IV.2.2- Les règles ou principes de disciplines
budgétaires
Les critères de convergence ou règles trouvent
leur fondement théorique de l'incohérence dans le temps des
politiques discrétionnaires. Théoriquement, les règles
budgétaires peuvent être définies comme les dispositions
réglementaires et/ou institutionnelles qui encadrent les choix de
politiques budgétaires. Elles désignent une norme, une valeur ou
une fourchette prédéterminée que les Etats s'engagent
à respecter pour assurer la discipline budgétaire. De ce fait,
les règles budgétaires portent sur les dépenses publiques,
le taux d'imposition, les déficits publics ou la dette publique. Deux
(02) thèses s'opposent sur la pertinence d'adopter ces règles.
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La « nouvelle théorie anti-keynésienne des
finances publiques » (TAK), aujourd'hui largement répandue et
dominante en Europe, montre que les politiques budgétaires de
consolidation, ont généralement des effets contraires à
ceux attendus. Non seulement elles n'ont pas d'effets restrictifs, mais elles
peuvent même avoir des effets expansionnistes (Guidice et al, 2003).
Ainsi, toujours selon la TAK, la politique budgétaire expansionniste
aurait des effets dépressifs, alors que la politique budgétaire
restrictive aurait des effets expansionnistes ; même à court
terme. Pour Creel et al., (2004) les autorités budgétaires se
trouvent face à un dilemme pour augmenter les dépenses publiques
pour des raisons microéconomiques (redistribution ou affectation) et
supporter un coût macroéconomique élevé. A cet
effet, deux versions existent :
? une version faible, selon laquelle la réduction
permanente des dépenses publiques provoque à terme un effet
favorable sur le niveau de production, en raison de la réduction des
impôts qu'elle permet ;
? une version forte, par laquelle cet effet favorable est
anticipé, de sorte qu'une réduction des dépenses publiques
a immédiatement un effet favorable sur l'activité.
Cependant, l'incohérence dans le temps des politiques
économiques milite en faveur de la règle, au détriment de
la discrétion. Il peut en effet arriver que les responsables politiques
souhaitent annoncer à l'avance la politique qu'ils ont l'intention de
mettre en oeuvre, en vue d'influer les anticipations des décideurs
privés. Une fois que ces derniers agissent en fonction de leurs
anticipations, les mêmes responsables politiques peuvent être
tentés de renier leur engagement. Comprenant alors que les
décideurs politiques les ont trompés, qu'en termes plus
diplomatiques ils sont « incohérents dans le temps », les
décideurs privés se méfient dorénavant de toute
annonce préalable d'une politique économique. Pour rendre leurs
annonces plus crédibles, les responsables politiques choisiraient de se
lier à une règle prédéterminée de politique
économique (notamment la
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politique budgétaire et monétaire), Kydland
(1977) ; Precott (1982) ; Olivier et François (2005).
Pour Mankiw (2007) par nature, la politique
discrétionnaire est souple. Si les décideurs politiques font
preuve d'intelligence et privilégient l'intérêt
général en même temps, il y a peu de raison de leur refuser
cette souplesse d'adaptation à la modification des conditions
économiques. Plusieurs auteurs (Eichengeen et Wyploz, 1998 ; Carton,
2005) ont montré que les règles budgétaires permettent
d'internaliser les externalités négatives que le déficit
public excessif ferait subir aux pays partenaires. Elles visent
également à assurer la crédibilité et la
cohérence temporelle de la politique fiscale, conformément aux
enseignements tirés des travaux de Barro et Gordon (1983). Selon
Giavazzi et Pagano (1988) le gouvernement ne sera pas crédible ; tant
qu'il ne se liera pas les mains. L'encadrement des politiques
budgétaires doit leur permettre de jouer pleinement leur rôle
d'ajustement à des chocs nationaux, conformément aux
préoccupations de la théorie des zones monétaires
optimales (Mundell, 1961).
Empiriquement, ces critères ont fait l'objet de
plusieurs évaluations notamment, dans la zone Communauté
Economique Monétaire d'Afrique Centrale (CEMAC), les travaux de Ondo
Ossa (2006) montrent qu'au regard de son fonctionnement, la CEMAC est un espace
anti-keynésien ; dans la mesure où la hausse des dépenses
publiques et du déficit budgétaire n'y a aucun effet sur la
croissance. La demande publique a donc nécessairement un effet plus
faible que la demande privée et la politique budgétaire ne peut
nullement y être utilisée pour stabiliser l'activité. De
plus, les externalités négatives
engendrées par des déficits excessifs de certains pays peuvent
avoir des répercussions sur les autres et provoquer dans le même
temps des pressions sur la banque centrale par le biais des dettes publiques.
À cet égard, un pays membre qui n'assure pas la
solvabilité de ses finances publiques fait automatiquement courir un
risque à la stabilité financière de la zone, à
travers un relèvement des taux d'intérêt de long terme.
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Par contre, Farima et alii (2006) évaluent deux
critères budgétaires : la règle de lissage du taux
d'imposition et celle du lissage des dépenses publiques. À cet
égard, les auteurs montrent, à l'aide d'un modèle de
régression linéaire, que la pertinence des règles du Pacte
de Stabilité et de Croissance (PSC) peut être mise en doute. C'est
le cas en période de ralentissement lorsque les autorités
mènent une politique budgétaire discrétionnaire, mais
également quand ils cherchent à assurer la stabilisation de la
croissance grâce aux stabilisateurs automatiques. En présence
d'une croissance inerte, les surplus requis par la contrainte budgétaire
inter temporelle devraient forcer la politique budgétaire à
redevenir pro-cyclique. Dès lors, suivre les prescriptions de la
règle de taux d'imposition pourrait induire un biais inflationniste dans
la politique budgétaire.
Dans le cadre de l'UEMOA, Tanimoune et Plane (2004) estiment
des règles budgétaires simples afin de déterminer les
mécanismes budgétaires de cette zone. Il s'agit des règles
de déficit public et de la dette publique. En effet, le Pacte de
Solidarité, de Croissance et de Stabilité de l'UEMOA
prévoit que le déficit public de chaque Etat membre doit
être supérieur ou égal à 0% du PIB et son ratio de
dette publique inférieur à 70%. Les auteurs procèdent
alors à des estimations sur données de panel à effets
fixes en s'inspirant de la méthode proposée par Clarida Gali et
Gertler (1999), reprise et adaptée par Ballabriga et Martinez-Mongay
(2002) et Pommier (2003). À cet égard, les résultats
montrent que le choix du solde budgétaire de base comme critère
d'appréciation de la convergence au sein de l'UEMOA semble la priver
d'éléments d'appréciation supplémentaires dans la
compréhension et donc la gestion de la politique budgétaire. Par
ailleurs, suivant les différentes estimations, les stabilisateurs
automatiques sont très faibles. Enfin, il apparait que l'ajustement
budgétaire semble se faire principalement à partir des
dépenses publiques plutôt que sur les recettes fiscales.
Selon Kane (2013), dans la zone UEMOA, en raison de la nature
asynchrone des cycles, les débats sur la manière de concilier
l'hétérogénéité et la coordination
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optimale apparaissent judicieux pour adopter de nouvelles
règles budgétaires qui allient souplesse et
crédibilité, tout en favorisant le rattrapage économique
par le biais de la synchronisation des cycles. Ainsi, convient-il dans un
contexte d'hétérogénéité, d'améliorer
la coordination des politiques budgétaires en vue d'une meilleure
synchronisation des cycles réels et nominaux ?
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