSommet mondial de 2005 ». Si, en 2008, la R2P n'est que brièvement mentionnée parmi les principaux thèmes abordés par le Secrétaire général de l'ONU dans son rapport à l'Organisation, en janvier 2009, ce dernier consacrait un rapport développé à la mise en oeuvre du principe. Et, après qu'en juillet 2009, elle lui eut consacré plusieurs jours de débats à l'initiative de son président, l'Assemblée générale des Nations Unies adoptait par consensus, le 14 septembre 2009, sa première résolution en la matière. L'année 2009 a donc été, comme l'a souligné le Secrétaire général, « une année décisive pour la mise en oeuvre de laresponsabilité de protéger ».33(*)

A. La souveraineté nationale et la responsabilité de protéger

L'État est le seul sujet du droit international public possédant une souveraineté. En effet, la souveraineté est une qualité qui est propre à l'État et le caractérise. Elle est aussi la garantie d'une non-ingérence provenant des autres États ou même de l'Organisation des Nations unies. Néanmoins, si la souveraineté signifie le pouvoir de l'État de décider lui-même, sans être soumis à un pouvoir extérieur ou supérieur, elle ne dispense pas l'État de respecter ses engagements ainsi que les règles du droit international.

La souveraineté se trouve ainsi soumise aux limitations que l'État a acceptées par convention et à celles qui résultent des règles du droit international. Parmi ces dernières, nous pouvons évoquer, notamment, le respect des Droits de l'Homme. Avec l'émergence récente du concept de la responsabilité de protéger (b), la souveraineté de l'État (a) est redéfinie en une « souverainetéresponsabilité ». L'État est responsable de protéger sa population. Il ne peut plus commettre des crimes à son encontre et se réfugier derrière laditesouveraineté pour échapper à toute intervention extérieure.

a. La souveraineté de l'État

La souveraineté est désignée, selon le schéma westphalien, l'identité juridique de l'État en droit international. C'est une notion qui introduit ordre, stabilité et prévisibilité dans les relations internationales, en ce sens que les États souverains sont considérés comme étant égaux, indépendamment des différences de taille ou de richesse. Le principe de l'égalité souveraine des États est consacré au paragraphe 1 de l'Article 2 de la Charte des Nations Unies. Au plan interne, la souveraineté signifie la capacité de prendre des décisions contraignantes à l'égard de la population et des ressources qui se trouvent sur le territoire de l'État. Cela étant, de manière générale, l'autorité de l'État est considérée comme étant non pas absolue, mais limitée et réglementée au plan interne par les dispositions constitutionnelles relatives à la séparation des pouvoirs34(*).

L'une des conditions de la souveraineté d'un État quel qu'il soit est l'obligation correspondante de respecter la souveraineté de tous les autres États : la règle de non-intervention est consacrée au paragraphe 7 de l'Article 2 de la Charte des Nations Unies. Un État souverain est habilité en droit international à exercer une compétence exclusive et totale à l'intérieur des frontières de son territoire. Les autres États ont l'obligation correspondante de ne pas intervenir dans les affaires intérieures d'un État souverain. Si cette obligation est violée, l'État victime a en plus le droit de défendre son intégrité territoriale et son indépendance politique. À l'époque de la décolonisation, ce sont les États nouvellement indépendants qui ont réaffirmé de la manière la plus catégorique le principe de l'égalité souveraine des États et son corollaire, la règle de non-intervention35(*).

L'État est une institution humaine dont la finalité est d'assurer à ses citoyens la sécurité et le bien-être de leur personne. Afin de remplir cette fonction, il dispose de certaines prérogatives qui lui permettent d'exercer son hégémonie sur ses citoyens et de s'opposer à toute ingérence étrangère susceptible de compromettre son existence. À cet effet, tout État dispose d'une armée et d'une force de sécurité en vue de protéger la personne et les biens des citoyens. L'État est donc doté d'une puissance irréductible à celle de toute autre entité en son sein. Le pouvoir dont dispose un État est à cet effet le pouvoir suprême, celui qui est au-dessus des autres.36(*)

De ce point de vue, les États sont constitués d'un territoire, d'une population et d'un pouvoir politique. C'est dans l'exercice de ce dernier que relève le principe de souveraineté. Celui-ci peut être considéré comme le critère de l'État en ce sens qu'on ne peut parler d'un État que lorsqu'il est souverain. Le principe de souveraineté confère à ceux qui détiennent le pouvoir de commandement le droit de prendre les décisions pour l'orientation de la politique globale nationale. Il y a ainsi un lien entre les notions de souveraineté, de puissance et de pouvoir.

La souveraineté exprime l'idée d'un pouvoir ou d'une puissance de commander que détient l'État. La souveraineté nationale se traduit en droit international par le droit àl'autodétermination. Encore appelé le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, le droit àl'autodétermination est le principe issu du droit international selon lequel chaque peuple dispose d'unchoix libre et souverain de déterminer la forme de son régime politique, indépendamment de touteinfluence étrangère. Ce principe a été affirmé après la seconde guerre mondiale dans la Charte desNations unies signée à San Francisco le 26 juin 1945 et entrée en vigueur le 24 octobre 1945.

Le point2 de l'article premier inclut parmi les buts des Nations unies celui de « développer entre les nations des relations amicales fondées sur le respect du principe de l'égalité de droits des peuples et de leur droit à disposer d'eux-mêmes»37(*). Ce droit a aussi été consacré par l'article premier du Pacteinternational relatif aux droits civils et politiques du 16 décembre 1966 : « Tous les peuples ont le droit de disposer d'eux-mêmes. En vertu de ce droit, ils déterminent librement leur statut politique et assurent librement leur développement économique, social et culturel»38(*).À partir de ces considérations, on peut dire que ce droit est sous-entendu dans sa mise en oeuvre par certains principes dont celui de l'intégrité territoriale et de l'intangibilité des frontières et le principe de non-ingérence. La résolution 1514 (XV), adoptée le 14 décembre 1960 par l'Assemblée générale des Nations unies stipule que « toute tentative visant à détruire partiellement ou totalement l'uniténationale et l'intégrité territoriale d'un pays est incompatible avec les buts et les principes desNations unies »39(*). Quant au principe de non-ingérence, il est défini dans l'article 2 de la Charte des Nations unies qui précise qu': « Aucune disposition de la présente Charte n'autorise les Nations uniesà intervenir dans les affaires qui relèvent essentiellement de la compétence nationale d'un État»40(*).

Cependant, il y a une autre dimension du droit international qui lie les États à la communauté internationale et autorise un contournement de la règle du droit régissant le principe de non-ingérence.41(*)Ainsi, dans le cas de menace contre la paix ou de non-respect des droits de l'homme, le droit international autorise de façon partielle et contrôlée l'intervention internationale dans les affaires d'un État souverain. Ceci montre les limites de la souveraineté nationale et justifie le principe de la responsabilité de protéger car les États sont liés à la communauté internationale par des traités qu'ils ont librement ratifiés et qui font partie intégrante de leurs lois fondamentales. C'est ainsi qu'on est passé d'une souveraineté nationale à une souveraineté de responsabilité.42(*)

b. Emergence et acceptation de la R2P

L'émergence du concept d'une « responsabilité de protéger » a été discutée à plusieurs reprises ces dernières années. En réaction aux cruelles atrocités et aux massacres de masse en Somalie, au Rwanda, en Bosnie,... au début des années 199043(*), les politologues et les juristes ont commencé à discuter de « l'intervention humanitaire » comme étant une nécessité face à la violence au sein des Etats44(*). Aux Nations Unies, le secrétaire général Boutros GHALI s'est interrogé sur le fait de savoir si les règles existantes au sujet de la souveraineté étaient ou non appropriées pour les défis du monde de l'après-guerre froide. Francis DENG, son adjoint, a discuté du concept de « souveraineté en tant que responsabilité », ajoutant cette perspective à la discussion de plus en plus intense à la fin des années 1990.

C'est au successeur de Boutros GHALI, Kofi ANNAN, qu'est revenue la tâche de faire avancer les discussions pour redéfinir les normes autour de l'intervention. En juin 1998, ANNAN s'est interrogé sur le fait de savoir si « l'ancienne orthodoxie » de la souveraineté empêchait la communauté internationale d'envisager l'intervention dans des conflits internes graves : « La Charte protège la souveraineté des peuples. Elle n'a jamais été conçue comme une autorisation pour les Etats de piétiner les droits de l'homme et la dignité humaine. La souveraineté implique la responsabilité, pas uniquement le pouvoir ».

L'année suivante a vu émerger la crise, la guerre et l'intervention au Kosovo et au Timor oriental. Ces évènements et les réactions confuses et hésitantes venant de toutes parts dans la communauté internationale, ont déterminé ANNAN à revenir à la nécessité d'une norme internationale nouvelle. L'ouverture de l'Assemblée générale étant prévue pour la mi-septembre 1999, ANNAN a décidé que ce forum extrêmement visible serait l'occasion d'un discours majeur sur le sujet. Il avait prévu, selon un proche conseiller, d'utiliser « la chaire de secrétaire général afin de changer le climat au sein du Conseil de sécurité45(*)».

Dans son discours, ANNAN a ouvertement soulevé des questions fondamentales concernant les normes existantes basées sur la souveraineté et la non-intervention.

Il a déclaré que « la souveraineté des Etats, dans son acception la plus basique, est redéfinie par les forces de la globalisation et de la coopération internationale... l'Etat est actuellement largement conçu comme étant au service de son peuple et non vice versa ». Faisant référence aux précédents du Rwanda, du Kosovo et du Timor oriental, ANNAN a déclaré que chacun avait démontré soit « les conséquences de l'inaction face au crime de masse », soit « les conséquences de l'action en l'absence d'une unité totale du côté de la communauté internationale ». En réponse à cette situation, ANNAN a proposé de « développer une norme internationale en faveur de l'intervention afin de protéger les civils du massacre en masse»46(*). Un an plus tard, lors du Sommet du Millénaire des Nations Unies, tenu en septembre 2000, Annan a une nouvelle fois défié les membres des Nations Unies à relever la question de l'intervention.

Le gouvernement canadien a répondu au défi lancé par Annan en constituant une Commission internationale de l'intervention et de la souveraineté des états (CIISE) afin de préparer des recommandations qui traiteraient le dilemme sur la protection des civils contre le massacre dans un système d'Etats souverains47(*).

Dirigée par Gareth EVANS et Mohamed SAHNOUN, la CIISE a présenté, l'année suivante, un rapport qui tentait de changer la dynamique du débat en recadrant la question non comme un droit d'intervenir, mais comme la « responsabilité de protéger » les individus en danger. La CIISE a brièvement exposé les fondements juridiques et éthiques de la R2P, établissant ainsi que chaque Etat a la responsabilité première ; la responsabilité n'incombe à la communauté internationale que lorsqu'un Etat ne peut ou ne veut protéger ses citoyens. La Commission a identifié trois composantes de la responsabilité de protéger : la prévention, la réaction et la reconstruction48(*).

La responsabilité de réagir, la composante la plus controversée qui, dans des cas extrêmes, impliquerait l'emploi de la force sans l'accord de l'Etat cible, a été définie et limitée par des « critères décisifs » et des « principes de précaution ». Ceux-ci visaient à éviter que des Etats ne détournent le principe de la R2P pour permettre une intervention intéressée et à servir de « déclencheur » pour débuter le processus de réaction lorsque le seuil est dépassé.

Tout en consacrant l'autorité première du Conseil de sécurité pour invoquer la responsabilité de protéger, la CIISE a laissé la possibilité ouverte pour le cas où le Conseil ne voudrait ou ne pourrait pas agir : ce sont alors les organisations régionales ou les coalitions entre des Etats volontaires qui pourront fournir une protection aux populations menacées49(*).

Par un accident de l'histoire, le rapport de la CIISE a été publié peu de temps après les attaques du 11 septembre 2001, dont les conséquences ont totalement éclipsé tant le rapport que ses conclusions. Toutefois, la réactivation de la norme de la R2P a été le fait d'ANNAN qui, à la fin de l'année 2003, a constitué un groupe de personnalités de haut niveau sur les menaces, les défis et le changement. EVANS a été nommé membre du groupe et le rapport qu'il a présenté en décembre 2004 mobilisait le langage et les recommandations de la CIISE sur la réaction devant la violence et l'atrocité de masse. ANNAN a par la suite utilisé les recommandations du groupe pour réaffirmer l'importance qu'il y a à adopter la nouvelle norme de la responsabilité de protéger dans son rapport Une liberté plus grande, publié en mars 2005 comme document-cadre pour le Sommet mondial qui allait avoir lieu en septembre50(*).

Ce duo complexe entre ANNAN et les groupes « extérieurs » a donné une forte impulsion à l'adoption de la R2P et ils furent récompensés par l'inclusion de trois paragraphes approuvant la nouvelle norme dans le document final du Sommet51(*)/

Cette acceptation a pourtant été accompagnée par de considérables modifications des propositions de la CIISE. Aucun critère décisif n'a été inclus, les principes de précaution n'ont pas été discutés et la réforme proposée du Conseil de sécurité afin de lui permettre de répondre plus efficacement aux crises humanitaires a été omise.

Néanmoins, les promoteurs de la R2P ont célébré l'adoption du document final comme étant un tournant qui comble un « vide normatif capital » et « le passage de la norme ferme de non-intervention à la nouvelle norme de la responsabilité de protéger s'est produit52(*) ».

B. Les phases d'adoption onusienne de la responsabilité de protéger53(*)

C'est à Kofi ANNAN, véritable bâtisseur de normes, que l'on doit la survie de la « responsabilité de protéger » au sein des instances onusiennes. Ce dernier permet en effet au concept de suivre son chemin en créant d'autres rapports qui reprennent la terminologie de celui de la CIISE

a. Première phase : vers la concrétisation du concept de la responsabilité de protéger

La première étape de la réflexion onusienne comprend deux rapports : le premier, réalisé en décembre 2004, a été marqué par la mise en place, par le Secrétaire général de l'ONU, d'un Groupe de personnalités de haut niveau sur les menaces, les défis et le changement. Ce Groupe a élaboré un rapport intitulé : « Un monde plus sûr : notre affaire à tous ». Sur le fond, ce rapport reprend quasiment les mêmes grandes lignes de celui de la CIISE, tels que la définition des termes du débat, le respect du principe de souveraineté, ainsi que les critères d'intervention militaire à des fins de protection humaine54(*).

En décembre 2004, le rapport du Groupe a été soumis à l'Assemblée générale par Kofi ANNAN qui s'est exprimé en ces termes : « L'histoire nous apprend que tous les Etats ne sont pas nécessairement toujours aptes ou disposés à assumer l'obligation qu'ils ont de protéger leurs populations et de s'abstenir de nuire à leurs voisins. Aussi faudrait-il, par le jeu du principe de la sécurité collective, confier une partie de ces obligations à la Communauté internationale qui, agissant conformément à la Charte des Nations Unies et à la Déclaration universelles des droits de l'homme, aiderait à mettre en place les moyens requis ou assurerait la protection nécessaire, selon le cas »55(*).

Le rapport du Groupe écarte toute notion de droit d'ingérence, en précisant qu'« il est de plus en plus admis qu'il s'agit non pas du droit d'ingérence d'un Etat quelconque, mais de l'obligation de protection de chaque Etat.. »56(*)

Le Groupe souligne également que les Etats signataires de la Charte de l'ONU jouissent des privilèges de la souveraineté, mais qu'ils en acceptent aussi les obligations. Cela implique que les Etats ont l'obligation d'assurer le bien-être de leurs populations et d'honorer leurs obligations vis-à-vis de la Communauté internationale. Pour ces Etats, à défaut de répondre à cette obligation, ou dans le cas où leurs responsables suscitent ou tolèrent de tels crimes, la Communauté internationale doit prendre les mesures nécessaires pour y mettre un terme et protéger les populations menacées, y compris le recours à la force armée, qui était une mesure possible, si nécessaire, et de dernier ressort. Dans cette optique, le rapport envisageait la notion de responsabilité de protéger comme « une nouvelle norme prescrivant une obligationcollective internationale de protection »57(*).

Le rapport envisage de mettre en oeuvre la « responsabilité de protéger », et recommande des critères de base pour déterminer le moment où la Communauté internationale emploie la force, et souligne que cette intervention doit être de dernier ressort et respecter la proportionnalité.

Le Conseil de Sécurité est considéré comme l'organe de l'ONU le mieux à même d'organiser des actions efficaces et d'intervenir promptement en présence de nouvelles menaces.

Le second rapport, effectué en 2005, est intitulé « Dans une liberté plus grande ». Ce texte, qui remet à l'honneur la notion de sécurité, relie ce dernier terme à ceux de développement et de droit de l'homme, tout en soulignant qu'il n'y a pas de véritable sécurité si les droits de l'homme ne sont pas respectés, le respect des droits de l'homme étant un gage de stabilité et de développement. L'attention est également portée sur la consolidation de la paix, passant de la fin d'un conflit à une paix substantielle.

Selon le rapport, lorsqu'un Etat n'est pas en mesure de protéger sa population contre les crimes, la Communauté internationale a la responsabilité de protéger les populations menacées par ces crimes, et doit d'abord recourir à des moyens diplomatiques, humanitaires ou à d'autres, plus appropriés58(*).

b. Deuxième phase : réalisation du concept de la responsabilité de protéger

La responsabilité de protéger, se concrétise politiquement lors du Sommet mondial de 2005. Au cours de la réunion plénière de Haut niveau de la soixantième session de l'Assemblée générale, les Nations Unies ont approuvé le rapport de la CIISE, comme en font foi les paragraphes 138 et 139 du Document final duSommet mondial de 2005, sous le titre de : « Devoir de protéger des populations contre legénocide, les crimes de guerre, les crimes contre l'humanité et le nettoyage ethnique ». Le document précise dans le § 138 : « C'est à chaque Etat qu'il incombe de protéger les populations du génocide, des crimes de guerre, du nettoyage ethnique et des crimes contre l'humanité.

Ce devoir comporte la prévention de ces crimes, y compris l'incitation à les commettre, par les moyens nécessaires et appropriés. Nous acceptons cette responsabilité et agirons de manière à nous y conformer. La Communauté internationale devrait, si nécessaire, encourager et aider les Etats à s'acquitter de cette responsabilité et aider l'Organisation des Nations Unies à mettre en place un dispositif d'alerte rapide ». Il ajoute dans le § 139 : « Il incombe à la Communauté internationale, dans le cadre de l'Organisation des Nations Unies, de mettre en oeuvre les moyens diplomatiques, humanitaires et autres moyens appropriés, conformément aux Chapitre VI et VIII de la Charte des Nations Unies, afin d'aider à protéger les populations du génocide, des crimes de guerre, du nettoyage ethnique et des crimes contre l'humanité...»59(*).

Ce texte de deux articles, en affirmant la responsabilité de l'Etat territorialement compétent, rappelle à chaque Organisation internationale et à la Communauté internationale dans son ensemble, leurs obligations en matière de protection, de prévention et de répression des crimes de génocides, de guerre, de nettoyage ethnique et contre l'humanité.

A cet égard, l'engagement des Etats de l'Assemblée générale des Nations Unies à l'occasion du Sommet mondial, a non seulement protéger les populations du génocide, des crimes de guerre, du nettoyage ethnique et des crimes contre l'humanité », mais également à mener en temps voulu une action collective résolue, par l'entremise du Conseil de Sécurité lorsque les autorités nationales n'assurent manifestement pas la protection de leurs populations60(*).

En vertu de ces deux paragraphes, le champ matériel d'application de la responsabilité de protéger a été fixé à quatre sortes de crimes : le génocide, le crime de guerre, le crime contre l'humanité et le nettoyage ethnique. Ainsi, la responsabilité de protéger s'inscrit dans la confirmation du contenu des incriminations déjà sanctionnées par le droit international.

Partant de ce fondement, le Document final envisage exclusivement des interventions humanitaires autorisées par le Conseil de Sécurité, en vertu du Chapitre VII de la Charte de l'ONU, lorsque les moyens pacifiques se révèlent insuffisants et que les autorités nationales manquent manifestement d'assurer la protection de leurs populations.

Ce document mondial n'indique pas la démarche à suivre en cas d'imminence de ces menaces, mais il évoque la mise en place d'un système d'alerte rapide.

Cet engagement des Etats, visant à assumer la responsabilité de protéger la population civile contre les crimes précités, a été renforcé par la résolution 1674 (2006)61(*) relative à la protection des civils en période de conflits armés, particulièrement des femmes et des enfants, ainsi la responsabilité d'accompagnement de la Communauté internationale.Cette résolution, pour la première fois, fait référence officiellement à la « responsabilité de protéger », en fixant le cadre normatif de l'action du Conseil de Sécurité sur la protection des civils dans les conflits armés. Ainsi, elle réaffirme les dispositions des paragraphes 138 et 139 du Document final du Sommet mondial de 2005 relatif à la « responsabilité de protéger » les populations du génocide, des crimes de guerre, de la purification ethnique et des crimes contre l'humanité.

Dans ce contexte, la résolution souligne l'obligation des Etats à respecter le DIH, notamment les règlements de la Haye de 1899 et 1907, les Conventions de Genève de 1949 et leurs Protocoles additionnels I et II de 1977. Elle les appelle également à ratifier les instruments internationaux relatifs au DIH, aux DIDH et droit des réfugiés.

La résolution 1674 condamne tout acte de violence et tout abus contre les populations civiles dans les conflits armés, en particulier, la torture et autres traitements prohibés, la violence sexuelle à l'encontre des femmes et des enfants, le recrutement d'enfants soldats, le déni délibéré d'aide humanitaire et les déplacements forcés.

En revanche, cette résolution n'a pas de force juridique particulière, ne faisant que rappeler l'arsenal juridique existant, et renvoie, en fait, à la construction désormais classique qui veut que le manquement en question soit constitutif d'une atteinte à la paix ou d'une menace contre la paix.

Se basant sur le Document final du Sommet mondial de 2005, en particulier ses paragraphes 138 et 139, l'Assemblée générale de l'ONU devait poursuivre son examen de la « responsabilité de protéger »62(*).

c. Troisième phase : prolongements sur la stratégie de la mise en oeuvre de la responsabilité de protéger

Le 12 janvier 2009, le Secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-Moon, a remis son premier rapportà l'Assemblée générale intitulé : « La mise en oeuvre de la responsabilitéde protéger ». La stratégie décrite dans ce rapport a été discutée lors d'un vif débat de trois jours, les 23, 24 et 25 juillet 2009.

Conformément aux paragraphes 138, 139 et 140 du Document final du Sommet mondial de 2005, le rapport détaille le mandat de l'ONU et son contexte historique, juridique et politique (section I de ce rapport), en mettant l'accent sur la valeur de la prévention, et en cas d'échec, d'une réaction adaptée aux circonstances précises de chaque cas.

Le 7 octobre de la même année, l'Assemblée générale a adopté, par consensus, sa première résolution 63/308 sur la « responsabilité de protéger », prenant note du rapport de Secrétaire général. La formule « responsabilité de protéger » en devient l'expression dans la langue onusienne. Elle va engager un débat sur la notion, ouvert à tous les Etats, qui se poursuit, notamment après chaque rapport rendu par le Secrétaire général de l'ONU.

Le 14 juillet 2010, le Secrétaire général a remis à l'Assemblée générale un deuxième rapport intitulé « Alerte rapide, évaluation, responsabilité de protéger ». Ce rapport propose dessolutions appropriées pour intervenir rapidement, de manière adaptée et équilibrée, en cas derisque de génocide, de crime contre l'humanité, de crime de guerre et de nettoyage ethnique. Dans un troisième rapport, en juin 2011, le Secrétaire général aborde « Le rôle des accordsrégionaux et sous régionaux dans la mise en oeuvre de la responsabilité de protéger ». Desmesures sont proposées pour permettre à l'ONU de renforcer sa collaboration et d'exploiterles informations et les analyses des organismes régionaux et sous- régionaux, afin de repérerles signes de risque et d'engager à temps une action préventive efficace aux niveaux sous régionalet mondial.

Dans son rapport suivant, intitulé « Responsabilité de protéger : réagir de manière prompte et décisive », présenté le 25 juillet 2012, en plein débat sur le conflit syrien, le Secrétairegénéral examine l'idée d'une « réponse rapide et décisive », dès lors qu'un Etat ne réussit pasà protéger sa population contre le génocide, les crimes de guerre, le nettoyage ethnique et lescrimes contre l'humanité , prenant en compte tous les moyens figurant aux Chapitres VI, VIIet VIII de la Charte, adaptés aux circonstances de chaque situation, et étroitement liés à laprévention et à la réaction.

Au vu des développements récents, la notion de « responsabilité de protéger » reste vivante au sein de l'ONU. Le Secrétaire général ajoute dans son dernier rapport de 2014 des propositions permettant d'affermir le consensus mondial sur la « responsabilité de protéger », demandant de mettre l'accent sur les crimes internationaux au sens strict qu'il qualifie d'« atrocités criminelles » qui renvoient aux crimes mentionnés dans le Documentfinal de 2005. Pour lutter contre ces menaces de crime, il recommande des mesures de prévention soutenues par la Communauté internationale. Parmi ces mesures préventives, figure la mobilisation des organisations de la société civile au service de la réconciliation et de la reconstruction.De plus, le rapport indique qu'il est indispensable d'encourager une collaboration plus large et plus efficace entre organismes régionaux et mondiaux pour mettre en oeuvre la responsabilité de protéger63(*).

§2. L'INTERVENTION AUX FINS DE LA PROTECTION DE LA PERSONNE HUMAINE ET FONDEMENT DE LA R2P

A. L'intervention aux fins de la protection humanitaire

Les droits de l'homme sont l'expression directe de la dignité de la personne humaine.

L'obligation pour les Etats d'en assurer le respect découle de la reconnaissance même de cette dignité que proclament déjà la Charte des Nations Unies et la Déclaration universelle des droits de l'homme. Cette obligation internationale est, selon une formule utilisée par la Cour internationale de Justice, une obligation ergaomnes; elle incombe à tout Etat vis-à-vis de la communauté internationale dans son ensemble, et tout Etat a un intérêt juridique à la protection des droits de l'homme. Cette obligation implique au surplus un devoir de solidarité entre tous les Etats en vue d'assurer le plus rapidement possible une protection universelle et efficace des droits de l'homme64(*).

a. Objectif de l'intervention

Toute nouvelle conception de l'intervention motivée par un souci de protection humaine doit viser au moins quatre objectifs fondamentaux :

Ø Établir des règles, des procédures et des critères qui permettent de déterminer clairement s'il faut intervenir et quand et comment il faut le faire;

Ø Asseoir la légitimité de l'intervention militaire lorsque celle-ci est nécessaire et que toutes les autres démarches ont échoué;

Ø Veiller à ce que l'intervention militaire, lorsqu'elle a lieu, soit menée aux seules fins prévues, soit efficace et accorde toute l'attention voulue à la nécessité de réduire autant que faire se peut les coûts humains et les dommages institutionnels qui en résultent; et

Ø Contribuer à éliminer, si possible, les causes du conflit tout en améliorant les perspectives d'une paix durable.65(*)

Aux termes de l'article 4 de la résolution de l'institut de droit international, toute mesure, individuelle ou collective, destinée à assurer la protection des droits del'homme, répondra aux conditions suivantes : sauf en cas d'extrême urgence, l'Etat auteur de la violation aura été mis en demeure de la faire cesser ; la mesure sera proportionnée à la gravité de la violation ; elle sera limitée à l'Etat auteur de la violation ; l'Etat qui y recourt tiendra compte des intérêts des particuliers et des Etats tiers, ainsi que de l'incidence de la mesure sur le niveau de vie des populations concernées.66(*)

b. Intervention humanitaire et ingérence humanitaire face à la souveraineté étatique

Le Droit international humanitaire et le Droit international de droits de l'homme se développent dans le cadre d'une société internationale dans laquelle l'Etat est souverain et où l'ingérence dans les affaires intérieures des Etats est en principe impossible car interdite. L'article 2 paragraphes 7 de la Charte des Nations Unies pose le principe de non-ingérence dans les affaires intérieures d'un Etat ; néanmoins ce principe ne porte toutefois pas atteinte à l'application des mesures coercitives prévues au chapitre VII de la même charte, qui donne le pouvoir au Conseil de sécurité de recourir à la force dans le cadre du maintien de la paix et de la sécurité internationale67(*).

La notion de l'intervention d'humanité et de l'intervention humanitaire ne doivent pas être confondu ; en effet, la confusion vient de ce que l'intervention d'humanité, plus ancienne que l'intervention humanitaire a été traduite dans la langue anglaise par « humanitarian intervention » qui correspondait en réalité, à la traduction française d'« intervention humanitaire ». Cette lacune de la langue anglaise a envahi la plupart des auteurs qui s'intéressent à l'intervention. Si l'intervention d'humanité désigne « l'action exercée par un État sur un gouvernement étranger dans le but de faire cesser les traitements contraires aux lois de l'humanité qu'il inflige à des particuliers, fussent-ils ses propres nationaux », l'intervention humanitaire quant à elle, est au sens strict, une intervention « de soutien logistique et militaire pour assurer la sécurité des convois ou d'aide humanitaire organisée en général par des ONG ou des organisations internationales (lesquelles feront alors de l'assistancehumanitaire)68(*) ; aux termes de le résolution de l'institut de droit international, « assistance humanitaire » désigne l'ensemble des actes, activités etmoyens humains et matériels relatifs à la fourniture de biens et de services d'ordre exclusivement humanitaire, indispensables à la survie et à la satisfaction des besoins essentiels des victimes de catastrophes69(*).

M. Bettati explique que le droit d'ingérence « est dépourvu de contenu juridique et n'en acquiert un que s'il est associé à l'adjectif humanitaire. Ce dernier, par la finalité qu'il assigne à l'intervention, la prive de l'illicéité dont elle est universellement entachée ». L'idée de droit d'ingérence est généralement invoquée lorsqu'on évoque l'assistance aux victimes conditionnées par la possibilité d'y avoir accès. Le droit suppose un cadre juridique défini de l'ingérence. Dans cette conception, le droit international aménage les hypothèses et modalités d'intervention. Sans que le terme d'ingérence y ait été retenu, la Charte des Nations Unies constitue une forme d'encadrement des interventions internationales.

Quant à la notion de devoir, elle s'attache à l'obligation de faire respecter les droits fondamentaux de la personne humaine : droit à la vie et droit à la santé. Elle repose sur l'idée d'un village mondial et sur la primauté des droits de l'homme. Sous cet angle, le devoir d'ingérence, en raison des considérations humanitaires, et morales, justifie de s'affranchir des règles de droit. Il traduit l'orientation morale humanitaire. Il est conçu comme plus contraignant et désigne l'obligation morale faite à un État de fournir son assistance en cas d'urgencehumanitaire70(*).

Il existe ainsi une sorte de contradiction entre la souveraineté de l'Etat, la non-ingérence et l'idée d'une communauté internationale garante des droits de l'homme. Cette contradiction est plus forte face à la multiplication des conflits internes ou des situations internes de la violation des droits de l'homme. En effet, l'ONU à travers ses résolutions ménage la souveraineté des Etats et accorde à ceux-ci un rôle premier dans le secours et la coordination d'aide aux victimes ; on fonderait difficilement un droit d'ingérence sur les résolutions de l'ONU71(*).

L'intervention d'humanité et les interventions humanitaires ont parfois justifie un droit ou un devoir d'ingérence humanitaire. Le prétendu droit d'ingérence humanitaire prend ses racines dans l'idéologie des droits de l'homme ; toutefois, le fondement de la règle d'assistance humanitaire est beaucoup plus précisément et plus concrètement le droit à la vie énoncé à l'article 3 de la Déclaration universelle des droits de l'homme,72(*) l'article 6 du pacte des droits civils et politiques73(*) et l'article 12 du pacte des droits économiques et sociaux74(*). Ainsi, là où, auparavant, le droit international reposait essentiellement sur la volonté des Etats et où il ne pouvait y avoir intervention dans les affaires intérieures d'un Etat sans son accord, actuellement différents facteurs, dont le développement des droits de l'homme et du droit international humanitaire, ont tempéré cet exclusivisme et permis la protection des individus75(*).

1. L'assistance humanitaire, une obligation des Etats dans leurensemble

Il existe, de manière générale, une obligation pour chaque Etat deréagir à des violations des droits fondamentaux de la personne.Le préambule de la Charte des Nations Unies et l'article 1er de cemême instrument constituent la base juridique de cette obligation, y compris l'article 55 paragraphe c qui dispose que «En vue de créer les conditions de stabilité et de bien-être nécessaires pour assurer entre les nations des relations pacifiques et amicales fondées sur le respect du principe de l'égalité des droitsdes peuples et de leur droit à disposer d'eux-mêmes, les Nations Unies favoriseront le respect universel et effectif des droits de l'homme et des libertés fondamentales pourtous, sans distinction de race, de sexe, de langue ou de religion.» et l'article 56 dispose aussi que les Membres s'engagent, en vue d'atteindre les buts énoncés à l'article 55, à agir, tantconjointement que séparément, en coopération avec l'Organisation.

Le non-respect du droit international humanitaire et des droits de l'homme est déplorable et nous concerne tous [...] l'article 1 commun aux Conventions de Genève suppose clairement que toutes les Parties contractantes, « s'engagent à respecter et à faire respecter » les conventions « en toutes circonstances ». Ainsi, nous avons tous l'obligation non seulement de respecter, mais également de veiller à ce que les parties au conflit respectent leurs obligations humanitaires76(*).

2. L'assistance humanitaire, une obligation de l 'Etat territorial

L'obligation de réaction pèse en premier lieu à charge de l 'Etat sur le territoire duquel se trouve une population "en détresse". Idéalement, cet Etat devra fournir directement l'assistance nécessaire à toutes les personnes qui se trouvent sous son contrôle.

la résolution 59/141 sur le renforcement de la coordination de l'aide humanitaire d'urgence, fournie par l'Organisation des Nations Unies, qui affirme la responsabilité principale qui incombe aux États à l'égard des victimes des situations d'urgence humanitaire à l'intérieur de leurs frontières, ... en analysant cette résolution, elle appelle les Etats à prendre leur responsabilité sur la question de la protection de la personne humaine ce qui constitue une responsabilité de l'Etat sur la protection et l'assistance de la population se trouvant dans son territoire..77(*)

La responsabilité de l'État en matière de violations des droits de l'homme et du droit international humanitaire est depuis longtemps un des fondements du droit international78(*). Cette responsabilité découle du principe pactasuntservanda79(*), qui veut que tout traité en vigueur lie les parties et doive être exécuté par elles de bonne foi.

À cet égard, il convient de rappeler qu'en cas de conflit armé, un État est responsable des violations du droit international des droits de l'homme et du droit international humanitaire qui lui sont imputables, telles que:

Ø Les violations commises par les organes de cet État, y compris sesforces armées;

Ø Les violations commises par des personnes physiques ou morales habilitéesà exercer des prérogatives de la puissance publique;

Ø Les violations commises par des personnes ou des groupes agissanten fait sur les instructions ou les directives ou sous le contrôle de cetÉtat;

Les violations commises par des personnes ou des groupes privés qu'il reconnaît et adopte comme son propre comportement. Un État peut également être responsable d'un manque de diligence s'il a omis de prévenir ou de sanctionner des violations du droit international des droits de l'homme et du droit international humanitaire commises par des acteurs privés.80(*)

Dans l'affaire Bosnie-Herzégovine c. Serbie-et-Monténégro, la Cour internationale de Justice a conclu que la Serbie avait violé ses obligations de prévenir les actes de génocide et de poursuivre leurs auteurs. La Cour a statué que la Serbie devait «immédiatement prendre des mesures efficaces pour s'acquitter pleinement de l'obligation qui lui incombe, en vertu de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide [...], de transférer au Tribunal pénal pour l'ex-Yougoslavie les personnes accusées de génocide ou d'autres actes prohibés par la Convention et de coopérer pleinement avec ledit Tribunal»81(*).

B. Les faibles fondements juridiques de la responsabilité de protéger

De l'absence d'un ordre juridique supra-étatique en mesure de légiférer de manière à contraindre les États, ainsi que du principe fondamental de l'égalité souveraine de ces derniers découle que c'est essentiellement la volonté individuelle des États qui peut faire en sorte que ceux-ci puissent être contraints par une règle de droit international. Le caractère sacro-saint de cette égalité souveraine établit également l'interdiction de l'usage de la force contre un autre État et l'intervention dans les affaires internes de celui-ci (pierre angulaire de la Charte des Nations unies : voir ses articles 2 point 4 et 7), principe qui ne souffre que deux exceptions que sont le droit à la légitime défense et le rétablissement de la paix ou de la sécurité internationale82(*). Ce principe a d'ailleurs été réaffirmé à moult reprises et notamment dans la résolution 2625 de l'Assemblée générale des Nations unies, réputée représenter l'Etat des « principes généraux du droit international » et qui répète que « les États doivent s'abstenir de recourir à la menace ou à l'emploi de la force » et qui interdit aux États « d'intervenir dans les affaires de la compétence nationale d'un État »83(*).

Or, sans entrer dans tous les détails de la création des règles de droit international, les fondements juridiques aujourd'hui invoqués par les tenants de la responsabilité de protéger sont beaucoup plus faibles que ces principes fondamentaux. La principale source juridique de ce principe est un document adopté par l'Assemblée générale de l'ONU lors du Sommet mondial de 2005, ensuite nous avons la résolution 63/308 du 14 septembre 2009 dans laquelle l'assemblée générale de l'ONU rappelle les paragraphes 138 et 139 du document final du sommet mondial de 2005, prend acte du rapport du secrétaire général ainsi que du débat opportun et productif sur la responsabilité de protéger, et décide de continuer l'examen de la question de la responsabilité de protéger84(*).

Selon ce document, qui a la même valeur normative qu'une résolution de l'Assemblée générale, ainsi que certains rapports d'experts qui ont suivi, la souveraineté donnerait au gouvernement des pouvoirs sur son territoire, mais aussi des obligations, dont celle de protéger sa population contre le génocide, les crimes de guerre et les crimes contre l'humanité. Dans les cas où cette protection ne serait pas assurée, cette responsabilité incomberait à la communauté internationale qui pourrait dès lors intervenir afin de se porter au secours de la population menacée. Il convient à cet endroit de rappeler que lors de la rédaction de la Charte de l'ONU, en 1945, la possibilité d'intervention pour défendre les droits humains avait été discutée, mais rejetée au vu des risques qu'elle pouvait représenter pour la stabilité internationale, et en particulier pour les États les plus faibles.

Bien que la R2P ne soit pas, en soi, un cadre juridiquement contraignant, en tant que principe, la R2P est fondée sur le droit international existant. Les responsabilités des États face au crime de génocide sont énumérées dans la Convention sur le génocide qui tient les États pour responsables de la prévention et de la répression du crime de génocide. Les obligations des États de « respecter et de faire respecter » le droit international humanitaire et leurs responsabilités en vertu du DIH sont énumérées dans les Conventions de Genève et leurs protocoles additionnels. Ces obligations ont un rapport direct avec les responsabilités en matière de crimes de guerre aux termes de la R2P. Bien qu'il s'agisse de crimes internationaux bien reconnus et définis en détail dans le Statut de Rome de la Cour pénale internationale, les crimes contre l'humanité n'ont pas leur propre convention ou traité où sont définies les responsabilités des États en matière de crimes contre l'humanité, malgré le fait que des éléments du crime, comme la torture et l'esclavage, possèdent leurs propres conventions85(*).

En fait, si l'on excepte le crime de génocide pour lequel il existe un fondement juridique clair dans la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide86(*) qui pourrait permettre voire obliger une intervention, il appert que les fondements juridiques de la Responsabilité de protéger sont fortement contestables, sinon complètement contraires aux principes généraux du droit international généralement reconnus.87(*)

Section II. VALEUR AJOUTEE QU'APPORTE LA RESPONSABILITE DE PROTEGER EN DROIT INTERNATIONAL

Avant d'aborder la question sur l'émergence de l'individu entant que sujet du droit international bénéficiant de la plénitude de la protection envisagée par la responsabilité de protéger (§2), nous allons d'abord aborder la question de la souveraineté entant que responsabilité de protéger l'individu qui constitue une valeur ajoutée qu'apporte la responsabilité de protéger (§1).

§1. VALEUR AJOUTEE : SOUVERAINETE ENTANT QUE RESPONSABILITE DE PROTEGER L'INDIVIDU

A. La souveraineté responsable

L'idée maîtresse qui sous-tend la responsabilité de protéger est que la souveraineté, attribut de l'Etat, si elle est toujours assortie d'un ensemble de droits, comporte des devoirs dont celui, fondamental, de la protection due à sa population contre les crimes internationalement consacrés.

La responsabilité de protéger traduit donc une évolution notable du concept de souveraineté à l'aube du XXIème siècle, que les chefs d'Etat et de gouvernement réunis en 2005 ont solennellement acceptés.

La Charte des Nations Unies est elle-même un exemple d'obligation internationale que les États Membres assument volontairement. D'une part, en accordant à l'État signataire le statut de Membre de l'ONU, la communauté internationale accueille cet État en tant que membre responsable de la communauté des nations. D'autre part, l'État lui-même, en signant la Charte, accepte les responsabilités qui découlent de sa signature. Il ne s'agit pas d'un transfert ou d'une dilution de la souveraineté de l'État. Mais il s'agit par contre d'une redéfinition nécessaire : on passe d'une souveraineté de contrôle à une souveraineté deresponsabilité, pour ce qui est tant des fonctions internes que des responsabilités externes.

Cette conception de la souveraineté comme responsabilité, qui est de plus en plus reconnue dans la pratique étatique, est importante à trois égards. En premier lieu, elle implique que les autorités étatiques sont responsables desfonctions qui permettent de protéger la sécurité et la vie des citoyens et de favoriser leur bien-être. En deuxième lieu, elle donne à penser que les autorités politiques nationales sont responsables à l'égard des citoyens au plan interne et de la communauté internationale par l'intermédiaire de l'ONU.

En troisième lieu, elle signifie que les agents de l'État sont responsables de leurs actes, c'est-à-dire qu'ils doivent rendre des comptes pour ce qu'ils font ou ne font pas. L'argument en faveur de cette redéfinition théorique de la souveraineté est renforcé par l'impact sans cesse grandissant des normes internationales relatives aux droits de l'homme, et la prégnance toujours plus grande de la notion de sécurité humaine dans le discours international.

Le concept de responsabilité de protéger entend apporter un début de réponse en considérant la souveraineté comme étant une responsabilité. Dans ce sens, la souveraineté de l'État n'est pas affaiblie mais au contraire, renforcée puisque ce dernier est reconnu comme premier responsable de la protection de sa population. De cette manière, la responsabilité de protéger permet de faire évoluer le débat relatif à l'action onusienne en cas de crise en réconciliant le respect de la souveraineté et l'action humanitaire sous couvert de l'ONU, et en démontrant ainsi qu'ils ne sont pas incompatibles. Par ailleurs, le concept de la CIISE pousse les États à agir collectivement et à recueillir un large consensus, incluant les organisations régionales du lieu de l'action et les États voisins, définissant ainsi le cadre de l'action humanitaire autorisée par le Conseil de sécurité.

Comme l'ont affirmé très clairement les chefs d'État et de gouvernement alors réunis, la responsabilité de protéger est l'alliée, et non l'adversaire, de la souveraineté. Elle découle du concept positif et affirmatif de la souveraineté en tant que responsabilité, et non de l'idée plus étroite d'intervention humanitaire. En aidant les États à s'acquitter de leurs obligations fondamentales en matière de protection, la responsabilité de protéger vise à renforcer, et non à affaiblir, la souveraineté. Son but est d'aider les États à y parvenir, et pas seulement de réagir en cas d'échec88(*).

La préface du professeur Olivier Corten et le professeur Rahim Kherad dans l'ouvrage du professeur Nabil Hajjami sur la responsabilité de protéger, ils montrent leur position sur la valeur juridique ajoutée sur la responsabilité de protéger : « tout d'abord, comme certains commentateurs l'avaient fait avant lui, il montre que les discours célébrant la « R2P » comme une nouveauté, voire un bouleversement, du droit international, ne reflètent certainement pas la position de la communauté internationale des États dans son ensemble. Juridiquement, le concept ne présente qu'une valeur ajoutée extrêmement faible, tenant à la codification des compétences du Conseil de sécurité en matière humanitaire et, plus fondamentalement, d'une conception équilibrée du concept de souveraineté.89(*)»

Départ nos analyses sur la valeur ajoutée de la responsabilité de protéger, nous concluons que ce concept ne constitue pas une nouvelle norme de droit internationale.

D'une part, elle n'assouplit pas l'article 2, §4 et n'autorise donc pas une intervention humanitaire unilatérale en cas de blocage du Conseil de sécurité. D'autre part, la responsabilité de protéger ne crée pas, non plus, des nouvelles obligations. En effet, elle ne fait que rappeler aux États le droit conventionnel et coutumier existant, c'est ce qu'affirment aussi Jean D'ASPREMONT et Jérôme DE HEMPTINNE que «si la responsabilité de protéger est simplement compris comme un mécanisme d'internationalisation de l'assistance humanitaire afin que celle-ci ne relève plus des affaires intérieurs de l'Etat, ce concept n'apporte rien de nouveau par rapport au droit positif »90(*). Quant au Conseil de sécurité, il bénéficie d'une responsabilité discrétionnaire, dont il peut faire usage quand bon lui semble. La responsabilité de protéger réitère donc ce que l'on savait déjà : le Conseil de sécurité lui seul peutautoriser une intervention militaire, s'il qualifie une catastrophe humanitaire de menace contre la paix et la sécurité internationales, en application du Chapitre VII. Partant de l'étude des positions des États, nous insistons sur deux remarques. Tout d'abord, les États se sont massivement prononcés en faveur du respect de la Charte des Nations Unies et contre l'unilatéralisme. Ils restent donc très attachés au principe de non intervention.

B. En matière de la protection des droits de l'homme

Depuis la fin des années 1990, nombre de textes internationaux consacrent la sécurité des populations comme un droit de l'Homme et affirment que la protection de ces dernières incombe non seulement aux États dont elles relèvent, mais aussi à la communauté internationale. Avec solennité, le Document final du Sommet mondial des Nations unies (adopté le 15 septembre 2005) affirme la responsabilité de chaque État de protéger sa population du génocide, des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité. Faisant reposer la responsabilité de protéger sur le principe de la « souveraineté comme responsabilité », il énonce que la communauté internationale est résolue à aider les États à protéger leur population.

L'un des mérites du concept de la responsabilité de protéger est en effet de dépasser l'opposition qui a dominé les années 1990, entre les États attachés à une stricte application du principe de souveraineté et ceux qui défendent les interventions militaires à des fins humanitaires : l'émergence du concept part de l'idée que la sécurité internationale doit être pensée, non plus uniquement en fonction de la sécurité des États dans le cadre d'un conflit interétatique, mais également en fonction de la sécurité des populations civiles victimes d'un conflit armé, surtout interne91(*).

La Charte des Nations Unies établit que le principe central du droit international est l'égalité souveraine des États et le droit des peuples à l'autodétermination92(*). Tous les États étant formellement égaux en droit, ils ne peuvent utiliser la force contre un autre État ou intervenir dans ses affaires internes, sauf en cas de légitime défense, ou afin de rétablir la paix ou la sécurité internationale, et ceci seulement après autorisation du Conseil de sécurité de l'ONU93(*). Ce principe essentiel à la stabilité des relations internationales a été répété à plusieurs reprises et notamment dans la résolution 2625 de l'Assemblée générale (AG) des Nations Unies (1970). Quand la Charte des Nations Unies a été adoptée, la possibilité d'intervenir pour protéger les civils a été discutée et rejetée par les gouvernements d'alors.

On craignait que les États les plus forts n'abusent de ce principe contre les États les plus faibles, ce qui représentait un trop grand risque pour la stabilité internationale et la souveraineté de ces États plus faibles. En fait, « les États du Sud considèrent que le principe de souveraineté et son corollaire concernant la non-intervention représentent, en pratique, leur dernière protection contre les règles d'un monde inégal »94(*) R2P demande aux états de reconnaître que la souveraineté implique une responsabilité de protéger leurs populations, et encourage la communauté internationale à assumer sa responsabilité de réagir quand un Etat est incapable ou manque la volonté de protéger ses populations. Ce sujet ne doit pas être apprécié comme une atteinte au droit d'intervention de l'Etat mais plutôt comme une nécessité d'assurer la protection des populations vulnérables.

La souveraineté emporte pour effet permanent et traditionnel de protéger l'Etat de toute atteinte à son intégrité physique et à son indépendance. Les principes de non-ingérence dans les affaires intérieures et de non-intervention tierce sur un territoire étatique, sauf autorisation expresse de l'Etat territorial lui-même ou habilitation du Conseil de sécurité sur la base du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies, sont des garanties fondamentales du respect des souverainetés. Cette conception classique de la souveraineté, tournée entièrement vers sa défense, a et gardera toujours une importance primordiale comme garante de l'indépendance des Etats95(*).

Mais l'évolution du droit international montre que la souveraineté dont se prévaut l'Etat ne l'autorise plus, aux yeux des autres, à commettre à l'abri de ses frontières toutes les exactions que bon lui semblerait contre sa population96(*).

La très large adhésion des Etats aux normes internationales des droits de l'homme et aux normes du droit international humanitaire, a eu au moins deux conséquences fondamentales: l'Etat reconnaît de plus en plus largement à l'individu la possibilité d'exiger de lui le respect de ses droits, comme lui-même s'est engagé à rendre compte à ses partenaires conventionnels de la manière dont il garantit les droits individuels dans son ordre interne; les violations des droits de l'homme et/ou du droit international humanitaire, a fortiori lorsqu'elles sont massives, sont désormais l'affaire de tous, car, au-delàde l'engagement volontaire des Etats à tout un réseau d'engagementsconventionnels, il s'agit de normes ergaomnes, comme la Cour international de Justice l'a depuis longtemps mis en évidence, quand elles n'ont pas, comme le droit à la vie notamment, valeur de normes de jus cogens. L'importance acquise par ce corpus juridique qu'est venue parachever l'affirmation de la justice pénale internationale, donne ainsi toute sa pertinence et sa légitimitéau concept de responsabilité de protéger qui trouve là ses racines lesplus profondes97(*).

Portée par toutes ces évolutions dont elle est un prolongement rationnel et logique, la responsabilité de protéger conduit à mettre en avant l'idée que, dans le monde du XXIème siècle, un Etat souverain digne de cettequalité doit s'acquitter pleinement de ses devoirs à l'égard de sa propre population. C'est là l'une de ses missions essentielles car, la souveraineté n'est pas une fin en soi, mais doit s'exercer au bénéfice du bien-être et de la sauvegarde des populations dont l'Etat a la charge98(*).

§2. VALEUR AJOUTEE : EMERGENCE DE L'INDIVIDU COMME SUJET DE DIP

Dans la lecture de la R2P telle que conçue par la CIISE, celle-ci attribue une grande importance à la personne comme sujet de protection en droit international, étant donné que, traditionnellement, la personne humaine occupait une place qu'on pourrait dire subalterne dans le droit international classique, essentiellement interétatique ; elle n'est pas considérée sauf dans la conception de Georges SCELLE, comme un sujet actif du DIP, elle ne peut pas en d'autres termes, agir par elle-même au sein de cette ordre hors de la tutelle étatique99(*), c'est-à-dire que l'individu ne relevé pas directement du droit international, les traités conclu par l'Etat ne lui est applicable que par le relais du droit interne100(*).

On peut globalement dire de cette situation de dépendance des individus à l'égard de la personne de l'Etat qu'elle est, en doit international contemporain, à la fois confirmée mais aussi de plus en plus nettement remise en cause : elle est confirmée parce que les seuls sujets dotés de la plénitude de la personnalité dans l'ordre juridique international général ; cette incapacité juridique internationale de l'individu est cependant de plus en plus remise en cause dans le contexte particulier de la protection internationale des droits de l`homme,101(*) c'est dans ce contexte justement que l'individu est considéré comme sujet du droit international102(*).

La Charte des Nations Unies, dans son préambule, ses articles 1, paragraphe 3, article 55 point c, complétés par les articles 13, 62 et 68, semblait ainsi conférer idéalement aux droits de l'homme une manière de portée constitutionnelle dans l'ordre international ; ainsi la charte va prendre en considération les droits de l'homme dans leur globalité, l'homme accède désormais à une existence juridique international103(*) ; ainsi, dans le cadre de sa protection, plusieurs normes du droit international ont été adopté notamment la déclaration universelle des droits de l'homme, pacte international relatif aux droits civils et politique, pacte international relatif aux droits économiques sociaux et culturels, les 4 conventions de Genève de 1949 et ses 3 protocoles additionnels de 1977,... toutes ces normes consacrent la protection de la personne humaine tant dans des situations exceptionnelles qu'ordinaires, ce qui montre l'émergence de la personne humaine comme objet de protection en droit international ; ainsi dans le cadre de la responsabilité de protéger, celle-ci vise la protection de la personne humaine contre le génocide, le crime de guerre, le nettoyage ethnique et le crime contre l'humanité ; dans l'esprit de ce concept, aucune exception n'est admise en matière de la protection de la personne humaine contre ces crimes, encore moins la souveraineté des Etats ne peut pas constituer un obstacle pour sa protection ; c'est ainsi, comme prévoit la R2P, l'Etat a l'obligation de protéger, s'il ne le fait pas ou soit il n'est pas capable de le faire, la communauté internationale pourra intervenir pour assurer la protection de l'individu.

Bien que le concept de la responsabilité de protéger mette beaucoup d'importance à la personne humaine comme sujet de protection, nous pouvons encore dire à ces propos qu'en cette matière, elle ne fait que rappeler les notions existantes en droit international, notamment la protection de l'individu contre le crime de guerre, crime contre l'humanité et crime de génocide qui sont sanctionnés par le statut de Rome, en particulier le crime de génocide a également une règlementation spéciale qui est celle de la convention sur la prévention et la répression du crime de génocide ; pour ce qui est du nettoyage ethnique, la crise qui a secoué l'ex-Yougoslavie dans les années 1990 permet d'éclaircir le phénomène du nettoyage ethnique.

Dans sa Résolution 819 adoptée le 16 avril 1993, le Conseil de sécurité des nations réaffirme d'abord le principe de la souveraineté, de l'intégrité et de l'indépendance de la Bosnie Herzégovine; ensuite, il prend le soin de condamner le nettoyage ethnique comme étant une violation du droit international humanitaire; enfin, il assimile le nettoyage ethnique à toute prise ou acquisition de territoire par la menace ou l'emploi de la force104(*) ; à partir de ce qui précède, nous pouvons une fois de plus dire que la responsabilité de protéger ne fait que rappeler les notions existantes déjà, elle n'apporte rien de nouveau en terme de l'émergence de l'individu comme sujet du DIP.

CHAPITRE II. MISE EN OEUVRE DE LA RESPONSABILITE DE PROTEGER

Leprésent chapitre sera abordé sous deux angles à savoir : les conditions de la mise en oeuvre de la responsabilité de protéger, ses piliers et moments triptyques (section1), et en deuxième lieu il sera question d'analyser la mise en oeuvre de la responsabilité de protéger dans la crise postélectorale de la Côte d'Ivoire (section 2).

Section I. CONDITIONS DE LA MISE EN OEUVRE DE LA RESPONSABILITE DE PROTEGER, SES PILIERS ET MOMENT TRIPTYQUE

Pour que la responsabilité de protéger soit déclenchée, certaines conditions doivent être réunies (§ 1) ; et celle-ci c'est-à-dire la responsabilité de protéger se distingue de ses notions voisines non seulement dans les cadres de ses conditions pour sa mise en oeuvre, mais aussi par ses moments triptyques et ses piliers (§2).

§1. CONDITIONS DE LA MISE EN OEUVRE DE LA RESPONSABILITE DE PROTEGER105(*)

En analysant les dispositions des paragraphes 138 et 139 du sommet mondial de 2005, nous déduisons que, pour que la Communauté internationale engage la R2P, il faut que certaines conditions soient réunies (A). Une fois ces conditions réunies, il faut prendre des mesures appropriées. Parmi les différents moyens, l'intervention militaire nécessite une grande prudence. En effet, vu ses effets sévères sur le terrain soit pour l'État touché, soit pour les populations, elle est elle-même soumise à certaines modalités. Autrement dit, pour qu'on puisse déclencher la responsabilité par le moyen militaire, plusieurs conditions additionnelles doivent être remplies (B).

A. Conditions générales

Pour le déclenchement de R2P par tous les moyens, il faut que certains crimes internationaux soient commis ou risquent d'être commis (a) et que le principe de la subsidiarité soit respecté (b).

a. La commission ou menace de commission de 4 crimes internationaux

Le premier pas en vue de la mise en oeuvre de la R2P est de déterminer son champ d'application matériel. Autrement dit, il faut savoir, parmi les différentes crises menaçant l'humanité (humanitaire, sanitaire, naturelle, etc.), laquelle peut déclencher la R2P ? Les paragraphes 138 et 139 du document final de 2005 intitulés « Devoir de protéger des populations contre le génocide, les crimes de guerre, le nettoyage ethnique et les crimes contre l'humanité »106(*) sont assez clairs sur ce point. Ces quatre crimes internationaux sont à la fois la condition de la mise oeuvre et l'objet de la R2P.

La question qu'il sied de répondre est celle de la définition de ces différents crimes. D'abord il ne faut pas confondre le crime de génocide et celui de nettoyage ethnique.Le crime de génocide a été codifié pour la première fois dans la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide de 1948. À peine cette convention est-elle entrée en vigueur que la Cour internationale de Justice s'est empressée de voir en elle l'expression du droit international coutumier. Sur cette base, le statut juridique du génocide oblige les États même en dehors de tout lien conventionnel107(*).

Au fil du temps, les législations internes ainsi que les différents statuts créant des juridictions pénales internationales ont repris la même définition de 1948, contribuant ainsi à renforcer l'assise juridique du crime. Le lexique des termes juridiques définit le génocide comme étant une infraction consistant à commettre ou à faire commettre l'exécution d'un plan concerté tendant à la destruction totale ou partielle d'un groupe national, ethnique, racial ou religieux ou d'un groupe déterminé à partir de tout autre critère arbitraire.108(*)Selon l'article 6 du Statut de Rome de la Cour pénale internationale, qui est le dernier texte à vocation universelle à reprendre la définition de la convention de 1948, le génocide s'entend de l'un quelconque des actes ci-après, commis dans l'intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux, comme tel : a) meurtre de membres du groupe; b) atteinte grave à l'intégrité physique ou mentale de membres du groupe; c) soumission intentionnelle du groupe à des conditions d'existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle; d) mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe ; e) transfert forcé d'enfants du groupe à un autre groupe109(*).

Cette définition du génocide repose essentiellement sur deux critères qui s'identifient en éléments objectifs ou matériels et en éléments subjectifs. Les éléments matériels du génocide sont composés de cinq types d'actes limitativement énumérés aux alinéas a) à e) précités. Ce sont des actes de nature physiques (meurtre, atteintes graves à l'intégrité physique ou mentale, ou soumission à des conditions d'existence devant entraîner leur disparition) ou biologiques (mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe, transfert forcé d'enfants du groupe à un autre groupe). Alors que le génocide physique vise la destruction du groupe par l'élimination physique de ses membres, le génocide biologique conduit à l'extinction du groupe à travers les entraves aux naissances et le transfert forcé d'enfants.

Quant à l'élément subjectif, il est constitué par l'élément intentionnel du génocide (dolusspecialis). L'intention du génocide est le point cardinal de la définition du génocide. Il a été dit qu'elle cristallise la caractéristique la plus intime du crime du génocide. Sans la preuve de celle-ci, il est impossible de conclure à ce crime110(*).

Par contre, le nettoyage ethnique est aussi désigné par diverses expressions françaises (« purification ethnique », « épuration ethnique »). Cependant, il n'existe pas à l'heure actuelle une définition juridique univoque du nettoyage ethnique qui fasse consensus. Indéfinie sur le plan juridique certes, la notion du nettoyage ethnique n'en a pas moins intéressé plusieurs sources qui ont tenté de lui apporter une définition méta ou extra juridique111(*).

La première définition, la plus connue, est venue du Rapport intérimaire de la Commission d'experts constituée conformément à la Résolution 780 (1992) du Conseil de sécurité112(*). Les experts appréhendent le nettoyage ethnique comme une pratique contraire au droit international qui consiste à rendre une zone ethniquement homogène en utilisant la force ou l'intimidation pour faire disparaître de la zone en question des personnes appartenant à des groupes déterminés.

La pratique du Conseil de sécurité des nations en relation avec la crise qui a secoué l'ex-Yougoslavie dans les années 1990 permet aussi d'éclaircir le phénomène du nettoyage ethnique. Dans sa Résolution 819 adoptée le 16 avril 1993113(*), le Conseil de sécurité des nations réaffirme d'abord le principe de la souveraineté, de l'intégrité et de l'indépendance de la Bosnie Herzégovine; ensuite, il prend le soin de condamner le nettoyage ethnique comme étant une violation du droit international humanitaire; enfin, il assimile le nettoyage ethnique à toute prise ou acquisition de territoire par la menace ou l'emploi de la force.

Tout ce qui précède permet de déduire trois éléments principaux de la définition du nettoyage ethnique : l'identité ethnique du groupe, l'acte de déplacement ainsi que l'acquisition du territoire par la force. Quoi qu'il en soit, le nettoyage ethnique a une finalité territoriale et c'est là son élément déterminant. La purification ethnique est une violation du droit international qui vise à prendre possession d'un territoire en déplaçant ou en assimilant par la force le groupe ethnique qui l'occupait.

Le nettoyage ethnique et le génocide ne peuvent pas être assimilés parce qu'ils ne sont pas identiques et qu'ils poursuivent des finalités différentes. Comme on l'a dit, le nettoyage ethnique a une finalité territoriale. En effet, son intention n'est pas, contrairement au crime de génocide, à rechercher dans la destruction physique ou biologique d'un groupe. En mettant en oeuvre une telle politique, les auteurs sont moins animés par l'intention de détruire le groupe que par celle qui consiste à utiliser tous les moyens à leur portée, y compris le meurtre, pour amener le groupe ethnique adverse à abandonner son territoire d'origine.

Que des meurtres puissent être commis dans ou en cours d'expulsion ou de transferts, cela n'enlève rien à la qualification de nettoyage ethnique, d'autant plus que le dolusspecialis est inexistant dans ce cas. Cette intention territoriale du nettoyage ethnique a d'ailleurs été confirmée par la CPI dans la situation du Soudan. La Cour souligne que l'élément distinctif du dol spécial caractérisant le génocide est l'intention de détruire un groupe protégé. Cette intention destructrice se distingue toutefois de l'intention requise en matière de nettoyage ethnique, dans le cadre duquel un criminel entend s'en prendre à un groupe ethnique, par exemple en le chassant d'une région, sans pour autant avoir l'intention de le détruire dans cette région.

Ceux qui soutiennent l'existence d'un lien entre le nettoyage ethnique et le génocide estiment aussi qu'en cas d'expulsion, on pourrait prouver que celle-ci a été mise en oeuvre avec l'intention de détruire le groupe visé pour conclure au génocide. Cet argument consiste en fait à faire coïncider l'intention du nettoyage ethnique avec l'intention spécifique afin de souligner leur complémentarité. Or, cette manière de faire est contre-productive dans la mesure où elle ne fait pas progresser le débat, car le même argument peut-être aussi tenu dans le cadre des crimes contre l'humanité et même les crimes de guerre. En outre, il est permis de douter de la possibilité que les deux intentions puissent coexister d'un point de vue strictement juridique, car les intentions qui les déterminent sont foncièrement opposées114(*).

Enfin, il n'existe pas en l'état du droit international positif des « manifestations variables du génocide », comme on a pu le lire dans les tentatives de certains auteurs visant à déformer la fonction normative du crime de génocide. Le génocide en droit est unique et ne saurait être assimilé à d'autres « pratiques dites génocidaires », et dans lesquelles on essaie depuis un certain temps, d'engluer le nettoyage ethnique.

Ceci dit, le nettoyage ethnique n'est pas moins attentatoire à la dignité humaine que le crime de génocide. Toutefois, le juriste ne doit pas se laisser emporter par la symbolique de l'imaginaire génocidaire. À notre sens, il n'est pas nécessaire de s'imposer le lourd fardeau de remettre en cause les acquis de 1948, en cherchant à faire absorber vaille que vaille ce phénomène qu'est l'épuration ethnique par le crime de génocide. Par contre, on peut se demander si le temps n'est pas venu d'ouvrir un nouveau chapitre des crimes internationaux, en donnant une signification autonome et exclusive au nettoyage ethnique. Cela permettra d'opérer définitivement sa scission avec les autres crimes officiellement reconnus.

Selon le statut de Rome, on entend par crime contre l'humanité l'un quelconque des actes ci-après lorsqu'il est commis dans le cadre d'une attaque généralisée ou systématique lancée contre toute population civile et en connaissance de cette attaque : a) Meurtre ; b) Extermination; c) Réduction en esclavage ; d) Déportation ou transfert forcé de population ; e) Emprisonnement ou autre forme de privation grave de liberté physique en violation des dispositions fondamentales du droit international ; f) Torture ; g) Viol, esclavage sexuel, prostitution forcée, grossesse forcée, stérilisation forcée ou toute autre forme de violence sexuelle de gravité comparable ; h) Persécution de tout groupe ou de toute collectivité identifiable pour des motifs d'ordre politique, racial, national, ethnique, culturel, religieux ou sexiste au sens du paragraphe 3 de ce statu, ou en fonction d'autres critères universellement reconnus comme inadmissibles en droit international, en corrélation avec tout acte visé dans le présent paragraphe ou tout crime relevant de la compétence de la Cour ; i) Disparitions forcées de personnes ; j) Crime d'apartheid ; k) Autres actes inhumains de caractère analogue causant intentionnellement de grandes souffrances ou des atteintes graves à l'intégrité physique ou à la santé physique ou mentale...115(*).

En outre, on entend par « crimes de guerre » : a) Les infractions graves aux Conventions de Genève du 12 août 1949, à savoir l'un quelconque des actes ci-après lorsqu'ils visent des personnes ou des biens protégés par les dispositions des Conventions de Genève : i) L'homicide intentionnel ; ii) La torture ou les traitements inhumains, y compris les expériences biologiques ; iii) Le fait de causer intentionnellement de grandes souffrances ou de porter gravement atteinte à l'intégrité physique ou à la santé ; iv) La destruction et l'appropriation de biens, non justifiées par des nécessités militaires et exécutées sur une grande échelle de façon illicite et arbitraire ; v) Le fait de contraindre un prisonnier de guerre ou une personne protégée à servir dans les forces d'une puissance ennemie ; vi) Le fait de priver intentionnellement un prisonnier de guerre ou toute autre personne protégée de son droit d'être jugé régulièrement et impartialement ; vii) La déportation ou le transfert illégal ou la détention illégale ; viii) La prise d'otages ;...116(*)

Après leur définition, La deuxième question qui surgit est celle de savoir si la Communauté internationale ne peut intervenir qu'après la commission de crimes ou bien avant que la crise n'éclate. Il faut avoir à l'esprit que le but primordial de la R2P est de prévenir des atrocités choquant nos consciences.La commission des crimes est la condition nécessaire, mais non pas suffisante. Il en faut une autre: le principe de subsidiarité.

b. Le principe de subsidiarité de la responsabilité de la Communauté internationale

Le principe de subsidiarité signifie que la R2P de la Communauté internationale ne peut être mise en jeu que lorsque l'État concerné n'est pas disposé ou n'est pas en mesure de protéger ses populations des crimes internationaux. Ce caractère subsidiaire de l'intervention de la Communauté internationale a été envisagé dès la proposition par la CIISE de la R2P.

Dans son rapport la Commission explique que : « Cette responsabilité subsidiaire est activée lorsque tel ou tel État est manifestement soit incapable, soit peu désireux d'accomplir sa responsabilité de protéger; ou est lui-même l'auteur effectif des crimes ou atrocités en question... »117(*). Cette condition est approuvée par la suite par le document de 2005.

B. Les conditions particulières de l'intervention militaire

D'autres modalités pour déclencher la R2P par le moyen militaire se divisent en deux ; d'abord, il faut que l'intervention armée de la Communauté internationale se fasse légalement et conformément au droit international ; ce qui nous amène à la question de savoir qui est habilité à autoriser et à coordonner une telle intervention (a). Au-delà de cette condition formelle, il est nécessaire qu'une telle intervention soit substantiellement légitime et bien justifiée (b).

a. La condition formelle : l'autorisation de l'autorité appropriée

La possibilité d'intervenir militairement afin de faire cesser la violence doit être conciliée avec la règle bien établie du droit international de l'interdiction du recours à la force énoncée expressément à l'article 2 § 4 de la Charte des Nations-Unies. Pour cela, il s'agit de déterminer qui pourrait légalement décider de réagir au nom de la Communauté internationale. L'un des choix peut être de conférer à chaque État ou à une coalition des États une telle compétence en modifiant ou en donnant une nouvelle interprétation à cette règle. En effet, certains pensent que l'article 2§4 insiste surtout sur le fait que l'usage de la force ne doit pas être incompatible avec les buts des Nations-Unies et vu qu'une telle intervention ne se fera qu'en vue d'application de l'un des buts importants de la Charte, c'est-à-dire le développement du respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales, cette intervention paraît sinon complètement légale au moins vraiment excusable. Pourtant, il y a un fort doute qu'une telle interprétation de la Charte puisse facilement être acceptée ou qu'une modification soit réalisée. Au-delà de ce problème juridique, ce choix nous conduira à d'autres inconvénients. Il augmente évidemment le risque d'utilisation abusive du droit et par conséquent on sera en présence d'une « société plus anarchique » où la paix est plus fragile118(*).

De plus que dans ce cas, cette responsabilité ne pourrait pratiquement être appliquée que par les grandes puissances envers les États faibles ou fragiles. Donc, en l'état actuel du droit international, cette solution n'est ni souhaitable ni réalisable. Comme certains le disaient, le choix d'une autorité appropriée est généralement subordonné à sa légitimité devant la société internationale et à son impartialité. Au regard de ces critères, c'est l'ONU qui apparaît comme la seule instance internationale pouvant en assumer la responsabilité.

Composé de tous les États, elle est le centre principal de coordination de tous les efforts de la Communauté internationale notamment en ce qui concerne la paix et les droits de l'homme. Au sein de l'ONU, vu la responsabilité principale du Conseil de sécurité en matière de maintien de la paix, il paraît logique que la question d'entreprendre de telles opérations de protection relève aussi de sa compétence. En plus, du point de vue juridique, le Conseil de sécurité est le seul organe international possédant le pouvoir d'autoriser l'action militaire contre un État, ce qui constitue l'une des deux exceptions de la règle de l'interdiction de l'usage de force.

C'est pour cela que la CIISE a retenu le Conseil de sécurité en tant qu'autorité appropriée pour autoriser l'intervention armée au titre de la R2P en disant qu' « ...il n'y a pas de meilleur organe, ni de mieux placé, que le Conseil de sécurité pour s'occuper des questions d'intervention militaire à des fins humanitaires ».119(*) Dans le même sens, le document du sommet 2005 insiste explicitement dans son paragraphe 139 sur le rôle pertinent du Conseil de sécurité en la matière.120(*)Pourtant, il reste encore la question de portée du chapitre VII sur ce point. En effet, en vertu de l'article 39 de la Charte, la compétence du Conseil en vue de prendre des mesures coercitives y compris l'utilisation de la force armée, est restreinte en cas de menace contre la paix, de rupture de la paix ou d'acte d'agression ; ce qui démontre à première vue que les 4 crimes internationaux sont, surtout quand ils sont commis au sein de frontières d'un État, exclus de son champ d'application. En effet, l'interprétation correcte de la Charte en utilisant le sens ordinaire des termes exige que les notions de la paix et la sécurité visent seulement les situations interétatiques. La CIISE invoque la pratique du Conseil de sécurité après la guerre froide en adoptant une interprétation plus large de ces notions incluant les situations des violations massives des droits de l'homme qui lui a permis d'intervenir dans les situations n'ayant pas à priori des conséquences pour les autres États.

Il est vrai que le Conseil de sécurité n'hésitait pas ces dernières années à se reconnaître compétent dans de telles situations et l'exprimait explicitement dans ses résolutions relatives à la protection des civils en période de conflit armé. Mais ces pratiques ne pourraient en soi constituer un fondement juridique pour une telle dérogation de la Charte, car le Conseil ne pourrait théoriquement élargir ses pouvoirs en violation des dispositions de la Charte.

En fait, comme certains le disaient, la pratique du Conseil, ainsi que celle des États et des autres organes de l'ONU en la matière surtout le document du sommet de 2005 qui confère au Conseil le rôle de l'autorité doivent être considérées comme des éléments exprimant une « modification de fait » de la Charte. En d'autre terme, la pratique implique l'accord implicite modifiant le champ de compétence du Conseil de sécurité. En outre, on peut soutenir qu'aux yeux de la Communauté internationale la notion de la sécurité internationale ne fait plus seulement référence à la sécurité des États, mais que cette dernière, si elle n'a déjà été substituée, est au moins en train d'être substituée avec le concept de la sécurité humaine.

Dans ce cas, le Conseil de sécurité sera compétent dans toutes les questions touchant la sécurité des États et des gens. De toute façon, il semble que le Conseil possède la capacité juridique nécessaire pour autoriser de telles opérations. L'autorisation de l'autorité appropriée est une condition préalable mais non pas suffisante. En fait, le Conseil doit, avant de décider à autoriser l'intervention armée, évaluer la situation sur le terrain en tenant compte de certains critères pour qu'une telle autorisation soit bien légitime121(*).

b. Les conditions substantielles

Etant donné que l'usage de la force armée va directement à l'encontre du principe de non-intervention, l'intervention militaire ne sera justifiée que dans les situations exceptionnelles et par conséquent doit être limitée auxcas extrêmes122(*) et doit être envisagée en dernier recours. La CIISE a essayé de proposer certains critères. Selon elle, le champ d'exercice de l'intervention armée doit encadrer :

· despertes considérables en vieshumaines, effectives ou appréhendées, qu'il y ait ou non intention génocidaire, qui résultentsoit de l'action délibérée de l'État, soit de sa négligence ou de son incapacité à agir, soitencore d'une défaillance dont il est responsable; ou

· un « nettoyage ethnique » à grandeéchelle, effectif ou appréhendé, qu'il soit perpétré par des tueries, l'expulsion forcée, laterreur ou le viol»123(*).

La condition du dernier recours signifie que l'intervention armée ne peut être autorisée que lorsque tous les autres moyens pacifiques ou coercitifs en vue de protéger les populations ont échoué. Cette condition proposée par la CIISE est approuvée par d'autres et apparaît dans le paragraphe 139 du document de 2005.

§2. LES PILIERS DE LA RESPONSABILITE DE PROTEGER ET SES MOMENTS TRIPTYQUE

Le concept de la responsabilité de protéger se distingue de ses notions voisines par ses piliers (A) ainsi que ses moments triptyque(B).

A. Les piliers de la responsabilité de protéger

Les piliers de la responsabilité de protéger sont clairement mentionnées dans le rapport du secrétaire général des Nations Unis sur la mise en oeuvre de celle-ci, ces pilier sont tirés de la définition même de la responsabilité de protéger telle que mentionnée dans les paragraphes 138 et 139 de document final du sommet mondial de 2005, il s'agit donc :

Premier pilier: Les responsabilités de l'État en matière de protection

Le premier pilier consiste dans la responsabilité permanente incombant à l'État de protéger ses populations, qu'il s'agisse ou non de ses ressortissants, du génocide, des crimes de guerre, du nettoyage ethnique et des crimes contre l'humanité, et de toute incitation à les commettre. Ce dernier élément, il faut le souligner, est essentiel pour conduire des stratégies de prévention efficaces en temps voulu. La déclaration des chefs d'État et de gouvernement relatée au paragraphe 138 du Document final du Sommet qui dispose que : «C'est à chaque État qu'il incombe de protéger ses populations du génocide, des crimes de guerre, du nettoyage ethnique et des crimes contre l'humanité. Cette responsabilité consiste notamment dans la prévention de ces crimes, y compris l'incitation à les commettre, par les moyens nécessaires et appropriés. Nous l'acceptons et agirons de manière à nous y conformer.» est le fondement de la responsabilité de protéger. Cette responsabilité, ont-ils affirmé, incombe avant tout à l'État124(*).

Deuxième pilier : Assistance internationale et renforcement des capacités

Le deuxième pilier consiste dans l'engagement pris par la communautéinternationale d'aider les États à s'acquitter de ces obligations. Au paragraphe 138 du Document final du Sommet, il est affirmé que « la communauté internationale devrait, si nécessaire, encourager et aider les États à s'acquitter de cette responsabilité de protéger ». Au paragraphe 139, il est dit : « Nous entendons aussi nous engager, selon qu'il conviendra, à aider les États à se doter des moyens de protéger leurs populations du génocide, des crimes de guerre, du nettoyage ethnique et des crimes contre l'humanité et à apporter une assistance aux pays dans lesquels existent des tensions avant qu'une crise ou qu'un conflit n'éclate. » Il ressort de ces deux dispositions que cette assistance pourrait prendre l'une des quatre formes suivantes : encourager les États à s'acquitter de leurs responsabilités au titre du premier pilier (paragraphe 138); les aider à exercer cette responsabilité (paragraphe 138); les aider à se doter des moyens de protéger leurs populations (paragraphe 139); et apporter une assistance aux pays « dans lesquels existent des tensions avant qu'une crise ou qu'un conflit n'éclate » (paragraphe 139).Tandis que la première forme d'assistance consiste à persuader les États de faire ce qui leur incombe, les trois autres formes supposent un engagement réciproque et un partenariat actif entre la communauté internationale et l'État125(*).

Troisième pilier : Réaction résolue en temps voulu

Le troisième pilier consiste dans la responsabilité des États Membres de mener en temps voulu une action collective et résolue lorsqu'un État manque manifestement à son obligation de protection. Bien qu'elle fasse l'objet d'amples débats, cette responsabilité au titre du troisième pilier est généralement comprise d'une manière trop étroite. Comme le précisent bien les deux premières phrases du paragraphe 139 du Document final du Sommet mondial de 2005, le troisième pilier fait partie intégrante de la stratégie convenue par les chefs d'État et de gouvernement pour s'acquitter de la responsabilité de protéger. Selon la première phrase, « il incombe également à la communauté internationale, dans le cadre de l'Organisation des Nations Unies, de mettre en oeuvre les moyens diplomatiques, humanitaires et autres moyens pacifiques appropriés, conformément aux Chapitres VI et VIII de la Charte, afin d'aider à protéger les populations du génocide, des crimes de guerre, du nettoyage ethnique et des crimes contre l'humanité ». Le libellé donne à penser qu'il devrait s'agir d'une responsabilité générique dont l'exécution n'est pas limitée dans le temps et fait appel aux mesures d'ordre pacifique prévues au Chapitre VI et à l'Article 52 du Chapitre VIII. La deuxième phrase de ce même paragraphe souligne que la communauté internationale pourrait invoquer une gamme plus large d'actions collectives, pacifiques ou non, pour autant que deux conditions soient réunies : « lorsque ces moyens pacifiques se révèlent inadéquats », et « que les autorités nationales n'assurent manifestement pas la protection de leurs populations » contre les quatre crimes et violations considérés. Dans les deux cas, les chefs d'État et de gouvernement affirment, au paragraphe 139 « nous sommes prêts à mener en temps voulu une action collective résolue, par l'entremise du Conseil de sécurité, conformément à la Charte, notamment son Chapitre VII, au cas par cas et en coopération, le cas échéant, avec les organisations régionales compétentes »126(*).

B. Les moments triptyques de la responsabilité de protéger : prévenir, réagir et reconstruire

Contrairement aux piliers de la responsabilité de protéger qui sont prévus dans le rapport de 2009 du secrétaire général des Nations Unies sur la mise en oeuvre de la responsabilité de protéger, les moments triptyque sont prévus dans le rapport de la CIISE.

a. La responsabilité de prévenir

La responsabilité de protéger s'accompagne nécessairement d'une responsabilité de prévenir, que la communauté internationale fasse davantage pour combler l'écart entre le soutien en paroles à la prévention et la volonté concrète de prévenir.

La prévention des conflits meurtriers et d'autres formes de catastrophes produites par l'homme incombe, comme toutes les autres composantes de la responsabilité de protéger, d'abord et avant tout aux États souverains et aux communautés et institutions qui s'y trouvent. Une volonté résolue des autorités nationales d'assurer un traitement équitable et l'égalité des chances pour tous les citoyens constitue un fondement solide pour la préventiondes conflits. Quant aux moyens nécessaires pour y parvenir, ils relèvent essentiellement de la responsabilisation et de la bonne gouvernance, de la protection des droits de l'homme, de lapromotion du développement socioéconomique et de la répartition équitable des ressources127(*).

Mais la prévention des conflits n'est pas une affaire strictement nationale ou locale. Le défaut de prévention peut avoir de vastes répercussions et des coûts importants à l'échelle internationale. Par ailleurs, la réussite de la prévention nécessite souvent et dans bien des cas exigent un appui résolu de la communauté internationale.

Cet appui peut prendre diverses formes. Il peut consister en une aide au développement et en d'autres actions susceptibles de contribuer à éliminer les causes profondes d'un conflit potentiel ; il peut s'agir d'un soutien aux initiatives prises localement pour promouvoir la bonne gouvernance, le respect des droits de l'homme ou l'état de droit ; ou il peut prendre la forme de missions de bons offices, d'efforts de médiation et d'autres actions destinées à favoriser le dialogue ou la réconciliation. Dans certains cas, l'appui international aux efforts de prévention peut prendre la forme de mesures d'incitation ; dans d'autres, il peut s'agir du recours à des mesures contraignantes, voire punitives128(*).

v LA POLITIQUE ONUSIENNE DE LA PREVENTION

La prévention apparaît comme le concept central de la problématique de la paix et de la sécurité dans l'ordre international, comme on peut le voir dès le premier article de la Charte de l'ONU. Certes, l'ONU s'engage autant à « prévenir » et à « écarter les menaces à la paix », qu'à « réprimer tout acte d'agression ou autre rupture de la paix » (confer chapitre VII de la charte). Mais en même temps, elle accorde sa préférence aux mesures de prévention et, le cas échéant, à la résolution pacifique des différends entre ses membres. Les rapports produits par les différents secrétaires généraux qui se sont succédé à l'ONU sont largement revenus sur cette question de la prévention en déplorant que son principe soit resté relativement lettre morte et en plaidant pour que s'opère une sorte de rupture avec la « culture de la réaction » au profit d'une « culture de la prévention »129(*).

Bien que le Rapport de la Commission internationale sur l'intervention et la souveraineté des États concerne essentiellement la question de la légitimitéd'une intervention humanitaire des États sur le territoire d'un autre État, la problématique de la prévention y occupe une place importante. La prévention est d'ailleurs considérée comme le premier moment d'un triptyque comprenant la réaction et la reconstruction, les deux derniers moments n'étant envisagés que de façon subsidiaire, quand la prévention n'a pas puproduire ses effets. Dans le sommaire du document, il est déjà précisé que « la prévention est la principale dimension de la responsabilité de protéger : il faut toujours épuiser toutes les possibilités de prévention avant d'envisager une intervention, et il faut luiconsacrer plus de détermination et de ressources »130(*).

Quant aux mécanismes de prévention, ils supposent trois conditions : « l'alerte rapide », basée sur la connaissance des risques ; « l'outillage préventif » qui renvoie à la connaissance des politiques susceptibles de générerdes crises et enfin « la volonté politique ».

L'alerte rapide est un mécanisme de prévention aussi important que difficile à réaliser. Son objectif est de pouvoir disposer de données fiables qui signalent la nécessité d'une intervention préventive. Mais étantdonné généralement la complexité des situations decrise, des facteurs s'entremêlent, dans lesquels il est difficile de déceler des indicateurs précis de l'imminence d'un conflit. Il faut pouvoir systématiser l'analysedes informations.

Pour chacun de ces niveaux de prévention, il faut partir d'une « boîte à outils » comprenant trois éléments : le traitement des besoins et des carences politiques (démocratie, État de droit, etc.) ; le traitement des privations et de l'inégalité des chances économiques (aide au développement, commerce équitable, etc.) ; le renforcement des protections et des institutions juridiques (intégrité et indépendance du pouvoir judiciaire) ; les réformes dans le secteur militaire et sécuritaire (éducation et formation des forces armées ; réinsertion des anciens combattants, désarmement, etc.)131(*).

C'est à chaque État qu'il incombe de protéger ses populations du génocide,des crimes de guerre, du nettoyage ethnique et des crimes contre l'humanité132(*). Cette responsabilité consistenotamment dans la prévention de ces crimes.Ce passage fait apparaître le lien étroit qui existe entre protection et prévention. En réalité, protéger signifie prendre un certain nombre de précautions ou de mesures pour empêcher qu'un individu ou un peuple ne soit affecté par un malheur. La prévention ne signifie pas autre chose. Cela revient à dire que le rôle fondamental joué par chaque État dans la responsabilité de protéger estla prévention, les autres États ou la communauté international ne pouvant intervenir que pour soutenir cet effort de prévention ou pour mettre fin à un crime qui s'est d'ores et déjà signalé133(*).

b. La responsabilité de réagir

La « responsabilité de protéger » suppose par-dessus toute une responsabilité de réagir devant des situations où la protection d'êtres humains est une impérieuse nécessité. Quand les mesures de prévention ne parviennent pas à résoudre le problème ou à empêcher que la situation se détériore, et quand un État ne peut pas, ou ne veut pas, redresser la situation, des mesures interventionnistes de la part d'autres membres de la communauté des États dans son ensemble peuvent s'avérer nécessaires.134(*) Ces mesures coercitives peuvent être d'ordre politique, économique ou judiciaire et, dans les cas extrêmes, elles peuvent également comprendre une action militaire. L'un des principes premiers, en matière de réaction comme en matière de prévention, est qu'il faut toujours envisager les mesures les moins intrusives et coercitives avant celles qui le sont plus.

Le fait que les mesures de prévention agissant au niveau des causes n'aient pas réussi à écarter ou à limiter une crise humanitaire ou un conflit ne signifie pas nécessairement qu'une action militaire s'impose. Chaque fois que cela est possible, il faut examiner les mesures coercitives qui ne vont pas jusqu'à l'intervention militaire, en particulier divers types de sanctions d'ordre politique, économique et militaire135(*).

Des conditions rigoureuses devront être réunies avant que l'intervention militaire puisse être envisagée. S'agissant des mesures d'ordre politique, économique ou judiciaire, la barre peut être placée relativement bas, mais pour l'intervention militaire, il faut un seuil plus élevé. Aucune action militaire ne peut être défendable si les circonstances ne sont pas véritablement graves. Mais l'établissement de seuils ou de conditions « déclenchâtes » ne règle pas tout. Il y a en effet toute une série d'autres principes de précaution qui doivent être appliqués pour que l'intervention demeure tout à la fois défendable dans son principe, etréalisable et applicable dans la pratique136(*).

Dans des cas extrêmes et exceptionnels, la responsabilité de réagir peut signifier la nécessité d'engager une action militaire.

Le point de vue général était que ces circonstances exceptionnelles devaient être des cas où la violence est si manifestement « attentatoire à la conscience de l'humanité » ou bien qui représentent un danger si évident et immédiat pour la sécurité internationale qu'ils exigent une intervention coercitive d'ordre militaire137(*).

v Critères à satisfaire pour une intervention militaire

Il n'existe certes pas de liste unique universellement acceptée mais, de l'avis de la Commission, tous les critères de décision pertinents peuvent être succinctement ramenés aux six catégories suivantes : autorité appropriée, juste cause, bonne intention, dernier recours,proportionnalité des moyens et perspectives raisonnables.

1. L'élément autorité appropriée, à savoir qui est habilité à autoriser une intervention militaire

Le Conseil de sécurité a, en matière de paix et de sécurité, une responsabilité « principale », mais non unique ou exclusive. L'Article 10 confère à l'Assemblée générale des Nations Unies une responsabilité générale pour tout ce qui relève du domaine de compétence de l'ONU, et l'Article 11 lui confère une responsabilité subsidiaire en ce qui concerne précisément le maintien de la paix et de la sécurité internationale,138(*) encore qu'elle ne puisse faire que des recommandations, et non prendre des décisions à caractère contraignant.

Comparativement au Document final du Sommet mondial de 2005 dans son paragraphe 139 qui accorde au conseil de sécurité une responsabilité exclusive d'autorisation d'une intervention militaire ce qui n'est pas le cas pour la CIISE qui soutient que le conseil de sécurité n'a que la responsabilité principale et non exclusive139(*).

2. Les critères décisifs : une juste cause

La Commission considère que les dérogations au principe denon-intervention doivent être limitées. L'intervention militaire à des fins de protectionhumaine doit être considérée comme une mesure exceptionnelle et extraordinaire et, pourqu'elle soit justifiée, il faut qu'un préjudice grave et irréparable touchant des êtres humainssoit en train ou risque à tout moment de se produire140(*).

3. Bonne intention

Le but primordial de l'intervention doit être de faire cesser ou d'éviter des souffrances humaines. Aucun emploi de la force militaire qui viserait dès le départ, par exemple, à modifier des frontières ou à promouvoir la revendication d'autodétermination de tel ou tel groupe combattant ne saurait se justifier. Le renversement d'un régime n'est pas, en soi, un objectif légitime, encore que le fait d'ôter à un régime sa capacité de nuire à son propre peuple puisse être essentiel pour mener à bien la mission de protection, étant entendu queles mesures nécessaires pour y parvenir varieront d'un cas à l'autre.

L'une des façons de contribuer à satisfaire le critère de la « bonne intention » consiste à veiller à ce que les interventions militaires aient toujours un caractère collectif ou multilatéral, plutôt que d'être le fait d'un seul pays. Un autre moyen consiste à déterminer si, et dans quelle mesure, l'intervention est effectivement soutenue par la population qui est censée en bénéficier. Un autre moyen encore est de déterminer si, et dans quelle mesure,l'opinion des autres pays de la région a été prise en compte et est favorable à l'intervention141(*).

4. Dernier recours

Toutes les voies diplomatiques et non militaires de prévention ou de règlement pacifique des crises humanitaires doivent avoir été explorées. La responsabilité de réagir avec la coercition militaire ne saurait être justifiée tant que la responsabilité de prévenir n'a pas été pleinement accomplie. Il ne s'ensuit pas nécessairement que chacune de ces démarches doivent avoir été concrètement essayée et avoir échoué : souvent, le temps fait tout simplement défaut pour que ce processus puisse se dérouler normalement. Mais cela signifie que l'on doit avoir des motifs raisonnables de penser qu'en tout état de cause, si telleou telle mesure avait été tentée, elle n'aurait pas donné le résultat escompté142(*).

5. Proportionnalité des moyens

Dans son ampleur, dans sa durée et dans son intensité, l'intervention militaire envisagée doit correspondre au minimum nécessaire pour atteindre l'objectif humanitaire poursuivi. Les moyens doivent être à la mesure des fins et en rapport avec l'ampleur de la provocation initiale. L'effet produit sur le système politique du pays visé doit lui aussi être limité à ce qui est strictement nécessaire pour réaliser le but de l'intervention. Les répercussions pratiques de ces restrictions peuvent être matière à débat dans chaque cas, mais les principes en jeu sont suffisamment clairs.

Il va sans dire que toutes les règles du droit international humanitaire doivent être rigoureusement respectées en pareille situation. L'on pourrait même considérer que, dans la mesure où une intervention militaire à des fins de protection humaine correspond à une forme d'action militaire nettement plus circonscrite et ciblée qu'une guerre totale, elledevrait être assortie de normes encore plus strictes143(*).

6. Perspectives raisonnables

Une action militaire ne peut être justifiée que si elle a des chances raisonnables de réussir, c'est-à-dire de faire cesser ou d'éviter les atrocités ou souffrances ayant motivé l'intervention. L'intervention militaire n'est pas justifiée si elle n'assure pas effectivement la protection voulue, ou si elle aboutit à des conséquences pires que celles de l'inaction. En particulier, une action militaire à des fins de protection humaine limitée ne saurait être justifiée si, ce faisant, elle déclenche un conflit plus vaste144(*).

c. La responsabilité de reconstruire

La responsabilité de protéger implique non seulement la responsabilité de prévenir et de réagir mais aussi celle de compléter la réaction et de reconstruire. En conséquence, si une intervention militaire est décidée parce qu'un État s'est effondré ou a renoncé à ses capacités et pouvoirs d'assumer sa propre « responsabilité de protéger » il faut qu'il y ait un véritable engagement à contribuer à ramener une paix durable et à promouvoir la bonne gouvernance et un développement durable. Les agents internationaux doivent rétablir la sécurité et l'ordre public, en partenariat avec les autorités locales, le but étant de transférer progressivement à ces dernières le pouvoir et la responsabilité de reconstruire.

Assurer la reconstruction et le redressement durable suppose que des ressources, financières et autres, soient engagées en quantités suffisantes, ainsi qu'une coopération étroite avec la population locale, et peut signifier aussi le maintien des intervenants dans le pays pendant un certain temps après que les buts initiaux de l'intervention ont été atteints145(*).

SECTION 2. L'APPLICATION DE LA RESPONSABILITE DE PROTEGER DANS LA CRISE IVOIRIENNE

Dans la présente section, nous allons d'une part analyser le conflit postélectoral ivoirien et les différentes violations des droits de l'homme visées par la responsabilité de protéger (§1) et d'autre le déclenchement de la responsabilité de protéger dans la crise postélectorale ivoirienne de 2010-2011.

§1. LE CONFLIT POSTELECTORAL IVOIRIEN ET LES VIOLATIONS DES DROITS HUMAINS VISES PAR LA RESPONSABILITE DE PROTEGER

A. Origine de conflit

Il s'agit ici de répondre à la question de savoir quel est l'élément déclencheur du conflit postélectoral de 2010-2011 ? C'est ainsi, face à l'impasse politique liée à l'application des différents accords de paix signés depuis la tentative de coup d'Etat en septembre 2002, les principaux acteurs de la crise entament un « dialogue direct » avec la facilitation du Président burkinabé Blaise COMPAORE. La signature en mars 2007 de l'Accord Politique de Ouagadougou (APO) par le Président Laurent GBAGBO et le Secrétaire Général des Forces Nouvelles Guillaume SORO, a permis d'apaiser le climat socio-politique et d'aboutir à l'organisation des élections présidentielles en octobre et novembre 2010146(*).

Cependant, ces dernières prendront une allure dramatique après les résultats du second tour ayant opposé le Président sortant Laurent Gbagbo à Alassane Ouattara, candidat de l'opposition. La Commission Electorale Indépendante proclame Alassane Ouattara vainqueur face au Président sortant, tandis que le Conseil Constitutionnel rend une décision proclamant Laurent GBAGBO vainqueur. En dépit des différentes médiations (CEDEAO et Union Afrique) visant à convaincre Laurent GBAGBO de céder le pouvoir au Président élu Alassane OUATTARA, la crise va progressivement se militariser, plongeant le pays dans un conflit qui va durer de décembre 2010 à avril 2011. La Côte d'Ivoire va connaitre ainsi une des pages les plus tristes de son histoire avec plus de 3000 morts, des milliers de blessés et environ un million de personnes fuyant les violences déplacées à l'intérieur du pays147(*).

Le 4 décembre 2010, Laurent GBAGBO prête serment devant le Conseil Constitutionnel et met en place par la suite un gouvernement. Retranché à l'hôtel du Golf avec ses collaborateurs et alliés du Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP), Alassane OUATTARA prête également serment le 5 décembre 2010, affirmant ainsi son statut de nouveau chef d'Etat. Il forme également un gouvernement et nomme SORO K. Guillaume, Secrétaire Général des Forces Nouvelles, comme Premier Ministre et Ministre de la défense. Le Président élu procède à la nomination d'un nouveau directeur général à la tête de la Radiodiffusion Télévision Ivoirienne (RTI). Le RHDP appelle ainsi la population, le 14 décembre 2010, à marcher sur la RTI en vue d'installer le nouveau directeur. Le camp de Laurent GBAGBO considère cet appel comme une manoeuvre de déstabilisation. Ainsi, des moyens militaires sont mis en place pour empêcher le déferlement des militants du RHDP vers la RTI. Le 16 décembre 2010, date prévue de la marche, les manifestants du RHDP sont violemment réprimés par les éléments des Forces de défense et de sécurité (FDS) restés fidèles à Laurent GBAGBO. Cette répression s'est soldée par plusieurs morts (une trentaine), des femmes violées et de nombreux blessés graves. Les faits documentés par les défenseurs des droits de l'Homme montrent que les personnes ciblées l'ont été à cause de leur identité ethnique/religieuse ou de leur appartenance politique148(*).

B. Les violations des droits de l'homme et du DIH visés par la responsabilité de protéger dans la crise poste électorale de 2010-2011 en Côte d'Ivoire

a. Les différentes violations des droits de l'homme et de droits international humanitaire

Lorsqu'il ne faisait plus aucun doute que Laurent Gbagbo n'avait aucune intention d'accepter les résultats des élections pourtant reconnus par la communauté internationale et donnant Alassane OUATTARA vainqueur, les forces de sécurité de Laurent Gbagbo sont passées à l'action dans le but de mater l'opposition. Chaque fois que les partisans d'Alassane OUATTARA sont descendus dans les rues d'Abidjan pour protester, ceux-ci ont été sévèrement réprimés et d'une manière particulièrement brutale ; le 16 décembre lors d'une marche sur la télévision contrôlée par Gbagbo, la RTI (Radiotélévision ivoirienne)149(*).

Les forces de sécurité ont tiré à balles réelles et lancé des grenades à fragmentation, tuant de nombreux manifestants et en blessant davantage. La répression s'est intensifiée avec l'enlèvement et la disparition de responsables locaux membres de la coalition d'Alassane Ouattara au sein de quartiers fidèles à celui-ci. Les corps de nombre d'entre eux ont été retrouvés plus tard par leurs proches à la morgue, criblés de balles. Les forces de sécurité ou les milices pro-Gbagbo s'en sont également pris aux femmes, les violant en raison de leur activisme politique en soutien à Alassane Ouattara ou de celui de leur mari, parfois abattu sous leurs yeux.

Pendant cette période, les principaux responsables de ces crimes étaient des unités d'élite étroitement liées à Laurent Gbagbo, dont la Garde républicaine, le CECOS (Centre de commandement des opérations de sécurité, une unité d'intervention rapide), la BAE (Brigade anti-émeute) et la CRS (Compagnie républicaine de sécurité, une unité de police d'élite). Dans certains cas, ces unités ont travaillé main dans la main avec les milices pro-Gbagbo, et notamment la Fédération estudiantine et scolaire de Côte d'Ivoire (FESCI), association étudiante de tradition violente, et les Jeunes patriotes, mouvement de la jeunesse fondé et dirigé par Charles Blé Goudé, nommé ministre de la Jeunesse par Laurent Gbagbo en décembre 2010.

En face, les Forces nouvelles contrôlant la moitié nord du pays se sont livrées à des actes d'intimidation et de violence à l'encontre des partisans de Laurent Gbagbo et ont commis des violences sexuelles contre des femmes. Si les violences commises à cette époque par les Forces nouvelles n'ont pas atteint le niveau de celles commises par le camp Gbagbo, elles présageaient toutefois des crimes graves que les Forces républicaines commettront à un stade plus avancé de la crise150(*).

Lorsque les partisans d'Alassane Ouattara sont descendus dans les rues pour manifester aux lendemains du second tour des élections du 28 novembre, les forces de sécurité de Laurent Gbagbo les ont contrés de manière brutale et souvent fatale ;les forces de sécurité commençaient souvent mais pas systématiquement par des tirs de grenades lacrymogènes et des coups de feu en l'air. Au bout de quelques minutes, cependant, elles utilisaient des armes à feu mortelles telles que des fusils kalachnikov, des pistolets automatiques et des grenades à fragmentation sans que le comportement agressif ou la violence excessive des manifestants ne nécessite de telles mesures. Les forces de sécurité ont continué de tirer sur les manifestants alors que ceux-ci fuyaient, en tuant des dizaines et en blessant beaucoup d'autres.

Les victimes interrogées par HumanRights Watch ont témoigné de la dangerosité particulière des grenades à fragmentation, notamment un jeune homme dont le petit frère a été tué par une grenade :

«Nous avons survécu à des violences politiques en 2000, en 2002, en 2004, mais jamais, durant toutes ces années, les forces de sécurité n'ont utilisé des grenades comme celles-ci contre nous. Jamais... Il n'y a rien de pire. Elles font tellement de blessés et de morts parce que les éclats partent dans tous les sens. Nous mettons nos mains en l'air, nous montrons que nous sommes pacifiques, et ils répondent en tirant ces grenades»151(*).

Outre la répression des manifestations, les forces de sécurité de Laurent Gbagbo ont assassiné et enlevé des responsables politiques locaux et leurs alliés activistes de la société civile. HumanRights Watch a documenté plus de dix cas de disparitions forcées ou d'exécutions sommaires survenus autour de la marche du 16 décembre. Les preuves réunies laissent fortement penser que ces exactions étaient le résultat d'une campagne organisée visant à sélectionner, rechercher et enlever des personnes spécifiques liées à la coalition politique d'Alassane Ouattara. Citons notamment les faits suivants :

Ø Au petit matin du 14 décembre, un dirigeant actif de quartier du Mouvement des forces de l'avenir (MFA), parti au sein de la coalition du RHDP, a été contraint par trois hommes armés en civil de monter dans une Mercedes grise. Des témoins ont déclaré à HumanRights Watch qu'ils avaient pu entendre les agresseurs demandés où se trouvaient plusieurs autres leaders du MFA à Abobo. Un appel passé ce même jour au téléphone de l'homme enlevé a été pris par une personne qui a répondu : « [Votre parent] fait partie du groupe qui tente de déstabiliser le parti au pouvoir. » Son corps a été retrouvé plus tard dans une morgue152(*).

Ø Un membre dirigeant du MFA a expliqué à HumanRights Watch que plusieursautres dirigeants du parti avaient « disparu »les corps d'au moins deux d'entreeux ont été par la suite identifiés, portant des blessures par balle, dans unemorgue. Deux militants de quartier pour le parti de l'UDCI (l'Union démocratiquede Côte d'Ivoire), faisant également partie de la coalition du RHDP, ont égalementété victimes de disparition le 9 décembre leurs corps ont été retrouvés à lamorgue de Yopougon plus d'une semaine plus tard153(*).

Ø Le 18 décembre, deux membres du groupe de la société civile Alliance pour lechangement (APC) qui est lié au parti de Ouattara et qui a été actif dans lamobilisation des électeurs ont été enlevés sous les yeux de témoins en début desoirée dans le quartier de CocodyAngré. Un témoin a expliqué à HumanRightsWatch que les gens qui se trouvaient dans un restaurant à proximité ont étécontraints de se coucher par terre tandis que des hommes armés obligeaient lesdeux militants à monter à bord d'un 4x4. Tous les deux sont présumés morts154(*).

Ø Six jours plus tard, un autre dirigeant de l'APC a échappé de peu à un enlèvement àAbobo vers 7h30 du matin, lorsqu'un 4x4 Mitsubishi vert foncé s'est dirigé vers lui àtoute vitesse et cinq hommes armés, dont trois en treillis, en sont sortis, l'appelantpar son nom et lui criant de monter dans la voiture. Un témoin a indiqué à HumanRights Watch que plusieurs de ces hommes portaient un béret rouge de la Garderépublicaine. Selon la victime potentielle, alors que les hommes tentaient de lecontraindre à monter dans la voiture, il a vu huit photographies dont la sienne etcelles d'autres personnes qu'il a reconnues comme étant des membres de ladirection du RHDP au niveau de la communauté sur le plancher de la voiture155(*).

Attaques de mosquées, de musulmans et d'imams

À plusieurs reprises pendant la crise, les forces pro-Gbagbo, y compris les unités de force de sécurité d'élite et les milices, ont attaqué des mosquées et exécuté des imams de manière ciblée. Ni l'ancien Président Gbagbo, ni ses militaires ou dignitaires n'ontdénoncé ces attaques à l'encontre d'individus et d'institutions religieuses. Dans un pays divisé relativement équitablement entre musulmans et chrétiens, la base politique d'Alassane Ouattara des groupes ethniques du nord du pays était essentiellement, mais assurément pas exclusivement, musulmane, tandis que les partisans et militants de Laurent Gbagbo étaient principalement chrétiens. Comme pour l'ethnicité, toutefois, la religion est étroitement liée à la politique en Côte d'Ivoire, et il est souvent difficile de démêler la motivation première de certaines attaques. Pour la grande majorité des Ivoiriens, il n'existe aucune division, ni hostilité inter-religieuse, mais avec l'intensification de la crise, l'association entre Alassane Ouattara et les partisans musulmans a entraîné un grand nombre d'attaques à l'encontre d'institutions et de leaders musulmans. De telles attaques pourraient bel et bien être considérées comme des crimes de guerre en vertu du Statut de Rome et du droit international humanitaire156(*).

Les premières attaques de ce genre se sont déroulées le 17 décembre. Deux mosquées d'Abobo ont été la cible de grenades propulsées par lance-roquettes à l'heure de la prière du vendredi, et une autre mosquée a été attaquée à Bassam, une ville côtière à une vingtaine de kilomètres d'Abidjan. Un témoin des attaques d'Abobo a raconté à HumanRights Watch ce qu'il avait vu :

«Vers midi, je suis allé à la mosquée la prière commence à 13 heures, mais nous avons généralement une réunion une heure avant. J'ai vu desmilitaires à proximité et quelques voitures un camion et un 4x4. Peu après mon arrivée, j'ai entendu des coups de feu provenant de l'extérieur. La mosquée était attaquée avec des armes lourdes. J'ai entendu quelqu'un crier : « En position, en position... Feu ! Feu ! », comme s'il y avait une guerre. Et puis, `boom.' La première roquette a traversé la mosquée et a explosé, formant un énorme trou près de la salle des femmes, détruisant le mur. Une autre a transpercé la mosquée de part et d'autre. La mosquée était pleine de personnes qui se sont mises à courir. J'ai entendu cinq booms ; je crois que quatre roquettes se sont abattues sur la mosquée.

Avant l'attaque, ils n'ont pas lancé de gaz lacrymogènes, ni ordonné l'évacuation du bâtiment. Alors que je sortais en courant, j'ai vu des hommes en tenue noire tirer dans tous les sens. J'ai couru jusque chez moi ; ma maison se trouve de l'autre côté de la rue, à une quinzaine de mètres seulement. De la fenêtre, j'ai vu les hommes armés capturer un partisan du RDR de 24 ans, ainsi qu'un Burkinabé de 24 ans. Ils ont tenté de fuir, mais la police les a attrapés et les a frappés, puis les a amenés de force dans le camion. J'ai l'impression que la police les a attrapés parce qu'ils étaient les premiers jeunes sur qui elle tombait ; je ne crois pas qu'elle les recherchait en particulier. Les policiers les ont frappés jusqu'à ce qu'ils s'effondrent, leur ont donné des coups de pied et ordonné de se relever. J'ai entendu les policiers hurler : « Nous allons tous vous tuer dans ce quartier, vous êtes tous des ADO initiales d'Alassane Ouattara. » [...] Les familles les ont cherchés partout dans les hôpitaux, les commissariats, les morgues. Je passe voir leurs parents tous les jours ; à chaque fois on parle de leurs filset ils se mettent à pleurer157(*).

Les mois de tensions et de violences en Côte d'Ivoire ont dégénéré en conflit armé dès mars 2011, période à laquelle les Forces républicaines ont lancé une offensive militaire dans l'extrême Ouest. Si les premières villes ont été prises dès fin février, le combat intense entre les forces armées a commencé mi-mars dans l'extrême Ouest et fin mars à Abidjan. De graves exactions ont continué d'être commises dans les deux camps, jusqu'aux derniers jours des combats début mai, soit près d'un mois après l'arrestation de Laurent Gbagbo, le 11 avril.

Dans l'extrême ouest du pays, alors qu'ils battaient en retraite, des groupes de miliciens et de mercenaires fidèles à Laurent Gbagbo ont perpétré des massacres et des meurtres généralisés dans un dernier élan de violence à l'encontre des Ivoiriens du Nord et des immigrés ouest-africains. À Abidjan, les forces de sécurité ralliées à Laurent Gbagbo ont bombardé aveuglément des zones civiles, tirant avec des armes lourdes sur des marchés et des quartiers. Les groupes de milices pro-Gbagbo ont attaqué des habitations et monté des points de contrôle rapprochés, tuant des centaines de partisans supposés d'Alassane Ouattara d'une manière effroyablement brutale. Ces événements ont marqué l'acte ultime de ce qui pourrait être qualifié de crimes contre l'humanité perpétrés par les forces placées sous le contrôle de Laurent Gbagbo, de Charles Blé Goudé et de leurs proches alliés158(*).

Quant aux Forces républicaines qui s'emparaient du pays, elles ont laissé dans leur sillage des morts, des femmes violées et des villages en cendres. Dans l'extrême Ouest, les forces d'Alassane Ouattara ont abattu des vieillards incapables de fuir les combats. Des femmes de Duékoué ont dû regarder les soldats d'Alassane Ouattara traîner leurs maris, leurs frères et leurs fils hors de leurs maisons et les exécuter. Après avoir pris le contrôle d'Abidjan, les Forces républicaines ont tué au moins 149 individus et torturé ou traité de manière inhumaine un plus grand nombre encore de personnes en détention. Au minimum, ces actes constituent des crimes de guerre aux termes du droit international. Mais étant donné l'étendue et la nature parfois organisée de ces actes, ceux-ci peuvent très certainement être qualifiés de crimes contre l'humanité.

b. Type de conflit connu dans cette crise postélectorale de la cote d'ivoire

Il s'agit de répondre à la question de savoir quel type de conflit armé qu'a connu la Côte d'Ivoire durant cette période poste électorale opposant ainsi la force qui était fidèle à Laurent GBAGBO et la force de Ouattara. Il s'agit bien évidemment de conflit armé non international, l'article 3 commun aux Conventions de Genève de 1949 s'applique en cas de conflit armé ne présentant pas un caractère international et surgissant sur le territoire de l'une des Hautes Parties contractantes.159(*) Les conflits armés ne présentant pas un caractère international sont donc ceux dans lesquels l'une au moins des parties impliquées n'est pas gouvernementale. Selon les cas, les hostilités se déroulent soit entre un (ou des) groupe(s) armés et des forces étatiques, soit uniquement entre des groupes armés160(*).

Dans l'affaire DUSKO TADICle tribunal estime qu'un conflit armé non international existe, chaque fois qu'il y a recours à la force armée entre les autorités gouvernementales et des groupes armés organisés ou entre de tels groupes au sein d'un Etat.161(*)Le conflit arme non international est synonyme de «guerre civile» ; aux fin de la résolution de l'institut de droit international, Aux fins de la présente Résolution, on entend par "guerre civile" les conflits armés de caractère non interétatique, conflits qui surgissent sur le territoire d'un Etat et qui mettent aux prises : le gouvernement établi avec un ou plusieurs mouvements insurrectionnels qui visent, soit au renversement du gouvernement ou du régime politique, économique ou social de 1'Etat, soit à la sécession ou à 1'autonomie d'une partie de cet Etat ; deux ou plusieurs groupes qui, en 1'absence de tout gouvernement établi, se disputent le pouvoir de 1'Etat. Ne sont pas des guerres civiles au sens de cette résolution : les troubles localisés ou les émeutes ; les conflits armés entre des entités politiques qui sont séparées par une ligne internationale de démarcation ou qui, pendant une durée prolongée, ont existé en fait comme des Etats, ni les conflits entre une telle entité et un Etat ; les conflits de décolonisation162(*).

Le conflit armé non international se caractérise par l'affrontement opposant les forces armées d'un Etat à des forces armées dissidentes ou rebelles. Le droit applicable durant de tels conflits a longtemps été considéré comme étant une question purement interne aux Etats. L'article 3 commun aux 4 Conventions de Genève de 1949 a permis de dégager pour la première fois certains principes fondamentaux devant être respectés durant de tels conflits.

Cependant, cet article ne définit pas la notion même de conflit armé non international. L'article 1 du Protocole II de 1977 a partiellement comblé cette lacune. Aux termes de celui-ci, est réputé conflit armé non international tout conflit qui se déroule sur le territoire d'un Etat, entre ses forces armées et des forces armées dissidentes ou des groupes armés organisés qui, sous la conduite d'un commandement responsable, exercent sur une partie de son territoire un contrôle tel qu'il leur permette de mener des opérations militaires continues et concertées et d 'appliquer le droit international établi par ce type de conflit163(*).

c. Qualifications des crimes commis dans la crise ivoirienne : crimes visés par la R2p
1. Crimes de guerre

La crise ivoirienne a été l'occasion d'une violation massive du principe de distinction qui prescrit aux parties au conflit de procéder en tout temps à la distinction entre les populations civiles et les combattants. Les seules attaques licites sont celles dirigées contre des combattants. En aucun cas, les populations civiles ne doivent être prises pour cibles, les civils constituent l'écrasante majorité des victimes desconflits armés1, alors même que le droit international humanitaire (DIH) stipule que les attaques ne peuvent être menées que contre des combattants et des objectifs militaires, et que les civils doivent être respectés164(*).Cette protection des personnes s'étendégalement aux biens, la distinction devant toujours être faite entre les biens de caractère civil et les objectifs militaires. Les attaques ne peuvent être dirigées que contre des objectifs militaires.

Chaque partie au conflit doit prendre toutes les précautions pratiquement possibles quant au choix des moyens et méthodes de guerre en vue d'éviter et, en tout cas, de réduire au minimum les pertes en vies humaines dans la population civile. Les opérations militaires doivent être conduites en veillant constamment à épargner la population civile et les biens de caractère civil. Ainsi les attaques par bombardement sont interdits, quels que soient les méthodes ou moyens utilisés165(*).

Contrairement à ces règles, les civils ont été souvent la cible des attaques dans le cadre de la crise ivoirienne. Le 3 mars 2011, la « Marche des femmes » qui avait rassemblé près de 3000 femmes au Carrefour Anador d'Aboboa fait l'objet d'une attaque à balles réelles par les FDS. Sept femmes et un jeune homme ont été tués. Les semaines avant, le marché du quartier Siaka Koné et plusieurs cours communes ont essuyé des bombardements qui ont causé des dizaines de morts et des centaines de blessés.

Entre le 6 et le 7 mars 2011, des représailles menées par le « Commando invisible » contre des Ebriés accusés de soutenir le camp Gbagbo dans le village d'Anonkoua-Kouté à Abobo, ont fait 15 morts et forcé au déplacement toute la population Ebrié du village.Le 8 avril 2011, le village Locodjroa subi une attaque par plusieurs petits groupes mixtes de miliciens et de mercenaires qui ont tué 7 personnes d'origine malinké par balles ou par le feu.

Aucune restriction n'était respectée ni dans le choix des méthodes de guerre, ni dans celui des armes. Dans l'arsenal des FDS, on a retrouvé des armes interdites dont des orgues de Staline (BM 21), une arme à 40 canons classée parmi les armes interdites parce que indiscriminée. Entre le 13 et le 22 mars 2011, des opérations de bombardements à l'arme lourde, menées par les FDS sur des quartiers et des populations accusés d'être favorables au candidat Ouattara à Yopougon,Williamsville, Attécoubé, Adjaméet Abobo, ont causé la mort d'au moins 40 personnes166(*).

2. Crimes contre l'humanité

Le principe d'humanité prescrit que les personnes civiles et les personnes combattantes ou hors de combat doivent être traitées avec humanité.

Or, dans le cadre de la crise post-électorale, les civils ont fait l'objet de nombreuses exactions, atteintes à la vie, à l'intégrité physique, traitements inhumains et dégradants. De façon générale, les parties prenantes n'ont pas cherché à épargner la vie des combattants et les violations des règles relatives au principe d'humanité ont été constantes167(*).

Il en est de même, en ce qui concerne le traitement dû aux personnes décédées. En effet, le droit international humanitaire prévoit que chaque fois que les circonstances le permettent, et notamment après un engagement, chaque partie au conflit doit prendre sans tarder toutes les mesures possibles pour rechercher, recueillir et évacuer les morts, sans distinction de caractère défavorable. La mutilation des cadavres est interdite. Les morts doivent être inhumés avec dignité et leurs tombes respectées et dûment entretenues afin de permettre l'identification du défunt. Chaque partie au conflit doit enregistrer toutes les informations disponibles avant l'inhumation et marquer l'emplacement des sépultures.

Aucune de ces prescriptions n'a été respectée. Les corps de combattants ou des civils ont été abandonnés dans les rues recevant parfois une sépulture sommaire de la part des parents ou d'âmesbienveillantes. La plupart du temps, les corps ont été enterrés dans des fosses communes pour les plus chanceux. Beaucoup d'autres corps ont été brûlés pour faire disparaître les preuves des violations. À Abobo, les FDS ont tenté sans succès d'enlever les corps des femmes tuées lors desmanifestations d'Anador. Après l'arrestation de Laurent Gbagbo le 11 avril 2011, par mesure desalubrité publique, les corps en putréfaction qui jonchaient les rues d'Abidjan ont été brûlés168(*).

§2. DECLANCHEMENT DE LA R2P EN COTE D'IVOIRE

Dans le cas pratique que nous examinons concernant la mise en oeuvre de la responsabilité de protéger en Côte d'Ivoire, nous tenons d'abord à signaler que, les crimes commis en Côte d'Ivoire dans la période poste électorale sont visés tous par la responsabilité de protéger tel que conçu par la CIISE et le paragraphe 138 du document final du sommet mondial de 2005, d'après nos analyses faite sur cette crise poste électorale, celle-ci c'est-à-dire la Côte d'Ivoire a manifestement manqué à son obligation de protéger sa propre population ou pour mieux dire, elle constitue elle-même auteur des crimes graves commis à l'encontre de sa propre population.

Le droit international consacre le droit à la protection de la vie humaine et de ladignité humaine contre le génocide, les crimes contre l'humanité et les crimes de guerre.Chaque Etat est obligé de prévenir ou de mettre fin rapidement au génocide, aux crimes contre l'humanité et aux crimes de guerre et qui surviennent sous sa juridiction ou son contrôle. Le génocide, les crimes contre l'humanité de grande ampleur ou les crimes de guerre de grande ampleur devraient être considérés comme une menace à la paix et à la sécurité internationales, conformément à l'article 39 de la Charte des Nations Unies.

Les organes compétents des Nations Unies devraient user de tous les pouvoirs statutaires dont ils disposent pour agir rapidement dans le but de mettre fin au génocide, aux crimes contre l'humanité de grande ampleur ou aux crimes de guerre de grande ampleur auxquels l'Etat sous la juridiction ou le contrôle duquel ils surviennent n'aurait pas mis un terme. Les mesures prises afin de mettre fin au génocide, aux crimes contre l'humanité de grande ampleur ou aux crimes de guerre de grande ampleur seront conformes au droit international. Si une action militaire est entreprise, son seul objectif sera de mettre fin au génocide, aux crimes contre l'humanité de grande ampleur, ou aux crimes de guerre de grande ampleur. Le droit international humanitaire sera strictement respecté pendant et après l'opération, de manière à assurer notamment la protection maximale de la population civile169(*)

C'est ainsi, face à ces atrocité, la responsabilité subsidiaire de la communauté internationale en matière de la protection de la personne humaine doit intervenir, c'est pourquoi, nous allons analyser aborder les efforts fournis par la communauté régionale et sou-régionale en vue de la résolution de conflit poste électorale de la Côte d'Ivoire en vue de mettre fin à des violations massive des droits de l'homme puis l'intervention de la communauté internationale (UNU dans le cadre du maintien de la paix).

A. Les efforts régionaux et sous-région dans le maintien de la paix dans la crise postélectorale de 2010-2011 en Côte d'ivoire

Dans le rapport de la CIISE, on reconnait qu'il est capital d'assurer une participation plus active des intervenants régionaux, qui ont une connaissance approfondie de la situation locale. Les conflits en gestation partagent certes un certain nombre de caractéristiques communes, mais chacun d'entre eux possède aussi, sous une forme ou une autre, des traits qui lui sont propres. Les intervenants régionaux sont souvent mieux placés pour comprendre la dynamique locale, encore que cela n'aille pas sans inconvénients, d'autant plus qu'ils ne sont souvent pas indifférents à l'issue d'un conflit meurtrier. La Commission recommande de mettre davantage de ressources au service des initiatives régionales et sous régionales de prévention des conflits, ainsi que pour favoriser la création de capacités propres à améliorer l'efficacité des organisations régionales et sous régionales dans les domaines du maintien de la paix, del'imposition de la paix et de l'intervention170(*).

Dans le cadre du maintien de la paix et de la sécurité africaine, il est créé au sein de l'Union Africaine le Conseil de paix et de sécurité (CPS) qui est un organe décisionnel permanent de l'Union Africaine pour la prévention , la gestion et le règlement des conflits, il constitue un système de sécurité collective et d'alerte rapide , visant à permettre une réaction rapide et efficace aux situations de conflit et de crise en Afrique, le protocole relatif à la création du conseil de paix et de sécurité a été adopte le 9 juillet 2002 à Durban (Afrique du sud) et entrée en vigueur 2003171(*).

Pour ce qui est de la situation de la cote d'ivoire, Le Conseil de paix et de sécurité a ainsi créé un panel d'expert pour la résolution de la crise, qui prenait des proportions alarmantes. Ce panel, présidé par le chef d'État mauritanien, Mohamed Ould Abdel Aziz, était composé des présidents du Tchad, de l'Afrique du Sud, de la Tanzanie et du Burkina Faso. Voici les conclusions du rapport élaboré par le panel d'experts : (1) miser sur un gouvernement d'union nationale présidé Alassane Ouattara ; (2) garantir une sortie digne à Laurent Gbagbo ; (3) désarmer les anciens rebelles et restructurer l'armée ; (4) restructurer le Conseil électoral indépendant (CEI) et le Conseil constitutionnel, et (5) créer une commission indépendante de « vérité, justice et réconciliation ». Les médiations se sont achevées avec le rapport communiqué par le panel d'expert, le 10 mars 2011, lors de la réunion extraordinaire de l'UA consacrée à la Côte d'Ivoire, dans lequel les parties étaient exhortées à se conformer aux recommandations précédemment énoncées dans un laps de temps déterminé, afin de parvenir à une solution pacifique à la crise postélectorale en Côte d'Ivoire. Le Conseil constitutionnel a proclamé Alassane Ouattara président de la République à la fin du mois de mai, après avoir étudié les recommandations de l'UA172(*).

Certains auteurs affirment que la crise postélectorale ivoirienne peut être considérée comme l'un des cas les plus complexes que le continent africain ait connu durant la dernière décennie. La probabilité que les décisions de l'UA soient appliquées diminuait à mesure que la catastrophe humanitaire s'aggravait, que le rôle des Nations Unies dans la gestion du conflit prenait de l'importance (partiellement en raison des accusations de Gbagbo contre l'intervention internationale) et que les acteurs abandonnaient toute volonté de négocier et de céder173(*).

Pour les mécanismes sous régionaux du maintien de la paix, nous avons la CEDEAO qui, en étroite collaboration avec l'UA, va de nouveau entreprendre des actions dans le cadre de la médiation pour faire accepter Laurent Gbagbo le départ en douceur du pouvoir. La possibilité de recourt aux armes semble écartée. Le 24 décembre 2010, elle organise un sommet extraordinaire à Abuja. Face à l'intransigeance de Gbagbo à demeurer à la tête du pays, l'organisation sous régionale menace d'utiliser « une force légitime » en recourant à l'ECOMOG pour le forcer de céder le fauteuil présidentiel. Elle mandate les présidents Boni Yayi du Bénin, Ernest Koroma de Sierra Leone, et Pedro Pires du Cap-Vert pour régler cette crise. Ils rencontreront Gbagbo et Ouattara le 28 décembre et le 3 janvier où RailaOdinga, Premier ministre kényan et envoyé de l'UA les accompagnera. Cette nouvelle médiation de la CEDEAO se solde par un échec. La force militaire est désormais la seule à faire entendre sa voix sur le terrain. Déjà, des affrontements opposant le « Commando Invisible » d'Ibrahim Coulibaly aux troupes loyales à Laurent Gbagbo depuis le 12 janvier 2011 se sont généralisés sur l'ensemble du pays. Avec la généralisation de cette guerre, une grande partie des troupes de l'armée abandonnent leurs postes. Les FRCI restées fidèles à Gbagbo se repositionnent autour du palais présidentiel, aux plateaux et la résidence présidentielle à Cocody174(*).

B. Intervention de communauté internationale dans le cadre du maintien de la paix en Côte d'ivoire

Du fait de la nécessité d'un meilleur partage du fardeau du maintien de la paix et de la sécurité dans le monde et en particulier en Afrique, le Conseil de sécurité encourage le partenariat avec les organisations régionales. En effet, s'il est indéniable que l'UA et les organisations sous régionales telles que la CEDEAO ont un rôle important à jouer dans la promotion de la paix et de la sécurité régionales, le Conseil de Sécurité des Nations Unies conserve la responsabilité première du maintien de la paix et de la sécurité internationales. A ce titre, le Conseil de sécurité conscient de cette lourde tâche et de la prolifération des conflits internes qui sévissent dans le monde et plus particulièrement en Afrique depuis les années 1990, est parfois obligé de déléguer ses pouvoirs aux organisations régionales et sous régionales qui, bénéficient en retour du soutien de celui-ci.

En effet, cette politique du Conseil de sécurité a été appliquée dans la crise ivoirienne faisant prévaloir ainsi, le Chapitre VIII de la Charte des Nations Unies.175(*) Par ailleurs, la crise ivoirienne a suscité la collaboration entre le Conseil de sécurité, l'UA et la CEDEAO. Une collaboration s'inscrivant dans le cadre du chapitre VIII de la charte de Nations Unies et une collaboration permettant une légitimation des forces françaises de Licorne et de la CEDEAO déployées en Côte d'Ivoire. Ainsi, l'article 52 dispose qu' « Aucune disposition de la présente Charte ne s'oppose à l'existence d'accords ou d'organismes régionaux destinés à régler les affaires qui, touchant au maintien de la paix et de la sécurité internationales, se prêtent à une action de caractère régional, pourvu que ces accords ou ces organismes et leur activité soient compatibles avec les buts et les principes des Nations Unies. Les Membres des Nations Unies qui concluent ces accords ou constituent ces organismes doivent faire tous leurs efforts pour régler d'une manière pacifique, par le moyen desdits accords ou organismes, les différends d'ordre local, avant de les soumettre au Conseil de sécurité. Le Conseil de sécurité encourage le développement du règlement pacifique des différends d'ordre local par le moyen de ces accords ou de ces organismes régionaux, soit sur l'initiative des Etats intéressés, soit sur renvoi du Conseil de sécurité.»176(*) Le chapitre VIII de la charte définit les relations entre accords régionaux et organismes régionaux et le Conseil de sécurité.

a. la résolution 1975 du Conseil de Sécurité adopté à l'unanimité concernant la crise politique en Côte d'Ivoire177(*)

Le conseil de sécurité va ainsi prendre une résolution face aux atrocités qui ont été commises en Côte d'Ivoire, il s'agit de la résolution 1975 du 30 mars 2011 ; quel est le contenu de cette résolution ?

Aux termes de cette résolution adoptée à l'unanimité de ses 15 membres, le conseil de sécurité, réaffirme qu'il souhaite vivement que la crise postélectorale soit réglée de manière pacifique, décide d'imposer à Gbagbo et aux membres de son entourage des sanctions concernant un gel de leurs devoirs financiers et une interdiction de voyager. Le conseil de sécurité condamne la décision de Laurent GBAGBO de ne pas accepter la solution politique globale ; il assure en outre l'opération des Nations Unies en Côte d'Ivoire (ONUCI) de son plein appui, et rappelle qu'il l'a autorisée, dans le cadre de l'exécution impartiale de son mandat, à utiliser tous les moyens nécessaire pour protéger les civils y compris, contre l'utilisation d'arme lourdes.

Dans cette résolution, dans le 2e paragraphe on rappelle le respect de la souveraineté, de l'indépendance, de l'intégrité territoriale et de l'unité de la Côte d'Ivoire, et rappelant l'importance des principes de bon voisinage, de non-ingérence et de coopération régionale, ce qui signifie le respect de l'article 2 paragraphe 7 de la Charte,

Étant donné que dans la mise en oeuvre de la responsabilité de protéger, dans le cadre du premier des trois moments triptyques prévu dans le rapport de la CIISE, c'est tout d'abord prévenir ; dans ce cadre, le conseil de sécurité souhaite vivement que la crise postélectorale en Côte d'Ivoire soit réglée de manière pacifique, et qu'elle exige une solution politique globale qui préserve la démocratie et la paix et favorise la réconciliation durable de tous les Ivoiriens.

Toutes les tentative de la résolution de la crise postélectorale de la Côte d'Ivoire n'ont pas réussi ; le conseil de sécurité Condamnant les graves exactions et autres violations du droit international, notamment le droit international humanitaire, le droit international des droits de l'homme et le droit international des réfugiés, perpétrées, réaffirmant la responsabilité qui incombe au premier chef à chaque État de protéger les civils et réitérant qu'il incombe avant tout aux parties à tout conflit armé de prendre toutes mesures possibles pour assurer la protection des civils.

C'est ainsi, en vertu du chapitre VII de la charte, le conseil de sécurité a pris cette résolution en 13 points :

1. Exhorte toutes les parties et tous acteurs ivoiriens à respecter la volonté du peuple et l'élection d'Alassane Dramane Ouattara à la présidence de la Côte d'Ivoire, qu'ont reconnue la CEDEAO, l'Union africaine et le reste de la communauté internationale, se déclare profondément préoccuper par la récente escalade de violence et exige qu'il soit immédiatement mis fin à la violence à l'encontre des civils, dont les femmes, les enfants et les déplacés;

2. Demande à toutes les parties d'oeuvrer à la solution politique d'ensemble de l'Union africaine et, à cet égard, se félicite de la décision prise le 10 mars par le Sommet du Conseil de paix et de sécurité de l'Union africaine de nommer un haut représentant chargé de la mise en oeuvre de la solution politique d'ensemble et engage toutes les parties à coopérer pleinement avec lui;

3. Condamne la décision de M. Laurent Gbagbo de ne pas accepter la solution politique globale proposée par le Groupe de haut niveau créé par l'Union africaine, et l'exhorte à se retirer immédiatement;

4. Demande instamment à toutes les institutions d'État ivoiriennes, notamment les Forces de défense et de sécurité de la Côte d'Ivoire (FDS-CI), de se soumettre à l'autorité que le peuple ivoirien a conférée au Président Alassane Dramane Ouattara, condamne les attaques, les menaces, les actes d'obstruction et de violence perpétrés par les FDS-CI, les milices et les mercenaires contre le personnel des Nations Unies, qu'ils empêchent de protéger les civils, de constater les exactions et les violations des droits de l'homme et d'aider à mener les enquêtes à ce sujet, souligne que les personnes responsables de ces crimes au regard du droit international doivent répondre de leurs actes et engage toutes les parties, en particulier les partisans et les forces de M. Gbagbo, à coopérer pleinement avec l'Opération des Nations Unies en Côte d'Ivoire (ONUCI) et à cesser d'entraver les activités que l'ONUCI mène en exécution de son mandat;

5. Redit qu'il condamne fermement tous les actes de violence perpétrés à l'encontre de civils, notamment les femmes, les enfants, les déplacés et les ressortissants étrangers, ainsi que les autres violations des droits de l'homme, en particulier les disparitions forcées, les exécutions extrajudiciaires, le meurtre et les mutilations d'enfants et les viols et autres formes de violence sexuelle;

6. Rappelle, tout en soulignant qu'il l'a assurée de son plein appui à cet égard, qu'il a autorisé l'ONUCI, dans le cadre de l'exécution impartiale de son mandat, à utiliser tous les moyens nécessaires pour s'acquitter de la tâche qui lui incombe de protéger les civils menacés d'actes de violence physique imminente, dans la limite de ses capacités et dans ses zones de déploiement, y compris pour empêcher l'utilisation d'armes lourdes contre la population civile, et prie le Secrétaire général de le tenir informé de manière urgente des mesures prises et des efforts faits à cet égard;

7. Demande à toutes les parties de coopérer pleinement aux opérations de l'ONUCI et des forces françaises qui la soutiennent, notamment en garantissant leur sécurité et leur liberté de circulation avec accès immédiat et sans entrave sur tout le territoire de la Côte d'Ivoire afin de leur permettre d'accomplir pleinement leur mission;

8. Engage toutes les parties à coopérer pleinement avec la commission d'enquête internationale indépendante chargée par le Conseil des droits de l'homme le 25 mars 2011 d'enquêter sur les faits et circonstances entourant les allégations de graves violations des droits de l'homme perpétrées en Côte d'Ivoire à la suite de l'élection présidentielle du 28 novembre 2010, et prie le Secrétaire général de lui communiquer ce rapport, ainsi qu'à d'autres organismes internationaux compétents;

9. Condamne l'utilisation de la Radiodiffusion Télévision Ivoirienne (RTI) et d'autres médias pour inciter à la discrimination, à l'hostilité, à la haine et à la violence, y compris contre l'ONUCI, ainsi que les actes d'intimidation et de violence à l'encontre de journalistes, et demande la levée de toutes les restrictions imposées à l'exercice du droit à la liberté d'expression en Côte d'Ivoire;

10. Se déclare vivement préoccupé par le nombre croissant de déplacés et de réfugiés ivoiriens, en particulier au Libéria, du fait de la crise en Côte d'Ivoire, et exhorte toutes les parties ivoiriennes à coopérer pleinement avec les organismes des Nations Unies et les autres acteurs qui s'emploient à améliorer l'acheminement de l'aide humanitaire destinée aux réfugiés et aux déplacés;

11. Réaffirme son exigence formulée de longue date tendant à voir M. Laurent Gbagbo lever le siège du Golf Hotel sans délai;

12. Décide d'adopter des sanctions ciblées à l'encontre des personnes qui répondent aux critères établis dans la résolution 1572 (2004) et les résolutions postérieures, notamment les personnes qui font obstacle à la paix et à la réconciliation en Côte d'Ivoire et aux activités de l'ONUCI et des autres acteurs internationaux en Côte d'Ivoire et qui commettent de graves violations des droits de l'homme et du droit international humanitaire, décide en conséquence que les personnes figurant sur la liste à l'annexe I de la présente résolution seront soumises aux mesures concernant les opérations financières et les voyages imposées aux paragraphes 9 et 11 de la résolution 1572 (2004), et réaffirme son intention d'envisager d'autres mesures, selon qu'il conviendra, y compris des sanctions ciblées contre les membres des médias qui répondent aux critères établis pour ces sanctions, notamment en incitant publiquement à la haine et à la violence;

13. Décide de rester activement saisi de la question.

Le Conseil de sécurité des Nations Unies le 30 mars 2011, dans cette résolution qu'il a adoptée à l'unanimité, condamnant les violations flagrantes des droits de l'homme commises par les partisans tant de l'ex-Président Laurent Gbagbo que du Président Ouattara. Cette résolution a fait état de la responsabilité première de chaque État de protéger les civils, a également exigé le transfert immédiat du pouvoir au Président Ouattara, et a enfin affirmé que l'opération des Nations Unies en Côte d'Ivoire (UNOCI) pouvait utiliser tous les moyens nécessaires pour protéger les vies et les biens. Dans un effort pour protéger la population de la Côte d'Ivoire de nouvelles atrocités, l'UNOCI a, le 4 avril 2011, entamé une opération militaire et le Président Gbagbo a été dépossédé du pouvoir le 11 avril du fait de son arrestation par les forces du Président Ouattara, après des journées de combatavec l'UNOCI et les forces militaires françaises.

b. De la licéité dans l'intervention militaire aux fins de la protection de la population ivoirienne

Les violations du DIH commises par un État ne peuvent, en elles-mêmes, fournir une base légale à une intervention armée d'États tiers, que ce soit sous forme d'« intervention humanitaire » ou d'une action menée conformément à la « responsabilité de protéger ». La légalité du recours à la force entre États est une question qui relève du jus ad bellum(désigne les conditions dans lesquelles les États peuvent recourir à la guerre ou à l'emploi de la force armée de manière générale)178(*) régie par la Charte des Nations Unies et par le droit coutumier, qui est un cadre normatif distinct du DIH179(*).

Selon la charte des Nations Unie, on ne peut recourir à la force que dans deux hypothèses : la première hypothèse est celle de la légitime défense en cas d'agressions180(*) et la seconde hypothèse et celle de l'autorisation par le conseil de sécurité dans le cadre de l'application du chapitre VII de la charte des Nations Unies dans sa mission du maintien de la paix et de la sécurité internationale ; En vertu des Chapitres VII et VIII de la Charte des Nations Unies, et sans préjudice de son pouvoir de mener des opérations de maintien ou d'imposition de la paix de son propre chef, le Conseil de sécurité a le pouvoir d'autoriser les Etats membres ou les accords ou organismes régionaux à prendre toutes les mesures nécessaires, y compris l'emploi de la force, aux fins de maintenir ou de rétablir la paix et la sécurité internationales.

C'est ainsi, dans le cas sous examen, l'intervention militaire a été autorisée par le Conseil de sécurité qui avait pris la résolution 1975 du 30 mars 2011 dans le cadre du pouvoir qui lui est reconnu par la Charte. Dans l'hypothèse où le Conseil de sécurité est dans l'impossibilité de s'acquitter de sa responsabilité principale de maintenir la paix et la sécurité internationales en raison de l'absence d'unanimité des membres permanents, l'Assemblée générale devrait, en vertu de la Résolution « L'Union pour le maintien de la paix », exercer sa compétence de recommander les mesures qu'elle juge appropriées181(*).

Une question qui reste à se poser est celle de la licéité des actions militaires qui n'ont pas été autorisées par les Nations Unies mais dont l'objectif déclaré est de mettre fin à un génocide, à des crimes contre l'humanité ou à des crimes de guerre de grande ampleur ; sur cette question, pour notre avis, cette intervention reste illicite quel que soit son but poursuivi, favoriser ces genres d'interventions risquerait d'ouvrir la porte aux autres Etats d'intervenir avec la casquette de la protection de la personne humaine mais avec d'autres intentions cachées.

c. Le rôle de la CPI dans la mise en oeuvre de la responsabilité de protéger

Le principe de la responsabilité de protéger est présenté comme une réforme profonde du droit international traditionnel afin de le mettre en accord avec les valeurs actuelles de la communauté internationale. Nous tenons à rappeler que ce principe est basé sur le fait « qu'il incombe à chaque État de protéger ses populations du génocide, des crimes de guerre, du nettoyage ethnique et des crimes contre l'humanité»182(*). Cette responsabilité consiste notamment dans la prévention de ces crimes, y compris l'incitation à les commettre, par les moyens nécessaires et appropriés. La communauté internationale devrait, si nécessaire, encourager et aider les États à s'acquitter de cette responsabilité. De ce fait lorsqu'un État n'a pas la volonté ou la possibilité d'agir, ou pire, agit d'une manière contraire à la réalisation de cet objectif ; il incombe également à la communauté internationale, dans le cadre de l'Organisation des Nations unies, de recourir à la justice pénale internationale comme un moyen de protéger les populations183(*).

La justice pénale internationale s'entend comme l'ensemble des « mécanismes répressifs internationaux», mise en oeuvre dans le but de prévenir les conflits et réprimer les crimes internationaux qui les accompagnent, pour ne pas laisser prospérer une culture de l'impunité. Les États ont l'obligation de protéger leurs populations, et dès lors qu'ils ne respectent pas leur devoir envers la communauté internationale, cette dernière se doit de réagir face aux manquements des obligations de cet État, notamment par l'entremise de la justice pénale internationale. On parle ainsi de responsabilité de réagir, laquelle est le deuxième des moments triptyques de la responsabilité de protéger184(*). Ainsi, cette justice pénale vise les individus (autorités ou dirigeants) des États car c'est à ces derniers qu'incombe le devoir de protéger les populations sur le territoire185(*).

Dans le cas des États défaillants, les crimes graves sont une conséquence de la politique désastreuse qu'ils mènent ou qu'ils ont menée. Ainsi, « c'est dans la mesure où l'État, par son autorité, par ses services publics, n'apparaît pas au service de l'intérêt général que des tensions communautaires ou ethniques apparaissent ou triomphent». De nos jours, les conflits internes sont les crises où se déroulent les crimes les plus graves. Il y a donc une réelle nécessité de mettre en place des mécanismes internationaux de surveillance permettant de détecter les dérives et des voies pour en faire part à l'État sans que ce dernier les tienne pour une ingérence injustifiée dans ses affaires intérieures186(*).

Les États qui sont membres des Nations unies doivent se conformer aux engagements qui s'imposent à eux sur le plan conventionnel ou coutumier au risque d'engager leur responsabilité internationale. De plus, étant donné que la Charten'est pas le seul fondement de la responsabilité de protéger, il est du devoir de chaque État de se conformer à leurs obligations internationales. Comme l'affirme la Commission internationale de l'intervention et de la souveraineté des États (CIISE) dans son rapport, cette responsabilité se fonde aussi sur « les impératifs juridiques particuliers énoncés dans les déclarations, pactes et traités relatifs aux droits de l'homme et à la protection des populations, le droit international humanitaire et la législation nationale ».

Les États doivent donc rendre compte de leurs actes aussi bien devant les organes d'applications des conventions auxquels ils sont parties, que devant les différents organes prévus par la communauté internationale pour lutter contre les crimes commis à l'encontre de la population. La justice pénale mise en oeuvre par la communauté internationale pour protéger les populations est donc un moyen de rappeler aux États quelles sont leurs obligations conventionnelles et coutumières envers cette dernière. Ces obligations résident en l'interdiction de la violation desnormes ayant un statut de jus cogenset pouvant entrainer un effet ergaomnes187(*).

Nous pouvons donc comprendre à ce niveau que, les crimes visés par la responsabilité de protéger sont réprimé par la cour pénale internationale ; c'est ainsi que Laurent Gbagbo était jugé pour des crimes commis pendant la crise de 2010-2011, née de son refus de céder le pouvoir à son rival Alassane Ouattara. Les violences avaient fait plus de 3 000 morts en cinq mois. Il avait été arrêté en avril 2011 par les forces du président Alassane Ouattara, soutenues par l'ONU et la France. Il est le premier ancien chef d'État à avoir été remis directement à la CPI.

En analysant la décision du conseil de sécurité autorisant l'intervention de l'armée française en complicité avec celle de la CEDEAO en vue de mettre fin aux atrocités de masse, en assimilant aussi l'intervention de la force de l'OTAN en Libye dans le même but ; ces interventions sont critiquables du fait qu'il s'agit dans les deux cas du changement de régime, dont la première intervention s'est soldée par la mort de GHADAFI, et l'autre par l'arrestation de GBAGBO ; on serait tenté de dire que ces deux interventions ont été menées dans le but du changement de ces deux régimes, nous n'aimerions pas trop aborder cet aspect qui n'est que subsidiaire à notre thématique.Un autre aspect que nous pouvons encore soulever est celui de l'élément déclencheur même de ce conflit postélectoral, la Commission Electorale Indépendante proclame Alassane Ouattara vainqueur face au Président sortant, tandis que le Conseil Constitutionnel rend une décision proclamant Laurent GBAGBO vainqueur, curieusement la prétendue communauté internationale aussi reconnait Alassane OUATTARA comme président, d'où, tous les moyens de règlement pacifique de ce conflit chercher à convaincre GBAGBO de quitter le pouvoir et d'accepter le résultat proclamé par la Commission Electorale Indépendante, la question que nous nous sommes est celle de savoir quand est-ce qu'on est légalement président d'un Etat ? Seule la constitution peut répondre à cette question, c'est ainsi, la constitution qui était en vigueur, est celle de 2000 qui prévoit à son article 39 que «Les pouvoirs du Président de la République en exercice expirent à la date de prise de fonction du Président élu, laquelle a lieu dès la prestation de serment. Dans les quarante-huit heures de la proclamation définitive des résultats, le Président de la République élu prête serment devant le Conseil constitutionnel réuni en audience solennelle»188(*). La CEI ne pouvant que proclamer le résultat provisoire, mais il revient au conseil constitutionnel de proclamer le résultat définitif.

CONCLUSION

Nous voici au terme de nos recherches autours de la thématique intitulée« L'application du concept de la responsabilité de protéger à la lumière de la souveraineté étatique : cas de la Côte d'Ivoire»aux cours desquelles nous avons eu à découvrir plusieurs notions sur la compatibilité entre protection de la personne humaine et souveraineté de l'Etat à l'époque où l'humanité se voit infliger d'actes ignobles attaquant son essence même.

L'apparition du concept de « responsabilité de protéger » dans le langage politique et le langage juridique international est liée au processus de plus en plus visible de l'affirmation de l'être humain comme centre des préoccupations du droit international. Ce concept cherche les moyens de rendre responsable face aux victimes des crimes de génocide, de guerre, des crimes contre l'humanité et le nettoyage ethnique.

Ensuite, la responsabilité de protéger est conçue comme un instrument supplémentaire, sans force juridique autonome. Dépourvue de toute juridicité, la « responsabilité de protéger » à la charge de la Communauté internationale face à l'Etat défaillant, ne constitue pas une norme émergente, pas plus qu'une norme prescrivant une obligation internationale de protection. La « responsabilité de protéger » partage donc avec le droit d'ingérence « une fragilité juridique ».

Dans cette perspective, alors même qu'elle est suscitée par la violation des règles impératives du jus cogens, la « responsabilité de protéger » n'est pas, à elle seule, à la hauteur d'unenorme impérative générale qui pourrait avoir une valeur supérieure à celle de la souveraineté ; à ces propos, selon notre point de vue, nous tenons à infirmer la première hypothèse que nous avions émise selon laquelle : « la valeur ajoutée qu'elle aurait apportée en Droit International, serait celle de ne pas opposer la notion de la souveraineté des Etats à la protection de la population civile, mais celle de l'affirmation de la souveraineté étatique entant qu'une responsabilité, en soutenant une responsabilité première de la protection de la population à l'Etat et à titre subsidiaire la communauté international ». La responsabilité de protéger ne présente qu'une valeur ajoutée extrêmement faible, tenant à la codification des compétences du Conseil de sécurité en matière humanitaire et, plus fondamentalement, d'une conception équilibrée du concept de souveraineté, nous pouvons donc affirmer que nous pouvons vivre sans la responsabilité de protéger, car elle n'apporte rien de nouveau comme valeur ajoutée en droit internationale ; nous tenons à affirmer que la responsabilité de protéger est apparue et évoluée dans le but de répondreà la problématique de la protection de la population civile, dans le cas où elle est victime des atrocités dont son Etatconstitue l'auteur ou ne veut pas s'acquitter de son obligation de protéger, ce qui nous amener à affirmer notre hypothèse sur l'émergence de la R2P.

Quand à ce qui concerne sa mise en oeuvre, la responsabilité de protéger n'intervient qu'en cas de la commission de crime de guerre, crime contre l'humanité, le génocide et le nettoyage ethnique tel que mentionné dans le rapport de la CIISE et le paragraphe 138 du document final du sommet mondial de 2005, ainsi donc, dans le cas de la Côte d'Ivoire que nous avons analysé, il s'agissait de la crise poste électorale de 2010 à 2011 qui a provoqué un conflit armé ; durant ce conflit, divers violations de droit de l'homme et de droit international humanitaire ont été enregistrées notamment le crime de guerre et le crime contre l'humanité qui sont des crimes visés par ce concept de la R2P, c'est à la suite de ces crimes que la résolution 1975 du conseil de sécurité a été prise faisant état de la responsabilité de protéger, en privilégiant d'abord les moyens pacifique de la résolution de ce conflit ce qui constitue le premier des moments triptyque prévu par la CIISE, ces moyens pacifiques de résolution qui étaient menés par la communauté régionale et sous régionale, avaient échoués, il était alors question de passer au deuxième des moments triptyque qui est la réaction, c'est à ce moment que, par l'autorisation du conseil de sécurité, la force de la CEDEAO en complicité avec la force armée française ont intervenues aux fins des protéger la population ivoirienne contre les atrocités ; à ces propos, nous tenons à affirmer notre deuxième hypothèse celle de la mise oeuvre de la R2P à la suite des violations graves des droits humains dans cette période poste électorale en Côte d'Ivoire ; l'intervention militaire ainsi autorisée par le conseil de sécurité est légale, du fait qu'il a agi sur base du chapitre VII de la charte qui lui reconnait le pouvoir de recourir à la force dans sa mission du maintien de la paix et de la sécurité internationale.

Ce que nous pouvons proposer sur la question de la protection de la personne humaine contre les violations graves des droits humains, surtout dans des situations où l'Etat lui-même est l'auteur, ou soit il est incapable d'assurer son obligation de protéger, est que seul le conseil de sécurité dans le cadre de l'application du chapitre VII de la charte en collaboration avec les organisations régionales et sous régionales sur base du chapitre VIII de la charte, puisse mener les actions en vue de protéger l'individu ce qui constitue d'ailleurs une exception au principe de la non-ingérence, susceptible même de déroger le principe sacrosaint du DIP qui est celui de la souveraineté des Etats. Ceci est lié au fait que le concept de la responsabilité de protéger n'a pas un fondement juridique capable de provoquer une dérogation aux principes sacrosaints de souveraineté et de non-ingérence et ne fait que se référer aux dispositions existantes, d'où nous ne voyons pas sa raison d'être.

Enfin, la question de la responsabilitéde protéger étant plus large, nous ne saurons l'épuiser dans ces quelques paragraphes. Nous n'avions pas pu toucher certains aspects que nous avions souverainement jugés inopportuns pour cette thématique. C'est notamment la question relative à l'impartialité et de la proportionnalité des forces engagées dans les opérations du maintien de la paix.Ainsi, sans prétendre à l'exhaustivité nous laissons aux chercheurs futurs de ce domaine la tâche de compléter cette modeste contribution.

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5. THIBALT J., «L'intervention humanitaire armée», in annuaire Français de relations internationales, Paris, vol X, 2009, pp. 1-9.

6. MVE ELLA L., « R2p et intervention humanitaire. Peut-on [ou comment] dépasser la volonté du conseil de sécurité ?», in Université de Lorraine, N° 39, France, 2017, p. 251. Article disponible en ligne à l'adresse : https://www.cairn.info/revue-civitas-europa-2017-2-page-249.htm.

7. DÖRMANN K. et SERRALVO J, «L'article 1 commun aux Conventions de Genève et l'obligation de prévenir les violations du droit international humanitaire», in Revue internationale de la croix rouge, volume 96. Disponible à l'adresse : https://www.icrc.org/fr/revue-internationale/article/larticle-1-commun-aux-conventions-de-geneve-et-lobligation-de-preveni

8. BACHAND R. et NGUYEN A., « La responsabilité de protéger », inRevue sociale et politique, No41-oct./nov.2011. Disponible sur internet dans https://googleweblight.com/i?u=https://www.ababord.org/La-responsabilite-de-proteger&hl=fr-CD..

9. SYLVAIN V., « Typologie des conflits armés en droit international humanitaire : concepts juridiques et réalités», in revue internationale de la croix rouge,Vol. 91, N° 873, mars 2009, pp. 1-21.

10. HUET V., « L'autonomie constitutionnelle de l'État : déclin ou renouveau ? », in Revue française de droit constitutionnel 1/2008, n° 73.Disponible dans l'adresse : https://www.cairn.info/revue-francaise-de-droit-constitutionnel-2008-1-page-65.htm

11. MASSI LOMBAT P., «Les sources et fondements de l'obligation de coopérer avec la Cour pénale internationale», In Revue Québécoise de droit international, volume 27-1, 2014, pp. 113-141. Disponible à l'adresse : https://www.persee.fr/doc/rqdi_0828-999_2014_num_27_1_1362

V. Résolutions de l'institut de droit international

1. Résolution de l'institut de droit international adoptée à la Session de Saint-Jacques-de-Compostelle 1989 sur La protection des droits de l'homme et le principe de non-intervention dans les affaires intérieures des Etats.

2. Résolution de l'Institut de droit international adoptée à la Session de Bruges 2003 sur l'assistance humanitaire.

3. Résolution de l'Institut de droit international adoptée à la Session de Wiesbaden 1975 sur Le principe de non-intervention dans les guerres civiles

4. Résolution de l'institut du droit international adoptée à la Session de Santiago 2007 sur les Problèmes actuels du recours à la force en droit international : Actions humanitaires.

5. Résolution de l'institut de droit internationale adoptée à la Session de Rhodes 2011 sur les Problèmes actuels du recours à la force en droit international.

VI. Documents officiels et différents rapports

1. Le Document final du Sommet Mondial du 20 septembre 2005. Adopté par la résolution de l'Assemblée générale de l'ONU. A/60/L.1 du 24 octobre 2005. Disponible à l'adresse: http://www.ilo.org/global/docs/WCMS_079440/lang-fr/index.htm

2. Rapport de la Commission internationale de l'intervention et de la souveraineté des Etats (CIISE), co-présidée par G. EVANS et M. SAHNOUN, La Responsabilité de protéger, décembre 2001, Publié par le Centre de recherches pour le développement international, Canada. Disponible dans l'adresse : https://www.idrc.ca/fr/book/la-responsabilite-de-proteger-rapport-de-la-commission-international-de-lintervention-et-de-la

3. Assemblée générale de l'ONU., Rapport du Secrétaire général, Alerte rapide, évaluation et responsabilité de protéger, A/64/864, 14 juillet. 2010. Disponible dans l'adresse :  https://dacces-ods.un.org/TMP/9662747.97916412.html

4. Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme, la protection juridique internationale des droits de l'homme dans les conflits armés, New York et Genève, 2011. Disponible à l'adresse : https://www.ohchr.org

5. Organisation Internationale de la Francophonie, Xe conférence des chefs d'État et de gouvernement ayant le français en partage, à Ouagadougou, le 27 novembre 2004. Disponible dans l'adresse : www.francophonie.org

6. Rapport du Groupe de personnalité de haut niveau sur les menaces, « les défis et le changement, Un monde plus sûr : notre affaire à tous ». A/59/565, 2 décembre 2004. Disponible à l'adresse : https://www.un.org/french/secureword/

7. Rapport du secrétaire général des Nations Unies sur La mise en oeuvre de la responsabilité de protéger A/63/677 du 12 janvier 2009. Disponible à l'adresse : https://undocs.org/pdf?symbol=fr/a/63/677

8. Rapport du groupement des acteurs ivoiriens des Droits Humains, Côte d'Ivoire : une décennie de crimes graves non encore puni, les victimes demandent réparations, Mars 2014. Disponible à l'adresse : https://freedomhouse.org.

9. HumanRights Watch, « Ils les ont tués comme si de rien n'était » Le besoin de justice pour les crimes post-électoraux en Côte d'Ivoire, octobre 2011 (une enquête menée en Côte d'ivoire sur les crimes commis pendant la période poste électorale). Disponible dans l'adresse : https://www.hrw.org

10. Commission Nationale d'Enquête, Rapport d'enquête sur les violations des droits de l'homme et du droit international humanitaire survenues dans la période du 31 octobre 2010 au 15 mai 2011, Juillet 2012. Disponible dans l'adresse : https://www.fidh.org

11. Le rapport de M.ThaboMbeki sur sa médiation en Côte d'Ivoire à la suite des élections». Disponible à l'adresse http://www.interwatch.org/rapports/rapport_tabo_mbeki.pdf.

12. Institut des études de sécurité. «Côte d'Ivoire : UA at a crossroad. Will the AU meeting finally resolve the Ivoirian political standoff?»Communiqué du 11 mars 2011.Disponible à l'adresse : http://www.issafrica.org/uploads/11March2011.pdf

VII. Jurisprudence

1. TPIY, Affaire du Procureur contre Dusko Tadic,Arrêt rendu le 2 octobre 1995.

2. CIJ, Affaire sur l'application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, Bosnie-Herzégovine contre Serbie et Monténégro, du 26 Février 2007.

VIII. Thèses et Mémoires

1. Mohammad SHARIFIFARD, La mise en oeuvre de la Responsabilité de protéger de la Communauté internationale : Quelle efficacité ? Mémoire master 2 recherche, université Montesquieu bordeaux iv, 2011-2012. Disponible à l'adresse : https://www.reseachgate.net/pubication/290195527_La_mise_en_oeuvre_de_la_Responsabilite_de_proteger_de_la_C0mmunaute_internationale_Quelle_efficacite

2. Samira AGGAR, La responsabilité de protéger : un nouveau concept ? Thèse de doctorat à l'Université de Bordeaux en 2016. Disponible dans l'adresse : https://www.theses.fr/121993698

3. A. DEMAUGE BOST, Le droit d'ingérence ou la souveraineté des Etats ? Mémoire de fin d'études, Institut d'Etudes Politiques de Lyon, 2000-2001 disponible sur internet à l'adresse : http://doc.sciencespolyon.fr/Ressources/Documents/Etudiants/Memoires/Cyberdocs/MFE2001/demaugebosta/these.html

TABLE DES MATIERES

EPIGRAPHE i

IN MEMORIAM ii

DEDICACE iii

REMERCIMENTS iv

SIGLES ET ABREVIATIONS v

0. INTRODUCTION 1

0.1. PROBLEMATIQUE 1

0.2. HYPOTHESES 8

0.3. CHOIX ET INTERET DU SUJET 8

0.4. APPROCHE METHOLOGIQUE 9

0.5. DELIMITATION DU SUJET 10

0.6. SUBDIVISION DU TRAVAIL 10

CHAPITRE I. RESPONSABILITE DE PROTEGER EN DROIT INTERNATIONAL 12

Section 1. EVOLUTION DE LA RESPONSABILITE DE PROTEGER 12

§1. SOURCE DE LA RESPONSABILITE DE PROTEGER 12

A. La souveraineté nationale et la responsabilité de protéger 14

a. La souveraineté de l'État 14

b. Emergence et acceptation de la R2P 17

B. Les phases d'adoption onusienne de la responsabilité de protéger 20

a. Première phase : vers la concrétisation du concept de la responsabilité de protéger 20

b. Deuxième phase : réalisation du concept de la responsabilité de protéger 22

c. Troisième phase : prolongements sur la stratégie de la mise en oeuvre de la responsabilité de protéger 25

§2. L'INTERVENTION AUX FINS DE LA PROTECTION DE LA PERSONNE HUMAINE ET FONDEMENT DE LA R2P 26

A. L'intervention aux fins de la protection humanitaire 26

a. Objectif de l'intervention 27

b. Intervention humanitaire et ingérence humanitaire face à la souveraineté étatique 27

1. L'assistance humanitaire, une obligation des Etats dans leurensemble 30

2. L'assistance humanitaire, une obligation de l 'Etat territorial 30

B. Les faibles fondements juridiques de la responsabilité de protéger 32

Section II. VALEUR AJOUTEE QU'APPORTE LA RESPONSABILITE DE PROTEGER EN DROIT INTERNATIONAL 35

§1. VALEUR AJOUTEE : SOUVERAINETE ENTANT QUE RESPONSABILITE DE PROTEGER L'INDIVIDU 35

A. La souveraineté responsable 35

B. En matière de la protection des droits de l'homme 37

§2. VALEUR AJOUTEE : EMERGENCE DE L'INDIVIDU COMME SUJET DE DIP 40

CHAPITRE II. MISE EN OEUVRE DE LA RESPONSABILITE DE PROTEGER 43

Section I. CONDITIONS DE LA MISE EN OEUVRE DE LA RESPONSABILITE DE PROTEGER, SES PILIERS ET MOMENT TRIPTYQUE 43

§1. CONDITIONS DE LA MISE EN OEUVRE DE LA RESPONSABILITE DE PROTEGER 43

A. Conditions générales 44

a. La commission ou menace de commission de 4 crimes internationaux 44

b. Le principe de subsidiarité de la responsabilité de la Communauté internationale 49

B. Les conditions particulières de l'intervention militaire 49

a. La condition formelle : l'autorisation de l'autorité appropriée 49

b. Les conditions substantielles 52

§2. LES PILIERS DE LA RESPONSABILITE DE PROTEGER ET SES MOMENTS TRIPTYQUE 52

A. Les piliers de la responsabilité de protéger 52

Premier pilier: Les responsabilités de l'État en matière de protection 53

Deuxième pilier : Assistance internationale et renforcement des capacités 53

Troisième pilier : Réaction résolue en temps voulu 54

B. Les moments triptyques de la responsabilité de protéger : prévenir, réagir et reconstruire 55

a. La responsabilité de prévenir 55

b. La responsabilité de réagir 57

v Critères à satisfaire pour une intervention militaire 59

1. L'élément autorité appropriée, à savoir qui est habilité à autoriser une intervention militaire 59

2. Les critères décisifs : une juste cause 59

3. Bonne intention 59

4. Dernier recours 60

5. Proportionnalité des moyens 60

6. Perspectives raisonnables 61

c. La responsabilité de reconstruire 61

SECTION 2. L'APPLICATION DE LA RESPONSABILITE DE PROTEGER DANS LA CRISE IVOIRIENNE 63

§1. LE CONFLIT POSTELECTORAL IVOIRIEN ET LES VIOLATIONS DES DROITS HUMAINS VISES PAR LA RESPONSABILITE DE PROTEGER 63

A. Origine de conflit 63

B. Les violations des droits de l'homme et du DIH visés par la responsabilité de protéger dans la crise poste électorale de 2010-2011 en Côte d'Ivoire 64

a. Les différentes violations des droits de l'homme et de droits international humanitaire 64

b. Type de conflit connu dans cette crise postélectorale de la cote d'ivoire 70

c. Qualifications des crimes commis dans la crise ivoirienne : crimes visés par la R2p 72

1. Crimes de guerre 72

2. Crimes contre l'humanité 73

§2. DECLANCHEMENT DE LA R2P EN COTE D'IVOIRE 74

A. Les efforts régionaux et sous-région dans le maintien de la paix dans la crise postélectorale de 2010-2011 en Côte d'ivoire 75

B. Intervention de communauté internationale dans le cadre du maintien de la paix en Côte d'ivoire 77

a. la résolution 1975 du Conseil de Sécurité adopté à l'unanimité concernant la crise politique en Côte d'Ivoire 78

b. De la licéité dans l'intervention militaire aux fins de la protection de la population ivoirienne 82

c. Le rôle de la CPI dans la mise en oeuvre de la responsabilité de protéger 84

CONCLUSION 87

BIBLIOGRAPHIE 90

I. Textes internationaux et nationaux 90

II. Résolutions de l'Assemblée générale et du Conseil de sécurité 91

III. Ouvrages 92

IV. Articles 93

V. Résolutions de l'institut de droit international 94

VI. Documents officiels et différents rapports 95

VII. Jurisprudence 96

VIII. Thèses et Mémoires 96

TABLE DES MATIERES 97

* 1 Saadi, le poète humaniste du XIIIème siècle, traduit par Mahshid Moshiri, disponible à l'adresse : https://blogs.mediapart,fr/eugenio-populin/blog/230918/les-enfants-d-adam-font-partie-d-un-corps-ils-sont-crees-tous-d-une-meme-essence consulté le 24 avril 2019 à 04h45'.

* 2 Léandre MVE ELLA, « R2p et intervention humanitaire. Peut-on [ou comment] dépasser la volonté du conseil de sécurité ?», in Université de Lorraine, N° 39, France, 2017, p. 251. Article disponible en ligne à l'adresse : https://www.cairn.info/revue-civitas-europa-2017-2-page-249.htm. Consulté le 12 mai 2019 à 10h30'

* 3 Julie LEMAIRE, La responsabilité de protéger : Un nouveau concept pour de vieilles pratiques ? Bruxelles, Note d'Analyse du GRIP, 31 janvier 2012, pp. 1-4.

* 4 Ibid, p. 4.

* 5 Ibid, p. 5.

* 6 Ibid.

* 7 Julie LEMAIRE, op. cit., p. 6

* 8. Ibid

* 9 Ibid, p. 7.

* 10 A/RES 59/141 de 2004 « le renforcement de la coordination de l'aide humanitaire d'urgence fournie par l'Organisation des Nations Unies ». Disponible dans l'adresse : http://www.oim.int/es/quincuagesimo-noveno-periodo-de-sesiones-2004 consulté le 14 juillet 2019 à 5h30'.

* 11 A/RES 59/124 de 2004 sur « les pratiques israéliennes affectant les droits de l'homme du peuple palestinien dans le territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est ». Disponible dans l'adresse  https://reseach.un.org/fr/docs/ga/quick/regular/59 consulté le 14 juillet 2019 à 5h33'.

* 12 A/RES 59/187 de 2004 sur « le renforcement de la coopération internationale dans le domaine des droits de l'homme ».disponible dans l'adresse https://reseach.un.org/fr/docs/ga/quick/regular/59 consulté le 14 juillet 2019 à 5h35'.

* 13 Julie LEMAIRE, Op. Cit, pp. 5-6.

* 14 Sandra SZUREK, « La responsabilité de protéger : Mauvaises querelles et vraies questions », in Anuario Colombiano de Derecho Internacional n ° 4, 2011, p. 49.

* 15 Sandra SZUREK, Op.cit., p. 49.

* 16 Rapport de la Commission internationale de l'intervention et de la souveraineté des Etats (CIISE), co-présidée par G. EVANS et M. SAHNOUN, La Responsabilité de protéger, décembre 2001, Publié par le Centre de recherches pour le développement international, Canada. Disponible dans l'adresse : https://www.idrc.ca/fr/book/la-responsabilite-de-proteger-rapport-de-la-commission-international-de-lintervention-et-de-la consulté le 15 mars 2019 à 6h50'.

* 17 A/RES 63/308 du 14 septembre 2009 sur «la responsabilité de protéger ». Disponible dans l'adresse :  https://reseach.un.org/fr/docs/ga/quick/regular/59 consulté le 14 juillet 2019 à 6h36'.

* 18 S/RES 1674 du 28 avril 2006, sur « la protection des civils en période de conflits armés ». Disponible dans l'adresse :  https://reseach.un.org/fr/docs/ga/quick/regular/59 consulté le 14 juillet 2019 à 7h33'.

* 19 André CABANIS, Jean-Marie CROUZATIER et Ciprian MIHALI, La responsabilité de protéger : une perspective francophone, Paris, Agence Universitaire de la Francophonie, 2010, p. 9.

* 20 Organisation Internationale de la Francophonie, Xe conférence des chefs d'État et de gouvernement ayant le français en partage, à Ouagadougou, le 27 novembre 2004, paragraphe 80, p. 11. Disponible dans l'adresse : www.francophonie.org consulté le 24 avril 2019 à 14h45'.

* 21 André CABANIS, Jean-Marie CROUZATIER et Ciprian MIHALI, Op. cit., p. 10.

* 22 Grand Larousse en 5 volumes, tome 4, Paris, librairie Larousse, 1987, p. 1577, V° hypothèse.

* 23 Grand Larousse en 5 volumes, tome 4, Paris, librairie Larousse, 198, pp. 2027-2028, V° méthodologie

* 24 Olivier CORTEN, Méthodologie du droit international public, Bruxelles, Edition de l'université de Bruxelles, 2009, p. 23.

* 25 Jean-Louis BERGEL, Méthodologie juridique, Paris, PUF, 2001, p. 29.

* 26 Charles SEIGNOBOS, La méthode historique appliquée aux sciences sociales, Paris, Félix Alcan, 2014, p. 3.

* 27 Le Document final du Sommet Mondial du 20 septembre 2005. Adopté par la résolution de l'Assemblée générale de l'ONU. A/60/L.1 du 24 octobre 2005, §139. Disponible à l'adresse: http://www.ilo.org/global/docs/WCMS_079440/lang-fr/index.htm consulté le 1 juillet 2019 à 01h30'.

* 28 Jean-Baptiste JEANGÈNE, «Responsibility to Protect, Protection of Civilians and their Interaction», in United Nations University Press, Tokyo, 2012, pp. 2-3.

* 29 Jean-Baptiste JEANGÈNE, op. cit., p. 3.

* 30 Ibid.

* 31 Ibid, pp. 3-4.

* 32 Ibid, p. 4.

* 33 Assemblée générale de l'ONU., Rapport du Secrétaire général, Alerte rapide, évaluation et responsabilité de protéger, A/64/864, 14 juillet. 2010, §14. Disponible dans l'adresse :  https://dacces-ods.un.org/TMP/9662747.97916412.html consulté le 13 avril 2019 à 03h03'.

* 34 Rapport de la CIISE : la responsabilité de protéger, op.cit, p.12, par.2.7

* 35 Ibid, p.12, par.2.8

* 36 Bantchin NAPAKOU, « De la souveraineté à la responsabilité de protéger », in revue internationale de philosophie, Université de Lomé, Togo, IX N°17 pp. 54-57.

* 37 Charte des Nations Unies signé à San Francisco le 26 juin 1945, Article 1 point 2. (Recueil de Droit International, collection d'instruments, Nations Unies, New York, 2018, tome I, pp. 3-22. Téléchargeable dans l'adresse : http://legal.un.org/poa et http://legal.un.org/avl ).

* 38 Pacte international relatif aux droits civils et politiques signé en New York le 16 Décembre 1966 et entrée en vigueur le 23 mars 1976, article 1 alinéa 2. (Recueil de Droit International, collection d'instruments, Nations Unies, New York, 2018, tome I, pp. 385-398. Téléchargeable dans l'adresse : http://legal.un.org/poa et http://legal.un.org/avl ).

* 39 A/RES 1514 du 14 Décembre 1960. Disponible dans l'adresse : https://www.un.org/fr/decolonization/declaration.shtml consulté le 4 mai 2019 à 16h30'.

* 40 Article 2 paragraphe 7 de la Charte des Nations Unies.

* 41 Bantchin NAPAKOU, op. cit., pp. 58-59.

* 42 Ibid., p. 60.

* 43 Jean-François THIBALT, « L'intervention humanitaire armée », in annuaire Français de relations internationales, Paris, vol X, 2009, p. 2.

* 44 Vincent A. AUGER, La responsabilité de protéger Six ans après, Afrique & Francophonie - 2e trimestre 2011, p. 85.

* 45 Vincent A. AUGER, Op. Cit, p. 86.

* 46 Rapport de la CIISE : La responsabilité de protéger, Op. Cit., p. 23.

* 47 Vincent A. AUGER, Op. Cit, p. 86.

* 48 Ibid.

* 49 Ibid, p. 87.

* 50Vincent A. AUGER, op. cit, p. 87.

* 51 Ibid.

* 52 Ibid, pp. 87-88.

* 53 Samira AGGAR, La responsabilité de protéger : un nouveau concept ? Thèse de doctorat à l'Université de Bordeaux en 2016, p. 77. Disponible dans l'adresse : https://www.theses.fr/121993698 consulté le 23 mai 2019 a 17h30'.

* 54 Rapport du Groupe de personnalité de haut niveau sur les menaces, « Les défis et le changement, Un monde plus sûr : notre affaire à tous ». A/59/565, 2 décembre 2004, p 20 § 18. Disponible à l'adresse : https://www.un.org/french/secureword/ consulté le 24 mai 2019 à 02h01'.

* 55 Ibid, p.23. § 29.

* 56 Ibid, p. 61. §201.

* 57 Rapport du Groupe de personnalité de haut niveau sur les menaces, « Les défis et le changement, Un monde plus sûr : notre affaire à tous ». A/59/565, 2 décembre 2004, pp. 61-62. §203.

* 58 Samira AGGAR, Op. Cit., p. 79.

* 59 Le Document final du Sommet Mondial du 20 septembre 2005. Adopté par la résolution de l'Assemblée générale de l'ONU. A/60/L.1 du 24 octobre 2005, § 138 et 139.

* 60 Samira AGGAR, op. cit.. p. 79.

* 61 S/RES 1674 du 28 avril 2006, sur « la protection des civils dans les conflits armés». Disponible à l'adresse : https://www.un.org/fr/sc/documents/resolutions/2006.shtml consulté le 4 juin 2019 à 9h00'.

* 62 A/RES 63/308 du 14 septembre 2009 sur Responsabilité de protéger, point 2.

* 63 Samira AGGAR, op. cit., p. 81.

* 64 Résolution de l'institut de droit international adoptée à la Session de Saint-Jacques-de-Compostelle 1989 sur La protection des droits de l'homme et le principe de non-intervention dans les affaires intérieures des Etats, article 1.

* 65 Rapport de la CIISE, paragraphe 2.3, p. 11.

* 66 Résolution de l'institut de droit international adoptée à la Session de Saint-Jacques-de-Compostelle 1989 sur La protection des droits de l'homme et le principe de non-intervention dans les affaires intérieures des Etats, article 4.

* 67 T. MUHINDO MALONGA et P. KAMBALE MAHUKA, Droit international humanitaire, Butembo, Presses Universitaires de Graben, 2015, p. 39.

* 68 Léandre MVE ELLA, Op. Cit., p. 251.

* 69 Résolution de l'Institut de droit international adoptée à la Session de Bruges 2003 sur l'assistance humanitaire, point 1.

* 70 A. DEMAUGE BOST, Le droit d'ingérence ou la souveraineté des Etats ? Mémoire de fin d'études,

Institut d'Etudes Politiques de Lyon, 2000-200. Disponible sur internet à l'adresse : http://doc.sciencespolyon.fr/Ressources/Documents/Etudiants/Memoires/Cyberdocs/MFE2001/demaugebosta/these.html. Consulté le 24 mai 2019 à 13h37'

* 71 T. MUHINDO MALONGA et P. KAMBALE MAHUKA, Op. cit., p. 40.

* 72 Déclaration universelle des droits de l'Homme, du 10 décembre 1948, article 3. (Recueil de Droit International, collection d'instruments, Nations Unies, New York, 2018, tome I, pp. 357-360. Téléchargeable dans l'adresse : http://legal.un.org/poa et http://legal.un.org/avl ).

* 73 Pacte international relatif aux droits civils et politiques, signé à New York le 16 décembre 1966, entrée en vigueur le 23 mars 1976, article 6.

* 74 Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, signé à New York le 16 décembre 1966, entrée en vigueur le 3 janvier 1976. (Recueil de Droit International, collection d'instruments, Nations Unies, New York, 2018, tome I, pp. 371-378. Téléchargeable dans l'adresse : http://legal.un.org/poa et http://legal.un.org/avl ).

* 75 T. MUHINDO MALONGA et P. KAMBALE MAHUKA, Op. cit., p. 40.

* 76 Knut DÖRMANN et Jose SERRALVO, « L'article 1 commun aux Conventions de Genève et l'obligation de prévenir les violations du droit international humanitaire », in Revue internationale de la croix rouge, volume 96, p. 40. Disponible à l'adresse : https://www.icrc.org/fr/revue-internationale/article/larticle-1-commun-aux-conventions-de-geneve-et-lobligation-de-preveni consulté le 14 avril 2019 a 20h30'.

* 77 A/RES 59/141 de 2004 sur « le renforcement de la coordination de l'aide humanitaire d'urgence fournie par l'Organisation des Nations Unies ».

* 78 Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme, la protection juridique internationale des droits de l'homme dans les conflits armés, New York et Genève, 2011, p. 76. Disponible à l'adresse : https://www.ohchr.org consulté le 23 avril 2019 à 12h23'.

* 79 Convention de Vienne sur le droit des traités du 23 mai 1969, article 26. (Recueil de Droit International, collection d'instruments, Nations Unies, New York, 2018, tome I, pp. 37-55. Téléchargeable dans l'adresse : http://legal.un.org/poa et http://legal.un.org/avl )

* 80 Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme, Op. Cit.., p. 77.

* 81 CIJ, Affaire sur l'Application de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, Bosnie-Herzégovine c. Serbie-et-Monténégro, Arrêt rendu le 26 février 2007, p.43.

* 82 Chapitre VII de la Charte des Nations Unies, les articles 42 et 51.

* 83 Rémi BACHAND et Amélie NGUYEN, « La responsabilité de protéger », in Revue sociale et politique, No41-oct./nov.2011. Disponible sur internet dans https://googleweblight.com/i?u=https://www.ababord.org/La-responsabilite-de-proteger&hl=fr-CD. Consulté le 24 mai 2019 à 7h23'.

* 84 A/RES 63/308, §.1 et 2.

* 85 CICR, Le droit international humanitaire et la responsabilité de protéger, Italie, 2011, p. 13. Disponible à l'adresse : https://www.icrc.org consulté le 25 avril 2019 à 11h00.

* 86 Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, conclue à New York le 9 décembre 1948 et Entrée en vigueur 6 Décembre 2000. (Recueil de Droit International, collection d'instruments, Nations Unies, New York, 2018, tome II, pp. 274-276. Téléchargeable dans l'adresse : http://legal.un.org/poa et http://legal.un.org/avl ).

* 87 Rémi BACHAND et Amélie NGUYEN, « La responsabilité de protéger », in Revue sociale et politique, No41-oct./nov.2011 disponible sur internet dans https://googleweblight.com/i?u=https://www.ababord.org/La-responsabilite-de-proteger&hl=fr-CD. Consulté le 24 mai 2019 à 7h23'.

* 88 Rapport du secrétaire général des Nations Unies sur La mise en oeuvre de la responsabilité de protéger, A/63/677 du 12 janvier 2009, p. 7. Disponible à l'adresse : https://undocs.org/pdf?symbol=fr/a/63/677 consulté le 24 avril 2019 à 15h34'.

* 89 Nabil HAJJAMI, La responsabilité de protéger, 1e édition, Paris, Bruylant, 2013, p. XVII. (Préface d'Olivier CORTEN).

* 90 Jean D'ASPREMONT et Jérôme DE HEMPTINNE, droit international humanitaire, Paris, Editions PEDONE, 2012, p. 368.

* 91 André CABANIS. Jean-Marie CROUZATIER et Ciprian MIHALI, Op. Cit., p. 9.

* 92 Article 2 point 4 et 7 de la Charte des Nations Unies.

* 93 Chapitre 7 de la Charte des Nations Unies et en particulier les articles 42 et 51.

* 94 André CABANIS. Jean-Marie CROUZATIER et Ciprian MIHALI, Op. Cit., p. 12.

* 95 Julie LEMAIRE, Op. Cit., p. 7.

* 96 Sandra SZUREK, Op. Cit., p. 53.

* 97Sandra SZUREK, Op. Cit., p. 54.

* 98 Ibid :

* 99 Pierre-Marie DUPUY, Droit international public, paris, Dalloz, 2008, p.217.

* 100 D. RUZIE et G. TABOUL, Droit international public, 22e édition, Paris, Dalloz, 2013, p. 51.

* 101 Ibid, pp. 217-218.

* 102 Nguway KADONY, Droit international public, Lubumbashi, Edition d'Essai, 2009, p. 262.

* 103 Pierre-Marie DUPUY, Op. Cit., p. 218.

* 104 Article 2 point 4 de la charte des Nations Unies. 

* 105 Mohammad SHARIFIFARD, « La mise en oeuvre de la Responsabilité de protéger de la Communauté internationale : Quelle efficacité ? », Mémoire master 2 recherche, université Montesquieu bordeaux iv, 2011-2012, p. 12. Disponible à l'adresse : https://www.reseachgate.net/pubication/290195527_La_mise_en_oeuvre_de_la_Responsabilite_de_proteger_de_la_C0mmunaute_internationale_Quelle_efficacite consulté le 25 mai 2019 à 15h30'.

* 106 Le Document final du Sommet Mondial du 20 septembre 2005.

* 107 Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, signé à Paris le 9 décembre 1948, entrée en vigueur le 12 janvier 1951.

* 108 R. GUILLIEN et J. VICENT, Lexique des termes juridique, Paris, Dalloz, 2001, p. 279, V° génocide.

* 109 Statut de Rome de la Cour pénal internationale du 17 juillet 1998, article 6. (Recueil de Droit International, collection d'instruments, Nations Unies, New York, 2018, tome II, pp. 349-367. Téléchargeable dans l'adresse : http://legal.un.org/poa et http://legal.un.org/avl )

* 110 Mohammad SHARIFIFARD, Op. Cit,. p. 14.

* 111 Ibid.

* 112 S/RES 780 du 6 octobre 1992. Disponible à l'adresse : https://daccess-ods.un.org/access.nsf/Get?OpenAgent&DS=S/RES/780(1992)&Lang=F. Consulté le 12 mai 2019 à 11h03'

* 113 S/RES 819 du 16 avril 1993. Disponible à l'adresse : https://daccess-ods.un.org/TPM/5769702.79216766.HTML. Consulté le 12 mai 2019 à 11h30'

* 114 Mohammad SHARIFIFARD, op. cit. p. 16.

* 115 Article 7 du Statut de Rome.

* 116 Article 8 du Statut de Rome.

* 117 Rapport de la CIISE : la responsabilité de protéger, op.cit., p.18, paragraphe.2.31.

* 118 Mohammad SHARIFIFARD, op. Cit. p. 18.

* 119 Rapport de la CIISE : la responsabilité de protéger, op.cit.., p.38, par.4.23 et p.54, par.6.14.

* 120 Paragraphe 139 du document de sommet mondial de 2005.

* 121 Mohammad SHARIFIFARD, op. Cit. p. 24.

* 122 Rapport de la CIISE : la responsabilité de protéger, op.cit., p.37, para.4.18.

* 123 Ibid, para. 4.19.

* 124Rapport du secrétaire général des Nations Unies sur La mise en oeuvre de la responsabilité de protéger, Op. Cit., p. 10.

* 125 Rapport du secrétaire général des Nations Unies sur La mise en oeuvre de la responsabilité de protéger, Op. Cit., p. 15.

* 126 Ibid, p. 23-24.

* 127 Rapport de la CIISE : la responsabilité de protéger, op.cit., p. 20.

* 128 Rapport de la CIISE : la responsabilité de protéger, op.cit., p. 21.

* 129 André CABANIS. Jean-Marie CROUZATIER et Ciprian MIHALI, op.cit., p. 64.

* 130Ibid., pp. 72-73.

* 131 André CABANIS. Jean-Marie CROUZATIER et Ciprian MIHALI, op.cit., p. 75.

* 132 Le Document final du Sommet Mondial du 20 septembre 2005, § 138.

* 133 André CABANIS, Jean-Marie CROUZATIER et Ciprian MIHALI, op.cit., PP. 76-77.

* 134 Rapport de la CIISE : la responsabilité de protéger, op.cit., p. 33.

* 135 Ibid.

* 136 Ibid..

* 137 Ibid, p. 34.

* 138 Article 10 et 11 de la charte des Nations Unies adopté à San Francisco le 26 juin 1945.

* 139 Rapport de la CIISE : la responsabilité de protéger, op.cit., p. 36.

* 140 Ibid, p. 37.

* 141 Rapport de la CIISE : la responsabilité de protéger, op.cit., p. 40.

* 142 Ibid, p. 41.

* 143 Rapport de la CIISE : la responsabilité de protéger, op.cit., p. 42.

* 144 Ibid.

* 145 Rapport de la CIISE : la responsabilité de protéger, op.cit., p. 43.

* 146 Rapport du groupement des acteurs ivoiriens des Droits Humains, Côte d'Ivoire : une décennie de crimes graves non encore puni, les victimes demandent réparations, Mars 2014, p. 19. Disponible à l'adresse : https://freedomhouse.org consulté le 2 juillet 2019 à 8h58'.

* 147 Rapport du groupement des acteurs ivoiriens des Droits Humains, p. 19.

* 148 Ibid, pp. 19-20.

* 149 Human Rights Watch, « Ils les ont tués comme si de rien n'était » Le besoin de justice pour les crimes post-électoraux en Côte d'Ivoire, octobre 2011, p 30 (une enquête menée en Côte d'ivoire sur les crimes commis pendant la période poste électorale). Disponible dans l'adresse : https://www.hrw.org consulté le 2 juillet 2019 à 8h36'.

* 150 Ibid.

* 151 Entretien accordé à Human Rights Watch par le frère d'une victime tuée par une grenade, Abidjan, 16 janvier 2011.

* 152 Entretien accordé à HRW par le témoin d'un enlèvement âgé de 19 ans, Abidjan, 12 janvier 2011 ; entretien accordé à HRW par un voisin de 38 ans témoins d'un enlèvement, Abidjan, 13 janvier 2011.

* 153 Entretien accordé à HRW par un dirigeant du MFA du quartier d'Abobo, Abidjan, 13 janvier

2011.

* 154 Entretien accordé à HRW par un témoin de l'enlèvement, Abidjan, 15 janvier 2011.

* 155 Entretien téléphonique accordé à HRW par une victime en fuite dans le nord de la Côte d'Ivoire, 14 janvier 2011.

* 156 Jean-Marie HENCKAERTS et Louise DOSWALD-BECK, Droit international humanitaire coutumier, vol 1, Bruxelles, Bruylant, 2006, p. 122. Règle 27.

* 157 Entretien accordé à HRW par un homme de 37 ans, Abidjan, 16 janvier 2011.

* 158HRW, « Ils les ont tués comme si de rien n'était » Le besoin de justice pour les crimes post-électoraux en Côte d'Ivoire, octobre 2011, p. 69.

* 159 Article 3 commun aux Conventions de Genève de 1949.

* 160 Sylvain VITE, « Typologie des conflits armés en droit international humanitaire : concepts juridiques et réalités », in revue internationale de la croix rouge, Vol. 91, N° 873, mars 2009, pp. 69-94.

* 161 TPIY, Affaire du Procureur contre Dusko Tadic, Arrêt rendu le 2 octobre 1995, paragraphe 70.

* 162 Résolution de l'Institut de droit international adoptée à la Session de Wiesbaden 1975 sur Le principe de non-intervention dans les guerres civiles, article 1.

* 163 PIETRO VERRI, Dictionnaire du droit international des conflits aimés, Genève, Presse du comité internationale de la croix rouge, 1988, pp. 37-38.

* 164 M. Sassòli, A. Bouvier et A. Quintin, Un droit dans la guerre ? Vol I, Genève, CICR, 2013, Partie I, Chapitre 8, p. 1.

* 165 Commission Nationale d'Enquête, Rapport d'enquête sur les violations des droits de l'homme et du droit international humanitaire survenues dans la période du 31 octobre 2010 au 15 mai 2011, Juillet 2012, p. 23. Disponible dans l'adresse : https://www.fidh.org consulté le 2 juillet 2019 à 8h30'.

* 166 Commission Nationale d'Enquête, Rapport d'enquête sur les violations des droits de l'homme et du droit international humanitaire survenues dans la période du 31 octobre 2010 au 15 mai 2011, Juillet 2012, p. 24.

* 167 Ibid, p. 24.

* 168 Commission Nationale d'Enquête, Rapport d'enquête sur les violations des droits de l'homme et du droit international humanitaire survenues dans la période du 31 octobre 2010 au 15 mai 2011, Juillet 2012, pp. 24-24.

* 169 Résolution de l'institut du droit international adoptée à la Session de Santiago 2007 sur les Problèmes actuels du recours à la force en droit international : Actions humanitaires.

* 170 Rapport de la CIISE : la responsabilité de protéger, op.cit., p. 25. Paragraphe 3.17.

* 171 Protocole relatif à la création du conseil de paix et de sécurité a été adopte le 9 juillet 2002 à Durban, article 2. Disponible à l'adresse : www.peaceau.org consulté le 2 juillet 2019 à 9h37'.

* 172 Le rapport de M. THABO MBEKI sur sa médiation en Côte d'Ivoire à la suite des élections. Disponible à l'adresse http://www.interwatch.org/rapports/rapport_tabo_mbeki.pdf. Consulté le 24 avril 2019 à 14h10'.

* 173 Institut des études de sécurité. «  Côte d'Ivoire : UA at a crossroad. Will the AU meeting finally resolve the Ivoirian political standoff ?» Communiqué 11 mars 2011. Disponible à l'adresse : http://www.issafrica.org/uploads/11March2011.pdf (9 octobre 2011), page 3. Consulté le 16 avril 2019 à 9h30'

* 174 G. OLAKOUNLE, Le rôle de la CEDEAO dans la gestion des crises politiques et des conflits : cas de la Guinée et de la Guinée Bissau, Abuja, Nigeria, FES, septembre 2010.

* 175 V. HUET, « L'autonomie constitutionnelle de l'État : déclin ou renouveau ? », in Revue française de droit constitutionnel 1/2008, n° 73, P.65. Disponible dans l'adresse : https://www.cairn.info/revue-francaise-de-droit-constitutionnel-2008-1-page-65.htm consulté le 2 mai 2019 à 8h30'.

* 176 Article 52 de la Charte des Nations Unies.

* 177 S/RES 1975 du 30 mars 2011 sur la crise politique en Côte d'Ivoire. Disponible à l'adresse : https://www.un.org/press/fr/2011/CS10215.doc.htm consulté le 2 mai 2019 à 8h30'.

* 178 CICR, Droit international humanitaire : réponse à vos questions, Genève, 2015, p. 7.

* 179 Nils Melzer, Droit international humanitaire, Genève, CICR, 2018, p. 308

* 180 Article 51 de la Charte des Nations Unies.

* 181 Résolution de l'institut de droit internationale adoptée à la Session de Rhodes 2011 sur les Problèmes actuels du recours à la force en droit international.

* 182 Document final du Sommet Mondial de 2005, paragraphe 138.

* 183 Damien MASSI LOMBAT PIERROT, « Les sources et fondements de l'obligation de coopérer avec la Cour pénale internationale », In Revue Québécoise de droit international, volume 27-1, 2014, p. 134. Disponible à l'adresse : https://www.persee.fr/doc/rqdi_0828-999_2014_num_27_1_1362 consulté le 2 juin 2019 à 8h30'.

* 184 Rapport de la CIISE : la responsabilité de protéger, op.cit., p. 33.

* 185 Damien MASSI LOMBAT PIERROT, Op. cit., p. 135.

* 186 Damien MASSI LOMBAT PIERROT, Op. cit., p. 134.

* 187Ibid ; p. 136.

* 188 Article 39 de la loi N°2000-513 du 1er Août 2000 portant Constitution de la Côte d'Ivoire. Disponible à l'adresse : http://www.loidici.org/constitutioncentral/codeconstitution,php consultée le 14 juillet 2019 à 01h30.






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