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Problématique du leadership responsable de la classe politique congolaise. Regard sur l'administration publique de la troisième république.


par Carlytho Nzazi Lengi
Université Pédagogique Nationale (UPN) - Licence en sciences politiques et administratives 2013
  

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II.3.2. LA DELIQUESCENCE OU LA DEFAILLANCE DE L'ETAT EN RDC

Selon le Foreign Policy Magazine, la RDC est un Etat défaillant, déstructuré et déliquescent, selon les critères de fund for peace140(*).

La description de la situation socio-économique de la RDC amène à conclure que celle-ci est mutatis mutandis comparable et assimilable à un Etat défaillant.

Selon the Fund for peace, Etat en déliquescence ou Etat défaillant, déstructuré ou failli, (en anglais : failed state) sont des expressions synonymiques pour désigner une même réalité.

Un Etat défaillant où l'échec n'a pas de puissance légitime sur son territoire. Cependant, cette définition, au sens strict, désigne la situation de deux tiers des Etats du monde, la désignation d'un Etat comme déliquescent n'est pas anecdotique et comporte, bien souvent, un certain poids politique. Les auteurs s'accordent, cependant, sur un certain nombre de paramètres.

Un Etat déliquescent est confronté à de sérieux problèmes qui compromettent sa cohérence et sa pérennité. Ils sont liés aux douze indicateurs suivants énumérés par Richard MUGARUKA141(*) :

1. Un gouvernement central si faible ou inefficace qu'il n'exerce qu'un contrôle marginal sur son territoire (le niveau de contrôle attendu pour déterminer le niveau de déliquescence varie cependant, selon les auteurs)142(*) ;

2. La légitimité dudit gouvernement pour prendre certaines décisions est contestée ;

3. L'absence de services publics essentiels ;

4. La présence de réfugiés ou déplacement des populations ;

5. Des relations conflictuelles avec les pays voisins ;

6. La détérioration de l'administration et des services publics ;

7. Les violations généralisées de droit de l'homme ;

8. Un appareil de sécurité privatisé devenu un Etat dans l'Etat et prolifération des milices privées ;

9. Les inégalités sociales, notamment dans le domaine de développement, l'éducation, de la répartition des richesses et de l'emploi ;

10. La criminalisation et la délégitimassions de l'Etat livré a la corruption, à l'impunité, et au pillage institutionnel, et au déficit de transparence et de gouvernance ;

11. L'émergence des factions et des fragmentations éthiques au sein de l'élite :

12. Intervention des puissances étrangères et dépendance idéologique, militaire et financière vis-à-vis d'elles.

La RDC correspond, grosso modo, à cette description. C'est pourquoi elle est souvent qualifié d'Etat déliquescent, défaillant, ou selon l'expression de ATTALI, « un Etat inexistant », un trou noir au milieu de l'Afrique ou prévaut encore, à défaut de gouvernance et d'une justice opérationnelle, la loi de la jungle143(*).

En effet, le bilan de cette période de l'exercice de la souveraineté nationale, en RDC, accuse un solde globalement négatif. En témoignage la souffrance d'un peuple marginalisé et opprimé, écarté de la jouissance et du partage équitable des richesses réelles et d'immenses ressources potentielles du sol et du sous sol de son pays, par une oligarchie compradore, menée par une conception prédatrice du pouvoir et couverte par la pratique systémique de l'impunité et de la conception.

La résolution 1991 du 28 juin 2011 par le conseil de sécurité de l'ONU de prolonger le mandat de mission de l'organisation des nations-unies pour la sécurité et la paix au Congo (MONUSCO) montre bien que le pays est loin de remplir les conditions minimales du fonctionnement d'un Etat normal144(*).

Il suffit pour s'en convaincre de lire les exposés de motif de cette résolution comme suit :

« soulignant que c'est au gouvernement de la RDC qu'il incombe au premier chef, d'assurer la sécurité sur son territoire et de protéger les civils, dans le respect de l'Etat de droit et du droit international humanitaire.

Priant instamment le gouvernement de la RDC, agissant en coopération avec l'ONU et les autres acteurs concernés, de prendre des mesures appropriées pour faire face à ces problèmes... ».

Ces constats de l'ONU correspond aux missions régaliennes de tout Etat et, le fait que la RDC n'est pas en mesure de s'en acquitter explique et justifie sa mise sous tutelle de la communauté internationale en même la déliquescence et la défaillance de la RDC qui pourtant n'ignore pas que ses intérêts vitaux ne coïncide pas toujours avec ceux de la communauté internationale. Une telle tutelle ne devait d'ailleurs pas se justifier plus de cinquante-trois ans après l'accession du pays à l'indépendance. C'est dire toute l'incurie, l'irresponsable et l'échec des dirigeants congolais, qui se sont déchargés d'une partie d'attributs de la souveraineté du pays.

La RDC accuse, aujourd'hui, toutes les caractéristiques de ce que l'on pourrait qualifier d'Etat défaillant ou déliquescent ou encore déstructuré. L'on devrait bien se garder, comme on le fait si souvent d'attribuer indistinctement cette situation à la fatalité ou à la communauté internationale ou encore à tout le peuple. Même si la communauté internationale et le peuple congolais ont une part de responsabilité dans cet énorme gâchis. Il sied de souligner que les premiers responsables, ce sont les hommes politiques congolais du hier et d'aujourd'hui145(*). C'est à eux qu'il revenait et revient, en premier lieu de concevoir et de planifier l'organisation et la gestion du pays de manière à assurer sa souveraineté et son intégrité territoriale, la sécurité et le bien-être de la population, de sauvegarder la paix et la justice, la bonne gouvernance, le respect des droits de l'homme et le développement. Rien ne justice que l'on tente de les disculper et de diluer leur responsabilité première en l'imputant à d'autres. Les citoyens incapables de résoudre les problèmes vitaux du pays et de la population devraient s'abstenir de briguer et, encore moins, d'assumer un mandat politique146(*).

Aujourd'hui, la RDC peine à sortir de la déliquescence, ainsi que la mentalité et la culture de la violence, de l'impunité, du pillage et de la corruption qui ont été renforcés par la guerre147(*). Ces mauvais effets hérités de la transition. En effet, oeuvre de la communauté internationale, l'accord global et inclusif légitimait, de facto et contre toute logique démocratique, la lutte armée zt la rébellion comme moyens pour conquérir le pouvoir et imposait, comme formule de gestion de la transition, un partage du pouvoir entre belligérants. C'est ainsi que des auteurs présumés de crimes considérés comme imprescriptibles par le droit international, se sont trouvés blanchis et placés à la tête du pays. Ils ont, dès lors, pu se présenter aux élections mimétiques imposées à la RDC comme voie de la restauration de la légitimité du pouvoir. Ils n'ont pas restauré partout l'autorité de l'Etat et instaurer la démocratie et un Etat de droit. L'insécurité, la corruption, les antivaleurs, l'impunité, la mauvaise gouvernance à charge de la nouvelle oligarchie compradore, subsistent et ont la peau dure, tandis que la descente aux enfers du peuple est loin de s'arrêter148(*).

Face à l'urgence de restaurer le tissu social et économique du pays détruit, aucun clivage, aucune guéguerre, aucune manoeuvre politicienne, aucune focalisation sur la conquête, le maintien et le partage du pouvoir, n'est ni de mise ni permise. La RDC ne peut se payer le luxe de continuer à assister, de manière impuissante, inconsciente et irresponsable, à la déliquescence de l'Etat, à la descente aux enfers de ses populations en proie à la misère, à l'insécurité et à la précarité. Elle ne devrait pas continuer à cautionner l'incapable de ses dirigeants politiques à assumer un leadership responsable donnant un espoir réel de redémarrage socio-économique et du développement du pays.

* 140Foreign Policy Magazine, Failled states indes, jul/aug 2005.

* 141 MUGARUKA Richard., Op cit, p. 505.

* 142 Idem

* 143 Lire le quotidien le potentiel, n°5268 du lundi 04 juillet 2011, sous le titre la Balkanisation de la RDC, échec et mat !

* 144 Rapport du conseil de sécurité des Nations Unies, résolution 1991 du 28 juin 2011.

* 145 MUGARUKA Richard., Op cit, p. 447

* 146 FWELEY DIANGITUKUA., Op cit, p. 67

* 147 MUGARUKA Richard., Op cit, p. 409

* 148 Ibid, p. 410

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"Il ne faut pas de tout pour faire un monde. Il faut du bonheur et rien d'autre"   Paul Eluard