RESUME
L'adoption du Pacte de Convergence et de Stabilité
(PCS) limite les marges de manoeuvres budgétaires dans l'absorption des
chocs défavorables. Pourtant, cette thèse s'intéresse
à la question relative aux externalités budgétaires
connues sous le nom « Effets de débordement » et leur
transmission. À ce titre, elle constitue un prolongement des
études antérieures réalisées sur la politique
budgétaire et sa fonction de stabilisation dans l'UEMOA.
L'intérêt de ce travail consiste à montrer dans quel
état les chocs de politiques budgétaires se propagent dans
l'activité économique des pays de l'union et tente à cet
effet de ressortir les canaux de transmission. La question de recherche est la
suivante : comment les chocs de politiques budgétaires d'un pays
spécifique peuvent-ils impacter l'économie des pays voisins dans
le cadre d'une union monétaire comme celle de l'UEMOA ? Le
modèle VAR en panel dynamique (PVAR) est privilégié et les
estimations sont effectuées en utilisant la méthode GMM. La
période couvre de 1980 à 2014. Les résultats ainsi obtenus
montrent clairement que les effets de débordement budgétaires
dans l'UEMOA sont ressentis de façon très
différenciée dans les pays, en raison des comportements
hétérogènes des économies. Les chocs de
dépenses publiques induisent un effet de débordement plus
important sur la croissance économique que les chocs de recettes
publiques. Les canaux de transmission des chocs budgétaires
diffèrent entre la zone euro et la zone UEMOA. Les trois (03) principaux
canaux de transmission sont : le canal du crédit en raison d'un
endettement assez important pour financer le déficit budgétaire ;
le canal de la fiscalité puisqu'au niveau national, on note une
concurrence fiscale qui souvent est source d'attraction ou de
désincitation pour les agents économiques (entreprises et
mobilité des facteurs) ; et enfin le canal du commerce, les politiques
budgétaires génèrent des externalités entre pays
partenaires. Pour rendre plus efficace l'action budgétaire sur
l'activité, il faut des politiques budgétaires prudentes à
travers une coordination plus poussée.
Mots clés : Politique
budgétaire - Effets de débordement - Canaux de transmission -
Chocs asymétriques - Hétérogénéité
structurelle - Stabilisation - UEMOA.
VIII
ABSTRACT
The adoption of the Convergence and Stability Pact (PCS)
limits the scope for fiscal maneuver in absorbing adverse shocks. Yet this
thesis addresses the issue of budget externalities known as "overflow effects"
and their transmission. As such, it is an extension of previous studies on
fiscal policy and its stabilization function in WAEMU. The interest of this
work is to show in what state fiscal policy shocks spread in the economic
activity of the countries of the union and attempts to highlight the channels
of transmission. The research question is: how can the fiscal policy shocks of
a specific country impact the economies of neighboring countries in the context
of a monetary union like that of WAEMU? The dynamic panel VAR model (PVAR) is
preferred and estimates are made using the GMM method. The period covers from
1980 to 2014. The results thus obtained clearly show that the effects of
budgetary outflows in the WAEMU are felt in a very different way in the
countries, because of the heterogeneous behavior of the economies. Public
expenditure shocks induce a greater spillover effect on economic growth than
public revenue shocks. The transmission channels of fiscal shocks differ
between the euro zone and the WAEMU zone. The three (03) main channels of
transmission are: the credit channel because of a debt large enough to finance
the budget deficit; the tax channel, since at national level there is tax
competition, which is often a source of attraction or disincentive for economic
agents (companies and factor mobility); and finally the trade channel, fiscal
policies generate externalities between partner countries. To make budget
action more effective, prudent fiscal policies.
Keywords: Budgetary policy - Overflow
effects - Transmission channels - Asymmetric shocks - Structural heterogeneity
- Stabilization - WAEMU.
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2
La concrétisation d'un processus stable de
développement socio-économique est un objectif pour tous les
pays. Face à un tel défi, les pays d'Afrique de la zone franc ont
longtemps poursuivi le processus d'intégration régionale pour
compléter et renforcer les politiques mises en place au niveau national
et multilatéral pour un développement harmonieux. C'est dans ce
contexte que huit (08) pays de l'Afrique de l'Ouest ont exprimé leur
volonté de donner une impulsion nouvelle et décisive par une
harmonisation accrue des politiques et des législations, à
travers la création d'une Union Économique et Monétaire
Ouest Africaine (UEMOA). Cette forme d'intégration débouche sur
un arrangement des politiques macroéconomiques qui, au-delà de
ses avantages et coûts, soulève quelques préoccupations
majeures.
En effet, au sein d'un tel espace, la politique
budgétaire demeure spécifique à chaque Etat membre. Les
avantages de ce type d'arrangement sont multiples sur le plan théorique.
Ils ont trait à la facilitation du commerce intra-communautaire pour
Rose et Engel, (2002) à la réduction du taux d'inflation des pays
membres selon Alesina et Barro, (2002), à la baisse des taux
d'intérêt et à l'accroissement de l'investissement
débouchant sur une croissance économique plus rapide
d'après De Grauwe, (2000). Pourtant, ces avantages théoriques
s'accompagnent de coûts en termes de flexibilité de la politique
macroéconomique pour les pays. Ces derniers ne peuvent plus recourir
à la politique monétaire pour stabiliser les cycles
économiques. Une telle architecture soulève alors un certain
nombre de préoccupations, dont celle liée à la
stabilisation des chocs asymétriques pouvant toucher les Etats. Selon
Zumer (1998), « le choc défini comme toute perturbation
affectant une économie donnée, est dit asymétrique dans un
contexte d'union monétaire, s'il ne frappe qu'un seul pays, quelques
pays ou même l'ensemble des pays de l'union, mais dans des proportions
différentes ». Ces chocs sont le grand problème des
unions monétaires et ne peuvent faire l'objet d'une réponse
commune. Si la politique monétaire est efficace pour l'économie
en cas de chocs symétriques, elle devient inefficace cependant aux chocs
asymétriques. Alors, la stabilisation doit passer par d'autres
politiques économiques, Guillaumin (2007).
3
Dans un tel contexte, la politique budgétaire retrouve
un regain d'importance. Elle reste le seul moyen à la disposition des
pouvoirs publics pour faire face aux chocs asymétriques conjoncturels,
pouvant menacer la viabilité d'une union monétaire, Schalck
(2006). Au sein d'un espace intégré, l'instauration d'un mode
d'organisation institutionnelle des fonctions budgétaires pour
discipliner les politiques nationales et les rendre compatibles avec le
renforcement de la monnaie commune, trouve toute sa légitimité,
Oros et Turcu, (2008) ; Echinard et Laurent (2010). De facto, l'on a toujours
supposé que les pays en union monétaire présentent des
économies structurellement identiques. Pourtant, des théories de
Mundell et Fleming à ce jour, aucune union n'est fondée sur des
économies homogènes ; malgré la volonté manifeste
des gouvernements. Le vrai constat est que les économies sont
hétérogènes. En effet, il y a des différences entre
pays en ce qui concerne les comportements, les structures économiques et
les préférences des agents. Parfois même, les politiques
discrétionnaires nationales sont susceptibles de renforcer
l'hétérogénéité ; puisque les règles
budgétaires (Pacte de stabilité) sont peu respectées.
Face à la recrudescence des chocs asymétriques,
l'instrument budgétaire est souvent utilisé comme une
réponse. Cela a des conséquences positives ou négatives
sur le niveau de l'activité économique de l'union. Ces
conséquences connues sous le nom « effets de débordement ))
en français ou « spill-overs )) en anglais, continuent d'alimenter
les débats ; à la recherche de solutions optimales pour les
unions monétaires. Ce recours excessif à l'instrument
budgétaire amplifie le niveau de déficits et d'endettements
publics au sein des unions monétaires. Ce qui remet au goût du
jour la question de l'efficacité de la politique budgétaire,
Engone (2005).
La résurgence des réflexions sur la politique
budgétaire1 dans les unions monétaires fait l'objet de
vives discussions. Ces débats portent entre autres sur
1 Selon A. BENASSY (1990), la politique
budgétaire est un instrument de politique économique qui consiste
à utiliser le budget de l'Etat pour atteindre certains objectifs, tels
que : la croissance économique, le plein
4
les effets de débordement budgétaires et les
canaux de transmission. En effet, dans une union monétaire, une
politique budgétaire d'un pays donné transite par des canaux pour
affecter les comportements des agents économiques d'autres pays,
Bénassy-Quéré et Cimadomo, (2006). Par canaux de
transmission, on attend les voies par lesquelles une décision de
politique économique (budgétaire ou monétaire) dans un
pays affecte l'économie d'un autre pays (Wyplosz, 2002). Ces impacts
sont des externalités connues sous le nom d'effets de
débordement. Ils caractérisent les effets voulus et
attendus2, engendrés par une décision de politiques
budgétaires d'un pays membre, et qui peut avoir des répercussions
positives ou négatives sur l'activité économique du pays
en question et sur ces partenaires commerciaux. (Biales, 2010 ; Schalck et
Benassy, 2007). La connaissance des mécanismes de transmission d'une
politique budgétaire permet aux décideurs de surveiller
correctement l'état de l'économie et de prendre les
décisions appropriées. À contrario, la
méconnaissance des mécanismes de transmission peut avoir des
conséquences : réactions cycliques ou contra- cycliques dans les
économies, (Angeloni et al, 2003).
Toutefois, les économistes ne s'accordent pas trop sur
les effets des politiques budgétaires. La théorie
keynésienne stipule que la politique budgétaire peut stimuler la
demande globale et relancer une économie stagnante. Ainsi, les
politiques budgétaires produisent des effets positifs sur
l'économie d'un pays par le mécanisme du multiplicateur
keynésien puisque les dépenses publiques représentent une
composante de la demande globale au même titre que la consommation,
l'investissement et les exportations. Celles-ci produisent grâce au
emploi et la réduction de la pauvreté. Pour R.A
MUSGRAVE (1959), la politique budgétaire se définit aussi comme
l'ensemble des instruments dont dispose un gouvernement pour influer sur
l'activité économique, ce qui lui permet d'assurer les fonctions
de stabilisation, d'allocation et de redistribution.
2Augmentation du revenu ; accroissement des
exportations ; accroissement des importations ; hausse de la production des
entreprises ; hausse des taux d'intérêt ; hausse des prix ;
détérioration de la balance courante ; perte de
compétitivité de l'économie ; hausse de l'endettement
5
mécanisme du multiplicateur, un accroissement important
de la production nationale, Keynes (1936).
Dans la théorie néo-fonctionnaliste, Haas (1958)
a mis l'accent sur la notion d'engrenage ou « spillover » dans les
communautés européennes. Il trouve sans équivoque une
forme de déterminisme économique ; puisque la décision
prise par les gouvernements européens de placer un secteur
économique donné sous l'autorité d'institutions
supranationales, a créé inévitablement, une pression
favorable à l'extension de l'autorité de ces institutions
à d'autres secteurs voisins.
La théorie de la Nouvelle Économie Classique
(NEC) dont les auteurs (Lucas, Sargent, Wallace et al, 1970), montre que la
politique budgétaire de stabilisation n'a aucun effet favorable sur
l'activité économique ; puisque les gouvernements utiliseraient
la politique budgétaire à mauvais escient, à des fins
électoralistes et non à des fins de régulation ; les
déficits publics seraient généralement trop
élevés, conduisant à une forte accumulation de dette
publique. Par ailleurs, les déficits publics seraient nuisibles en
entrainant une hausse des taux d'intérêt, une baisse de la demande
privée (puisque les agents anticipent les impôts qu'ils devront
payer demain) et une baisse de l'offre (en raison de l'anticipation des effets
néfastes des impôts futurs). Barro (1974) aborde dans le
même sens à partir du principe « d'équivalence
ricardienne3» pour lequel, un déficit budgétaire
n'a pas l'effet attendu sur la demande car les individus anticipent une
augmentation future des impôts afin que l'État rembourse sa dette.
Ils réduisent donc leur consommation et augmentent leur épargne
pour payer les impôts futurs. Aussi, Kydland et Prescott (1977) ont
analysé le problème de l'incohérence dans le temps des
décisions des pouvoirs publics. Ils démontrent que les politiques
publiques mises en oeuvre par les pouvoirs publics sont incapables de
3 Selon ce théorème, il y aurait, sous certaines
conditions, équivalence entre l'augmentation de la dette publique
aujourd'hui et l'augmentation des impôts requise demain pour le
remboursement de cette dette et le paiement des intérêts.
6
réaliser les objectifs fixés dès que les
conséquences de leurs engagements sont parfaitement
intégrées dans les anticipations d'agent considéré
comme rationnel.
Aussi, la théorie néo-réaliste ou
inter-gouvernementaliste a mis en évidence la place de la politique
intérieure dans les espaces communautaires. Certains auteurs comme
Hoffmann. S et Moravcsik. A (1980) concluent que les priorités
essentielles des gouvernements nationaux restent les programmes qui leur sont
propres. Ainsi, la Commission Européenne devient l'institution
internationale destinée à faciliter les marchandages entre Etats
(interstate bargains) qui constituent en réalité le
véritable moteur de l'intégration européenne.
Krugman (1991) dans sa théorie des zones
d'intégration « naturelle 4» a mis en
évidence le résultat des « effets frontières ».
Dans ces conditions on peut admettre que lorsque les zones de
préférences institutionnelles ne recouvrent pas les zones
d'intégration « naturelle », les effets de débordement
sont importants ; ce qui peut réduire les échanges par les
accords commerciaux officiels. L'importance du rôle des effets de
proximité dans ces zones est liée notamment aux coûts de
distance ; c'est-à-dire « l'ensemble des coûts
supportés pour transférer un bien de son lieu de production
à son lieu de consommation » (Siroën, 2000). Il peut s'agir
des coûts de transport, des difficultés de consommation et autres
barrières non tarifaires. Ces facteurs jouent en faveur de la dispersion
des activités industrielles en créant une protection «
naturelle 5» qui conduit à localiser les activités à
proximité du lieu de consommation. À l'inverse lorsque les
externalités positives se généralisent, les avantages de
la concentration des activités se diffusent dans un espace plus large
par « effets de contagion » ; favorisant ainsi la réduction
des disparités de revenus. Entre ces deux situations, on peut observer
le cas intermédiaire où la concentration
4 Ce sont les zones où les pays qui sont proches
naturellement et dont les transactions sont facilitées par cette
proximité
5 Pour Krugman [1991], une zone naturelle se définit
comme une zone à l'intérieur de laquelle, en l'absence de
barrières aux échanges et d'accords de préférence,
les échanges seraient plus intenses qu'avec le reste du Monde.
7
d'activités dans une région donnée
implique des effets de débordement à la fois locaux et
globaux.
Solow (2002) dans sa théorie de réhabilitation
de la politique budgétaire montre qu'il est très difficile, voire
impossible d'imaginer une politique budgétaire pure qui n'ait aucun
effet sur la répartition des revenus ou sur l'affectation des
ressources. Cette affirmation remet en cause l'opinion dominante des
années 80 sur l'incapacité de la politique budgétaire
à stabiliser la conjoncture. Or, la mise en place de l'Union
Européenne redonne à cette question une nouvelle actualité
soutenue par le débat que soulève la nouvelle Théorie
anti-Keynésienne (TAK) des finances publiques (Giavazza et Pagano, 1990
et 1995 ; Besson et Echinard, 2000 ; Mathieu et Sterdyniak, 2005).
Depuis Mundell (1961) et Fleming (1962)6, la
controverse est vive sur le signe et l'ampleur des externalités
générées par une politique budgétaire expansive.
Malgré l'enrichissement du cadre d'analyse de Mundell-Fleming par une
meilleure spécification des fondements microéconomiques des
comportements des agents par la nouvelle macroéconomie internationale,
la littérature théorique ne fournit pas une réponse claire
quant aux signes des effets de débordement de la politique
budgétaire. Il ressort globalement des modèles théoriques
analysant la transmission internationale de la politique budgétaire que
le signe des externalités générées est fortement
dépendant de la spécification des fondements
microéconomiques des comportements des agents. Par ailleurs, la
robustesse des arguments relatifs aux externalités négatives de
demande dépend de l'importance du canal du commerce extérieur et
de la réaction du taux d'intérêt commun de l'union aux
changements de la politique budgétaire (Sarr, 2006).
Sur le plan empirique, Persson et Tebellini, (1995)
soutiennent que dans une union monétaire, les politiques
budgétaires peuvent dégager des externalités importantes
et des risques d'insoutenabilité des finances publiques. Les
6 Les premiers à avoir mis en évidence les canaux
de transmission de la politique budgétaire lorsque les pays
étaient interdépendants
8
économies sont interdépendantes au point que les
politiques budgétaires adoptées par un pays affectent la
performance économique des pays voisins. Des coûts peuvent
clairement apparaitre : par exemple un gouvernement choisissant des politiques
visant à maximiser les objectifs nationaux et ignorant les
externalités imposées aux autres pays peut générer
un équilibre sous-optimisé. Creel et al., (2004) ont
identifié trois canaux de transmission de la politique budgétaire
dans l'union européenne à savoir la consommation,
l'investissement et les taux d'intérêt. Pour la même zone,
Bénassy-Quéré et Cimadomo (2006) identifient quatre
principaux canaux de transmission par lesquels les politiques
budgétaires nationales affectent l'économie des autres pays. Il
s'agit : du commerce extérieur ; du taux d'inflation ; du taux
d'intérêt et de la fiscalité. Cependant, il est
envisagé de porter la réflexion sur les canaux les récents
pour les besoins de la recherche ; c'est-à-dire les quatre canaux
identifiés.
Pour celui du commerce extérieur, les changements de
politiques budgétaires nationales affectent les autres pays à
travers les termes de l'échange et les changements dans la demande
d'importations (Persson et Tabellini, 1995). Ainsi, un effet positif de hausse
de la demande est immédiatement perceptible dans le pays en
déficit et chez ses partenaires (Carton, 2005). On peut noter là
une manifestation des effets keynésiens qui se propagent via le commerce
extérieur.
Le deuxième est relatif à l'inflation. Sarr
(2006) montre qu'une hausse des dépenses publiques peut accroître
l'inflation nationale et l'inflation moyenne de l'union si la banque centrale
commune réagit par une politique monétaire restrictive. Cela peut
affecter négativement l'activité de tous les pays membres de
l'union. Alors, il convient de dire qu'un différentiel de taux peut
être à l'origine d'une transmission de choc budgétaire
entre pays. Par exemple un pays en déficit perd sa
compétitivité face à ses partenaires de l'union, lorsque
son taux d'inflation locale est plus élevé que ses pays voisins.
Ce qui se traduit à long terme par une activité moins dynamique
dans le pays comparé au reste de l'union.
9
Le troisième est celui du taux d'intérêt.
Les changements dans les rendements après imposition du capital dans
différentes localités affectent les autres pays en cas de
mobilité parfaite ou imparfaite du capital. Selon Carton (2005) la
variation de la demande (situation de déficit) provoque une hausse des
prix, surtout dans le pays en question et une réaction de la politique
monétaire. Ainsi, les taux d'intérêt de court terme
augmentent temporairement dans l'ensemble de la zone, avec une propagation
partielle de taux longs (il s'agit des taux ayant servi à financer
l'investissement).
Dans la zone euro, le canal fiscal a été mis en
évidence aussi. Des auteurs tels que Giavazzi, Pagano et Blanchard
(1990), ont mis en évidence les effets de la politique budgétaire
sur la fiscalité. Ils ont montré qu'une baisse permanente des
dépenses publiques annonce une baisse future des impôts. Une
relance budgétaire peut donc avoir des implications différentes
pour les pays partenaires selon qu'elle résulte d'une stimulation de la
demande ou d'une baisse de la fiscalité. Par ailleurs, une politique
fiscale agressive en faveur des entreprises (par exemple, une baisse rapide de
l'impôt sur le bénéfice des sociétés) peut
obliger les pays partenaires à réagir, soit en rationalisant ses
dépenses publiques, soit en participant à son tour à la
course.
Par contre dans la zone UEMOA, une étude
réalisée par Sarr (2006) explique que les effets d'un choc
budgétaire transitent par les canaux suivants : le commerce intra-zone,
le taux d'intérêt et le taux de change. Selon Honohan (1992) ;
Boccara et Devarajan (1993), la transmission de l'inflation entre les pays du
noyau dur (la Côte d'Ivoire et le Sénégal) de l'UEMOA et
les pays les plus pauvres a été étudiée mais
également entre la France et les pays membres de l'union. Cependant, ils
concluent l'existence d'un noyau commun du taux d'inflation qui tourne autour
de celui de la France, mais rejettent toute cointégration des
séries de taux d'inflation dans la zone. En dehors de cela, une
étude empirique analysant l'ampleur des effets de débordement des
chocs de politiques budgétaires sur l'activité économique
réelle dans cette zone est quasi-inexistante.
10
Dans le même ordre d'idée, sur la période
1993-2002, Ondo Ossa (2006) trouve que la zone CEMAC est indéniablement
un espace anti-keynésien, dans la mesure où la hausse des
dépenses publiques et du déficit budgétaire n'a aucun
effet sur la croissance. La demande publique a donc nécessairement un
effet plus faible que la demande privée et la politique
budgétaire ne peut nullement y être utilisée pour
stabiliser l'activité. De plus, les externalités
négatives engendrées par des déficits excessifs de
certains pays peuvent avoir des répercussions sur les autres et
provoquer dans le même temps des pressions sur la banque centrale par le
biais des dettes publiques. À cet égard, un pays membre qui
n'assure pas la solvabilité de ses finances publiques fait
automatiquement courir un risque à la stabilité financière
de la zone, à travers un relèvement des taux
d'intérêt de long terme. Cependant, les externalités
exercées par une politique budgétaire nationale dépendent
de la taille du pays. Si les actions budgétaires du Gabon ou du Tchad
affectent peu les autres pays de la zone comme que le montrent les
résultats de ses travaux, il en va autrement des actions initiées
par le Cameroun qui, en tant que grand pays, est tenu à plus de
discipline collective que les petits pays.
Les nombreux clivages notés dans les controverses
théoriques et empiriques font dire à Benassy et al (2004), que
les débats théoriques relatifs aux politiques budgétaires
sont perçues comme étant « un champ de bataille entre les
avocats de l'offre et ceux de la demande, entre tenants des politiques
structurelles et partisans des politiques contra-cycliques, entre chevaliers de
la libéralisation et défenseurs des services publics, entre ceux
qui évaluent une politique à l'aune de ses effets sur la
croissance à moyen terme et ceux qui mettent l'accent sur ses effets
immédiats pour la répartition du revenu, etc.».
Pourtant, peu de travaux empiriques ont évalué
les effets de débordement budgétaires et analysé leurs
canaux de transmission dans les unions monétaires. En union
européenne, les travaux empiriques tels que ceux de Gros et Hobza (2001)
ont montré en général que les externalités
budgétaires sont faibles, voire
non significatives dans une union monétaire. Beetsma et
al., (2001) mettent en évidence des externalités positives, mais
en se limitant au canal du commerce extérieur. Pour la zone franc,
l'Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA) apparait comme
notre champ d'investigation pour les raisons ci-après :
? D'abord la présence de
l'hétérogénéité structurelle des
économies nécessite de consacrer un important pouvoir de
stabilisation aux politiques budgétaires propres à chaque pays
pour le besoin de relance économique (Coulibaly, 2013) ;
? Ensuite les économies sont à la fois pauvres
et fortement intégrées au processus de mondialisation
économique et financière ; à ce titre, elles restent
très vulnérables face aux chocs exogènes ;
? En fin, la présence des cycles asynchrones de
production nécessite une coordination des politiques budgétaires,
afin d'amortir les chocs sur les économies (Kane, 2013).
Ainsi, la question de recherche est la suivante : comment
les chocs de politiques budgétaires d'un pays spécifique
peuvent-ils impacter l'économie des pays voisins dans le cadre d'une
union monétaire comme celle de l'UEMOA ?
L'objectif principal de ce travail est d'analyser la
propagation et l'ampleur des chocs des chocs de politiques budgétaires
d'un pays sur l'économie des autres pays de l'union. L'atteinte de cet
objectif passe par les objectifs spécifiques suivants :
OS1 : Vérifier si un choc de
politiques budgétaires dans un pays donné produit des effets
identiques sur tous les pays de l'union.
OS2 : Mesurer l'ampleur des effets de
débordement des chocs de politiques budgétaires dans l'UEMOA sur
l'activité économique (ici la croissance) des pays.
11
OS3 : Identifier les canaux de transmission des
chocs budgétaires dans l'UEMOA.
12
L'approche méthodologique s'appuie sur un modèle
Vectoriel Auto-régressif (VAR) sur données de panel. Le
modèle VAR en panel dynamique a montré d'excellentes
capacités de représentation des fluctuations
macroéconomiques. Cette approche se caractérise par plusieurs
avantages spécifiques. Elle permet à la fois de contrôler
les effets spécifiques individuels et temporels et de pallier les biais
d'endogénéité des variables, surtout lorsqu'il existe un
ou plusieurs retards de la variable dépendante figurant comme variable
explicative (Sawsen, 2006). Du point de vue économétrique aussi,
les chocs exogènes peuvent être identifiés à partir
des résidus d'équation estimés. L'introduction de l'espace
amène à prendre en compte l'autocorrélation spatiale qui
se réfère à l'absence d'indépendance entre les
observations géographiques et
l'hétérogénéité spatiale.
Les données utilisées proviennent de plusieurs
sources. D'abord la base de données de la BCEAO publiée dans le
site de l'UEMOA, a permis d'obtenir les statistiques sur les dépenses
publiques, les recettes publiques, les importations, le crédit à
l'économie et la dette publique en vigueur dans la zone. Ensuite la base
de données du Word Development Indicator (WDI) publiée le 21
décembre 2016 dans le site de la Banque Mondiale, a permis d'obtenir les
données sur le taux de croissance réelle, l'investissement
privé et l'inflation. Et enfin la base de données émise
par le Fonds Monétaire International (FMI) qui a été
utilisée pour compléter les valeurs manquantes présentes
dans les précédentes bases de données. Cette recherche se
fonde sur les hypothèses suivantes :
H1 : La nature (signes) des effets de
débordement budgétaires dans les pays de l'UEMOA est tributaire
de leur structure économique pour la zone.
H2 : Les chocs de dépenses publiques
induisent un effet plus important sur la croissance économique que les
chocs de recettes fiscales, en raison d'une harmonisation de plus en plus
poussée des législations fiscales dans l'UEMOA.
H3 : Les canaux de transmission peuvent
différencier d'une union à l'autre en raison des
spécificités économiques au regard de la
littérature économique.
13
Cette thèse défend l'idée selon laquelle,
l'ampleur des effets de débordement budgétaires dans l'UEMOA est
tributaire du degré d'hétérogénéité
des économies qui la composent. L'intérêt d'un tel sujet
est de montrer comment les chocs de politiques budgétaires se propagent
dans l'activité économique des États de l'Union et tente
à cet effet de ressortir les canaux de transmission. L'innovation dans
ce travail aussi, est d'avoir été le premier à
évaluer l'ampleur des effets de débordement des chocs
budgétaires dans la zone UEMOA. Dans un contexte de Pacte de convergence
et de stabilité, ce travail de recherche apporte quelques contributions
à l'amélioration de la stabilité macroéconomique
dans la zone à travers la politique budgétaire.
Ce travail est structuré autour de trois (03)
chapitres. Le premier chapitre traite des comportements économiques et
des externalités budgétaires dans l'UEMOA. A cet effet, il met
l'accent sur les hétérogénéités
structurelles, l'analyse des contagions budgétaires puis les
critères de convergence et de surveillance multilatérale. Le
deuxième chapitre passe en revue les arguments théoriques et
empiriques dans la conduite de la politique budgétaire en union
monétaire de façon générale. Le troisième
chapitre expose la méthodologie d'évaluation des effets de
débordement budgétaires et les résultats de la recherche
à partir d'un modèle VAR en panel dynamique.
![](Effets-de-dbordement-des-politiques-budgtaires-en-union-montaire-htrogne-Ca3504889.png)
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