Capital humain et transformation structurelle en Afrique subsaharienne.par Diosthin Majesté II DE-GBODO Université de Yaoundé II-SOA - Master 2 Ingénierie Economique et Financière 2018 |
2.2. Les indicateurs de mesure de la transformation structurellePlusieurs indicateurs énumérer ci-haut permettent de quantifier la transformation structurelle notamment : l'emploi sectoriel, la valeur ajoutée sectorielle des exportations, la diversification des exportations et la sophistication des exportations. L'approche par les exportations dans cette étude est privilégiée ce qui permet le choix de ces mesures notamment la diversification et la sophistication des exportations comme indicateurs de la transformation structurelle. Il est utile de s'intéresser aux indicateurs liés à la structure des exportations de la région car d'un point de vue pratique, les données d'exportation sont souvent plus disponibles et plus cohérentes que les données de production ce qui favorise une analyse plus fine dans les comparaisons directes entre pays. La diversification des exportations : indicateur de la transformation structurelleLa diversification des exportations est définie au sens d'Hidalgo et Hausman (2009) comme la large gamme des produits fabriqués et exportés sans modifier nécessairement les niveaux de productivités. Elle est perçue aussi comme la dispersion des activités productives dans un grand nombre d'activités différentes les unes des autres par la nature des biens et des services produits (Berthélemy, 2005). Il y a derrière ce concept très général de diversification le phénomène de variété et de concentration. La variété fait référence au nombre de produits différents exportés comparé à la structure d'exportation mondiale. La concentration, elle renvoie à la distribution des exportations si cette distribution est équilibrée alors la concentration est faible et ceci comparé à partir d'un produit. À l'inverse, si la distribution est fortement inégalitaire alors les exportations sont concentrées. Il est souvent avancé que ce n'est pas seulement le niveau des exportations qui mène à la croissance, mais aussi le degré de diversification de ces exportations ou de la base d'exportation. La littérature récente montre plutôt que les pays ont tendance à diversifier leur production et leurs exportations à mesure qu'ils se développent, contrairement aux anciennes théories de la division du travail et de la spécialisation au service de la croissance économique et du développement formulée par Adam Smith, et le modèle du commerce international Heckscher-Ohlin Samuelson (HOS) qui soutenaient que les pays devraient se spécialiser dans la production des biens pour lesquels ils disposent d'un avantage comparatif. L'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) en 2004 maintient que faute de diversification des exportations dans les pays en développement, la baisse et les fluctuations des recettes d'exportation ont eu une incidence négative sur les revenus, les investissements et l'emploi. Grâce à la diversification, les risques liés aux investissements sont répartis sur un portefeuille plus large de secteurs économiques, ce qui se traduit par une augmentation des revenus (Acemoglu et Zilibotti, 1997). Selon Romer (1990), la diversification peut être considérée comme un facteur qui contribue à améliorer l'efficacité des autres facteurs de production. De plus, la diversification aide les pays à se protéger contre les détériorations des termes de l'échange en stabilisant les recettes d'exportation. Les changements structurels dépendent des types de produits qui sont échangés (Hausmann et Klinger, 2006 ; Hwang, 2006). Love (1986), par exemple, a indiqué qu'un pays devrait éviter d'être fortement tributaire de l'exportation d'un nombre limité de produit car cela diminuait sa capacité à compenser en partie les fluctuations touchant certains secteurs d'exportation par les secteurs qui connaissent davantage de stabilité. Il a conclu que la diversification des exportations était une stratégie judicieuse pour réduire l'instabilité et qu'elle ne devrait pas se limiter uniquement aux secteurs autres que l'agriculture. Par ailleurs, une plus grande diversification permet aussi de créer des effets multiplicateurs ou des effets de diffusion (effets spillovers) ainsi qu'une hausse de la productivité (Melitz, 2003). Les indices les plus utilisés pour mesure la diversification, d'après la littérature et les travaux effectués (Lectard, 2016) sont généralement : - l'indice Herfindahl-Hirschman : c'est un indicateur de la concentration du marché, il apparaît dans l'article pionnier « What you export matters » des auteurs comme Hinferdahl-Hirschman(2006) par la suite Hausmann et al Rodrik (2007), qui montrent empiriquement que les produits ont des impacts différents sur le développement économique à travers leur degré de diversification. Mais il existe deux indices d'Herfindahl-Hirschman à savoir l'indice de concentration d'HH et l'indice de diversification d'HH. Dans le cadre de cette étude le second sera retenu pour capter la diversification des exportations bien que rarement utilisé dans les travaux en raison de sa méconnaissance des périodes couvertes pour certains pays. - L'indice de Gini : mesure statistique permettant de rendre compte de la répartition d'une variable au sein d'une population, développé par Gini. Cet indice ressort de la littérature sur les inégalités de revenu mais moins utiliser dans les travaux sur la diversification. - L'indice de Theil : créé suite aux travaux de Theil(1954) c'est un indicateur de mesure d'inégalité fondé sur l'entropie5(*) de Shannon. Très utile pour mesurer la diversification du commerce intra-régional, l'indice de Theil est reconnu pour ses propriétés de décomposition permettant de désagréger la diversification globale en diversification intergroupe - extensive- et intragroupe -intensive-. Aussi connu dans la littérature des inégalités de revenus. Les approches récentes développées notamment par Cadot et al.(2011) confirment la validité de l'utilisation de cet indice au niveau désagrégé comme indiquer ci-haut en marge extensive et intensive. - L'indice de diversification de HHR : cet indicateur mesure le degré de diversification proprement défini dans le contexte de variété. - Le nombre de produits exportés : indique approximativement le niveau diversifié des produits d'un pays. Mais plus tard ce dernier présentait une limite d'après plusieurs auteurs on peut avoir un nombre élevé de produit d'un même secteur ou d'une même composition productive par conséquent ce dernier n'informe pas réellement sur le degré de diversification d'un pays. La lecture des valeurs de ses indicateurs est généralement la même car ils varient majoritairement de 0 à 100. Ainsi, plus leurs valeurs sont élevées, plus les exportations ne sont concentrées que sur un nombre restreint de produit ou de secteur. Alors que l'indice de Gini donne plus de poids au centre de la distribution, les autres indices pondèrent plus fortement les extrémités de la distribution. La sensibilité de l'indice d'Herfindahl à l'introduction de nouvelles exportations est cependant faible, il faut que ces dernières représentent une part significative de la distribution pour qu'il y ait une baisse de l'indice. La propriété de décomposition de l'indice de Theil le rend particulièrement attractif pour l'étude des dynamiques de diversification, il est donc fréquemment utilisé. Enfin, Chandra et al(2007) ; HHR( 2007) associe à la diversification, une seconde mesure de la transformation structurelle insistant sur le fait qu'elles sont fortement liées. Chandra et al (2007) ou Parteka (2007) remarquent d'importantes disparités entre les pays dans la vérification de cette thèse. Ils constatent, entre autre, que certains pays ont su diversifier leur structure productive sans qu'il y ait de réels impacts sur leur développement économique. Ils soulignent l'existence d'un paramètre supplémentaire (`something more'), pouvant expliquer ces résultats. Ils proposent le niveau de sophistication des exportations associé à la diversification des exportations pour mieux décrire la transformation structurelle. * 5 L'entropie a été introduite en 1865 par R. Clausius, elle caractérise le degré de désorganisation ou d'imprédictibilité du contenu en information d'un système. |
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