II.2- Choix de politiques budgétaires
Par nature, les économistes admettent fondamentalement
que l'économie est instable. Les pays enregistrent fréquemment
des chocs sur l'offre ou sur la demande qui impactent positivement ou
négativement leurs économies. La prise en compte de la nature des
chocs peut influer sur le choix de la politique budgétaire selon qu'ils
soient symétriques ou asymétriques. Ce qui nous amène
l'analyse des choix de politiques de stabilisation conjoncturelle.
Graphique 5 : Les principaux effets du déficit
budgétaire
Stimulation de la demande globale
(multiplicateurs)
|
Possibilité de
réduction de
l'investissement
Augmentation de la charge de la dette (intérêt pays
par l'Etat)
Croissance et création d'emploi
Frein à la croissance et à l'emploi
Augmentation du déficit
77
Source : Auteur, à partir de
l'analyse keynésienne
78
II.2.1- La politique d'austérité
budgétaire
En union monétaire, l'impact des politiques
d'austérité est amplifié en raison de
l'interdépendance des pays par des liens commerciaux. Lorsque tous les
pays consolident simultanément leurs finances publiques, la production
de chaque pays est non seulement réduite dans l'économie
domestique, mais elle sera également affectée par les
consolidations budgétaires réalisées dans les autres
pays-membres. Les politiques d'austérité menées de concert
en union européenne risquent de conduire à une contraction
cumulative de l'activité économique. Batini et al., (2012)
confirme les effets dépressifs des consolidations et constate que les
réductions de dépenses publiques sont bien plus dommageables
à l'activité que les hausses d'impôts.
Une étude du Fonds Monétaire International (FMI,
2010) a analysé les expériences de consolidation
budgétaire menée dans les économies avancées. Les
résultats concluent des effets non keynésiens (multiplicateur
négatif) pour les politiques de restrictions budgétaires en
prenant appui sur quelques pays comme le Canada, le Danemark, l'Irlande, la
Suède qui présentent en réalité une certaine
particularité. Elles portent sur de « petites économies
ouvertes » avec leur propre monnaie et qui ont mené des politiques
de rigueur budgétaire, en les combinant avec la
dépréciation monétaire. Contrairement à ces
derniers, le FMI montre que dans tous les pays, depuis 30 à 40 ans, les
effets des consolidations budgétaires sont restés
keynésiens, c'est-à-dire dépressifs.
Une autre étude du FMI (2012) réalisée
par dix-sept (17) économistes donne des résultats similaires.
Elle compare la valeur des multiplicateurs budgétaires dans les
modèles macroéconomiques DSGE pour les politiques
discrétionnaires et affirme que les multiplicateurs sont toujours
positifs dans ces modèles. Pour la zone euro, le multiplicateur est
même supérieur à un. En d'autres termes, si tous les pays
prennent des mesures de consolidation budgétaire en même temps, la
contraction de l'activité sera supérieure à l'impulsion
budgétaire. Par conséquent, la conduite de politiques de rigueur
budgétaire dans l'ensemble a
79
des effets récessifs forts et les déficits
publics ne pourront pas être compensés. Holland et Portes (2012)
ont observé les répercussions des divers plans
d'austérité adoptés en zone euro. Ils expliquent que les
politiques économiques poursuivies ces dernières années
par les pays européens se révèlent particulièrement
nocives pour l'activité. Aussi, la consolidation budgétaire a
entraîné une hausse du ratio dette publique/PIB dans chaque pays
membre, excepté l'Irlande. La consolidation coordonnée des
politiques budgétaires s'est traduite par une hausse du ratio de 5 %
environ pour la zone euro dans son ensemble. Il faut noter que les plans
d'austérité ont été mis en oeuvre pour
atténuer les tensions sur les marchés de la dette souveraine et
éviter la contagion. Cependant, les plans ont conduit à une
hausse des taux d'intérêt, la persistance des effets
négatifs sur la production et finalement un accroissement des ratios
dette/PIB. Les conclusions de leurs travaux montrent que le décalage
dans le temps des ajustements budgétaires permettrait de réduire
les coûts sur l'emploi et la croissance, sans pour autant que
l'endettement s'éloigne de sa trajectoire soutenable.
Dans la même lancée, Auerbach et Gorodnichenko
(2012) ont montré à partir d'une étude sur un panel de 30
pays de l'OCDE (en grande partie les pays de la zone euro) que les effets de
débordement des chocs budgétaires sont plus accentués
(forts) pendant les périodes de récession. Quant au régime
de change, les effets restent plus faibles dans les régimes à
taux de change fixe que dans les régimes à taux de change
flottants. Erceg et Lindé (2012) ont développé un
modèle DSGE13 à deux économies pour observer
comment l'appartenance à une
13 Le modèle DSGE a permis examiner les effets d'une
expansion des dépenses publiques dans une trappe à
liquidité. Si la trappe à liquidité est très
longue, le multiplicateur de dépense peut être beaucoup plus grand
que dans des circonstances normales, et les coûts budgétaires
minimes. Mais compte tenu de ce `fiscal déjeuner libre, `on ne sait pas
pourquoi les décideurs voudraient limiter la taille de l'expansion
budgétaire. Notre document traite de cette question dans un
environnement de modèle dans lequel la durée de la trappe
à liquidité est déterminée de manière
endogène, et dépend de la taille de la relance budgétaire.
Nous montrons que, même si le multiplicateur est élevé pour
de faibles augmentations dans les dépenses publiques, il peut diminuer
sensiblement à des niveaux de dépenses plus élevés
; ainsi, il est essentiel de faire la distinction entre la réponse
marginale et moyenne de la dette de sortie et le gouvernement.
80
union monétaire façonne les effets d'une
consolidation, qu'elle prenne la forme d'une hausse d'impôts ou d'une
réduction des dépenses publiques. Une consolidation
budgétaire entraîne une contraction de l'activité dans
l'union monétaire. Leurs travaux aboutissent aux résultats
suivants : d'abord à court et moyen termes, une contraction des
dépenses publiques déprimera davantage la production que si la
consolidation budgétaire avait pris la forme d'une hausse
d'impôts. Par contre, le modèle suggère que les
réductions des dépenses sont moins dommageables à
l'activité ; ensuite à long terme, ils préconisent une
combinaison de réductions de dépenses et de hausses
d'impôts si un pays membre d'une union monétaire est contraint de
consolider ses comptes publics.
Néanmoins, ils reconnaissent avoir sous-estimé
les répercussions qu'une baisse des dépenses publiques peut avoir
sur la croissance potentielle. Or, les dépenses d'infrastructures sont
susceptibles de stimuler la productivité du capital privé et que
les dépenses en éducation améliorent la
productivité de long terme par l'accumulation du capital humain.
Des études du (FMI) (2013) affirment que les
consolidations budgétaires ne stimulent jamais l'activité
économique. L'accélération de l'activité domestique
suite à l'adoption d'un plan d'austérité se traduit par un
accroissement de la demande extérieure, impulsée par une
dépréciation réelle du taux de change. En plus, les
politiques d'austérité augmentent le ratio de la dette
publique/(PIB) ; puisse que le resserrement budgétaire sur
l'activité économique réduit le PIB.
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