Paragraphe 2 : Les défaillances des
mécanismes de contrôle
Les défaillances des mécanismes de
contrôle de la légalité de détention et d'inspection
des conditions de détention (A) et l'insuffisance des allocations des
établissements pénitentiaires (B) sont également des
limites à l'effectivité des droits socio-économiques des
détenus préventifs.
A. Les mécanismes de contrôle de la
légalité de détention et d'inspection des conditions de
détention carcérale
Il existe des mécanismes de contrôle
juridictionnels (1) et des mécanismes de contrôle non
juridictionnels (2).
1. Les mécanismes de contrôle
juridictionnel
Au titre des mécanismes juridictionnels de
contrôle de l'exécution des conditions de détention, le
législateur togolais a prévu deux contrôles internes et un
contrôle externe.
Le Procureur de la République et le Juge d'Instruction
assurent le contrôle des lieux de détention relevant de leur
ressort. Selon les dispositions de l'article 500 du CPPT : « Le
Ministère Public visite périodiquement les établissements
pénitentiaires de sa circonscription. Il vérifie la situation des
détenus et fait élargir tous ceux qui seraient détenus
arbitrairement. Il fait rapport au Ministère de la Justice du
résultat de ses visites, quant à l'application des dispositions
relatives à la condition pénitentiaire.» Cette mission
est également confiée au Juge d'Instruction. Aux termes des
dispositions de l'article 501 du CPPT : «Le juge d'instruction visite
au moins chaque trimestre le quartier des prévenus des
établissements de son ressort et veille au respect des dispositions
générales et particulières applicables aux
prévenus. Il dresse rapport de ses visites et le transmet au Procureur
Général par la voie hiérarchique. » L'objectif
de ces visites périodiques est de permettre à ces acteurs
judiciaires, de faire appliquer dans la mesure du possible la règle 8 de
l'ensemble des règles minimales pour la protection des personnes
détenues.
48
Cependant dans la pratique, ces prescriptions légales
ne sont pas observées. Ces visites périodiques sont inexistantes.
Ainsi, les détenus vulnérables sont laissés à la
merci des détenus plus forts et au personnel pénitentiaire.
Le contrôle juridictionnel externe est effectué
par l'Inspection Générale des Services juridictionnels et
pénitentiaires. L'équipe de l'Inspection Générale
est composée de deux hauts magistrats nommés par décret
présidentiel pris en Conseil des Ministres.
L'Inspecteur général des services
juridictionnels et pénitentiaires a pour attributions de :
contrôler le fonctionnement et la gestion interne des services et
juridictions (organisation, méthodes de travail, manière de
servir du personnel d'appui) ; mener des enquêtes et instruire les
plaintes et requêtes adressées au Garde des Sceaux, centraliser
les rapports des chefs de cours ; exploiter les données et toutes
études nécessaires à une bonne administration de la
justice.
Il existe une défaillance dans le fonctionnement de
l'inspection générale de l'administration des services
judiciaires et pénitentiaires en raison de l'irrégularité
de contrôles. Ce contrôle se fait une fois par
an90. Cela se justifie par le manque de ressources
humaines et financières. Ces irrégularités de
contrôle contribuent à la lenteur de l'appareil judiciaire,
à la dégradation des conditions de détention. Elles
favorisent également aux détentions abusives.
2. Les mécanismes de contrôle non
juridictionnel
Le système de justice togolais n'a pas en son sein un
mécanisme séparé uniquement mandaté pour faire des
enquêtes et des poursuites pénales sur des allégations
d'actes de torture, de mauvais traitements et autres formes d'abus commis par
des représentants de l'Etat. Alors que la Commission Nationale des
Droits de l'Homme (CNDH) a pour mandat de «vérifier» et
d'examiner les allégations de violations de droits de
l'homme91, elle ne dispose pas de pleins pouvoirs
d'enquête et de poursuites pénales.
Il faut relever que le Mécanisme National de
Prévention contre la Torture n'est pas encore opérationnel au
Togo. Ce mécanisme est intégré à la CNDH.
La commission des droits de l'homme de l'Assemblée
nationale exerce aussi un contrôle non juridictionnel dans les
établissements pénitentiaires.
90Ibid.,p.43.
91Article 2 lit c) et Articles 17 ff. de la Loi
Organique No. 96-12 of 11 Décembre 1996 relative à la
composition, l'organisation et au fonctionnement de la CNDH, modifiée et
complétée par la Loi Organique No. 2005-004 du 9 février
2005 (ci-après «Loi Organique de la CNDH»).
49
Cependant, il y a lieu de relever que les différents
mécanismes de contrôle susmentionnés effectuent rarement
des visites dans les lieux de détention afin de dissuader les auteurs de
violation des droits des détenus. C'est dans cette perspective que le
département d'Etat américain a relevé dans son rapport que
: « Il n'y avait pas des inspecteurs pour aider à
résoudre les plaintes des prisonniers et des détenus. Les
plaintes des détenus sont rarement l'objet d'enquêtes, et quand
elles le sont, les résultats ne sont jamais rendus publics. Aussi, les
enquêtes gouvernementales sur les mauvaises conditions de
détention sont-elles rares. Les Organisations non gouvernementales
locales et internationales comme le Comité international de la
Croix-Rouge (CICR) accréditées par le ministère de la
Justice ont, quant à elles, l'autorisation de visiter les prisons.
»92
En plus de ces défaillances de contrôle, il
existe également une insuffisance des allocations de prise en charge.
|