I.3.5- L'homogénéité des
préférences : Cooper et Kindelberger
Pour Cooper (1977) et Kindleberger (1986), l'union
monétaire est avant tout un bien collectif, manifestation de la demande
commune des États membres. Les pays membres qui ont des relations
commerciales intenses et qui expriment des préférences
similaires, aussi bien pour les biens privés que pour les biens
collectifs, remplissent les conditions pour former une zone monétaire
optimale. Il est alors plus aisé de faire des compromis en
matière de politique économique dans la zone constituée
à cause de l'homogénéité des
préférences. Finalement, on peut admettre que tous les
critères énoncés ci-dessus, plus qu'ils ne s'excluent,
sont plutôt complémentaires pour définir la zone
monétaire optimale. Aussi, de récents travaux tentent-ils de
formaliser les grands principes de la ZMO ainsi définie pour
apprécier la pertinence de ces critères à la
lumière des faits, dans des modèles d'équilibre
général.
71
I.3.6- L'endogénéité des
critères d'optimalité
A la suite des travaux initiaux menés par Mundell
(1961) ; McKinnon (1963) et Kenen (1969) sur la théorie des ZMO,
d'autres critères ont permis aussi de tracer les contours de
l'optimalité. Ainsi, Frankel et Rose (1997) montrent après les
critères usuels dans l'analyse de l'optimalité des zones deux
autres critères : l'intégration commerciale et la
corrélation des cycles d'affaires. Cette thèse de
l'endogénéité des critères de ZMO
développée par est l'une des principales critiques à
l'égard de la théorie traditionnelle. Pour Frankel et Rose
(1997), le processus d'intégration monétaire est endogène
dans la mesure où l'union monétaire renforce la symétrie
des chocs et justifie ex post tout l'intérêt de créer une
monnaie unique. Ils privilégient deux critères importants pour
mesurer les gains résultants des unions monétaires :
Le degré d'intégration commercial
évalué par le niveau du commerce bilatéral et la
corrélation des cycles d'affaire sont les deux critères
utilisés pour mesurer les gains résultants des unions
monétaires. Les auteurs montrent que, deux pays auront
intérêt à mettre en place une union monétaire
lorsqu'ils ont un niveau d'échange bilatéral élevé
et/ou une corrélation forte de leur cycle économique.
L'idée sous-jacente est que, l'union monétaire renforce la
corrélation des variables économiques en renforçant les
liens commerciaux, réduisant par la même occasion les chocs
asymétriques. Il en résulte des gains à l'union même
si on prend en compte les coûts engendrés par la perte d'autonomie
de la politique monétaire au niveau domestique.
A partir d'un niveau d'intégrations commerciales, le
degré de symétrie des économies et une frontière
d'optimalité, les auteurs mettent en évidence le caractère
endogène des critères d'optimalité (graphique N°3).
Des pays caractérisés par un niveau faible d'échanges
bilatéraux, une faible synchronisation des cycles économiques
(partie hachurée) n'ont aucun intérêt d'abandonner
l'indépendance monétaire. Cela s'explique par l'absence de gains
en cas d'union (bénéfice < 0). Par contre, à droite de
la frontière d'optimalité
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(exemple point C) : forte corrélation des cycles
d'affaire et la forte intégration commerciale, l'union monétaire
générerait des profits supérieurs aux pertes
découlant de l'autonomie monétaire.
Graphique 3 : Intégration commerciale et cycle
des affaires
Source : Manix W.
Hédreville
Ce graphique dénote le caractère endogène
des critères d'optimalité. Ainsi, les pays ne sont pas aptes
à créer une zone monétaire, ils se situeront au point a,
(à gauche de la frontière d'optimalité). La formation
d'une simple zone de libre-échange amènerait les pays au point b
grâce à la hausse du niveau des échanges bilatéraux.
Cependant, ils resteront toujours à gauche de la frontière
d'optimalité. Il s'ensuit qu'une zone de libre-échange ne
règle pas la situation. Il faut mettre de côté les
critères traditionnels et entrer en alliance monétaire afin
d'atteindre le point c caractéristique d'un niveau élevé
d'intégration commercial et d'une forte corrélation des
cycles.
Au total, Frankel et Rose (1997) montrent que, si ces
critères traditionnels ne sont pas respectés par un pays au
moment de la formation de l'union (ex ante), la hausse des échanges
commerciaux c'est-à-dire l'augmentation de la corrélation des
cycles d'affaire qui en découle le permettra après union (ex
post).
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