Après une analyse tendancielle des profils
économiques pour les pays de l'union dans le premier chapitre, nous
procédons à l'approche économétrique des
résultats. Cette section a pour objet la présentation des
résultats et leurs interprétations. Elle est composée de
trois sous-titres. Il s'agit d'abord de la présentation des
résultats de la modélisation, ensuite de l'analyse des chocs
budgétaires et enfin de la mesure de l'ampleur des effets de
débordement budgétaires et des canaux de transmission.
Ici nous allons exposer les résultats issus des
différents tests selon la méthodologie dégagée plus
haut. Certains sont intégralement présentés dans le corps
du texte et d'autres renvoyés en annexe pour complément
d'informations.
Parmi les tests de première génération,
celui de Levin Lin et Chu est adapté, non seulement pour sa puissance,
mais surtout parce qu'il prend en compte
l'hétérogénéité des différents
individus du panel. Pour tester la stationnarité des variables, la
méthode permet de vérifier deux hypothèses, en
l'occurrence l'hypothèse Ho : les séries ne sont pas
stationnaires contre l'hypothèse alternative ; H1 : les séries
sont stationnaires. Le tableau suivant résume la situation.
Le tableau n°6 montre que toutes les variables sont
stationnaires en niveau (P-Value = 5%). Donc elles sont
co-intégrées d'ordre 0. C'est la raison pour laquelle on estime
un PVAR ou VAR en panel.
Les astérisques (*) indiquent les meilleures (donc
les plus faibles) valeurs des critères d'informations suivants : ATC=
critère d'information d'Akaike, BIC = critère d'information
bayesien de Schwartz et HQC= Critère d'Hannan-Quinn
L'analyse montre que tous les critères d'informations
Akaike (AIC) de Schwarz (SC) et d'Hannan-Quinn e acceptent un retard maximal de
2. Il convient de retenir donc un PVAR (2). Ce tableau affiche les valeurs
minimales respectives (17,04) ; (-13,99) et (-15,96). Un tel résultat
signifie que les variables explicatives ont un effet retardé sur les
variables endogènes de deux (02) périodes. Les équations
à estimer du modèle seront décalées de 2
périodes.
o Le test de causalité au sens de
granger
Dans le prolongement de la discussion, il semble important
d'effectuer des tests de causalité (voir tableau n°8 en annexe)
fondés sur le modèle de Granger. Au niveau théorique, la
mise en évidence de relations causales entre les variables
économiques fournit des éléments de réflexion
propices à une meilleure compréhension des
phénomènes économiques. De manière pratique il est
nécessaire à une formulation correcte de la politique
économique. Ainsi, connaître le sens de la causalité est
aussi important que mettre en évidence des relations entre les
variables. Etant donné que les variables sont stationnaires en
126
niveau, le test de causalité au sens de Granger est
applicable. Ici, l'accent est mis sur la causalité individuelle et la
causalité globale. Le test porte uniquement sur les variables
endogènes du modèle (au nombre de 5). Ce test a été
effectué au seuil de significativité de 1%, 5% et 10%. Les
résultats sont consignés dans le tableau suivant :
o Test de causalité sur le taux de
croissance
Il est testé l'hypothèse Ho : selon laquelle le
taux de croissance n'est pas causé par les autres variables, contre
l'hypothèse alternative H1 : le taux de croissance est causé par
les autres variables. (Voir les résultats du tableau n°13 en
annexe).
Pour la causalité individuelle, les résultats
du tableau n°13 montrent l'existence de causalité entre le taux de
croissance réelle et les dépenses publiques, puisque la
probabilité associée est de (0.000). Elle est inférieure
au seuil statistique de 1%. Il s'agit donc d'une causalité
unidirectionnelle. Il existe également un lien de causalité entre
le taux de croissance réelle et les importations. La probabilité
ainsi associée est de (0.035) ; elle est inférieure au seuil
statistique de 5%. Donc, prises isolément des autres seules les
dépenses publiques et les importations causent le taux de croissance
économique au sens de Granger. Il s'agit d'une causalité
unidirectionnelle. Par contre les variables dette publique (detpupib) et
recettes publiques (recpupib) confirment l'hypothèse Ho puisque leurs
probabilités associées sont respectivement de (0.557) et (0.301)
largement supérieures aux différents seuils statistiques de
significativité 1% ; 5% et 10%. Cependant les prises dans leur ensemble
affichent une probabilité de (0.000) donc inférieure à 1%
; alors globalement les variables causent le taux de croissance réel.
o Test de causalité sur la dette
publique
Ici, on test l'hypothèse Ho : la dette publique n'est
pas causée par les autres variables contre l'hypothèse
alternative H1 : la dette publique est causée par les autres
variables.
127
Pour la causalité individuelle, le tableau n°13
montre l'existence de causalité entre le taux de croissance
réelle, les importations et les dépenses publiques. Les
probabilités associées sont de l'ordre de (0.02) ; (0.019) et
(0.000), donc nettement inférieure au seuil statistique de 5% pour les
deux premières et de 1% pour le reste. Ce qui traduit ainsi que les
variables taux de croissance réelle (tcrel) ; dépenses publiques
(depupib) et importations (importpib) causent au sens de Granger la dette
publique. La causalité est ici unidirectionnelle. Par contre la variable
recettes publiques (recpubpib) vérifie l'hypothèse nul avec une
probabilité de (0.468) ; c'est-à-dire qu'elle ne cause pas la
dette publique ; d'où une certaine indépendance entre les deux
séries. Pour la causalité globale, les variables affichent une
probabilité de (0.000) donc inférieure à 1% d'où
l'hypothèse Ho.
o Test de causalité sur les dépenses
publiques
On teste l'hypothèse Ho : selon laquelle les
dépenses publiques ne sont pas causées par les autres variables,
contre l'hypothèse alternative H1 : les dépenses publiques sont
causées par les autres variables.
Pour la causalité individuelle, le tableau n°13
(voir en annexe) affiche l'existence de causalité entre les
dépenses publiques, le taux de croissance réelle (tcrel) et la
dette publique (detpupib) avec des probabilités respectives de (0.02) et
de (0.049) qui sont inférieures au seuil statistique de 5%. Pour les
recettes publiques (recpupib), la probabilité est de (0.008) donc
inférieure à 10%. Ces résultats montrent que ces variables
causent au sens de Granger les dépenses publiques. Par contre les
importations (importpib) vérifient cependant l'hypothèse nulle
avec une probabilité de (0.203) ; ce qui dépasse les
différents seuils de significativité (1% ; 5% 10%). Alors il
existe une certaine indépendance entre les deux séries. Mais
prises dans leur ensemble, les variables causent bien les dépenses
publiques avec une probabilité de (0.000) donc inférieur à
1%.
o 128
Test de causalité sur les recettes
publiques
Nous testons l'hypothèse Ho : selon laquelle les
recettes publiques ne sont pas causées par les autres variables, contre
l'hypothèse alternative H1 : les recettes publiques sont causées
par les autres variables.
Pour la causalité individuelle, le tableau n°13,
affiche une causalité entre les recettes publiques, le taux de
croissance réelle et les dépenses publiques. Les
probabilités correspondantes sont respectivement de (0.005) pour le
tcrel et de (0.000) pour la depubpib, elle est significative au seuil
statistique de 5% et 1%. On déduit que celles-ci causent bien les
recettes publiques. Par contre concernant les séries dette publique et
les importations, les probabilités sont supérieures aux seuils
significatifs (1%, 5% et 10%) pour les valeurs respectives de (0.173) et de
(0.303). Les deux séries vérifient alors l'hypothèse
nulle. Donc la dette publique et les importations ne causent pas les recettes
publiques. Cependant, les valeurs prises ensemble aussi montrent une
probabilité de (0.000) d'où l'existence d'une causalité
globale.
o Test de causalité sur les
importations
Il convient de tester l'hypothèse Ho : selon laquelle
les importations ne sont pas causées par les autres variables, contre
l'hypothèse alternative H1 : les importations sont causées par
les autres variables.
Pour la causalité individuelle, les résultats
du tableau n°13 montrent l'existence d'une causalité entre les
importations, les dépenses et la dette publiques. Les
probabilités sont de (0.001) pour depupib et (0.000) pour detpubpib.
Elle est significative au seuil de 1%. Donc les séries vérifient
bien l'hypothèse alternative ; c'est-à-dire que les importations
sont causées par les dépenses publiques et la dette publique. En
revanche, les séries recettes publiques et le taux de croissance
réelle ont des probabilités supérieures à 10% avec
les valeurs de (0.162) pour le tcrel et de (0.136) pour recpubpib. Ce qui
conduit à l'acceptation de l'hypothèse nulle. D'où une
relation d'indépendance entre les séries. D'un point de vue
global,
129
les valeurs donnent une probabilité de (0.000) ce qui
montre que les variables prises dans leur ensemble causent bien les
importations.
À l'issu du test de causalité, les
résultats confirment la nature des variables pour un modèle VAR.
C'est le vecteur où les variables sont mutuellement
dépendantes.
o Estimation du modèle par la méthode
GMM
Quelques précautions sont nécessaires pour
l'estimation par GMM. Comme le soulignent Feve et Langot (1995) des retards
trop importants dans les variables conduisent à une distribution des
paramètres de plus en plus concentrés autour de valeurs
biaisées. Le PVAR estimé ici prend en compte les équations
ayant fait l'objet de test de causalité au sens de Granger. Les
estimations issues de l'implémentation des cinq modèles sont
récapitulées dans le tableau n°8 qui suit :
130
Tableau 8 : Résultats des estimations par la
méthode GMM
Source : Auteur, à partir du logiciel
stata
NB : *** ; ** ; * sont les seuils de significativité
respectivement à 1 %, 5 % et 10 %. Les chiffres entre parenthèses
représentent les statistiques t de student.
Le (tcrel) : représente le taux de croissance
réelle et correspond à l'équation1 : les résultats
montrent que les « dépenses publiques »
retardées d'une période
131
agissent positivement sur le taux de croissance réelle
avec une élasticité égale à (46,39) et est
significative au seuil de 1%. Si l'on augmente de 1% les dépenses
publiques, elles induisent un accroissement de 46,39% sur le taux de croissance
réelle. Ce signe positif est bien conforme à la théorie
keynésienne. En effet, les dépenses publiques sont
traditionnellement considérées comme un facteur de stimulation de
la croissance économique. Conformément à la logique
keynésienne, les dépenses publiques peuvent exercer une influence
contra-cyclique significative sur les variables fondamentales de
l'économie, notamment sur la consommation et l'investissement. Sur le
plan empirique, les travaux comme celui de Masson et Taylor (1994) confirment
qu'une hausse des dépenses publiques génère un effet
positif sur l'activité économique ; Benassy et Schalck (2007)
montrent aussi que la politique budgétaire favorise la production et
l'augmentation de la fiscalité peut également favoriser les
activités et les comportements qui procurent les effets de
débordement positifs. Enfin pour Cottarelli (2011) elle permet de
financer les biens publics qui ne seraient pas spontanément produits par
le marché. Les théories récentes de la croissance
endogène considèrent que la politique budgétaire
discrétionnaire est efficace à la production du fait qu'elle
permet de propulser la croissance. Celle-là induit à son tour un
accroissement des dépenses publiques, facteur de croissance. Ce
résultat corrobore avec celui de Solomane Koné (2000), qui montre
que la politique budgétaire a un impact positif sur le PIB réel
dans les pays de l'UEMOA. Toutefois, ce lien n'est pas toujours linéaire
puisqu'il existe un seuil de déficit de 1% du PIB où
l'élasticité économique réagit différemment
à la politique budgétaire. Ce résultat est confirmé
par de nombreuses études notamment celles de Tanimoune et al., (2005) et
Diane et Fall (2002).
Quant à la variable « importations »
décalée de deux périodes, elles impactent
négativement le taux de croissance avec un seuil de
significativité de 5%. C'est pourquoi une variation positive des
importations de 5% réduit à la baisse de 51,19% le taux de
croissance. L'étude de l'effet de production aurait également
montré que, toutes choses égales par ailleurs, un niveau faible
de réaffectation
132
intersectorielle des ressources conduit au faible degré
de production de biens de substitution aux importations, et donc réduit
les parts de marché aux produits locaux. Dans le cas de l'UEMOA, un tel
résultat s'explique à partir de plusieurs facteurs : d'abord la
faiblesse du tissu industriel qui n'est pas en mesure de fournir une large
gamme de produits manufacturés aux consommateurs. Ce qui pousse les
habitudes de consommation des ménages vers les produits importés
qui parfois de loin sont plus compétitifs en termes de prix
(c'est-à-dire coûtent moins cher). La réduction des filets
de protection matérialisée par la signature de nombreux accords
comme celui des APE encouragent fortement les importations de produits de
substitution par rapport à la production régionale. Ensuite, les
pays de l'UEMOA développent un faible niveau de commerce intrazonal
(environ 12%) contre 64% pour le seul continent européen et le reste
entre les États-Unis et l'Asie. Cette ouverture commerciale face
à la concurrence internationale et la détérioration des
termes de l'échange créent d'énormes difficultés
aux entreprises nationales, et les poussent parfois à revoir à la
baisse leur niveau de production pour éviter toute situation de
mévente. La tarification au coût marginal dans les pays
industrialisés est bien inférieure à celle des pays de la
zone. Enfin, les pays de l'union sont fortement importateurs de matières
premières telles que les hydrocarbures. Avec le renchérissement
des cours du pétrole dans les pays importateurs, les coûts des
facteurs deviennent plus chers et conduisent à une situation d'inflation
au cas où les entreprises ne bénéficient d'aucune
subvention.
Lorsque le « taux d'inflation » augmente
de 5%, cela entraine une baisse sur la croissance de 0,0965%. Ce
résultat est bien conforme à la théorie de la
parité du pouvoir d'achat (PPA) qui stipule que l'inflation agit
négativement sur la croissance via la consommation des agents
économiques ; en l'occurrence les consommateurs. Ce qui amène les
entreprises à revoir à la baisse leur offre de production.
Plusieurs études ont établi une relation négative entre
l'inflation et la croissance économique. Les résultats de Fischer
(1993) montrent que l'inflation réduit la croissance en baissant
l'investissement et l'augmentation de
133
la productivité. En outre, il précise qu'une
faible inflation et un faible déficit fiscal ne sont pas
nécessaires pour une croissance élevée même sur de
longues périodes. Par ailleurs et également un niveau
élevé d'inflation n'est pas compatible avec une croissance
économique soutenue.
Pour la variable « investissement privé
», elle agit positivement sur le taux de croissance réelle et
reste significative de 1% sur la période en cours. Ainsi, une
augmentation de l'investissement privé de 1% induit aussi un
accroissement de 0,509% du taux de croissance réelle. Ce qui est
très vrai dans la théorie économique. Toutes choses
égales par ailleurs, une variation de l'investissement impacte
l'activité réelle de l'économie. Une augmentation de
l'investissement entraine une hausse du revenu national (PIB) ; ce qui accroit
la consommation. Cette hausse de la consommation permet à son tour
d'augmenter la production, qui se manifeste par un accroissement du revenu
national donc de la croissance économique. Le relèvement des taux
d'investissement privé constitue donc un levier essentiel de relance
économique. En effet, Borenzstein (1990) montre que la politique
budgétaire reste un facteur important de soutien de la croissance et de
l'investissement privé. Ce résultat a été
corroboré par les travaux de Mansouri (2003) dans le cas du Maroc
où l'effet d'entraînement de l'investissement public sur
l'investissement privé et la croissance a été
également mis en exergue.
Pour la variable « crédit à
l'économie », le résultat montre un effet
négatif sur la croissance. L'impact est significatif au seuil de 1%.
Dès lors, une augmentation de 1% du volume de crédit produit une
baisse de 15,79% sur le taux de croissance. Un tel résultat a
été trouvé par d'autres chercheurs notamment Friedman et
Kuttner (1993) et Gerther et Gilchrist (1994). Ces derniers suggèrent
une certaine déconnexion entre l'évolution de la demande de
crédit et celle du PIB. Friedman et Kutter montrent en particulier qu'en
début de récession, les entreprises peuvent être
confrontées à des contraintes de liquidité qui les
poussent à recourir à des demandes de crédits de
trésorerie supplémentaire, en raison de l'augmentation des
besoins en fonds de roulement qui ne peuvent être
134
financés sur ressources propres. Gerther et Gilchrist
aboutissent également à un résultat similaire pour
l'économie américaine, en indiquant notamment qu'un
ralentissement de la croissance, voire une baisse de l'activité
économique peut s'accompagner d'une augmentation de la demande de
crédit bancaire. Toutefois, ce résultat n'est pas conforme
à la logique des partisans de l'offre de crédit, pour qui le
canal du crédit établit une corrélation étroite
entre les évolutions de l'offre de crédit et de l'activité
économique. La contraction de la première entraine celle de la
seconde. Selon Mishkin (1996), qui met l'accent sur l'asymétrie
d'information au niveau des marchés de capitaux, ce canal s'observe
particulièrement dans les économies où le marché
financier est embryonnaire.
Le « detpubpib » : représente le ratio de la
dette et correspond à l'équation 2. Les résultats
empiriques ont montré qu'il existe une relation significativement
négative entre la variable « taux de croissance »
retardée d'une période et le ratio de la dette publique au
seuil de 10%. Ici, les résultats montrent que l'élasticité
de la croissance par rapport au ratio de la dette est de (-0,0538). Autrement
dit, une hausse de 10% du taux de croissance réduit le ratio de la dette
publique de 0,0538%. Ce signe est connu puisque la plupart des travaux
théoriques ou empiriques perçoivent la dette publique comme un
frein à la croissance parce qu'elle réduit l'épargne
disponible, élève les taux d'intérêt ou
réclame une diminution des dépenses publiques productives et/ou
une augmentation des impôts. Kumar et Wood (2010) montrent que
l'élasticité de la croissance par rapport à la dette
publique n'est que de -0,02. De surcroît, même s'il existe une
corrélation négative entre les mouvements du ratio d'endettement
public et ceux de l'activité économique, cette corrélation
pourrait principalement provenir du fait qu'une expansion économique
réduit mécaniquement le rapport dette/PIB. Deux auteurs Reinhart
et Rogoff (2011) montrent qu'une augmentation de la dette publique cause un
ralentissement de la croissance. À l'aide d'histogrammes, ils mettent en
évidence une relation en U inversée entre le taux de croissance
et la dette des pays développés ; le rapport ne devenant
négatif qu'une fois franchit un niveau d'endettement de 90%. Checherita
et Rother
135
(2010) montrent qu'au-delà du seuil de 90% à
100% du PIB, la dette publique serait préjudiciable à la
croissance économique. Par contre Minea et Villieu (2009) sur un panel
de vingt-deux pays trouvent un changement de signe au voisinage d'un ratio de
dette publique de 120%, mais dont l'effet se fait graduellement sentir
dès que la dette publique atteint 70% du PIB. Dans l'UEMOA, Tanimoune,
Plane et Combes, en testant l'efficacité de la politique
budgétaire sur la période 1986-2002 par la méthode de
Hansen (1996, 1999), parviennent à déterminer un effet de seuil
de 83% pour un taux d'endettement public.
La variable « dette publique » agit
positivement sur elle-même avec une élasticité de (0,692)
lorsqu'elle est retardée d'une période puis de (0,222) pour un
décalage de deux périodes. L'effet est significatif au seuil de
1%. Le signe positif de la dette par rapport à la dette elle-même
s'explique par un effet de cumul. Lorsque la dette publique croît de 1%
par rapport à sa valeur retardée d'une période, cela
entraine une augmentation de 0,692% sur la dette en cours, mais lorsque le
décalage est de deux périodes, la variation est de 0,222%. Donc
les dettes antérieures vont entrainer un accroissement de celle encours,
ce qui augmente évidemment son poids.
La variable « dépenses publiques »
réagit positivement sur la dette publique avec un degré de
significativité de 1%. Lorsque les dépenses publiques
retardées de deux périodes croissent de 1%, elles induisent un
accroissement de 0,967% sur la dette publique. Le signe entre dépenses
publiques et la dette publique trouve son fondement dans le financement par
endettement des dépenses productives. Les travaux de Cacheux (2002) ;
Blanchard et Giavazzi (2003) et Fitoussi (2003) soutiennent l'idée que
financer les dépenses d'investissement publiques par emprunt peut
à première vue sembler attrayante dans la mesure où elles
influencent positivement la croissance potentielle de l'économie selon
la théorie de la croissance endogène. En réponse à
un ralentissement conjoncturel, les dépenses productives sont plus
faciles à comprimer que les dépenses non
136
productives, telles que les dépenses en salaire ou les
transferts ; au risque de peser sur la croissance. Dès lors, il semble
qu'un plafond imposé sur le déficit public courant aura
inévitablement un biais structurellement dépressif sur la
croissance (Creel et al. 2002). D'après ces promoteurs, la règle
d'or pourrait permettre aux gouvernements de mener des politiques plus
favorables à la croissance. L'endettement utilisé à des
fins d'investissement public pourrait alors paraitre « vertueux »
dans la mesure où il encourage la croissance future. Selon la
thèse libérale lorsque les dépenses publiques sont
financées par endettement, elles ne feront qu'alourdir le poids de la
dette.
Avec la variable « importations », les
résultats montrent l'existence d'une relation significativement
négative entre le ratio de la dette publique et le taux d'importation.
Son seuil est de 5%. La valeur de l'élasticité étant
égale à -1,201, considère qu'une augmentation de 5% du
taux d'importation retardé d'une période réduit le ratio
de la dette publique de 1,201%. Cette sensibilité se joue par le canal
du taux de change. Lorsqu'il se déprécie, la perte de valeur de
taux de change réduit considérablement les montants de la dette
d'une part. D'autre part, l'impact de la dégradation des termes de
l'échange sur la consommation, la production et les échanges,
dépend des caractéristiques de l'économie en
matière de production et de consommation. Toutes choses égales
par ailleurs, un degré plus élevé de substitution entre
production locale et bien importé tend à réduire davantage
les échanges. De ce fait, le solde de la balance commerciale va
s'améliorer au profit des exportations avec l'entrée de devises
pouvant servir au remboursement de la dette.
La variable « inflation » les
résultats de l'estimation ont montré qu'il existe une relation
significativement positive entre le ratio de la dette et le taux d'inflation au
seuil de 1%. Plus spécifiquement, une hausse de 10% du taux d'inflation
entraine l'augmentation du ratio de la dette de 0,0786%. Un tel résultat
est bien justifié dans la théorie économique lorsque les
pays sont engagés dans le commerce international. Souvent ils se
trouvent confrontés à des variations des
137
termes de l'échange. Les changements de prix
amènent les gouvernements à rembourser à terme un montant
plus important de leur dette intérieure, et pour la dette
extérieure par une appréciation du taux de change.
La variable « crédit à
l'économie » montre une significativité au seuil de 1%
alors que l'élasticité du ratio de la dette par rapport à
la variable est de 0,438%. Ces résultats ne sont pas surprenants au
regard de la théorie économique puisque la dette publique est
contractée via un taux d'intérêt qui, lorsqu'il est faible
incite les gouvernements à recourir au marché bancaire. Cela est
logique surtout lorsque les autres sources de financement sont soumises
à des conditionnalités plus sévères. Les pays de
l'UEMOA dans leur majorité se sont lancés dans des programmes
d'émergence économiques qui les poussent naturellement à
la recherche accrue de financement dont le secteur bancaire reste une des
principales sources.
Le « depubpib » : représente le ratio des
dépenses publiques/PIB et correspond à l'équation 3 :
Les résultats des tests montrent que la variable
« taux de croissance réelle » rétablit une
corrélation positive et significative au seuil de 10%. La
sensibilité entre les deux variables est de 0,0118 lorsque ce taux est
retardé d'une période. Ce qui veut dire tout simplement qu'une
augmentation de 1% de taux de croissance réelle induit un effet positif
pour 0,0118% sur les dépenses publiques. Retardé à deux
périodes, l'élasticité entre les deux variables passe
à 0,00993. Cela montre que l'effet se dissipe avec le temps. Pour le
même pourcentage, les dépenses publiques augmentent de 0,00993%.
Ce comportement sur les dépenses publiques résulte de
l'augmentation de la production grâce à un effet keynésien.
Les dépenses publiques étant une composante de l'absorption,
toute variation de l'offre peut avoir un impact positif sur les dépenses
publiques.
Pour la variable « dette publique », il
existe une relation à sens négatif entre l'évolution
des ratios de dépenses publiques et la dette publique. Le degré
de
138
significativité de la relation est de 5%. Par contre
l'élasticité qui mesure cette sensibilité égale
à (-0,0316). Autrement dit, une hausse de 5% de la dette publique
retardée de deux périodes entraine une baisse de 0,0316% du ratio
dépenses publiques/PIB. Ce sens de causalité est rendu possible
grâce le taux de croissance dont l'accroissement pourrait être
dû à l'augmentation des dépenses publiques à travers
le multiplicateur qui va agir positivement sur la croissance. Ainsi le ratio
dette/PIB va connaitre une baisse lorsque le PIB croît plus vite que la
dette publique. Si le supplément de dépenses publiques est
utilisé à des fins productives, alors la dette publique va
baisser dans la mesure où la richesse qui en résulterait peut
servir à rembourser le service de la dette.
Pour la variable « dépenses publiques »,
les résultats montrent une relation positive des dépenses
publiques sur elles-mêmes avec un degré de significativité
de 1% lorsqu'elles sont retardées d'une et de deux périodes.
Leurs élasticités respectives sont de (0,463) et (0,331). Ainsi,
une hausse de 1% des dépenses publiques produit un effet positif de
0,463% à la première période et de 0,331% à la
deuxième période. Pour ses valeurs retardées, l'impact
positif s'explique par le fait que la politique budgétaire conserve dans
le temps les traces des actions passées. Elle est une politique dont on
peut affirmer qu'elle a une mémoire. Donc par un effet de cumul, elles
entrainent une augmentation d'elles-mêmes.
Pour la variable « recettes publiques »
les résultats montrent une relation positive des recettes sur les
dépenses publiques pour une significativité de 1%, lorsqu'elle
est retardée d'une période. La valeur de
l'élasticité est de 0,150, toute augmentation de 1% du ratio des
recettes publiques favorise aussi un accroissement de celui des dépenses
publiques à hauteur de 0,150%. Un tel résultat n'est pas
surprenant puisque les recettes publiques sont une variable dépendante
du PIB. Elles agissent dans le même ordre que le PIB sur les
dépenses publiques. Ce qui est bien conforme à la théorie
keynésienne.
Pour la variable « importations », on
retrouve l'existence d'une relation positive entre les importations et les
dépenses publiques pour un degré de significativité
139
à 10%. La valeur de l'élasticité entre
les variables « importations » et « dépenses publiques
» se chiffre à 0,288. Cela suppose que lorsque le taux
d'importation connaît une hausse de 10% pour un retard d'une
période, elle conduit également à une augmentation de
0,288% du ratio des dépenses publiques. Dans la théorie
économique, une politique de relance budgétaire peut stimuler la
demande étrangère à travers les subventions et les
transferts. Sur le plan empirique, plusieurs travaux comme celui de Sarr (2006)
sur la zone UEMOA ont montré qu'une hausse des dépenses publiques
nationales peut s'adresser directement aux produits étrangers et
stimuler ainsi les importations. Carton (2005) affirme qu'un effet positif de
hausse de la demande est immédiatement perceptible dans le pays en
déficit et chez ses partenaires.
Pour la variable « crédit à
l'économie », on retrouve également une relation
positive entre le crédit à l'économie et les
dépenses publiques pour un degré de significativité de
10%. La valeur de l'élasticité est de 0,0567. Lorsque le
crédit à l'économie croît de 10%, cela induit une
augmentation de 0,0567% sur le ratio des dépenses publiques. Lorsque
l'Etat fait recours au marché financier pour combler son déficit
budgétaire, son crédit envers le secteur bancaire et le
système financier en général augmente. Sa présence
sur le marché crée un effet d'éviction sur le taux
d'intérêt.
Le « recpubpib » : représente le ratio des
recettes publiques/PIB et correspond à l'équation 4 :
Pour la variable « dépenses publiques »,
il existe une relation positive entre le taux de croissance
économique et les recettes publiques avec un degré de
significativité à 5% avec un décalage d'une
période. Le degré de sensibilité est de (0,00168). Une
augmentation de 5% du taux de croissance réelle entraine 0,00168% sur le
ratio des recettes publiques/PIB. Cela est conforme à la théorie
économique ; puisque le PIB constitue la base de l'assiette fiscale,
donc les recettes fiscales en l'occurrence dépendent du niveau de
l'activité économique.
140
Pour la variable « dette publique », par
contre, on note une relation à sens positif avec un seuil de 10% entre
la dette publique retardée d'une période et les recettes
fiscales. Ici, l'élasticité donne 0,0530. Ce qui traduit la
variation de 0,0530% du ratio des recettes publiques suite à une hausse
de 10% du ratio de la dette publique. La réaction positive de la dette
sur des recettes publiques se justifie ; du simple fait de l'insuffisance ou du
rétrécissement de l'assiette fiscale pour un pays. Un faible taux
de couverture fiscale aura pour conséquence un recours massif à
la politique d'endettement. Un tel argument corrobore les résultats des
travaux du FMI (2012) à partir d'un modèle DSGE dans la zone
euro. Ces résultats montrent que la politique de restriction fiscale a
des effets récessifs forts et les déficits publics s'accentue.
Holland et Portes (2012) ont observé les répercussions des divers
plans d'austérité adoptés en zone euro. Ils expliquent que
les politiques économiques poursuivies ces dernières
années par les pays européens se révèlent
particulièrement nocives pour l'activité économique.
Aussi, la consolidation budgétaire a entraîné une hausse du
ratio dette publique/PIB dans chaque pays membre, excepté l'Irlande. La
consolidation coordonnée des politiques budgétaires s'est
traduite par une hausse du ratio de 5 % environ pour la zone euro dans son
ensemble. Il faut noter que les plans d'austérité ont
été mis en oeuvre pour atténuer les tensions sur les
marchés de la dette souveraine et éviter la contagion.
Pour la variable « dépenses publiques »,
les résultats des estimations montrent un lien à la fois
positif et négatif avec un degré de significativité de 1%.
Les valeurs des élasticités sont respectivement de 0,876 pour un
retard d'une période et de - 0,468 pour un retard de deux
périodes. Lorsque les dépenses publiques augmentent de 1%, elles
produisent un effet positif de 0,876% sur les recettes mais, à l'ordre 2
induisent une baisse de 0,468%. Une interprétation ce résultat
peut se faire à partir de la conduite d'une politique
budgétaire.
Pour la variable « recettes publiques »,
les résultats affichent une corrélation positive au seuil de
significativité de 1%. L'élasticité de la variable par
rapport à
141
elle-même est de 0,286. Ainsi, une hausse des recettes
publiques retardées d'une période entraine l'augmentation sur
elles-mêmes de 0,286%. Ce résultat s'obtient par un effet de
cumul.
L'« importpib » : représente le taux
d'importation par rapport au PIB et correspond à l'équation 5
:
Pour la variable « taux de croissance réelle
», les estimations aboutissent à l'existence d'une relation
négative entre les importations et le taux de croissance réelle
pour un seuil significatif de 10%. L'élasticité correspondante
est -0,000344 lorsque la variable est retardée d'une période. Du
coup, une variation de 10% du taux d'importation produit une hausse de
0,000344%. Ce résultat s'explique dans la théorie libérale
par la concurrence et la compétitivité des prix des biens
importés qui impactent négativement la production locale.
D'autres facteurs comme le faible niveau d'industrialisation des pays n'offre
souvent pas une diversité de gamme aux consommateurs et les poussent
vers les produits de substitution.
Pour la variable « dette publique », les
résultats montrent une relation à la fois négative et
positive entre la dette publique et le taux d'importation pour un seuil
significatif de 1%. Les élasticités sont de l'ordre de -0,0398
pour un retard d'une période et 0,0282 pour un retard de deux
périodes. Ainsi, une hausse de 1% de la dette publique induit dans un
premier temps une baisse de 0,0398% du taux d'importation et dans un second
temps un accroissement de 0,0282%. Cette situation à effets
opposés pourrait se justifier par la réaction rapide les
gouvernements face à la conjoncture économique ; exemple la
réaction spontanée des gouvernements pour répondre
à la demande sociale où engager des dépenses à des
fins purement politiques.
Pour la variable « dépenses publiques »,
les estimations montrent que la relation entre les dépenses
publiques et les importations est négative dans le contexte des pays de
l'UEMOA pour un seuil significatif à 1%. Pour cela,
l'élasticité
142
correspondante est de -0,159. Ce qui revient à dire que
lorsqu'un pays croît ses dépenses publiques de 1% alors les
importations en provenance des autres pays baissent de 0,195%. De tels
résultats ne sont pas toujours confirmés partout et en tout
temps. Par ailleurs, l'impact de la dégradation des termes de
l'échange sur la consommation et les échanges dépend des
caractéristiques de l'économie en matière de production et
de consommation. Toutes choses égales par ailleurs, un degré plus
élevé de substitution entre production locale et bien
importé tend à réduire davantage les échanges.
Aussi, une capacité plus forte de réaffectation intersectorielle
des dépenses publiques permet de produire des biens substitution aux
importations, et donc de réduire l'impact négatif du changement
de prix sur le revenu réel en limitant davantage les importations.
Pour la variable « recettes publiques »,
on trouve une relation positive entre les recettes publiques et les
importations pour un seuil de significativité à 5% lorsque la
variable est retardée d'une période. L'élasticité
calculée est égale à 0,0495. Ainsi une hausse de 5% du
taux de fiscalité induit à court terme une augmentation des
importations à hauteur de 0,0495%. Ce résultat n'est conforme
à la théorie économique que dans un contexte particulier.
L'analyse de la courbe de Laffer (1958), montre que dans sa première
phase toute augmentation de la fiscalité peut engendrer un accroissement
des importations, mais moins que proportionnel. Mais au-delà d'un seuil
critique, toute modification à la hausse produit l'effet inverse. Par
contre, toute augmentation des importations va entrainer un accroissement des
recettes fiscales.
Pour la variable « importations », les
estimations laissent voir l'existence d'une relation positive de la variable
sur elle-même avec un degré de significativité de 5%
lorsqu'elle est retardée d'une période et de 10% pour deux
périodes. Les élasticités correspondantes sont
respectivement de 0,216 et 0,219. Autrement dit, une augmentation de 5% des
importations de la période antérieure provoque un accroissement
de 0,216% pour les importations de la période courante. Pour une hausse
de 10% des importations décalées de deux périodes, elle
provoque
143
une variation positive de 0,219%. Par un effet de cumul, les
importations pèsent sur la balance commerciale et expliquent la forte
vulnérabilité des économies à la volatilité
des prix étrangers.
Pour la variable « crédit à
l'économie », les résultats de l'estimation montrent un
lien positif entre le crédit à l'économie et les
importations avec un seuil de significativité de 1%. Par
conséquent, la sensibilité entre ces deux variables est de
0,0563. Cela montre que lorsque le crédit à l'économie
augmente de 1%, il produit à son tour un accroissement de 0,0563% sur
les importations. Ce comportement se justifie par le fait que l'effet de
l'inflation s'accompagne souvent de politique de subvention et de crédit
à la consommation pour soutenir la demande sociale. Ce qui entraine un
recours excessif à l'instrument budgétaire ou l'endettement.
Tableau 9 : Test de corrélation des
résidus d'équations du modèle