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L'application de la responsabilité de protéger à la lumière de la souveraineté étatique. Cas de la Côte d'Ivoire.


par GràƒÂ¢ce AWAZI KITAMBALA
Université de Goma Faculté de droit - Licence en Droit Public 2019
  

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B. Les conditions particulières de l'intervention militaire

D'autres modalités pour déclencher la R2P par le moyen militaire se divisent en deux ; d'abord, il faut que l'intervention armée de la Communauté internationale se fasse légalement et conformément au droit international ; ce qui nous amène à la question de savoir qui est habilité à autoriser et à coordonner une telle intervention (a). Au-delà de cette condition formelle, il est nécessaire qu'une telle intervention soit substantiellement légitime et bien justifiée (b).

a. La condition formelle : l'autorisation de l'autorité appropriée

La possibilité d'intervenir militairement afin de faire cesser la violence doit être conciliée avec la règle bien établie du droit international de l'interdiction du recours à la force énoncée expressément à l'article 2 § 4 de la Charte des Nations-Unies. Pour cela, il s'agit de déterminer qui pourrait légalement décider de réagir au nom de la Communauté internationale. L'un des choix peut être de conférer à chaque État ou à une coalition des États une telle compétence en modifiant ou en donnant une nouvelle interprétation à cette règle. En effet, certains pensent que l'article 2§4 insiste surtout sur le fait que l'usage de la force ne doit pas être incompatible avec les buts des Nations-Unies et vu qu'une telle intervention ne se fera qu'en vue d'application de l'un des buts importants de la Charte, c'est-à-dire le développement du respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales, cette intervention paraît sinon complètement légale au moins vraiment excusable. Pourtant, il y a un fort doute qu'une telle interprétation de la Charte puisse facilement être acceptée ou qu'une modification soit réalisée. Au-delà de ce problème juridique, ce choix nous conduira à d'autres inconvénients. Il augmente évidemment le risque d'utilisation abusive du droit et par conséquent on sera en présence d'une « société plus anarchique » où la paix est plus fragile. 118(*)

De plus que dans ce cas, cette responsabilité ne pourrait pratiquement être appliquée que par les grandes puissances envers les États faibles ou fragiles. Donc, en l'état actuel du droit international, cette solution n'est ni souhaitable ni réalisable. Comme certains le disaient, le choix d'une autorité appropriée est généralement subordonné à sa légitimité devant la société internationale et à son impartialité. Au regard de ces critères, c'est l'ONU qui apparaît comme la seule instance internationale pouvant en assumer la responsabilité.

Composé de tous les États, elle est le centre principal de coordination de tous les efforts de la Communauté internationale notamment en ce qui concerne la paix et les droits de l'homme. Au sein de l'ONU, vu la responsabilité principale du Conseil de sécurité en matière de maintien de la paix, il paraît logique que la question d'entreprendre de telles opérations de protection relève aussi de sa compétence. En plus, du point de vue juridique, le Conseil de sécurité est le seul organe international possédant le pouvoir d'autoriser l'action militaire contre un État, ce qui constitue l'une des deux exceptions de la règle de l'interdiction de l'usage de force.

C'est pour cela que la CIISE a retenu le Conseil de sécurité en tant qu'autorité appropriée pour autoriser l'intervention armée au titre de la R2P en disant qu' « ...il n'y a pas de meilleur organe, ni de mieux placé, que le Conseil de sécurité pour s'occuper des questions d'intervention militaire à des fins humanitaires ».119(*) Dans le même sens, le document du sommet 2005 insiste explicitement dans son paragraphe 139 sur le rôle pertinent du Conseil de sécurité en la matière.120(*)Pourtant, il reste encore la question de portée du chapitre VII sur ce point. En effet, en vertu de l'article 39 de la Charte, la compétence du Conseil en vue de prendre des mesures coercitives y compris l'utilisation de la force armée, est restreinte en cas de menace contre la paix, de rupture de la paix ou d'acte d'agression ; ce qui démontre à première vue que les 4 crimes internationaux sont, surtout quand ils sont commis au sein de frontières d'un État, exclus de son champ d'application. En effet, l'interprétation correcte de la Charte en utilisant le sens ordinaire des termes exige que les notions de la paix et la sécurité visent seulement les situations interétatiques. La CIISE invoque la pratique du Conseil de sécurité après la guerre froide en adoptant une interprétation plus large de ces notions incluant les situations des violations massives des droits de l'homme qui lui a permis d'intervenir dans les situations n'ayant pas à priori des conséquences pour les autres États.

Il est vrai que le Conseil de sécurité n'hésitait pas ces dernières années à se reconnaître compétent dans de telles situations et l'exprimait explicitement dans ses résolutions relatives à la protection des civils en période de conflit armé. Mais ces pratiques ne pourraient en soi constituer un fondement juridique pour une telle dérogation de la Charte, car le Conseil ne pourrait théoriquement élargir ses pouvoirs en violation des dispositions de la Charte.

En fait, comme certains le disaient, la pratique du Conseil, ainsi que celle des États et des autres organes de l'ONU en la matière surtout le document du sommet de 2005 qui confère au Conseil le rôle de l'autorité doivent être considérées comme des éléments exprimant une « modification de fait » de la Charte. En d'autre terme, la pratique implique l'accord implicite modifiant le champ de compétence du Conseil de sécurité. En outre, on peut soutenir qu'aux yeux de la Communauté internationale la notion de la sécurité internationale ne fait plus seulement référence à la sécurité des États, mais que cette dernière, si elle n'a déjà été substituée, est au moins en train d'être substituée avec le concept de la sécurité humaine.

Dans ce cas, le Conseil de sécurité sera compétent dans toutes les questions touchant la sécurité des États et des gens. De toute façon, il semble que le Conseil possède la capacité juridique nécessaire pour autoriser de telles opérations. L'autorisation de l'autorité appropriée est une condition préalable mais non pas suffisante. En fait, le Conseil doit, avant de décider à autoriser l'intervention armée, évaluer la situation sur le terrain en tenant compte de certains critères pour qu'une telle autorisation soit bien légitime121(*).

* 118Mohammad SHARIFIFARD, op. Cit. p. 18.

* 119Rapport de la CIISE : la responsabilité de protéger, op.cit.., p.38, par.4.23 et p.54, par.6.14.

* 120 Paragraphe 139 du document de sommet mondial de 2005.

* 121Mohammad SHARIFIFARD, op. Cit. p. 24.

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