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La transaction en matière pénale.


par Constant TABOULACK FOKOU
Université de Yaoundé II-SOA - Diplôme d’Etudes Approfondies en droit pénal 2005
  

Disponible en mode multipage

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    REPUBLIQUE DU CAMEROUN REPUBLIC OF CAMEROON

    Paix- Travail- Patrie Peace-Work-Fatherland

    MINISTÈRE DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEURE MINISTRY OF HIGHER EDUCATION

    UNIVERSITÉ DE YAOUNDÉ II SOA UNIVERSITY OF YAOUNDE II SOA

    FACULTÉ DES SCIENCES JURIDIQUES FACULTY OF LAW AND POLITICAL

    ET POLITIQUES SCIENCES

    DÉPARTEMENT DE SCIENCES CRIMINELLES DEPARTMENT OF CRIMINAL LAW

    THEME : LA TRANSACTION EN MATIERE PENALE

    Mémoire présenté et soutenu publiquement en vue de l'obtention du Diplôme d'Etudes Approfondies (DEA)

    OPTION: DROIT PENAL

    Par

    TABOULACK FOKOU Constant

    Sous la direction de :

    Pr. Adolphe MINKOA SHE Agrégé des Facultés de Droit

    Soutenu publiquement le 13 décembre 2005

    i

    La faculté des Sciences Juridiques et Politiques de l'Université de Yaoundé II n'entend donner aucune approbation ou improbation aux opinions émises dans ce mémoire ; ces opinions devront être considérées comme propres à leur auteur.

    DEDICACE

    ii

    A ma grande soeur POKWOUO Micheline

    iii

    REMERCIEMENTS

    Nos sincères remerciements vont à tous ceux qui, de près ou de loin, nous ont apporté

    leur soutien et sans qui, ce travail n'aurait pas été réalisé et plus particulièrement :

    - Au Pr. MINKOA SHE Adolphe qui a bien voulu nous diriger et guider nos

    premiers pas dans le monde de la recherche en dépit de ses nombreuses occupations

    - A Mme MLEM MVA Pierrette qui nous a mis en confiance pour aborder ces études

    - A Mme NGONO Solange pour ses précieux conseils et sa disponibilité

    - A mon père FOKOU Jean Ferdinand et à ma mère MAKOGUEM Louise

    - A mes frères KENGNE Ives M., SOH Ebénézer, TCHOFFO Jules

    -A tous mes amis et camarades de promotion

    iv

    TABLE DES ABREVIATIONS

    Al. Alinéa

    -Ann. Annuaire

    -Art. Article

    -Bull.civ. Bulletin civil

    -C.A. Cour d'appel

    -Cass Cour de cassation

    -C.civ. Code civil

    -C.pén. Code pénal

    -C.pr. pén. Code de procédure pénale

    -C.S. Cour suprême du Cameroun

    -D. Dallloz

    -Ency.D. Encyclopédie Dalloz

    -Fac. Faculté

    -Gaz. Pal. Gazette du palais

    I-bid Au même endroit

    -Infra Ci-dessous

    -J.C.P. Juris-classeur Périodique

    -L.G.D.J. Librairie générale de droit et de jurisprudence

    -Ord. Ordonnance

    -R.S.C. Revue de Science Criminelle et de droit pénal comparé

    -Sq. Suivant

    -T C. Tribunal coutumier

    -TPI Tribunal de première instance

    -V. Voir

    v

    Sommaire

    Introduction générale 1

    Première partie : Le principe d'une admission de la transaction en matière pénale 9

    Chapitre 1 : Le recours à une procédure spéciale . .... ...11

    Section 1 : La position classique 12

    Section 2 : L'extension possible. 20

    Chapitre 2 : Mécanisme et nature des mesures transactionnelles ... 27

    Section 1 : Les formes de transaction . 28

    Section 2 : Nature de la transaction 37

    Chapitre3 : Le domaine des mesures alternatives aux poursuites 44

    Section 1 : Les infractions contre la personne et contre la famille 44

    Section 2 : Les infractions économiques et contre les biens 51

    Conclusion première partie 55

    Deuxième partie : La mise en oeuvre des alternatives aux poursuites 56

    Chapitre 1 : La procédure 58

    Section 1 : Conditions générales de la transaction pénale 59

    Section 2 : Déroulement de la transaction pénale 71

    Section 3 : Les mesures relevant de la transaction . 77

    Chapitre 2 : Effets et portée des mesures transactionnelles 81

    Section 1 : Effets de la transaction pénale 81

    Section 2 : Portée de la mesure . 90

    Conclusion deuxième partie 94

    Conclusion générale 95

    vi

    RESUME

    La transaction continue à être considérée comme une exception en matière pénale car elle est vue ici comme étant contraire à l'ordre public et aux droits de la défense. Malgré cette conception, l'idée d'une transaction comme alternative aux poursuites n'a cessé de faire du chemin. Et son développement, timide au départ, est aujourd'hui manifeste à travers les procédés telles que le «plaider coupable » et la médiation. La détermination de sa nature soulève quelques inquiétudes. Pourtant, la transaction offre des solutions intéressantes aux différents problèmes que connaît la justice tels que l'engorgement des tribunaux et la lenteur.

    Sa mise en oeuvre est soumise à des conditions liées à l'infraction, au délinquant et à la victime et qui visent à faire respecter les principes de la procédure pénale. Le respect de ces conditions fait produire à cette mesure des effets dont le principal est l'extinction de l'action publique. Il existe d'autres effets comme la non-inscription de la condamnation au casier judiciaire.

    La transaction se présente comme une mesure d'avenir pour une bonne administration de la justice.

    vii

    SUMMARY

    Transaction is still considered as an exception in criminal matter because it is seen in this domain as contrary to public policy and to the rights of the offender. Although this opinion, the idea of transaction considered as an alternative to prosecution is going on further. Its development can be seen throughout measures like "plea bargaining" and mediation. But the determination of its nature is not an easy task. However transaction offers solution to many problems faced by the justice like court's congestion, slowness.

    Its application is submitted to conditions related to offence, to the offender and to the injured person and aims at respecting criminal procedure's principles. The respect of those conditions produces many effects with the main being the barring of prosecution. Agreement between parties produces other effects such as the non transcription of the verdict in the criminal record.

    Transaction appears therefore as a measure of future for a good and fair administration of justice.

    1

    INTRODUCTION GENERALE

    L'une des fonctions essentielles de l'Etat est de faire régner l'ordre dans la société. Pour cela, il est tenu d'intervenir dans les différends entre les individus par l'organisation de la justice publique. Cette fonction n'a pas toujours été assumée ou bien assumée. En fait le premier mode de règlement des conflits dans les sociétés primitives fut la vengeance. Ensuite lui succéda la justice privée. Aujourd'hui, l'arbitrage a été remplacé par les tribunaux institués par l'Etat qui a désapproprié les individus de leurs conflits.

    Mais curieusement, on assiste à un regain d'intérêt pour les modes alternatifs de règlement des conflits notamment l'arbitrage, la conciliation et la médiation. La caractéristique essentielle de ces modes de résolution des conflits est la place qu'occupe la volonté des parties. Très justement, les parties sont libres d'en disposer comme elles l'entendent. On est amené à se demander ce qui explique un tel regain d'intérêt. L'une des explications possibles serait que le XXIe siècle est l'ère des libertés et que chacun a le droit de choisir comment résoudre le différend qui peut l'opposer à autrui. Mais, ce serait méconnaître l'encadrement des libertés qui imposent les limites aux libertés individuelles et déterminent le domaine d'exercice de celles-ci. Une autre explication tiendrait du fait que nous sommes dans un siècle de vitesse et où il faut gagner du temps. Au-delà de toutes ces explications, il se pourrait que la raison soit plus profonde.

    Tout d'abord, les modes alternatifs de règlement des conflits ont fait leurs preuves notamment en droit de la famille par exemple. Ceci a sans doute amené les justiciables à s'y intéresser de plus en plus. Ensuite, et cette raison semble assez fondamentale, ces modes supposent que les parties aient une grande confiance en celui à qui elles confient la résolution de leurs différends. Or justement, cette confiance semble faire défaut dans nos tribunaux

    2

    aujourd'hui. De fait, les justiciables ne sont plus satisfaits des services de la justice qui est non seulement très engorgée, mais à qui l'on reproche également la lourdeur de ses procédures. Bref, on assiste à une « crise des institutions judiciaires »1. D'où la résurgence des modes alternatifs de résolution des conflits qui s'épanouissent beaucoup plus en droit privé et particulièrement en matière civile ou en droit des affaires.

    A l'heure des mutations et des réformes de la procédure pénale (au Cameroun)2, en considération des droits de la défense à l'occasion d'un procès en particulier pénal, un constat s'impose : « le procès reste non seulement la conséquence d'un échec », mais « il ne résout pas tous les problèmes. Il faut encore faire accepter les solutions qu'il impose et surtout les faire exécuter » 3. C'est fort de ce constat qu'il nous a paru opportun de nous interroger sur de nouvelles procédures pénales notamment sur la possibilité d'une alternative à la poursuite et plus précisément sur la transaction. Déjà l'article 2046 du code civil dispose qu'« on peut transiger sur l'intérêt civil qui résulte d'un délit... ». S'il ne fait aucun doute que l'on peut transiger sur un intérêt civil, qu'en est-il en matière pénale ? Peut-on parler d'alternative aux poursuites notamment de la transaction en matière pénale ?

    La transaction est la convention par laquelle les parties terminent une contestation née ou préviennent une contestation à naître au moyen de concessions réciproques (art.2044 c. civ.). Elle se caractérise par trois éléments que sont : l'existence d'un litige, l'intention d'y mettre fin et les concessions réciproques dans ce but. Pendant longtemps et même jusqu'aujourd'hui, on reconnaît de manière unanime que la transaction n'est pas compatible avec l'idée de répression qui gouverne le droit pénal. Il est traditionnellement admis que l'on ne peut transiger sur les matières qui intéressent l'ordre public. Ce principe trouve deux

    1 Cette crise se traduit par la permanence de la justice privée. S'ajoute à ce tableau les évasions spectaculaires des prisons.

    2 Au moment où nous nous lancions dans la rédaction de ce travail, le projet de code de procédure pénale était en adoption à l'Assemblée Nationale.

    3 Discours de Guinard (J. M.), séance d'ouverture de la conférence du stage d'avocats au Conseil d'Etat à la cour de cassation, Gaz. Pal. 8 et 9 nov. 1995, p. 28.

    3

    ordres d'explications. La transaction intervenue entre le délinquant d'une part et soit un tiers, soit la victime d'autre part, est nulle. Ceci parce que la victime en particulier, si elle peut mettre en mouvement l'action publique4, elle ne peut l'exercer a fortiori en disposer. L'extinction de l'action publique ne peut davantage résulter d'une transaction directe entre le ministère public et le délinquant, par laquelle le premier s'engagerait à ne pas poursuivre ou à arrêter les poursuites en contre partie du versement d'une somme d'argent au Trésor public ou à la victime par le dernier. Cette solution s'explique par le fait que l'action publique n'est qu'exercée par le ministère public, elle ne lui appartient pas. Elle appartient au peuple au nom duquel la justice est rendue. Il ne peut donc en disposer encore moins y renoncer simplement.5

    Mais alors ce principe est-il absolu ? On répond par la négative. La transaction est admise pour certaines actions ayant un caractère particulier lié à la sévérité du régime juridique qui rend impossible l'admission des circonstances atténuantes ou l'application du sursis à exécution sur les peines pécuniaires. La transaction constitue ainsi le moyen de compenser la rigueur excessive de ce particularisme. Il s'agit des actions réservées aux administrations des eaux et forêts, des douanes et à l'administration fiscale. À côté de ces cas, on peut également citer les hypothèses où l'exercice de l'action publique est subordonné à une plainte de la victime. Mais il faut cependant nuancer cette position car il s'agit bien des cas formellement autorisés par la loi. Cette dérogation se justifie par le fait que les intérêts défendus ici sont assez particuliers et les infractions dans ces domaines ne portent pas atteinte, sinon très peu, à l'ordre public ou aux droits des tiers. Parlant justement d'intérêts, cette étude en présente plus d'un.

    L'étude des alternatives aux poursuites peut soulever une multitude d'interrogations auxquelles il serait très enrichissant de répondre, du moins pour ce qui concerne la transaction

    4 V. Pradel (J.) La procédure pénale, Cujas, Paris, 1972

    5 Si le système camerounais n'est pas celui de la légalité des poursuites, il soumet néanmoins l'activité du procureur au contrôle du parquet général qui peut remettre en cause une décision de classement sans suite. (V. art. 134 Code de procédure pénale).

    4

    telle qu'elle est admise à ce jour. Tout d'abord on pourrait se demander quelle est la nature de la transaction ? S'agit-il d'une sanction administrative ? S'agit-il d'un contrat ? Dans l'affirmative, quels en seraient les effets sur la procédure ? On imagine le cas des co-auteurs ou complices par exemple ; la transaction conclue par l'un pourra-t-elle être invoquée par les autres étant donnée que celle-ci a un effet extinctif sur l'action publique ? D'autre part, ces effets seront-ils les même selon que la transaction soit intervenue avant ou après le jugement ?

    Au-delà de toutes ces considérations, il y a d'autres intérêts à la fois scientifique, économique voire humain. D'un point de vue scientifique, il s'agit de contribuer à la résolution du problème de délinquance par la proposition d'une solution nouvelle qui, sans toutefois se soustraire à l'idée de répression dont est crédité le droit pénal, le présente sous un aspect moins contraignant et qui prend en compte les limites des solutions jusqu'ici appliquées.

    Par ailleurs il s'agit, dans une perspective avenir, de « débroussailler » le chemin de ce qui semble être l'avenir du Droit dans la matière pénale en particulier car, faut-il le rappeler, il est question de la recherche d'une bonne administration de la justice.

    D'un point de vue économique, l'intérêt d'une telle question n'est plus à démontrer. En fait, elle serait salvatrice pour les pays en voie de développement en particulier car elle permettrait de résoudre le problème d'engorgement des juridictions sans forcement avoir besoin d'augmenter les lignes budgétaires ou d'accroître le personnel. En outre, une telle solution aurait l'avantage de la célérité qui est un des paramètres d'une bonne administration de la justice, les affaires s'accommodant mal d'une justice lente. Cette solution serait donc, à terme attractive des investissements, sources d'emploi puisqu'elle offrirait l'assurance de la réparation effective du dommage subi.

    De plus, la résolution du problème de délinquance économique (infraction à laquelle elle s'applique) permettrait à l'Etat de dégager des ressources supplémentaires en recouvrant

    5

    effectivement les impôts. Dans le même sens, le recouvrement des amendes sera plus efficient.

    L'intérêt peut enfin être envisagé d'un point de vue de l'être humain. La transaction permettrait d'éviter la surpopulation carcérale qui, non seulement rend les conditions de détention inhumaines mais ne favorise pas la resocialisation des délinquants. Du côté de la victime, cette dernière serait sans doute plus satisfaite car en plus de favoriser une réparation rapide, elle ne se sentira plus oubliée mais écoutée car le regret exprimé ou le pardon demandé par le délinquant est souvent plus apaisant qu'une condamnation exemplaire intervenue dans le mépris total de la victime. Vu sous cet angle, la transaction serait aussi un instrument d'apaisement social.

    L'évolution de la société admet de plus en plus des pratiques qui étaient jadis interdites. Il existe au Canada, aux Etats-Unis et en Grande Bretagne, une pratique appelée le « plea bargaining » (le plaider coupable). C'est un échange entre l'avocat et le substitut du procureur en vue de la conclusion d'une entente portant soit sur l'infraction, soit sur la sentence. Elle est même devenue une pratique essentielle dans la procédure pénale américaine. Ne s'agit-il pas là d'une transaction à visage voilé ? Bien plus, la politique criminelle mise en place aujourd'hui, semble inadaptée à certains types de délinquances. En effet il existe des infractions qui, bien que n'étant pas graves, peuvent dégénérer et engendrer des troubles plus grands. Ne pas poursuivre ce type d'affaires n'est pas la solution car ce serait laisser la victime insatisfaite et donner à l'auteur le sentiment d'impunité fort préjudiciable pour l'avenir. On dénonce l'effet néfaste des courtes peines d'emprisonnement (rupture avec l'extérieur, contamination délictueuse, stigmatisation) et l'engorgement des tribunaux répressifs. Les autres solutions ne sont guère satisfaisantes. Le sursis sans mise à l'épreuve est vécu par le délinquant comme une absence de peine. L'efficacité de la sanction pécuniaire n'est guère meilleure. Une part considérable des amendes classiques n'est pas

    6

    recouvrée. Par ailleurs l'évolution économique et les nouvelles techniques de l'information et de la communication n'ont pas été seulement bénéfiques pour l'homme. Il s'en est suivi une crise des mécanismes de régulation sociale (la famille, l'école, l'Eglise et les autres structures de socialisation) beaucoup plus perceptible dans les pays en voie de développement tels que le Cameroun où ces structures connaissaient déjà de sérieuses difficultés. Compte tenu de tout ceci, la question est davantage de savoir si une alternative aux poursuites (la transaction notamment) ne peut pas être une solution à ces problèmes ? Ne faut-il pas étendre la transaction à toute la matière pénale ? L'effectivité et l'efficacité de la sanction pénale ne peuvent-elles pas être obtenues par ce moyen ? En d'autres termes, la transaction n'est-elle pas un gage d'une bonne administration de la justice si elle est une réponse aux problèmes de délinquance dont les politiques actuelles ne résolvent pas de manière efficace ? Au pardon qui, sous forme de grâce, intervient après la condamnation, ne faut-il pas ajouter un autre pardon qui, se plaçant avant les poursuites, paralyserait celles-ci sous condition d'une bonne conduite du délinquant ?6 Il est temps que le « judiciaire » et le « social » fassent front pour apporter des solutions nouvelles à la délinquance.

    La problématique étant ainsi libellée, nous pouvons formuler plusieurs hypothèses de recherche. Est-il possible d'admettre la transaction en matière pénale c'est-à-dire sur l'action publique ? Il faudrait alors vérifier si une telle admission peut s'étendre à toutes les infractions. Autrement dit, il sera question de rechercher le champ d'application d'une telle mesure. Il serait tout aussi, important de vérifier l'efficacité et l'effectivité de la transaction dans l'optique d'une bonne administration de la justice.

    L'engorgement des tribunaux et le volume d'affaires classées sans suite qui heurtent l'idée de justice et de protection de la société ont fait naître le besoin d'un traitement social de la délinquance en amont par des modes alternatifs de sanction et/ou de transaction. Entre

    6 Rolland (M.), « Le ministère public, agent non seulement de répression, mais de prévention », J.C.P. 1957 I, 1342, no 9 et s.

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    les poursuites longues, coûteuses et l'abandon pure et simple, il doit y avoir une forme moderne de justice plus généralisée que la transaction fiscale par exemple, et adaptée à l'évolution de la société. L'idée n'est pourtant pas nouvelle, c'est son acceptation et les tentatives de mise en oeuvre en droit pénal qui le sont à cause de multiples contestations. Pour les auteurs classiques, on ne saurait transiger sur l'action publique. La transaction est perçue ici comme une immixtion du civil dans le pénal, ce qui est contraire à l'idée selon laquelle le « criminel tient le civil en l'état. » D'autre part, en plus de violer les principes (présomption d'innocence, séparation des autorités de poursuite et de jugement) qui gouvernent la procédure pénale, la transaction serait incompatible avec le système inquisitoire en vigueur dans notre pays. Cette position traditionnellement admise et fortement défendue par les classiques connaît cependant depuis quelques décennies une remise en cause qui a amené déjà certains législateurs, notamment français, à consacrer les alternatives aux poursuites (Loi Perben II.) Depuis peu de temps, des auteurs se sont penchés sur la question et la tendance est à l'analyse de son admission. Ainsi pour RAYMOND GASSIN7, la transaction ne serait applicable que dans les cas spéciaux admis aujourd'hui c'est-à-dire aux actions réservées aux administrations fiscales, des douanes, des eaux et forêts. Telle n'est pas la position des auteurs comme JOCELYNE LEBLOIS-HAPPE8, KHADIDJA MEDJAOUI,9 pour qui une extension de la transaction ou d'une manière générale, des alternatives aux poursuites serait un moyen idoine de lutte contre la délinquance notamment la petite délinquance. Analysant la composition pénale consacrée par la France, JEAN PRADEL parle quant à lui de la « consécration du plea bargaining à la française ». Plusieurs thèses dans l'hexagone ont porté sur le sujet comme celle de B. Le PAGE-SEZNEC10, de J.F. DUPRE11. Dans le même sens Le

    7 Gassin (R.), « La transaction » Rép. Pen. D.2003.

    8 Leblois-Happe (J.) « La médiation pénale comme mode de réponse à la petite délinquance : état des lieux et perspectives », R.S.C. no3 1994,

    9 Medjaoui (K.), « L'injonction pénale et médiation pénale, tableau comparatif critique », R.S.C. no4 1996, 7721076.

    10 Le Page-Seznec (B.)La transaction en droit pénal, Thèse, Paris X, 1995.

    8

    Pr. HENRI BOSLY y a consacré un ouvrage intitulé La Transaction en droit pénal belge. Fort de toutes ces observations, il nous est paru important d'apporter notre contribution au débat. Cette procédure d'inspiration anglo-saxonne pose de sérieuses difficultés quant à son admission dans le droit français ou camerounais.

    L'essentiel de notre démarche consistera en la démonstration de la réalisation des différentes hypothèses avancées. Il s'agira d'une analyse des textes et de la jurisprudence afin d'en dégager les possibilités d'une intégration de cette pratique dans notre système.

    Malgré la réforme amorcée par le projet de code de procédure pénale, l'interdiction de transiger demeure. Pour cette raison, notre étude, bien que n'étant pas une étude comparative prendra comme base la pratique déjà utilisée dans d'autres législations.

    La transaction telle que nous l'envisageons ici a un caractère protéiforme. Aussi ce terme sera-t-il utilisé non seulement au sens où l'entend l'art. 2044 du c. civ. mais aussi comme terme générique englobant toutes les modalités de traitement des plaintes.

    S'inscrivant donc dans une perspective d'avenir, notre étude n'est envisageable que si l'on s'accorde sur l'idée d'une admission de la transaction généralisée à toute la matière pénale. Ce préalable fait, il nous incombera de voir comment cette mesure pourrait être mise en oeuvre. D'où le plan suivant :

    -l'admission de la transaction en matière pénale, (première partie)

    -la mise en oeuvre des alternatives aux poursuites, (deuxième partie)

    11Dupre (J. F.) La transaction en matière pénale, thèse Nancy, 1975.

    9

    L'idée d'un traitement social de la délinquance par des modes alternatifs de poursuites n'est pas nouvelle. C'est son acceptation et les tentatives de mise en oeuvre en droit pénal qui le sont. En effet, il existe au sein de la doctrine une opposition farouche à une idée de transaction pénale ainsi d'ailleurs qu'au sein de la jurisprudence12. Lorsqu'il est informé de la commission d'une infraction, le ministère public dispose de la liberté de poursuivre ou de ne pas poursuivre le délinquant. C'est le principe de l'opportunité des poursuites. Dans sa version stricte, ce principe se résume à un choix : le délinquant est renvoyé devant la juridiction compétente ou le ministère public classe sans suite. Le nombre considérable de classements sans suite13 a cependant incité à envisager de nouveaux modes de réaction sociale. Si pour des raisons évidentes l'extension de la transaction est à l'ordre du jour, les modalités d'une telle intervention divisent encore.

    La réticence de la doctrine à l'extension de la transaction en matière pénale, au-delà de la question liée à l'interdiction de transiger sur l'action publique, soulève d'autres interrogations, notamment celle du rôle du parquet dans une telle procédure.

    Outre cette question, il se pose le problème des mécanismes et/ou des modes de transaction, ainsi que celui de leur nature. Même si l'on admettait l'idée d'une transaction, il faudrait encore pouvoir cerner le domaine d'application de cette mesure car, faut-il le dire, le manque d'encadrement ou un encadrement laxiste aboutirait à des résultats choquants pouvant aller jusqu'à une « légitimation » de certaines infractions.

    Au demeurant, pour qu'un principe de transaction soit posé, il faudrait admettre la possibilité d'une autre façon de traiter la délinquance (chap. 1), en déterminer les modes et la nature (chap.2), en déterminer le domaine (chap. 3), étapes incompressibles dans la systématisation de cette procédure.

    12 V. décision no95-360 DC du 2 février 1995 du conseil constitutionnel déclarant l'injonction pénale contraire à la constitution, www.senat.fr

    13 Environ 80 % des affaires soumises au parquet sont classées sans suite parmi lesquelles 10 % seulement pour des raisons de pure opportunite,Mathias(E.) La procédure pénale Bréal éd..

    10

    CHAPITRE I. LE RECOURS A UNE PROCEDURE SPECIALE

    L'une des raisons fondamentales pour lesquelles la doctrine s'est toujours opposée à la transaction pénale est que celle-ci ne respecterait pas les principes directeurs de la procédure pénale. En réalité le droit pénal et, plus particulièrement l'action publique, a pour but d'infliger une sanction à l'auteur d'une violation de la norme sociale. Or, l'exercice de cette action relève de l'ordre public qui est incompatible avec la transaction.

    Mais l'évolution contemporaine du droit pénal, qui ne se pose plus simplement en terme de sanction du coupable des violations des règles de droit positif, propre à sauvegarder la loi, a rendu plus vaste la fonction de la justice et de ses organes14. L'idée d'un traitement social de la délinquance en amont, entre des poursuites longues et coûteuses et l'abandon pur et simple n'a cessé de faire du chemin, malgré de multiples débats et oppositions. Le droit d'inspiration romano-germanique a semblé finalement marquer son adhésion à cette idée en France, à travers le vote de la « loi Perben II » portant adaptation de la justice à l'évolution de la criminalité. Cette loi s'est fortement inspirée de la procédure anglo-saxonne du « plea-bargaining » pour instituer la « comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité »,une sorte de transaction entre le délinquant et le ministère public. Mais il faut dire que cette loi n'est qu'un aboutissement car ici, la pratique avait déjà retenu la composition pénale et la médiation pénale qui s'inscrivent dans le même sillage.

    Malgré cette évolution qui tend à se généraliser, le Cameroun semble encore rester à la traîne car même le Code de Procédure Pénale en cours récemment adopté n'admet que très

    14 Medjaoui (K.) « L'injonction pénale et la médiation pénale, tableau comparatif critique », R.S. C. IVO 4, 1996, p. 824.

    11

    timidement15 - sinon pas du tout - la transaction. L'admission d'une procédure spéciale de traitement de la délinquance pose en réalité un problème de confrontation et d'équilibre entre plusieurs principes constitutionnels et les principes généraux de droit en matière de procédure pénale. On peut dès lors comprendre pourquoi la doctrine manifeste en la matière une résistance très forte (S1) suivi en cela par le législateur. Pourtant, le code de Procédure Pénale, dans son effort de modernisation, tout en intégrant les nouvelles procédures d'origine anglo-saxonne comme il l'a fait, aurait pu adhérer à cette évolution. Ainsi, il aurait pu insérer dans notre système, qui s'y prête déjà fort bien, 16 la possibilité d'extension de la transaction à toute la matière pénale (S2).

    Section 1. LA POSITION CLASSIQUE

    Traditionnellement, il est reconnu que l'on ne peut transiger sur les matières qui intéressent l'ordre public et les bonnes moeurs. Ce refus ferme connaît cependant un léger tempérament, qui n'altère en rien la rigueur de la règle.

    Para. 1. De la non admission...

    La règle générale d'interdiction de transiger sur l'action publique semble trouver son fondement dans le souci de respecter les principes de base de la procédure pénale(A).17 Plus que des principes de procédure pénale, il s'agit des principes constitutionnels qui garantissent les droits de la défense(B).

    15 Le nouveau c. de pr. pén. admet la transaction uniquement lorsqu'elle est formellement autorisée par la loi. Art. 3. Par ailleurs dans une certaine mesure les amendes forfaitaires en matière de contravention éteignent l'action publique et leur versement facultatif : Art. 613 et 621.

    16 L'un des obstacles majeurs à l'entrée dans le droit romano-germanique de la transaction était son caractère inquisitoire essentiellement secret lors de l'enquête de police et n'admettant pas la présence du conseil. Le nouveau code de procédure pénale va un peu plus loin dans le sens ou le système devient un peu plus accusatoire.

    12

    A- La transaction serait contraire aux principes de base de la procédure

    pénale

    On retrouve dans les rangs des opposants à la transaction, non seulement la doctrine, mais aussi des praticiens du droit tels que les avocats. Même si les uns et les autres ne partagent pas cette idée pour des raisons parfois diverses, il n'en demeure pas moins que leurs points de vue s'accordent sur un certain nombre de points.

    1 - L'égalité de traitement

    Pour la doctrine classique, la transaction est contraire au principe de l'égalité de traitement des délinquants et l'impartialité qui devrait présider à l'exercice des poursuites n'est pas garantie. En effet, le risque de favoritisme et/ou de discrimination serait évident puisque, le parquet qui avait déjà le choix de poursuivre le délinquant ou de classer l'affaire pour des raisons d'opportunité, aurait désormais la possibilité d'obtenir une sanction sans l'épreuve de l'audience publique que certaines catégories professionnelles ou sociales redoutent fortement. C'est en tout cas le point de vue de JACQUES HEDERER.17

    2.- La non séparation des autorités de poursuite et de jugement

    On reproche aussi à la transaction de ne pas respecter le principe de la séparation des autorités de poursuites et de jugement. Corollaire du principe constitutionnel de la séparation des pouvoirs cher à Montesquieu, ce principe est sacré et ne devrait souffrir d'aucune ambiguïté. De fait, c'est au parquet qu'il appartient de proposer la mesure transactionnelle ; ce exerçant ainsi la liberté qui lui est reconnue, à travers l'opportunité des poursuites, de poursuivre ou de ne pas poursuivre. Comme le remarque ROBERT CARIO, « les choix décisionnels que le parquet formule dépassent très nettement le champ de ses

    17 Cario, (R.), « Potentialités et ambiguïtés de la médiation pénale, Entre Athéna et Thémis », in La médiation pénale. Entre répression et réparation, sous la direction de Robert Cario, l'Harmattan, 1999, p. 25.

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    compétences ».18 Pour trancher des suites à donner à la procédure poursuit-il, « il exerce des pouvoirs juridictionnels incontestables »19 dès lors qu'il peut choisir les solutions à proposer aux parties. Il devient dans une certaine mesure « juge de l'indemnisation des petits délits »20. Depuis l'ordonnance N° 72/4 du 26 août 1972 portant organisation de la justice, les fonctions d'instruction et de poursuites sont cumulées par le parquet. La jurisprudence corrobore cette consécration. La Cour Suprême affirme dans un arrêt que « Le parquet dans l'exercice des fonctions d'information judiciaire, constitue une juridiction comme en constituait le juge d'instruction dont les attributions ont été transférées au parquet »21. Si le parquet ou du moins le juge d'instruction est considéré comme une juridiction, la question se pose de savoir s'il peut bénéficier de l'intime conviction qui lui permettrait de se prononcer en toute liberté.

    En effet,le rôle du juge d'instruction lui donne la possibilité d'apprécier les charges réunies contre le suspect à la suite de son information. Or une telle appréciation ne peut se faire que s'il lui est reconnu une intime conviction22. Même s'il est difficile de reconduire cette jurisprudence avec les dispositions du nouveau code de procédure pénale, il n'en demeure pas moins que l'on ne peut, pour l'instant, reprocher au parquet de statuer comme juridiction. Déjà ce code adopté n'entrera en vigueur qu'un an après son adoption. Bien plus, il donne au procureur de la république la possibilité de se prononcer sur l'instruction avant que le magistrat instructeur ne prenne une ordonnance quant à la suite à réserver à la poursuite. Dans un tel contexte peut-on reprocher au ministère public d'outre passer ses compétences lorsqu'il propose une transaction ? D'autre part, sa position de protecteur des intérêts de la société ne lui confère-t-elle pas cette latitude de mieux apprécier ces intérêts et

    18 Cario (R.) op. cit, p. 25

    19 Ibid,

    20 Ibid.

    21 Arrêt N° 119 du 8 février 1979

    22 ANOUKAHA (F.) Le magistrat instructeur en procédure pénale camerounaise, thèse doctorat 3ecycle, Yaoundé, 1982 pp.155 - 165

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    de mieux les protéger par la prévention à travers la transaction qui se présente comme un moyen efficace de prévention de la récidive ?

    3 - Violation du principe Non bis in idem.

    L'hostilité vient également du non-respect du principe « non bis in idem »23. En vertu de ce principe, une même personne ne peut être jugée ou poursuivie à nouveau pour un fait délictueux déjà jugé. Or dans le cadre de la transaction (médiation), le procureur de la république garde la possibilité de déclencher les poursuites dans les délais de la prescription de l'action publique, ce qui est contraire au principe. En plus de violer la règle, il y a le risque que l'échec de la mesure entreprise influence sur la décision qui sera rendue au fond. Tout ceci est contraire à l'idée de procès équitable défendue par la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples en son article 7 al 1.

    Cependant, on peut se demander si une telle critique est vraiment fondée étant donné que le parquet n'exerce là qu'une prérogative qui lui est reconnue par la loi. Autrement dit, la proposition de transiger ne rentre-t-elle pas dans le cadre de l'opportunité des poursuites, décision administrative qui ne préjudicie en rien les droits de l'inculpé ?

    4- Recul de la sanction et impunité à prix d'argent

    Les reproches faits à la transaction sont nombreux et variés. Lorsqu'elle fut envisagée en Belgique dans les années 1935, la presse trouvait qu'elle « déconsidérait la justice et consolidait le privilège de l'argent »24. Pour reprendre les propos du Président DE HALLEUX, la transaction est « un recul de la répression » et l'extension de la transaction « l'impunité à prix d'argent ». Pour lui, « La composition en matière pénale, n'a rien d'un progrès et il faut rechercher les origines aux âges des tribus et des vengeances privées ». 25

    23 Cario (R.) op. cit. 26.

    24 La libre Belgique des 30 décembre1934 et 4 janvier 1935, citée par Bekaert (H.) La manifestation de la vérité dans le procès pénal, Bruxelles, Bruylant, 1972, p., 27.

    25 De Halleux, « La transaction introduite dans le droit pénal », Annales, 1939, p. 69 et s.

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    Par ailleurs, d'autres juristes ont eu à ce propos des réactions similaires. C'est notamment le cas des avocats en France qui, réagissant à la Loi PERBEN II26, ont estimé que la consécration de la C.R.P.C. portait atteinte à la fonction et à l'existence des avocats. Il est à craindre pensent-ils, que cette mesure ne fasse sombrer le métier ou plus exactement la publicité dont bénéficiait la fonction car sans audience publique suivie de débats intenses, certains avocats ne seront jamais connus et risqueraient de sombrer définitivement. De l'avis de certains, la procédure qu'on a voulu simplifier s'en trouverait plutôt alourdie et compliquée.

    B - Le non-respect des droits de la défense

    Des grands principes du droit pénal, il y a celui de la présomption d'innocence27. C'est d'ailleurs un « droit fondamental » constitutionnellement protégé (constitution du 18 janvier 1996) et prévu par plusieurs textes internationaux (Charte Africaine des droits de l'homme et des peuples, Déclaration universelle des droits de l'homme, Convention européenne des droits de l'homme).

    Cette présomption légale28 se trouve « renversée » d'après l'expression de Khadija Medjaoui et, au lieu d'une présomption d'innocence, on assiste avec la transaction plutôt à une « présomption de culpabilité »29. L'intervention d'une mesure de transaction au stade de l'appréciation de l'opportunité des poursuites, à défaut de traduire une précipitation dans le règlement du litige, marque une reconnaissance ou une déclaration explicite de culpabilité. Or à ce stade, il semble assez difficile de l'établir étant donné que le prévenu devrait être traité comme une personne n'ayant aucun contentieux, comme une personne libre et normale.

    26 Loi portant adaptation de la justice à l'évolution de la criminalité votée en France en mars 2004 et qui a institué la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité.

    27 V. Ngono (S.), « la présomption d'innocence », Revue africaine de Sc. Juridiques., vol. 2, no 2, 2001, pp.151 - 162.

    28 Merle (P.), Les présomptions légales en droit pénal, Paris, LGDJ, 1970, pp. 4 et s. Pour cet auteur, la présomption d'innocence n'est pas une présomption, mais un principe général de droit.

    29 Medjaoui (K.), op. cit. p. 826.

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    Pour balayer ces réserves à la crédibilité de cette procédure, ses défenseurs ont affirmé que le consentement du prévenu à la mesure répudiait largement cette critique. Pour eux, le consentement libre et éclairé du prévenu empêche l'atteinte à la présomption d'innocence. Mais cet argument n'a pas suffit à calmer les détracteurs de la transaction car de leur avis, même ce consentement était vicié puisqu'il ne traduisait que l'adhésion à un contrat auquel le prévenu ne pouvait que souscrire puisque n'ayant qu'un choix limité. Par ailleurs l'accord de l'intéressé ne lèverait pas objectivement ce manquement. Il constituerait même une atteinte à la liberté du prévenu de plaider coupable ou non coupable.

    Malgré toutes ces critiques, et sous certaines réserves, il a été néanmoins admis des hypothèses de transaction pénale.

    Para 2- ...À une admission restrictive

    L'admission timide de la transaction résulte de la réticence de la doctrine et du législateur. Elle trouve son origine dans l'Ancien droit et les cas se sont considérablement multipliés. Dans l'Ancien droit, le droit de transiger sur l'action publique était reconnu à la Ferme Générale pour les infractions relatives aux impositions affermées à l'exception de celles dont la poursuite entraînait l'application des peines corporelles30. Cette solution fut condamnée par la loi du 4 germinal an IV. Cette interdiction suscitera des protestations qui vont conduire à la suppression de la règle d'interdiction de transiger. L'admission profita d'abord à l'administration des douanes, puis progressivement aux autres administrations. Du fait de la colonisation, le Cameroun héritera de tous ces acquis.

    Mais une autre explication pourrait venir du souci de limiter le monopole du ministère public dans le déclenchement des poursuites, sans compter qu'il existe des intérêts spéciaux qui justifient également une telle solution.

    30 Gassin (R.), la transaction, Rep. Pén., D. 2004

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    A- La limitation du monopôle du ministère public

    Seule le ministère public dispose du pouvoir d'exercer l'action publique. En son article 143 al (1) le code de procédure pénale dispose que : « sous réserve des dispositions de l'article 157, le juge d'instruction ne peut ouvrir une information judiciaire que s'il est saisi par un acte du procureur de la république ». Par ailleurs, le ministère public dispose de l'opportunité des poursuites. Pour vaincre l'inertie que cela peut engendrer, il a été reconnu à certaines administrations le pouvoir de déclencher l'action publique et surtout celui d'obtenir satisfaction par le biais de la transaction.

    Mais le fondement d'une telle admission semble être beaucoup plus technique. En effet, la répression des infractions fiscales par exemple obéit à un régime juridique très sévère comportant l'impossibilité d'excuser le contrevenant sur sa bonne foi et d'admettre les circonstances atténuantes ou le sursis à l'égard des peines pécuniaires. La transaction constituerait ainsi le moyen de compenser la rigueur excessive de ce particularisme31.

    À côté des cas où le déclenchement des poursuites est partagé avec certaines administrations, il y a le cas où celui-ci est soumis à une plainte préalable de la victime. Dans une telle hypothèse, la transaction intervenue entre elle et le délinquant met fin à l'action publique déjà engagée.

    Les intérêts particuliers que défendent ces administrations ainsi que les victimes dans le cas sus évoqué justifient l'admission de la transaction.

    B - Les intérêts spéciaux

    Certains intérêts justifient le recours à la procédure de transaction, car elle est assez favorable pour certaines administrations en tant que mode de répression. Il s'agit des administrations des eaux et forêts, des douanes, de l'administration fiscale et des postes et télécommunications. La transaction leur donne un moyen particulièrement efficace de

    31 Gassin, op. cit.

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    recouvrement de leur dû. Par ailleurs, la nature des infractions fiscales par exemple, et par ricochet, celle de l'amende fiscale fonde utilement cette faculté. Les infractions fiscales constituent en effet moins des violations de l'ordre social que des atteintes au patrimoine particulier de l'Etat de telle sorte que l'amende fiscale présente un caractère essentiellement indemnitaire32.

    A côté de ces cas formellement reconnus par la loi, il existe des cas de transaction non prévus, mais dont la pratique s'accommode fort bien. Ces derniers rentrent dans le sillage des intérêts (particuliers) dont la violation porte plutôt atteinte à un patrimoine particulier. C'est par exemple le cas du vol spécial d'énergie prévu par l'art. 319 du code pénal.

    Des enquêtes menées auprès du service contentieux de l'Agence centrale AES/SONEL33 de Yaoundé, il ressort que cette société pratique la transaction. Elle préfère l faire appel à cette solution plutôt que de porter directement l'affaire devant les juridictions lorsque l'auteur des faits accepte la proposition de régler les impayés et les amendes ou pénalités que la société propose. En réalité, cette société « ne voit pas l'intérêt d'une action en justice si elle peut par ce moyen recouvrer autrement son dû, l'essentiel étant ce dû ».

    Si les intérêts patrimoniaux ouvrent droit à la transaction, d'autres intérêts assez privés et personnels le permettent également. C'est le cas des infractions dont la mise en mouvement de l'action publique est soumise à une plainte préalable de la victime, telles que l'adultère, l'injure, la diffamation ou la violation de domicile. Le caractère assez privé de ces infractions fait qu'il soit possible de transiger car il y va de la vie privée de la victime.

    La réticence à l'admission de la transaction ainsi que les fondements donnés à celle-ci auraient dû limiter le domaine de l'institution aux matières fiscales et assimilées. Or l'on s'est rendu compte qu'à l'époque contemporaine, elle déborde largement le domaine des infractions fiscales. Loin de s'étendre uniquement aux infractions économiques, elle s'étend

    32 Helie (F.), no 577 ; Garraud, t 1, no94; Causse, La transaction en matière pénale, thèse, Toulouse, 1945, cité par Gassin.

    33 Société chargée de la distribution de l'électricité au Cameroun

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    aux contraventions de police voir aux infractions liées à la vie privée. Alors, n'y a t-il pas lieu de poursuivre ce mouvement d'extension vers d'autres infractions ?

    Section II. L'EXTENSION POSSIBLE

    La transaction en matière économique est admise en France depuis la loi du 21 octobre 1940. A cette époque, elle répondait à des besoins d'efficacité de l'action de l'administration mais aujourd'hui, l'extension de la transaction s'explique beaucoup plus par des besoins d'adaptation de la répression à la criminalité (P1). Le service de la justice est aujourd'hui à la recherche de l'efficacité qui passe par une certitude de la répression que semble offrir des alternatives à la poursuite (P 2).

    Para 1 - Pour des besoins d'adaptation de la répression à l'évolution...

    L'évolution de la société impose des simplifications de la procédure pénale car non seulement le volume des affaires à traiter a augmenté, mais aussi la criminalité a pris des formes variées et multiples. L'allègement du « rite judiciaire » s'impose tout comme l'adaptation de la répression aux formes de criminalités (A). Mais cette répression devrait également se plier aux exigences des droits humains (B) en portant une attention particulière à la victime (C).

    A.- De la criminalité

    Jadis notre société était moins exposée à certaines difficultés du fait de la non urbanisation. Le phénomène urbain a créé, avec l'entassement des populations et la multiplication des contacts entre individus, un milieu de culture particulièrement propice au développement de la criminalité et aux atteintes de tout genre aux normes sociales.

    Malheureusement, les conflits créés par une telle situation sont nombreux et les victimes sont le plus souvent négligées. Plus encore, les auteurs ne sont pas très souvent punis. Ces conflits sont, pour la plupart, liés aux troubles de voisinage. En général, les faits

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    sont d'une gravité moindre mais leur répétition conduit à une détérioration des relations sociales.

    La répression ordinaire ne donne pas souvent aux magistrats la possibilité de réprimer de tels faits car ils sont renfermés dans des règles rigoureuses. Du coup, l'action de ceux-ci se trouve vouée à l'échec, à moyen ou long terme. Une telle rigueur rend la justice inadaptée à régler ce genre de délinquance. Les alternatives aux poursuites offriraient le moyen d'y remédier car non seulement elles permettraient le maintien d'un climat social détendu, mais aussi et surtout apporteraient une solution « libérée du carcan des règles juridiques »34.

    « L'anachronisme »35 de la justice répressive n'est donc pas relatif uniquement à son incapacité à traiter la délinquance urbaine. Il tient aussi à l'inadaptation de ses mesures aux exigences contemporaines de droits humains.

    B - Aux exigences des droits humains

    Le droit pénal traverse une crise liée à son inadaptation à protéger les valeurs fondamentales de la collectivité ; et le droit pénal spécial subit de plein fouet ce choc à cause du changement des idées et des moeurs36. En effet, ce qui allait de soit hier n'est plus très évident aujourd'hui. La détermination de la politique criminelle a toujours posé un problème de choix entre la protection des droits individuels et la protection des droits collectifs. « La doctrine du XIXe siècle considérait plus ou moins ouvertement que les délinquants perdent, du fait de la violation du pacte social, l'usage de la plupart des droits de l'homme ». La démocratie et « l'inflation » des droits de l'homme ont remis en cause une telle conception du délinquant. En tant qu'être humain, il lui est reconnu des droits irréductibles qui commandent

    34 Berg (R.), Médiation pénale, Rép. Pén., D.

    35 Ibid.

    36 Léaute (J.), « Droit pénal et démocratie », in Aspects nouveaux de la pensée juridique, recueil d'études en hommage à Marc Ancel, Paris, Pedone p. 151.

    21

    qu'il soit traité en toute circonstance avec dignité,37 y compris lorsqu'il mérite un châtiment. Ainsi « le châtiment doit avoir l'humanité pour mesure »38.

    Pour reprendre le Pr. MINKOA SHE, « la répression doit tirer sa légitimité du respect des droits de l'homme »39. Les alternatives aux poursuites permettraient le respect des droits fondamentaux de l'inculpé en lui évitant l'emprisonnement qui, à lui tout seul, par des conditions de détention inhumaines est déjà en soi une violation de ces droits40. Bien plus, elles seraient un moyen efficace de prévention de la récidive que favorise la prison. Comme le relevait TARGET : « C'est la nécessité de la peine qui la rend légitime. Qu'un coupable souffre, ce n'est pas là le but de la peine mais que des crimes soient prévenus, voilà ce qui est d'une haute importance »41.

    Les critiques contre la privation de liberté ne sont pas récentes. De nombreux auteurs ont prôné ce que Jean PRADEL a appelé une « application du droit pénal douceur ». En tête de ce mouvement d'extrême méfiance à l'égard de la privation de liberté, on retrouve FOUCAULT qui s'insurge contre le « caractère disciplinaire et malfaisant de la prison ». Si à une époque elle semblait être une peine humanitaire - par rapport aux peines corporelles - aujourd'hui, de nombreuses études psychologiques, sociales et économiques ont fait apparaître ses inconvénients. C'est en tout cas ce qui ressort d'un document de la Commission de reforme du droit au Canada publié en 1975, intitulé « Etudes sur l'emprisonnement ».42

    37 Charte africaine des droits de l'homme et des peuples, art. 5; préambule constitution du 18 janv. 1996.

    38 Foucault (M.), cité par le Pr. Minkoa She, Droits de l'homme et droit pénal au Cameroun, Economica, 1999, p. 14

    39 Minkoa She ibid.

    40 Des rapports du MINATD., il ressort que les droits de l'homme sont souvent bafoués dans les prisons. Outre la surpopulation (construite pour 800 places, la prison centrale de Yaoundé en compte plus de 3000 à ce jour) il y règne l'insalubrité (16 toilettes et douches pour 3.000 âmes). De même dans un de ses rapports publiés en 1998, Amnesty international écrivait « les prisonniers sont régulièrement passés à tabac. Il sont mis au fer dans les cellules dépourvues de lumière, d'équipement sanitaire et d'eau ».

    41 Locré, Législation civile, commerciale et criminelle de la France t. XXIX, 1832 p.8.

    42 Pradel (J.), Histoire des doctrines pénales, « Que sais-je ? » PUf, 1992, p. 111. Ce document considère l'emprisonnement non seulement au regard des idées de justice et d'humanité, mais aussi sur le plan économique. Le « principe d'économie exige qu'on vise à réduire au maximum le sacrifice imposé à la société, au système pénal, au condamné et aux siens. Le coût économique de la privation de liberté ne se limite pas à la construction et à l'entretien prisons »

    22

    Dans le même sens MITTERMAIER disait déjà que « le régime cellulaire est une barbarie digne des siècles les plus grossiers du Moyen-âge ». 43

    A défaut tout simplement de dépénaliser ou de classer sans suite, une transaction serait une solution alternative située en amont des poursuites pour neutraliser celles-ci et ainsi éviter au délinquant les effets néfastes de l'emprisonnement. L'évolution aidant, « la volonté des morts ne suffit plus à justifier ni la condamnation capitale, ni la privation de la liberté... »44 .

    C - La prise en compte de la victime

    Les criminologues ont pendant longtemps affirmé que le droit pénal classique ne connaît que l'infraction et la peine, mais ignore le délinquant et qu'il est le droit de l'acte et non celui de l'auteur. Cette affirmation vaut autant pour le délinquant qu'elle semble l'être pour la victime car très souvent, celle-ci est négligée voire oubliée. Et lorsqu'il arrive que cette dernière sollicite des dommages et intérêts pour le préjudice subi, elle n'est pas souvent payée.

    De fait, le recouvrement des créances, tel qu'il est organisé, donne la priorité aux créances de l'Etat c'est-à-dire aux frais de justice et aux amendes dans le cas où celles-ci seraient prononcées en même temps que les dommages et intérêts accordés à la victime. Le condamné cherchera d'abord à régler les frais dus à l'Etat avant de voir le cas de la victime. Il s'ensuit alors que soit elle est réglée tardivement, soit elle n'est pas du tout réglée. Cette situation est à l'origine de la création et de la multiplication des associations d'aide aux Victimes telles que INAVEM (Institut National D'aide aux Victimes et de Médiation).

    Par ailleurs la victime est le plus souvent mal écoutée car si dans une situation elle pourrait se satisfaire d'une sanction, d'une peine infligée à l'auteur, dans telle autre par

    43 Pradel (J.), ibid. p. 60.

    44 Léaute, op. cit.

    23

    contre, elle aimerait que ce dernier restitue ce qu'il a volé, ou enfin préférerait une satisfaction ou réparation psychologique45.

    Avec la transaction, le droit pénal aura une oreille pour la victime qui pourrait, dans certains cas dire ce qu'elle pense et ce qu'elle désire et voir cela être pris en considération. Para. 2 - Pour une certitude de la répression

    Parler de la certitude de la répression lorsque l'on traite des alternatives aux poursuites peut paraître étonnant pour les tenants de l'idée selon laquelle celles-ci sont un recul sinon une consécration de « l'impunité au prix d'argent ». Pour eux, le but de rétribution et d'intimidation de la sanction ne peut pas être atteint par ce moyen.

    C'est en fait le sempiternel débat qui a cours sur le but de la punition. Doit-on punir pour infliger des souffrances au condamné et par-là décourager la récidive et les éventuels délinquants comme le soutiennent les néo-classiques ou alors doit-on punir dans l'optique de traiter et de resocialiser le délinquant comme le soutient la défense sociale. Point n'est besoin pour nous ici de revenir sur un tel débat. Quelle que soit la position adoptée, il est question d'extirper le mal de la société. Et pour y parvenir il faut que la répression soit certaine donc efficace. La certitude de la répression n'est pas forcement synonyme de souffrance ou de sévérité de la peine. MONTESQUIEU le soulignait déjà lorsqu'il affirmait qu'« il ne faut point mener les hommes par les voix extrêmes(...) qu'on examine la cause de tous les relâchements, on verra qu'elle vient de l'impunité des crimes et non pas de la modération des peines46». C'est dire que le risque est moins dans les peines plus douces que dans l'impunité. Car une peine moins sévère si elle avait la certitude de son application, serait plus efficace qu'une peine lourde dont l'exécution ne sera jamais effective ou achevée du fait de la libération conditionnelle ou de la grâce.

    45 Salzer (J.), cité par Leblois-Happe (J.), op. cit. p.532

    46 Montesquieu cité par Pradel (J.) op. cit.

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    Même sur ce point une mesure alternative à la poursuite ne serait pas aussi douce que l'on pourrait y croire. Au fond, le prévenu vivrait avec la crainte et la menace d'une sanction en cas d'inexécution de la mesure consentie. Pour s'en convaincre, il suffit de relire le rapport de TARGET au Conseil d'Etat qui disait « ...L'efficacité de la peine se mesure moins sur la rigueur que sur la crainte qu'elle inspire » 47. Précisément, l'inculpé sait non seulement la peine qu'il doit subir, mais mesure l'ampleur d'une sanction en cas de poursuite.

    L'acceptation par l'inculpé de réparer le dommage causé et de payer l'amende est un bon signe vers la resocialisation. Dès lors, on peut estimer que le traitement sera atteint et la prévention de la récidive assurée. Ceci pour la simple et bonne raison qu'« on corrigera plus aisément les coupables si on diminue leur peine, car on surveille plus exactement sa conduite lorsqu'on n'a pas perdu entièrement son honneur »48. Ainsi, le coupable fait amende honorable, et s'il est fait appel à son sens de responsabilité, le but de la sanction sera plus atteint ; cette responsabilité étant « non le point de départ de la condamnation, mais son point d'arriver, son but » 49 . Et donc, « est-il vraiment choquant qu'une personne poursuivie commence à faire amende honorable avant d'être condamnée en reconnaissant les faits qu'elle a commis et en demandant à les réparer, facilitant ainsi l'action de la justice ? Ne s'agit-il pas d'une voie plus conforme à la dignité humaine et de ce fait, plus éducative donc plus efficace » ? 50

    Voila quelques raisons parmi tant d'autres pour lesquelles une mesure alternative aux poursuites est d'un intérêt capital pour une bonne justice.

    47 Locré op. cit.

    48 Sénèque, De la clémence, I, 22, cité par Pradel op. cit.

    49 Merle et Vitu, Pédagogie de la responsabilité cité par Pradel, ibid.

    50 Molins (F.), « Plaidoyer pour le « plaider coupable », des vertus d'une peine négociée, in Le Nouveau procès pénal après la loi Perben II, dossiers de la journée d'étude Dalloz du 8 mars 2004, Paris, Dalloz,, 2004, p. 418.

    CONCLUSION CHAPITRE

    Malgré les critiques, l'idée d'alternatives aux poursuites a fait son chemin. De l'interdiction de transiger en passant par les « substituts » à l'emprisonnement, on est inexorablement en train de tendre à une admission plus large de la transaction par son extension progressive à la matière pénale. Jadis limitée à certaines matières spécifiques, elle s'étend aujourd'hui à de nouvelles matières. Ceci n'est que normal au regard de l'évolution sociale puisque « la fidélité au passé ne peut constituer un titre au maintien des règles transmises que sous bénéfice d'un inventaire exercé par la société de contemporains à qui ces règles sont destinées ». 51 Mais une telle évolution ne peut bien suivre son cours que si aucun doute n'entoure les modes et la nature des mesures envisagées.

    25

    51 Léaute (J.) op. cit. p. 152.

    26

    CHAPITRE II. MECANISME ET NATURE DES MESURES TRANSACTIONNELLES

    Traditionnellement, une infraction était poursuivie par le parquet (sous réserve du classement sans suite dans les systèmes opportunistes) et se trouvait sanctionné d'une peine. Ce schéma classique est aujourd'hui contesté par les adeptes du recul du système pénal qui suggèrent de faire appel à la «dépénalisation» ou à la «diversion». La dépénalisation recouvre les formes comme le passage d'une infraction du statut de crime à celui de délit ou le remplacement d'une peine privative de liberté par une alternative à celle-ci. La diversion quant à elle consiste à l'abstention de poursuivre ou l'arrêt des poursuites pénales lorsque le système de justice pénale est régulièrement compétent avec appel à des techniques extrapénales.52 Le souhait de raréfier l'application de la privation de liberté devait conduire les auteurs à suggérer des alternatives à celle-ci. FERRI en son temps avait déjà imaginé plusieurs, même s'il ne croyait pas à leur efficacité. MICHAUD recommandait quant à lui le travail d'intérêt général. L'épanouissement de la vie économique, l'automation industrielle et l'accélération des déplacements sont l'une des causes de ce mouvement de recul du système pénal. Ce mouvement traduit au fond le souci de simplifier la procédure. Il fallait donc, comme le dit le Pr. FETTWEIS, « dégager les rôles des juridictions et assurer la répression simple et rapide des infractions « les moins graves » par un allègement de ce que François Clercq appelle le « rite judiciaire » 53. Pour répondre à cette préoccupation, le législateur camerounais avait déjà mis sur place des mesures allant dans ce sens. En fait « le législateur a toujours voulu simplifier la procédure pour la rendre d'un maniement plus aisé »54. Mais on

    52 Pradel, op. cit.

    53 Bekaert (H.), La manifestation de la vérité dans le procès pénal, Bruxelles, Bruylant, 1972

    54 Anoukaha (F.) Le magistrat instructeur en procédure pénale Camerounaise, thèse doctorat 3e Cycle, Yaoundé 1981. p. 117.

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    peut envisager divers moyens qui permettent d'y parvenir et il n'est pas douteux que les alternatives aux poursuites auraient méritées de retenir l'attention du législateur.

    Ainsi les législations étrangères ont prévu des mesures autres que la flagrance ou les alternatives à l'emprisonnement. Ces mesures sont très en vue dans la procédure contemporaine. Si les auteurs tendent à s'accorder sur leurs vertus (S2), les opinions divergent cependant sur leur nature. Toujours est-il que pour procéder à une qualification, il est important de connaître ces mesures à travers leur description (S1).

    Section 1- LES FORMES DE TRANSACTION

    En droit positif actuel, la panoplie des alternatives s'est diversifiée à un point extrême si bien que l'on peut aujourd'hui parler de la « théorie des alternatives55. En témoignent les enquêtes qui sont innombrables ainsi que les comptes rendus des discussions menées devant la Société Générale des prisons. Si ces affirmations font beaucoup plus allusion aux alternatives à l'emprisonnement, il n'en demeure pas moins vrai que dans le domaine des alternatives aux poursuites, le foisonnement est aussi présent. Plusieurs variétés d'alternatives aux poursuites ont été instituées. Toutes n'ont pas reçu le même écho. C'est le cas de l'injonction pénale en France qui a été déclarée inconstitutionnelle par une décision du Conseil Constitutionnel55.

    Malgré cette tentative avortée, le législateur n'a pas baissé les bras et une loi de 1999 va instituer la composition pénale. Un peu plus tard, en 2004, la loi Perben II va consacrer La comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, une sorte de « plaider coupable » « à la française ». 56 Un peu plus tôt au début des années 1990, la loi no 93-2 du 4 janvier 1993 avait entériné la médiation pénale.

    55 Pradel (J.), Op. cit.

    55 Décision no95-360 DC du 2 février 1995.

    56 Céré (J-P.), De la composition pénale à la Comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité : le «plaider coupable» à la française in « Le nouveau procès pénal après la Loi Perben II ». Dossiers de la journée d'études Dalloz 2004. Paris Dalloz 2004. p. 388 et s.

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    Para. 1- La composition pénale

    C'est une des procédures alternatives aux poursuites par excellence permettant au Procureur de la République de proposer au mis en cause des mesures dont l'acceptation et l'exécution arrêteront les (éventuelles) poursuites puisqu'elle éteint l'action publique. Elle ne constitue pas un jugement et, encore moins une peine car elle est essentiellement écrite. Instituer par la loi n° 99-515 du 23 juin 1999 en France, la composition pénale est née des cendres de la défunte injonction pénale dont elle corrige les insuffisances.

    Les conditions d'exécution ou de mise en oeuvre de la composition pénale tiennent pour l'essentiel à la nature de l'infraction commise et à la personne du délinquant. Pour ce qui est des infractions, il s'agit de celles n'affectant pas gravement l'ordre public et dont la liste est limitativement énumérée par l'article 41-2 du code de procédure pénale français et qui sont passibles d'une peine de trois ans d'emprisonnement au maximum. Dès que l'infraction concernée figure dans cette liste57, le procureur peut déjà envisager la composition pénale sous réserve du respect des autres conditions.

    Quant à l'autre condition liée à la personne du délinquant ce dernier doit être majeur et admettre sa participation aux faits reprochés sous peine de nullité de la procédure. Il ne doit pas avoir fait l'objet ou bénéficié de mesure du même genre par le passé. Il doit être un délinquant primaire.

    A côté de ces deux conditions, il existe celle de la réparation du dommage causé à la victime lorsque celle-ci est identifiée. Mais elle n'est pas préalable ou obligatoire pour la mise en oeuvre de la procédure et doit avoir lieu dans les six mois de la conclusion de l'accord de composition pénale. Les acteurs de cette procédure sont le Procureur de la République, auteur de la proposition, le mis en cause et le juge du siège. Elle se déroule en deux phases :

    57 Cére, ibid.

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    La première est celle de la proposition de la mesure au mis en cause qui dispose d'un délai d'environ 10 jours pour se décider sous peine de caducité de la proposition. La proposition est faite par le procureur soit directement au mis en cause, soit par l'entremise d'un officier de police judiciaire.

    La deuxième étape se déroule devant un magistrat du siège. Le Procureur informe le Président du tribunal de la proposition de composition pénale. Ce dernier procède à la validation ou au rejet de la mesure proposée. La validation met en exécution la composition pénale tandis que rejet la rend caduque et le Procureur a le choix soit de recourir à une autre mesure alternative, soit d'opter pour le déclenchement des poursuites.

    En cas de validation, diverses mesures seront prononcées,58 et on doit sanctionner l'infraction qui a été commise. Toutefois, la procédure ne peut arriver à cette étape que si elle a été acceptée par le mis en cause à travers un consentement libre et éclairé. Dans tous les cas, le mis en cause bénéficie d'un certain nombre de droit59.

    Para II- La médiation pénale

    « La médiation est tout mode informel de résolution par un tiers de conflits qui aurait dû a priori être résolu dans les formes par un juge de l'espèce traditionnel » 60 Cette autre alternative aux poursuites a été instituée par la loi no 93-2 du 4 janvier 1993 visant à favoriser dans le cadre de la commission de délits, une solution librement négociée entre les parties grâce à l'intervention d'un tiers, appelé le médiateur.

    Si dans la composition pénale, l'accent est mis sur le fait que l'auteur doit reconnaître les faits, dans la médiation par contre, l'accent est mis sur le dialogue entre les parties, bien que certains magistrats favorables au développement de cette pratique considèrent cette reconnaissance comme une condition sine qua none. En fait, dans la composition pénale, il

    58 V. infra IIe partie, chap. I section 3

    59 Voir infra IIe partie Chap. I. Para. 2

    60 Carbonnier (J.), Réflexion sur la médiation, in la médiation : un mode alternatif de résolution des conflits, 14 et 15 novembre 1991.

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    n'y a pas de discussion alors que dans la médiation, un dialogue doit s'instaurer entre la victime et l'auteur pour la recherche d'une solution acceptée de tous. Il s'agit au fond de trouver une solution amiable, finalité que rappelle le médiateur au début de l'entretien.

    A- Typologie des médiations

    Il existe deux grands types de méditation pénale. L'une est complètement intégrée à l'institution judiciaire ; c'est la médiation judiciaire tandis que l'autre résulte surtout de l'action d'associations ; c'est la médiation sociétale.

    1- La médiation judiciaire

    Dans la médiation judiciaire, le médiateur exerce des fonctions judiciaires et elle est interne au système judiciaire. Elle peut être exercée par un magistrat du siège ou du parquet. C'est le cas de la conciliation préalable en matière de divorce qu'exerce le magistrat saisi à cet effet. Mais il faudrait dire que le procureur de la république ou un de ses substituts ne saurait s'ériger en médiateur sans que les principes d'impartialité et de neutralité ne soient remis en cause, lui-même étant partie au procès pénal. Il y aurait ainsi incompatibilité entre les activités judiciaires exercées à titre professionnel et la fonction de médiateur.

    2- La médiation sociétale

    La médiation sociétale est celle organisée par la société civile. Elle peut s'exercer selon deux modalités différentes et selon qu'elle est faite avec ou sans contrôle judiciaire.

    a - La médiation sans contrôle judiciaire

    La médiation sans contrôle judiciaire peut prendre deux formes. Il existe la médiation informelle ou individuelle qui est celle qu'un citoyen exerce dans le cadre de sa vie familiale, professionnelle ou sociale. On rencontre souvent cette forme dans les commissariats de police où elle est exercée par des officiers de police. Soumis à aucun encadrement réglementaire, il

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    s'agit d'une procédure informelle où « la déontologie des acteurs des ces médiation c'est leur éthique. » 61

    L'autre forme de médiation sociétale sans contrôle judiciaire est la médiation sociétale collective et organisée. Celle-ci s'apparente aux médiations qui ont lieu chez les chefs de bloc, de quartiers et chefs de village.

    b- La médiation sous contrôle judiciaire

    Cette médiation n'est pas abandonnée à la société civile mais simplement elle lui est déléguée. On pourrait rapprocher de cette médiation l'arbitrage. Mais la situation la mieux indiquée semble être sans conteste la médiation que les services sociaux exercent dans le cadre des conflits de famille.

    B- Les organes de la médiation

    Lorsqu'il est saisi des faits constitutifs de délits, le procureur de la république ou un de ses substituts va décider des suites à leur donner. Il peut ainsi recourir à un médiateur. La décision de recourir à la médiation dépend entièrement du procureur de la république puisqu'elle ne peut intervenir qu'antérieurement à l'action publique. Une sélection est donc nécessaire pour choisir les affaires à soumettre à la médiation en respectant des critères précis.

    Premièrement, il doit s'assurer que le dommage causé à la victime sera réparé. En fait, ce critère est une sorte de substitut à l'action civile puisque le dommage sera réparé. La transaction intervenue a l'autorité de la chose jugée en dernier ressort entre les parties. D'où l'irrecevabilité d'une action civile ultérieure. 62

    En deuxième lieu, la mesure doit mettre fin aux troubles résultants de l'infraction. L'infraction constitue en effet un trouble à l'ordre public et une fois celui-ci constaté, une peine doit être infligée à son auteur. L'accent étant mis ici sur la victime, le trouble est le plus

    61 Lazergues (C.), Typologie des procédures de médiation pénales, mélange offert à A Colomer, 1993, p.217 et S.) Cité par Berg (R.) Médiation pénale, Rép. Pén. Dalloz 1999.

    62 La plupart des accords de médiation précisent qu'ils emportent renonciation à l'exercice de l'action civile V. en ce sens Berg (R.) op. .cit., no68 et 69.

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    souvent le préjudice suivi par la victime. La réparation de ce préjudice fera office de peine et le délinquant ne demeurera pas impuni.

    Enfin, la mesure doit contribuer au reclassement de l'auteur de l'infraction. Il va sans dire que le « traitement » du délinquant guide le procureur dans le choix de la médiation car il serait illusoire de croire qu'une telle mesure aurait un atout si le sens de la responsabilité et de la compréhension du délinquant ne peut être éveillé. C'est peut-être pourquoi la pratique l'applique aux délinquants primaires.

    L'autre organe qui intervient dans la médiation est le médiateur. Il s'agit d'un tiers qui de préférence ne saurait être le magistrat du parquet. C'est le plus souvent un bénévole ou une personne exerçant une activité sociale.

    Il pèse sur ce tiers une obligation de transparence qui lui impose de décrire la procédure aux parties en leur précisant leur droit d'être assisté par leur conseil. Il a également l'obligation de neutralité et est tenu au secret professionnel. Il ne doit divulguer aucune information qui lui serait communiquée par les parties ; bien entendu, il doit être impartial et indépendant63.

    C-La procédure de la médiation

    Le médiateur, dès qu'il est saisi, doit s'assurer du consentement des parties à la médiation en organisant un entretient préliminaire. Il doit ainsi convoquer la victime et l'auteur présumer des faits afin de leur proposer la solution de médiation. Chacune des parties sera reçu seul en commençant par la victime et il leur expliquera la finalité amiable de la procédure. Lorsque l'accord des parties est obtenu, il organise la « rencontre de médiation » au cour de laquelle auront lieu les discussions pour la résolution du litige. Si au terme des discussions les parties tombent d'accord, elles signent l'accord qui n'est pas un simple engagement d'honneur mais constitue une transaction au sens de l'article 2044 du code civil.

    63 V. Berg (R.), op. cit. n°81-85.

    Lorsque les parties exécutent les obligations contenues dans l'accord, le médiateur le constate et dresse un procès verbal. Dans ce cas, l'accord met fin à leur conflit. Cet accord doit être soumis au régime juridique de l'article 2052 du code civil sur la transaction. Il s'ensuit qu'il a, à l'égard des parties, l'autorité de la chose jugée en dernier ressort et que la nullité de l'accord peut difficilement être obtenue, la transaction ne pouvant être attaquée pour lésion ou pour cause d'erreur. Mais lorsqu'elles ne parviennent à aucun accord, il en dresse également un procès verbal et le procureur peut décider de l'opportunité des suites à donner à l'affaire (classer sans suite ou pour poursuivre).

    Il peut cependant arriver que, malgré l'accord, la convention ne soit pas exécutée. Dès lors, les difficultés surviennent étant donné que la victime ne peut plus agir en réparation du dommage subi. Toutefois « puisqu'il s'agit d'un acte soumis au droit commun des obligations, la victime peut agir soit en exécution de la transaction, soit en résolution pour inexécution afin d'obtenir la reprise de ses droits initiaux » 64. D'ailleurs la chambre commerciale de la cour de cassation à confirmer cette dernière possibilité dans un arrêt du 24 novembre 198265. L'exercice d'une telle action est synonyme d'échec de la médiation et on hérite d'un procès civil.

    Au bout du compte, la médiation ne peut intervenir que si l'on connaît à la fois la victime et l'auteur. Sa finalité est d'aboutir à une solution amiable. Tel semble ne pas être le cas de la comparution sur la reconnaissance préalable de culpabilité.

    33

    64 Blanc (G.), La médiation pénale, JCP 1994, I, 3760.

    65 Bull. Civ. IV, n°373.

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    Para 3 - Le « plaider coupable »

    C'est une négociation entre la défense et la poursuite théoriquement envisageable quelle que soit la gravité de l'infraction considérée. Procédure d'inspiration anglo-saxon, le « plea bargaining » ou plaider coupable est de l'avis de certains « un élément essentiel de l'administration de la justice »66 aux Etats Unis. Il est pratiqué en Grande Bretagne et au Canada même si le nombre d'affaire criminelle réglée par cette procédure n'est pas aussi important qu'aux Etats-Unis.

    Concrètement, l'accusé qui, ne conteste pas la poursuite, qui plaide coupable ou qui dénonce ces co-participants demande en échange des concessions soit sur l'infraction (ne viser que quelques un des faits ou les disqualifier), soit sur la sanction (en recommandant la clémence au juge). L'intéressé renonce ainsi à certains de ses droits comme le droit de plaider non coupable, le droit d'être confronté aux témoins à charge, le droit d'être jugé par la procédure du « trial » 67.

    Le pragmatisme du monde de l'Amérique est pour beaucoup dans le développement de cette procédure qui, informelle à l'origine, a formellement été consacrée par la cour suprême des Etats-Unis68. Sa consécration est liée aux avantages qu'elle présente. Comme l'énonce le Chief Justice Burger, « le plea bargaining permet à l'institution judiciaire de traiter toutes les poursuites dont elle est saisie. S'il survenait une baise de 10% des pleas of guilty résultant de plea bargaining, il faudrait doubler le nombre de juges, de greffiers, de jury de salles d'audience, etc. »69

    Depuis quelques décennies, les pays n'ayant pas de culture anglo-saxonne essaient d'intégrer cette pratique dans leur système de justice pénale. La tentative la plus récente est

    66 Cedras (J.), Le droit pénal Américain, « Que sais-je », 1997, p. 113.

    67Audience au cours de laquelle le jury se prononce sur la culpabilité d'une personne poursuivie. La décision sur la peine intervient après lors d'une autre audience ; le sentensing. C'est une particularité américaine.

    68 Affaire Brady vs. United State, 1970.

    69 Environ 90% des affaires pénales aux USA sont réglées par cette méthode ainsi qu'une très vaste majorité en Grande Bretagne et au Canada hptt/ www.vie-publique.fr

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    celle de la loi française dite loi d'adaptation de la justice aux évolutions criminelles ou `'Loi Perben II» du nom de son initiateur. Cette loi consacre la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC). Mais la question se pose de savoir si le système inquisitoire en vigueur dans les pays Romano-Gernamique permettait une telle pratique.

    En réalité, le développement du plaider coupable est largement lié au caractère essentiellement oral et accusatoire du procès anglo-saxon qui oppose l'accusation et la défense sans que le juge y joue un rôle actif et, d'autre part, à la complexité des règles de preuves que cette procédure a engendrée. Le système inquisitoire étant essentiellement secret et écrit, la crainte était de voir cette pratique inadaptée dans ce système. Malgré cela, les pays comme l'Italie, l'Espagne et l'Allemagne l'ont intégré dans leur justice pénale dans les années 1980. Mais il faut souligner que dans ces pays, le plaider coupable n'est pas appliqué à l'Américaine. Il a connu des adaptations.

    La comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité a ainsi vocation à ne s'appliquer qu'à un certain type d'infractions de moindre gravité. D'après la loi Perben II, cette procédure ne peut s'appliquer que pour les infractions dont le maximum de la peine encourue ne peut être supérieur à 5 ans. Elle ne s'applique pas à toutes les infractions. Comme son nom l'indique, la reconnaissance doit être explicite. La procédure reçoit ainsi diverses appellations : « confession » au Portugal, « jugement de conformité » en Espagne et « pattegiamento » en Italie. La multiplicité des appellations traduit toutes les nuances et spécificités de chacune d'elle. Mais quel que soit le nom qu'il puisse prendre, le plaider coupable offre un certain nombre de garanties à l'accusé70 et les effets71. Sont assez proches les uns des autres. Au fond, l'idée est de mettre l'accent sur une peine acceptée par le délinquant, et d'éviter en fin de compte un procès.

    70 V. Infra. ITe partie, Chap. I section 1 para. 2

    71 V. infra. ITe partie, Chap. I section 3

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    Le Cameroun, du fait de la colonisation, a hérité à la fois du système d'inspiration romano-germanique et de la Common Law anglo-saxon. Notre procédure pénale a pendant longtemps été dominée par ces deux tendances. Avec le nouveau code de procédure pénale qui vise à unifier ces procédures et qui intègre désormais les éléments du droit anglo-saxon, tel le « direct » et le « cross examination », peut-on penser à l'application d'une telle procédure dans notre système ?

    Le Code de Procédure Pénale interdit toute transaction en matière pénale mais dans un souci d'amélioration cette procédure, on pourrait l'essayer. Une solution en plus ne nuerait pas, mais plutôt l'absence de solution appropriée et rapide aux difficultés auxquelles la justice fait face. La pratique de ces mesures a fait reconnaître par la grande majorité leur efficacité. Mais la nature de telles procédures divise encore les auteurs.

    Section II- NATURE DE LA TRANSACTION

    La détermination de la nature de la transaction n'est pas rendue facile à cause des avis divisés autour de son admission d'une part, et à cause de l'intervention du procureur de la république dans sa mise en oeuvre d'autre part. Toujours est-il que des tentatives en ce sens ont donné lieu à une vive controverse (P1) si bien que la détermination de cette nature ne peut être complète que si une différence avec les autres alternatives est clairement établie. (P 2)

    Para 1- La controverse autour de la nature de la transaction.

    La diversité des mesures transactionnelles semble favorable à la controverse. Mais quelle qu'elle puisse être, le développement de cette pratique commande qu'une position soit adoptée par rapport à la nature de la mesure.

    A - Position du problème.

    La transaction intervenue soit entre le délinquant et la victime, soit entre le délinquant et le ministère public et qui éteint l'action publique pose d'énormes difficultés. On se

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    demande s'il s'agit d'une mesure administrative, d'une sanction, d'un jugement ou encore d'un contrat ?

    La réponse à une telle interrogation pourrait avoir des incidences lourdes sur la procédure tant sur son déroulement que sur les suites pouvant lui être réservées. Elle donne lieu à des analyses différentes.

    1- la théorie classique : une variété de la transaction civile

    Pour cette théorie, la transaction ne serait rien d'autre qu'une variété de la transaction du droit civil. Comme cette dernière, elle constitue un contrat synallagmatique à titre onéreux et commutatif, destinés à mettre fin à une contestation par des concessions réciproques. Ses défendeurs citent comme exemple la transaction fiscale. On pourrait également y voir le cas de la médiation. En fait, BLANC G. l'assimile à un acte soumis au droit commun des obligations. Un exemple est l'hypothèse où le mis en cause s'engage à réparer en nature ou en argent le dommage causé à la victime et à payer en cinq indemnités. Si rien en droit ne parait s'opposer à une telle qualification, il n'est pourtant pas souhaitable de la retenir.

    On sait que la victime qui a accepté le principe de la médiation, ne peut plus agir en réparation du dommage subi en cas d'inexécution, l'accord ayant entre les parties l'autorité de la chose jugée en dernier ressort. Elle ne pourra agir qu'en exécution ou en résolution étant donné qu'elle ne peut obtenir la nullité de l'accord pour erreur ou pour lésion.72 Mais une telle position marque une confusion entre l'action civile et l'action publique. La transaction pénale éteint l'action publique et tend à l'application de sanctions pénales.

    Il y a dans la médiation, un lien indissociable qui unit l'aspect civil et l'aspect pénal du litige. C'est dire que cette position n'est plus en faveur.

    72 Berg (R.) ; la médiation pénale Rep. Pen. D. 1999.

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    2- Les auteurs modernes : une sanction administrative

    Les auteurs modernes préfèrent voir dans la transaction pénale une sanction administrative. « Sanction administrative librement acceptée et qui tient lieu de peine, telle est, en définitive, la nature juridique de la transaction pénale ».73

    Pour BOULAN, il s'agirait d'une peine privée infligée par une administration publique74. D'autres parlent d'une manière plus complexe d'actes qui présentent le double caractère de remise gracieuse réglée par les droits spéciaux douanier, fiscal, et de contrat régi par le code civil. S'il n'est pas douteux que la transaction fiscale est destinée à compenser la rigueur excessive des matières dans lesquelles elle est possible (le refus des circonstances atténuantes et du suivis et l'exclusion de la bonne foi du contrevenant), il est peut être excessif de la considérer comme une sorte de diminutif de la sanction pénale encourue.

    3- Renonciation monnayée

    C'est la position défendue par RAYMOND GASSIN. Pour lui, la transaction doit être analysée comme une « renonciation monnayée à l'action publique par l'administration ».75 C'est une renonciation à l'action publique en ce que la transaction éteint non seulement cette action, mais le fait d'une certaine manière, en abandonnant toute possibilité d'application de la sanction pénale. Dès lors, il ne serait pas inexact de dire que « la transaction s'analyse en un moyen administratif bilatéral d'extinction des poursuites » (Merle et Vitu), du moins pour la transaction fiscale.

    Cela semble cependant insuffisant étant donné qu'il est de la même nature de ces infractions et du droit de l'administration de disposer à leur gré d'une action publique.

    73 Boitard, la transaction pénale en droit français, R. S. C. 1941, p. .

    74 Boulan, La transaction douanière, Etude de droit pénal douanier Ann. Fac. Droit Aix-en-Provence, 1968, p. 219.

    75 Gassin (R.), la transaction Rep. Pen. D. 1969.

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    A- Proposition de solution

    Toutes ces positions traduisent la difficulté qu'il y a à dissocier le lien qui unit, dans la transaction pénale, l'aspect civil et l'aspect pénal du litige. Par ailleurs, l'intervention du parquet ne facilite pas la tâche. Certains ont estimé qu'une telle intervention donnait à la mesure le caractère d'un acte juridictionnel dans le mesure où elle donnait lieu à une peine et que l'exécution éteignait l'action publique. Même si la transaction ou du moins, son exécution éteint l'action publique, il serait un peu exagéré de la considérer comme une décision juridictionnelle ou comme une sanction pour deux raisons. D'une part, affirmer que la transaction est une décision juridictionnelle c'est considérer que le procureur de la république ou le parquet est un « échelon juridictionnel »76 alors que le procureur ne peut prononcer des décisions ayant le caractère de jugement. Bien plus, la transaction ne fait pas partie des actes ou ordonnances que le juge d'instruction rend et qui peuvent faire l'objet de recours de la part de l'inculpé77. D'autre part, la transaction ne donne pas lieu à des mesures à caractère exécutoire sauf peut-être dans le cas de la médiation. Mais jusque là, cette position est à relativiser.

    La décision du procureur de la république de recourir à la transaction relève de son pouvoir d'opportunité des suites à donner aux affaires dont il est saisi. De ce point de vue, la transaction est une décision administrative ; mais il ne s'agit pas d'une sanction administrative comme on pourrait le penser. Cela s'explique par le fait que la décision de transaction ne donne pas lieu au recours et ne peut être une sanction, même administrative. Surtout, lorsqu'elle intervient dans le cadre des pouvoirs d'appréciation de l'opportunité des poursuites, elle prend la nature d'un acte de classement sans suite. Mais par rapport à la décision de classement sans suite, elle n'intervient pas au même niveau si bien que s'il fallait établir une hiérarchie des actes d'administration de justice, la transaction se situerait un peu

    76 Medjaoui (K.), « L'injonction pénale et la médiation pénale », R.S.C., no4 1994, p. 830

    77 V. Brière de l'Isle (G.), COGNIART (P.), Procédure pénale, t 2, police, Instruction, jugement.

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    en amont et au- dessus de l'acte de classement sans suite proprement dit. Elle serait donc une mesure administrative unilatérale, alternative au classement sans suite.

    Même cette position ne semble pas suffisante pour établir véritablement la nature de la transaction car à côté il y a également des alternatives comme le classement sans suite sous condition78. En fait, la pratique même n'aide pas beaucoup car une systématisation de la transaction n'est pas aisée. Le moins que l'on puisse dire c'est que la transaction laisse l'opportunité de poursuite intacte et le procureur peut toujours, nonobstant la transaction, engager des poursuites, du moins dans les cas de médiation et de composition pénale.

    En attendant que la doctrine s'accorde et/ou que la pratique ne tranche ce débat, nous pensons avec KHADIJA MEDJAOUI, qu'il s'agit d'une option du principe de l'opportunité des poursuites. Ce qui corrobore peut-être la position de REMY BERG qui la considère comme une mesure pré judiciaire, à caractère contradictoire.

    Cette détermination avancerait peut-être un peu plus si la transaction était distinguée d'avec les mesures proches.

    Para 2 -La distinction avec les alternatives à l'incarcération.

    Le mouvement pour le recul de la répression avait commencé par imaginer les mesures dont l'objectif serait de diminuer la rigueur de la répression. C'est ainsi qu'on a parlé de dépénalisation. Les auteurs qui prônaient ce recul pensaient que l'emprisonnement constituait une sanction exceptionnelle à la quelle on ne devrait recourir que pour neutraliser un certain nombre de délinquants sérieusement dangereux ou pour dénoncer des comportements hautement répréhensibles constituant des violations graves de valeurs fondamentales. Le recours à l'emprisonnement ne pouvait se faire qu'en dernier ressort et comme une mesure de contrainte contre certains délinquants qui refusaient de se soumettre à

    78 Sur les classements sans suite, voir Eric MATHIAS, La procédure pénale, Bréal, 2e édition, 2003, pp.101-102.

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    d'autres sanctions pénales. C'est dans cette mouvance que diverses alternatives virent le jour. La première fut l'amende ; puis vint ensuite la semi détention, le sursis et la suspension du prononcé de la peine. Par rapport aux alternatives à la poursuites, on se demande pourquoi recourir à ces dernières puisque, semble-t-il, le résultat recherché est le même (générer moins de récidive.). Il est question de faire ressortir les particularités des unes et des autres.

    1-Le sursis à l'exécution

    C'est une mesure qui suspend l'exécution totale ou partielle d'une peine d'emprisonnement. On peut avoir le sursis simple ou le sursis avec probation ou mise à l'épreuve. Il ne peut s'appliquer que pour des infractions dont la condamnation est inférieure ou égale à cinq ans ou à une amende. Ceci le rapproche étrangement des alternatives aux poursuites qui ne peuvent s'appliquer que pour des infractions de moindre gravité dont le maximum de la condamnation ne peut être supérieur à cinq ans. Tout comme les alternatives aux poursuites, il s'applique aux délinquants n'ayant pas fait l'objet d'une précédente condamnation. 79

    Mais, à la différence des alternatives aux poursuites, c'est une cause qui met obstacle à l'exécution des peines. Autrement dit, le sursis simple ou avec probation intervient à la suite d'une condamnation c'est-à-dire d'un jugement. Or les alternatives aux poursuites permettent justement d'éviter un procès. Même si le régime du sursis impose au condamné des obligations proches des mesures qui interviennent à la suite de la transaction, il s'en distingue par le fait qu'il laisse la possibilité d'exécuter la peine qui plane sur la tête du condamné alors que la transaction laisse tout simplement ouverte l'opportunité des poursuites et, dans sa nature, ne constitue pas une modalité de l'exécution de la peine.

    Le sursis tout comme l'amende forfaitaire sont des alternatives à l'emprisonnement mais d'un degré différent.

    79 V. art 54 à 60 Code pénal Camerounais.

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    2-L'amende forfaitaire.

    L'amende est une peine pécuniaire obligeant le condamné à verser une certaine somme d'argent au Trésor public80. C'est une peine contrairement à la mesure transactionnelle même si cette dernière peut donner lieu à l'exécution de la mesure ayant le caractère de peine.

    L'amende forfaitaire intervient généralement pour le cas des contraventions et son montant est fixé à l'avance par la loi. Elle éteint l'action publique tout comme la transaction81 mais ne peut intervenir dans certain cas où la transaction pourrait s'appliquer tel le cas des contraventions ayant causé un dommage corporel82.

    L'amende forfaitaire est une amende policière dans la mesure où l'agent de police a qualité pour la prononcer et la percevoir même s'il le fait sous le contrôle du procureur de la république, du moins pour ce qui est de sa légalité.

    Son paiement étant facultatif83 il laisse au procureur de la république le choix de la mise en mouvement de l'action publique. Mais comme son nom l'indique, elle n'est pas négociée et librement acceptée par le contrevenant. L'amende forfaitaire lui donne tout simplement le choix entre un paiement rapide et immédiat et un procès au terme duquel ce même paiement aura lieu car c'est la loi qui fixe le montant. Tout simplement, il est question de gagner du temps sans pouvoir, comme le recherche la transaction, donner un avertissement au contrevenant et assurer son reclassement.

    CONCLUSION CHAPITRE

    Au terme de cette analyse sur la nature de la transaction, il ressort que celle-ci a une nature hybride qui la laisse entre un acte d'administration de la justice et un acte judiciaire ou

    80 Définition donnée par le lexique de termes juridiques

    81 art 621. nouveau c. pr. pen

    82 V. art. 607 nouveau C. pr. Pen

    83 V. art 613 du même code.

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    plus précisément préjudiciaire. La multiplicité des mesures transactionnelles ne rend pas la solution évidente, il appartiendrait peut être à la pratique de systématiser celle-ci.

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    CHAPITRE III

    LE DOMAINE DES MESURES ALTERNATIVES AUX POURSUITES

    La protection des valeurs fondamentales de la société est une question d'une grande importance qui mérite, si l'on veut assurer la justice, une juste proportion entre la valeur protégée et la sanction de sa violation. Il existe des valeurs dont la violation est une grande atteinte aux normes de la société. Les auteurs de telles violations représentent un danger sérieux et grave pour la société si bien que leur mise à l'écart s'avère indispensable pour l'ordre public. La gravité de ces infractions les exclut du domaine d'application de la transaction. Aussi, ne peuvent rentrer dans ce domaine les crimes. La transaction n'a vocation à s'appliquer qu'à la « petite délinquance » ou du moins aux infractions punies d'une peine qui ne dépasse pas cinq ans d'emprisonnement. Pour l'essentiel, il s'agirait des actes liés aux contraventions routières. Mais la particularité de la transaction intègre également des infractions liées à la famille et la personne. Un des aspects les plus considérables de cette procédure concerne les atteintes au patrimoine et à l'économie. Aussi, analyserons-nous les infractions liées à la personne et à la famille d'un côté, et les infractions économiques et contre les biens de l'autre.

    Section I. LES INFRACTIONS CONTRE LA PERSONNE ET

    CONTRE LA FAMILLE.

    C'est infractions apparaissent dans une certaine mesure comme le domaine par excellence des alternatives aux poursuites et plus particulièrement de la médiation. En effet, la transaction trouve un terrain propice dans les affaires qui mettent en conflit les personnes qui

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    se connaissent et sont condamnés à vivre ensemble ou à proximité. La nécessité de concilier ou de diminuer l'intensité du conflit le recommande. C'est notamment le cas des infractions ou conflits familiaux (P1). La transaction peut aussi s'appliquer pour des conflits portant une atteinte légère à la personne, l'idéal étant ici d'assurer d'abord la réparation due à la victime (P2).

    Para. 1- Les infractions contre la famille

    Ici nous entendons les infractions ayant un rapport plus ou moins direct avec la famille, qu'il s'agisse de celles liées à la formation de la famille (le mariage) ou celles liées à la vie de la famille ainsi formée par exemple la non représentation d'enfant ou le non paiement de la pension alimentaire.

    A - Les infractions liées à la formation du mariage

    La formation du mariage peut donner lieu à la commission de plusieurs infractions. On peut distinguer le délit du mariage forcé, le délit d'escroquerie à la dot ou le délit d'exigence excessive de dot. Relativement aux infractions liées à la dot, elles sont prévues par l'art. 357 du code pénal et sont constituées de l'escroquerie à la dot et de l'exigence de dot excessive.

    Pour que cette infraction soit constituée, les conditions suivantes doivent être remplies. Il faut tout d'abord une indisponibilité de la femme. L'art 357 al 1 (a) du code pénal dispose que « se rend coupable d'escroquerie à la dot celui qui, en promettant le mariage d'une femme déjà mariée ou engagée dans les fiançailles non rompues, reçoit d'un tiers tout ou partie d'une dot » . L'indisponibilité de la femme découle du fait qu'elle est, soit déjà mariée, soit déjà engagée dans des fiançailles non rompues.

    La deuxième condition est le défaut de qualité pour recevoir la dot. Cette condition est prévue à l'al. 1(6) du même article. Même si rien n'est dit sur celui qui peut avoir la qualité pour recevoir la dot, on peut estimer qu'il s'agit des parents et/ou tuteurs légaux de la femme.

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    Toute autre personne étant considérée comme n'ayant pas cette qualité accordée par le lien de sang ou par la loi.

    Outre ces conditions, les éléments de l'infraction doivent être réunis. Le premier élément est la réception d'une dot. Cette réception doit être effective et, peu importe que la dot soit versée en totalité ou en partie. Egalement, il n'est pas besoin de spécifier la nature de l'objet reçu. L'indifférence de cette nature fait que tout objet reçu au titre de la dot par celui qui n'en a pas qualité constitue l'infraction. Il y a aussi le fait de recevoir sans rembourser le prétendant évincé. Le deuxième élément constitutif est l'intention coupable. Celle-ci découle du fait de recevoir la dot en connaissance de cause c'est-à-dire en ayant conscience de son défaut de qualité et de se comporter comme si on en avait.

    A côté de l'escroquerie à la dot, il y a l'exigence de la dot excessive. Ici, le délinquant a la qualité mais demande une « somme » excessive pour le mariage d'une femme veuve ou divorcée ou d'une fille majeure de vingt et un ans. Cette infraction est fondée par le fait que le mariage n'est pas un commerce et la dot, pas une condition de validité de celui-ci.84 L'infraction est constituée même si celui qui la reçoit n'est que l'héritier de celui qui a fait l'exigence. Il faut qu'en plus de l'exigence excessive, que celui qui le fait, fasse obstacle au mariage pour ce seul motif.

    La répression des actes donne lieu souvent à des sentences assez sévères. En effet, la loi prévoit une peine d'emprisonnement allant de trois mois à cinq ans et une amende de 5 000 à 500 000 francs CFA ou l'une de ces deux peines seulement. Très souvent les tribunaux ont prononcé des peines d'emprisonnement ferme très sévères. Dans une affaire, le tribunal de première instance de Douala a condamné un prévenu à un an d'emprisonnement85.

    84 V. art 70 al (1) ordo n°81/02 du 29 juin 1981 portant organisation de l'état civil et diverses dispositions relative à l'état des personnes physique

    85 TPI Douala, jugement n°1833 du 6 février 1975, affaire M.P. et Lipène Tonye Séverin C/ Patha Pierre

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    Dans deux autres affaires, le tribunal coutumier de Yaoundé a prononcé six mois et dix ans d'emprisonnement respectivement pour dot excessive. 86

    Lorsque le mariage se forme sans incident, la famille est fondée et la vie de celle-ci donne lieu à des infractions surtout lorsqu'elle bât de l'aile.

    B. La non représentation d'enfant

    La non-représentation d'enfant est le fait de ne pas représenter un enfant mineur à celui auquel sa garde a été confiée par une décision de justice même provisoire87.C'est également le fait pour une personne ayant charge d'un enfant, de ne pas le représenter à ceux qui ont le droit de le réclamer.

    Des dispositions des articles 355 et 179 du code pénal, il ressort que l'emprisonnement peut être d'un maximum de cinq ans et l'amende jusqu' à un million de francs. Or une telle sanction ou du moins la poursuite de telles infractions risque de donner lieu à des désordres dans la famille quand on sait que, généralement, l'enfant est confié à un membre de la famille. On risquerait ainsi de créer plus de problèmes que l'on n'en résout. Pourtant, la transaction permettrait non seulement de résoudre ce problème, mais aussi éviterait d'en créer de nouveaux tout en favorisant un climat propice a l'entente et au dialogue.

    C. Le non-versement de pension alimentaire

    La pension alimentaire est une somme d'argent versé périodiquement pour faire vivre une personne dans le besoin, en exécution d'une obligation alimentaire. Elle est le plus souvent obtenue à la suite d'une décision de justice. Le refus de payer cette pension constitue l'infraction de non-paiement de pension alimentaire prévue par l'article 180 du code pénal.

    86 T.C.Ydé jugement no1945 du 22décembre 1970 qui condamne à six mois d'emprisonnement et à 200.000 frs d'amende l'héritier qui a reçu la dot promise à celui dont il succède et jugement no 2070 du 8 avril 1975. 87Definition donnée par le lexique de termes juridiques, 11eme édition, D., 1998.

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    Ici il n'est pas nécessaire qu'il y ait intention coupable. En fait, le défaut de paiement est présumé volontaire. Il appartient au mis en cause de prouver le contraire. De même, l'insolvabilité du mis en cause due à son inconduite ne peut constituer une excuse.

    Les sanctions prévues sont un emprisonnement d'un mois à un an et/ou une amende de 20 000 à 400 000 francs CFA. S'il est nécessaire de réprimer un tel comportement, il est tout aussi important de considérer la situation du bénéficiaire de la pension. Envoyer le prévenu en prison c'est l'empêcher de travailler pour assurer cette obligation et le condamner à une amende c'est peut-être prendre ses économies ou son salaire qui lui aurait permis de satisfaire le bénéficiaire.

    Dès lors, une transaction parait être le meilleur moyen pour assurer les droits de la victime. De même, les infractions comme l'abandon du foyer sont également du domaine de la transaction. Comment un conjoint peut-il envoyer le père ou la mère de ses enfants par exemple en prison sans nuire aux relations futures entre membres de la famille?

    La même question se pose pour les cas de jeunes qui sont envoyés en prison pour avoir engrossé une fille mineure de 16 ans. A - t - on le droit de priver un enfant de l'amour de son père au nom de la sanction ou de la répression ? Au fond, dans ces cas lorsque le jeune homme réussit à ne pas se faire arrêter, il se sauve sans laisser de traces et lorsqu'il est arrêter, il va en prison et au sortir refuse tout contact avec la mère ou l'enfant qui lui a « volé » des années de sa vie. Pourtant, une alternative à la poursuite aurait permis non seulement de s'occuper de la maman, mais aussi de l'enfant et surtout de lui donner l'amour dont il aura besoin. Ceci semble, à notre avis, être une lacune du système actuel quand on sait que dans la plupart des cas, la fille est consentante de la relation si tout simplement elle n'a pas pris les devants dans l'initiative. La prise en compte de la victime est également importante dans les cas des atteintes corporelles.

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    Para II- les blessures simples et légères

    L'intégrité physique des personnes a toujours fait l'objet d'une très grande protection de la part du législateur. Il n'y a qu'à voir la rigueur des sanctions des violations et des atteintes à cette intégrité pour s'en convaincre. Le législateur n'accorde pas beaucoup d'importance à la volonté dans la répression, celle-ci ne jouant pas souvent pour minorer la répression.

    Mais il faut dire qu'autant l'accent est mis sur la répression de l'atteinte, autant il n'est pas fait allusion à la réparation due à la victime. En fait, les juridictions prononcent le plus souvent des dommages et intérêts dont le paiement, tout comme celui des amendes, n'est pas toujours rassuré. Les victimes des atteintes corporelles ou physiques mettent souvent des années à courir après le recouvrement des dommages-intérêts qui leur ont été accordés, surtout lorsque l'auteur s'est retrouvé en prison à la suite de son délit. La réparation devient ainsi hypothétique et la victime est obligée de dépenser encore dans les procédures visant à assurer sa réparation. S'il est important de réprimer et de prévenir les atteintes à l'intégrité physique des personnes, il est aussi important d'assurer à la victime la réparation du préjudice subi. Le sentiment de justice intègre ces deux paramètres et la victime ressent la justice mieux assurée quand elle est indemnisée.

    Toutes les atteintes ne sont pas d'une gravité extrême et une bonne administration de la justice serait peut-être, d'assurer d'abord à la victime, la réparation du préjudice subi. Or dans ce registre on n'a pour l'instant que l'obligation de transiger qui pèse sur l'assureur du civilement responsable en matière d'accident de circulation88. En effet l'assureur a l'obligation de proposer une transaction à la victime en matière d'accident de circulation, quit à celle-ci de la refuser ou de l'accepter. Mais ceci a beaucoup plus trait à l'action civile de la victime.

    88 V. Ord.no81/005 du 13 décembre 1989 relative à l'indemnisation des victimes d'accidents la circulation, art. 24 et s.

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    En matière pénale, et plus précisément pour ce qui est des atteintes moins graves comme les blessures simples et les blessures légères, le délaissement d'incapable89, la transaction pourrait offrir bien des avantages dans la répression.

    Dans nombre de cas d'atteintes visées par ces infractions, il y a absence d'intention de nuire. Bien plus, l'auteur et la victime se connaissent souvent (cas des époux ou concubins) et emprisonner l'un d'eux pour blessures légères ou simples n'est pas de nature à favoriser la continuation d'un climat d'apaisement, même s'il en est résulté une incapacité de travail. Une autre solution serait d'assurer tout d'abord la réparation due à la victime par une transaction et puis d'imposer à l'infracteur, toujours par le biais de cette transaction, des mesures visant à aiguiser son sens de la responsabilité et de la prudence.

    En plus des atteintes de blessures, il y a des infractions comme l'omission de porter secours ou le délaissement d'incapable qui constituent aussi des atteintes à l'intégrité physique. Une bonne administration de la justice consisterait pour ces infractions, plutôt que de sévir, d'enseigner aux délinquants à ne plus commettre de telles violations. Ainsi, la transaction permettrait d'imposer à l'auteur d'une omission de porter secours, des oeuvres ou actions envers des personnes ayant besoin d'assistance afin de prévenir la récidive et de le sanctionner en le traitant.

    Les atteintes à l'intégrité ne sont pas seulement d'ordre physique. Il y a également des atteintes morales. C'est le cas de la dénonciation calomnieuse, de la diffamation et des injures voire du chantage prévu par les articles 303 à 307 du code pénal. Pour la plupart de ces infractions, la poursuite ne peut être engagée que sur plainte de la victime, et le retrait de la plainte avant la condamnation définitive arrête l'exercice de l'action publique. Si le déclenchement de l'action publique est laissé à la victime, pourquoi ne pas transiger puisque « l'opportunité des poursuites » est laissée à son appréciation ? On gagnerait sans doute

    89 V. art.280, 281, et 283 du c. pén. . Camerounais.

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    beaucoup plus de temps si une transaction avant les poursuites intervenait car il ne servirait à rien d'instruire, de consacrer du temps à une action que la victime peut arrêter d'un moment à l'autre.

    Le domaine de la transaction pénale pourrait s'étendre aux infractions de violation de domicile, de menaces simples, de menaces sous conditions punies respectivement par les articles 299, 301 et 302 du code pénal. Il s'agit des délits qui portent atteinte à la tranquillité des personnes.

    La transaction pénale ne s'applique pas s'appliquer uniquement à ces infractions. Il se pourrait que son domaine de prédilection soit les atteintes patrimoniales.

    Section II- LES INFRACTIONS ECONOMIQUES ET CONTRE LES

    BIENS

    La transaction pénale donne le plus souvent lieu au prononcé des mesures ayant essentiellement un caractère indemnitaire. La plupart des infractions visées constituent moins des troubles à l'ordre public que des atteintes au patrimoine particulier de l'Etat ou d'un particulier ou même à l'ordre économique.

    Para 1- La pression sur les prix et les faux poids et mesures

    Ces délits sont des infractions économiques. Il s'agit, d'une manière générale, de toutes infractions qui se rapportent à la production, la répartition, la circulation et la consommation des denrées et marchandises, ainsi que aux moyens d'échange consistant particulièrement dans la monnaie.90

    Les délits de faux poids et mesures, de pressions sur les prix et de destruction des denrées retenus par le législateur ont cette particularité qu'il s'agit de l'intérêt général qui est aussi protégé. Ces délits, pour la plupart, concernent les denrées ou marchandises et sont

    90 Position dégagée par une jurisprudence des chambres réunies cass. 1 e août 1949, JCP II 5033

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    prévus par les art. 252, 256 et 257 du code pénal. Tout comme les autres infractions, les délits de faux poids et mesures, de pressions sur les prix sont punis d'une peine dont le maximum est inférieur à cinq ans. Dans certains cas, lorsque les peines sont même doublées, elles ne sont pas supérieures à cinq ans.91

    La répression des infractions dites économiques pose tout de même un certains nombres de difficultés. Déjà, il est difficile de définir le droit pénal économique. La doctrine en a une conception tantôt restrictive, tantôt extensive. Dans un premier temps elle considère la protection des intérêts du pays, donc l'intérêt général sans protéger les individus. Dans une deuxième conception, cette fois extensive, c'est l'option libérale qui prévaut. L'incrimination vise alors à protéger l'individu à l'occasion des rapports économiques qu'il noue librement.

    Dans un contexte libéral comme le nôtre, il est assez difficile de réprimer de telles infractions surtout lorsqu'on sait que l'économie est une chaîne, un engrenage qui entraîne tous les secteurs de la vie active. Dès lors, il se pourrait que proposer la transaction pour ces infractions soit une autre solution au problème.

    Dans le registre des infractions économiques, on peut citer : les prix illicites, les pénuries artificielles créées pour renchérir les prix. En l'état actuel, cette répression semble peu efficace car non seulement les faux poids et mesures sont légions dans nos marchés, mais aussi insuffisante puisqu'elle ne couvre pas toutes les atteintes à l'économie. L'épanouissement économique a crée de nouvelles formes de délinquance qui, sans épargner l'économie en général, frappe particulièrement les individus. C'est le cas, par exemple, de la pratique qui consiste à vendre aux clients à un prix autre que celui affiché sur la marchandise et dont le but est d'arnaquer l'acheteur, les prix affichés n'étant qu'une fausse publicité ou un moyen de contourner le contrôle des prix.

    91 Cas des pressions sur les prix, art.256 al. 2

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    Dans tous les cas, la protection des privés semble dominer ici, compte tenu des intérêts et des biens qui entrent en jeu.

    Para 2- Les destructions et dégradation des biens

    La répression des infractions relatives aux biens ou au patrimoine des individus emprunte souvent le chemin de la restitution des biens volés ou détruits. Sans toutefois négliger l'aspect sanction et la peine que doit subir le délinquant, la victime se satisfait beaucoup plus de la réparation du préjudice subi. Elle souhaiterait, dans la plupart des cas, se voir rétablir dans son bien. Le caractère patrimonial et indemnitaire de la sanction pourrait donc militer en la faveur du choix des mesures transactionnelles.

    La destruction des biens est prévue par les articles 316 al (1) et 317 du code pénal. Elle peut être partielle ou totale et peu importe que le bien appartienne en tout ou partie à autrui. Autrement dit, même si l'on est copropriétaire, l'infraction peut être constituée dès lors qu'il y a destruction de bien. Mais, il faut préciser que les biens concernés ici exclus les édifices, les navires ainsi que les ouvrages ou installations. Pour ces biens, le maximum de l'emprisonnement encouru est de dix ans. Des dispositions de l'article 317 du code pénal camerounais, il ressort que la destruction concerne également les bornes ou tout autre signe établis pour délimiter des propriétés différentes. Cela peut être une clôture de quelque nature qu'elle soit. Ces cas de litige concernent le plus souvent des voisins terriens qui sont aménés à vivre de proximité. Exemple : Imaginez ce Monsieur X qui se rend dans sa plantation et trouve que son voisin Y a édifié une clôture en piquets de bois et non seulement aurait grignoté un ou deux mètres mais a fait passer de son côté quelques arbres fruitiers qu'il avait plantés jadis et qui lui font des revenus non négligeables depuis quelque temps. Fou furieux, monsieur X détruit ladite clôture. Informé, Monsieur Y porte plainte pour destruction de biens. La condamnation de l'un pour des raisons sus évoquées entraîne le plus souvent une détérioration du climat social et des relations de bon voisinage. Et les conflits de ce genre

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    sont assez courant notamment à l'Ouest Cameroun où la question foncière est d'une haute importance pour la population. L'application de la transaction ici serait d'une haute importance surtout qu'en plus d'être voisins, les parties sont souvent des frères et parents et on épongerait ainsi une bonne partie de ce contentieux assez rapidement. Une transaction permettrait également d'éviter des dérapages qui aboutissent, malheureusement et le plus souvent, à des pratiques mystiques entraînant parfois des pertes en vies humaines.

    La destruction peut aussi concerner le cas de l'article 188 du même code. Il s'agit de la soustraction et de la destruction des pièces publiques. Cette hypothèse concerne non pas les biens appartenant à autrui, mais des pièces placées sous la garde de l'autorité publique. Sont exclus ici les registres, minutes ou autres actes originaux de l'autorité publique.92 On pourrait rapprocher de cette hypothèse le cas du bris des scellés prévu par l'article 191.

    Quant à ce qui concerne la dégradation, elle a trait, d'après le code pénal (art. 187) aux biens publics. Il s'agit, pour la plupart, des monuments, statues ou autres édifices destinés à l'utilité publique. C'est le cas par exemple des riverains des voiries urbaines qui transforment celles-ci en dépotoir tant pour leurs eaux usées que pour leurs déchets ménagers.

    Mais il faut dire que la dégradation peut aussi concerner les biens d'autrui. Ainsi, les inscriptions à l'aide des peintures aérosols, des signes et des dessins sur un mur privé ou un véhicule, peuvent être constitutives de dégradation. Il peut également s'agir des affichages intempestifs sur des murs privés.

    La dégradation des biens est assez apparentée à la lacération des affiches prévue par l'article 196. En fait, on peut lacérer, recouvrir ou tout simplement enlever les affiches, ce qui d'une façon ou d'une autre constitue soit une dégradation soit une destruction. D'ailleurs, le code pénal ne singularise pas toujours ces deux notions. Elles sont utilisées côte à côte dans divers articles et le législateur parle à la fois de « destruction » et de « dégradation »,

    92 Cette hypothèse est prévue par l'al.2 du même article et l'emprisonnement est de cinq à dix ans.

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    nonobstant l'intitulé de l'article. Dans ce registre des atteintes aux biens, on peut aussi citer la filouterie et la tromperie envers les associés. On pourrait même y ajouter certains cas de recel.93

    Comme on peut le constater, le domaine d'application de la transaction peut être assez vaste. Il va sans dire qu'il englobe déjà les hypothèses d'infractions fiscales, douanières et forestières où la transaction est formellement reconnue. En plus il y a des domaines que nous venons d'inventorier qui pourraient, sans risque, être soumis à la transaction à cause du caractère soit social, soit patrimonial des infractions concernées.

    Conclusion première partie.

    « Un mauvais arrangement vaut mieux qu'un bon procès » a-t-on coutume de dire. Si cette pensée ne résume pas entièrement les développements qui précèdent, elle traduit tout au moins l'idée d'une justice négociée et surtout la recherche d'autres moyens que le procès pour la résolution des confits pénaux. Une des solutions a été trouvée à travers la transaction pénale. Le fondement de celle-ci, ainsi que la multiplicité des modes de transaction ou encore la relative difficulté à établir la nature de cette pratique, n'ont pas suffit à arrêter son expansion et son extension à d'autres matières pénales. Mais il ne s'agit là que des questions de temps et de pratique. L'entrée récente de cette pratique dans le droit d'inspiration romano-germanique peut tout expliquer. L'idée fait son chemin et le domaine ne cesse de s'élargir à de nouvelles infractions puisque certaines questions qui jusqu'ici ne trouvaient pas de réponses sont désormais réglées. Il ne s'agit ni plus ni moins que de l'importante question des droits et des garanties de la personne poursuivie dans la mise en oeuvre de cette pratique.

    93 Nous pensons ici au recel des biens dont le « receleur » ignorait l'origine délictueuse de ceux-ci et n'avait aucun moyen d'en savoir ou d'en douter.

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    Si la question de l'admission et de la transaction en matière pénale a été longuement discutée et continue encore à faire l'objet d'un refus catégorique de la part de certains, c'est moins à son impossibilité à faire parti du droit pénal qu'aux difficultés de mise en oeuvre qu' elle engendre. En réalité, pour certains systèmes pénaux, l'admission et l'extension de la transaction engendreraient non pas une évolution mais une révolution qui mettrait en cause tous les fondements sur lesquels ils ont fonctionnés jusque là. Or la révolution a toujours fait peur car elle a souvent des lendemains incertains et chaotiques, personne ne pouvant prévoir les suites du mouvement. C'est par exemple le cas du système de la légalité des poursuites et dans une certaine mesure le système inquisitoire.

    Dans le système de la légalité de poursuites en effet, le procureur de la république est obligé, une fois l'enquête ouverte, de poursuivre quit à procéder par la suite à un non-lieu. Un tel système qui ignore le principe de l'opportunité des poursuites admettra difficilement sinon pas du tout, la transaction pénale. La raison est toute simple. Obligé de poursuivre, le procureur doit aller jusqu'au bout de sa démarche, peu importe le degré de gravité de l'affaire ou le temps que l'on perdra, peut-être inutilement. C'est ce système qui est en vigueur en Allemagne. Le système inquisitoire qui admet le principe de l'opportunité des poursuites n'est pas tout aussi favorable à la mise oeuvre de la transaction. En fait, il est pour l'essentiel secret, écrit et non contradictoire dans la phase de l'enquête voire dans l'instruction. C'est ce système qui est pratiqué en France. Or en matière de transaction, la procédure ne doit pas être sécrète, encore moins contradictoire. Finalement, le système accusatoire Anglo-saxon semble favorable à une telle procédure. D'ailleurs, les pratiques de « plea bargainng » y sont courantes et presque généralisés.

    Le Cameroun a quant à lui adopté un système mixte prenant en compte les aspects des systèmes inquisitoire et accusatoire dans la phase policière et dans la phase de jugement

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    respectivement. L'application de la transaction parait donc possible dans ce système. D'ailleurs, même les législations dont les normes ne permettent pas a priori l'application de la transaction l'ont intégré dans leur système. C'est le cas du droit allemand qui, comme nombre d'autres pays d'Europe continentale, applique le « plaider coupable » même si ici, il n'est pas codifié comme en Espagne ou au Portugal. Dans la pratique allemande, la jurisprudence admet la transaction partout sur les remises de peine en échange d'aveux de culpabilité. Les avantages indéniables de la transaction pénale ont amené la France avec la loi Perben II, à rejoindre ces pays de l'Europe continentale.

    Il ne suffit cependant pas de mettre en exergue les avantages de la mesure, il faudrait encore la mettre en oeuvre. Or très souvent, cette mise en oeuvre a été l'objet des débats. En réalité, il se posait la question des garanties dont le prévenu doit jouir devant la juridiction répressive. Comment la transaction respecterait-t-elle tous ces droits qu'elle semblait bafouer ?

    Il fallait déterminer la procédure à suivre en matière de transaction au regard du droit procédural pénal car de la procédure, dépend le respect de ces droits. Par ailleurs, le droit pénal et la procédure pénale ne trouvent la pleine mesure de leur efficacité que si les peines sont exécutées d'où l'importance de la détermination des modalités d'exécutions ou des effets des mesures transactionnelles. Aussi allons-nous étudier dans cette partie la procédure de mise en oeuvre de la transaction (Chap. I) et les effets ou l'exécution des condamnations pécuniaires prononcées à la suite de la transaction (Chap. II).

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    CHAPITRE I

    LA PROCEDURE

    Celui qui a commis une infraction à la loi pénale n'est pas automatiquement, ni immédiatement soumis à l'exécution de la peine prévue par le code pénal pour l'infraction qu'il a commise. En règle générale, un délinquant ne subit la peine qu'après avoir été condamné par un juge judiciaire et il ne peut être condamné qu'après avoir été jugé par les juridictions instituées à cet effet. L'organisation, le déroulement et le jugement du procès pénal intenté par le ministère public sont prévus par des dispositions fixant les règles de forme qui doivent être suivies. Dans la constatation des infractions, l'établissement et le rassemblement des preuves, le jugement du délinquant et les voies de recours susceptibles d'être intenté contre les décisions répressives, ces règles et formes doivent être respectées. C'est dire l'importance de la procédure tant pour la société que pour l'individu considéré comme étant l'auteur de l'infraction car il s'agit de concilier les droits individuels avec les besoins de la société. C'est cette procédure qui est suivie lors d'un procès classique c'est-à-dire un procès qui respecte les différentes étapes d'enquête préliminaires, d'instruction préparatoire et de jugement.

    La question du respect de cette procédure s'est posée avec l'admission de la transaction en matière pénale car, comme nous le savons déjà, toutes les étapes sus-citées sont un peu abrégées. Plus exactement, la doctrine classique opposée à cette transaction, a estimé qu'une telle procédure remettait en cause toutes les règles édictées en la matière et plus principalement les droits du prévenu. Mais une telle position semble assez hâtive. Bien que n'assurant pas les différentes phases d'un procès pénal classique, la transaction ne respecte

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    pas les règles de formes. Pour s'en convaincre, il n'y a qu'à analyser les conditions générales de la transaction (S1) son déroulement (S2) et les mesures prononcées à l'issue de cette procédure (S3) particulière et quelque peu nouvelle dans le traitement de la délinquance.

    Section I- CONDITIONS GENERALE DE TRANSACTION PENALE

    Lorsque le ministère public est saisi de la commission d'une infraction, il ne peut poursuivre que si certaines conditions sont remplies. Entre son droit de classement sans suite et son pouvoir d'opportunité de poursuites, le ministère public peut décider de recourir à la transaction. Mais contrairement à ce que l'on pourrait penser, une telle décision n'est possible que si certaines conditions sont remplies. Les unes tiennent à l'infraction, les autres à l'auteur de l'infraction et d'autres enfin à la victime.

    Para. 1- Conditions liées à l'infraction.

    Bien qu'elle relève de l'opportunité de poursuites dont il dispose, le procureur de la république ne peut recourir à la transaction que si celle-ci répond à certaines conditions relatives à l'infraction.

    A-L'infraction doit ressortir du domaine de la transaction

    Toutes les infractions ne peuvent pas faire l'objet de la transaction. Pour que le procureur de la république fasse recours à la transaction, il faudrait d'abord que l'infraction reprochée fasse partie des délits pouvant faire l'objet de transaction. Dans les systèmes de droit où les alternatives aux poursuites ont été systématisées, il existe une liste claire et limitative des différentes infractions pouvant faire l'objet de la transaction. En France par exemple, l'art. 41-2 al. (1) du code de procédure pénal a établi une liste de délits et de contraventions qui peuvent être soumis à la transaction, plus précisément à la composition

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    pénale.94 Dans le même sillage le projet de loi portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, telle qu'il avait été adopté par le Sénat français en octobre 2003, excluait expressément de la liste les délits commis par les mineurs, les délits de presse, les délits politiques et les homicides involontaires.95

    De fait, certaines infractions bien que n'étant que des délits, sont d'une certaine sensibilité telle qu'elles ne peuvent pas être soumises à cette procédure par nature plus douce car ce serait une porte ouverte sur la déchéance et la décadence de la société. Il en va ainsi des délits qui ont trait aux moeurs et à la morale comme la prostitution. Mais cette seule condition n'est pas suffisante. Il faudrait encore que le procureur s'assure que par ce moyen, il mettra fin au trouble causé à la société.

    B- Mettre fin au trouble causé à la société

    La sanction pénale n'a pas pour but uniquement d'infliger aux délinquants une peine en contre partie de la violation d'une norme ou des valeurs de la société. Elle doit pouvoir également mettre fin au trouble causé à la société par les délits.

    Les débats qui ont porté sur le but de la peine mettaient en exergue le fait que celle-ci doit non seulement avoir un but retributif, mais aussi elle devrait restituer à la société la tranquillité qui avait été troublé. En fait, la violation d'une norme sociale choque les consciences et la sanction pénale doit apaiser les effets néfastes que l'infraction a produit sur la société. La société fonctionne sur un modèle d'ordre et de morale établi. Le comportement du délinquant étant contraire à cet ordre, il faut un moyen pour remettre les choses à leur place. La doctrine classique avait imaginé la peine comme étant le moyen d'y parvenir. Avec les procédures nouvelles comme la transaction, il faut également s'assurer que la mesure sera à même d'atteindre cette finalité de « conservation de corps social » pour reprendre les termes

    94 V. «le nouveau procès pénal après la loi Perben II », Dossier de la journée d'études Dalloz du 8 mars 2004, Paris, Dallez, 2004, pp. 391-392

    95 Ibid.

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    de John LOCKE96. La transaction ne sera légitime que si elle tend à la conservation de la paix publique. Autrement dit, il faudrait que la mesure transactionnelle soit à même d'apaiser le mécontentement social né de la commission de l'infraction. Elle doit, comme le disait SELDEN, « purger le mal que l'infraction commise a causé »97 à la société. Très souvent, la commission d'une infraction entraîne la vindicte populaire qui est une source de troubles. Au fond, la société est à la recherche de la justice, gage du maintien de l'ordre et de la paix. Pour satisfaire ce besoin, il ne faudrait pas que la mesure donne l'impression de favoriser plutôt le délinquant. C'est le sentiment auquel tient toute personne ou toute société et il ne doit pas être bafoué.

    D'autres conditions doivent également être remplies pour que la mise en oeuvre de la transaction puisse avoir lieu.

    Para II. Conditions liées au délinquant

    L'autre condition nécessaire pour recourir à la transaction pénale concerne le délinquant et a trait à la reconnaissance des faits et des droits de ce dernier ainsi qu'à sa resocialisation. Le délinquant doit par ailleurs être majeur.

    A- Reconnaissance des faits

    L'idée dominante de la procédure de transaction est que le délinquant doit reconnaître sa participation aux faits reprochés. D'ailleurs, qu'il s'agisse du « plea bargaining » américain, de la « confession » du code de procédure pénal portugais ou de la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité de la loi Perben II, tous ces noms sont évocateurs du préalable de l'aveu du délinquant dans la mise en oeuvre de la procédure. C'est dire l'importance de l'aveu et de la compréhension par le délinquant du sens de son geste.

    96 John Locke cité par Pradel. (J.), Histoire des doctrines pénales. Que sais-je ? PUF. 1991

    97 Selden cité par Pradel,ibid.

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    1-L'aveu

    « L'objet de toute procédure pénale est la découverte de la vérité »98 parce que celle-ci doit aboutir à la démonstration de la culpabilité (ou de l'innocence) de l'accusé ou prévenu. La recherche de cette vérité prend divers chemins dans les preuves que peut rassembler le juge d'instruction. Mais traditionnellement, l'aveu a toujours été considéré comme un moyen idoine d'atteindre la manifestation de la vérité. Pour cette raison, la procédure pénale a pendant longtemps été orienté vers la recherche de l'aveu. Tous les moyens même les plus imaginables et les plus odieux comme la torture, étaient alors mis en oeuvre pour obtenir l'aveu considéré jadis comme « la reine des preuves »99

    Les longs débats qui précèdent l'établissement de la vérité et de la culpabilité du prévenu ont conduit à rechercher un raccourci : l'aveu. Or avec la procédure transactionnelle, cet aveu est recherché de façon instantanée, ce qui a le mérite d'éviter les tortures et autres pratiques pour l'obtention de celui-ci. Ici précisément, plus que l'aveu, l'inculpé ou le suspect doit reconnaître les faits. Autrement dit, il ne suffit pas qu'il dise qu'il plaide coupable, il faudrait encore que cela puisse être vrai pour être pris en compte. Il se pose alors le problème de la valeur probante de l'aveu. Le code pénal et le code d'instruction criminelle en vigueur au Cameroun ne font aucune allusion à ce mode de preuve. Mais le projet de code de procédure pénal en son art 315 al 4 déclare que « la force probante de l'aveu est laissée à l'appréciation du tribunal qui ne peut l'admettre ou le rejeter que par décision motivée ». L'aveu est donc contrôlé car la conviction du juge doit se fonder sur un élément indiscutable. Il doit donc être obtenu sans contrainte d'aucune sorte, ni morale, ni matérielle. Il doit être fourni en pleine connaissance de cause par l'inculpé ou le prévenu conscient de ses paroles. Le juge ou le ministère public doit pouvoir rejeter les aveux manifestement mensongers passés par des alcooliques ou des dégénérés. C'est d'ailleurs dans ce souci que le délinquant

    98 Garrand, Instruction Criminelle, T 1er, n°227 p 475

    99 V. Nkolo (P.), La recherche des preuves dans l'avant projet de code de procédure pénale, thèse doctorat 3ecycle p. 30

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    doit être non seulement majeur, mais jouir de toutes ses facultés. Dans la pratique allemande de la transaction, l'aveu n'est valable que si la culpabilité ne fait aucun doute.

    Si ces conditions sont respectées, il n'y a pas de raison que l'on ne prenne pas en compte l'aveu car nous pensons avec FAUSTIN HELIE que « quand un homme avoue qu'il est l'auteur d'une action immorale, cette déclaration emporte avec elle la présomption qu'il dit vrai car, il n'est point dans la nature humaine de subir remords qui l'agitent, que, cédant au cri du remord ou à un besoin impérieux de vérité, il fait l'aveu de sa faute volontairement l'imputation d'un fait honteux lorsque cette imputation est mensongère » puisque ajoute- t- il « c'est en proie au trouble qui le domine, au remords qui l'agitent que, cédant au cri du remord ou à un besoin impérieux de vérité, il fait l'aveu de sa faute ».100

    2-Implication de l'aveu

    Si l'on pose comme condition de prise en compte de l'aveu que celui-ci soit obtenu en toute licéité et sans violence et qu'il soit fourni en connaissance de cause et en toute conscience, c'est parce qu'un tel geste a des conséquences importantes sur la procédure et sur les droits de la personne poursuivie. Dans un procès classique, l'aveu entraîne l'arrêt des débats et le juge prononce la sentence, l'aveu étant considéré comme preuve suffisante. Ce geste peut être autrement plus lourd de conséquences puisqu'il met en jeu les droits de la défense.

    Dans la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, l'aveu ou si l'on préfère la reconnaissance des faits emporte renonciation au droit au silence, au droit de plaider coupable ou non de la personne poursuivie. Parfois même, il est perçu comme une renonciation à la présomption d'innocence qui gouverne le procès pénal. C'est pour cela que les partisans de l'exclusion de toute transaction pénale ont estimé que cette dernière foulait au

    100 Nkolo (P) op. cit. p. 32

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    pied les garanties de la défense. Ce qui semble un peu exagéré car plusieurs garanties entourent la mise en oeuvre d'une telle pratique.

    B- Les garanties de la défense

    L'une des questions soulevées par la transaction pénale était celle de savoir si le double degré de juridiction était respecté par cette pratique. Simplement le suspect ou l'inculpé qui a plaidé coupable et qui s'est vu imposer une mesure ou sanction peut-il interjeter appel de la décision ? La possibilité d'un tel recours est la garantie d'une bonne administration de la justice et du respect des droits de l'inculpé. C'est un droit reconnu à la personne poursuivie.

    La réponse à cette interrogation dépend de la nature que l'on donne à la transaction ou plus précisément du mode de transaction envisagé. Dans le cas de la médiation, le délinquant est libre de s'exécuter ou non car un tel accord est plus proche du régime juridique du droit des obligations.101 Lorsque l'on envisage plutôt la composition pénale, la mesure transactionnelle est immédiatement exécutoire. Mais une fois encore, le délinquant peut l'exécuter ou ne pas l'exécuter. Par contre lorsqu'il s'agit de la CRPC, les données sont légèrement modifiées étant donné que l'intervention du juge pour homologuer l'accord et la sanction acceptée, rend alors possible le recours. Ceci étant la procédure offre bien d'autres garanties.

    1- L'absence de pression.

    Il va sans dire que la reconnaissance de culpabilité doit se faire en toute licéité et sans violence. Cette interdiction concerne les tortures faites dans le but d'obtenir les aveux de l'inculpé. D'autre part, l'inculpé ne doit pas être soumis à des pressions. Il s'agit ici des pressions de quelque nature que ce soit, psychologique ou liée à la détention. Ainsi la jurisprudence anglaise pose comme condition de validité de l'accord de reconnaissance de

    101 V. Berg. (R.), La médiation pénale. Ency. D. Rép. Droit Pen. 1999. n°109-110

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    culpabilité l'absence de pression sur l'accusé. Elle considère une telle pression comme une atteinte à la liberté du délinquant de plaider coupable ou non coupable. Aussi considère-t-elle l'indication anticipée de la réduction de peine comme une pression. C'est la position qui a été dégagée par la jurisprudence Turner de 1970102. Dans cette décision, la chambre criminelle de la « Court of Appel » a posé comme conditions de la reconnaissance de culpabilité, l'obligation pour l'avocat de l'inculpé d'insister pour que celui-ci plaide non coupable lorsqu'il n'a pas commis les faits qui lui sont reprochés et surtout que pendant la négociation, le juge doit indiquer le type de peine qu'il envisage et non sa teneur précise ; une telle indication étant constitutive de pression.

    La CRPC retenue par la loi portant adaptation de la justice aux évolutions criminelles pose quant à elle la condition que la proposition de transaction ne doit pas se faire lorsque l'inculpé est en détention préventive car, là aussi, il y aurait pression. Il se pose à ce niveau le problème de la détention préventive. Doit- t-on garder un individu qui fait preuve de bonne conduite et qui décide de commencer à s'amender en reconnaissant les faits au même titre que celui qui a plaidé non coupable imposant de ce fait des recherches suplementaires pour la découverte de la vérité ? Il se pourrait qu'il y ait là une injustice qui défavorise le délinquant qui a reconnu les faits. Bien plus, si la détention préventive est destinée à éviter que le délinquant ne fasse disparaître les éléments de faits susceptibles de prouver sa culpabilité, il n'y a plus de raison de garder ce dernier car son aveu emporte la « présomption qu'il dit vrai » et constitue un élément suffisant. La détention préventive devient alors arbitraire et sans raison.

    2- Le libre consentement et l'assistance de l'avocat.

    Toutes ces interdictions visent à assurer un consentement libre et éclairé. Il ne faut pas seulement que l'accord ou la reconnaissance de culpabilité soit fait sous pression. Il faut

    102 Service des études juridiques, hptt/ www.senat.fr

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    encore que l'inculpé consente en toute liberté, en toute connaissance de cause. Informé de toutes les discussions qui ont eu lieu entre son avocat et le juge ainsi que des mesures de rechange qui lui sont proposées, le prévenu doit manifester librement sa ferme volonté de collaborer à leur mise en oeuvre.

    Par ailleurs, le prévenu doit être informé de son droit d'être assisté par un avocat. En fait, l'accord du délinquant bien que donné en toute liberté et en toute conscience ne peut être reçu qu'en présence d'un avocat.103 Cette présence est exigée même avant que l'intéressé ne formule son accord à la proposition de la transaction. Cette présence a pour objectif de fortifier l'ambition de parvenir à une acceptation libre et éclairée de la mesure.

    L'avocat doit pouvoir recevoir le dossier avant le moment de l'audience au cours duquel son client donne son accord. Autrement dit, il doit pouvoir prendre connaissance du dossier bien avant, ce qui lui assure la possibilité de l'étudier suffisamment. D'ailleurs, dans ce sens, la procédure de CRPC impose un délai d'au moins dix jours au cours duquel l'intéressé étudie la proposition avant de donner son accord.

    A côté de ces garanties, on peut relever en outre l'obligation de la présence physique de la personne poursuivie. La proposition doit par ailleurs être écrite et signée par le procureur. Elle doit contenir l'exposé de la nature et du quantum des mesures proposées. L'intéressé doit recevoir une copie de cette proposition. Toutes ces précautions visent à renforcer l'idée du traitement du délinquant.

    C - La resocialisation du délinquant

    Sous l'influence de l'école de la défense sociale nouvelle de MARC ANCEL, les fonctions traditionnelles de la peine (rétribution, intimidation) ont fait place à d'autres fonctions, dont celles de resocialisation, de réinsertion et d'adaptation du délinquant. La mesure transactionnelle doit permettre une prise de conscience par le délinquant de sa faute et

    103 Le nouveau procès pénal après la loi Perben II... op. cit.

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    surtout l'aider à assumer cette faute en lui faisant supporter sa sanction.104On part de l'idée selon laquelle une punition librement acceptée est beaucoup plus efficace qu'une punition imposée. Au lieu de stigmatiser et de réprimer à outrance le délinquant, on cherche à le traiter, à le reclasser. En outre, une meilleure resocialisation passe par l'individualisation de la sanction. Précisément, la transaction présente des assurances dans ce sens. En fait, elle prend en compte la personnalité du délinquant, puisque l'une des exigences posées pour sa mise en oeuvre est que le délinquant soit un délinquant primaire et qu'il n'ait pas fait l'objet d'une précédente mesure de cette nature dans les cinq années précédentes. Si le délinquant a déjà bénéficié d'une mesure de transaction et qu'il rechute, le parquet est en droit de douter de l'intérêt d'une nouvelle mesure pour lui. Dans ce cas, une poursuite sera plus opportune pour lui rappeler ce que dit la loi.

    La resocialisation apparaît ainsi comme une application au délinquant du modèle libéral de la pénologie qui insiste sur l'utilité de la peine. Ce modèle implique la reconnaissance de l'individu en tant que valeur autonome, ce qui explique le respect et la dignité dus par la société. Même si certains sont sceptiques à la personnalisation de la peine par la transaction105, elle(personnalisation) est évidente ici. Comme le disait PLATON dont nous partageons les idées, « la justice pénale doit permettre au criminel de tirer profit de sa peine et de se réconcilier avec sa victime en passant de la querelle à l'amitié ».

    Para. 3- Conditions liées à la victime

    Pour qu'elle s'opère, il faut que la mesure transactionnelle assure la réparation du préjudice subit par la victime. Un préalable à cette réparation est que la victime soit identifiée.

    104 Berg. (R.) op. cit.

    105 V. Hederer (J.), Le nouveau procès pénal après la loi PERBEN II. Pp. 404-405. Cet auteur estime que la composition pénale ne facilite pas l'individualisation de la peine.

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    Mais il peut arriver que celle-ci ne soit pas connue. Dans ce cas, il sera difficile de remplir cette condition. Mais lorsqu'elle est identifiée, il faut assurer son indemnisation. Ce qui pose le problème de l'évaluation du préjudice.

    A- L'indemnisation

    C'est une sorte de substitut à l'exercice de l'action civile par la victime. Le Procureur de la République est tenu de proposer à l'auteur des faits de réparer les dommages quels qu'ils soient, causés par sa faute. Le délinquant ne peut échapper à cette obligation qu'en justifiant qu'il a déjà réparé le préjudice. La victime, tout comme l'auteur des faits, est avertie de la transaction et de son droit d'être assisté d'un avocat.

    Le préjudice subi peut être matériel ou moral mais c'est avant tout la réparation du préjudice matériel que l'on cherche à obtenir.

    Ce souci de réparer le dommage traduit la tendance actuelle qui consiste à prendre de plus en plus en compte la situation de la victime. La transaction se veut être plus proche de la victime, l'écouter et la faire participer à la solution du conflit. Comme le dit J. LEBOIS-HAPPE, « de simple spectateur, elle devient acteur de la réponse donnée à l'acte délictueux ».106

    D'après les dispositions du code de procédure pénale français sur la composition pénale, le délai donné à l'auteur des faits pour la réparation du préjudice causé par l'infraction est de six mois. Une chose est d'accepter de réparer le dommage subi par la victime, une autre est l'effectivité de cette réparation. La question se pose donc de savoir de quel moyen dispose effectivement la victime pour contraindre l'auteur des faits délictueux, cause du préjudice, à la réparation. Cette question est d'autant plus pertinente que l'accord de l'auteur est souvent interprété comme un acte soumis au droit commun des obligations, c'est-à-dire que l'auteur pourrait exécuter ou ne pas exécuter après signature de l'accord. Le projet de loi portant

    106 Leblois-happe (J.) La médiation pénale comme mode de réponse à la petite délinquance : état des lieu et perspectives, R.. S. C. 1994,p. 532.

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    adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité proposait que le recouvrement puisse se faire par la procédure d'injonction de payer.

    Mais le plus souvent, la réparation est effective puisque la solution sera adaptée au problème et la réparation souple en corrélation avec les besoins de chacun. Illustrons nos propos.

    Deux jeunes gens, un soir de bal, en arrivent à une algarade à l'issue de laquelle le véhicule de la victime subit de sérieuses dégradations. Son propriétaire, au chômage, avait acquis son automobile au prix de bien des efforts et, de fait, lui prodiguait mille attentions.

    Le jeune homme mis en cause, au chômage également, était dans l'impossibilité financière de faire face aux dépenses de réparation des dommages. Par ailleurs, sa compagnie d'assurance ne pouvait intervenir car les dégradations étaient la résultante d'actes délibérés.

    Lors de la rencontre de médiation, ces jeunes gens ont pu aborder le problème de fond, lié à une mésentente qui durait depuis leur adolescence. Ce premier aspect traité, ils ont pu envisager avec réalisme et bienveillance la réparation du préjudice pour parvenir à l'accord suivant. Le jeune homme, auteur des faits, ayant exercé chez un garagiste, proposa d'une part d'y faire effectuer les réparations au prix coûtant et, d'autre part, de participer lui-même aux travaux. La facture des pièces pouvait également se régler par petites mensualités auprès du garagiste. Conformément à l'accord ainsi passé entre ces deux jeunes et après confirmation reçue du garage, ils se retrouvèrent dans cet établissement et procédèrent aux réparations.107

    Dans cet exemple précis, si le problème de l'évaluation ne se pose pas, tel n'est pas le cas lorsqu'il faut réparer un préjudice autre que matériel.

    107 Arnoux(S.) et Tercq (N.), « Les enjeux de la médiation pénale pour la victime » in la médiation pénale : Entre répression et réparation, sous la direction de Robert Cario , l'Harmattan, 1999 pp. 117-118.

    70

    B- L'évaluation du préjudice

    Lorsque la victime allègue un préjudice moral, il faut également le réparer dans toute la mesure du possible. Le montant de l'indemnité fait l'objet de discussion.108 Il ne s'agirait pas pour la victime de chercher à obtenir une indemnisation disproportionnée, si-non la mesure serait vouée à l'échec. La victime verra son dommage, dans la pratique, réparé à la hauteur de ce qu'elle croît être juste puisqu'elle y a consenti. On peut cependant imaginer qu'un peu plus tard, elle s'estime lésée et demande une indemnisation supplémentaire. Cette demande sera-t-elle recevable ?

    La victime doit faire preuve de vigilance et de beaucoup d'attention car l'on estime que « ce qui est négocié est juste », l'accord étant le fruit, le point d'équilibre des intérêts antagonistes.109 Dès lors, il y a de sérieux doute à propos de la recevabilité d'une telle action puisque, assimilé au régime de la transaction (art. 2052 C. Civ) l'accord a l'autorité de la chose jugée en dernier ressort entre les parties.110 Mais une telle solution ne semble envisageable que dans l'hypothèse d'une médiation ou tout simplement lorsque le préjudice subi n'est pas susceptible de connaître une évolution entre l'intervention de l'accord et l'indemnisation effective.

    En effet, dans l'hypothèse d'un préjudice corporel, l'évaluation semble être un peu plus délicate. Ce préjudice est susceptible de s'améliorer ou de s'aggraver. Dès lors, quand doit-on se placer pour évaluer le préjudice et que faire en cas de sous-évaluation ? Exemple : une affaire de coups et blessures commis par un ex-petit ami sur celui l'ayant remplacé a été renvoyée en médiation, l'étendue des violences n'étant initialement pas connue. Or, il s'est avéré par la suite que ces violences ont entraîné une interruption temporaire de travail de plus de six mois. Dans une telle occurrence, le préjudice devrait être réévalué. En droit commun, le

    108 V. Berg. (R.) La médiation pénale. Ency. D. Rép. Droit Pén. 1999.

    109 Cette conception est celle soutenue par l'autonomisme contractuel pour qui le contrat n'est que juste parce que librement négocié entre égaux

    110 V. Berg R. op. cit. N° 109-110.

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    moment de l'évaluation est fixé non pas au jour de la réalisation du dommage, mais au jour du jugement. Dans l'exemple précédent, il est évident que l'affaire prendra le chemin du tribunal correctionnel car l'auteur refusa de payer ou de revenir sur l'accord, alors que la victime a droit à réparation intégrale du préjudice subi. La victime pourra contester la validité de l'accord. Dans le cas d'une comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, la victime peut contester devant le juge chargé de l'homologation de l'aveu et de la sanction proposée. Sur ce point en tout cas, la pratique a encore besoin de préciser les contours d'un tel problème. Ces conditions préalables réunies, comment se déroule la transaction ?

    Section II- DEROULEMENT DE LA TRANSACTION

    Lorsque toutes les conditions préalables de mise en oeuvre de la transaction sont réunies, on peut envisager son déroulement. Une question persiste cependant, celle de savoir si la proposition est laissée au choix du ministère public ou à celui de l'auteur des faits. Toujours est-il que, pour plus de rigueur et pour éviter tout arbitraire, l'intervention d'un juge pour homologuer l'accord est nécessaire.

    Para1- La proposition de l'accord

    Qui a l'initiative de la transaction et à quel moment peut-elle intervenir ? Voila des questions essentielles auxquelles il faut répondre.

    A- L'initiative de l'accord

    On s'est longtemps posé la question de savoir à qui appartenait l'initiative de la proposition de transiger. La question se posait d'autant plus que la nature d'une telle procédure était controversée et les mesures diverses.

    Des différences de nature peuvent être décelées à travers l'initiative du recours. Dès l'initiative du recours à l'une ou à l'autre des mesures, une différence essentielle apparaît à l'égard des personnes concernées et de leur volonté. C'est ici que le droit commun des

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    contrats quant au consentement marque par exemple la médiation alors que d'autres mesures obéissent au droit réservé à l'administration de la justice d'apprécier la suite à donner à l'affaire. Ainsi, lorsqu'une infraction est constatée dans un procès verbal, l'administration peut, de sa propre initiative, faire à ce dernier des offres de transaction.111 C'est le cas le plus souvent en matière de transaction fiscale et douanière.

    Pour les autres transactions, l'initiative peut dépendre, soit de l'auteur de l'infraction, soit du ministère public à qui revient le droit d'apprécier les suites à donner à l'affaire dont il est saisi. Dans l'hypothèse de la médiation et de la composition pénale, l'offre de transaction émane, et ne peut émaner que du procureur de la république. Elle est soit faite directement à l'auteur des faits par le procureur, soit transmise au nom du procureur par son substitut ou encore par un officier de police judiciaire. En fait, la proposition de transiger ne peut intervenir qu'antérieurement à l'action publique. Autrement dit, la proposition de transiger est un acte purement administratif et non juridictionnel qui laisse ouverte la possibilité pour le procureur d'engager les poursuites en cas d'échec de la transaction. Toutefois, les poursuites ne seront possibles que pour autant que les faits ne sont pas prescrits.

    Dans l'hypothèse par contre du plaider coupable ou de la CRPR, l'offre de transaction est le plus souvent l'oeuvre de l'inculpé ou de son avocat. Dans les procédures anglaise, espagnole et portugaise, c'est l'accusé qui fait l'offre de transaction. Cette procédure d'inspiration anglo-saxonne essentiellement orale, donne à la personne poursuivie la possibilité de demander à plaider coupable si des concessions peuvent lui être accordées sur la peine ou les frais de justice

    Mais si d'une manière générale l'initiative appartient à l'accusé, aux Etats-Unis et au Canada, elle est tantôt partagée par le ministère public ou plus précisément le

    111 V. en ce sens Gassin (R.),, La transaction pénale, Rép. Pén. D. n° 43-49. En matière fiscale et douanière, la transaction peut être demandée indifféremment par le contrevenant et l'administration et sur-le-champ dès la constatation du délit et la rédaction du procès verbal.

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    procureur de la république et l'accusé, tantôt confiée uniquement au seul juge (Canada). Des raisons diverses expliquent cette particularité. Au Canada l'offre appartient au juge pour des raisons d'opportunités non pas des poursuites mais d'une bonne administration de la justice. En fait le juge y recourt lorsqu' « il est convaincu qu'elle (transaction) est appropriée compte tenu des besoins du suspect et de l'intérêt de la société et de la victime »112

    Aux Etats-Unis par contre, l'offre est partagée par le simple fait que le procureur exerce en même temps les fonctions de poursuites (exercice de l'action publique) et d'instruction (juge d'instruction). Cette situation est très proche de celle du Cameroun où depuis 1972, le parquet cumule ces deux fonctions. Mais avec le projet de code de procédure pénale, les choses semblent avoir changé puisqu'il opère une distinction entre les autorités chargées de la mise en oeuvre de l'action publique et celles chargées de l'instruction.

    B- Le moment de la transaction

    En droit processuel, le moment d'intervention d'un acte est capital tant pour la validité de l'acte que pour la suite de la procédure. Comme nous l'avons déjà relevé, la transaction peut intervenir à tout stade de la procédure en matière fiscale et douanière avant l'intervention d'une décision sur le fond.

    La loi No 96/12 du 5 août 1996 portant Loi-cadre relative à la gestion de l'environnement au Cameroun pose comme condition, sous peine de nullité, que la transaction intervienne avant toute procédure judiciaire éventuelle (art. 96 al. 3). Dans le même ordre d'idée, la loi 94/01 du 10 janvier 1994 portant régime des forêts, de la faune et de la pêche sans être aussi explicite que la précédente laisse déduire que la transaction interviendrait également avant la procédure judiciaire. Ces mêmes exigences s'imposent pour les transactions pénales de médiation et de composition pénale. En effet, le domaine de la transaction permet une telle pratique car nombre d'infractions ici sont conditionnées, pour la

    112 Services d'études juridiques « Le plaider coupable », hptt/ www.senat.fr

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    mise en mouvement de l'action publique, à une plainte de la victime. Mais également la transaction peut intervenir avant une décision définitive (cas des injures).

    Mais dans le cadre de la transaction proposée par le procureur de la république, l'auteur a un délai de 10 jours pour donner sa position faute de quoi la proposition devient caduque. Cette caducité ne joue pas lorsque l'on se retrouve dans le plaider coupable. Ici, la reconnaissance de la culpabilité peut avoir lieu à tout moment de la procédure. Dès sa comparution, l'inculpé peut plaider coupable ou non coupable.

    Aux Etats-Unis particulièrement, le fait que la reconnaissance de culpabilité intervienne à tout moment permet d'éviter un nouveau procès. En fait, faute d'une majorité du jury sur la décision de culpabilité, le procès est annulé et la procédure doit recommencer. Mais dans certains Etats, le « plea bargaining » est limité à certaines phases de la procédure (première comparution devant le juge, après l'audience préliminaire qui permet d'apprécier le caractère probable de la culpabilité113.)

    L'avantage ici serait sans doute le gain de temps qu'il procure et les avantages que tire l'inculpé de son geste. Plus la reconnaissance de la culpabilité intervient tôt, plus le délinquant en tire des avantages. Ainsi, la réduction de la peine sera plus conséquente et importante lorsque l'inculpé plaide coupable rapidement. Ceci est valable en Angleterre et aux Etats-Unis.114

    Toujours par rapport au moment de l'intervention, de l'offre de transiger, les dispositions françaises sur la composition pénale prévoyaient que celle-ci ne peut avoir lieu à peine de nullité, lorsque le délinquant était en garde à vue.115 Mais les réalités pratiques ont eu

    113 Site web op. cit.

    114 hptt/ www.senat.fr, op. cit.

    115 Géré (J-.P.), De la composition pénale à la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité : le « plaider coupable » à la française in Le nouveau procès pénal après la loi Perben II,Dossiers de la journée d'études Dalloz du 8 mars2004, Paris,D. 2004, pp.393

    75

    raison sur les dispositions de cette loi. La loi du 9 Septembre 2002 a supprimé cette

    interdiction.

    La procédure ainsi envisagée permettrait donc d'éviter un procès et de passer directement au prononcé de la sanction acceptée par le délinquant. Mais l'intervention d'un juge est nécessaire pour la validation de la mesure.

    Para II- L'homologation de l'accord par un juge de siège

    L'un des reproches faits à la transaction était de ne pas respecter la séparation entre les autorités de poursuite et les autorités de jugement. L'homologation du juge est une garantie pour le délinquant et pour une bonne administration de la justice. Au cours de l'audience d'homologation, le juge devra vérifier la validité de l'accord ou de l'aveu du délinquant d'une part, puis la qualification retenue par le procureur d'autre part.

    A - Vérification de la validité de l'accord.

    Si le prévenu accepte la peine proposée par le parquet, sur requête du procureur, le président du tribunal ou un juge délégué organise une audience d'homologation de la décision. Ici se pose la question de savoir de quel tribunal le président doit-il appartenir. C'est la nature de l'infraction qui détermine le tribunal. Depuis l'ordonnance de 1972 portant organisation judiciaire, c'est le tribunal de première instance qui est compétent en matière de délit et de contravention. Le projet de code de procédure pénale a confirmé cette compétence (art 289). Par ailleurs, l'on notera qu'il pourrait s'agir, conformément au nouveau code de procédure pénale, soit du tribunal du lieu de commission des faits, soit de celui du domicile du prévenu, soit enfin du lieu d'arrestation. Ce même tribunal est compétent en matière de flagrance, une procédure dont le souci est de traiter les problèmes avec célérité, tout comme d'ailleurs la procédure de transaction.

    Fort de toutes ces considérations, nous pensons que le tribunal de première instance et partant le président de ce tribunal est le juge naturel devant homologuer l'accord.

    76

    L'audience doit se tenir aussitôt les mesures proposées acceptées car il y va de la liberté du délinquant si celui-ci est détenu. On s'est demandé si l'audience d'homologation devait être publique ou se tenir en chambre de conseil. L'audience publique permettrait d'assurer le principe de la publicité des débats. Par principe, l'audience sera publique. Mais il se pourrait que la tenue en chambre de conseil puisse être retenue en pratique116 puisqu'elle évite la stigmatisation dénoncée du délinquant.

    Le rôle du juge consistera à vérifier si l'accord a été donné selon les conditions exigées c'est-à-dire en toute liberté, en toute conscience et sans pression. Il doit également vérifier si la reconnaissance de culpabilité est fondée et tout ceci en présence de l'avocat du prévenu. Dans la même perspective, il devra s'assurer que le prévenu comprend la nature des faits qui lui sont reprochés ainsi que les conséquences de sa décision de plaider coupable.

    .

    B- Vérification de la qualification retenue

    Le juge saisi par requête du procureur statue, entend les parties s'il y a lieu, et valide ou rejette l'accord de transaction. Il le fait par ordonnance d'homologation ou de non - validation qui ne peut être rendue qu'au vu du dossier dont il dispose et en se fondant sur son intime conviction.

    Justement il se pose le problème de la qualification donnée au fait et de la prise en compte de cette qualification dans l'intime conviction du juge. Plus simplement, le juge est-t-il lié par la qualification donnée aux faits par le procureur et par les termes de l'accord ?

    Le juge jouit d'une liberté qui lui confère une indépendance face aux dossiers que lui transmet le procureur. C'est cette indépendance qui lui donne la possibilité de requalifier les faits retenus par le procureur. Il s'agit en fait de la liberté d'appréciation souveraine qui dans une affaire, permet au juge de requalifier et de diminuer la peine. Par exemple, poursuivi

    116 Céré op. cit.p.400.

    77

    pour tentative de complicité de corruption, un individu s'est vu finalement condamné pour trafic d'influence.117 Le juge saisi doit apprécier souverainement pour en déduire la catégorie pénale à laquelle les faits appartiennent.118

    Une fois sa conviction établie, le juge ne peut q'approuver ou rejeter la

    proposition de transaction. La décision rendue par ordonnance est notifiée à l'intéressé et à la victime. En cas de refus de validation, la proposition du procureur devient caduque et la procédure prend fin. Le parquet doit alors choisir une autre voie s'il souhaite poursuivre l'auteur des faits. La validation par contre permet de mettre en exécution les mesures relevant de la transaction.

    Section III- LES MESURES RELEVANT DE LA TRANSACTION

    Le caractère protéiforme de la transaction ne permet sans doute pas de rechercher des mesures qui peuvent s'appliquer à toutes les formes. Tout au plus, on pourrait dégager un ensemble de mesures susceptibles d'être appliquées, la tâche revenant au parquet de choisir la mesure appropriée à la situation en présence.

    Para 1- La peine d'emprisonnement

    La comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité peut entraîner une peine d'emprisonnement. Comme nous avons eu à le mentionner, cette procédure est un peu particulière, bien que conduisant à une justice négociée et favorisant un gain de temps.

    D'après le projet de loi française sur la reconnaissance préalable de culpabilité, le prévenu bénéficie d'un délai de 10 jours de réflexion pour donner sa réponse à la proposition du procureur. A la question qui s'était posée de savoir si celui-ci pouvait être placé en détention provisoire, le projet répond par l'affirmative. Mais cette mesure exceptionnelle ne pouvant être prise que si la peine proposée par le procureur est supérieure à deux mois d'emprisonnement ferme. Dès son origine, le plaider coupable avait vocation à s'appliquer à

    117 C. A. ydé, Arrêt no 1133 du 20 août 1973

    118 V. en ce sens Anoukaha (F.) Le magistrat instructeur en procédure pénale camerounaise, thèse doctorat 3e cycle, Yaoundé 1982

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    tous les litiges, même les plus graves. Mais avec la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité que la France a adopté, cette procédure se limite comme la composition pénale, et autre alternative à des infractions les moins graves. Doit-t-on dès lors maintenir la peine d'emprisonnement ?

    L'objectif avoué de cette procédure est d'abord de permettre au délinquant d'accepter la sanction proposée par le procureur. En fait, il n'a jamais été question ici ou ailleurs même, de ne pas prononcer de sanction. Bien plus, la procédure de plaider coupable permet d'obtenir pour certains faits, des concessions sur la peine et non sur son absence. La peine d'emprisonnement est justifiée. La reconnaissance de culpabilité permet ainsi d'obtenir une réduction de la peine. Exemple : dans le cadre du tribunal pénal International pour le Rwanda un accusé bénéficia de la réduction de peine du fait de la reconnaissance de culpabilité. Dans l'affaire Vincent Rutaganira en effet, ce-ex conseiller municipal d'une commune Rwandaise, accusé de génocide ou plus exactement d'omission de porter secours, plaida coupable. Ce qui était une première devant ce tribunal. Il bénéficia de la clémence du juge et ne fut condamné qu'à six ans d'emprisonnement.119 Bien que portant sur des faits graves, cette affaire témoigne de l'application de la réduction des peines due à la reconnaissance de culpabilité. Le taux de réduction peut varier et se situe dans l'ordre de 20 à 30%. Et plus la reconnaissance intervient tôt, plus la réduction est importante. C'est du moins la pratique anglo-saxonne.

    Pour que cette procédure soit applicable au Cameroun, il faudrait inciter les délinquants à plaider coupable. Pour ce faire, la peine d'emprisonnement ne devrait pas être supérieure à six mois et surtout il faudrait un juge de l'application des peines. C'est là un cas extrême puisque, pour l'essentiel, la mesure prononcée consistera plutôt en une amende.

    119 Journal du TPIR Hirondelle du 16/03/2005 hptt/ www.africatime.fr

    79

    Para 2- La peine d'amende

    Tout comme la peine privative de liberté apparaissait à une époque comme la peine par excellence, l'amende apparaît dans la procédure transactionnelle comme peine par excellence.

    Dans la plupart des infractions ressortissant du domaine de la transaction, la sanction a un caractère indemnitaire. En effet, l'infraction cause un trouble à la société ou plus précisément à la victime. Le meilleur moyen d'assurer le rétablissement de l'ordre qui a été troublé consistera en la réparation du préjudice que la victime a subi. La mesure envisagée ici consistera au versement ou à la réparation du dommage de la victime, cette réparation tenant également lieu de sanction. On associe ainsi le souci de rétribution à celui d'indemnisation. Nous pouvons dès lors, approuver J-M. VARAUT lorsqu'il écrit : « On s'habitue à tout, même à la prison, mais jamais à donner de l'argent ».120 Dans certains cas, à la place de l'amende qui devait être versée en plus de la réparation, le procureur pourrait se satisfaire du paiement des frais de justice, tandis que parallèlement, la transaction aurait l'effet inverse ailleurs ; la suppression de l'obligation de payer ces frais pour le délinquant.

    Il n'est cependant pas exclu qu'à côté de la réparation, le juge prononce une amende et le paiement des frais de justice. Toujours est-il que pour « encourager » le geste du délinquant et son envie de s'amender, on s'en tiendra le plus souvent à la réparation et à d'autres mesures visant à favoriser la resocialisation du délinquant.

    Para 3- Les autres types de peines

    Pour que la transaction atteigne la pleine mesure de son efficacité, il faudrait que la mesure proposée au délinquant soit à même d'assurer sa resocialisation. Pour parvenir à cet

    120 Varaut (J-M.), La médiation ou la justice non violente, Gaz-Pal. 1994. II. doctr. 1097. cité par Berg (R.), op. cit

    80

    objectif, le Procureur peut proposer diverses mesures dont le but sera de responsabiliser le délinquant.

    Tout d'abord il peut y avoir dessaisissement au profit de l'Etat de la chose qui a servi ou qui était destinée à commettre l'infraction ou qui en est le produit. Cette mesure ressemble à s'y méprendre, à celle relative à la confiscation de l'art. 35 du code pénal camerounais.

    Un travail non rémunéré au profit de la collectivité peut encore être proposé à l'auteur des faits. D'après la pratique, ce travail dit « d'intérêt général » doit être limité à soixante heures et dans un délai n'excédant pas six mois en matière délictuelle et à trente heures en matière de contravention dans un délai de trois mois. Ce travail est effectué au profit d'une personne morale de droit public ou d'une association habilitée. Ainsi, il serait plus judicieux de proposer à l'auteur de dégradation de chaussée ou de monument l'entretient de ladite chaussée ou dudit monument ou encore de faire participer l'auteur d'un délaissement d'incapable ou d'omission de porter secours à des oeuvres d'aides et d'assistance aux personnes en besoin.

    D'autres mesures peuvent être proposées ou imposées à l'auteur comme l'engagement d'adopter une attitude respectueuse d'autrui dans le cadre des conflits de voisinage ayant dégénéré, ou encore l'engagement de ne plus recommencer (cas des conflits ou violences entre concubin ou époux). Le procureur peut tout simplement, soit faire un rappel à la loi à l'intention de l'auteur des faits, soit imposer une cure de désintoxication, soit interdire la fréquentation de certains lieux au mis en cause etc.

    La procédure ayant bien suivie son cours, les mesures proposées peuvent être exécutées dès la validation par le juge. Cette exécution emportera des effets dont l'ampleur est liée à la bonne ou mauvaise exécution desdites mesures.

    81

    CHAPITRE II. EFFETS ET PORTEE DES MESURES

    TRANSACTIONNELLES

    L'effet fondamental de la transaction pénale, comme le dispose l'art. 62 al 1 (f) du projet de code de procédure pénale, est l'extinction de l'action publique. Cette affirmation ne saurait cependant suffire à définir la portée exacte de la transaction. Son effet extinctif soulève en effet de nombreux et importants problèmes. Les dispositions particulières aux diverses transactions apportent quelques précisions sur certains points. La jurisprudence pour le reste, emprunte aux effets de la transaction du droit civil qui constitue un modèle, tout en leur apportant des adaptations et des exceptions nécessitées par le particularisme de la matière. Si la transaction a pour principal effet d'éteindre l'action publique, il reste que la portée d'une telle pratique suscite encore des scepticismes.

    Section I - EFFETS DE LA TRANSACTION.

    Les effets de la transaction pénale sont commandés par une distinction essentielle entre le cas d'exécution de la mesure et le cas de non-exécution. Tout comme la mise en oeuvre de la transaction, les effets dépendent pour beaucoup du comportement ou de l'attitude de l'auteur de l'infraction.

    Para.1- En cas d'exécution.

    Outre les difficultés liées au maintien ou non de l'auteur en détention provisoire, la transaction pose le problème de l'intervention des tiers en cas d'extinction de l'action publique. L'exécution peut emporter une autre conséquence que l'extinction de l'action publique.

    82

    A-Extinction de l'action publique

    L'exécution de la transaction constitue la situation normale d'extinction définitive de l'action publique destinée à sanctionner l'infraction commise, même à l'égard des peines d'emprisonnement - lorsque celles-ci ne sont pas proposées comme mesure sanctionnant la transaction - et de l'amende qui pourrait lui être substituée par le jeu des circonstances atténuantes.

    De l'idée d'extinction de l'action publique découlent plusieurs conséquences importantes. Tout d'abord, le ministère public doit s'abstenir de mettre en mouvement l'action publique. En effet, si l'ordonnance de validation de l'accord donne à celui-ci l'autorité de la chose jugée, l'exécution de la mesure, et par conséquent l'extinction de l'action publique consécutive, rend la transaction irrévocable et la personne poursuivie ne pourra plus être inquiétée de quelque manière que ce soit. Autrement dit, la personne jadis poursuivie s'étant acquittée de sa dette envers la société, elle bénéficie désormais de la protection du principe non bis idem ou mieux redevient un citoyen normal.

    Ensuite, l'extinction de l'action publique entraîne pour le délinquant qui était détenu provisoirement sa mise en liberté immédiate, aucune raison de fait ou de droit ne justifiant plus la continuation de la détention, sauf hypothèse de plaider coupable où une peine d'emprisonnement proposée et acceptée doit être exécutée. Dans ce cas précisément, la procédure ne prendra fin qu'avec l'exécution totale de la peine. Autrement dit, l'extinction de l'action publique emportera impossibilité future d'exécution d'autres mesures.

    Par rapport à l'exécution de la mesure, il s'est posé la question de savoir si celle-ci devait être faite personnellement par l'auteur ou par un tiers en son nom. En droit pénal, il existe le principe dit de la personnalisation des peines ou de l'individualisation de la sanction selon lequel la sanction est individuelle. Ceci implique, non seulement que la sanction doit

    83

    prendre en compte la personnalité de l'individu à laquelle elle s'applique, mais aussi et surtout qu'elle est personnelle. Sur un plan strict, la prise en compte de ce principe exclut l'intervention des tiers dans l'exécution. Bien plus, si un tiers devait supporter l'indemnisation, le but ne sera pas atteint du fait que la transaction confond très souvent la réparation et la sanction. Simplement, le but ici est de permettre au délinquant de s'assurer, l'on comprend que le tiers soit exclu de la mesure puisqu'elle doit être personnelle.

    Une telle position est cependant à relativiser car le nouveau code de procédure pénale prévoit la possibilité de l'intervention d'une caution dans l'exécution des condamnations pécuniaires (art 558 al 1). Sous-jacent à ce problème d'intervention des tiers en général, il y a la question de la participation des complices et coauteurs.

    1- La transaction ne peut profiter aux tiers

    La transaction peut-elle profiter ou nuire aux complices et coauteur ? En vertu du principe de l'effet relatif de la transaction, une transaction conclue entre un prévenu et le procureur ne peut profiter à ses complices ou coauteurs. Cette solution a été réaffirmée avec force à plusieurs reprises.121 Suivant la formule employée par certains arrêts : « Si en raison du caractère de réparation il ne peut être prononcé, en cas de pluralités de contrevenants, qu'une seule série de pénalités pécuniaires pour la même infraction, la transaction intervenue à l'égard de certains d'entre eux ne peut mettre obstacle à l'action pénale subséquente à engager contre les autres tant que le préjudice n'a pas été complètement réparé » 122

    Cependant des limitations doivent être apportées à cette solution. Lorsque l'auteur de la transaction peut être considéré comme gérant d'affaire de tous les contrevenants, la sanction profite aussi à ces derniers.

    121 Crim. 8 mars 1951,Bull. crim. No 71; 22 janv. 1958; 26 nov. 1964, ibid, no 314.

    122 Gassin (R.), La transaction, Ency. D. Rép. Droit Pen. D. no72

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    2- La transaction ne peut nuire aux tiers

    La transaction ne peut par ailleurs nuire aux tiers. Elle ne peut donc être opposée aux coauteur et complice ou même au civilement responsable du contrevenant qui a transigé (art 2051 C. civ.). Mais il existe ici une difficulté pratique car très souvent, l'aveu du transigeant citera ses complices et coauteurs. Pourrait-on utiliser cet aveu contre ces coauteurs ou complices ? Que non. L'interdiction demeure et on ne saurait obtenir l'aveu de celui-ci par des pressions. Biens plus, en cas d'échec de la transaction, la procédure reprend le chemin normal de droit commun mais en aucun cas, les aveux donnés pour la transaction ne seront pris en compte dans les pièces du dossier.

    En matière de douane, la transaction intervenue entre le contrevenant et une douane étrangère est « res inter alios acta » à l'égard de la douane camerounaise. Mais dans la zone CEMAC cette affirmation est à relativiser car d'après les articles 312, 329 et 330 du code des douanes, la poursuite est diligentée par une autorité de l'un des pays dont les intérêts ont été lésés pour le compte de tous les Etats.

    A- La non inscription au casier judiciaire

    Lorsque la mesure est exécutée, l'extinction de l'action publique efface toute condamnation. En fait, la transaction n'est pas une cause quelconque d'extinction de l'action publique. Elle opère à l'égard du transigeant comme le ferait l'amnistie123 ou la prescription. Tout se passe comme si l'action publique s'est éteinte sans que le délinquant ne soit frappé d'une sanction pénale. C'est ce qui explique le fait que la transaction ne soit pas inscrite au casier judiciaire de celui qui l'a obtenu. Elle n'entraîne donc aucune incapacité attachée à la décision de condamnation. Elle ne peut donc pas servir de premier terme à la récidive. La situation est très différente de celle qui se produit lorsque l'extinction de l'action publique résulte de la chose jugée. L'inscription de la transaction au casier judiciaire risquerait en effet,

    123 L'amnistie est un pardon légal. Sans effacer les faits et leurs conséquences civiles l'amnistie éteint l'action publique et efface la peine prononcée. L'amnistié retrouve un casier judiciaire vierge.

    85

    de pénaliser le délinquant qui se soumet à la mesure et en respecte les engagements par rapport à celui qui la refuse et bénéficie d'un classement sans suite. Une précision cependant mérite d'être faite.

    On peut se demander si l'existence des faits délictueux postérieurs à une première mesure transactionnelle pourra faire l'objet d'une seconde mesure en faveur du délinquant. Théoriquement, la réponse est affirmative. Cependant, il serait utile que le procureur connaisse le passé pénal de l'individu car on est en droit de douter de l'intérêt d'une nouvelle mesure concernant le délinquant.124 Dès lors une distinction doit être faite quand au casier judiciaire dans lequel cette mesure peut être inscrite car seul le casier judiciaire peut renseigner le procureur sur le passé pénal de l'individu.

    Le casier judiciaire, relevé des condamnations d'un individu, en raison de sa gravité ne peut être communiqué à n'importe qui. C'est pourquoi on distingue des bulletins de trois types :

    Le bulletin n°1 est destiné à informer les autorités judiciaires auxquelles il est réservé. Devant être par définition complet, il constitue le relevé intégral des fiches d'une même personne.

    Le bulletin n°2 est destiné à informer plus spécifiquement le projet de certaines administrations, notamment pour les personnes physiques, à la suite de poursuites disciplinaires ou de demandes d'emplois.

    Le bulletin n°3 est un relevé encore plus limité. Il n'existe que pour des personnes physiques et indique les condamnations à des peines privatives de libertés supérieures à deux ans ou d'une durée inférieure dont le tribunal a ordonné mention au bulletin n°3. Le bulletin n°3 ne peut être communiqué qu'à la personne qu'il concerne, laquelle le produira à l'appui d'une demande d'emploi par exemple ou d'un concours

    124 Berg (R.),La médiation Ency. D. Rep. Droit pén.

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    Ainsi si l'on devrait faire mention de la mesure transactionnelle au casier judiciaire pour les raisons que nous avons mentionnées, ce ne pourrait être qu'au bulletin n°1 destiné à l'information des autorités judiciaires. D'ailleurs la loi française du 9 septembre 2002 a introduit l'inscription des compositions pénales exécutées au bulletin n°1 du casier judiciaire126

    Il peut cependant arriver que le transigeant refuse la transaction tout simplement ou l'accepte et ne l'exécute pas.

    Para 2- En cas de non-exécution.

    La transaction pénale ne se solde pas toujours par une réussite. Il y a des transactions qui échouent et ceci pour plusieurs raison.

    Tout d'abord, certains mis en cause brillent par leur absence à l'audience bien qu'ils aient été convoqués par les soins du procureur (environ 10 à 12%)126. Parfois, bien qu'étant présents, les mis en cause refusent parce que les dommages intérêts demandés par la victime sont trop importants. Parfois encore, l'échec provient du refus de valider la proposition de la transaction. Mais il se pourrait que cette hypothèse soit rare. Mais si la proposition a été validée et que par la suite le mis en cause ne s'exécute pas ou s'exécute partiellement, que se passera-t-il ? La question est d'autant importante qu'un temps plus ou moins long peut s'écouler entre l'engagement et son exécution. Ce qui pose la question de la prescription. Dès lors de quel recours dispose la victime pour les amener à s'exécuter ?

    A-Le problème de la prescription de l'action publique

    On peut avoir quelques inquiétudes, quand on sait qu'il peut s'écouler un temps d'au moins trois mois accordé au prévenu entre l'engagement et l'exécution, étant donné que

    126 V. art573 à 580 Projet de code de procédure pénale

    126 Regnault (J.-D.), Composition pénale, l'exemple du Tribunal de Cambrai in Le Nouveau procès pénal après la loi PERBEN II... op. cit. p. 210.

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    certains délits qui ressortissent du domaine de la transaction peuvent se prescrire par quatre mois. De plus, l'acceptation de la proposition peut être dilatoire juste pour gagner du temps. Lorsque l'on ajoute à ce délai le fait que l'action publique n'est pas encore mise en mouvement, il peut arriver qu'au terme de l'inexécution de la mesure, la prescription de l'action publique soit déjà acquise.

    Pour pallier à ce risque, il a été retenu que « la prescription de l'action publique est suspendue entre la date à laquelle le procureur de la république propose une composition pénale et la date d'expiration du délai imparti pour exécuter la composition pénale » (art. 4124°, al. 8 C. pr. pén. français).127

    Mais il peut arriver que le mis en cause fasse une exécution partielle sans pouvoir la mener à son terme. Au terme du délai, la prescription si elle devait être acquise sera-t-elle suspendue ou alors devrait-on la considérer comme acquise ? Le projet de loi portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité tel qu'adopter par le Sénat français en octobre 2003 répond à cette interrogation. Il prévoit en effet que les « actes tendant à la mise en oeuvre ou à l'exécution de la composition pénale sont interruptifs de la prescription de l'action publique »128.

    Au regard des dispositions spécifiques à la composition pénale, on peut dire qu'elle correspond aux obstacles suspensifs de la prescription de l'action publique de l'art. 68 al. 2 du nouveau code de procédure pénale Camerounais.

    B- Les garanties visant à assurer l'exécution de la mesure

    En général ceux des délinquants qui ne payent pas ou qui ne fissent pas de payer, sont relancés par les services de polices ou de gendarmerie. Cette relance est en général suffisante.

    127 Céré op. cit. p. 397.

    128 Ibid.

    88

    Mais quand il n'y a toujours pas de paiement, l'auteur des faits est convoqué à l'audience. Le parquet recouvre la plénitude de ses pouvoirs dans ce cas ; et il peut alors engager des poursuites par la voie de droit commun.

    Mais puisque le souci ici est d'assurer l'exécution de la mesure, on s'est posé la question de savoir si on ne pouvait pas contraindre l'auteur des faits à s'exécuter. Au fond, il faut assurer la réparation due à la victime au même moment que l'exécution effective de la condamnation par l'auteur des faits pour qu'il subisse la sanction, notamment lorsqu'elle est pécuniaire.

    1-La contrainte par corps

    Le nouveau code de procédure pénale prévoit, sur l'exécution des condamnations pécuniaires, la possibilité de recours à la contrainte par corps lorsque l'auteur des faits ne veut pas s'exécuter. Ainsi, d'après l'art. 557 « c'est une mesure qui vise à obliger le condamné à exécuter les condamnations pécuniaires ou à effectuer les restitutions ordonnées par une juridiction ». Étant donné que la contrainte est applicable à la diligence du ministère public, il est dès lors possible de l'étendre aux mesures transactionnelles. La durée de la contrainte est fonction de la somme due et varie de 20 jours pour les sommes qui n'excèdent pas 10 000fr à cinq (5) ans pour celles supérieures à 5 000 000 de francs CFA.129

    Si l'objectif de la transaction avait été d'éviter au délinquant une privation de liberté, la contrainte par corps permettrait-elle encore de l'atteindre ? Bien plus, en envoyant le délinquant derrière les barreaux, n'est-on pas définitivement en train de tourner le dos au paiement et à la réparation du préjudice subi par la victime ? On imagine en fait que l'incarcération priverait le prévenu de son activité professionnelle, source de revenus pour lui et puisque rien ne garantit qu'au cours de son incarcération, le travail auquel il sera astreint lui

    129 V. art. 564 nouveau c. pr. pén.

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    fournirait des ressources nécessaires pour s'acquitter de son obligation.130 Etant donné le manque de structures d'aide aux personnes détenues ainsi que l'absence de structures de suivie pénale et post pénale dans nos pays, on ne peut qu'être sceptique et répondre par la négative.

    Mais des issues de secours ont été prévues par ce même code ou par d'autres textes.

    2- L'exécution forcée sur les biens

    Dans le souci d'assurer l'exécution à tout prix de la mesure et de pallier aux éventuels inconvénients de la contrainte, il a été proposé de procéder à une exécution forcée sur les biens du débiteur.

    L'amende doit être exécutée efficacement et certainement si on veut lui assurer une place importante dans l'arsenal de la répression en raison de ses précieux avantages. Ainsi, il faut recourir à des moyens de contrainte contre les délinquants qui peuvent payer et qui refusent de le faire, en prélevant sur leur fortune ou sur leur salaire. Aussi la poursuite sur le patrimoine est-elle le moyen adéquat pour le faire. On peut alors établir une hypothèque sur les biens immobiliers du délinquant, puis procéder à une saisie et informer ce dernier de la réalisation en cas de non-exécution. Ce procédé évite les frais de vente dans la mesure où le dépôt opéré après la saisie ne sera levé que lorsque le mis en cause aura payé. Cette façon pourrait inciter le mis en cause à payer avant la réalisation de ses biens.

    Une telle solution, sans être absolument écartée, a cependant été critiquée. Elle serait néfaste pour l'entourage du délinquant. En fait, tout comme l'emprisonnement que l'on a dénoncé, elle aurait des conséquences désagréables, notamment économiques sur la famille du délinquant. La saisie et la réalisation des biens du délinquant sanctionneraient beaucoup plus sa famille qui en supportera le coup économique. Aussi devrait-on éviter que celui-ci ne soit

    130 D'après l'art. 57 du décret no 92/052 du 27 mars 1992 portant régime pénitentiaire au Cameroun, le détenu a droit à un pécule que l'on prélève (à raison 1/3) sur le fruit du travail qu'il effectue lors de son incarcération et qui lui sera versée à sa sortie de prison. Mais malheureusement, cette disposition n'est presque jamais appliquée.

    90

    incommodé, par exemple en saisissant ses outils de travail ou son fonds de commerce131 Les causes de non-paiement ne sont pas les mêmes. Cela peut être l'indigence, la mauvaise volonté ou la fainéantise ou encore la négligence. Les moyens de remplacement doivent être en rapport avec la cause du non-paiement et permettre d'atteindre le but assigné à la peine dans la politique criminelle moderne.

    Aussi, le nouveau code de procédure pénale a imaginé une autre soupape à savoir, le recours a la caution. Pour honorer ses obligations et éviter l'incarcération de la contrainte par corps, la personne poursuivie peut offrir une caution, laquelle s'engage à payer dans les deux mois de l'engagement.

    Toutes ces mesures, sans être cumulatives, sont peut-être supplémentaires et on imagine mal comment toutes ces mesures ne pourront pas vaincre la résistance du délinquant.

    SECTION III- PORTEE DE LA MESURE.

    Si les effets de la transaction relevés plus haut sont assez remarquables, ils ne sont pas de nature à traduire toute l'ampleur de cette mesure. En fait, les effets de la transaction ne se cantonnent pas uniquement à leur impact sur le sort du délinquant ou de la victime. Son rayon d'action est plus grand et plus général et touche tant les parties, nous l'avons dit, que la société dans son dans son ensemble du moins, pour ce qui est de l'administration de la justice. Mais la mesure aura-t-elle le même succès dans un autre environnement que le cadre occidental dans lequel elle est actuellement pratiquée ?

    131 Mohamed (A.H.), L'amende pénale dans les droits modernes et spécialement dans le code pénal suisse, Paris, L.G.D.J.1959, P. 197 et sq.

    91

    Para I- Les avantages pour le système

    Dans la recherche d'une justice rapide et efficace, de divers moyens ont été imaginés. La comparution immédiate ou la procédure de flagrance ont été mises sur pied. Mais ces mesures sont limitées leur domaine étant bien précisé.

    La loi Perben II qui a institué la CRPC, entrée en vigueur en octobre 2004, a été accueille diversement dans le monde judiciaire. Certains praticiens l'ont qualifié de « chantage » tant pour l'accusé que pour la victime. D'autres ont estimé qu'elle était une mesure « inutile ».

    Mais malgré toutes ces critiques, la procédure commence à bien s'installer dans la pratique des tribunaux. Ainsi, sur un total de 181 tribunaux chargés de sa mise en oeuvre, le plaider coupable commence à trouver sa place et ceci dans pas moins de 144, c'est-à-dire plus de la moitié, soit environ 80% de taux de réussite pour l'instant.131 Bien plus la mesure est bien appréciée par les prévenus même si parfois, ils peuvent avoir le « sentiment d'être jugés trop vite »132 Voila pour ce qui concerne la CRPC.

    Quant aux autres formes transactionnelles déjà expérimentées, elles connaissent le même succès. Depuis mars 2001, plus exactement le 26 mars, date de la première audience de composition pénale devant le tribunal de CAMBRAI, au moins 1156 dossiers ont été traités. 133 Ce qui est intéressant c'est de remarquer que ces dossiers sont des dossiers assez complexes impliquant parfois plusieurs personnes. Parmi ces 1156 dossiers, 568 sont classés comme composition pénale réussie et action publique éteinte et 460 en cours de traitement c'est- à-dire en cours de paiement.

    Au regard de ces chiffres, il va sans dire que la transaction pénale présente plutôt un visage radieux. Son efficacité est incontestable car non seulement on aura une justice efficace, mais aussi une justice rapide. Désormais, le temps de réaction de la communauté entre le

    131 Guibert (N.) « Entrée en vigueur dans une confusion » in Le Monde du 20 Mai 2005

    132 Garçon, « Plaider coupable, synthèse », hptt/ www.vie-publique.fr

    133 Regnault (J.D.), op. cit. pp.109-110.

    92

    moment de l'infraction et la sanction est ramené à des proportions très réduites, favorisant une justice de proximité dans tous les sens du terme.

    Par ailleurs, la transaction aurait le mérite d'instituer une justice discrète. Si les audiences d'homologation se déroulent en chambre du conseil plutôt qu'en audience publique, la stigmatisation dont le mis en cause pourrait faire l'objet serai évitée ce qui accroît les chances d'une resocialisation du délinquant.

    Para II- L'avenir de la transaction

    Quel avenir pour la transaction ? La question semble risquée car on ne saurait prédire le sort d'une telle procédure avec certitude compte tenu de l'accueil mitigé dont elle fait l'objet. Mais bien plus que l'avenir, il s'agit à travers cette interrogation de se demander si dans la perspective de l'avenir et hors mis les prédispositions juridiques de notre système de droit, cette procédure connaîtra le même succès qu'elle commence à remporter sous d'autres législations. En d'autres termes le contexte actuel (surtout socioculturel) permettrait-il l'intégration facile et réussie dans le droit processuel camerounais ?

    Pour que l'application de la transaction soit véritablement efficace et que les effets attachés à celle-ci aient toute leur portée, il faudrait pouvoir vaincre un certains nombres d'obstacles inhérents à notre société, si jamais elle doit s'y appliquer. Il faudrait déjà que l'éthique soit de rigueur car l'on constate qu'elle perd de plus en plus du terrain. Il faudrait alors pouvoir transcender l'idée selon laquelle le riche est tout puissant et reconnaître que les humains sont égaux et que chacun a droit au respect. Dans le cas contraire, on arriverait à une situation où les « plus riches » enfreindront les lois et violeront les droits des moins nantis parce que capables de supporter la réparation ou les amendes sans en courir autres sanctions que celles-ci. Dans une telle situation, la transaction ne restituerait pas la victime dans sa dignité puisqu'elle se fera avec mépris et sans respect.

    93

    D'autre part le recul de la corruption éviterait que certaines personnes ne monnaient pour être « jugées » par ce mode de règlement de différend.

    Sous réserve de ces remarques il faut dire que notre contexte social et culturel y est parfaitement favorable. En effet, la médiation est presque comme une tradition ici. La paix sociale est privilégiée car la résolution des différends prenait traditionnellement plus le chemin de la réconciliation que celui de la répression et celui de la réparation. Il fallait maintenir la cohésion sociale en favorisant le dialogue. Sur un tout autre plan, la situation économique est des plus favorables car c'est une justice à coût réduit tant pour l'Etat que pour le mise en cause qui sera le plus souvent dispensé des frais de justice.

    94

    Conclusion deuxième partie

    Si la décision de recourir à la transaction dépend dans une large mesure du procureur de la république, le succès de la mesure quant à lui dépend exclusivement de l'attitude des mises en cause. Contrairement aux affirmations des uns et des autres, la procédure de transaction offre toutes les garanties dont peut jouir un délinquant lorsqu'il est poursuivi et respecte le principe cartésien du droit poccesuel.

    La souplesse et la simplicité de sa mise en oeuvre favorisent le succès dont il fait montre, entraînant au passage des avantages tant pour la justice elle-même que pour les parties. Même si la mise en oeuvre de la transaction peut relever certaines faiblesses - ce qui est d'ailleurs normal - force est de reconnaître que l'ensemble de la procédure est fiable et efficace pour résoudre certains litiges qui traités autrement, ne connaîtraient pas de solution ou du moins auraient été classés tout simplement.

    95

    CONCLUSION GENERALE

    L'entrée de l'idée de transaction dans le domaine pénal a connu bien de résistance. Deux raisons, qui sont en fait des difficultés peuvent expliquer cette résistance. L'une est d'ordre sémantique, tandis que l'autre politique. La difficulté sémantique d'abord parce que le vocable utilisé par les juristes prête à confusion. Les tentatives de dénomination de cette procédure laissent dubitatif. Des modes alternatifs de règlement des conflits, en passant par les alternatives à l'incarcération, rien ne parait tout à fait adapté à ce qui a été conçu ici comme mode alternatif de traitement des plaintes. En fait, cette procédure d'inspiration anglo-saxonne ne parvenait pas à trouver son équivalent dans le droit d'origine romano-germanique. Il devenait dès lors difficile de définir la nature exacte de cette procédure qui se situe à la croisée de chemins entre les mesures administratives d'administration de la justice, le droit des obligations et les mesures juridictionnelles. Pourtant, ce n'est pas faute d'avoir un domaine d'application pouvant correspondre à ses exigences. Celui-ci est d'ailleurs vaste et très fourni.

    Mais la difficulté à faire exister le concept, même si elle est révélatrice des difficultés à l'intégrer, n'est pas seulement une question de langage. C'est aussi une question de choix politique. L'idée de transaction en matière pénale se heurte à des habitudes, à des traditions. Chacun le sait, deux possibilités existent depuis longtemps dans nos juridictions pénales : la répression ou le classement sans suite.134 La transaction s'insinue dans une troisième voie, inouïe pour les parquetiers et prenant place dans un développement souhaitable des « classements sous condition »..135 Elle demanderait sans doute un peu plus d'effort au

    134 Fouconnet (L.), « L'avenir de la médiation pénale », sous la direction de Robert Cario, La médiation pénale. Entre répression et réparation, l'Harmattan, 1999, p. 157.

    135 C'est un classement sans suite subordonné à l'accomplissement préalable d'une prestation. V. en ce sens Mathias (E.), Procédure pénale, Bréal éditions, 2003, p. 102

    96

    magistrat ; la réponse à sa proposition n'étant pas systématique puisque les parties peuvent refuser. Il ne s'agit plus de poursuivre tous les délinquants même si l'opportunité de le faire est maintenue. Il ne s'agit plus de classer sans suite au mécontentement général des victimes plaignantes, et à la satisfaction des délinquants, leur donnant le sentiment d'une justice impuissante et archaïque. Il s'agit désormais pour reprendre l'expression de PIERRE TRUCHE, de réaliser « un classement sans poursuite »136. Bref, il s'agit de pourvoir la justice d'une autre voie, alternative aux poursuites, qui offre les qualités de rapidité, de souplesse, de proximité et d'efficacité. Une solution plus apte au traitement du délinquant et à la prévention de la récidive.

    En dépit de quelques faiblesses qui ont été relevées, il reste une certitude, c'est que l'idée de transaction ou d'alternative aux poursuites est en train de faire son chemin. Ce mode de traitement social de la délinquance s'écarte un peu de la tradition judiciaire des procès. C'est peut-être là toutes ses chances de succès. Ses avantages ont déjà séduit les pays de tradition latine qui l'ont adopté en Europe. C'est le cas de la France qui a adopté une loi dans ce sens et qui est entrée en vigueur en octobre 2004. Peut-être notre pays suivra t-il cette voie en tout point de vue avantageuse.

    136 Truche (P.), lors de son audition par la commission des lois du Sénat le 8 octobre 1997, cité par Fouconnet (L.) ibid. p.. 158.

    ANNEXES

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    99

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    101

    102

    103

    104

    105

    106

    BIBLIOGRAPHIE

    I- LEGISLATION

    Code Pénal Camerounais

    Code de procédure pénale

    Loi no 94/01 du 20 janvier 1994 portant Régime des Forêts, de la faune et de la Pêche Loi no 96/12 du 5août 1996 portant Loi-cadre relative à la gestion de l'environnement au Cameroun

    Ordonnance no 81/02 du 29 juin 1981 portant organisation de l'état civil et diverses dispositions relatives à l'état des personnes physiques

    Ordonnance no 89/005 du 13 décembre 1989relative à l'indemnisation des victimes d'accident de circulation

    Décret no 92/052 du 27 mars 1992 portant régime pénitentiaire au Cameroun

    II- OUVRAGES GENERAUX

    -BARRET (O.), Les contrats, Paris, LGDJ,2001, p

    -BORRICARD (J.), SIMON ( A.-M.), Droit pénal et procédure pénale, Paris, Sirey, 2e édition, 2002,

    -BRIERE DE L'ISLE (G.) et COGNIART (P),Procédure pénale,

    police,instruction,jugement,t.2, Paris, Armand colin,1972,335p.

    -MATHIAS (E.), La procédure pénale, Paris Breal éditions, 2003

    -GHESTIN (J.)JAMIN (C.), Traité de droit civil : Les effets du contrat, interprétation,

    qualification, Paris, LGDJ, 3e éd. 2001, 1360p.

    -LARGUIER (J.), Droit pénal général, Paris, Dalloz, 19e éd. 2003,

    -MINKOA SHE (A.), Droits de l'homme et droit pénal au Cameroun, Economica,

    1999,313p.

    -PRADEL (J),- Manuel de droit pénal général, Paris CUJAS , 2000, 733p

    - Histoire des doctrines pénale, Paris, Que-sais-je ? PUF, 1991,124p

    107

    -SOYER(J.C.), Droit pénal et procédure pénale, Paris, LGDJ,16e édition ,2002, 356 p. -SPENCER (J.R.),La procédure pénale anglaise, Paris, Que-sais-je ? PUF, 1998, 278p. -TERRE (F.), SIMLER (Christophe), LEQUETTE (Yves), Les obligations Paris, Dalloz, 2002,

    -VERIN (J.), Pour une nouvelle politique pénale, Paris, LGDJ,1995,

    III-OUVRAGES SPECIALISEES

    -BEKAERT (H.), La manifestation de la vérité dans le procès pénal, Bruxelles,

    Bruylant, 1972, 367p.

    -BOULOC (B.), Problèmes actuels des sciences criminelles, Presse Universitaire d'Aix-Marseille, 1998, 131p.

    -CARIO (R.), La médiation, sous la direction de Robert CARIO,Paris, L'Harmattan, 1999, 235p.

    -CEDRAS (J.), Le droit pénal américain, Paris, Que-sais-je ? PUF, 1997,127p.

    -MERLE (P.), Les présomptions légales en droit pénal, Paris, LGDJ, 1970, 212p. -MOHAMED (A.H.), L'amende pénale dans les droits modernes et spécialement dans le

    code pénal suisse, Paris, LGDJ, 1959, 376p.

    -TIXIER (G.), DEROUIN (P.), Le droit pénal de la fiscalité, Paris, Dalloz, 1989, 352p.

    IV-THESES ET MEMOIRES

    -ANOUKAHA (F.), Le magistrat instructeur en procédure pénale camerounaise, thèse doctorat 3e cycle, Yaoundé, Université de Yaoundé,1982.

    -BANACK(G.S.), Les infractions relatives à la formation du mariage en droit camerounais, mémoire de maîtrise, Yaoundé, Université de Yaoundé,1990-1991.

    - EZO'O ENGOLO (B.A.), L'opportunité des poursuites du ministère public, Yaoundé, Université de Yaoundé, 1985-1986.

    -NKOLO (P.), La recherche des preuves dans l'avant projet de code de procédure pénale, thèse doctorat 3e Yaoundé, Université de Yaoundé 1982.

    108

    V- ARTICLES DE DOCTRINE

    - ARNOUX(S.) et TERCQ (N),Les enjeux de la médiation, in La médiation entre répression et réparation, sous la direction de Robert Cario Paris, L'Harmattan, 1999, 235p.

    -BERG (R.), Médiation pénale, in Répertoire Pénale Dalloz,t.5.

    -CERE (J.-P.), De la composition pénale à la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité :le « plaider coupable » à la française, in Le nouveau procès pénal après la loi PERBEN II Dossier de la journée d'études Dalloz du 8 mars 2004, Paris Dalloz,2004 -GASSIN (R.), Transaction, in Rep.pén. dalloz, t.71

    -HEDERER (J.),Un an d'expérience de composition pénale dans un tribunal de grande instance, in « Le nouveau procès pénal après la loi PERBEN » II Dossier de la journée d'études Dalloz du 8 mars 2004, Paris Dalloz,2004 in Le nouveau procès pénal après la loi PERBEN II Dossier de la journée d'études Dalloz du 8 mars 2004, Paris Dalloz,2004 -KHADIDJA MEDJAOUI ? L'injonction et la médiation pénale tableau comparatif critique, in.Revue de sciences criminelles et de droit pénal comparé no4 octobre-décembre 1996.

    - LEAUTE (J.), Droit pénal et démocratie, in Aspect nouveau de la pensée juridique, Recueil d'études en hommage à Marc Ancel, Paris-Pedone 1975 ;pp. 1551-156. -LEBLOIS-HAPPE (J.), La médiation pénale comme mode de réponse à la petite délinquance : état des lieux et perspectives in Revue de Sciences Criminelles et de droit pénal comparé no 3 juillet-septembre 1994 pp.459-674.

    -POKORA (S.), La médiation pénale in « Le nouveau procès pénal après la loi

    PERBEN » II Dossier de la journée d'études Dalloz du 8 mars 2004, Paris Dalloz,2004 -REGNAULT (J.-D.) composition pénale : l'exemple du tribunal de Cambrai composition pénale : in « Le nouveau procès pénal après la loi PERBEN II» Dossier de la journée d'études Dalloz du 8 mars 2004, Paris Dalloz,

    VARRAUT(J.M.), La médiation ou justice non violente, Gazette du Palais,1994,doctr.1094.

    1

    109

    TABLE DES MATIERES

    Avertissement ..i

    Dédicace ii

    Remerciements .iii

    Table des abréviations iv

    Sommaire ...v

    Résumé .vi

    Summary ..vii

    INTRODUCTION GENERALE 1

    CHAPITRE I. LE RECOURS A UNE PROCEDURE SPECIALE 10

    Section 1. LA POSITION CLASSIQUE 11

    Para. 1. De la non admission... 11

    A- La transaction serait contraire aux principes de base de la procédure

    pénale ..12

    1 - L'égalité de traitement 12

    2.- La non séparation des autorités de poursuite et de jugement 12

    3 - Violation du principe Non bis in idem. 14

    4- Recul de la sanction et impunité à prix d'argent 14

    B - Le non-respect des droits de la défense 15

    Para 2- ...À une admission restrictive 16

    A- La limitation du monopôle du ministère public 17

    B - Les intérêts spéciaux 17

    Section II. L'EXTENSION POSSIBLE 19

    Para 1 - Pour des besoins d'adaptation de la répression à l'évolution 19

    A.- De la criminalité 19

    B - Aux exigences des droits humains 20

    C - La prise en compte de la victime 22

    Para. 2 - Pour une certitude de la répression 23

    CONCLUSION CHAPITRE 25

    CHAPITRE II. MECANISME ET NATURE DES MESURES

    TRANSACTIONNELLES . 26

    Section 1- LES FORMES DE TRANSACTION 27

    Para. 1- La composition pénale 28

    Para II- La médiation pénale 29

    A- Typologie des médiations 30

    1- La médiation judiciaire 30

    2- La médiation sociétale 30

    a - La médiation sans contrôle judiciaire 30

    b- La médiation sous contrôle judiciaire 31

    B- Les organes de la médiation 31

    C-La procédure de la médiation 32

    Para 3 - Le « plaider coupable » 34

    Section II- NATURE DE LA TRANSACTION 36

    110

    Para 1- La controverse autour de la nature de la transaction. 36

    A - Position du problème. 36

    1- la théorie classique : une variété de la transaction civile 37

    2- Les auteurs modernes : une sanction administrative 38

    3- Renonciation monnayée 38

    B- Proposition de solution 39

    Para 2 -La distinction avec les alternatives à l'incarcération. 40

    1-Le sursis à l'exécution 41

    2-L'amende forfaitaire. 42

    CONCLUSION CHAPITRE 42

    CHAPITRE III 44

    LE DOMAINE DES MESURES ALTERNATIVES AUX POURSUITES 44

    Section I. LES INFRACTIONS CONTRE LA PERSONNE ET

    CONTRE LA FAMILLE . 44

    Para. 1- Les infractions contre la famille 45

    A - Les infractions liées à la formation du mariage 45

    B- La non représentation d'enfant 47

    C- Le non-versement de pension alimentaire 47

    Para II- les blessures simples et légères 49

    Section II- LES INFRACTIONS ECONOMIQUES ET CONTRE LES

    BIENS 51

    Para 1- La pression sur les prix et les faux poids et mesures 51

    Para 2- Les destructions et dégradation des biens 53

    Conclusion première partie. 55

    CHAPITRE I 58

    LA PROCEDURE 58

    Section I- CONDITIONS GENERALE DE TRANSACTION

    PENALE 59

    Para. 1- Conditions liées à l'infraction. 59

    A-L'infraction doit ressortir du domaine de la transaction 59

    A- Mettre fin au trouble causé à la société 60

    Para II. Conditions liées au délinquant 61

    A- Reconnaissance des faits 61

    1-L'aveu 62

    2-Implication de l'aveu 63

    B- Les garanties de la défense 64

    1- L'absence de pression. 64

    2- Le libre consentement et l'assistance de l'avocat. 65

    C - La resocialisation du délinquant 66

    Para. 3- Conditions liées à la victime 67

    A- L'indemnisation 68

    B- L'évaluation du préjudice 70

    Section II- DEROULEMENT DE LA TRANSACTION 71

    111

    Para1- La proposition de l'accord 71

    A- L'initiative de l'accord 71

    B- Le moment de la transaction 73

    Para II- L'homologation de l'accord par un juge de siège 75

    A - Vérification de la validité de l'accord. 75

    B- Vérification de la qualification retenue 76

    Section III- LES MESURES RELEVANT DE LA TRANSACTION 77

    Para 2- La peine d'amende 79

    Para 3- Les autres types de peines 79

    CHAPITRE II. EFFETS ET PORTEE DES MESURES

    TRANSACTIONNELLES . 81

    Section I - EFFETS DE LA TRANSACTION. 81

    Para.1- En cas d'exécution. 81

    A-Extinction de l'action publique 82

    1- La transaction ne peut profiter aux tiers 83

    2- La transaction ne peut nuire aux tiers 84

    A- La non inscription au casier judiciaire 84

    Para 2- En cas de non-exécution. 86

    A-Le problème de la prescription de l'action publique 86

    B- Les garanties visant à assurer l'exécution de la mesure 87

    1-La contrainte par corps 88

    2- L'exécution forcée sur les biens 89

    SECTION III- PORTEE DE LA MESURE 90

    Para I- Les avantages pour le système 91

    Para II- L'avenir de la transaction 92

    Conclusion deuxième partie 94

    CONCLUSION GENERALE 95

    ANNEXES 97

    BIBLIOGRAPHIE 106






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