Crise politico-religieuse en Afrique centrale. Cas de la RCA.par Matthieu Alidor Kabeya Université de Lubumbashi - Graduate en Relations Internationales. 2017 |
§2. SUR LE PLAN SECURITAIRELa polarisation de la société centrafricaine s'est traduite par la fragmentation de la puissance publique et le contrôle entiers du territoire de la RCA par une multitude de groupes armés, notamment des milices dites « chrétiennes » des « anti-balaka », qu'une rhétorique prétendument confessionnelle oppose aux rebelles de l'ex-Séléka à prédominance musulmane. Selon le dernier Rapport du Secrétaire général des Nations unies sur l'examen stratégique de la MINUSCA, daté du 22 juin 2016, la présence continue de divers groupes armés et le manque de capacités des forces de sécurité nationales représentent «la menace la plus urgente et la plus dangereuse à la stabilité du pays ».140(*) Les Forces armées centrafricaines (FACA) sont quant à elle ressorties affaiblies des trois années de violences, beaucoup de leurs éléments ont déserté ou sont accusés d'avoir rejoint les rangs de milices anti-balaka ou de la séléka pour certains, durant la période de transition, les données biométriques de 7 300 soldats ont été recueillies dans une base de données et le rapport du Secrétaire général des Nations unies, de juin 2016, estime à 8 300 le nombre de personnes au service du secteur de la défense, alors que le nombre d'armes fonctionnelles serait lui dérisoire. Les stocks d'armes et de munitions ont en grande partie été pillés lors des affrontements en 2013.141(*) La police et la gendarmerie centrafricaines demeurent par ailleurs en sous-effectifs et souffrent d'un déficit de financement. Lors des élections, la MINUSCA a formé 2 689 policiers et gendarmes au maintien de l'ordre et a appuyé des activités de renforcement des capacités de déploiement à Bambari, Bangassou, Bangui, Bossangoa, Bouar, Bria, Kaga Bandoro et Ndélé. Pour pallier à ce manque de capacités, un plan quinquennal de développement et de renforcement des capacités a été défini avec le concours de la MINUSCA pour reconstruire les éléments de maintien de la paix142(*) La reconstruction de l'armée centrafricaine semblent à l'évidence parmi les clés de la restauration d'un ordre politique viable en RCA, les écueils restent cependant à la mesure de la complexité de la situation du pays. Faustin-Archange Touadéra a été élu sur l'engagement de mettre fin aux violences intercommunautaires, avec l'appui de la MINUSCA (près de 12 000 hommes), et le soutien des troupes de l'opération militaire française Sangaris, Faustin-Archange Touadéra prône une démarche globale à l'égard des groupes armés, fondée sur la concertation politique, la réforme du secteur de la sécurité (RSS), la réconciliation, la lutte contre l'impunité et les processus de désarmement, de démobilisation, de réintégration et de rapatriement. Il existe une opposition fondamentale entre les aspirations de la MINUSCA, et les ambitions des acteurs locaux, en somme une conception divergente de la réforme et du format de l'armée. La réforme selon les acteurs locaux, du moins les acteurs gouvernementaux, est l'élargissement des forces de défense et de sécurité à tous les groupes armés qui satisfont aux critères de la DDR, à l'exception des ex-Séléka. Pour la MINUSCA, l'UE, et la Mission de conseil militaire de l'Union européenne en République centrafricaine (EUMAM), les effectifs actuels des FACA estimés à environ 7 700 éléments absorbent près de 80 % du budget du secteur de la sécurité, essentiellement en paiement des salaires. Une situation qui limite à l'évidence les possibilités d'acquisition d'équipements et la formation de ce personnel. La solution, selon les interlocuteurs centrafricains serait d'augmenter le budget et les contributions des partenaires extérieurs de la RCA. À l'inverse, les partenaires de l'UE estiment qu'un effectif de 5 000 hommes serait suffisant, en raison de la présence des forces internationales, qui contribuent déjà à la gestion des frontières et la sécurisation de certaines parties du territoire centrafricain.143(*) Par conséquent, le retard de paiement des soldes des FACA, membres de la force tripartite, au mois de février 2016, avait provoqué des tensions motivant l'interposition de la MINUSCA pour empêcher une confrontation entre FACA et groupes armés.144(*) * 140Idem, P.5 * 141GRIPSÉ, Op.cit., P.5 * 142Idem, P.5 * 143GRIPSÉ, Op.cit., P.5 * 144MICHEL LUNTUMBUE, Op.cit., P.4 |
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