L'application de la responsabilité de protéger à la lumière de la souveraineté étatique. Cas de la Côte d'Ivoire.par GràƒÂ¢ce AWAZI KITAMBALA Université de Goma Faculté de droit - Licence en Droit Public 2019 |
B. Les phases d'adoption onusienne de la responsabilité de protéger53(*)C'est à Kofi ANNAN, véritable bâtisseur de normes, que l'on doit la survie de la « responsabilité de protéger » au sein des instances onusiennes. Ce dernier permet en effet au concept de suivre son chemin en créant d'autres rapports qui reprennent la terminologie de celui de la CIISE a. Première phase : vers la concrétisation du concept de la responsabilité de protégerLa première étape de la réflexion onusienne comprend deux rapports : le premier, réalisé en décembre 2004, a été marqué par la mise en place, par le Secrétaire général de l'ONU, d'un Groupe de personnalités de haut niveau sur les menaces, les défis et le changement. Ce Groupe a élaboré un rapport intitulé : « Un monde plus sûr : notre affaire à tous ». Sur le fond, ce rapport reprend quasiment les mêmes grandes lignes de celui de la CIISE, tels que la définition des termes du débat, le respect du principe de souveraineté, ainsi que les critères d'intervention militaire à des fins de protection humaine.54(*) En décembre 2004, le rapport du Groupe a été soumis à l'Assemblée générale par Kofi ANNAN qui s'est exprimé en ces termes : « L'histoire nous apprend que tous les Etats ne sont pas nécessairement toujours aptes ou disposés à assumer l'obligation qu'ils ont de protéger leurs populations et de s'abstenir de nuire à leurs voisins. Aussi faudrait-il, par le jeu du principe de la sécurité collective, confier une partie de ces obligations à la Communauté internationale qui, agissant conformément à la Charte des Nations Unies et à la Déclaration universelles des droits de l'homme, aiderait à mettre en place les moyens requis ou assurerait la protection nécessaire, selon le cas »55(*). Le rapport du Groupe écarte toute notion de droit d'ingérence, en précisant qu'« il est de plus en plus admis qu'il s'agit non pas du droit d'ingérence d'un Etat quelconque, mais de l'obligation de protection de chaque Etat.. »56(*) Le Groupe souligne également que les Etats signataires de la Charte de l'ONU jouissent des privilèges de la souveraineté, mais qu'ils en acceptent aussi les obligations. Cela implique que les Etats ont l'obligation d'assurer le bien-être de leurs populations et d'honorer leurs obligations vis-à-vis de la Communauté internationale. Pour ces Etats, à défaut de répondre à cette obligation, ou dans le cas où leurs responsables suscitent ou tolèrent de tels crimes, la Communauté internationale doit prendre les mesures nécessaires pour y mettre un terme et protéger les populations menacées, y compris le recours à la force armée, qui était une mesure possible, si nécessaire, et de dernier ressort. Dans cette optique, le rapport envisageait la notion de responsabilité de protéger comme « une nouvelle norme prescrivant une obligationcollective internationale de protection »57(*). Le rapport envisage de mettre en oeuvre la « responsabilité de protéger », et recommande des critères de base pour déterminer le moment où la Communauté internationale emploie la force, et souligne que cette intervention doit être de dernier ressort et respecter la proportionnalité. Le Conseil de Sécurité est considéré comme l'organe de l'ONU le mieux à même d'organiser des actions efficaces et d'intervenir promptement en présence de nouvelles menaces. Le second rapport, effectué en 2005, est intitulé « Dans une liberté plus grande ». Ce texte, qui remet à l'honneur la notion de sécurité, relie ce dernier terme à ceux de développement et de droit de l'homme, tout en soulignant qu'il n'y a pas de véritable sécurité si les droits de l'homme ne sont pas respectés, le respect des droits de l'homme étant un gage de stabilité et de développement. L'attention est également portée sur la consolidation de la paix, passant de la fin d'un conflit à une paix substantielle. Selon le rapport, lorsqu'un Etat n'est pas en mesure de protéger sa population contre les crimes, la Communauté internationale a la responsabilité de protéger les populations menacées par ces crimes, et doit d'abord recourir à des moyens diplomatiques, humanitaires ou à d'autres, plus appropriés58(*). * 53 Samira AGGAR, La responsabilité de protéger : un nouveau concept ? Thèse de doctorat à l'Université de Bordeaux en 2016, p. 77. Disponible dans l'adresse : https://www.theses.fr/121993698 consulté le 23 mai 2019 a 17h30'. * 54Rapport du Groupe de personnalité de haut niveau sur les menaces, « Les défis et le changement, Un monde plus sûr : notre affaire à tous ». A/59/565, 2 décembre 2004, p 20 § 18. Disponible à l'adresse : https://www.un.org/french/secureword/ consulté le 24 mai 2019 à 02h01'. * 55Ibid, p.23. § 29. * 56Ibid, p. 61. §201. * 57Rapport du Groupe de personnalité de haut niveau sur les menaces, « Les défis et le changement, Un monde plus sûr : notre affaire à tous ». A/59/565, 2 décembre 2004, pp. 61-62. §203. * 58 Samira AGGAR, Op. Cit., p. 79. |
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