B. La nécessité de renforcer les
mécanismes de réparation et d'indemnisation
Le droit à la réparation et à
l'indemnisation des victimes de violation des droits fondamentaux au cours
d'une instance est garanti par l'article 19 al. 4 de la Constitution
Togolaise130. Ainsi le constituant togolais a
répondu aux exigences des normes internationales en la matière.
Dans la pratique, seules les personnes condamnées par erreur peuvent
dans le cadre de la demande en révision solliciter des
dommages-intérêts à
l'Etat131.
En ce qui concerne les détenus provisoires
bénéficiant d'une décision de non-lieu, l'Etat doit
pouvoir les indemniser. Cette question n'avait pas été la
préoccupation majeure du CPPT car ce dernier est presque muet.
Néanmoins, le CPPT a effleuré un peu ce sujet à travers
les dispositions de l'article 345 : « Le prévenu
acquitté peut solliciter des dommages-intérêts dont le
montant est fixé par le jugement d'acquittement s'il s'avère que
la partie civile a abusé de son droit d'agir en prenant à la
légère l'initiative des poursuites. » Il faut
128Haut-Commissariat des Nations Unies aux Droits
de l'Homme, Les droits économiques, sociaux et culturels, Manuel
destiné aux institutions nationales des droits de l'homme, série
sur la formation professionnelle n°12, New York et Genève
,Nations Unies : 2004, p.10.
129« La punition, la privation de liberté ne peut
faire du prisonnier un rebut humain, le prisonnier reste un sujet de droit
» (P. THIBAUD, Revue Esprit, numéro consacré à la
prison, nov. 1979, introduction). Toute personne privée de sa
liberté doit être « traitée avec humanité
et le respect de la dignité inhérente à la personne
humaine » (Pacte relatifs aux droits civils et politiques, art.
10).
130 Article 19 al. 4 de la Constitution Togolaise :
«Les dommages résultant d'une erreur de justice ou ceux
consécutifs à un fonctionnement anormal de l'administration de la
justice donnent lieu à une indemnisation à la charge de l'Etat,
conformément à la loi. »
131 Articles 408-412 du CPPT.
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noter que cette mission a été confiée
à la Chambre administrative de la Cour d'Appel qui entre temps avait
fermé ses portes aux justiciables. Pour rendre effectif cette chambre,
le Président de la Cour d'Appel de Lomé a, par une ordonnance
désigné un conseiller de ladite cour pour présider cette
chambre132.Il faut préciser qu'à la
date du 18 mai 2016, aucun juge n'a été nommé comme juge
assesseur. Mais cette chambre n'est pas toujours fonctionnelle.
En droit français, la procédure d'indemnisation
est réglementée par le code de procédure pénale
français et par décret133. En effet,
l'indemnisation suppose une détention provisoire ou une
incarcération provisoire et non un placement sous contrôle
judiciaire, un non-lieu, une relaxe ou un acquittement et un préjudice
manifestement anormal et d'une particulière gravité. Cette
dernière exigence vise à exclure à la fois une
réparation systématique. Mais cette dernière condition a
été modifiée par la loi française du 15 juin 2000
qui a assoupli la condition du préjudice.
Cependant, le besoin se fait sentir aujourd'hui de rendre la
procédure d'indemnisation plus efficace. Il faut aussi prévoir et
simplifier cette procédure c'est-à-dire instaurer une
indemnisation à toute personne victime d'une mesure de privation de
liberté au cours d'une procédure terminée à son
égard par un non-lieu, une relaxe ou un
acquittement134. La procédure
d'indemnisation peut, par exemple, relever de la compétence d'une
Commission composée de magistrats de la cour suprême,
des agents des finances, des agents de la Commission Nationale des
Droits de l'Homme et la société civile.
Le contentieux de réparation devrait également
prendre en compte les victimes de torture, des traitements cruels, inhumains et
dégradants. Pour que cela devienne une réalité, l'Etat
devrait responsabiliser tous les acteurs intervenant dans ce domaine. En cas de
manquement, la responsabilité de l'Etat peut être engagée.
Ce dernier à son tour exercera une action récursoire contre
l'agent fautif.
A l'analyse de tout ce qui précède et vue la
complexité des droits de l'homme, il y a lieu de soutenir que la mise en
oeuvre de ces droits exige plusieurs moyens.
Les Principes de Paris reconnaissent que, pour être
efficace, une institution nationale doit non pas agir seule, mais
établir et entretenir des rapports de coopération avec divers
132La cérémonie de réouverture
de la chambre administrative de la Cour d'appel de Lomé a
été lancée le 05 décembre 2015.
133 Articles 149 et 150 du CPPF et Décret N°71-5
du 04 janvier 1971 ; op.cité Jean Pradel, procédure
pénale, 14e édition Cujas, 2008/2009, p.709.
134 Ibid., op. cit. p.82.
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groupes et organisations135. Cette
tâche n'incombe pas seulement à l'Etat togolais mais
également à la société civile et à la
communauté internationale.
135Principes concernant le statut et le
fonctionnement des institutions nationales pour la protection et la promotion
des droits de l'homme. Ces principes ont été approuvés par
la Commission des droits de l'homme en mars 1992, (résolution 1992/54)
et par l'Assemblée générale (résolution
A/RES/48/134 du 20 décembre 1993).
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