L'État civil est un service public chargé de
tenir dans chaque commune le registre officiel des mariages, des naissances et
des décès. Dans l'offre de services, celui de la commune de Kolda
est jugé peu satisfait par la plupart de la population
interrogée. Selon l'enquête, 58,7% jugent la durée et la
qualité des services peu satisfaisantes. Même si les
dépôts sont fixés à 15heures et les retraits
à 16heures le lendemain, les personnes sont contraintes de faire
plusieurs allées et retours entre leurs lieux habitations et la mairie.
Avec le processus d'étirement de la commune, 57,7% parcours une distance
longue pour se rendre au centre d'État civil, certains quartiers sont
situés en moyenne à plus de 3km de l'hôtel de ville.
Les koldois de l'extérieur ne sont pas
épargnés des conséquences de la lenteur des
procédures. Ils dépensent beaucoup sur le plan financier dans la
mesure où ils utilisent du crédit pour coordonner avec leur
correspondant local et payent le transport du document. Sachant que le
transport du document coûte en moyenne mille francs cfa et que la
durée moyenne du transport est de vingt quatre heures beaucoup de
koldois éprouvent de la peine pour déposer à temps des
dossiers de concours ou d'emploi.
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Photo 1 : Attente devant le guichet de retrait des
pièces d'État civil
La population de la commune a très fortement
augmenté ces dernières décennies. Avec un taux
d'accroissement moyen annuel de 8,4%, la population est passée de 59076
en 2005 à 74458 habitants en 201456. En plus avec les
sensibilisations menées par les ONG pour l'inscription des enfants
à l'école française, la population tient à
l'obtention, surtout, d'actes de naissance. Ainsi les demandes se sont de plus
en plus multipliées. Bien que les services demandés soient
variés, le seul centre d'État civil de la commune reçoit
des dizaines voire des centaines de demande par catégorie. Compte tenu
de cette situation, les 13 agents ont souvent des difficultés à
respecter leur engagement. La population interrogée affirme qu'il n'est
pas rare de voir des erreurs de correspondance sur les documents rendus aux
demandeurs. Les demandes les plus fréquentes sont les transcriptions,
les déclarations de naissance et les certificats de non
inscriptions57. Par crainte de la récurrence des
désagréments, les agents sont souvent obligés de ramener
chez eux une pile de demandes. De ce fait, ils travaillent jusque tard dans la
nuit et arrivent souvent en retard le matin. La cause du retard de satisfaction
des demandes est surtout liée à la recherche de documents et
à la signature du l'autorité compétente. Souvent, les
personnes essayent de corrompre les agents de la mairie. L'enquête
56 Estimation de la population du
Sénégal de 2005 à 2015, ANSD, 2006
57 Les agents en charge de ces demandes ne
connaissent pas leur nombre exact par jour, semaine ou par mois.
révèle que 57,1% pensent qu'il est possible de
réduit les longs délais par le fait de connaitre le personnel
surtout mais aussi par un payement supplémentaire.
Graphique 4 : Les moyens de réduction de la
durée des services
payement
supplémentaire
29%
négociation
3%
pression
2%
connaissance
66%
Cette situation a conduit à un problème majeur
lié à la question d'attribution de faux numéros de
registres à des personnes. Souvent, des agents sont payés pour
faire de faux extraits de naissance à des personnes. Cela entraine
l'attribution d'un numéro à deux ou plusieurs individus, qui sont
souvent contraints de refaire tous les dossiers obtenus auparavant. La cause
principale de ce facteur est l'immigration. En réalité, ceux qui
arrivent dans la commune choisissent souvent de payer une personne pour obtenir
un papier donné, sans passer par la procédure normale.
Concernant la recherche de document, le seul agent en charge
de cette tâche éprouve
des difficultés pour satisfaire les demandes. Au cas
où cet agent est débordé les transcripteurs prennent le
relai.
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Photo 2 : Agent en charge de la recherche
documentaire
Pour la gestion des documents, les agents affirment rencontrer
beaucoup de difficultés dans ce domaine. Un agent se confie en ces
termes « Kolda n'est plus dans les années 1960 où il n'y
avait qu'une petite pile de documents. Aujourd'hui, notre souci majeur est la
conservation en toute sécurité des documents à la mairie,
car la plupart sont détruits. D'ailleurs les documents datant
de certaines années comme 1970, même s'ils existent toujours, ils
sont très difficiles à retrouver. Même si le classement est
fait par années les documents sont poussiéreux,
déchirés et parfois éparpillés à
même le sol. L'une des causes de destruction des document est
l'humidité ».
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Photos 3, 4, 5, 6, 7 et 8: Images prises dans la
pièces à archives
Photo 3 Photo 4
Photos 5 Photo 6
Photos 7 Photo 8
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A l'État civil beaucoup de documents sont
menacés de destruction mais aussi de disparition, compte tenu de la
situation à laquelle ils sont conservés. Au cas où les
pièces demandées ne sont plus retrouvées, les agents de
l'État civil aident le demandeur à formuler une demande
auprès de la justice pour l'obtention d'une attestation de
destruction.
Pendant les années 1990, la plupart des certificats
ont été faits sous forme de volet et plusieurs d'entre eux sont
détruits. Par conséquent, l'intéressé est
invité à se rendre à la gendarmerie pour avoir une copie.
En 2008, la mairie a utilisé la même technique, en enregistrant
les certificats d'administration sous forme de volet et aujourd'hui le risque
de perdre ces documents est énorme. Selon un ancien agent du service,
« l'État civil de Kolda souffre des mêmes
problèmes et la principale cause est surtout le manque de volonté
des dirigeants ». Durant l'entretien, cet agent soulève la
question liée à la déconcentration du service. En effet,
les agents ont formulé plusieurs fois des demandes pour que
l'État civil soit délocalisé vers le centre hospitalier
régional de Kolda et vers le poste de santé de Sikilo. Mais leurs
demandes sont restées sans suite malgré les changements à
la tête de la mairie.