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Impacts de l’anthropisation sur le paysage forestier et les variables climatiques dans la zone forestière de Yangambi. Recherche des scénarios à  court, moyen et long terme.


par Julien BWAZANI BALANDI
Université de Kisangani - Master en aménagement des écosystèmes  2019
  

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IV.2. Résultats d'étude

IV.2.1. Dynamique historique et prospective du paysage

Les classifications d'images satellitaires de 1986, 1995, 2000, 2009 et 2018 regroupées en trois décennies, ont permis d'identifier les changements historiques d'occupation du sol dans la zone d'étude. En dépit d'une régression forestière observée, la zone d'étude est nettement dominée par les classes forestières, les forêts primaires en particulier. Une dominance qui serait liée aux multiples efforts de conservation de la biodiversité fournis par plusieurs institutions en place principalement, l'Institut National d'Etudes et Recherches Agronomiques (INERA).

Les taux de déforestation observés d'une décennie à l'autre attestent une régression des surfaces forestières dans la zone d'étude. En première décennie (1986-1995), le taux est estimé à 0,007 % par an. Moins alarmant, cette situation serait probablement liée à une faible densité de la population, et à des multiples rébellions ayant survenu à cette époque. Ce taux augmente sérieusement à la deuxième décennie (2000-2009) pour atteindre un seuil de 0,13%. Un seuil identique à celui trouvé par (S. Katembera Ciza et al.,2015) dans la zone forestière d'Isangi entre 2002 et 2010. Il s'agit d'une circonscription spatiale qui partage un bon nombre de villages que notre zone d'étude. A l'image de la deuxième décennie, la déforestation augmente de plus en plus à la dernière décennie (2009-2018) et atteint un seuil de 0,4%. Une perte annuelle légèrement supérieure à la moyenne nationale qui oscille entre 0,2 et 0,3 % ces vingt dernières années (GTCR, 2012 ; OFAC,2012) et atteint par ailleurs le rythme amazonien (Demaze 2007). A l'échelle locale, cette perte forestière au rythme amazonien s'expliquerait par une augmentation de la densité de la population très attachée aux activités destructives de la forêt comme le montre la figure 36. Selon le rapport administratif du district de la Tshopo (actuelle province de la Tshopo) de 2009, cette population s'estimait à environ 67,794habitants avec une densité de 17habitants/Km2. De 1999 à 2009, cette population autour de la réserve de biosphère de Yangambi montre un accroissement absolu de l'ordre de 6hab/Km2 soit un taux de croissance annuelle moyen de 4,1%. De plus, l'agriculture traditionnelle, dans la plupart des régions d'Afrique, est la culture itinérante. Cependant, à partir du moment où la densité de population atteint et dépasse certaines limites critiques, la période de jachère se raccourcit (tableau 17), et la végétation se dégrade, souvent irréversiblement (Kio, 1984).

Au courant de deux dernières décennies, les transitions d'autres classes vers les classes anthropiques ont été considérables. Les variations des superficies gagnées au profit de l'agriculture ont été importantes.

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On observe entre 2000 et 2009 des pertes de 3,15% et de 21,06% respectivement de forêts primaires et forêts secondaires au profit de la classe agricole. De même, plus de 2% et plus de 20% respectivement pour les forêts primaires et les forêts secondaires transitent au profit de l'agriculture entre 2009 et 2018.

Le plus grand danger observable sur le paysage dans cette dynamique historique est la réduction sensible des forêts secondaires. Il s'agit en effet du type forestier qui doit assurer la succession dans le paysage. Ce sont les forêts secondaires qui reconstitueront la forêt dense. Elles constituent le passage obligé vers l'état climacique dans un écosystème forestier (OIBT, 2002). La baisse de leur taux est un signe de perturbation pour la restauration de l'écosystème.

Au-delà de la succession, ce type forestier joue également un rôle très important dans la séquestration de CO2. Il s'avère ainsi, nécessaire de circonscrire dans le temps et dans l'espace, les activités anthropiques afin de limiter la régression alarmante des forêts secondaires. Pour cela, la conception et la mise en oeuvre d'un plan d'aménagement durable, constitue une condition sine qua non.

Les diverses analyses liées à la dynamique historique du paysage telles que discutées ci-haut ont été complétées par le calcul des indices de la structure spatiale du paysage. Ces indices ont permis de mettre en évidence la configuration spatiale des taches des classes dans le paysage. En effet, un total de 11 indices de la structure spatiale du paysage plus deux paramètres de dispersion (la variance et le coefficient de variation) ont été calculés.

Quatre principaux constats ont été enregistrés dans l'analyse de la structure spatiale du paysage. Le premier est celui d'une complémentarité dans l'interprétation des résultats des indices. Ceci étant, l'aire moyenne, la dominance des taches et l'indice de forme tous complémentaires au nombre des taches, ont approuvé la forte fragmentation des forêts primaires en 2000. Il s'agit également du début d'une période au courant de laquelle, plus de 3% des forêts primaires sont alloués à l'agriculture, un de principaux facteurs de fragmentation.

Cette fragmentation des forêts primaires est de même justifiée par le coefficient de variation. La classe étant fortement fragmentée, les agrégats isolés enregistrent des écarts importants en termes de surface occupée. En conséquence, l'hétérogénéité des aires de taches demeure élevée. Le deuxième constat se rapporte à l'opposition des résultats de certains indices pour certaines classes d'occupation du sol. Ce deuxième constat, traduit en effet, la complexité d'analyser la configuration de certaines classes afin de déduire leur tendance de fragmentation (dégradation) ou de défragmentation.

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En effet, l'aire moyenne, le périmètre moyen, l'indice de forme autant de que le nombre de taches ont attesté la fragmentation de la classe des forêts secondaires en 2000. Un processus qui n'est pas par contre approuvé pour la même date et la même classe, par la dominance, et les paramètres de dispersion. En considérant la dominance, la classe des forêts secondaires serait fortement fragmentée en 2018.

Toutes ces complémentarités et oppositions de certains indices dans l'analyse de la structure spatiale du paysage, renseignent sur la nécessité d'utiliser plusieurs indices pour caractériser la structure spatiale d'un paysage puisqu'un seul indice ne peut résumer à lui seul, toute la complexité de l'arrangement spatial des taches (Dale et al.,1994).

Le troisième constat quant à lui, se rapporte à la valeur de l'aire minimale qui est identique pour toutes les classes, alors que le quatrième constat se réfère à la valeur du périmètre minimal, identique pour toutes classes.

En effet, la valeur identique pour toutes les classes de l'aire minimale serait l'équivalent de la résolution spatiale (30m) des images Landsat. La surface d'un pixel étant de 900m2 rapportée en hectare, cette surface serait de 0,09ha. Il en est de même pour le périmètre minimal. En effet, 30m de côté pour un pixel, multipliés par 4 justifie en fait, le 120m pour tous les périmètres minimaux.

L'utilisation du dendrogramme de Bogaert et al., (2004) a été très nécessaire pour éclairer certains résultats de la dynamique historique du paysage. A la différence des indices structuraux, le dendrogramme analyse les processus de transformation spatiale en considérant deux dates distinctes.

En effet, les résultats de cette analyse attestent que la reforestation enregistrée entre 1986 et 1995 dans la classe des forêts primaires serait entre autre liée à la création des taches. Alors que la forte déforestation enregistrée dans la classe des forêts secondaires serait liée à la suppression des taches. Considérant l'instabilité politique du pays entre 1986-1995, limitant une activité agricole intensive, le processus de suppression des forêts secondaires ne serait pas probablement lié à l'action humaine. Il serait probablement lié à la succession (le passage des forêts secondaires aux forêts primaires).

On peut de même constater que la déforestation des forêts primaires dans la deuxième et la troisième décennie serait entre autre attachée au processus de suppression, et de dissection que connaitra la classe respectivement à la deuxième et troisième décennie. Des processus qui, considérant le contexte du pays en ces intervalles de temps, marqué par le début d'une stabilité politique, seraient liés aux activités anthropiques.

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Au regard de la dynamique prospective du paysage, en dépit des quantités proches de la réalité, le modèle Land Change Modeler (LCM) présente dans l'ensemble, quelques difficultés à prédire les changements entre 2009 et 2018 comme on peut observer les écarts dans certaines classes. Toutefois il confirme les tendances d'évolution observées entre 2009 et 2018 : les terres bâties et nues (avec 5,2% dans la prédiction de 2018) sont largement plus étendues qu'en 2009 ; la classe agricole (avec 7,6% dans la prédiction) demeure moins étendue qu'en 2009 ; les forêts primaires (avec 76,7%) demeurent également moins étendues qu'en 2009 ; les forêts secondaires (avec 5,2%) conservent la même tendance de réduction que celle observée entre 2009 et 2018 dans le réel. L'analyse des changements, aussi bien à l'échelle des classes anthropiques qu'au niveau des classes forestières met donc, en exergue des résultats intéressants qu'il convient de nuancer. Ceci est imputable à la part importante de la constance observée et simulée (80 %).

Ainsi, considérant l'allure de la perte forestière telle que démontrée dans la dynamique historique, associée à la croissance démographique, à la forte activité agricole, la perte continuelle des forêts (figure 25) et l'extension continuelle des classes anthropiques (figure 23) telles que prédites pour le court, moyen et long terme demeurent logiques et acceptables.

Les limites du modèle peuvent ici se résumer principalement dans la disponibilité des données mobilisées. Certains auteurs ont montré que l'ajout de données supplémentaires pouvait être limité par leur nature non quantifiable et leur indisponibilité en format digital (Schneider, Pontius, 2001) cités par Mas et al., (2011).

La complexité du système forestier dans la zone forestière de Yangambi ne peut effectivement se résumer à un nombre restreint de facteurs. Nos entretiens ont permis d'identifier des facteurs politiques et institutionnels (pauvreté, chômage, conflits, coût de la terre, etc.), des facteurs démographiques (migration, distribution de la population), des facteurs culturels (consommation des ménages) ... La question qui se poserait pour les recherches futures est alors celle de savoir, la prise en compte de la totalité hypothétique des variables explicatives permettrait-elle une précision optimale de la prédiction ?

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"Et il n'est rien de plus beau que l'instant qui précède le voyage, l'instant ou l'horizon de demain vient nous rendre visite et nous dire ses promesses"   Milan Kundera