4.3. La pérennisation de la participation
A travers le graphique qui suit, nous allons mettre en exergue
l'opinion de nos enquêtés sur la participation au
développement local.
Graphique 12 : Proportion des opinions de la
population sur la pérennisation de la participation au
développement local
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100%
0%
Oui Non
Source : enquête de terrain
A l'échelle de ce camembert, 100% de nos
enquêté ont donné un point de vue commun qui est celui de
pérenniser la participation au développement local. La
problématique de la pérennisation des projets de
développement met en confrontation deux logiques : les pratiques
sociales et la logique de projet avec comme passerelle possible la
participation.
Ainsi, Les pratiques paysannes obéissent à des
logiques rationnelles. Les comportements des populations paysannes face aux
projets de développement manifestent leur capacité de prendre des
décisions cohérentes en fonction des
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objectifs et de contraintes qui leur sont propres, tant dans
le domaine de la production que dans ceux de la reproduction sociale, politique
et identitaire. Les sociétés paysannes ne sont pas des groupes
unis, solidaires et collectivistes, comme le veut une certaine pensée.
L'idée d'utilisation collective des projets comme biens communs doit
être relativisée.
La notion de "développement" telle que l'entendent les
projets de développement, est dotée d'une connotation
économique qui ne s'inscrit pas forcement dans la logique de
développement des populations locales.
Les projets de développement se caractérisent de
plus en plus par une certaine lourdeur, des objectifs et des moyens
prédéfinis qui les rendent peu adaptés au contexte local,
insuffisamment flexible et incontrôlable par les populations
bénéficiaires. Ce qui ne favorise pas leur
pérennisation.
Les approches participatives favorisent l'implication des
populations bénéficiaires et permettent à celles-ci
d'avoir un pouvoir d'initiative et de décision (qu'il faut tout de
même relativiser) dans la définition et la mise en oeuvre des
actions et programmes qui concernent leur propre avenir. Elles contribuent tout
de même à transformer les normes sociales. Les stratégies
de réorganisation des sociétés bénéficiaires
favorisent la création de nouvelles formes d'organisation qui se
superposent aux formes d'organisations traditionnelles. Il se pose des risques
de dysfonctionnement et même de représentativité des
groupements créés.
A la lumière des constats ci-dessus, trois
problèmes fondamentaux à notre avis, entravent la
pérennisation des projets de développement dans une approche
participative. Ces problèmes sont les suivants :
- La définition de l'action prioritaire
à mettre en oeuvre : même avec une approche
participative, elle se fait avec beaucoup des biais qui sont dus au poids des
ONG et à la faiblesse relative de la population paysanne pendant cet
exercice. Par courtoisie ou ruse, les populations acceptent n'importe quel
projet, même s'il ne constitue pas directement une préoccupation,
sans que le courtier local, très imbu de son approche participative et
qui est présent dans
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le village depuis un ou deux jours, ne s'aperçoive de
la « supercherie ». Ce qui est important aux yeux des populations
paysannes, c'est moins leur participation, que le calcul de ne pas laisser
filer entre leurs mains l'opportunité que représente un
projet.
- La précarité des projets de
développement : il s'agit de la dépendance
complète des courtiers locaux aux partenaires financiers du Nord. Dans
la mise en oeuvre des projets de développement, les deux brandissent la
participation des populations comme garante de leur pérennisation. Mais
sur le terrain, cette pérennisation est prise en otage par les
durées courtes des contrats entre le courtier local et son financeur du
Nord, les longues périodes de rupture entre deux contrats, les
arrêts brusques des projets pour manque de financement.
- Les innovations techniques et/ou organisationnelles
apportées par le projet ne s'inspirent pas des pratiques
locales. Elles contribuent même dans certains cas à transformer
les normes sociales préétablies, semant ainsi les bases de
conflits latents.
En principe, l'approche participative est un outil de travail
et doit être considéré comme tel. Elle implique certes, les
populations bénéficiaires dans le choix des actions qui les
concernent. Cependant, elle ne doit pas être vue comme une sorte de
baguette magique dont l'utilisation entrainerait ipso facto
l'appropriation et la pérennisation des projets de
développement. Celles-ci dépendent dans une large mesure de la
prise en compte des logiques communautaires. Ces logiques dans la plupart des
cas sont confrontées aux logiques de projet qui
réfléchissent essentiellement en termes de « cadre logique
».
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