Tic et territoire. Analyse des usages des technologies de l'information et de la communication dans la gestion de la commune de Kolda.par Mamadou Mounirou Diallo Université Cheikh Anta Diop de Dakar - Master 2 Espaces, Sociétés et Développement 2014 |
Première partie : Cadre théorique et méthodologique9 Introduction de la première partieL'ascension fulgurante des TIC a suscité moult réflexions de la part des spécialistes des sciences sociales. En effet, ces outils ont fini par transformer non seulement les relations entre les hommes et entre les hommes et leurs territoires, mais aussi du rapport entre la distance et le temps. Cette situation a donné naissance à une polémique autour du maintien du territoire. Également, le développement des TIC a entrainé un changement entre les acteurs chargés de gérer le territoire. Par conséquent, cette partie pose la problématique de l'usage des TIC dans la gestion en général et dans la gouvernance locale en particulier. Il est aussi question d'expliquer la méthodologie adoptée pour la concrétisation de la recherche. 10 11 CHAPITRE 1 : CADRE THÉORIQUELa problématique est fondamentale dans notre travail de mémoire car elle « est l'ensemble construit autour d'une question principale, des hypothèses de recherche et des lignes d'analyse qui permettrons de traiter le sujet choisi »9. Le développement des TIC n'épargne aucune société et la gérance des effets des outils numériques est devenue une préoccupation pour tous les dirigeants du monde. Ainsi de nombreuses réflexions se sont développées autour de la société de l'information, mais notre recherche est fondée sur le thème qui porte sur le cardan entre TIC et gouvernance locale. Aujourd'hui, dans le nouveau système mondial qui est dominé par des forces politico-économiques transnationales, quels sont les enjeux de l'usage des TIC dans la gestion de la commune de Kolda ? La réponse à cette question est l'objet de ce travail. I. Contexte et justificationLe développement des TIC a entrainé un bouleversement dans le fonctionnement du monde à cause de l'avènement de la société de l'information. Cette dernière, fondée sur la connaissance et le savoir, impose l'intégration des TIC dans tous les secteurs d'activités. Au milieu des années quatre-vingt les pays développés ont utilisé les technologies modernes pour soutenir la révolution industrielle, en les appliquant à plusieurs domaines. Ainsi l'application des TIC dans la gouvernance renferme d'importantes potentialités, en offrant beaucoup d'avantages pour la prestation des services publics, en permettant de réduire les coûts des transactions et même en augmentant les revenus du gouvernement. Ce qui explique l'importance du « e-gouvernement » généralement appelé « e-gov », c'est-à-dire l'usage des TIC dans le secteur public afin d'offrir de meilleurs services aux citoyens et de favoriser la bonne gouvernance. Le financement du « e-gouvernement » est important par rapport à d'autres secteurs publics, aussi bien dans les pays développés que dans ceux en développement, comme il en est le cas en Inde10. Compte tenu des opportunités offertes par les TIC, les pays sous-développés, notamment ceux de l'Afrique voient les technologies modernes comme le fer de lance d'un développement économique et social (Ba, 2003). En effet, ces pays souffrent d'une situation économique et sociale dégradée conjuguée à des difficultés dans le fonctionnement de 9 Michel Beaud « l'art de la thèse », la découverte, 2003, 104 pages. 10 Information et communication pour le développement (IC4D) Rapport du groupe Banque Mondiale sur diffusion et l'impact des TIC, volume 2, 2009. http://worldbank.org/ic4d 12 l'administration dues à un manque d'assiduité récurent de son personnel, à la faible réactivité de l'administration mais aussi et surtout à la corruption et au non-respect des procédures. La Banque Mondiale soutient à cet effet que « l'Afrique doit surfer à la grande vague de la révolution technologique sinon elle sera encore plus marginalisée que jamais »11. Par conséquent, plusieurs initiatives ont été lancées par des organisations internationales de développement, par des ONG, et par des responsables politiques nationaux en vue de mettre les TIC au service du développement durable. Convaincus des vertus salvatrices des TIC, les pays sous-développés, entre autres ceux de l'Afrique considèrent les technologies de l'information comme un moyen pour accéder plus rapidement au développement, à travers le « leap-frog » ou théorie du saut technologique12. Le Sénégal s'est engagé dans les années 1990, à travers des réformes politico-économiques et juridiques, à emprunter les « autoroutes de l'information » qui sont de nouveaux médias au sens d'infrastructures de communication électronique13. Dorénavant le « e » signe de modernité devient le préfixe de la quasi-totalité des activités sociales traditionnelles (Gabas, 2005). Depuis 2000, le Sénégal tente d'implanter la transparence dans la gouvernance à travers le Programme National de Bonne Gouvernance (PNBG). Dans ce programme, l'introduction des TIC dans l'administration a été inscrite parmi les priorités. À cet effet, plusieurs dispositions ont été prises comme la mise en place de portails internet dont celui de la décentralisation14 et celui des démarches gouvernementales15 ou l'installation du système GAINDE (Gestion Automatisée des Informations Douanières et des Échanges). Récemment, la direction générale des impôts a conçu « e-tax », une plateforme de télé procédures pour permettre aux contribuables de s'acquitter de leurs obligations fiscales en 11 Chenau-Loquay, entre local et global, quel rôle de l'État africain face au déploiement des réseaux de télécommunications ? Exemple du Mali et du Sénégal. Afrique contemporain, numéro spécial, 199, juillet-septembre 2001, p36-46 12 Théorie selon laquelle l'utilisation des technologies permet de brûler les étapes pour accéder au développement et à la société de l'information. Cheneau-Loquay, les territoires de la téléphonie mobile en Afrique. NETCOM, vol. 15 n°1-2, sept.2001. 13 Elles sont constituées des réseaux de toute nature (câbles, fibres optiques, satellites, liaisons hertzienne), qui devraient permettre grâce à leur large capacité et aux techniques de compressions la transmission quasi infini des données, voix, images sous forme de bits numériques (Lamouline, C. 1997). 14 www.sendeveloppementlocal.com 13 ligne. On assiste alors à l'avènement de la vision « e-Sénégal »16 avec un important financement dans le Projet de Modernisation des Systèmes d'Information de l'Administration (PMSIA)17. Cette vision constitue le point de départ vers une administration électronique. Cette dernière envisage le passage du gouvernement au « e-gouvernement », du citoyen au « e-citoyen ». Il s'agit d'une manière de mettre fin aux soucis de transparence, d'améliorer les services offerts aux citoyens et d'augmenter les recettes. Pour y arriver, des mesures telles que la libéralisation et le fonds de solidarité numérique18 ont été prises, pour rendre l'accès aux télécommunications plus faciles et pour réduire la fracture numérique. Mieux l'inauguration de l'intranet gouvernemental témoigne de la volonté de mettre les TIC au service de l'administration publique. A cette occasion, certaines collectivités locales de la capitale ont tenté l'expérience de « l'internet citoyen »19. Aujourd'hui, la question des TIC n'est pas seulement une affaire des dirigeants politiques mais elle occupe également une place importante dans le quotidien des citoyens, qui cherchent de plus en plus à les utiliser comme outil de contrôle des affaires publiques. C'est dans ce contexte que s'inscrit ce travail qui se veut alors une contribution à l'analyser de l'usage des Technologies de l'information et de la communication (TIC) dans la gestion de la commune de Kolda. Située au Sud du Sénégal, en haute Casamance, la commune de Kolda fut créée par arrêté général n°7562 du 1er décembre 1952. Le choix du sujet se justifie d'abord par le fait que la population de Kolda s'intéresse de plus en plus aux TIC. Ensuite, par le fait qu'il y'a une faible interaction entre les administrateurs et les administrés sur la gestion de la commune. Enfin, le choix est légitimé 16 La vision e-Sénégal vise à mettre le citoyen et l'entreprise au sein des préoccupations du gouvernement, à permettre l'accès de tous les citoyens à l'information, à répondre aux besoins de performance de l'État et aux besoins d'informations décisionnelles des dirigeants. http://www.adie.sn/index.php/e-gouvernement/e-gov 17 http://www.adie.sn/index.php/realisations/intranet-gouvernemental 18 Ce projet est proposé par Abdoulaye Wade alors président du Sénégal, lors du sommet des Nations Unies sur la fracture numérique à Genève, 2009. Le projet est approuvé par Communauté Internationale et parrainé par les villes de Genève et de Lyon (Sagna, 2006). 19 Lire à ce propos Ibrahima Sylla, « L'Internet citoyen au Sénégal : enjeux et scénarii », Cybergeo : European Journal of Geography [En ligne], Science et Toile, document 610, mis en ligne le 12 juillet 2012, consulté le 08 mai 2015. URL : http://cybergeo.revues.org/25408 ; DOI : 10.4000/cybergeo.25408 14 par le fait qu'il n'y a pas d'étude portant sur les TIC à Kolda alors qu'aujourd'hui le rythme de croissance des TIC y est soutenable. Du point de vue scientifique cette étude contribuera à enrichir les recherches sur les modalités d'appropriation des TIC et les mutations qu'elles ont entrainées dans la zone, à renforcer l'analyse géographique de la fracture numérique, et à voir de près l'importance de l'usage des TIC dans la gouvernance locale. |
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